8. Des défaites indolores ?
Les rapports ambivalents de la gauche radicale française aux résultats électoraux
p. 153-173
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« Nous comprenons que des fois nous perdions. Nous perdons si souvent. Mais nous avons toujours fait avancer des idées, nous n’attendons qu’une chose : que l’on respecte nos drapeaux, que l’on respecte notre parole, que l’on nous respecte dans notre identité d’hommes et de femmes de gauche. »
Discours de Jean-Luc Mélenchon, Meeting pour les élections européennes, Ludres (Meurthe-et-Moselle), 13 mai 2014
1Les partis de la gauche radicale française, définis ici comme ceux revendiquant un positionnement politique antilibéral à la gauche de la social-démocratie, entretiennent un rapport ambivalent aux élections. Ils y participent de manière régulière, et même routinisée1, tout en menant une critique, souvent virulente, du système institutionnel auquel ils participent2. Si cette tension entre un certain « pragmatisme électoral » et le refus de transiger avec les « grands principes » est caractéristique des organisations issues du mouvement ouvrier3, elle apparaît exacerbée, dans le cas de la gauche radicale française, par sa relative marginalité politique. Pour les partis pouvant y être rattachés, la défaite électorale, entendue comme l’insuccès à obtenir le(s) mandat(s) mis en compétition, constitue l’issue la plus probable d’une participation électorale, particulièrement lors des scrutins uninominaux. Nous le verrons, elle est même souvent anticipée par leurs militants en amont des élections.
2Ce paradoxe apparent invite à s’interroger sur le sens que les collectifs partisans de la gauche radicale donnent à leur participation aux élections et au « verdict des urnes ». Plus spécifiquement, dans le cadre de ce chapitre, nous cherchons à comprendre les modalités potentiellement différenciées avec lesquelles ils appréhendent et gèrent en leur sein la confrontation attendue à la défaite électorale. Au niveau empirique, notre propos s’appuie sur l’étude comparative de l’investissement de l’élection présidentielle de 2012 par les quatre principaux partis de la gauche radicale française de l’époque : le Parti communiste français (PCF), le Parti de gauche (PG), le Nouveau parti anticapitaliste (NPA) et Lutte ouvrière (LO). Il mobilise des données récoltées dans le cadre de deux recherches doctorales distinctes, mais traitant d’objets similaires. La première, achevée en 20154, portait sur la dynamique des interactions entre les différents partis qui participent à produire la gauche radicale française comme un espace relativement autonome du champ politique français, aussi bien à l’échelle nationale que locale (notamment dans le département de la Meurthe-et-Moselle). Quant à la seconde, encore en cours5, elle s’intéresse aux relations et modalités d’organisation des deux principaux partis constitutifs du Front de gauche (FG) – le PCF et le PG – dans trois départements aux caractéristiques distinctes (Ille-et-Vilaine, Loiret, Val-de-Marne). Concrètement, les enquêtes menées dans le cadre de ces recherches ont permis de récolter trois types de données sur lesquelles s’appuie l’analyse proposée dans ce chapitre : 1) des entretiens semi-directifs avec des cadres (nationaux et locaux) et des militants du PCF, du PG et du NPA ; 2) des articles issus du dépouillement systématique des principaux titres de la presse partisane de la gauche radicale : les hebdomadaires du PCF, Communistes (Com), du PG, À Gauche (AG), du NPA, Tout est à nous ! (TEAN) et de LO, Lutte ouvrière (LO), complété pour ce dernier parti par une revue théorique, Lutte de classe (LC) ; 3) des observations directes réalisées dans les différents partis étudiés (meetings, soirées électorales, congrès, conférences nationales et conseils nationaux). Par leur quantité et leur diversité, les sources recueillies nous paraissent offrir la possibilité de saisir et de comparer les interprétations partisanes des résultats de l’élection présidentielle de 2012 qui s’est soldée par une défaite dès le premier tour pour les trois candidats des partis étudiés : Nathalie Arthaud (LO), Jean-Luc Mélenchon (FG) et Philippe Poutou (NPA).
Tableau 1. Résultats des candidats de la gauche radicale au premier tour de l’élection présidentielle le 22 avril 2012

3L’hypothèse au cœur de notre chapitre est que les modalités de réception de la défaite au sein du PCF, du PG, du NPA et de LO varient selon deux facteurs complémentaires.
4Premièrement, selon la place accordée à la compétition électorale dans leurs cultures partisanes respectives6. Les partis politiques sont ici pensés comme des « ateliers d’identités et d’imaginaires collectifs7 » qui donnent sens à l’activité politique et structurent les représentations et pratiques de ses membres. Comme le souligne Frédéric Sawicki, « les stratégies et les manières de faire de la politique des entrepreneurs politiques ne s’expliquent pas uniquement comme le produit de la quête raisonnée et systématique du pouvoir, mais sont conditionnées par des cadres cognitifs et normatifs objectivés dans des règles et un langage8 ». Pour le dire autrement, la poursuite d’un mandat électif n’est qu’un moteur de l’activisme politique parmi d’autres, dont l’importance varie d’un parti à un autre, selon les représentations du collectif, de sa nature et des desseins s’y étant imposés comme dominants9. Les rapports à la compétition électorale, et donc à la défaite, dépendent largement des cultures partisanes propres à chaque organisation, et parfois très hétérogènes entre des groupements partageant pourtant une certaine proximité idéologique.
5Deuxièmement, les modalités de réception de la défaite peuvent également varier de manière plus conjoncturelle selon les profits extra-électoraux escomptés d’une participation à une élection. Les positions de pouvoir ne sont pas les seuls trophées mis en compétition lors d’un scrutin. L’accès à des dispositifs institutionnalisés de propagande politique, notamment à la télévision et dans l’espace public, ou encore l’obtention de financements publics, peuvent aussi constituer des incitations significatives pour des partis considérés comme des outsiders politiques, y compris pour ceux entretenant par ailleurs un rapport critique aux élections. Ne pas investir de candidats, c’est prendre le risque de se priver des différentes ressources matérielles mais surtout symboliques qui y sont mises en jeu. La campagne électorale peut alors devenir pour certains d’entre eux plus importante que l’issue même du scrutin.
6Pour saisir au mieux les rapports que les partis de la gauche radicale française entretiennent à la défaite électorale, nous avons fait le choix d’organiser notre propos en trois parties, correspondant à trois phases successives du processus électoral. La première partie se concentre sur l’amont de l’élection, et plus spécifiquement sur les débats se développant au sein du PCF, du PG, du NPA et de LO dans l’année précédant l’élection présidentielle de 2012, sur l’opportunité d’y participer. La deuxième partie porte sur le travail de définition des objectifs électoraux par chacun des partis étudiés, et sur leur réévaluation dans la dynamique de la campagne électorale. Enfin, la troisième et dernière partie analyse les effets de la défaite advenue sur les collectifs partisans.
Faut-il participer à l’élection présidentielle ?
7Faire le choix de participer à une élection implique pour une organisation politique de se conformer à un ensemble de règles, juridiques ou symboliques, régissant cette procédure d’allocation des positions de pouvoir politique10. Cette nécessaire conformation contraint le travail de formalisation d’une offre électorale. Elle n’est cependant nullement synonyme d’une uniformisation des pratiques et représentations de l’élection. Si elles décident toutes d’investir un candidat pour l’élection présidentielle de 2012, les principales formations de la gauche radicale ne le font ainsi ni de la même manière ni pour les mêmes raisons.
Des conceptions différenciées de la participation aux élections
8Bien qu’ils occupent des positions proches dans l’espace politique, les partis de gauche radicale française n’entretiennent pas tous un rapport identique aux élections. Héritiers des premiers mouvements ouvriers à avoir investi la compétition électorale dès le xixe, le PCF et le PG (issu d’une scission du Parti socialiste en 2008) continuent, malgré leurs critiques, à les appréhender comme un mode d’accès légitime à des positions de pouvoir politique11. Ils y présentent presque systématiquement des candidats, à tous les échelons. Pour reprendre les analyses de Michel Offerlé, les deux principales formations constitutives du FG partagent les fondements de « l’activité politique comme activité spécifique », en ce qu’ils s’accordent « sur la nature de la compétition : la dévolution du pouvoir se fait par l’élection, seule démocratique ; la lutte politique est une lutte symbolique qui se fait par des mots12 ».
