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    Plan

    Plan détaillé Texte intégral LES NOUVELLES FORMES D’ENGAGEMENT EN FRANCE. DISPOSITIFS INSTITUTIONNELS ET PARTICIPATIONS JUVÉNILES (VINCENZO CICCHELLI) EXPÉRIMENTER LA CITOYENNETÉ : NOUVELLES FORMES D’ENGAGEMENT DES JEUNES ? (MARCO BONTEMPI) DES JEUNES ITALIENS PLUS ENGAGÉS QUE LES JEUNES FRANÇAIS (BERNARD ROUDET) Bibliographie Notes de bas de page Auteurs

    Deux pays, deux jeunesses ?

    Ce livre est recensé par

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    Table des matières

    Chapitre 4. De nouvelles formes d’engagement ?

    Vincenzo Cicchelli, Marco Bontempi et Bernard Roudet

    p. 87-108

    Texte intégral Bibliographie Bibliographie Notes de bas de page Auteurs

    Texte intégral

    LES NOUVELLES FORMES D’ENGAGEMENT EN FRANCE. DISPOSITIFS INSTITUTIONNELS ET PARTICIPATIONS JUVÉNILES (VINCENZO CICCHELLI)

    Ce qu’il y a d’inédit dans l’engagement contemporain

    1Pour comprendre la signification de l’essor récent en France de nouvelles formes d’engagement des adolescents et des jeunes, il est nécessaire d’avoir à l’esprit les deux éléments qui les caractérisent. D’une part, des responsables gouvernementaux, des élus locaux, des agents administratifs, des responsables associatifs incitent désormais les jeunes à se présenter comme des porteurs de projets personnels et associatifs, à s’engager en bons citoyens, à s’intéresser à la vie politique et à participer activement et pleinement à la société civile. Cette sémantique des participations juvéniles s’appuie sur quatre mots-clefs autonomie, projet, engagement et responsabilité. Loin d’être seulement discursive, cette exhortation se concrétise par l’intermédiaire de dispositifs institutionnels variés. D’autre part, si les jeunes investissent ces nouveaux dispositifs, ils inventent pour leur part d’autres groupements, moins institutionnels, moins liés à l’engagement politique et militant traditionnels, résolument ouverts sur la société civile, composés le plus souvent exclusivement par leurs pairs.

    2Cette nouvelle exhortation en provenance des adultes a pour origine le sentiment diffus d’une forte poussée de l’égoïsme dans les générations nouvelles, de déclin du souci d’autrui, ce qui donnerait à terme un inévitable désintérêt pour la chose publique. Ces affirmations récurrentes sur l’inquiétante apathie civique des jeunes peuvent s’expliquer de deux façons. D’une part, il est possible qu’il y ait une erreur d’appréciation de la part des responsables associatifs, syndicaux, politiques qui appartiennent à une génération pour qui l’engagement rimait avec la durée, la constance et le dévouement à un groupement d’intérêt général (ce qui évidemment n’excluait pas l’existence de compagnons de route, ou de critiques à l’égard de la direction de la part des militants), et qui font de leur réussite personnelle au sein de ces organisations le type idéal du militantisme (oubliant que l’appartenance à vie à un groupement a toujours été un fait minoritaire) (Ion, 2005a). D’autre part, ces invitations à participer à la vie sociale proviennent d’une autre peur, de signe contraire, tout aussi ancienne et puissante, qui consiste à penser que le désintérêt pour le bien commun peut à tout moment basculer dans des formes extrêmes et violentes d’occupation de l’espace public à l’occasion d’émeutes, rassemblements et manifestations (Cicchelli, Galland, Maillard, Misset, 2007). Pointe alors la nécessité de canaliser les éventuels griefs des jeunes en les métamorphosant en élan participatif à l’aide de dispositifs institutionnels d’accompagnement, contrôlés par les adultes.

    3Nous allons prendre en considération deux formes de participations. La première renvoie à des dispositifs promulgués par les administrations d’État et/ou les collectivités territoriales. Ils ont été initiés par les politiques et se présentent comme des opportunités offertes aux jeunes : ce sont les concours « Envie d’agir », « Défis jeunes »1 et les différentes formes de Conseils de jeunesse2. La seconde, plutôt liée aux initiatives individuelles et/ou collectives des jeunes eux-mêmes, se manifeste par le bénévolat, volontariat et la création d’associations. Elle est plutôt l’expression de la société civile (Sue, 2003).

    Deux concours

    4Ces concours ont des règles et des systèmes d’évaluation qui orientent, tout du moins idéalement, les contenus de l’engagement, les mettent en forme, en acceptant ou en refusant les dossiers déposés pour obtenir un financement (ou en demandant leur reformulation). S’adressant aux 16-30 ans, « Défi Jeunes » a depuis 1987, année de sa création, primé plus de dix mille projets, dont le montant oscille entre 1 600 € et 8 500 €. Trois objectifs sont poursuivis : développer le sens de l’autonomie, de la responsabilité et de l’engagement ; favoriser la découverte de soi, de ses potentialités, de ses capacités d’action et de création ; favoriser l’insertion sociale et professionnelle. Les critères officiels d’évaluation portent sur le fait que le projet soit un défi pour soi, ait une utilité sociale et un impact local, soit novateur, exemplaire et durable. Mais c’est seulement depuis la naissance du concours « Envie d’agir » en octobre 2002 que l’on commence à parler d’un tournant dans la politique ministérielle visant l’essor de l’engagement. Ce dispositif a en effet bénéficié de campagnes publicitaires intenses, il a été dès le départ présenté, avant toute évaluation, comme le fruit d’une nouvelle pensée sur les jeunes qui aurait révolutionné les politiques juvéniles.

    5Si « Défi Jeunes » est plus sélectif et exigeant, si les financements sont plus élevés, il a surtout des finalités d’insertion sociale et professionnelle. « Envie d’agir » promeut tout d’abord l’engagement. En s’adressant aux 11-30 ans, ce dernier pousse les jeunes à présenter des projets dans les domaines de la citoyenneté, de la culture, du sport, de l’environnement, de la solidarité et de l’humanitaire. En 2003, ont été financés 600 000 € pour le concours « Envie d’agir » et 2 400 000 € pour le concours « Défi Jeunes ». En 2006, pour l’ensemble de tous les dispositifs du Ministère de la jeunesse, des sports et de la vie associative, 3 300 projets ont été soutenus, 42 000 jeunes ont été touchés, dont 15 000 bénéficiaires directs3.

