• Contenu principal
  • Menu
OpenEdition Books
  • Accueil
  • Catalogue de 15529 livres
  • Éditeurs
  • Auteurs
  • Facebook
  • X
  • Partager
    • Facebook

    • X

    • Accueil
    • Catalogue de 15529 livres
    • Éditeurs
    • Auteurs
  • Ressources numériques en sciences humaines et sociales

    • OpenEdition
  • Nos plateformes

    • OpenEdition Books
    • OpenEdition Journals
    • Hypothèses
    • Calenda
  • Bibliothèques

    • OpenEdition Freemium
  • Suivez-nous

  • Lettre d’information
OpenEdition Search

Redirection vers OpenEdition Search.

À quel endroit ?
  • Presses universitaires de Rennes
  • ›
  • Le sens social
  • ›
  • Les espaces de construction des inégalit...
  • ›
  • Deuxième partie. Les politiques et les i...
  • ›
  • L’école à l’école du néolibéralisme : ré...
  • Presses universitaires de Rennes
  • Presses universitaires de Rennes
    Presses universitaires de Rennes
    Informations sur la couverture
    Table des matières
    Liens vers le livre
    Informations sur la couverture
    Table des matières
    Formats de lecture

    Plan

    Plan détaillé Texte intégral Éducation et restructuration de l’espace urbain : le tournant néolibéral des politiques éducatives américainesLe laboratoire philadelphien : acteurs, discours et pratiques de la réforme éducativeLa fabrique territoriale des inégalités scolaires : écoles « low cost », pratiques punitives et libre choixConclusion : du renforcement des inégalités scolaires à l’injustice éducative Bibliographie Notes de bas de page Auteurs

    Les espaces de construction des inégalités éducatives

    Ce livre est recensé par

    Précédent Suivant
    Table des matières

    L’école à l’école du néolibéralisme : réforme scolaire, bonnes pratiques et inégalités à Philadelphie

    Nora Nafaa et David Giband

    p. 147-168

    Texte intégral Bibliographie Bibliographie Notes de bas de page Auteurs

    Texte intégral

    1Depuis le début des années 2000, le système éducatif américain est l’objet de profondes réformes. Celles-ci cherchent à améliorer la performance éducative des élèves, la position du pays dans les classements internationaux et à réduire des inégalités éducatives particulièrement criantes entre les enfants issus de la majorité blanche et ceux issus des minorités noires et hispaniques (Giband et Nafaa, 2016). Engagées dès 2001 par l’administration Bush1 et poursuivies par l’administration Obama2, ces réformes associent dans un même mouvement des objectifs économiques (adapter l’école à la mondialisation) et sociaux (réduire les inégalités éducatives notamment dans les villes). Ces politiques éducatives réformistes se situent dans une perspective néolibérale assumée qui entend sortir l’éducation du « monopole public », moderniser son fonctionnement par l’introduction de normes et de méthodes managériales et mieux arrimer l’éducation aux politiques de développement des villes (Lipman, 2011). Nombre de travaux ont montré que l’éducation, au même titre que d’autres secteurs non marchands, est remodelée par des politiques visant à accroitre l’attractivité et la compétitivité des villes (Hackworth, 2007 ; Brenner et Theodore, 2002). L’éducation et ses réformes – à l’instar de la privatisation des services publics (eau, santé, logement social), du glissement des arènes de décision vers des coalitions publique/privée – participent de la « néolibéralisation de la ville » (Hackworth, 2007). Une éducation confiée à un panel d’opérateurs (privés, publics, associatifs), répondant à des standards internationaux et à des normes issues du monde de l’entreprise, apparaît comme un vecteur de réussite éducative autant que d’attractivité des entreprises et des salariés les plus qualifiés.

    2La question est prégnante aux États-Unis où le système éducatif connaît un ensemble de reconfigurations que l’on peut qualifier de tournant néolibéral des politiques éducatives urbaines. Au nom de l’adaptation des villes à la mondialisation, se mettent en place discours, réformes et politiques éducatives qui valorisent la privatisation, la marchandisation, la performativité de l’éducation au sein des districts scolaires des grandes villes (Apple, 2004). Les métropoles américaines apparaissent à ce titre comme des laboratoires privilégiés des transformations économiques et sociales (Brenner, Peck et Theodore, 2010) et l’école y est un enjeu majeur (Giband, 2003 ; Taylor, 2009). À la suite de Chicago en 2001, la plupart des grands districts scolaires urbains du pays adoptent des réformes libéralisant le secteur éducatif via l’introduction d’outils de mesure de la performance et de privatisation des écoles publiques en difficulté (Lipman, 2004).

    3Nous partons de l’hypothèse que, loin de résoudre les inégalités sociales et raciales, les réformes scolaires engagées renforcent les inégalités éducatives existantes et contribuent au déploiement de ce qui apparaît davantage comme des formes d’injustice socio-spatiale (Lipman, 2015). Pour ce faire, cet article interroge les inégalités éducatives par une lecture des processus de mise en tension des espaces scolaires dans le cadre du déploiement de politiques éducatives néolibérales. Il prend appui sur l’exemple de Philadelphie – ville marquée depuis 2007 par une grave crise du district scolaire – qui fait de l’éducation le vecteur du changement urbain et de son inscription dans la compétition économique. Partant de l’analyse des relations entre changements urbains et politiques éducatives, nous questionnerons d’abord, ce que nous qualifions de « double tournant » de l’éducation à Philadelphie : tournant néolibéral des politiques éducatives locales et tournant éducatif des politiques urbaines. Double tournant qui, comme nous le verrons ensuite, induit une nouvelle géographie dans l’affectation spatiale des ressources éducatives qui prend valeur de « marché scolaire », placé sous le sceau de la mise en compétitivité, de la responsabilisation, de l’évaluation, du libre choix et de la performance. Autant d’éléments qui permettent d’appréhender le renforcement et le renouvellement des inégalités scolaires dans des contextes marqués par le poids des héritages ségrégatifs et raciaux (Spring, 2008).

    Éducation et restructuration de l’espace urbain : le tournant néolibéral des politiques éducatives américaines

    4Dans ce texte, nous nous intéressons à l’éducation comme media fondamental dans la poursuite d’un mode de développement néolibéral de la ville (Lipman, 2011). Nous nous positionnons dans une géographie urbaine critique qui articule les apports de la géographie sociale française (Buléon et Di Méo, 2005 ; Séchet et Veschambre, 2006), attentive à la façon dont les acteurs façonnent, « fabriquent » la ville, développent des stratégies pour leur territoire, à ceux de la géographie radicale anglophone (Harvey, 2014) intéressée par une compréhension critique des effets de la mondialisation et des recompositions du capital au sein des espaces urbains. Nous souhaitons explorer les conditions de mise en œuvre de la néolibéralisation des politiques éducatives et ses effets en termes d’inégalités scolaires en portant l’attention sur les acteurs engagés, les discours mobilisés, les stratégies mises en place autant que sur la mesure des inégalités scolaires. Ce travail repose d’une part, sur la mobilisation de données statistiques issues des institutions locales (district de l’éducation de Philadelphie, État de Pennsylvanie) et d’autre part, sur des enquêtes de terrain3 menées dans le cadre d’une thèse en cours et de programmes de recherches.

    Du tournant néolibéral des politiques éducatives urbaines au tournant éducatif des politiques urbaines

    5Nous partons de l’hypothèse que l’éducation participe de la restructuration contemporaine des villes américaines, au même titre que la privatisation des équipements urbains, et relève de la mise en œuvre d’un urbanisme néolibéral (Wilson, 2004). Les villes américaines sont les lieux privilégiés de la privatisation des équipements et des institutions publiques et de l’intervention grandissante d’acteurs privés et associatifs (entreprises, fondations caritatives, associations communautaires, lobby d’affaires) dans la sphère non marchande (Brenner, Peck, Theodore, 2010). Elles apparaissent comme les espaces emblématiques du déploiement de politiques néolibérales dont les discours valorisent l’entrepreneuriat urbain, la privatisation de pans entiers du secteur public, l’instauration de normes managériales dans la conduite des affaires publiques, autant d’éléments au fondement d’une gouvernance néolibérale de la ville (Hackworth, 2007). La néolibéralisation des politiques urbaines s’apparente à une idéologie qui promeut l’efficacité du marché dans l’ensemble de la sphère urbaine : économique, politique, culturelle et sociale (Hankins et Martin, 2006). Elle ne répond pas seulement à des fins utilitaristes (maximiser les revenus du capital), il s’agit aussi d’un projet politique qui véhicule un imaginaire social dans lequel l’éducation occupe une position centrale. Avec pour horizon la compétitivité économique des métropoles, l’éducation est la condition sine qua non de la réussite économique locale dans le marché mondial (Ossen, Codd et O’Neill, 2004). Il s’agit dans un même mouvement d’adapter l’éducation (ses institutions, son mode de fonctionnement, de financement, son organisation territoriale) aux normes de la gouvernance urbaine, et de faire de celle-ci un élément moteur de l’attractivité urbaine.