9Cette adhésion aux principes fondamentaux de la démocratie représentative ne se retrouve pas dans les représentations de l’élection dominantes à LO et au NPA. Dans ces deux partis issus du trotskisme, la disqualification du principe électoral est commune. Elle conduit à une mise à distance des élections et à leur redéfinition comme un simple moment de publicisation de leurs idées :
« Faire de la propagande autour de ces objectifs, les faire partager, ne signifie pas encore avoir la détermination de les imposer. La lutte de classe ne se déroule pas dans le domaine éthéré des idées, mais dans la réalité des rapports de forces. […] Nous mettrons à profit la campagne électorale pour mener une propagande communiste, en accentuant ce que nous avons fait lors des élections précédentes. Il ne s’agit évidemment pas de faire voter sur le communisme, ce qui serait tout simplement stupide. »
« La campagne électorale », LC, 140, décembre 2011.
« À l’occasion des élections nous voulons prolonger les batailles quotidiennes en faisant entendre la voix des exploitéEs et des oppriméEs, du monde du travail, des immigréEs, des femmes, de la jeunesse, de toutes les victimes de l’austérité mise en place par un État soumis aux banques et au patronat, qui utilise le racisme et la xénophobie pour nous diviser. À partir des positions débattues et adoptées par notre parti depuis sa fondation, nous défendons un programme de rupture avec le capitalisme, pour un autre partage des richesses, pour que les salariéeEs et l’ensemble de la population ne paient pas la crise. C’est un programme pour les luttes, pour leur généralisation. C’est la seule voie, face à la crise sociale, politique et écologique qui ne saurait se résoudre dans le cadre d’une alternance, du respect des institutions et de la propriété privée. »
« Déclaration de la Conférence nationale du NPA pour l’élection présidentielle », TEAN, 109, juin 2011.
10C’est par ce rapport instrumental et propagandiste aux élections que les directions successives des deux partis ont justifié le fait d’investir des candidats pour des élections et particulièrement pour la plus médiatisée d’entre elles, l’élection présidentielle. Alors que LO y présente une candidate sans interruption depuis 1974 (Arlette Laguiller à six reprises puis Nathalie Arthaud depuis 2012), le principal initiateur du NPA, la Ligue communiste révolutionnaire (LCR), y avait déjà pris part à quatre reprises avant 2012, en 1969 et en 1974 avec Alain Krivine, puis en 2002 et en 2007 avec Olivier Besancenot. Cette relative banalisation de la participation aux élections n’est cependant pas sans susciter de régulières controverses entre les militants de ces organisations. Si certains, minoritaires, restent résolument hostiles à tout engagement électoral, et prônent un repli sur la seule sphère des luttes sociales13, d’autres, plus nombreux, se contentent de regretter la part croissante prise par les actions électorales dans les activités de leur parti :
« Je pense que c’est une bonne chose de se présenter aux élections pour avoir une tribune pour défendre nos idées. Après, je pense qu’on a quand même beaucoup été bouffés par ça dans les dernières années, ce qui fait, qu’en fait, finalement, ce qui devrait être un outil devient un but, et ça, cela nous parasite beaucoup pour définir un programme, etc. Au bout du compte, là, je suis contente que cela soit terminé. »
Entretien avec Sylvie (militante du NPA, ex-LO), Meurthe-et-Moselle, juin 2012.
Des processus variables de sélection des candidats
11Dans les mois précédant l’élection présidentielle de 2012, les directions des différents partis de la gauche radicale se saisissent de la question de leur participation au scrutin selon les procédures conformes à leurs statuts respectifs. Elles restent cependant extrêmement attentives aux décisions et prises de position des uns et des autres, s’appréhendant tour à tour comme des rivaux ou des partenaires potentiels.
12LO est le premier parti à finaliser son dispositif pour la présidentielle de 2012 en investissant Nathalie Arthaud comme candidate dès décembre 2010. Au nom de la conception propagandiste des élections précédemment évoquée, la direction de LO s’accorde sans véritable débat sur l’importance de disposer pour la septième fois consécutive de son propre candidat à l’élection présidentielle. Elle rejette ensuite sans ambiguïté la proposition d’alliance qui lui est faite par le NPA14. Ce refus n’est pas tant fondé sur des divergences idéologiques que sur des enjeux stratégiques. Considérant l’élection comme une tribune, la direction de LO juge plus efficace de privilégier la « pureté idéologique15 » de la propagande plutôt que de conclure une alliance qui suppose un compromis programmatique et idéologique :
« Pendant la campagne, nous aurons à répondre à la pression unitaire à la gauche de la gauche. Quelle que soit la façon dont cette pression s’exprimera, ce sera toujours pour nous reprocher de ne pas nous être alignés derrière Mélenchon, à l’instar du Parti communiste. Nous y répondrons, bien sûr, et nous dirons ce que nous pensons de leur politique. Mais, plutôt que de polémiquer avec ce qu’ils disent ou ne disent pas, il est plus important de dire et de répéter ce que nous avons à dire nous-mêmes. Contrairement à ce que raconteront les commentateurs, nous ne sommes pas en rivalité sur le terrain électoral. […] Nous avons à expliquer, à commencer par les milieux proches de nous, que seul compte le premier tour, où ceux qui se sentent du camp des travailleurs ont la possibilité d’exprimer leur identité politique. »
« La campagne électorale », LC, 140, décembre 2011.
13Du côté du NPA en revanche, l’annonce par Olivier Besancenot en mai 2011 qu’il n’entend pas se présenter à nouveau ouvre un vif débat sur l’opportunité de participer à l’élection. Le groupe dirigeant du parti se déchire autour de trois scénarios concurrents : l’investiture par le parti d’un autre candidat ; la participation à l’émergence d’une candidature commune aux différents acteurs de la gauche radicale ; le ralliement à la candidate de LO. L’extrême conflictualité des échanges met à jour de profondes divergences entre les responsables du parti quant aux fondements de l’activité politique. Défendant une candidature commune à plusieurs partis de gauche radicale, les segments « unitaires » et une partie de l’ancienne majorité du NPA dénoncent l’« enfermement identitaire16 » de la nouvelle majorité. Celle-ci les accuse en retour de « perdre leur sang-froid » et estime qu’« il faut être présent à cette échéance (présidentielle), se saisir de cette opportunité pour diffuser le plus largement possible nos idées17 ». Selon elle, en cas de non-participation, « la visibilité du NPA serait compromise pendant six mois18 ». Le groupe majoritaire du NPA défend ainsi une candidature du NPA autour d’une conception instrumentale de l’élection tandis que l’opposition « unitaire » défend la nécessité de rechercher des alliances autour d’une candidature commune et entend prendre en compte les contraintes de l’exercice électoral : « Nous ne pouvons contourner le champ politique et social tel qu’il est et refuser de nous doter d’une politique en prise avec la situation et ses contradictions, sauf à cultiver l’isolement comme une vertu et à se contenter d’une orientation atemporelle et propagandiste19. » En juin 2011, la désignation de Philippe Poutou comme candidat par la convention nationale du parti acte la victoire du premier scénario, celui de la candidature autonome, sur les autres. L’investiture de cet ancien militant LO et LCR jusqu’alors largement inconnu est cependant immédiatement présentée comme étant censée réaffirmer l’investissement du NPA dans les luttes sociales et son combat contre la « politique politicienne ». Dès sa nomination, Philippe Poutou est ainsi dépeint comme un « ouvrier candidat » investi dans le mouvement social20.