    6L’objectif déclaré par le Ministère dans une circulaire4 est d’insister davantage sur le dialogue avec l’école et les associations, de faire en sorte que les projets financés soient ensuite validés à l’intérieur d’un parcours de formation des jeunes.

    7Le site Internet « Envie d’agir » est sans nul doute le pivot du dispositif. Il permet d’accéder aux renseignements clefs, est présenté comme le catalyseur des offres, des liens sont présents avec plus de dix mille associations et dix mille projets. La structure du dispositif montre l’ampleur de l’effort réalisé par le Ministère, le type de capacités qu’il requiert et l’effet de socialisation sur lequel il parie. Elle fixe surtout les règles du jeu auxquelles doivent se plier les personnes participantes. Repérer l’information pertinente, esquisser un projet, saisir des opportunités, fonder éventuellement une association, imaginer un budget, visualiser les étapes du parcours, indiquer l’investissement humain, construire un réseau, réaliser la tâche que l’on s’est attribuée et la rendre publique, ce sont des éléments pertinents pour être sélectionnés.

    Recréer le lien social

    8Si l’on estime que les projets financés tendent à se conformer aux critères d’évaluation retenus par les jurys, il est possible de comprendre la nouvelle normativité adulte qui oriente l’action des jeunes vers l’engagement en analysant ses structures rhétoriques, telles qu’elles apparaissent sur les sites Internet, brochures, manuels et autres textes consacrés à la promotion de ces concours. On constate alors qu’au niveau individuel, l’engagement entendu comme promesse, dans le but d’opérer en ayant autrui comme horizon de sa propre action, et la responsabilité comme parole maintenue, seraient de nouvelles vertus à poursuivre. Pour pouvoir agir, les jeunes bénéficient de formes d’autonomie leur permettant de prendre l’initiative et d’obtenir un soutien logistique et/ou financier qui concrétise leurs projets. La réalisation de ces derniers rendra le jeune plus autonome qu’il ne l’est. L’autonomie des jeunes est donc une vertu ambivalente, elle est à la fois un statut et une conquête, le point de départ de toute action et un objectif à poursuivre par l’action elle-même (Ricœur, 2001). Les jeunes sont considérés comme capables de dire et de témoigner leur propre engagement, de se reconnaître dans leur acte, en maintenant une promesse par la projection vers l’avenir.

    9Une interview accordée par Claude Capelier, conseiller spécial de l’ancien ministre de la jeunesse, Luc Ferry, initiateur du concours « Envie d’agir », constitue un témoignage précieux de cette nouvelle rhétorique adulte de l’engagement et des finalités qu’on lui prête5. Les jeunes ont démontré une grande capacité d’initiative et d’intérêt pour la chose publique après les résultats du premier tour des élections présidentielles de 2002, affirme-t-il, quand de centaines de milliers de garçons et de filles sont descendus dans la rue pour conjurer le danger d’une éventuelle, quoique très improbable, victoire finale du candidat d’extrême droit Jean-Marie Le Pen. Toutefois, en l’absence de structures adéquates, ces initiatives spontanées sont destinées à s’essouffler. Tout en reconnaissant l’existence de projets juvéniles, Capelier déplore leur dispersion, leur absence de cohérence et de visibilité. Pour cette raison, il fait appel à un plus grand élan vers la société civile, en prenant appui sur les capacités des jeunes à développer un espace situé entre le monde privé, id est la vie personnelle, et le monde public contrôlé par l’État, id est l’école et la formation. Mais il s’adresse aussi aux Autorités pour que soient développés des supports d’animation, gestion et médiation de ces initiatives. Si cette opération vise à informer, suivre, soutenir, reconnaître les projets des jeunes, elle se révèle bien plus profondément comme une tentative de panser certains maux dont ils souffrent : « C’est une façon pour reconstruire le lien social et, à terme, de reconstruire l’intérêt de la jeunesse pour la politique » (p. 149), en conjurant leur forte attraction pour la violence.

    Les conseils de jeunesse

    10Si l’opportunité d’instituer des conseils de jeunes apparaît en France déjà à la fin de la seconde guerre mondiale, il faudra attendre les années 1970 et 1980 pour observer des initiatives plus nombreuses, permanentes et durables. Pourtant, c’est seulement vers la fin des années 1990 que ces assemblées deviennent un élément central du dialogue promu par les responsables politiques dans le but de réconcilier les jeunes avec les institutions, les inviter à proposer des mesures concrètes qui améliorent leurs conditions de vie (Becquet, 2002a). La tâche attribuée aux conseils, composés par les 16-26 ans, est essentiellement consultative et incitative. Il s’agit de proposer des solutions aptes à améliorer les conditions de vie des jeunes dans les domaines de l’emploi, de la formation et de l’orientation, de l’accès à la culture et aux loisirs, à la santé, à la lutte pour la parité, l’égalité et la citoyenneté, de la lutte contre les discriminations etc. Il leur est demandé de se charger de la coordination et du contrôle d’actions concrètes, telles que des rencontres au niveau local, les festivals de la citoyenneté, des débats, des expositions, des campagnes d’information, après accord et demande de collaboration avec des organismes et associations déjà existants. Il existe un grand nombre de Conseils Locaux de Jeunesse, constitués sur l’initiative des maires ; 99 Conseils Départementaux de la Jeunesse, présidés par le préfet et composés par les membres des Conseils locaux et d’associations locales ; un Conseil National de la Jeunesse, présidé par le ministre de la jeunesse et des sports, composés par les membres des conseils départementaux, d’associations, partis ou syndicats. L’institution de ces conseils a été une formidable « intuition politique » (Becquet, 2002b), elle a en outre permis la mise en place d’une « gouvernance juvénile » (Vulbeau, 2002, p. 107), les jeunes peuvent définir peu à peu les contours d’une qualification civique territoriale. Une parité relative entre les statuts de l’adulte et du jeune inscrit ce dernier dans un espace social où cohabitent différentes générations. Les Conseils des enfants et des jeunes peuvent être définis comme un dispositif de socialisation secondaire qui présume une certaine compétence politique de la part des participants. Les jeunes élus sont considérés comme des acteurs qui disposent d’une expérience spécifique, ce qui justifie leur capacité d’intervention. Toutefois on ne saurait oublier que ces citoyens « en herbe » mènent des actions participatives dans le cadre d’une nouvelle injonction pédagogique à l’expression de la parole.