    6Dans nombre de pays occidentaux, des alliances se forment dans les villes afin de réformer l’éducation (Apple, 2001). Ces alliances sont portées aux États-Unis par les acteurs privés (chambres de commerce, syndicats patronaux, lobbies) et philanthropiques (Mitchell et Lizotte, 2016)4. Elles combinent différentes fractions du capital et proposent de généraliser des solutions de type marchandisation de l’éducation aux problèmes que rencontre l’école (échec scolaire, dégradation des conditions d’enseignement, inégalités éducatives, déficits budgétaires des districts scolaires, etc.). Les solutions préconisées valorisent la responsabilisation collective et individuelle des acteurs de l’éducation et promeuvent le recours à l’évaluation et aux techniques managériales. Ces discours intègrent l’éducation dans un ensemble de partis-pris idéologiques : centralité du marché, primauté du libre choix scolaire, encouragement des mobilités au sein de l’espace scolaire, renforcement des conditions sociales et spatiales de la compétition scolaire et promotion de la performance éducative.

    7Ce tournant néolibéral des politiques éducatives est concomitant du tournant éducatif des politiques urbaines qui fait de l’éducation un élément clef dans la reconquête économique et sociale des villes. L’école – et plus largement l’offre d’éducation sur un territoire – s’apparente à un ensemble d’aménités urbaines qu’il s’agit de valoriser. Ce tournant s’effectue en parallèle à la mise en place d’une gouvernance urbaine misant sur la flexibilité, le recours aux partenariats public/privé, la responsabilisation individuelle et le libre choix territorial (Giband, 2006). Ce double tournant repose aussi sur une dérégulation du système public d’éducation, matrice de nouvelles inégalités urbaines et scolaires.

    La dérégulation du système éducatif matrice des inégalités (1983-2016)

    8La période des droits civiques avait inauguré aux États-Unis une politique nationale de déségrégation scolaire cherchant à réduire les écarts entre groupes ethniques sur la base d’une territorialisation de l’action éducative et de la mobilité géographique des élèves5. Les années 1970 marquent l’abandon progressif de ces pratiques déségrégatives et le retour à des politiques locales faiblement intégratives. Ce qui conduit, sur la base de l’affectation résidentielle des élèves, à des partitions ethno-raciales des districts et des établissements au fondement d’importantes inégalités éducatives entre la majorité blanche et les minorités noires et hispaniques. Ces partitions sont renforcées par un mode de financement reposant en grande partie sur la fiscalité des districts scolaires. Dans le même temps, les faillites des districts des grandes villes se multiplient pendant que se banalisent la représentation d’un système d’éducation publique en panne et la stigmatisation des établissements accueillant les élèves pauvres et souvent issus des minorités (faible niveau scolaire, niveau élevé de violences). L’arrivée de l’administration Reagan et la publication du rapport « A nation at risk » (1983) annoncent le passage à des politiques éducatives valorisant des situations de quasi-marché scolaire (Mitchell et Lizotte, 2016). Établissant le diagnostic de l’échec du système éducatif public, « A nation at risk » diffuse l’idée d’un risque à le maintenir en l’état. Suivent trois décennies de réformes qui posent le principe de la dévolution des responsabilités éducatives de la sphère publique vers un panel élargi d’opérateurs (entreprises, associations communautaires, fondations philanthropiques). Domine l’idée que les acteurs de l’éducation (parents, enseignants, responsables d’établissements) doivent s’investir davantage (en valorisant les notions d’empowerment et de selfhelp6) afin de maximiser leurs opportunités dans un contexte de libre choix scolaire (Bloch et al., 2003). Ces changements sont une première fois formalisés dans la réforme Clinton’s Goals 2000 (1996) qui instaure des standards d’évaluation et de comparaison des élèves, des enseignants et des établissements. La dérégulation du système éducatif états-unien atteint toutefois son apogée à partir de 2001 avec la loi No Child Left Behind7, marquant le tournant néolibéral du gouvernement fédéral dans le domaine scolaire. Cette loi, portée par l’administration Bush, refond l’ensemble du système public d’éducation. Trois volets majeurs la caractérisent. Tout d’abord, l’adoption de normes managériales intégrant des acteurs tiers, notamment du secteur privé, inaugure le retrait progressif des acteurs gouvernementaux. Ensuite, un système d’évaluation punitive, sous couvert de responsabilisation et d’autonomisation des établissements scolaires (accountability8), devient l’outil de régulation. Enfin, la diversification du marché scolaire (privatisation des écoles à faible performance éducative : les low performing schools) participe de la libéralisation du paysage scolaire (Felouzis et al., 2013). Le programme fédéral Race to the top de l’administration Obama (2009) accélère la mise en compétition des établissements entre eux avec la création d’un fonds encourageant l’innovation et les réformes sur un système concurrentiel d’appels à projet.

    9L’intégration du discours néolibéral dans les politiques éducatives urbaines se fait d’autant plus facilement que les districts scolaires des grandes villes (financés par un impôt local et des dotations des États) traversent de graves crises budgétaires. Sur fond de faillites des grands districts scolaires (à Philadelphie, Chicago, New York et à la Nouvelle-Orléans), prospère l’idée de l’inéluctable échec du système éducatif public et la nécessité à le réformer.

    Le laboratoire philadelphien : acteurs, discours et pratiques de la réforme éducative

    10Loin d’être un cas isolé, le district scolaire de Philadelphie constitue – avec les districts de Chicago et de la Nouvelle-Orléans9 – un exemple emblématique des réformes en cours.

    Graphique 1. – Composition ethnique de la population scolaire du district de Philadelphie, 2015.

    Image 1000000000000134000001542347AEEF51D0E5A6.jpg

    Source : School District of Philadelphia, 2015.

    Bonnes pratiques et responsabilisation des établissements

    11À la fin des années 1990, le district fait face à une succession de banqueroutes financières, au délabrement avancé des écoles publiques et à un niveau élevé de violences scolaires (Giband, 2003). La situation est révélatrice d’une partition biraciale de l’espace scolaire métropolitain qui oppose un district scolaire central (Philadelphie), majoritairement composé d’enfants noirs et hispaniques (graphique 1, carte 1), à des districts de banlieue peuplés de classes moyennes blanches et à la base fiscale plus équilibrée (Giband, 2003). En 2000, plus de 80 % des enfants scolarisés dans les écoles du district appartiennent à une minorité ethnique et 70 % vivent sous le seuil de pauvreté. 90 % des élèves noirs et hispaniques sont scolarisés dans des établissements mono-ethniques comptant plus de 85 % d’enfants vivant sous le seuil de pauvreté. Pâtissant de faibles ressources fiscales, le district alloue 6900 dollars par an et par élève contre une moyenne de 12000 dollars dans l’État de Pennsylvanie. En 1998, alors que le déficit du district s’élève à 216 millions de dollars, le maire et le superintendant du district de Philadelphie (démocrates) menacent de fermer les établissements scolaires si l’État (républicain) n’augmente pas ses dotations. En réponse, l’État de Pennsylvanie prend en 2000 le contrôle du district qu’il confie en 2001 à une nouvelle structure la School Reform Commission (SRC). La SRC est une agence de moyens qui fait office de guichet pour le district et les établissements scolaires et a pour mission le développement d’un « educational diverse providers model » (modèle avec divers prestataires éducatifs). Le district scolaire de Philadelphie est alors présenté comme un laboratoire national d’innovations visant à développer un modèle efficace et performant, en assurant la transformation du système public d’éducation en un quasi marché ouvert à des opérateurs d’éducation, les EMO (Education Management Operators10) : entreprises spécialisées (comme Edison, Inc.), fondations philanthropiques ou groupes religieux. Mandatée pour améliorer les taux de réussite aux tests nationaux et résoudre les difficultés financières, la SRC promeut une politique de responsabilisation des établissements – selon de nouvelles normes gestionnaires et éducatives –, et de dérégulation de la carte scolaire. Les dotations aux établissements dépendent désormais des taux de réussite aux tests nationaux des élèves ainsi que de l’adoption par les établissements et les enseignants de « bonnes pratiques ». La performance scolaire et administrative, érigée en principe dominant, guide la réforme du district. En fonction des évolutions des résultats des élèves d’une année sur l’autre aux tests11 (mesurées par un indicateur : le Adequate Yearly Progress, AYP, lui-même modulé par des critères sociaux), les établissements sont classés en plusieurs catégories. Les vanguard schools sont des écoles d’avant-garde qui présentent des taux élevés de réussite. Elles obtiennent un niveau de dotation plus important et ont le droit de sélectionner leurs élèves. Les non vanguard schools se partagent entre les établissements qui ont atteint leurs objectifs (mesurés par un score à atteindre, le SPP : School Performance Profile, aux tests locaux et nationaux), et ceux qui obtiennent de faibles performances : les écoles en difficulté (empowerment schools) et celles en échec (failing schools). Les empowerment schools12 sont des établissements scolaires en difficulté pour lesquelles le SRC préconise un ensemble de mesures (refonte du programme éducatif sur les matières centrales, renouvellement de l’équipe enseignante, etc.), promeut leur autonomisation administrative (chemin supposé conduire à la réussite éducative) mais sans sanction financière. Les failing schools sont des établissements en grande difficulté qui n’ont pas réussi à atteindre leurs objectifs AYP pendant deux années consécutives et qui seront, soit fermés, soit convertis en Charter schools, c’est-à-dire proposés en délégation de service public (établissement géré par un prestataire sous contrat avec le district, avec des investissements très différents selon l’opérateur).