14Au sein du FG, le processus de désignation d’un candidat commun à l’élection présidentielle se heurte à la faible institutionnalisation de la coalition. Pendant tout le premier semestre 2011, les partis du FG cherchent à trouver un accord pour les élections présidentielle et législatives de 2012. Les procédures de désignation spécifiques à chaque parti sont bricolées en fonction de leurs objectifs respectifs dans la négociation inter-partisane et des rapports de force internes. Du côté du PG, Jean-Luc Mélenchon annonce sa candidature dès le mois de janvier 2011. Le but est alors d’accélérer les négociations au sein du FG et d’obtenir le plus rapidement possible le ralliement de la direction communiste à sa candidature. Au PCF, la procédure de désignation du candidat à la présidentielle est plus tardive et incertaine. Pierre Laurent fait part de sa préférence pour un soutien à Jean-Luc Mélenchon en avril 201121 mais ce n’est qu’en juin 2011 qu’une conférence nationale tranche entre soutien au fondateur du PG dans le cadre du FG, candidature d’André Chassaigne (dans le cadre du FG) et candidature communiste autonome (Emmanuel Dang Tran). Si la première option l’emporte assez nettement parmi les délégués réunis (63,6 % des suffrages), le soutien communiste à la candidature de Jean-Luc Mélenchon ne devient définitif qu’à l’issue d’une primaire fermée, le 18 juin. Une nouvelle fois, celle-ci tourne en la faveur de Jean-Luc Mélenchon (59,12 % des voix) qui devient donc officiellement le candidat de l’ensemble des partis coalisés. Si elle peut paraître surprenante, la procédure de sélection du représentant du PCF à l’élection présidentielle de 2012 répond à un double objectif. Le premier est de respecter la démocratie interne – d’où la primaire – tout en contenant les divisions internes qui le fragilisent alors, d’où la convention nationale organisée en amont. Le second est de renforcer la position des négociateurs communistes dans les discussions au sein du FG. En plus de réguler les résistances intra-partisanes, la consultation des adhérents présente l’avantage de déstabiliser les partenaires de la coalition, en faisant peser le risque d’un rejet « à la base ». En donnant à voir le caractère négocié du soutien communiste à la candidature de Jean-Luc Mélenchon, il s’agit de le présenter comme une importante concession nécessitant une forme de réciprocité22. Concrètement, les dirigeants du PCF entendent montrer que ce soutien à un prix, en l’occurrence un accord de répartition favorable à leur parti pour les élections législatives.
15Tout en partageant un rapport critique aux logiques de fonctionnement de la démocratie représentative, les principaux partis de la gauche radicale française sont porteurs de conceptions très différentes de la compétition électorale. Dans les cultures partisanes de LO et, dans une moindre mesure, du NPA, c’est une représentation propagandiste et instrumentale de la participation électorale qui domine. À l’inverse, au sein des partis du FG, les élections restent perçues comme un moyen légitime, bien qu’imparfait, d’attribution des positions de pouvoir politique. Ces divergences de conception induisent des attentes différentes quant aux gains d’une participation aux élections.
Construction des objectifs électoraux et campagne électorale
16Les campagnes électorales constituent, pour les partis et leurs membres, des séquences d’intensification du travail de mobilisation politique23. Pour certains, elles ont comme objectif principal de permettre de rallier le maximum d’électeurs et, idéalement, d’accéder à des positions de pouvoir politique. Pour d’autres, elles apparaissent comme des fins en soi ; l’objectif n’étant pas tant d’obtenir des mandats que de faire parler de soi et de son offre politique. Bien qu’elles aient en commun une certaine marginalité politique qui leur rend a priori difficile d’envisager une victoire à l’élection présidentielle, LO et NPA d’une part, et FG de l’autre, ne poursuivent pas les mêmes desseins lorsqu’ils se lancent dans l’élection.
Quand participer, c’est déjà gagner
17Aux termes de la loi du 6 novembre 1962 relative à l’élection du président de la République, chaque candidat doit réunir les parrainages d’au moins 500 élus pour pouvoir se présenter effectivement devant les électeurs. Ces parrainages doivent être déposés au Conseil constitutionnel, qui en vérifie le nombre et la validité, avant « le sixième vendredi précédant le premier tour de scrutin » soit, en 2012, avant le 16 mars. Si cette « course aux parrainages » constitue désormais une composante à part entière de la campagne électorale, sa signification varie sensiblement d’un parti à un autre.
18Du côté du FG, l’obtention des parrainages nécessaires ne constitue à aucun moment un véritable enjeu pour le candidat Jean-Luc Mélenchon. Le soutien du PCF et de son maillage d’élus locaux lui offre en effet, dès l’été 2011, l’assurance d’avoir le nombre de soutiens suffisant pour satisfaire les exigences légales. Néanmoins, l’officialisation des parrainages offre aux dirigeants du PCF une nouvelle occasion de souligner la position prééminente de leur parti au sein du FG. Ainsi, si Pierre Laurent précise publiquement que 850 des 1100 soutiens finalement obtenus par Jean-Luc Mélenchon proviennent d’élus communistes, ce n’est pas innocent24. Il opère ainsi un cadrage de la situation coalitionnelle en laissant entendre que cette candidature n’aurait pas été possible sans le PCF. Il réaffirme alors les prétentions élevées de son parti pour la répartition des investitures aux législatives.
19Du côté du NPA et de LO en revanche, réussir à obtenir les parrainages nécessaires représente un objectif à part entière qui concentre les énergies militantes pendant de longs mois. La recherche des signatures est associée à un discours mobilisateur fondé sur les dispositions individuelles et collectives au militantisme. Au NPA, le décompte des parrainages est régulièrement effectué, les meilleures fédérations citées en exemple et l’investissement militant constamment valorisé. Les règles électorales sont retraduites par la confrontation à leur culture partisane cultivant la défiance à l’égard des institutions étatiques et des élections. Tout en étant régulièrement décriée par les représentants du NPA et de LO comme « une barrière antidémocratique », la règle contraignante des parrainages leur offre une opportunité de mise en scène identitaire de leurs organisations comme des partis de militants, extérieurs au monde politique dominant. La capacité même à participer à l’élection devient une forme de victoire collective, célébrée avec soulagement une fois le nombre de parrainages suffisant acquis :
« J’ai déposé les signatures qui m’assurent d’être présente à l’élection présidentielle, je tiens à remercier tous les maires car je sais qu’ils ne partagent pas forcément mes idées mais, par ce geste démocratique, ils ont permis ma candidature. […] Ce n’est jamais facile […] car il faut déployer beaucoup d’énergie, sillonner le pays, aller discuter, convaincre des milliers de maires pour être parrainé et je suis soulagée après ce dépôt. »
« Dans la course aux signatures, Nathalie Arthaud arrive première », Libération, 7 mars 2012.
« Le NPA a réussi son premier tour administratif ! Philippe Poutou, l’ouvrier candidat, s’invite au banquet des politiques. »
«
L’ouvrier enfin candidat ! », TEAN, 140, mars 2012.
20Le cadrage opéré par les dirigeants du NPA et LO de la phase d’officialisation des candidatures leur permet ainsi paradoxalement de réaffirmer leurs revendications antisystèmes : le fait de participer aux élections n’est pas présenté comme le signe d’une acceptation du système politique, et de ses règles, mais au contraire comme une victoire remportée contre celui-ci.
Campagne électorale et réajustement des objectifs
21La conception propagandiste de l’élection mobilisée au sein de LO et du NPA pour justifier l’investiture d’un candidat à l’élection présidentielle a pour conséquence la non-formalisation d’attentes en termes de score. Officiellement, l’important n’est pas de réaliser un quelconque résultat mais d’accroître les capacités de mobilisation du parti dans la perspective de luttes extra-électorales. D’ailleurs, dans les mois précédant l’élection présidentielle de 2012, on ne retrouve aucune trace dans les débats internes d’un quelconque objectif chiffré ou même de préoccupations stratégiques visant à accroître la base de soutien électorale, y compris lorsque les sondages se montrent peu flatteurs.