    11Pourtant, malgré l’intérêt que ces lieux revêtent pour l’apprentissage de la démocratie participative et la socialisation politique en dehors de la famille, différents problèmes persistent. D’un côté, une défection progressive à l’égard de ces conseils a été remarquée, due à leur faible visibilité et à l’impatience manifestée par les jeunes de vouloir transformer rapidement leurs propositions en actions. De l’autre côté, des doutes ont été soulevés à propos de leur possibilité de peser sur les décisions politiques : on déplore la carence des moyens, on craint l’inefficacité du dispositif à cause de la dispersion de la politique juvénile en différents ministères – ce qui pousse certains responsables politiques à souhaiter un dialogue interministériel.

    12En ce qui concerne les Conseils des enfants et des jeunes, développés depuis des années, ils sont autour de 1 200 et s’adressent aux 9-18 ans (plus rarement aux 25 ans). Si les tâches des deux conseils sont en définitive très proches, la différence vient du fait que les Conseils des enfants ont pour interlocuteurs l’administration et la préfecture alors que les Conseils des jeunes naissent à l’initiative des maires et des élus locaux et ressemblent plutôt à des associations, bien qu’ils n’en aient pas le statut (Vulbeau, 2002).

    13Par ailleurs, le succès de l’expression « promotion de la citoyenneté », employée pour désigner ces initiatives, conduit à croire à leur neutralité. Or derrière l’apparente unité dans les intentions de ceux qui promeuvent ces initiatives, se cachent en revanche différentes conceptions des capacités dont peut faire preuve un jeune et finalement de sa place au sein de la communauté. Quatre modèles ont été retrouvés dans les discours des acteurs politiques observés (Koebel, 2000). Le premier ne reconnaît au jeune aucune capacité d’exercer son pouvoir, y compris au niveau consultatif. Si les jeunes doivent vraiment participer à la vie politique, il est tout d’abord opportun qu’ils montrent le respect pour des valeurs telles la patrie, la nation, le drapeau. Ces discours se retrouvent généralement chez des adjoints se déclarant d’extrême droite. Un deuxième modèle est caractérisé par une faible reconnaissance de la capacité politique des enfants et des jeunes et par la volonté de sensibiliser les membres du conseil aux mécanismes démocratiques et au fonctionnement de la mairie. C’est un discours qui exalte les vertus de l’initiation, mais aussi de l’apprentissage in vivo de l’éducation civique, qui estime que les jeunes doivent s’entraîner longtemps avant de pouvoir accéder à des responsabilités. C’est un modèle typique des politiques qui revendiquent une appartenance à droite. Un troisième modèle reconnaît au jeune une certaine capacité d’intervention dans les débats municipaux. Il s’agit plutôt de consulter les jeunes sur des sujets les concernant, même si la réalisation des projets est rarement prise en considération. Les jeunes apporteraient aux professionnels de la politique un supplément de connaissance de la réalité. Ce sont des maires n’ayant jamais appartenu à des partis. Un dernier modèle est exprimé par des élus locaux qui traitent les jeunes en partenaires, qui leur reconnaissent une grande capacité aussi bien d’intervention dans les débats que dans la concrétisation des projets. Le jeune est considéré comme le détenteur d’une vision du monde originale de son milieu que l’adulte n’a pas ou n’a plus. Il s’agit de maires plutôt orientés à gauche.

    14Il est possible d’évaluer le succès politique de ces dispositifs à l’aune de deux considérations. D’une part, les politiques publiques en direction de la jeunesse prennent de plus en plus un ancrage local (Loncle, 2000). D’autre part, ces dispositifs renvoient au cadre plus vaste de la démocratie locale, source désormais d’un profit symbolique pour les maires au même titre que la lutte contre la délinquance ou la protection de l’environnement. Comme le faisait remarquer Christian Le Bart (2003), les conseils de quartier permettent à leurs promoteurs d’anticiper les éventuelles critiques faites à leurs intentions parce qu’ils se présentent comme une forme de consultation. Toutefois, une consultation n’est nullement une concertation, encore moins une décision politique. En dépit de leurs déclarations, les maires semblent encore profondément liés à trois monopoles qui fondent leur statut : prétention de parler au nom de la société locale (monopole de la représentation) ; prétention de parler de la société locale (monopole de la compétence) ; prétention de décider pour la société locale (monopole de la décision). On n’épousera pas la conclusion lapidaire de Le Bart pour qui les conseils de quartier sont le fruit de stratégies orientées vers le but de faire vivre institutionnellement et médiatiquement une démocratie locale neutralisée sur le plan de la décision politique. Pourtant on ne peut s’empêcher de penser que dans le cadre de nos conseils de jeunesse, la socialisation à l’engagement civile se réalise en évitant de prendre en considération la question fondamentale inscrite dans tout débat d’assemblée : le caractère politique des choix à réaliser.

    En dehors des dispositifs les plus récents : associations et bénévolat

    15En dehors de ces dispositifs, il existe d’autres formes d’engagement juvénile depuis longtemps. Les associations, par exemple, sont redécouvertes, courtisées et encouragées par les responsables politiques locaux et nationaux. Sorties de cette place ambiguë à laquelle la tradition républicaine les a toujours assignées (Ion, 1996), elles sont considérées comme aptes à faire front aux maux supposés de la modernité, en particulier la détérioration du lien social. Afin de contrecarrer la contractualisation des rapports sociaux, certains préconisent le développement de l’appartenance associative, indicateur de vivacité du lien social, d’altruisme, de sociabilité. On comprend alors que les recherches sur l’associationnisme des jeunes se multiplient, après une longue période d’indifférence (Roudet, 1996).

    16Des études montrent que les jeunes n’ont jamais cessé de s’intéresser à certaines formes d’organisation collective (Roudet, Tchernia, 2001) : les 18-29 ans adhèrent autant que la moyenne des Français à des associations (soit à peu près 40 % dans les deux cas). Toutefois si cette forme d’appartenance reçoit encore des suffrages, c’est qu’elle n’a cessé de se transformer, de faire plus de place à l’implication personnelle tout en continuant d’inscrire l’individu dans des collectifs choisis qui lui permettent « d’étayer son identité » (Vermeersch, 2004). Une nouvelle articulation entre l’individuel et le collectif se laisse observer dans les associations. La multiplication des valeurs qui permettent aux individus de dire leur engagement dans un langage partagé ne signifie pas l’absence de valeurs communes.

