Ouvrir la ville aux femmes : rêves et réalités
p. 9-16
Texte intégral
CET OUVRAGE EST NÉ D’UNE INSATISFACTION ET D’UN ESPOIR
1Travaillant depuis plusieurs années sur les thématiques qui croisent les études urbaines et les études sur le genre, j’ai commencé dans un contexte bien peu construit où seules quelques géographes pionnières posaient, pour les sciences sociales, des questions que les professionnelles de la ville ne prenaient que rarement à leur compte sur les spécificités des pratiques urbaines selon le sexe des usagers. La ville émancipatrice ne nous semblait pas si accueillante que cela pour les femmes. En effet, elles constituent 80 % des travailleurs pauvres, 70 % des usagers des transports en commun, 90 % des personnes qui subissent des violences sexuelles dans l’espace public, 85 % des chefs de famille monoparentale, 70 % des personnes qui font les courses, 70 à 80 % des personnes âgées, 80 % des prostituées, etc. mais 20 à 30 % des élues.
2A l’évidence, les femmes ne sont pas encore tout à fait « des hommes comme les autres » et c’est dans l’espace urbain que ces différences sociales entre les sexes expriment leurs dimensions. Les difficultés socio-économiques amènent les femmes dans les quartiers d’habitat social, les obligations domestiques conditionnent leurs déplacements, l’insécurité stigmatise leur présence dans les espaces publics qui ne leur sont pas indifféremment ouverts selon qu’il fasse jour ou nuit. Leur place parmi les gestionnaires et les décideurs des politiques urbaines reste marginale et les métiers de la ville demeurent encore bien masculins.
3Or, malgré ces évidences qui devraient conduire à penser la ville dans sa dimension sexuée, il reste difficile de faire émerger solidement la nécessité d’une prise en compte de ces différences qui, très souvent, se trouvent bien plutôt être des discriminations. Pour le sens commun, la ville reste en dehors des pratiques discriminantes, comme un support intemporel et abstrait d’activités humaines qui ne la construiraient pas. Toute la recherche urbaine montre pourtant qu’il n’y a de territoires que construits et que les espaces sont essentiellement tracés par les enchevêtrements des pas humains. Toutes les sciences sociales montrent l’indéfectible réciprocité entre les constructions spatiales et les constructions identitaires. Tous les travaux du siècle dernier conduisent au constat de l’urbanisation massive du monde et l’associent à l’envol démographique et économique des sociétés de la globalisation.
4Comment peut-on alors ne pas être aveuglé par cette évidence : la dimension du genre ne peut pas être occultée si l’on veut avoir quelque compréhension des évolutions urbaines et sociales. Car, les discriminations selon le sexe ne sont pas seulement un problème social parmi d’autres. Elles sont le reflet de la structuration fondamentale de toutes les sociétés qui, partout et de tout temps, se fondent sur la dichotomie entre les femmes et les hommes pour proposer des modèles sociaux inégalitaires. Ces discriminations traversent l’ensemble de toutes les pratiques sociales. Elles sont, d’une certaine façon, l’expression même de l’organisation sociale.
5D’un côté, l’urbanisation concerne les trois-quarts de l’humanité. De l’autre, la division sociale selon le genre s’exprime dans tous les secteurs de l’activité.
6Malgré cela, il demeure difficile d’amener les décideurs à prendre en compte la perspective de genre pour penser les projets urbains. Et il reste tout aussi difficile de convaincre les chercheurs que la ville, miroir des normes dominantes, expression des régulations sociales est un vecteur puissant et particulièrement éclairant de toutes les inégalités.
7C’est de cette contradiction-là qu’est née l’insatisfaction intellectuelle qui nous a conduit à rechercher les raisons de ce paradoxe. La ville porte-t-elle encore tellement l’espoir de liberté que lui ont accolé les penseurs de la modernité pour qu’il soit difficile de la penser comme reflet des sociétés et des cultures dans ce qu’elles ont de contraignant, voire d’injuste ? Les discriminations de genre sont-elles encore trop associées à des revendications féministes discutables pour être traitées avec le sérieux que l’on doit aux principes du Droit ? C’est à la fois l’image de la ville et celle des féminismes, pourtant souvent liées dans leur émergence, qui se trouvent écornées par la proximité de l’autre. Le féminisme semble comme une production excessive de l’individualisme urbain. Et la ville paraît le support atemporel de toutes les libertés.