22Le FG présente une configuration toute différente. Si les acteurs coalisés sont relativement prudents en début de campagne, ils vont, encouragés par la dynamique de leur campagne qu’enregistrent les enquêtes d’opinion et l’affluence dans les meetings, réévaluer en cours de route leurs ambitions. Au moment de son investiture, aucun objectif électoral précis n’est assigné à Jean-Luc Mélenchon. Pour les dirigeants communistes, les élections législatives semblent constituer le seul véritable enjeu, la présidentielle apparaissant presque secondaire. En avril 2011, le Conseil national du PCF estime ainsi que « l’objectif essentiel [des élections de 2012] sera d’aboutir à un groupe du Front de gauche où la composante communiste sera renforcée pour mieux répondre aux attentes de la population25 ». La défaite à la présidentielle semble actée comme une évidence et l’attention se porte déjà sur le coup d’après : le renouvellement de l’Assemblée nationale. Il est attendu des élections législatives de juin 2012 qu’elles permettent au PCF de conserver ses mandats ou d’en gagner de nouveaux, afin d’assurer la survie du groupe à l’Assemblée, de renforcer sa capacité à peser sur les nouveaux équilibres politiques à gauche et, enfin, de préserver les ressources financières du PCF26.
23Au sein même de l’équipe de campagne constituée autour de Mélenchon, les attentes apparaissent mesurées au début de la campagne électorale. Claude Debons, membre du conseil national du FG, se contente ainsi en décembre 2010 d’espérer « un résultat “significatif”… bon, du genre 7-8 %, … moi, je ne rêve pas au score à deux chiffres, je crois que c’est impossible. Mais 7-8 %, c’est peut-être possible » (entretien réalisé à Paris en décembre 2011). De même, Nathalie, militante du PG, se rappelle d’un début de campagne prudent : « Il fallait rester les pieds sur terre, nous attaquions ici notre premier véritable coup d’essai […] il ne fallait pas s’attendre au grand soir » (entretien réalisé dans le Loiret en avril 2014). Tout en mobilisant des référents propres au PCF, Serge livre un récit similaire :
« On n’entendait pas vraiment passer le premier tour, on voulait surtout montrer que les communistes étaient toujours là et actifs […] et éviter par le biais de cette stratégie d’union de rejouer le fiasco de 2007 [Marie-George Buffet y obtient 1,93 % des suffrages exprimés]. »
Entretien réalisé en Ille-et-Vilaine en avril 2013.
24Au début de l’année 2012, les éditoriaux de À Gauche, rédigés par François Delapierre, directeur de campagne de Jean-Luc Mélenchon, commencent à se faire plus optimistes, pressentant l’émergence d’une véritable « révolution citoyenne27 ». Le registre est identique dans la presse communiste : « Il se passe quelque chose dans le pays, de très profond dans la gauche et autour du Front de gauche28. » Le récit de Frédéric Génevée (membre du conseil exécutif national du PCF) tranche ainsi avec celui de Claude Debons quelques semaines auparavant :
« Il y a quelques mois, on ne pensait pas qu’on en serait là aujourd’hui. Vraiment. En termes d’influence, on pèse à gauche, on pèse dans le débat. Nos thèmes sur la critique du capitalisme financier, maintenant, sont repris, … y compris par François Hollande. Cela veut dire qu’on marque le terrain. Et puis on fait des meetings incroyables, il y a beaucoup de monde… alors cela ne veut pas dire que le score… Je ne sais pas quel sera le score, mais… Bon, il sera supérieur à celui de Marie-George Buffet. »
Entretien avec Frédéric Génevée, Paris, janvier 2012.
25Convaincus désormais de « faire l’événement », les acteurs coalisés affichent des objectifs plus ambitieux. La tactique du « front contre front » devient l’un des principaux axes de la campagne et amène à affirmer un objectif relationnel : dépasser l’« ennemi » Front national. François Delapierre écrit ainsi en mars 2012 que « le Front de gauche est en train de faire bouger les lignes » : « Nous avons fait dérailler la mécanique FN et arrêté son opération de “dédiabolisation”. Nous exerçons une attraction idéologique sur l’électorat de gauche qui pèse sur le candidat du PS29. » Le compte-rendu d’une réunion des secrétaires départementaux du PCF évoque « l’optimisme » et « l’enthousiasme » des cadres communistes30. Cet optimisme se nourrit grandement des sondages de plus en plus flatteurs et témoigne d’une suspension temporaire de la critique habituellement d’usage au sein de la gauche radicale à l’égard de cette méthode :
« Nous qui étions d’habitude si prompts à dénoncer les sondages “mensongers”, “manipulateurs”, “à la solde des puissants”, nous avons perdu toute capacité de réflexion quand ces sondages nous ont brossés dans le sens du poil. Une fois passée la certitude de faire un score à deux chiffres ça n’arrêtait pas de grimper, de grimper, et on a voulu voir uniquement ce que nous voulions voir. Quand on a été crédités de 15 % et plus, on s’est même mis à rêver d’un score à la Duclos [21,27 % des suffrages en 1969]. »
Entretien avec Jacky (militant PCF), Ille-et-Vilaine, avril 2013.
26Face à la progression des intentions de vote en faveur de Jean-Luc Mélenchon, les sondages n’apparaissent plus comme des artefacts, mais comme l’expression de l’opinion et la démonstration d’une campagne efficace. Il en va de même pour l’affluence grandissante dans les meetings sur laquelle se fonde la croyance d’un nombre croissant de militants en la capacité de leur candidat à effectuer une percée électorale inédite, qui viendrait bousculer les équilibres politiques habituels.
27Ainsi, les attentes à l’égard de la campagne et des résultats varient sensiblement d’un parti à un autre selon la place accordée aux élections dans chaque culture partisane. Ces anticipations différenciées conditionnent le rapport au « verdict des urnes ». Dit autrement, les modalités de réception et d’évaluation de la performance électorale, et en l’occurrence de la défaite, ne dépendent pas uniquement du score effectivement obtenu mais du contexte partisan et de l’univers de sens dans lequel elle advient.
Que faire de la défaite ? La gestion de l’après-élection
28Daniel Gaxie a mis en évidence l’importance des luttes d’interprétation des élections dans la compétition politique : « L’élection est une sanction de la gestion d’un patrimoine électoral dans laquelle l’interprétation de la sanction fait partie de la sanction elle-même. Le résultat ne vaut que par l’analyse que l’on en donne et le verdict électoral n’existe réellement que lorsque les adversaires en présence ont dégagé une tendance générale et imposé la légitimité de leur interprétation31. » En ce sens, il convient moins de s’intéresser à la défaite en tant que réalité objective qui s’impose aux acteurs qu’aux interactions à travers lesquelles la défaite est construite comme un succès ou comme un échec, et parfois même successivement comme l’un puis comme l’autre.
Des défaites pleines de promesses
29Au lendemain du premier tour de l’élection présidentielle de 2012, les principaux médias nationaux regorgent d’analyses soulignant les scores décevants des candidats de la gauche radicale. Alors que les résultats des candidats du NPA (1,15 % des voix) et de LO (0,56 %), en net recul par rapport à 200732, sont clairement qualifiés de contre-performances33, celui de Jean-Luc Mélenchon (11,1 %) apparaît mitigé34. Le candidat du FG obtient en effet un score bien meilleur que celui de Marie-Georges Buffet cinq ans auparavant, mais nettement en-deçà des derniers sondages pré-électoraux et de celui de la candidate du FN, Marine Le Pen (17,9 %).