    Carte 1. – Répartition ethnique de la population scolaire du district de Philadelphie, 2015.

    Image 10000000000002B20000037AA1E7439B5713AF41.jpg

    Dérégulation du système public et normes managériales

    12L’arrivée de la SRC marque le glissement dans la conduite des politiques éducatives de la sphère publique et municipale vers une sphère publique/ privée aux mains d’une coalition de pouvoirs associant une structure administrative (SRC)13, de grandes fondations philanthropiques engagées dans l’aide financière aux établissements scolaires en difficulté et des lobbyistes représentants les intérêts du capital local (le Philadelphia School Partnership, PSP). Le PSP regroupe des représentants des secteurs de la banque, de la finance, de l’immobilier, des investisseurs engagés depuis 2002 en faveur du redressement du secteur éducatif à Philadelphie. Le PSP joue un rôle majeur dans la diffusion de normes néolibérales au sein du système éducatif. Relais des fondations philanthropiques engagées dans l’aide aux districts scolaires dont elle collecte les fonds, le PSP gère entre 100 et 300 millions de dollars destinés aux établissements en difficulté. Acteur de poids dans la mise en œuvre de la réforme du SRC, le PSP voit dans le district scolaire un « terreau fertile » pour la dérégulation de l’éducation et la privatisation des établissements les plus difficiles (dénoncés comme des « dumpster schools » soit des écoles poubelles). Ses objectifs tiennent dans le « down sizing » (le dégraissage) du district et dans un mot d’ordre : « dump the losers » (éjecter les perdants)14. Derrière le discours valorisant les leading-performing schools, l’innovation éducative et la mise en valeur des talents, on trouve un système qui repose sur l’audit, l’évaluation et la coercition. Le recours aux modes de management des entreprises privées est l’occasion de réduire les coûts. 1 milliard de dollars de coupes budgétaires ont été opérées depuis 2002, 1500 enseignants ont été licenciés, 86 % des emplois de non enseignants (bibliothécaires, infirmières) ont été supprimés et certaines fonctions sont externalisées : les enseignants remplaçants sont recrutés par une entreprise privée, les activités extrascolaires sont déléguées aux acteurs associatifs. Se banalisent les normes néo-managériales : indexation du salaire des enseignants aux résultats des élèves, interdiction de se syndiquer dans les écoles en redressement, etc. Cette réforme cherche d’abord à maximiser les possibilités de choix offertes par un panel d’opérateurs éducatifs. Ensuite, elle promeut un principe de responsabilisation : celle des établissements qui, dans un contexte concurrentiel, doivent développer stratégies et moyens nécessaires pour répondre aux objectifs d’efficacité pédagogique, et celle des parents d’élèves appelés à mobiliser dans un espace scolaire « libre » les opportunités offertes en fonction de leur projet éducatif.

    13En moins d’une décennie, l’espace scolaire visant l’équité interethnique et structuré par des zones de recrutement attachées à l’espace résidentiel intégrant dans les mécanismes de financement les difficultés sociales et économiques des établissements, se transforme en un espace scolaire dérégulé où, à côté des écoles publiques de quartier, intervient une myriade d’opérateurs et d’établissements autonomes et concurrents (carte 2), censés maximiser le choix scolaire et ainsi participer à la réduction des inégalités (magnet schools, charter schools, renaissance schools, innovation schools, contract schools, etc.)15.

    La fabrique territoriale des inégalités scolaires : écoles « low cost », pratiques punitives et libre choix

    14La mise en œuvre de la réforme intervient dans un district historiquement marqué par le poids des inégalités scolaires déterminées par un ensemble de facteurs sociaux et ethniques16 pour un public scolaire majoritairement issu des minorités et des foyers pauvres (carte 1, graphiqe 1).

    La privatisation ou la question des charter schools dans les quartiers pauvres

    15Se fondant sur les résultats des écoles aux tests, le SRC prend dès 2002 le contrôle de plusieurs dizaines d’établissements classés en difficulté qu’il confie à des opérateurs privés. De 2002 à 2016, 86 établissements scolaires publics sont ainsi transformés en charter schools (carte 2) et une soixantaine ferme définitivement, essentiellement dans les quartiers noirs de North et West Philadelphia (cartes 2 et 3). Les charter schools scolarisent désormais 63000 élèves17 et sont gérées par une douzaine d’opérateurs (EMO). Les charter schools sont des écoles publiques financées par le district scolaire dont la gestion est confiée par mandat (charte) à des prestataires extérieurs : entreprises, universités ou associations à but lucratif qui ont toute liberté pour développer un projet éducatif et recruter le personnel enseignant en dehors de celui du district. En échange de dotations du district scolaire et des fondations caritatives, elles s’engagent à rééquilibrer budget et performance éducative. Pour cela, elles proposent des programmes spéciaux et recrutent les élèves sur dossier et par un système de loterie à l’échelle du district (tableau 1).

    16Les charter schools se développent rapidement au sein des quartiers pauvres et noirs (carte 2). La charterisation y amorce des changements majeurs, sources de nouvelles inégalités. Elle participe d’abord d’une privatisation du système public d’éducation dans les quartiers pauvres en introduisant des opérateurs à but lucratif. Elle contribue ensuite à la dérégulation de la carte scolaire en faisant éclater les liens traditionnels entre établissements scolaires et communautés locales (associations de quartier qui fournissaient des programmes périscolaires). Pour mémoire, les charter schools recrutent à l’échelle du district et non des secteurs scolaires. Enfin, elle modifie les conditions mêmes d’enseignement en autorisant des programmes dérogatoires (labélisés excellence, initiative, innovation, etc.) et en supprimant le droit de grève et de se syndiquer pour les personnels enseignants. Loin de répondre aux ambitions de réussite pour tous, les EMO, gérant les charter schools des quartiers pauvres, y développent un modèle d’écoles « low cost ». Ces charter schools « low cost » recrutent un personnel enseignant novice et inexpérimenté, proposent des programmes scolaires réduits aux matières principales (mathématiques, anglais, sciences) et des investissements limités pour le matériel18. À cela s’ajoute l’externalisation de nombreuses fonctions : le service de cantine est souvent confié au secteur associatif, le recours aux parents est récurrent pour l’achat de matériel (manuels, cahiers, ordinateurs, etc.) et pour l’animation des programmes hors curriculum (activités artistiques, sportives, linguistiques), ce qui se révèle particulièrement problématique dans les écoles des quartiers pauvres. La « charterisation » des établissements en difficulté induit également une mobilité sélective des élèves. Soucieuses de répondre aux objectifs fixés par le SRC à l’évaluation SPP, les charter schools ont tendance à recruter les meilleurs élèves des écoles de quartier et systématisent des pratiques implicites de tri des autres élèves. Ces établissements proposent peu ou pas de programmes de soutien scolaire, ni d’aides aux enfants non-anglophones ou aux enfants handicapés, éloignant des catégories considérées à risque en matière de réussite aux tests. D’autres rendent difficiles les conditions d’admission pour les foyers les plus modestes. Ainsi, les documents d’inscription ne sont disponibles que sur internet et uniquement en anglais, pénalisant les foyers pauvres et les non-anglophones. En retour, les écoles publiques de quartier (non charterisées) concentrent les élèves en difficulté scolaire et ceux issus des foyers pauvres et perdent les bourses au mérite. Elles voient leur budget réduit au profit des charter schools, fragilisant un peu plus leur possibilité de réussite aux tests. À cela s’ajoute une répartition inégale des dotations aux établissements. Les charter schools reçoivent désormais plus de la moitié des dotations financières du district pendant que les écoles de quartier voient leur dotation, comme leur personnel enseignant et non enseignant, baisser fortement. Dans le même temps, se banalisent les formes de mobilité scolaire qui renforcent les inégalités. Aux mobilités choisies (celles de bons élèves des écoles publiques vers les charters schools) s’ajoutent les mobilités contraintes. Les fermetures d’établissement et la sélection à l’entrée des charter schools contraignent un nombre croissant d’élèves à des mobilités quotidiennes hors de leur aire de recrutement dans des établissements éloignés et non desservis par les bus scolaires. Depuis 2010, les fermetures d’établissements (carte 3) ont contraint 9000 élèves à changer d’établissements et à des allongements des temps de trajets scolaires rendus difficiles par la traversée de secteurs contrôlés par les gangs, autant de facteurs de démobilisation et de décrochage pour les élèves les plus fragiles.

    Carte 2. – La nouvelle offre scolaire du district de Philadelphie.

    Image 10000000000002BE0000039F9FE7E13D540D393E.jpg

    Tableau 1. – Les types d’établissements scolaires du district de Philadelphie.

    Image 10000000000002B4000000C8C9C44E4A51F02050.jpg

    Source : N. Nafaa, 2016.