8Il nous fallait donc approfondir la question de la place des femmes dans la ville et tenter de voir si la ville favorise les rêves égalitaires des féminismes ou si, au contraire, elle exprime la pérennité de la différenciation sexuée.
9Les quelques données statistiques que nous venons de rappeler montrent, s’il en est besoin, que beaucoup reste à faire pour que les villes reflètent des sociétés plus justes. Mais, pour ce qui est des femmes, est-ce parce que l’exigence féministe est trop haute ou seulement parce que l’évolution sociale est trop lente ?
10Un ensemble d’études antérieures1 a souligné combien les villes restent des lieux difficiles pour les femmes mais aussi combien elles sont investies progressivement par leurs activités qui suivent bien souvent les obligations que leur impose l’économie.
11Restait donc à voir ce qui a été fait, ce qui a été réalisé, ce qui a été expérimenté dans les villes, dans leur passé, dans leurs projets pour mettre en œuvre des sociétés plus humaines. Car c’est dans cette dimension là que réside l’espoir qui a guidé notre projet.
12En effet, les femmes et les hommes s’essaient depuis toujours à des réalisations sociales, des projets politiques, des choix artistiques, des options architecturales, des expérimentations urbanistiques, des expériences éducatives, des recherches alternatives, des réformes essentielles, des subversions d’ordres injustes, etc. pour réaliser leurs idéaux les plus fous. Et il ne saurait en être autrement pour l’idéal féministe de sociétés égalitaires.
13Et, de fait, même s’il est difficile de faire entendre la problématique du genre dans les milieux des gestions urbaines, les choses ont commencé à changer. Urbanistes et décideurs portent dans quelques grandes municipalités françaises des actions, encore timides, pour promouvoir le libre accès de tous à la ville. Les politiques, européennes notamment, qui ont mis en avant le développement urbain durable ont parfois, surtout dans les pays anglo-saxons, réussi à fonder sur ses « trois piliers » la recherche de croissance : économie, environnement, lutte contre les discriminations. Lorsque ce troisième volet du développement durable n’est pas estompé par les deux autres, on s’interroge souvent sur ce qu’il peut signifier. Généralement, viennent à l’esprit les discriminations culturelles, ethniques, d’âge, de handicap. Plus difficilement, arrivent aux consciences les discriminations de sexe. Mais la prise de conscience vient parce que les femmes ont pris une place centrale dans le salariat, tout en maintenant leur rôle traditionnel dans la famille et que, pour ce faire, elles sont de plus en plus présentes dans l’espace public.
14Si, donc, les villes sont des lieux qui reflètent les dissemblances entre les femmes et les hommes, mais si elles sont également les lieux de projets de vie meilleure, voire de sociétés nouvelles, il nous reste à mesurer la distance entre les rêves des unes et les réalisations des autres.
15Quels rêves d’égalité, de mixité, de séparation, de domination se sont inscrits dans l’espace des villes ? Quels projets ont été assez présents pour connaître des formes de réalisation ? Quelles utopies ont échoué sur la plage des chimères ? Quels temps et quelles sociétés ont porté des conceptions féministes assez fortes pour passer dans les faits ? Les villes ont-elles été favorables aux femmes en leur donnant une place d’individu(e)s à part entière ou reste-t-il quelques scories des pratiques anciennes ? Comment la morale sociale prend-elle corps dans les espaces urbains et comment les rôles sociaux de sexe s’y inscrivent-ils ? C’est à partir de ces interrogations que nous avons porté attention aux dimensions féministes des projets urbains.
16Nous avons examiné les projets anciens et ceux qui sont expérimentés aujourd’hui et nous avons essayé de comprendre comment les normes sociales de sexe s’affichent dans les villes, comment lieux et genres interagissent dans leur construction sociale simultanée pour saisir enfin l’un des vecteurs fondamentaux de l’utopie socio-urbaine : la sexualité.