30La qualification en tant qu’échec de la performance de leurs candidats respectifs est cependant rapidement réfutée par les directions de LO, du NPA et du FG. Elles s’attachent ainsi toutes à produire des interprétations des résultats alternatives à celles des médias dominants visant, d’une part, à relativiser la portée de l’élection présidentielle et, d’autre part, à présenter leur campagne électorale comme le point de départ d’une dynamique de mobilisation pleine de promesses pour l’avenir. Ainsi, la défaite de Philippe Poutou est présentée comme étant, malgré son ampleur, parfaitement conforme aux attentes et objectifs initiaux du parti :
« Nous savions bien que la sympathie que Philippe Poutou avait suscitée, l’écho rencontré, auraient du mal à se transformer en vote. […] Ce score faible ne mesure pas l’impact réel de notre campagne ni son importance pour la suite. L’ouvrier candidat, l’inconnu, a réussi à se faire entendre, à bousculer les routines politicienne et médiatique, à faire entendre nos idées, à gagner une large sympathie. C’est l’aboutissement d’une longue bataille politique pour faire entendre dans cette cacophonie électorale la voix du monde du travail, une voix anticapitaliste. »
« Notre campagne, un acquis qui comptera », TEAN, 146, 26 avril 2012.
31De même, les publications de LO s’efforcent de muer la défaite de Nathalie Arthaud en réussite politique, la campagne ayant permis une diffusion large des idées du parti :
« Pour tous les journalistes et les experts politiques qui résument la vie politique au cirque électoral, notre score de 0,5 % à 0,7 % sera considéré comme l’échec de notre campagne et de notre politique. Mais je tiens d’abord à rappeler que, si 0,5 % à 0,7 % cela pèse peu dans les urnes, cela fait près de 200000 personnes qui ont approuvé notre programme de lutte. […] Et au-delà du score, camarades, nous pouvons être fiers de cette campagne. […] La campagne électorale que nous venons de faire nous donne un point d’appui. Oh ! ce ne sont pas nos résultats électoraux qui vont nous aider. Mais le score est une chose, la campagne et les idées que nous avons propagées en est une autre. Les résultats électoraux s’oublient, alors que les idées vont faire leur chemin. »
Nathalie Arthaud, « Une campagne où nous avons défendu nos idées », LO, 2282, 27 avril 2012.
32Des tentatives analogues de promotion d’une interprétation méliorative des résultats sont observables du côté du FG. Les directions du PG et du PCF s’entendent pour appréhender la défaite de leur candidat commun comme « un succès incontestable » et une étape majeure vers la conquête du pouvoir35. François Delapierre promet ainsi des lendemains qui chantent pour le FG :
« Il ne faut pas additionner des choux et des carottes… Et pourtant les commentateurs comparent les voix obtenues dimanche par Jean-Luc Mélenchon avec des sondages. « Alors déçus ? » entonnent-ils en chœur. Mais ce sont les sondeurs qui devraient s’expliquer sur cet écart ! Il faut rapporter une élection à une autre élection. Le score du Front de gauche marque une progression fulgurante par rapport à la dernière élection nationale, les européennes. 3 millions de voix en plus et un pourcentage presque doublé. Qui dit mieux ? Personne ! Cette poussée du Front de gauche change le paysage. Elle met la gauche à un niveau très élevé. »
François Delapierre, « Une poussée exceptionnelle », AG, 1301, 27 avril 2012.
33Le discours est identique au PCF, où on salue une « progression considérable » par rapport à 2007 et l’enrayement du long déclin électoral du parti36 :
« Notre score, à deux chiffres, inédit depuis trente ans, obtenu à l’issue d’une campagne exaltante, est un événement de l’élection. Le Front de gauche progresse de manière continue à chaque élection, depuis sa création lors des élections européennes. […] Le poids de ces quatre millions de voix, rassemblées grâce à notre travail, à nos choix stratégiques et à celui de nos partenaires du Front de gauche, nous redonne une place inédite en reconstituant un nouveau paysage à gauche. »
« Rapport de Pierre Laurent au CN du 25 avril 2012 », Com, 477, mai 2012.
34Ce travail de réinterprétation de la défaite de Jean-Luc Mélenchon est prioritairement orienté vers les militants et les acteurs coalisés du FG eux-mêmes. À l’instar de la mobilisation référendaire de 2005, les « quatre millions de voix » du 22 avril sont érigées en mythe, en évènement clé d’une forme de « roman de parti » du FG37, venant légitimer les fondements de cette coalition. Au PG comme au PCF, la campagne est érigée en épopée triomphale ayant vocation à prendre place dans la mémoire des militants, à constituer pour eux une référence commune, indépendamment de leur parti d’origine. Jean-Luc Mélenchon offre une version paradigmatique de ces envolées lyriques dans l’introduction d’un ouvrage consacré à la campagne « historique » du FG :
« Nous avons tiré de nos ferveurs une force autonome et conquérante qui s’ébroue à présent sous le soleil de la grande histoire. […] Plus rien ne nous arrêtera. Les quatre millions de voix qui se sont rassemblées pour le dire le 22 avril 2012 sont un commencement joyeux dans le bruit et la fureur de notre temps. Elles annoncent qu’un autre futur est possible ! Avec le Front de gauche, nous avons fait “place au peuple” sur la scène politique et médiatique. »
Jean-Luc Mélenchon, « Introduction », in Burlot Stéphane, Résistance. L’album de campagne du Front de gauche, Bruno Leprince, 2012, p. 9.
35Dans les semaines suivant l’élection présidentielle, les interprétations négatives (absence du second tour, candidat distancé par l’extrême droite), comme les divergences potentielles (prise de position pour le second tour, sens à donner à la coalition), sont à l’inverse totalement éclipsées des prises de position publiques des représentants du PG et du PCF. L’heure est à l’entente autour d’une volonté affichée de renforcer le degré d’institutionnalisation du FG38, en s’appuyant sur la dynamique de l’élection présidentielle.
36À la lecture des premières interprétations des résultats de leur candidat par les dirigeants partisans, les implications de la défaite apparaissent très limitées : soit elle est présentée comme n’ayant guère d’importance, soit elle est retraduite en un succès politique. La distance critique aux élections et les faibles attentes, en particulier dans les cas de LO et du NPA, facilitent l’acceptation de la défaite, qui ne donne dès lors guère lieu à des ajustements stratégiques ou programmatiques significatifs. Ce constat doit cependant être nuancé. En effet, la seule analyse des interprétations des résultats par les directions immédiatement après le scrutin ne suffit pas, les effets organisationnels et militants de la défaite se posant à plus long terme.
Les effets de la défaite sur les collectifs partisans
37La mémoire de la défaite n’est pas immuable : elle est retravaillée et potentiellement remise en cause à l’aune de ses effets durables sur le collectif partisan. Le degré d’investissement dans ces luttes d’interprétation varie sensiblement selon l’importance initiale accordée à l’enjeu électoral, dont on a vu qu’elle était très variable au sein des différentes composantes de la gauche radicale française. Il est possible de mettre en évidence trois séries d’effets de la défaite sur ces collectifs partisans.
38Tout d’abord, une défaite électorale peut donner lieu à une reconfiguration des relations intra-partisanes. En considérant un parti comme « un champ de luttes et comme un espace de concurrence objectivée entre des agents ainsi disposés qu’ils luttent pour la définition légitime du parti et pour le droit de parler au nom de l’entité et de la marque collective39 », la défaite constitue une ressource symbolique dans les luttes internes. L’exemple du PCF en atteste. Alors même que la candidature de Jean-Luc Mélenchon était fortement contestée en interne avant son investiture, la dynamique encourageante de sa campagne, puis sa défaite initialement dépeinte comme très honorable, renforcent l’alignement intra-parti-san ou, plus exactement, accroît le coût d’expression des divergences. Lors du premier Conseil national consécutif au premier tour de l’élection présidentielle, les opposants au FG semblent absents : sur cinquante-deux intervenants, seuls quatre évoquent de manière critique Jean-Luc Mélenchon, sans aller jusqu’à rejeter le FG40. Les interventions sont également beaucoup plus homogènes qu’à l’accoutumée. À l’inverse, le résultat des élections législatives est immédiatement investi par les segments contestataires pour disqualifier la stratégie du FG et la direction nationale du PCF41. Le recul sensible en nombre de voix par rapport à l’élection présidentielle (moins de deux millions au premier tour des législatives contre quatre à celui de la présidentielle) et, surtout, la perte par le parti de cinq de ses douze députés, contribuent à une réactivation des clivages internes préexistants. La non-satisfaction de l’objectif de renforcement de la représentation communiste à l’Assemblée acte la fin de la courte parenthèse unanimiste sur l’interprétation de la défaite de la présidentielle comme « prometteuse42 ». Les opposants au FG au sein de la direction du parti rejettent cette fois immédiatement les lectures relativistes de la défaite des législatives proposées par le secrétaire national Pierre Laurent43, et relancent les controverses internes sur la légitimité de la coalition, qui continuent à animer le parti jusqu’à aujourd’hui44.