    17Les enquêtes sur les Valeurs des Français permettent une confirmation de ces résultats : prédominent des associations tournées vers l’accomplissement personnel ; loin de baisser, se développent les prises de responsabilité au sein des associations ; l’appartenance multiple décline au profit de l’investissement dans une seule association ; la sociabilité amicale se renforce (Roudet, 2001). La mise en avant de la réalisation de soi dans l’engagement se fait au sein d’un groupe de proches, par l’intermédiaire d’une éventuelle forte implication personnelle, qui n’exclut nullement la prise de distance, la critique et la défection, selon des modalités privilégiant des mobilisations sur des objectifs délimités capables d’obtenir des résultats immédiats. S’épanouir individuellement en gardant une forte autonomie montre que de façon plus générale l’adhésion inconditionnelle cède le pas à la participation élective, ponctuelle et immédiatement gratifiante.

    18L’engagement des jeunes ne s’inscrit pas dans un horizon temporel long : les luttes se font ici et maintenant et sans qu’elles soient justifiées par l’idéologie des lendemains qui chantent. C’est plutôt en raison de la peur que l’avenir pourra être moins prometteur que les luttes se déclenchent. Si les utopies ne disparaissent pas définitivement, elles sont un peu mises en réserve, cependant que les valeurs qu’elles portent inspirent des actions au quotidien : c’est une sorte « d’idéalisme pragmatique ». La façon dont les membres des collectifs s’associent privilégie davantage le réseau horizontal et égalitaire que celui vertical et hiérarchique, ce qui s’inscrit dans cette forte tendance de ne pas déléguer sa parole et parler au contraire en son nom propre (Ion, 2005b). Mais ce n’est pas seulement le rapport à la temporalité et à la hiérarchie interne qui a été modifié dans l’engagement. Celui-ci déborde l’intérêt pour la chose publique, pour la participation au sort de la Cité, pour devenir une « nécessité existentielle » (Lapeyronnie, 2005, p. 53). En effet, le moratoire psychosocial (Galland, 2006) n’est plus aujourd’hui adossé à une mécanique institutionnelle qui offre aux individus un cadre suffisamment stable pour gérer l’apprentissage de la vie adulte par l’expérimentation. L’individu étant mis en demeure de prendre parti, de choisir, l’engagement devient plus difficile à déléguer, il relève d’une « responsabilité personnelle au fur et à mesure de la désarticulation et de l’affaiblissement des processus de socialisation. Pour les jeunes aujourd’hui, il s’agit bien de s’engager pour être plus pleinement un individu » (Lapeyronnie, 2005, p. 53).

    19Finalement, et pour proposer quelques pistes à venir, il faudrait cerner la signification attribuée par les jeunes aux dispositifs analysés supra en examinant les liens qui se nouent entre l’engagement (entendu comme une promesse) et la responsabilité (entendue comme une promesse tenue). Parler de promesse et de maintien de la promesse signifie s’intéresser à ces différents risques : trahison de la promesse, insuccès, atermoiements. Comprendre comment le jeune fait corps avec son projet, l’incarne, le revendique, l’expérimente, le rend public pourrait se réaliser en prenant en compte l’aller-retour entre les difficultés qui se posent, les solutions éventuelles, les transformations du projet jusqu’à son issue définitive (Cicchelli, 2006).

    EXPÉRIMENTER LA CITOYENNETÉ : NOUVELLES FORMES D’ENGAGEMENT DES JEUNES ? (MARCO BONTEMPI)

    20Au cours des dix dernières années se sont développées en Italie certaines formes d’engagement public des jeunes nées en relation avec les transformations du domaine de la politique. L’engagement pour dépasser la crise de légitimation des institutions politiques et des acteurs traditionnels a favorisé la diffusion de pratiques de participation inspirées des principes de la démocratie délibérative. C’est dans cette perspective qu’Habermas a souligné la nécessité d’une sphère publique dans laquelle joue un rôle important le dialogue, la communication argumentative et l’intersubjectivité. Le développement de compétences communicationnelles évolue : c’était un point de départ, c’est maintenant un objectif des pratiques de la participation. La présence de lieux où expérimenter les pratiques de la démocratie délibérative devient donc important. On a parlé de ces possibilités d’expérimentation comme « d’écoles de démocratie » et il n’y a pas de doute que l’école et l’associationnisme sont des lieux d’entraînement importants pour l’exercice du dialogue et le développement de compétences délibératives. (Cavalli 1999a ; 1999b). Un rôle particulier est celui qui est joué par les institutions politiques elles-mêmes, qui offrent aux jeunes des espaces où faire l’expérience de la pratique de la citoyenneté. La participation devient ainsi apprentissage et l’apprentissage est reconnu comme une pratique de participation. Nous verrons cependant comment les logiques à l’œuvre dans la relation d’apprentissage sont différentes de celles propres à la participation. L’apprentissage se réalise traditionnellement à travers une relation asymétrique entre l’enseignant et l’enseigné, alors que la participation comporte la reconnaissance, au moins formelle, de conditions de parité entre les acteurs. Lier l’apprentissage et la participation, c’est donc redéfinir les logiques du premier terme en lien avec les logiques du second6.

    Logiques de la participation décisionnelle et relations entre adultes et jeunes : les Conseils et les Forums de jeunesse

    21En Italie, la participation décisionnelle des jeunes est essentiellement encouragée à travers les Conseils de la jeunesse et les Forums. Les premiers, développés au niveau municipal, constituent un mode de relations entre jeunes et autorités publiques de la ville, notamment le Conseil municipal (Consiglio Comunale). Les seconds concernent surtout les associations de jeunes, ou en charge de la jeunesse. Ils ont des aspects organisationnels différents et peuvent être articulés sur plusieurs niveaux territoriaux : municipal, provincial et régional. En outre, le Forum national de la Jeunesse (Forum Nazionale Giovani) a été créé en 2004.

    22Comme dans d’autres États européens, les formes d’organisation des Conseils italiens de la jeunesse sont variables. Ils ont été développés selon deux conceptions distinctes de la participation des jeunes, qui correspondent à deux modèles.