17Le colloque Utopies féministes et expérimentations urbaines qui s’est tenu en mars 2006 à Tours, et dont cet ouvrage est issu, a réuni des analyses et des réflexions sur des projets urbains, utopistes ou réalisés, pour changer les rapports entre les sexes.
18Le spectre est large de l’utopie à l’expérimentation mais il a ici plusieurs significations. D’une part, il permet de prendre la mesure de ce qui a été voulu, rêvé, projeté que ce soit dans l’ordre de l’idéal ou dans celui de la réalité et d’autre part, il introduit à toutes les formes possibles des expériences sociales. Enfin, il fait place à la dimension égalitaire des féminismes dont il n’est pas certain qu’elle soit encore tout à fait autre chose qu’une utopie.
19Dans un ouvrage récent2, un groupe d’historiennes a présenté les mouvements féministes du xxe siècle en les séparant en deux vagues, en deux moments. Jusqu’au milieu du siècle, les femmes ont voulu être reconnues comme des personnes à part entière dans une société du progrès. Ensuite, elles ont voulu abolir l’ordre social discriminant à leur encontre et faire passer dans les faits la mixité réalisée. Pour reprendre le point de vue de Michèle Perrot, « la première vague revendique l’égalité des droits entre les sexes… La seconde vague des années 1960-1980, “les années Mouvement” de la Libération des femmes, s’attache bien davantage à l’autonomie du sujet-femme, dans ses choix existentiels de tous ordres3 ».
20Selon la même dichotomie, on peut dire que les féminismes ont rêvé une société de droit égalitaire avant de lutter pour la réalisation, ou du moins l’expérimentation, de cette société. Et on peut souligner que ces luttes se lisent dans les phénomènes urbains qui, eux aussi, expriment le passage des sociétés encore rurales aux sociétés contemporaines presque totalement urbaines sur la même temporalité de ce xxe siècle, ce qui, là encore, incite à penser les corrélations entre les deux univers.
21Si l’on considère que « l’égalité des sexes est l’objectif majeur des féminis-mes4 », il est clair que les formes de ce militantisme ont été très diverses. Il est difficile d’évaluer si l’utopie fouriériste, partiellement expérimentée, est plus ou moins irréaliste que l’utopie de la pluri-sexuation des mouvements queer. L’une et l’autre sont, tout autant, des formes d’analyse que des formes de projets politiques. Elles sont des avancées intellectuelles et des formes spécifiques d’expérimentation. La modernité réalisée dans le second xxe siècle nous semble évidente et toutes les revendications de sa mise en place paraissent raisonnables. Vouloir disposer de son corps, de sa capacité de travail, de sa vie semble « normal » aujourd’hui dans la société occidentale, que l’on soit un homme ou une femme. Et pourtant, cela reste encore bien fragile ici et ailleurs. L’utopie advenue d’une société de droit égalitaire reste encore sous la coupe d’une réalité sociale très empreinte des modèles traditionnels inégalitaires. C’est pourquoi, il nous a paru intéressant d’ouvrir notre attention à toutes les utopies féministes pour les confronter aux expérimentations urbaines qui en relèvent. L’utopie, comme chimère politique, comme projet idéal de société ou comme gouvernement idéal d’un peuple heureux, s’étage du rêve le plus fou à la volonté réformiste d’une mise en place toujours renouvelée d’un projet sociétal idéal, voire idéaliste. N’en est-il pas de même du féminisme ?
22Du rêve d’une société égalitaire, de l’épanouissement de chacune à la lutte quotidienne pour des améliorations des conditions de vie souvent minuscules, la longue marche des femmes de leur position dominée vers la juste reconnaissance de leurs capacités n’est-elle pas l’une des formes politiques les plus constantes de la recherche utopiste d’un ordre social bouleversé ?
23La diversité des mouvements féministes s’appuie sur des idées qui parfois peuvent aller jusqu’à s’opposer et nous avons voulu explorer ces rêves de société-femme, de non-mixité, de pouvoir féminin, d’égalité dans la mixité, de modes familiaux renouvelés, de partages justes, de détournements subversifs, de révolutions et de réformes, de reconnaissance de différences ou d’universalité humaine, etc. Mais, au-delà, de ces évocations idéelles nous avons essayé de voir ce qui a pu et peut actuellement passer dans la réalité sociale de toutes ces conceptions féministes et cela, très précisément, dans la dimension urbaine.