39D’autant plus que la défaite peut aussi fragiliser l’équilibre financier du parti qui la subit. Une campagne électorale coûteuse et un résultat insuffisant pour obtenir un remboursement ou accéder à un financement public affectent en effet durablement les capacités d’action d’un parti. Ce risque financier est largement anticipé par les partis de gauche radicale et ce, quelles que soient leurs attentes et anticipations. LO et le NPA alignent ainsi leurs dépenses sur le minimum de remboursement forfaitaire (c’est-à-dire qui ne dépend pas du résultat obtenu mais seulement de la participation à l’élection présidentielle). Ainsi, Philippe Poutou et Nathalie Arthaud mettent en place des campagnes financièrement minimalistes. Après remboursement, la campagne présidentielle de Philippe Poutou ne coûte que 32706 €, et celle de Nathalie Arthaud, 242288 €45. Malgré la différence de résultat et de coût de la campagne, la logique est identique dans le cas de la campagne de Jean-Luc Mélenchon. Dans un premier temps, alors que les estimations des instituts de sondage sont faibles et que le remboursement des frais de campagne est encore incertain (nécessité de dépasser le seuil des 5 % des suffrages exprimés), le budget de campagne de Jean-Luc Mélenchon reste bien inférieur au plafond de remboursement et, plus encore, au plafond des dépenses autorisées. Ce n’est qu’avec la progression dans les sondages et l’affluence dans les évènements de campagne que le budget va fortement augmenter (il double pendant cette séquence). Mais, même dans cette configuration plus favorable, le budget de campagne reste très proche du plafond de remboursement qui est fixé à 50 % du plafond des dépenses autorisées. Ainsi, la campagne de Jean-Luc Mélenchon coûte 9514318 € pour un remboursement de 8004225 €46. Ainsi, si la défaite ne se double pas de réelles difficultés financières, la défaite anticipée produit des effets sur les dispositifs de campagne via une modération des dépenses.
40Les effets financiers de la défaite électorale sont plus visibles à l’issue des élections législatives car le financement public dépend des résultats obtenus (première fraction) et du nombre de parlementaires se déclarant membres d’un parti (seconde fraction). Pour être éligible à la première fraction, il est nécessaire de franchir un seuil (1 % des suffrages exprimés dans un minimum de cinquante circonscriptions issues de trente départements). Contrairement à 2007, LO et le NPA ne parviennent pas à franchir ce seuil en 2012 et, de ce fait, perdent tout financement public. Dans ce cas, la défaite électorale se double de difficultés financières et grève les capacités financières du parti pour les élections à venir. Le financement public représentait, pour LO, 347410 € soit 10,25 % de son budget en 2012. Dans son budget 2013, cette perte n’est pas compensée, mais elle l’est en grande partie dès le budget 2015, grâce à une augmentation des autres recettes (produits divers, etc.) alors même que les élections municipales de 2014 ont privé LO de quasiment tous ses élus municipaux (94303 € de reversions pour l’exercice 2012). En parvenant à compenser les pertes liées à son activité électorale (financement public et contribution des élus), LO limite les effets financiers de la défaite et maintient son activité électorale traditionnelle. Ce n’est pas le cas du NPA. Dans la foulée de la présidentielle de 2012, le NPA lance ainsi une souscription plus ambitieuse que les années précédentes et ne participe que partiellement aux scrutins de 2014 et 2015. Mais les difficultés financières du NPA ne sont pas uniquement liées à ses contre-performances électorales : elles se combinent avec une crise interne. Le financement public obtenu par la LCR à l’issue des élections législatives de 2007 s’élevait, pour l’exercice 2012 à 851147 €, soit près d’un quart du budget NPA/LCR en 2012. Le budget du NPA est ainsi divisé par trois entre 2012 et 2015, mais seulement la moitié de cette baisse s’explique par la perte du financement public. Dans le même temps, entre 2012 et 2015, le total des cotisations des adhérents recule de 32 %. Dans les deux cas, la défaite et ses effets financiers ne produisent guère de changements tactiques, comme le montre le récit de Sylvie (NPA) qui idéalise, d’une certaine manière, le retour à un parti de militants, modeste et populaire, qu’implique la perte du financement public :
« Vu les résultats aux législatives, le NPA va avoir un financement public ? Ah, non, on n’en a pas. Puisqu’il n’y a que 18 circonscriptions où on a dépassé les 1 % et il en fallait cinquante, donc…
Cela va être difficile pour la suite…
Ben, on… on fera un parti militant, qui marchera à la souscription, aux cotisations, et puis voilà ! En général, l’argent qu’on touche de l’État, c’est ce qui nous permet de nous présenter aux élections, donc on fera moins d’élections et ce sera très bien [rire]. »
Entretien avec Sylvie (militante NPA), Meurthe-et-Moselle, juin 2012.
41Enfin, la défaite peut produire chez les militants un sentiment de déception et influencer ainsi les logiques de leur engagement47. Derrière la satisfaction de façade affichée par les directions des partis de la gauche radicale au lendemain de l’élection présidentielle de 2012, des traces de cette déception militante se retrouvent jusque dans la presse partisane. Si certains articles reconnaissent brièvement les regrets de certains militants quant à la défaite de leur candidat, ce n’est cependant que pour mieux les relativiser (en les mettant par exemple sur le compte de la fatigue ou de la jeunesse) et insister à nouveau sur les aspects positifs de la campagne et des résultats :
« Utilisant la déception, voire les larmes, de jeunes militants qui aspiraient à plus et à mieux, et qui ont reçu, choqués, l’annonce du score du FN, voilà que les commentateurs parlent d’un demi échec. Nous récusons totalement cela. Le score est une grande victoire, une première et grande victoire pour nous qui visons désormais plus haut. »
Com, 477, 2 mai 2012.
42Les déceptions ne sont ainsi évoquées que pour mieux réaffirmer leur caractère limité. Les entretiens que nous avons menés à l’issue de la campagne présidentielle de 2012 auprès de militants font pourtant apparaître un important décalage entre ce discours d’institution et la réception militante de la défaite, notamment au sein du FG. Alors que la presse partisane et les déclarations publiques des dirigeants nuancent ou réfutent toute idée d’échec, la défaite est perçue par les militants interrogés comme un réveil, un retour à une réalité d’autant plus douloureuse qu’elle est synonyme d’effondrement des illusions collectives :
« Comme pour toute ivresse, le plus dur c’est le lendemain, et là on a eu un peu mal aux cheveux. »
Entretien avec Pierre (militant PCF), Val-de-Marne, mai 2013.
« Nous avons un peu perdu la mesure du raisonnable pendant la campagne, nous avons pris trop de confiance en nous et en nos possibilités politiques, et à voler trop près du soleil nous nous y sommes brûlé les ailes, la chute a été immédiate, et douloureuse. »
Entretien avec André (militant PG), Val-de-Marne, juillet 2013.
43D’autres font part de leur déception, non quant au résultat obtenu, mais quant à l’incapacité à dépasser le FN :
« Réaliser 11 % ce n’est pas un échec. La grosse déception est surtout venue du fait que l’extrême droite est beaucoup plus haute que nous. »
Entretien avec Vincent (militant PCF), Ille-et-Vilaine, février 2013.
« Nous n’avons pas su, en tant que militants et organisations, apparaître plus crédibles que la bête immonde pour les citoyens, c’est là que réside notre principale défaite. »
Entretien avec Nathalie (militante PG), Loiret, avril 2014.