    23Le premier modèle se caractérise par la centralité des institutions politiques représentatives dans la promotion de la participation. Dans cette configuration, les Conseils de la jeunesse sont organisés en étroite relation avec le Conseil municipal des adultes, qui en est le promoteur et le référent direct. Selon une enquête (Castellani 2001), environ 500 Conseils relèvent de ce modèle en Italie, en grande partie dans les villes de moins de 25 000 habitants. Ils sont composés de jeunes de moins de 16 ans. Ils ont été institués par les Conseil municipaux qui ont inséré dans leur Statut les dispositions relatives à l’organisation, aux fonctions et aux formes de financement de ces structures. Soixante pour cent des Conseils fonctionnent selon les mêmes règles que les conseils des adultes : élection et hiérarchie formelle des membres, organisation en commissions de travail, responsabilités au sein du conseil. Dans certains cas, le Conseil est présidé d’un maire élu parmi les jeunes ; dans d’autres, d’un adulte qui peut être le maire de la ville (Sindaco), le conseiller municipal (Assessore) chargé des politiques de la jeunesse ou un responsable de ce secteur. Les Conseils sont institués en collaboration avec l’école, à l’intérieur de laquelle se tiennent les élections pour leur formation et – dans de nombreux cas – leurs réunions. Les thèmes de travail sont choisis dans 50 % des cas par les adultes ; par ces derniers et les jeunes dans 20 % des cas. Ils sont déterminés par les jeunes dans seulement 30 % des cas. La méthode de travail se calque sur la méthode formalisée par les institutions : réunions en fonction d’un ordre du jour, interventions organisées par tours de parole et procès-verbaux des séances. La périodicité des réunions est très variable : selon les cas, de plusieurs fois par mois à quelques fois par an. Ceci influence naturellement le choix des thèmes et projets sur lesquels travailler. Le Conseil, enfin, dispose d’une somme d’argent qu’il peut dépenser de manière autonome pour réaliser des initiatives. Dans ce modèle, sont prévues des rencontres du Conseil de la jeunesse et du Conseil municipal, durant lesquelles les jeunes font des suggestions et formulent des requêtes sur les questions relevant des politiques de la jeunesse.

    24Il y a donc au centre de ce modèle une conception de la participation appréhendée avant tout comme apprentissage des procédures et dynamiques du débat politico-institutionnel. Les jeunes se voient offrir la possibilité d’avoir une « expérience politique comme modalité d’éducation » (Baruzzi, 2003, p. 60). La participation n’est donc pas une fin en soi ; elle est envisagée comme un moyen d’éduquer les jeunes à l’exercice de la politique. En tentant de rendre l’expérience du Conseil municipal « vivante », certaines significations identitaires très enracinées sont réaffirmées. D’une part, les jeunes – considérés comme non compétents – sont invités par les adultes à participer aux dynamiques institutionnelles, et sont donc exclus de ces dernières. Les attentes éducatives inhérentes à ce modèle des Conseils mettent en évidence l’importance accordée à la sphère cognitive de l’acquisition des compétences politiques, en tant que moyen d’expression des idées et en tant que formation devant permettre un regain d’intérêt pour la politique. Même si cette tendance est justifiée par le fait que les jeunes concernés sont âgés de 8 à 16 ans, la définition de la participation comme éducation reste un élément central de ce modèle. D’autre part, le domaine dans lequel se réalise cette éducation à la politique est caractérisé par la réaffirmation de la centralité des institutions politico-représentatives dans la vie de la communauté locale. Canevaro (1999) a observé à juste titre que le risque de cette « pédagogie institutionnelle » est que les jeunes imitent les adultes. Et plus on tente de lier la pratique de la participation à des méthodes éducatives caractérisées par une définition asymétrique des rôles et de leurs significations, plus le risque est grand. « Dans la majorité des projets mis en œuvre de cette manière, les jeunes eux-mêmes, en s’adaptant aux attentes des praticiens, orientent spontanément la relation vers cette forme technicisée et impersonnelle. Les objectifs de la communication et la sémantique sont donc majoritairement définis de manière unilatérale par le monde adulte ; on demande aux enfants et aux adolescents de confirmer les sens proposés par ce dernier » (Dreossi 2003, p. 290).

    25Dans le second modèle des Conseils, les jeunes sont pensés comme étant potentiellement porteurs d’un point de vue « autre » que celui des adultes. Cette altérité est reconnue comme nécessaire à la participation que l’on entend promouvoir. Dans ce cas-là, il ne s’agit pas de proposer aux enfants de jouer à imiter les comportements des adultes dans un Conseil municipal en miniature, « mais de donner à la ville l’opportunité inhabituelle de se confronter à un point de vue (…) “autre”, différent, tel que celui des enfants » (Tonucci, 1996, p. 43). Les enfants peuvent ainsi constituer une sorte d’indicateur de la qualité de vie de la ville. À ce titre, ils peuvent apporter aux adultes des points de vue non communs, à partir desquels envisager les problèmes des villes contemporaines.

    26Le nombre de Conseils de la jeunesse relevant du second modèle est nettement inférieur à celui du premier. Il n’y a pas de donnée disponible mais, à titre indicatif, on peut en dénombrer quelques dizaines en Italie. Les aspects organisationnels visent à privilégier les possibilités d’expression personnelle des jeunes qui y prennent part. Ces Conseils fonctionnent généralement sur la base de projets montés par des associations et auxquels collaborent l’école et les autorités locales. Il n’y a pas d’élection et la participation est libre. Le but n’est pas de reproduire les dynamiques des espaces institutionnels du débat politique, mais de constituer « un organisme où [les jeunes peuvent] faire entendre leur voix quant aux problèmes du territoire, en particulier les problèmes qui les concernent » (Cosolo Marangon, 2000, p. 33). Ce modèle nécessite que les adultes qui font fonctionner le Conseil y agissent comme des animateurs, avec le double objectif de former un groupe de jeunes qui puisse travailler sur des questions choisies de manière autonome, et présenter des propositions et des projets à leur interlocuteur institutionnel (le Conseil municipal souvent).

    27Dans le premier modèle, l’exécution des propositions formulées par les jeunes a un rôle de second plan, car on se concentre sur l’objectif d’apprentissage des procédures. À l’inverse, elle s’avère essentielle dans le second : elle traduit l’implication des adultes dans le processus déclenché par les jeunes, pour le bien de leur communauté (Cosolo Marangon, 2000, pp. 80-83). Naturellement, les adultes peuvent avoir à expliquer aux jeunes les raisons des modifications et/ou des réalisations partielles de ce que ces derniers avaient proposé. Au centre de ce modèle, il y a la communauté locale et le souci de son bien-être comme expression du sentiment d’appartenance. La participation des jeunes est donc conçue comme le fait de prendre soin de la communauté, en agissant pour améliorer la qualité de la vie. Pour réaliser ces actions, la coopération des institutions et de la « société civile » est nécessaire, mais aussi une collaboration entre les adultes et les jeunes dans laquelle les premiers se montrent disponibles à écouter ce que les seconds veulent dire. En ce sens, les institutions locales sont considérées comme les interlocuteurs des Conseils de la jeunesse non pas parce qu’elles sont au centre de la vie collective, mais parce qu’elles représentent une part (importante) de la communauté. L’expérience politique que les jeunes font avec les Conseils inspirés de ce modèle est certainement moins procédurale et plus axée sur le développement des relations sociales de coopération entre individus appartenant à la même communauté et partageant le souci de la qualité de vie en son sein.