24C’est dans la ville et dans la façon dont se fait la ville que nous avons regardé les expérimentations qui abondent les logiques féministes. Il en va ainsi du projet politique, voire du vote de la loi, de la réalisation de modèles de vies familiales différentes de celles qui ont porté la société patriarcale, de l’expression artistique dans la liberté d’un espace de friche, de l’expérience pédagogique d’une socialisation égalitaire, ou de la vie communautaire hors de tout système hiérarchique, de l’écriture féministe de la vie sociale ou du bouleversement des représentations de la sexualité, de la mise en place effective d’une sexualité sans entrave, du travail réorganisé ou des propositions d’aménagement d’espaces de liberté, du choix de la maternité ou du clonage de l’espèce, etc.
25Parmi tous ces possibles et parmi tous les travaux qui ont été présentés à Tours, deux aspects ont clivé les présentations : l’un réflexif, académique a amené de la connaissance théorique, historique, des éléments d’analyse interprétatifs ; l’autre a présenté des expérimentations mises en place partout dans le monde, des Philippines en Russie, de Bordeaux à Umea, de Brest à Montreuil, de Constantine à Kinshasa.
26A la connaissance universitaire s’est confrontée celle du terrain et de l’expérience. Les expérimentations contemporaines ont éclairé les idées anciennes et les lectures théoriques ont donné interprétation aux faits d’actualité. Parfois, les expérimentations sont assez anciennes pour avoir livré leur bilan ; d’autres fois, elles sont encore en cours.
27Pour restituer ces entrelacs, nous avons choisi quatre modes d’exposition qui conduisent du constat à l’essai d’interprétation et qui tentent de rendre la diversité des propos échangés, aussi bien pour ce qui est du passé que de la période actuelle.
28Les communications, regroupées dans la première partie du texte qui suit, tentent de montrer comment la ville a pu être rêvée, théorisée, imaginée pour que les femmes y trouvent une place à part entière depuis des temps lointains (Katherine Roussos) jusqu’à parvenir à être investie d’une appropriation totale de la ville par des femmes militantes (Christine Hudson) . Mais avant que ces expériences ne soient possibles, les femmes ont dû rêver une vie plus facile dans des quartiers à l’architecture progressiste mais parfois difficile à vivre (Thibault Tellier). Elles ont dû, ailleurs qu’en Europe, conquérir leur place dans la rue (Nadia Redjel), se battre pour s’établir dans des contextes malaisés, voire hostiles, et montrer des ressources considérables d’initiatives et d’adaptation (Habiba Essahel).
29Non seulement la ville ne se montre pas facile à investir mais encore elle demande aux femmes beaucoup de courage et d’efforts pour gagner le droit de son usage. Et l’on voit que, du monde musulman peu enclin à ouvrir l’espace public aux femmes jusqu’au nord de l’Europe réputé plus égalitaire, les femmes luttent pour sortir des espaces domestiques auxquels la société les assigne. Le rêve des femmes d’une ville qui leur soit ouverte n’est pas encore une réalité mais il n’est déjà plus une utopie.