    17Les charter schools des quartiers pauvres sont loin de répondre aux enjeux d’excellence éducative promue par la SRC. Bien au contraire, les stratégies commerciales des opérateurs des charter schools fragilisent l’offre éducative dans les quartiers pauvres des Noirs et des Hispaniques. Ces opérateurs se livrent à une rude concurrence pour obtenir les marchés lors de la transformation d’une école publique en charter school. Sous fond d’appels d’offre, cette concurrence induit son lot de propositions « au moins-disant », de fausses promesses afin de capter les financements du district et des organisations philanthropiques. Quitte, quelques années plus tard, à fermer précipitamment les établissements (pour cause de rentabilité insuffisante) et à abandonner parents et élèves19. Les faillites, les rachats et fusions entre opérateurs de charter schools perturbent le paysage scolaire des quartiers pauvres. Parfois, la SRC ne renouvelle pas la charte des opérateurs et ferme les charter schools pour résultats insuffisants à l’évaluation SPP. Ces dernières années, près du tiers des charter schools ont fermé ou n’ont pas été renouvelées, toutes dans les quartiers noirs de la ville. Ces changements, alternant fermetures, transformations et faillites, pénalisent des élèves souvent en difficulté, disposant de faibles capacités d’adaptation. L’histoire récente du district est émaillée de fermetures soudaines et de scandales dans la gestion des charter schools (résultats truqués aux tests, gestion opaque des fonds alloués) dont les opérateurs n’hésitent pas, au gré des financements publics, à relocaliser « leurs actifs » dans d’autres districts plus généreux. La volatilité des charter schools alimente une forte contestation des associations de parents d’élèves et des syndicats d’enseignants qui dénoncent un système profitant des écoles en difficulté comme autant « de vaches à lait » et déstabilisant l’espace scolaire des quartiers pauvres. Toutefois, les associations locales sont marginalisées au rythme des fermetures et de la charterisation, rendant difficile l’exercice des formes de solidarité (soutien périscolaire, aides aux familles non anglophones). Fermeture des low performing schools, multiplication des charter schools et mobilité contrainte sont vécues comme des pratiques punitives à l’encontre d’un public scolaire doublement stigmatisé en raison de ses caractéristiques ethniques et sociales.

    Carte 3. – Les fermetures d’établissements scolaires depuis 2012.

    Image 10000000000002C20000034209BB8F0B6CC94333.jpg

    Ethnicisation des performances et territorialisation avancée du décrochage scolaire

    18Bien que les écarts en termes de réussite scolaire entre les quartiers blancs et ceux des minorités ethniques soient une constante, la réforme engagée en 2002 introduit deux dimensions : une ethnicisation renforcée de la performance et la territorialisation du décrochage scolaire. Plus qu’un creusement des écarts entre élèves blancs et des minorités noires et hispaniques, ressort une ethnicisation avancée de la performance éducative. 70 % des élèves blancs sont scolarisés dans des établissements obtenant des résultats aux SPP supérieurs à 60 % alors que 80 % des élèves noirs sont scolarisés dans des établissements présentant des résultats inférieurs à 20 %. Les résultats en lecture et en mathématiques illustrent l’ampleur et le creusement des écarts entre deux types de populations scolaires (tableau 2). D’un côté, les populations blanches et asiatiques présentent des taux élevés aux tests en mathématiques et en lecture en fin de collège. Les élèves asiatiques sont au-dessus de la moyenne mais sont peu représentatifs. Issus d’une génération bien intégrée à la société américaine, ceux-ci demeurent une minorité peu présente à Philadelphie. Élèves blancs et asiatiques sont surreprésentés dans les établissements du centre-ville, notamment dans les établissements privés catholiques, les magnet et les charter schools où les prestataires investissent, autant d’établissements qui bénéficient de bonnes conditions matérielles, de la participation de tiers-acteurs (parents, entreprises) et d’une inscription dans des circuits de scolarisation facilitant l’intégration des élèves à l’université (programmes préparant aux études supérieures, soutien et participation des universités à certains établissements). Les élèves hispaniques, davantage marqués par la pauvreté et l’isolement géographique dans les ghettos de North et West Philadelphia, présentent de faibles résultats (41 %) à l’instar des élèves noirs (37 %) pour un accès limité à l’enseignement supérieur (inférieur à 20 %). Ces élèves pâtissent des effets de la réforme : établissements sous dotés, mobilité contrainte, isolement géographique des établissements, pratiques punitives du district concernant les établissements les accueillants. La baisse des résultats scolaires depuis 2001 est concomitante de la politique de désinvestissement de la part du district et de l’État et de l’imposition de normes pédagogiques « innovantes » inadaptées à ce public scolaire.

    Tableau 2. – Le niveau scolaire des élèves du district scolaire en mathématiques et en lecture de la 3e à la 8e par groupe ethnique.

    Image 10000000000002B4000001873F489BBE23DF3A25.jpg

    Source : Philadelphia School District, 2016.

    Carte 4. – Les élèves décrocheurs.

    Image 10000000000002CA000003C68E0C36D0947A9D84.jpg

    19L’une des manifestations des faibles performances scolaires et des écarts ethniques et territoriaux concerne le décrochage scolaire (lycéens sortant du système éducatif sans obtenir de diplôme). Cet indicateur fait ressortir une géographie de l’échec scolaire. De 2009 à 2014, le taux de décrochage scolaire a quasiment doublé, passant de 4,09 % à 8,96 %, atteignant dans les établissements des quartiers pauvres jusqu’à 41 %. Lorsque l’on additionne ces données à celles relatives à l’absentéisme scolaire, ressort une géographie des inégalités éducatives particulièrement virulentes dans les quartiers noirs de la ville à North et West Philadelphia et secondairement dans les quartiers hispaniques (carte 4). Deux éléments se combinent. D’une part, on retrouve les effets des désinvestissements dans des lycées publics scolarisant une population scolaire en difficulté (suppression des postes de conseillers d’éducation, d’aides pédagogiques). D’autre part, l’indexation des dotations du district aux établissements en fonction de leurs résultats à l’évaluation SPP incite les responsables d’établissement à déscolariser les décrocheurs. Certains lycées apparaissent ainsi comme des drop out factories, des « usines du décrochage scolaire », tous localisés dans les quartiers pauvres des minorités de North, South Philadelphia et Frankford (carte 4).

    Derrière l’alibi de la performance scolaire, le maintien des inégalités scolaires

    20La publication par l’État de Pennsylvanie depuis 2010 des résultats aux tests nationaux ne montre pas de réelles performances des écoles « chartérisées » par la réforme (tableaux 1 et 2), ni de progrès pour l’ensemble de la population scolaire. Concernant les écoles charterisées, elles n’améliorent pas leurs résultats aux tests de façon significative. Ainsi, les 20 Renaissance Charter Schools (programme de « charterisation » pour 20 établissements en grande difficulté des ghettos noirs de la ville lancé en 2012) présentent au SPP des taux faibles proches de ceux des écoles publiques en difficulté (tableau 3).

    Tableau 3. – Taux de réussite au SPP (2015) par type d’établissements.

    Type d’établissements % de réussite
    Écoles publiques 59,07
    Charter schools 59,38
    District de Philadelphie 59,08

    Source : Philadelphia School District, 2015.

    21Lorsque l’on analyse les résultats aux tests à la sortie du lycée, à l’exception des magnet schools (qui représentent un volume marginal d’élèves), les résultats restent faibles pour l’ensemble des établissements quelle que soit leur catégorie (tableau 3). Dans les quartiers pauvres, à l’exception de rares poches de réussite éducative (correspondant à des établissements proposant des programmes d’excellence éducative20), ressort l’image d’une marée de « dumpster schools » (écoles poubelles).

    Tableau 4. – Les résultats aux SPP en fin de lycée, 2015.

    Image 10000000000002B3000000E67A551069C0126D3E.jpg

    Source : Philadelphia School District, 2015.

    22D’une manière générale, et malgré l’ampleur de la réforme, en dix ans les inégalités scolaires restent élevées (tableau 4). En 2014, seuls 43 % des élèves du district atteignent la moyenne en lecture, et 46 % en mathématiques, soit des taux quasi identiques à ceux de 2000. Les élèves issus de familles économiquement désavantagées peinent davantage que les autres (39 %). Les élèves non-anglophones et les élèves handicapés sont également marqués par des résultats médiocres, respectivement 27 % et 18 %.

    Territoires de la réussite, parias scolaires et marges de (re)conquête éducative

    23La réforme est au fondement d’une triple partition de l’espace scolaire. Celui-ci se partage entre les territoires à haute valeur éducative, les territoires de la relégation scolaire et les marges de (re)conquête éducative.