    28Les Forums de la jeunesse sont une autre forme de promotion de la participation des jeunes. Ils sont composés de jeunes âgés de 18 à 30 ans et s’articulent sur différents niveaux territoriaux et institutionnels (municipaux, provinciaux et régionaux). Ils remplissent principalement les deux fonctions de représentation des associations de jeunes ou qui ont en charge la jeunesse et d’organisation d’initiatives et de projets.

    29Beaucoup de lois régionales prévoient l’institution de Forums comme interlocuteurs des différents niveaux d’autorité sur le territoire, et on assiste ces dernières années à un développement croissant de ces formes de participation. Au niveau municipal, les Forums ont généralement un financement de la municipalité pour l’organisation d’événements, de rencontres et de manifestations. En revanche, aux échelons supérieurs (provincial et régional), ils exercent seulement une fonction d’interlocuteurs des pouvoirs publics pour la définition des politiques de la jeunesse. Il s’agit en effet de rencontres périodiques – parfois une seule fois par an – dans lesquels les jeunes n’ont que des fonctions consultatives. Ce sont surtout les responsables du monde associatif qui participent aux rédaction, discussion et approbation de documents d’orientation, et dialoguent avec les responsables institutionnels des politiques de la jeunesse. De la même manière, le but du Forum National de la Jeunesse (Forum Nazionale Giovani) – fondé en 2004 par 40 associations, dont de nombreux mouvements de la jeunesse de partis politique – est de représenter l’Italie lors des rencontres internationales des organes de participation. Il a également le rôle d’interlocuteur du Parlement et du Gouvernement sur les questions relevant des politiques de la jeunesse. En bref, il semble possible d’affirmer que les jeunes qui y participent représentent un segment très réduit du monde juvénile et constituent – surtout dans les plus hauts niveaux de représentation – une strate « en formation » de la future classe dirigeante des milieux associatifs et politiques.

    30De manière générale, nous pouvons donc remarquer que chaque forme de participation peut être encouragée sous la forme d’une relation asymétrique ou sous la forme d’une coopération entre adultes et jeunes. Ceci transparaît aussi bien dans les modalités communicationnelles que dans la construction sociale des rôles et du sens. Comme nous l’avons vu, l’éducation est la forme communicationnelle asymétrique la plus facilement envisagée pour encourager la participation. Dans ces cas, cette dernière constitue un moyen d’éducation dont la finalité, plus ou moins explicite, est le transfert de compétences considérées comme pouvant « compléter » les identités juvéniles. À l’inverse, dans sa forme communicationnelle de coopération, la participation présente deux aspects novateurs importants. Le premier est le caractère réflexif de la relation : la participation y est déjà effective, « grâce à la réflexion sur le concept même de participation, à partir de sa thématisation explicite dans le cadre du projet » (Cuconato 2004, p. 110). Ainsi, les conditions de la participation ne sont plus considérées comme allant de soi, ce qui permet l’expression dans ce cadre des particularités individuelles et subjectives. Le second caractère novateur, étroitement lié au premier, est relatif à l’appréhension des jeunes comme des individus compétents pouvant contribuer de manière originale au déroulement de processus sociaux d’intérêt collectif. Ce second aspect suppose que les adultes soient capables d’écouter ce que les jeunes souhaitent dire, qu’ils prennent au sérieux la participation de ces derniers à la définition relationnelle de leur rôle d’adultes.

    31Dans la construction sociale des rôles et du sens du rapport entre adultes (en tant qu’acteurs politico-institutionnels) et jeunes (en tant qu’acteurs de la société civile), l’élaboration asymétrique de la relation ressort de la conception de la participation attribuant un rôle central aux institutions politiques représentatives. Dans cette perspective, le « centre » institutionnel s’« ouvre » aux jeunes pour combler la distance qui le sépare de leurs pratiques sociales et de leur style de vie. De plus, il façonne les politiques de la jeunesse comme des instruments de consensus et de formes de légitimation pour des secteurs de la société de plus en plus détachés des logiques de la politique institutionnelle. Ceci est particulièrement évident dans les formes plus récentes de promotion de la participation juvénile, tels les Conseils et les Forums. Ces outils peuvent se décliner de manière très variée, en raison justement des différentes conditions culturelles : quand ils relèvent d’une conception centraliste des institutions et des politiques, ils deviennent une réplique des formes de représentation politique et des intérêts existant déjà dans les structures locales. L’asymétrie des rôles adultes/jeunes façonne ainsi les relations entre institutions et société civile, en liant la compétence politique aux logiques institutionnelles et, par leur biais, aux rôles adultes (Bontempi, 2007). L’institution des Forums comme interlocuteurs des autorités locales responsables des politiques de la jeunesse semble confirmer cette analyse. Les jeunes sont inclus en tant que jeunes, sous une forme institutionnalisée de représentation du monde juvénile. En d’autres mots, les institutions se montrent prêtes à reconnaître la spécificité des jeunes seulement en les redéfinissant comme des interlocuteurs institutionnellement symétriques aux rôles adultes.