44La déception peut conduire dans certains cas à un désengagement, durable ou temporaire. Les propos de Maxime expriment bien les difficultés à maintenir son engagement après les désillusions des élections législatives :
« J’ai été séduit par les discours de Jean-Luc Mélenchon et j’ai voulu participer à cette campagne […] quand j’ai vu sur le net des photos de la Bastille ça a été un déclic […] j’ai instantanément voulu être avec tous ces gens […] après le premier tour, je me suis progressivement éloigné, je n’ai pas été relancé par les militants pour d’autres choses. »
Entretien avec Maxime (militant FG), Loiret, janvier 2013.
45Dans la situation qu’il évoque, la défaite se combine avec le retour à la routine de l’activité partisane, et rend particulièrement sensible pour cet acteur le décalage entre ses dispositions militantes et celles des militants des partis coalisés. Ceux-ci sont en effet partie prenante de diverses instances de socialisation permettant de relativiser la défaite électorale. Même si ce cas individuel n’est pas généralisable à l’ensemble des sympathisants non encartés, on peut néanmoins considérer que la défaite participe, parmi d’autres variables, d’une forme de démobilisation, en particulier pour les acteurs les moins bien intégrés aux institutions partisanes. Ainsi, le constat de Claude Giraud, pour qui « les émotions sont un facteur d’engagement compulsif, car elles ne se maintiennent pas dans le temps et ne se transforment pas ipso facto en adhésions raisonnées et constantes48 », semble bien s’appliquer à ces engagements aussi fugaces que fragiles dans l’effervescence d’une campagne.
Conclusion
46Les réactions au sein du NPA ou de LO d’un côté, celles caractérisant le FG de l’autre, attestent de l’inégalité des collectifs partisans face à la défaite. Les acteurs du FG s’investissent bien davantage dans les luttes d’interprétation des résultats ; de même, la non-réalisation des objectifs les impacte bien davantage. La place, le rôle et la valeur accordés à la compétition électorale dans chaque culture partisane apparaissent comme des variables pertinentes pour considérer leur rapport à la défaite électorale. Cette notion permet en effet de dépasser la simple dichotomie victoire/défaite. La réception partisane de la défaite ne dépend pas – ou pas seulement – du résultat obtenu, mais également des cadres cognitifs mobilisés pour la rendre intelligible et se doter d’une interprétation partagée du scrutin. En d’autres termes, le rapport à la compétition électorale conditionne, parmi d’autres variables, la capacité des acteurs à traduire une défaite en succès ou à l’inverse en échec politique.
47Par de nombreux aspects, les élections présidentielle et législatives de 2017 confirment ces éléments. Les partis les plus critiques de la compétition électorale sont aussi ceux que la défaite, bien que sévère49, affecte le moins. Pour ces partis, la participation à la compétition électorale ne vise pas la conquête du pouvoir ; les élections y constituent alors des moments quasi-exclusivement propagandistes, ce qui a comme conséquence une focalisation sur la capacité à entrer en et faire campagne, là où, pour d’autres partis, la campagne n’est qu’une modalité de la compétition pour la dévolution du pouvoir. Ainsi, pour les anciens alliés du FG qui accordent une forme de centralité aux luttes électorales (sans pour autant abandonner toute critique du fait électoral), la réception de la défaite dépend plus fortement de la dynamique de la campagne et des résultats. Les premiers éléments recueillis auprès de militants de La France insoumise semblent ainsi témoigner d’une forme de déception identique à celle constatée en 2012 pour les militants fortement investis dans la campagne présidentielle. À l’inverse, les militants communistes, du fait d’un soutien tardif et critique à la candidature de Jean-Luc Mélenchon d’une part, d’un engagement moindre dans sa campagne d’autre part, semblent moins affectés par la défaite. Au-delà, le résultat obtenu (19,58 % des suffrages exprimés) contribue très largement à « effacer » la défaite au profit de la valorisation d’un résultat qui « montre une progression historique, avec un quasi-doublement [du] score par rapport à 2012. […] Au total, Jean-Luc Mélenchon rate la qualification pour le deuxième tour de seulement 1,72 points et 620000 voix, soit environ 10 voix par bureau de vote50 ». In fine, la réception d’une défaite électorale, qu’elle soit ou non renforcée par un échec politique, ne dépend pas seulement du résultat obtenu mais de la culture d’organisation propre à chaque parti qui tend à renforcer ou au contraire à minorer les effets de la défaite, tout au moins dans le cas d’acteurs occupant des positions dominées et entretenant une distance critique à la compétition électorale.
Footnotes
1 La candidature à une élection peut d’ailleurs être considérée comme l’une des modalités du militantisme partisan. Une enquête quantitative menée au PG, au PCF et au NPA en 2010-2011 montre que respectivement 52,1 %, 64,6 % et 77,6 % des congressistes ont déjà été candidats au nom de leur parti à une ou plusieurs élections. Cf. Mathieu Romain, « Tous ensemble ! » ? Les dynamiques de transformation de la gauche radicale française, Nancy, thèse de science politique, université de Lorraine, 2015, p. 423.
2 Cf. Raynaud Philippe, L’extrême gauche plurielle. Entre démocratie radicale et révolution, Paris, Autrement, 2006, 272 p. ; Pereira Irène, Les grammaires de la contestation. Un guide de la gauche radicale, Paris, La Découverte, 2010, 225 p. Cette logique d’attraction-répulsion à la politique institutionnelle n’est pas sans rappeler le rapport au vote des militants libertaires. Cf. Luck Simon, « Entre contestation et participation. L’ambiguïté du rapport au vote des activistes de la gauche libertaire », Revue française de science politique, no 2, 2008/58, p. 231-256.
3 Lefebvre Rémi et Sawicki Frédéric, La société des socialistes. Le PS aujourd’hui, Bellecombe-en-Bauges, Le Croquant, 2006, p. 21.
4 Sur la méthodologie de cette enquête, cf. Mathieu Romain, op. cit., p. 93-129.
5 Wald Quentin, Le Parti communiste français et le Front de gauche (intitulé provisoire), thèse de doctorat en cours de réalisation à l’Institut du droit public et de la science politique de l’université Rennes I.
6 Lazar Marc, « Cultures politiques et partis politiques en France », in Cefaï Daniel (dir.), Cultures politiques, Paris, Presses universitaires de France, 2001, p. 171-172.
7 Hastings Michel, « Partis politiques et administration du sens », in Andolfatto Dominique, Greffet Fabienne et Olivier Laurent (dir.), Les partis politiques. Quelles perspectives ?, Paris, L’Harmattan, 2001, p. 22.
8 Sawicki Frédéric, « Les partis politiques comme entreprises culturelles », in Cefaï Daniel (dir.), op. cit., p. 197-198.
9 Sur la diversité des logiques d’investissement en politique : Gaxie Daniel, La démocratie représentative, Paris, Montchrestien, 2003 (4e édition), p. 94-96.
10 Bailey Frederick George, Les règles du jeu politique : étude anthropologique, Paris, PUF, 1971, p. 18.
11 Becker Jean-Jacques, Le Parti communiste veut-il prendre le pouvoir ? La stratégie du PCF, de 1930 à nos jours, Paris, Seuil, 1981, 332 p.
12 Offerlé Michel, Les partis politiques, Paris, PUF, 2006 (5e édition), p. 90-91.
13 C’est d’ailleurs le choix fait, à l’heure actuelle, par une autre organisation trotskiste, le Parti ouvrier indépendant.
14 « Lettre de la direction de LO », TEAN, 100, 28 avril 2011.
15 Pour reprendre l’expression de Lanuque Jean-Guillaume et Lévy Pierre, « Lutte ouvrière, monolithe du trots-kysme ? », in Delwit Pascal (dir.), Les partis politiques en France, Bruxelles, Éditions de l’ULB, 2014, p. 139.
16 « Sursaut ou déclin », TEAN, 103, 19 mai 2011.