30La deuxième partie de cet ouvrage réunit des propos qui éclairent la façon dont les lieux peuvent être porteurs des rôles sociaux de sexe et comment ces derniers sont totalement producteurs des formes de l’espace. Ici, les utopies sont reines et nous montrent comment seraient les villes où les femmes auraient le droit d’être des personnes à part entière. Ce qui nous est montré, ce sont des points de vue féminins et des points de vue masculins sur les réalités et les usages urbains. Des femmes, des féministes du xixe siècle ont imaginé, voulu et parfois tenté de réaliser des villes pour des femmes libres. C’est le cas de F. Tristan (Maïre F. Cross), de Rokeya Sakhawat en Inde (Barnita Bagghi), de Charlotte Gilman (Liane Mozère) . Elles proposent des organisations spatiales qui répondent à ces exigences et, avec ces organisations de l’espace, ce sont aussi des formes de pouvoir politique, des rapports à l’enfantement, des formes de vie morale, etc. où se joue la totalité des identités sexuées. Dans les villes de l’utopie féministe, les lieux sont différents de ceux que nous connaissons parce que les rapports sociaux entre les sexes sont différents et les rapports sociaux de sexe sont égalitaires parce que l’ensemble de l’organisation sociale les reflète, y compris dans la vie urbaine. A ces utopies de femmes, répondent des points de vue masculins. Cabet décrit la ville du bonheur et explicite les rapports sociaux dont elle sera le support. Mais il ne parvient pas, dans sa générosité égalitariste, à rompre les chaînes des rapports sociaux de sexe si profondément naturalisés dans la société de son temps qu’ils demeurent des impensés (Armelle Le Bras-Chopard). Et là encore, les temps passés ne font guère qu’éclairer ces impensables de l’égalité entre les êtres humains que nous continuons à véhiculer dans les formes les plus actuelles de nos activités les plus sociales. En aidant les jeunes à réaliser leurs rêves de culture hip-hop (utopie d’égalité sociale), on laisse s’exprimer tous les obstacles intériorisés et invisibles qui interdisent aux filles d’user en égales de la proposition sociale (Yves Raibaud). On savait depuis les travaux de Catherine Dutheil, combien la musique était masculine. On comprend avec l’exemple des musiques amplifiées de la jeunesse des banlieues, comment cette sexuation perdure. Il faut des lieux appropriés pour que l’égalité trouve place.
31Le troisième groupe de textes qui suit cherche à ouvrir à des explications pour ces résistances. On le comprend la ville résiste, les femmes luttent, les modèles ne se laissent guère ébranler. Comment concevoir qu’une société au Droit aussi égalitaire que la nôtre, aux discours aussi empreints des droits humains puisse se montrer aussi rigide dans les pratiques qu’elle induit lorsqu’il s’agit de faire aux femmes une place égale à celle des hommes. Les trois exemples donnés ici illustrent bien les articulations qui produisent les changements et qui en sont également les produits. Les femmes de l’Antiquité ont joué de la virginité pour se décaler des valeurs dominantes et conquérir une autonomie plus grande (Patrick Laurence). En maîtrisant la sexualité, la maternité, elles ont cassé l’emprise sur elles que leur société accordait aux hommes. Dans le second exemple, d’utopie et d’imagination, la littérature nous amène la libération par la dissolution, la disparition d’une sexualité douloureuse car porteuse des « prisons intérieures » des assignations de genre. Et la ville est le théâtre de ces changements fondamentaux (Mónica Zapata). C’est dans la société contemporaine de l’Europe de l’Est que nous voyons les résistances sociales profondes à ces contraintes intériorisées des assignations sexuées, voire sexuelles avec l’exemple des difficultés à faire entendre la nécessité de bouleverser l’ordre hétérosexuel, y compris dans les milieux féministes. Budapest, et sa tradition turque des bains publics, est le support urbain de cet exemple des rigidités des modèles sociaux de genre (Katarzyna Pabijanek).
32Le quatrième ensemble de communications qu’il nous a semblé important d’apporter à la réflexion de tout un chacun, c’est celui des aspects pratiques des réalisations, des expérimentations en cours. La plupart d’entre elles sont dans le mouvement, dans la création, dans la mise en place. Il est trop tôt pour en tirer toutes les leçons. Il serait dommage de ne pas les faire connaître. Nous avons donc souhaité associer à la version papier de ce texte, un document électronique qui restitue quelques-unes des expérimentations urbaines en cours qui tentent de faire vivre les utopies féministes5.
33Des exemples d’expérimentations récentes, des expériences de tous les pays, des utopies du passé, des pratiques de l’Antiquité, des faits de Droit ou de culture amènent des éléments d’analyse et de lecture pour comprendre pourquoi, alors qu’à l’évidence, femmes et hommes ne sont pas égaux dans l’espace public, il demeure si difficile de faire partager une approche de la ville, de sa fabrication, de sa gestion, de sa rénovation, avec la perspective du genre. Avec la ville, c’est l’ensemble social qui résiste à l’utopie féministe de l’égalité. Mais dans la ville, s’écrivent les évolutions qui bouleversent l’ordre social.
Notes de bas de page
Auteur
-
Sylvette Denèfle
Professeure de Sociologie
Université François Rabelais de Tours
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