    24Les territoires à haute réussite éducative correspondent à certains quartiers privilégiés du centre-ville (Rittenhouse Square, Society Hill) et du Nord-Est (cartes 1 et 2). Ils se caractérisent par un entre soi-ethnique (population blanche issue des classes moyennes et supérieures), des taux élevés de réussite scolaire et une offre éducative diversifiée. Deux facteurs se cumulent : d’une part, la concentration de populations favorisées, principales bénéficiaires et actrices de la réforme éducative, et d’autre part, les stratégies territoriales de restructuration de l’offre éducative par la SRC, les EMO et les acteurs privés. Le capital social de ces groupes ainsi que la définition précoce de circuits privilégiés de scolarisation jouent un rôle décisif. Dans ces territoires protégés des fermetures, la réforme menée par la SRC facilite une restructuration de l’offre valorisant le déploiement de deux types d’établissements : les magnet schools (écoles proposant des programmes d’excellence éducative) et les charter schools (carte 2). Les magnet schools se concentrent en centre-ville autour des quartiers des classes supérieures. Contrairement aux quartiers pauvres, les EMO y développent une offre de charter schools élitistes, promouvant l’excellence éducative. Ces charter schools sont bien dotées en personnel qualifié, en matériel et en programmes périscolaires (arts, sports, langues étrangères). Magnet et charter schools participent par ailleurs de la revitalisation du centre. En effet, dès 2002, profitant des libertés de gestion autorisées par la réforme, le Center city district, association des grandes entreprises du centre-ville, crée la CCSI (Center City School Initiative ; Cucchiara, 2013). Celle-ci a pour objet de renforcer les écoles publiques en intervenant dans leur financement et leur programme éducatif. Il s’agit d’une prise de contrôle par les élites économiques de plusieurs écoles du centre-ville afin de faciliter l’arrivée des classes supérieures. Formalisée dans un document, « Reinvent neighborhood school », l’objectif est de faire de la reconquête des écoles publiques du centre-ville le support d’un projet de distinction urbaine (« Philadelphia the next great city »), articulant l’amélioration de l’offre éducative (programmes enrichis) à l’accueil des « classes créatives » (travailleurs qualifiés œuvrant dans le design, les arts, l’informatique, la recherche). Les secteurs scolaires du centre-ville associent entre-soi éducatif et mobilité scolaire choisie. Cette stratégie d’élitisme des établissements du centre-ville – couplée aux possibilités d’accueil des enfants de salariés des entreprises du centre mais résidant en banlieue – modifie la composition du district et accélère la colonisation des établissements par les classes moyennes et supérieures. Sous la pression des associations de parents et des entreprises, les établissements du centre-ville multiplient les programmes éducatifs d’excellence et les activités périscolaires de l’après-midi (arts, culture, sports), nécessitant soutiens financiers et participation des parents. Face à une offre associée à une contrainte sociale et financière et à l’invasion/colonisation par les représentants des classes moyennes et supérieures, les foyers modestes quittent des établissements relevant pourtant de leur secteur pour une scolarisation dans des secteurs voisins. Alors qu’en 2002, les enfants Noirs représentent près de 30 % des effectifs en centre-ville, leur part en 2015 ne dépasse pas les 10 %.

    25Dans le même temps, le désengagement de l’État, les délégations de service public conduisent à la formation de véritables territoires de relégation scolaire qui fonctionnent comme autant de territoires de l’échec scolaire avancé. Ceux-ci correspondent aux quartiers noirs de North et West Philadelphia, et hispaniques à Frankford. Ces territoires cumulent les piètres performances scolaires (SPP inférieurs à 20 %), les pourcentages élevés de décrocheurs et les faibles pourcentages de poursuite des études dans l’enseignement supérieur. Il s’agit d’espaces qui concentrent les populations scolaires en difficulté, les établissements les moins performants, et ceux destinés à l’accueil de ce que l’on peut qualifier de « parias scolaires » : jeunes délinquants, primo-arrivants, élèves violents, élèves décrocheurs, etc. Ils fonctionnent comme des territoires répulsifs et isolés des réseaux de la réussite éducative, peu ou pas connectés aux autres secteurs scolaires (faible mobilité des élèves vers les établissements des quartiers blancs). Principale cible de la réforme de la SRC, ces territoires pâtissent de discours stigmatisant et de pratiques évaluatives punitives (austérité budgétaire, licenciement des personnels non enseignants, interdiction du droit de grève pour les enseignants).

    26Enfin, on observe la présence de ce que nous qualifions de marges de reconquête éducative. Il s’agit d’espaces scolaires à l’interface entre les grands ghettos noirs et les secteurs scolaires centraux qui font l’objet d’une reconquête conduite le plus souvent par des acteurs qui, en prenant le contrôle d’établissements scolaires, souhaitent assurer les conditions d’une reconquête immobilière. Au premier rang de ces acteurs figurent les universités de la ville qui agissent comme des opérateurs économiques et immobiliers dans le développement de projets urbains dans les marges ouest (Drexell University et University of Pennsylvania à West Philadelphia) et nord (Temple University à North Philadelphia) et comme des opérateurs éducatifs (promoteurs de programmes d’innovation pédagogique). Localisées dans des quartiers en transition ethnique à l’interface entre le centre-ville et les ghettos, ces universités associent la reconquête des écoles en difficulté par « charterisation » à la reconquête immobilière des quartiers pauvres. Les universités de Drexel et UPenn à West Philadelphia ont acquis des charter schools afin d’y développer des programmes d’excellence servant les enfants du personnel, renforçant l’attractivité du campus auprès d’une population de cadres supérieurs.

    Conclusion : du renforcement des inégalités scolaires à l’injustice éducative

    27L’exemple philadelphien est symptomatique des changements des politiques éducatives en cours aux États-Unis et interroge les inégalités scolaires de deux façons. Premièrement, il met en lumière les processus à l’œuvre dans l’application de normes éducatives et leurs effets en termes de re-stratification de l’espace scolaire. La nouveauté réside moins dans le renforcement d’inégalités anciennes que dans l’inégale répartition spatiale des ressources éducatives (budgets, enseignants qualifiés, programmes périscolaires, personnels d’encadrement, moyens matériels) érigée en norme gestionnaire qui induit deux changements. D’abord, la compétition comme norme et valeur : l’accès aux ressources ne repose plus sur une répartition spatiale des dotations mais sur leur mise en compétition par une agence ad hoc en fonction de normes évaluatives et punitives. Ensuite, la déconnexion entre les territoires éducatifs et les ressources : la réforme procède à l’évidence d’une déterritorialisation de la question éducative qui déstructure les liens entre écoles et territoire de gestion (secteur de recrutement, quartier) et introduit l’idée (fausse) d’un espace scolaire uniforme et également doté dans lequel la mobilité et le choix facilitent la réussite de tous.

    28Deuxièmement, ces normes et leur lot d’inégalités ne sont pas imposés dans une logique top down et ne sont pas non plus la simple translation de normes supranationales au local. Elles correspondent à des processus complexes hybridant normes internationales, injonctions nationales, pratiques éducatives et projets politiques locaux. Ces processus sont portés par les acteurs locaux (publics, privés, associatifs) dans leur double tentative de transformation de l’espace urbain et du système éducatif. Ces changements ne servent pas seulement la marchandisation de l’éducation dans des contextes d’austérité budgétaire. Ils visent aussi à modifier le sens, les pratiques, les projets et l’imaginaire éducatif dans les villes étasuniennes. L’éducation n’est plus un bien public et n’est pas seulement une marchandise. Elle devient un média indispensable dans la transformation et l’adaptation des métropoles à la compétition économique et un levier des changements sociétaux souhaités par les acteurs en présence. Si l’on suit cette proposition, les changements de l’espace scolaire et leurs inégalités sont coproduits sur le terrain par l’ensemble des acteurs de l’éducation : élus, responsables administratifs, une grande partie des parents d’élèves y compris au sein des minorités, certains syndicats enseignants qui s’alignent sur les critères du marché et ses logiques normatives. Autant d’actes individuels et collectifs, subis ou acceptés comme norme et valeur non questionnables, qui sont au fondement du renforcement des inégalités éducatives appréciées par beaucoup comme inéluctables. L’introduction de normes entrepreneuriales conduit à l’éclatement d’une organisation scolaire héritée de la période des droits civiques et de l’affirmative action et des consensus qui l’ont établi pour donner à lire une aggravation des fractures sociales et interethniques dans lesquelles se renforcent les inégalités éducatives qui prennent dès lors valeur d’injustice socio-spatiale.

    Bibliographie

    Des DOI sont automatiquement ajoutés aux références bibliographiques par Bilbo, l’outil d’annotation bibliographique d’OpenEdition. Ces références bibliographiques peuvent être téléchargées dans les formats APA, Chicago et MLA.