17 « Faire entendre la voix des anticapitalistes dans les luttes et les élections », TEAN, 106, 9 juin 2011.
18 « 500 signatures », TEAN, 117, 29 septembre 2011.
19 « L’enjeu véritable de la CN », TEAN, 106, 9 juin 2011.
20 « Philippe Poutou : un ouvrier candidat, pas le candidat ouvrier », TEAN, 109, 30 juin 2011.
21 « Rapport de Pierre Laurent, CN 8-9 avril 2011 », Com, 432, 13 avril 2011.
22 « Rapport de Pierre Laurent, CN 8-9 avril 2011 », Com, 432, 13 avril 2011. Dominique Andolfatto pointe le pragmatisme de cette décision visant à protéger le PCF d’un nouvel échec électoral. Cf. Andolfatto Dominique, « Splendeurs et misères du Front de gauche. Jean-Luc Mélenchon, le PCF et les élections de 2012 », Communisme, 2013, p. 465-511
23 Lefebvre Rémi, « Le travail de mobilisation électorale », in Cohen Antonin, Lacroix Bernard et Riutort Philippe (dir.), Nouveau manuel de science politique, Paris, La Découverte, 2009, p. 406-421.
24 « Jean-Luc Mélenchon a déposé ses 1100 parrainages », L’Humanité, 16 mars 2012.
25 « Résolution du CN 8-9 avril 2011 », Com, 432, 13 avril 2011.
26 On peut y voir une manifestation de la semi-cartellisation du PCF. Cf. Andolfatto Dominique et Greffet Fabienne, « La « semi-cartellisation » du Parti communiste français », in Aucante Yohann et Dézé Alexandre (dir.), Les systèmes de partis dans les démocraties occidentales. Le modèle du parti-cartel en question, Paris, Presses de Sciences Po, 2008, p. 321-346.
27 « Résistance ! », AG, 1287, 17 janvier 2012 ; « Projection », AG, 1288, 27 janvier 2012.
28 « Une dynamique de rassemblement », Com, 464, 1er février 2012.
29 « À 50 jours », AG, 1294, 9 mars 2012.
30 Com, 470, 14 mars 2012.
31 Gaxie Daniel, Le cens caché, Paris, Seuil, 1978, p. 10-11.
32 Ubbiali Georges, « Les usages du trotskisme dans l’extrême gauche française (LO, LCR, PT) », in Geay Bertrand et Willemez Laurent (dir.), Pour une gauche de gauche, Bellecombe-en-Bauges, Le Croquant, 2008, p. 261-275.
33 « Contre-performance pour Poutou, avec 1,2 % », Le Monde, 22 avril 2012 et « Pari perdu pour Nathalie Arthaud, avec 0,6 % des voix », Le Monde, 22 avril 2012.
34 « Mélenchon, quatrième avec 11,1 % : pari perdu mais score record », Le Monde, 22 avril 2012.
35 AG, 1301, 27 avril 2012, « Nous tenons les clefs du futur ».
36 Sur l’évolution électorale du PCF : Lavabre Marie-Claire et Platone François, Que reste-t-il du PCF ?, Paris, Autrement, 2003, 158 p. ; Andolfatto Dominique, PCF. De la mutation à la liquidation, Monaco, Éditions du Rocher, 2005, 312 p. ; Mischi Julian, Le communisme désarmé, Marseille, Agone, 2014, 332 p. ; Pudal Bernard, Un monde défait, Bellecombe-en-Bauges, Le Croquant, 2009, 215 p.
37 Sur la notion de roman de parti : Pudal Bernard, Prendre parti : Pour une sociologie historique du PCF, Paris, Presses de la FNSP, 1989, p. 23 et suivantes.
38 Wald Quentin, Le Front de gauche. Essai sur une tentative de recomposition de la gauche politique française (2009-2013), Rennes, mémoire de science politique, université Rennes 1, 2013 ; Mathieu Romain, « À la recherche de la démocratie en coalition. L’exemple du Front de gauche », in Andolfatto Dominique et Goujon Alexandra (dir.), Les partis politiques, ateliers de la démocratie, Bruxelles, Éditions de l’université de Bruxelles, 2016, p. 109-119.
39 Offerlé Michel, op. cit., p. 14.
40 « CN 25 avril 2012 », Com, 477, 2 mai 2012.
41 Cautres Bruno, « Le vote Mélenchon. Le poids de l’héritage communiste et les limites d’une dynamique », in Perrineau Pascal (dir.), Le vote normal. Les élections présidentielle et législatives d’avril-mai-juin 2012, Paris, Presses de Sciences-Po, 2013, p. 111-131.
42 « CN 13 septembre 2012 », Com, 489, 19 septembre 2012.
43 Cf. « Rapport de Pierre Laurent au CN du 18 juin 2012 », Com, no 484, 20 juin 2012.
44 Le même constat peut être fait en 2017. En effet, après avoir soutenu le même candidat à la présidentielle, le PCF et La France insoumise (FI) se sont affrontés aux législatives lors desquelles le PCF obtient 2,72 % des suffrages exprimés (contre 11,03 % pour FI). Reconnu au sein du PCF comme une défaite et un échec malgré une (légère) progression en nombre d’élus, ce résultat ne modifie pas les équilibres intra-partisans, mais les réactive autour du débat récurrent sur l’avenir du PCF. Ainsi, quelques jours seulement après les législatives, Pierre Laurent déclare au CN du PCF : « La question de l’avenir du Parti est posée. […] Nos résultats législatifs sont un échec grave en termes de voix et de crédibilité nationale ». Ce résultat nécessite, selon le leader communiste, une « révolution politique » du PCF et un « processus de profonde transformation du Parti. » Cf. Rapport de Pierre Laurent au CN des 23 et 24 juin 2017. La défaite de 2017 conduit ici aux mêmes réponses organisationnelles qu’après la présidentielle de 2007. Cf. Pudal Bernard, « PCF : un parti peut-il en cacher un autre ? », in Geay Bertrand et Willemez Laurent (dir.), op. cit., p. 239-258 ; Mathieu Romain, op. cit., p. 158-168.
45 Journal officiel, 30 janvier 2013.
46 Ibid. Au final, la campagne présidentielle de 2012 est nettement moins coûteuse que celle de 2007. Le résultat de Marie-George Buffet n’avait alors pas permis au PCF d’obtenir le remboursement des dépenses de campagne.
47 Sur les logiques de désengagement militant, cf. Fillieule Olivier (dir.), Le désengagement militant, Paris, Belin, 2005, 319 p. ; Mathieu Romain, « Trajectoires de dissidents. La redéfinition collective et individuelle des engagements partisans », in Higelé Jean-Pascal et Jacquot Lionel (dir.), Figures de l’engagement. Objets, formes, trajectoires, Nancy, Presses universitaires de Lorraine, 2017, p. 115-132.
48 Giraud Claude, Qu’est-ce que l’engagement ?, Paris, L’Harmattan, 2011, p. 141.
49 Avec respectivement 1,09 % et 0,64 % des suffrages exprimés, Philippe Poutou et Nathalie Arthaud obtiennent des résultats marginaux.
50 « Le peuple a parlé », L’Heure du peuple, 1524, 28 avril 2017.
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La proximité en politique
Usages, rhétoriques, pratiques
Christian Le Bart and Rémi Lefebvre (ed.)
2005
Aux frontières de l'expertise
Dialogues entre savoirs et pouvoirs
Yann Bérard and Renaud Crespin (ed.)
2010
Réinventer la ville
Artistes, minorités ethniques et militants au service des politiques de développement urbain. Une comparaison franco-britannique
Lionel Arnaud
2012
La figure de «l'habitant»
Sociologie politique de la «demande sociale»
Virginie Anquetin and Audrey Freyermuth (ed.)
2009
La fabrique interdisciplinaire
Histoire et science politique
Michel Offerlé and Henry Rousso (ed.)
2008
Le choix rationnel en science politique
Débats critiques
Mathias Delori, Delphine Deschaux-Beaume and Sabine Saurugger (ed.)
2009