    32Dans la construction des rôles et significations institutionnels, la relation de coopération paraît possible si l’asymétrie des rôles ne méconnaît pas la valeur de la participation de ceux qui sont par définition en dehors des institutions. Ceci implique un changement de logique : « l’acteur politique n’apparaît plus comme celui qui décide directement (policy maker), mais plutôt comme celui qui prend acte, arbitre ou encourage des processus laissés à l’interaction des destinataires de la décision (policy taker). L’acteur politique délègue son pouvoir au profit des stakeholder, mais il ne se défait pas entièrement de ses prérogatives. En fait, il les reconstitue à un niveau supérieur en tant que promoteur, garant et défenseur du processus » (Bobbio 2002, p. 136). Ceci signifie que la co-projétation des politiques de la jeunesse ne peut plus se faire en convoquant les jeunes à la table des institutions. Elle change de profil en devenant une activité développée dans un réseau de relations paritaires entre différents acteurs. On peut dire que ce sont les institutions qui participent – avec les associations, les groupes informels mais aussi les individus – à la création d’outils de coordination nécessaires à la détermination et la réalisation des projets. L’obtention des ressources peut ne pas être une tâche exclusive des institutions (qui sont de plus en plus en difficulté), mais être le produit de formes d’association et d’organisation mises en œuvre par les citoyens, de manière individuelle ou en groupe. Il s’agit d’un changement radical qui permettrait une nouvelle configuration institutionnelle dans laquelle les institutions coopèrent avec les jeunes pour identifier leurs problèmes et les affronter avec eux. Soulignons que ceci n’annule pas la spécificité des institutions, mais la replace à un niveau d’action ou « elles instaurent le principe de subsidiarité à l’égard de la société civile et garantissent la qualité des services et l’accès universel à ces derniers » (Prandini 2004, p. 50).

    Le changement de l’engagement dans des associations de bénévoles

    33La relation entre les jeunes et le bénévolat se caractérise, ces dernières années, par d’importants changements. L’engagement des jeunes dans les associations de bénévoles a progressivement diminué. Si environ la moitié des jeunes entre 15 et 30 ans est inscrite dans des associations, seulement 10 % s’engagent dans des activités bénévoles (Albano 2002). Les associations dans lesquelles les jeunes sont majoritaires représentent 8 % du total des associations de bénévoles (ONV, 2006). En Italie, les jeunes sont donc une présence minoritaire dans le monde du bénévolat. Cette situation découle à la fois des changements du bénévolat et de l’apparition chez les jeunes d’une nouvelle façon de le considérer. D’abord, l’engagement des jeunes dans le bénévolat s’avère moins motivé par des choix religieux ou de conceptions éthiques de la vie et plus orienté vers des objectifs spécifiques et limités dans le temps. Ce changement de motivations rend l’engagement moins stable dans le temps et plus facilement « intermittent ». Le choix d’être bénévole devient une des expériences possibles pouvant intéresser, mais avec un caractère de stabilité de moins en moins présent. Par ailleurs, le bénévolat développe de nouvelles fonctions, surtout en relation avec le travail. Pour les jeunes italiens, dans un contexte caractérisé par la flexibilité du travail et l’expérimentation de l’élaboration des identités, le bénévolat représente de plus en plus un espace d’expériences axées sur l’aide et la solidarité, mais également nécessaires à l’orientation et l’insertion dans le monde du travail. L’engagement est considéré par les jeunes également comme une possibilité d’acquérir des compétences et relations utiles pour l’insertion dans le monde du travail. D’une part, un processus de professionnalisation est à l’œuvre dans le monde du bénévolat : il se concrétise par l’augmentation des activités payantes organisées par les associations. D’autre part, ce processus trouve dans les conditions d’incertitude et de précarité des jeunes un terrain particulièrement approprié : ces derniers peuvent exercer des activités professionnelles choisies, qui ont une dimension de solidarité et leur permettent également d’avoir d’autres activités. En ce qui concerne le second aspect, cette croissance de l’engagement professionnel dans les activités de bénévolat juvénile est surtout favorisée par le soutien économique des institutions locales (communes, provinces, régions). En effet, les associations constituées principalement de jeunes s’engagent plus que les autres dans les conventions et projets financés par les pouvoirs publics locaux, pour développer les prestations dans les écoles, musées et bibliothèques, dans les services d’assistance et de protection de l’environnement. On ne peut pas encore affirmer que le bénévolat constitue une forme de participation effective à la gestion du territoire ou, au contraire, qu’il est subordonné aux institutions locales, qui l’utiliseraient pour offrir des services à moindre coût.

    34Bref, les formes d’engagement des jeunes que nous avons rapidement examinées montrent le développement d’une relation complexe entre autonomie et responsabilité. L’engagement des jeunes se développe à l’intérieur de relations avec les adultes qui sont bien souvent caractérisées par des liens asymétriques, selon des logiques permettant plus facilement des formes d’autonomie que de prise de responsabilités (ou alors, celles-ci sont limitées). étudier la structure de ces espaces et les formes sociales qui caractérisent le lien entre responsabilité et autonomie sera un objet d’étude des sociologues qui travaillent sur la condition des jeunes dans les années à venir.

    DES JEUNES ITALIENS PLUS ENGAGÉS QUE LES JEUNES FRANÇAIS (BERNARD ROUDET)

    35Marco Bontempi et Vincenzo Cicchelli montrent comment, en Italie et en France, des modalités d’engagement juvéniles inédites se développent, sur la base d’un double processus. D’une part, on constate la mise en place récente, à l’initiative des pouvoirs publics, de dispositifs institutionnels de participation et, d’autre part, on observe le renouvellement de formes plus traditionnelles d’engagement, telle que la participation associative. Dans chaque pays, les dispositifs publics visent à expérimenter des formes de citoyenneté dans l’espace public, tandis que l’engagement associatif apparaît davantage ouvert sur la société et sur les rapports des jeunes avec leurs pairs. C’est sur ce deuxième aspect que nous développerons une comparaison de l’engagement des jeunes italiens et des jeunes français : l’adhésion associative se construit en effet, au sein de chaque pays, sur un rapport singulier des jeunes à leur société d’appartenance et à ses particularités. Dans cette perspective, nous nous référerons à deux enquêtes conduites simultanément en Italie et en France, proposant des données comparables sur l’appartenance aux associations et groupements organisés. L’enquête sur les valeurs des Européens, réalisée à trois reprises (1981, 1990, 1999), permet de comparer les résultats relatifs aux 18-29 ans avec ceux concernant les populations adultes (Galland, Roudet, 2005). L’enquête EUYOUPART, effectuée en 2004, concerne les 15-25 ans7.