    Format

    • APA
    • Chicago
    • MLA
    Apple, M. (2012). Ideology and Curriculum (1–). Routledge. https://doi.org/10.4324/9780203129753
    Bloch, M. N., Holmlund, K., Moqvist, I., & Popkewitz, T. S. (Eds.). (2003). Governing Children, Families, and Education (1–). Palgrave Macmillan US. https://doi.org/10.1007/978-1-137-08023-3
    Brenner, N., & Theodore, N. (2002). Cities and the Geographies of "Actually Existing Neoliberalism". In Antipode (Vols. 34, Issues 3, pp. 349-379). Wiley. https://doi.org/10.1111/1467-8330.00246
    Felouzis, G., Maroy, C., & van Zanten, A. (2013). Les marchés scolaires (1–). Presses Universitaires de France. https://doi.org/10.3917/puf.felou.2013.01
    Hackworth, J. (2013). The Neoliberal City (1–). Cornell University Press. https://doi.org/10.7591/9780801461590
    HANKINS, K. B., & MARTIN, D. G. (2006). Charter Schools and Urban Regimes in Neoliberal Context: Making Workers and New Spaces in Metropolitan Atlanta. In International Journal of Urban and Regional Research (Vols. 30, Issues 3, pp. 528-547). Wiley. https://doi.org/10.1111/j.1468-2427.2006.00678.x
    Lipman, P. (2004). High Stakes Education (1–). Routledge. https://doi.org/10.4324/9780203465509
    Lipman, P. (2015). Urban Education Policy under Obama. In Journal of Urban Affairs (Vols. 37, Issue 1, pp. 57-61). Informa UK Limited. https://doi.org/10.1111/juaf.12163
    Séchet, R., & Veschambre, V. (Eds.). (2006). Penser et faire la géographie sociale (1–). Presses universitaires de Rennes. https://doi.org/10.4000/books.pur.362
    Spring, J. (2018). The American School (1–). Routledge. https://doi.org/10.4324/9781315145136
    Taylor, C. (2009). Towards a geography of education. In Oxford Review of Education (Vols. 35, Issues 5, pp. 651-669). Informa UK Limited. https://doi.org/10.1080/03054980903216358
    Apple, Michael. Ideology and Curriculum. []. Routledge, 2012. https://doi.org/10.4324/9780203129753.
    Bloch, Marianne N., Kerstin Holmlund, Ingeborg Moqvist, and Thomas S. Popkewitz, eds. Governing Children, Families, and Education. []. Palgrave Macmillan US, 2003. https://doi.org/10.1007/978-1-137-08023-3.
    Brenner, Neil, and Nik Theodore. “Cities and the Geographies of ‘Actually Existing Neoliberalism’”. Antipode. Wiley, June 2002. https://doi.org/10.1111/1467-8330.00246.
    Felouzis, Georges, Christian Maroy, and Agnès van Zanten. “Les marchés Scolaires”. []. Presses Universitaires de France, 2013. https://doi.org/10.3917/puf.felou.2013.01.
    Hackworth, Jason. “The Neoliberal City”. []. Cornell University Press, January 1, 2013. https://doi.org/10.7591/9780801461590.
    HANKINS, KATHERINE B., and DEBORAH G. MARTIN. “Charter Schools and Urban Regimes in Neoliberal Context: Making Workers and New Spaces in Metropolitan Atlanta”. International Journal of Urban and Regional Research. Wiley, September 2006. https://doi.org/10.1111/j.1468-2427.2006.00678.x.
    Lipman, Pauline. High Stakes Education. []. Routledge, 2004. https://doi.org/10.4324/9780203465509.
    Lipman, Pauline. “Urban Education Policy under Obama”. Journal of Urban Affairs. Informa UK Limited, February 2015. https://doi.org/10.1111/juaf.12163.
    Séchet, Raymonde, and Vincent Veschambre, eds. Penser Et Faire La géographie Sociale. []. Presses universitaires de Rennes, 2006. https://doi.org/10.4000/books.pur.362.
    Spring, Joel. The American School. []. Routledge, 2018. https://doi.org/10.4324/9781315145136.
    Taylor, Chris. “Towards a Geography of Education”. Oxford Review of Education. Informa UK Limited, October 2009. https://doi.org/10.1080/03054980903216358.
    Apple, Michael. Ideology and Curriculum. [], Routledge, 2012. Crossref, https://doi.org/10.4324/9780203129753.
    Bloch, Marianne N., et al., editors. Governing Children, Families, and Education. [], Palgrave Macmillan US, 2003. Crossref, https://doi.org/10.1007/978-1-137-08023-3.
    Brenner, Neil, and Nik Theodore. “Cities and the Geographies of ‘Actually Existing Neoliberalism’”. Antipode, vol. 34, no. 3, Wiley, June 2002, pp. 349-7. Crossref, https://doi.org/10.1111/1467-8330.00246.
    Felouzis, Georges, et al. Les marchés Scolaires. [], Presses Universitaires de France, 2013. Crossref, https://doi.org/10.3917/puf.felou.2013.01.
    Hackworth, Jason. The Neoliberal City. [], Cornell University Press, 1 Jan. 2013. Crossref, https://doi.org/10.7591/9780801461590.
    HANKINS, KATHERINE B., and DEBORAH G. MARTIN. “Charter Schools and Urban Regimes in Neoliberal Context: Making Workers and New Spaces in Metropolitan Atlanta”. International Journal of Urban and Regional Research, vol. 30, no. 3, Wiley, Sept. 2006, pp. 528-47. Crossref, https://doi.org/10.1111/j.1468-2427.2006.00678.x.
    Lipman, Pauline. High Stakes Education. [], Routledge, 2004. Crossref, https://doi.org/10.4324/9780203465509.
    Lipman, Pauline. “Urban Education Policy under Obama”. Journal of Urban Affairs, vol. 37, no. 1, Informa UK Limited, Feb. 2015, pp. 57-61. Crossref, https://doi.org/10.1111/juaf.12163.
    Séchet, Raymonde, and Vincent Veschambre, editors. Penser Et Faire La géographie Sociale. [], Presses universitaires de Rennes, 2006. Crossref, https://doi.org/10.4000/books.pur.362.
    Spring, Joel. The American School. [], Routledge, 2018. Crossref, https://doi.org/10.4324/9781315145136.
    Taylor, Chris. “Towards a Geography of Education”. Oxford Review of Education, vol. 35, no. 5, Informa UK Limited, Oct. 2009, pp. 651-69. Crossref, https://doi.org/10.1080/03054980903216358.

    Cette bibliographie a été enrichie de toutes les références bibliographiques automatiquement générées par Bilbo en utilisant Crossref.

    Bibliographie

    Apple Michael W., 2001, « Comparing neoliberal projects and inequality in education », Comparative Éducation, no 4, vol. 37, p. 409-423.

    10.4324/9780203129753 :

    Apple Michael W., 2004, Ideology and Curriculum, New York, Routledge.

    10.1007/978-1-137-08023-3 :

    Bloch Marianne, Holmlund Kerstin et Moqvist Ingeborg et al., 2003, Governing children, families and education : Restructuring the welfare state, New York, Palgrave Macmillan.

    10.1111/1467-8330.00246 :

    Brenner Neil et Theodore Nik, 2002, « Cities and the Geographies of “Actually Existing Neoliberalism” », Antipode, no 3, vol. 34, p. 334-379.

    Brenner Neil, Peck Jamie et Theodore Nik, 2010, « Variegated neoliberalization : geographies, modalities, pathways », Global Networks, no 10, 2, p. 182-222.

    Buléon Pascal et Di Méo Guy, 2005, L’espace social : Lecture géographique des sociétés, Paris, Armand Colin.

    Bulkley Katrina et Henig Jeffrey, 2010, Between Public and Private : Politics, Governance, and the New Portfolio Models for Urban School Reform, Cambridge (Mass.), Harvard Éducation Press.

    Cucchiara Maya B., 2013, Marketing schools, marketing cities : who wins and who loses when schools become urban amenities, Chicago/Londres, University of Chicago Press.

    10.3917/puf.felou.2013.01 :

    Felouzis Georges, Maroy Christian et van Zanten Agnès, 2013, Les marchés scolaires : sociologie d’une politique publique d’éducation, Paris, PUF.

    Giband David et Nafaa Nora, 2016, « Obama et l’école : néolibéralisation et marchandisation des districts scolaires urbains », Urbanité, Les villes américaines de l’ère Obama, quels héritages ?, [http://www.revue-urbanites.fr/les-villes-americaines-obama-et-lecole- neoliberalisation-et-marchandisation-des-districts-scolaires-urbains/], (consulté le 20 mars 2018).

    Giband David, 2003, « L’école et la métropole américaine à l’épreuve de la gouvernance. Nouvelles minorités, pratiques de l’espace scolaire et fragmentation métropolitaine », Annales de géographie, vol. 112, p. 382-401.

    Giband David, 2006, Géographie sociale des États-Unis, Paris, Ellipses.

    10.7591/9780801461590 :

    Hackworth Jason, 2007, The neoliberal city : Governance, ideology, and development in American urbanism, Ithaca, Londres, Cornell University Press.

    10.1111/j.1468-2427.2006.00678.x :

    Hankins Katherine B. et Martin Deborah G., 2006, « Charter schools and urban regimes in neoliberal context : Making workers and new spaces in metropolitan Atlanta », International Journal of Urban and Regional Research, no 3, vol. 30, p. 528-547.

    Harvey David, 2014, Brève histoire du néolibéralisme, Paris, Les prairies ordinaires.

    10.4324/9780203465509 :

    Lipman Pauline, 2004, High stakes education : Inequality, globalization, and urban school reform, New York/Londres, Routledge Falmer.

    Lipman Pauline, 2011, The new political economy of urban education : Neoliberalism, race, and the right to the city, New York, Routledge.

    10.1111/juaf.12163 :

    Lipman Pauline, 2015, « Urban education policy under Obama », Journal of Urban Affairs, no 37, 57-61.

    Mitchell Katharine et Lizotte Chris, 2016, « Governing through failure. Neoliberalism, philanthropy and education reform in Seattle », in Michelle Brady et Randy K. Lippert (ed.), Governing practices, neoliberalism and the ethnographic imaginary, Toronto, Toronto University Press.

    Ossen Mark, Code John et O’neill Anne-Marie, 2004, Éducation policy : globalization, citizenship and democracy, Londres, SAGE Publication.

    10.4000/books.pur.362 :

    Séchet Raymonde et Veschambre Vincent, 2006, Penser et faire de la géographie sociale : contributions à une épistémologie de la géographie sociale, Rennes, PUR.

    10.4324/9781315145136 :

    Spring Joel H., 2008, The American School, From the Puritans to the No Child Left Behind, Boston, Burr Ridge, Dubuque, Éditions McGraw-Hill.

    10.1080/03054980903216358 :

    Taylor Chris, 2009, « Towards a geography of education », Oxford Review of Éducation, no 5, vol. 35, p. 651-669.

    Wilson David, 2004, « Towards a contingent neoliberalism », Urban geography, no 8, vol. 25, p. 771-783.

    Notes de bas de page

    1  Au titre de la loi No Child Left Behind, 2001.

    2  Notamment le programme de dotation financière Race to the Top, inscrit dans la loi American Recovery and Reinvestment Act de 2009.

    3  Entretiens semi-directifs avec des acteurs publics (responsables administratifs, élus, gestionnaires, urbanistes), associatifs (associations de parents d’élèves, associations communautaires, religieuses), syndicats d’enseignants et journalistes spécialisés ; et observations (réunions publiques, assemblées générales).

    4  The Gates Foundation, Walton Family Foundation, Broad Foundation.

    5  Dont le busing qui consiste en une affectation des élèves dans des écoles hors de leur quartier afin d’encourager la mixité raciale en affrétant des bus scolaires.

    6  Autonomisation et débrouille.

    7  « aucun-enfant-laissé-pour-compte ».

    8  Évaluation.

    9  Deux districts scolaires également marqués par l’ampleur de la crise scolaire et la mise en œuvre de politiques expérimentales, pour Chicago voir Lipman (2004) et pour la Nouvelle-Orléans voir Bulkley et Henig (2010).

    10  For profit Education Management Operators : opérateurs privés de gestion de l’éducation.

    11  Il s’agit de tests standardisés proposés par le gouvernement fédéral en lecture, mathématique et sciences.

    12  Littéralement « écoles en responsabilisation ».

    13  Constituée par 5 membres, 3 nommés par le gouverneur de l’État et 2 par le maire de Philadelphie.

    14  Source : PSP, 2014, One city, two systems of schools, [http://www.philaschoolpartnership.org/app/uploads/2014/12/PSAP-Position-Paper-One-City-Two-Systems.pdf].

    15  Magnet schools : écoles publiques proposant des programmes sélectifs sur dossier ; Charter schools : écoles publiques dont la gestion est déléguée à un organisme tiers et affranchies d’une partie des régulations imposées aux districts urbains ; Renaissance schools : écoles publiques en dessous des performances requises et intégrées aux plans de reconversion scolaire des districts scolaires urbains par la charterisation ; Innovation schools : écoles faisant partie des plans de renaissance schools mais dont la gestion est confiée à un EMO comme les charter schools ; Contract schools : écoles publiques en contrat avec le bureau d’éducation mais non soumise à l’autorité du district scolaire local.

    16  Entre majorité blanche et minorités noire et hispanique.

    17  Soit 1/3 des effectifs scolaires du district de Philadelphie.

    18  Faute de financement, de nombreux établissements scolaires sont dans l’incapacité de fournir des manuels et du matériel de base (tableaux, tables, chaises, cahiers).

    19  En 2015, un opérateur de Charter School à North Philadelphia a défrayé la chronique en fermant sans préavis sa charter school (Scholar Academy) et en redéployant ses actifs dans le district scolaire de Memphis.

    20  4 Innovation High School ont été labellisées par le district.

    Auteurs

    • Nora Nafaa
      Doctorante en géographie, membre de l’UMR 5281 ART-Dev de l’université de Perpignan Via Domitia. Elle travaille sur les inégalités scolaires et sociales dans les villes états-uniennes et réalise un travail de doctorat sur les politiques éducatives urbaines dans un contexte de néolibéralisation de l’éducation à Philadelphie et Atlanta.
    • David Giband
      Professeur des universités en urbanisme et aménagement du territoire, membre de l’UMR 5281 ART-Dev de l’université de Perpignan Via Domitia. Il travaille sur les inégalités sociales et scolaires ainsi que sur les politiques éducatives dans les villes étasuniennes et européennes. Ses travaux interrogent les réformes éducatives ainsi que la construction des territoires éducatifs.
    Précédent Suivant
    Table des matières

    Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

    Voir plus de livres
    Les règles de l'entraide

    Les règles de l'entraide

    Sociologie d'une pratique sociale

    Ségolène Petite

    2009

    La politique de la stupéfaction

    La politique de la stupéfaction

    Pérennité de la prohibition des drogues

    Nicolas Carrier

    2008

    L'école et ses stratèges

    L'école et ses stratèges

    Les pratiques éducatives des nouvelles classes supérieures

    Philippe Gombert

    2012

    Le passage à l'écriture

    Le passage à l'écriture

    Mutation culturelle et devenir des savoirs dans une société de l'oralité

    Geoffroy A. Dominique Botoyiyê

    2010

    Actualité de Basil Bernstein

    Actualité de Basil Bernstein

    Savoir, pédagogie et société

    Daniel Frandji et Philippe Vitale (dir.)

    2008

    Une vie à soi

    Une vie à soi

    Nouvelles formes de solitude au féminin

    Erika Flahaut

    2009

    Les étudiants en France

    Les étudiants en France

    Histoire et sociologie d'une nouvelle jeunesse

    Louis Gruel, Olivier Galland et Guillaume Houzel (dir.)

    2009

    Qu'est-ce que négocier ?

    Qu'est-ce que négocier ?

    Sociologie du compromis et de l'action réciproque

    Christian Thuderoz

    2010

    La parole ou la vie

    La parole ou la vie

    Valeur et dette en Mélanésie

    Charles Illouz

    2010

    Tally's Corner

    Tally's Corner

    Les Noirs du coin de la rue

    Elliot Liebow

    2011

    Les classes populaires à l'école

    Les classes populaires à l'école

    La rencontre ambivalente entre deux cultures à légitimité inégale

    Christophe Delay

    2011

    Cultures enfantines

    Cultures enfantines

    Universalité et diversité

    Andy Arleo et Julie Delalande (dir.)

    2011

    Voir plus de livres
    1 / 12
    Les règles de l'entraide

    Les règles de l'entraide

    Sociologie d'une pratique sociale

    Ségolène Petite

    2009

    La politique de la stupéfaction

    La politique de la stupéfaction

    Pérennité de la prohibition des drogues

    Nicolas Carrier

    2008

    L'école et ses stratèges

    L'école et ses stratèges

    Les pratiques éducatives des nouvelles classes supérieures

    Philippe Gombert

    2012

    Le passage à l'écriture

    Le passage à l'écriture

    Mutation culturelle et devenir des savoirs dans une société de l'oralité

    Geoffroy A. Dominique Botoyiyê

    2010

    Actualité de Basil Bernstein

    Actualité de Basil Bernstein

    Savoir, pédagogie et société

    Daniel Frandji et Philippe Vitale (dir.)

    2008

    Une vie à soi

    Une vie à soi

    Nouvelles formes de solitude au féminin

    Erika Flahaut

    2009

    Les étudiants en France

    Les étudiants en France

    Histoire et sociologie d'une nouvelle jeunesse

    Louis Gruel, Olivier Galland et Guillaume Houzel (dir.)

    2009

    Qu'est-ce que négocier ?

    Qu'est-ce que négocier ?

    Sociologie du compromis et de l'action réciproque

    Christian Thuderoz

    2010

    La parole ou la vie

    La parole ou la vie

    Valeur et dette en Mélanésie

    Charles Illouz

    2010

    Tally's Corner

    Tally's Corner

    Les Noirs du coin de la rue

    Elliot Liebow

    2011

    Les classes populaires à l'école

    Les classes populaires à l'école

    La rencontre ambivalente entre deux cultures à légitimité inégale

    Christophe Delay

    2011

    Cultures enfantines

    Cultures enfantines

    Universalité et diversité

    Andy Arleo et Julie Delalande (dir.)

    2011

    Voir plus de chapitres

    Géographie sociale ou géographie postmoderne ? Les formations sociospatiales plutôt que la communauté dans l’étude des dynamiques métropolitaines américaines

    David Giband

    Voir plus de chapitres

    Géographie sociale ou géographie postmoderne ? Les formations sociospatiales plutôt que la communauté dans l’étude des dynamiques métropolitaines américaines

    David Giband

    Accès ouvert

    Accès ouvert freemium

    ePub

    PDF

    PDF du chapitre

    Suggérer l’acquisition à votre bibliothèque

    Acheter

    Édition imprimée

    Presses universitaires de Rennes
    • amazon.fr
    • decitre.fr
    • mollat.com
    • leslibraires.fr
    • placedeslibraires.fr
    ePub / PDF

    1  Au titre de la loi No Child Left Behind, 2001.

    2  Notamment le programme de dotation financière Race to the Top, inscrit dans la loi American Recovery and Reinvestment Act de 2009.

    3  Entretiens semi-directifs avec des acteurs publics (responsables administratifs, élus, gestionnaires, urbanistes), associatifs (associations de parents d’élèves, associations communautaires, religieuses), syndicats d’enseignants et journalistes spécialisés ; et observations (réunions publiques, assemblées générales).

    4  The Gates Foundation, Walton Family Foundation, Broad Foundation.

    5  Dont le busing qui consiste en une affectation des élèves dans des écoles hors de leur quartier afin d’encourager la mixité raciale en affrétant des bus scolaires.

    6  Autonomisation et débrouille.

    7  « aucun-enfant-laissé-pour-compte ».

    8  Évaluation.

    9  Deux districts scolaires également marqués par l’ampleur de la crise scolaire et la mise en œuvre de politiques expérimentales, pour Chicago voir Lipman (2004) et pour la Nouvelle-Orléans voir Bulkley et Henig (2010).

    10  For profit Education Management Operators : opérateurs privés de gestion de l’éducation.

    11  Il s’agit de tests standardisés proposés par le gouvernement fédéral en lecture, mathématique et sciences.

    12  Littéralement « écoles en responsabilisation ».

    13  Constituée par 5 membres, 3 nommés par le gouverneur de l’État et 2 par le maire de Philadelphie.

    14  Source : PSP, 2014, One city, two systems of schools, [http://www.philaschoolpartnership.org/app/uploads/2014/12/PSAP-Position-Paper-One-City-Two-Systems.pdf].

    15  Magnet schools : écoles publiques proposant des programmes sélectifs sur dossier ; Charter schools : écoles publiques dont la gestion est déléguée à un organisme tiers et affranchies d’une partie des régulations imposées aux districts urbains ; Renaissance schools : écoles publiques en dessous des performances requises et intégrées aux plans de reconversion scolaire des districts scolaires urbains par la charterisation ; Innovation schools : écoles faisant partie des plans de renaissance schools mais dont la gestion est confiée à un EMO comme les charter schools ; Contract schools : écoles publiques en contrat avec le bureau d’éducation mais non soumise à l’autorité du district scolaire local.

    16  Entre majorité blanche et minorités noire et hispanique.

    17  Soit 1/3 des effectifs scolaires du district de Philadelphie.

    18  Faute de financement, de nombreux établissements scolaires sont dans l’incapacité de fournir des manuels et du matériel de base (tableaux, tables, chaises, cahiers).

    19  En 2015, un opérateur de Charter School à North Philadelphia a défrayé la chronique en fermant sans préavis sa charter school (Scholar Academy) et en redéployant ses actifs dans le district scolaire de Memphis.

    20  4 Innovation High School ont été labellisées par le district.

    Les espaces de construction des inégalités éducatives

    X Facebook Email

    Les espaces de construction des inégalités éducatives

    Ce livre est cité par

    • Caro, Patrice. (2020) Territorialization of Education. DOI: 10.1002/9781119751755.ch11
    • Danic, Isabelle. Keerle, Régis. Thémines, Jean-François. (2021) Adolescentes et adolescents des villes et des champs. DOI: 10.4000/books.pur.147687
    • Danic, Isabelle. Fontar, Barbara. Grimault-Leprince, Agnès. (2021) Adolescentes et adolescents des villes et des champs. DOI: 10.4000/books.pur.147742
    • Thémines, Jean-François. Guern, Anne-Laure Le. (2020) Images d’espaces / espaces en images. Géocarrefour, 94. DOI: 10.4000/geocarrefour.14266
    • Goudeau, Sébastien. Sanrey, Camille. Stanczak, Arnaud. Manstead, Antony. Darnon, Céline. (2021) Why lockdown and distance learning during the COVID-19 pandemic are likely to increase the social class achievement gap. Nature Human Behaviour, 5. DOI: 10.1038/s41562-021-01212-7
    • Checcaglini, Agnès. Caro, Patrice. (2021) Métropolisation, mobilités et décrochage scolaire chez les jeunes. Revue française de pédagogie. DOI: 10.4000/rfp.10434
    • Danic, Isabelle. Fontar, Barbara. Grimault-Leprince, Agnès. (2021) Social and Local Inequalities in Leisure. Adolescents’ Experiences in Their Living Space. Youth and Globalization, 3. DOI: 10.1163/25895745-03010007
    • Fontar, Barbara. Le Mentec, Mickaël. (2020) Les pratiques vidéoludiques des adolescents de 13-15 ans. Réseaux, N° 222. DOI: 10.3917/res.222.0079

    Les espaces de construction des inégalités éducatives

    Ce livre est diffusé en accès ouvert freemium. L’accès à la lecture en ligne est disponible. L’accès aux versions PDF et ePub est réservé aux bibliothèques l’ayant acquis. Vous pouvez vous connecter à votre bibliothèque à l’adresse suivante : https://freemium.openedition.org/oebooks

    Suggérer l’acquisition à votre bibliothèque Acheter ce livre aux formats PDF et ePub

    Si vous avez des questions, vous pouvez nous écrire à access[at]openedition.org

    Les espaces de construction des inégalités éducatives

    Vérifiez si votre bibliothèque a déjà acquis ce livre : authentifiez-vous à OpenEdition Freemium for Books.

    Vous pouvez suggérer à votre bibliothèque d’acquérir un ou plusieurs livres publiés sur OpenEdition Books. N’hésitez pas à lui indiquer nos coordonnées : access[at]openedition.org

    Vous pouvez également nous indiquer, à l’aide du formulaire suivant, les coordonnées de votre bibliothèque afin que nous la contactions pour lui suggérer l’achat de ce livre. Les champs suivis de (*) sont obligatoires.

    Veuillez, s’il vous plaît, remplir tous les champs.

    La syntaxe de l’email est incorrecte.

    Référence numérique du chapitre

    Format

    Nafaa, N., & Giband, D. (2019). L’école à l’école du néolibéralisme : réforme scolaire, bonnes pratiques et inégalités à Philadelphie. In I. Danic, B. Fontar, A. Grimault-Leprince, M. Le Mentec, & O. David (éds.), Les espaces de construction des inégalités éducatives (1‑). Presses universitaires de Rennes. https://doi.org/10.4000/books.pur.150827
    Nafaa, Nora, et David Giband. « L’école à l’école du néolibéralisme : réforme scolaire, bonnes pratiques et inégalités à Philadelphie ». In Les espaces de construction des inégalités éducatives, édité par Isabelle Danic, Barbara Fontar, Agnès Grimault-Leprince, Mickaël Le Mentec, et Olivier David. Rennes: Presses universitaires de Rennes, 2019. https://doi.org/10.4000/books.pur.150827.
    Nafaa, Nora, et David Giband. « L’école à l’école du néolibéralisme : réforme scolaire, bonnes pratiques et inégalités à Philadelphie ». Les espaces de construction des inégalités éducatives, édité par Isabelle Danic et al., Presses universitaires de Rennes, 2019, https://doi.org/10.4000/books.pur.150827.

    Référence numérique du livre

    Format

    Danic, I., Fontar, B., Grimault-Leprince, A., Le Mentec, M., & David, O. (éds.). (2019). Les espaces de construction des inégalités éducatives (1‑). Presses universitaires de Rennes. https://doi.org/10.4000/books.pur.150687
    Danic, Isabelle, Barbara Fontar, Agnès Grimault-Leprince, Mickaël Le Mentec, et Olivier David, éd. Les espaces de construction des inégalités éducatives. Rennes: Presses universitaires de Rennes, 2019. https://doi.org/10.4000/books.pur.150687.
    Danic, Isabelle, et al., éditeurs. Les espaces de construction des inégalités éducatives. Presses universitaires de Rennes, 2019, https://doi.org/10.4000/books.pur.150687.
    Compatible avec Zotero Zotero

    1 / 3

    Presses universitaires de Rennes

    Presses universitaires de Rennes

    • Mentions légales
    • Plan du site
    • Se connecter

    Suivez-nous

    • Flux RSS

    URL : http://www.pur-editions.fr

    Email : pur@univ-rennes2.fr

    Adresse :

    2, avenue Gaston Berger

    CS 24307

    F-35044

    Rennes

    France

    OpenEdition
    • Candidater à OpenEdition Books
    • Connaître le programme OpenEdition Freemium
    • Commander des livres
    • S’abonner à la lettre d’OpenEdition
    • CGU d’OpenEdition Books
    • Accessibilité : partiellement conforme
    • Données personnelles
    • Gestion des cookies
    • Système de signalement