    36L’enquête sur les valeurs des Européens nous révèle que l’appartenance associative des jeunes italiens est supérieure à celle des jeunes français : 44 % des Italiens de 18 à 29 ans appartiennent à au moins une association contre 37 % des Français du même âge, sans qu’il n’y ait de réelle différence entre les taux des jeunes et des adultes dans chaque pays. Avec le Portugal (24 %) et l’Espagne (37 %), mais aussi la Grande-Bretagne (32 %), l’Italie et la France se différencient des pays d’Europe du Nord qui dépassent les 50 % d’appartenance, atteignant même des taux de plus de 75 % pour les pays scandinaves et les Pays-Bas. Cette gradation peut s’expliquer par les variables classiques de l’opposition Nord Sud en Europe occidentale, opposant le poids culturel du catholicisme à l’influence des protestantismes. Les sociétés scandinaves et néerlandaises, où la participation collective et l’organisation à la base sont très présentes, se caractérisent par le maintien d’un vif sentiment d’appartenance sociale et par une culture civique n’ayant pas son équivalent dans les pays d’Europe du Sud. Toutefois, parmi ces pays, l’Italie se révèle avoir le plus fort taux d’appartenance associative, proche du taux moyen des pays d’Europe occidentale (46 %). Dès lors, en matière d’engagement, l’Italie serait-elle le plus « nordique » des pays méditerranéens ? Même si, comme l’observe Marco Bontempi, l’implication des jeunes italiens dans les associations tend à diminuer, elle reste marquée par certaines spécificités.

    37La répartition des appartenances entre les divers types d’associations s’organise en effet différemment entre l’Italie et la France. Les jeunes français adhèrent essentiellement à des associations sportives et de loisirs, qui concernent 22 % d’entre eux. L’appartenance à des associations culturelles tombe à 7 % et les autres associations recensées dans l’enquête ont des taux d’adhésion de 3 % et moins. La participation des jeunes italiens est mieux répartie entre les différents types d’associations, avec des taux d’appartenance très souvent supérieurs à celui des jeunes français : 17 % adhèrent à des associations sportives et de loisirs, 14 % à des associations culturelles, 9 % à des groupements religieux (pour 3 % en France), 7 % à des organisations de jeunesse (pour 3 %), 5 % à des groupements caritatifs (pour 2 %). Mais surtout, les groupements que l’on pourrait qualifier de défense de causes d’intérêt général, qui valorisent une vision du monde et qui ont a priori une dimension davantage militante, ont des taux d’adhésion supérieurs en Italie. C’est le cas des groupements de défense de l’environnement (5 % en Italie pour 2 % en France), des groupements pour le développement du Tiers-monde (4 % pour 1 %), des syndicats (3 % pour moins de 1 %). Les mouvements politiques, quant à eux, ont des taux extrêmement bas dans les deux pays (1 %).

    38Si l’on examine l’évolution de l’appartenance à six types de groupements entre 1981 et 1999, on s’aperçoit que la tendance est davantage à l’accroissement en Italie : seule l’appartenance aux groupements politiques décline, l’adhésion syndicale reste stable, tandis que l’appartenance augmente dans les groupements culturels, religieux, caritatifs et dans les associations de jeunesse. En France, seule l’appartenance aux groupements culturels augmente ; l’adhésion aux syndicats et aux mouvements de jeunesse diminue fortement, tandis que les appartenances aux groupements religieux, caritatifs et politiques restent stables à un niveau très bas. Ces évolutions sur presque vingt ans donnent un profil beaucoup plus dynamique à la participation associative des jeunes italiens, davantage engagés dans des groupements de défense d’intérêts collectifs. Le modèle italien apparaît répartir de façon plus équilibrée l’adhésion entre des associations récréatives valorisant le développement personnel, qui sont particulièrement prisées en France, et la participation à des groupes d’engagement plus ouverts sur la société, notamment dans les domaines sociaux ou religieux, qui recueillent peu d’adhésion en France. Cette plus grande implication des jeunes italiens dans le fonctionnement de la société globale paraît confirmée par les réponses à une question de l’enquête relative à la participation à la vie de la Cité. En 1999, 71 % d’entre eux trouvent souhaitable d’augmenter la participation des citoyens aux décisions du gouvernement pour 44 % seulement des jeunes français. Les jeunes italiens partagent davantage cette opinion que les adultes (60 %) et cette valorisation de formes participatives de la démocratie a progressé depuis 1981 (50 %), contrairement à la France.

    39Les résultats de l’enquête EUYOUPART, plus récente, amplifient ce positionnement plus dynamique de l’Italie en matière d’engagement. Parmi les huit pays enquêtés (Allemagne, Autriche, Estonie, Finlande, France, Italie, Royaume-Uni, Slovaquie), les jeunes italiens sont les plus nombreux à s’engager dans des formes de participation protestataire, comme les manifestations (32 %), les grèves (34 %), voire dans des actions illégales de protestation : manifestations non autorisées ou occupations de locaux. Cette enquête confirme que, davantage que les jeunes français, les jeunes italiens s’investissent dans divers groupements, en y adhérant, en y accomplissant une tâche bénévole ou, surtout, en participant à une activité : syndicat, mouvements pour la paix, pour la défense des droits de l’Homme, organisation de jeunesse d’un parti politique… Dans les huit pays retenus, ce sont eux qui participent le plus à des actions des mouvements altermondialistes.

    40Le constat de ces différences étant fait, il reste maintenant à les expliquer. Sur ce point, nous pouvons encore nous référer à l’enquête EUYOUPART qui souligne la spécificité de la situation italienne en matière de socialisation politique : le niveau de politisation des parents est le plus élevé parmi les huit pays étudiés. Plus du tiers des jeunes italiens déclarent avoir des parents fortement politisés (36 % pour 20 % des jeunes de l’échantillon total), parents qui par ailleurs sont peu abstentionnistes. Franco Garelli a souligné que les jeunes italiens se réfèrent davantage à une conception normative de la famille, caractérisée par des devoirs plus forts pour leurs membres adultes, appelés à construire une relation stable dans le temps en fonction de l’éducation des enfants (Garelli, 2005). Dans ce contexte de forte valorisation de la famille, celle-ci paraît avoir une réelle influence en matière de socialisation politique et d’engagement. Mais la socialisation entre pairs est également à prendre en compte : selon l’enquête EUYOUPART, ce sont les jeunes italiens qui discutent le plus de politique (36 % déclarent un niveau élevé de discussions politiques), tout particulièrement avec leurs amis (62 % discutent régulièrement de politique). Davantage que les jeunes français, les jeunes italiens estiment que leur meilleur ami s’intéresse à la politique. Il n’est donc pas étonnant que ce soit en Italie, pays où les jeunes enquêtés sont les plus politisés, que se développe le plus fort et le plus diversifié engagement au sein d’associations et de groupements, tant il nous paraît que ce n’est pas la participation associative qui ouvre sur la société globale et sur le politique, mais bien plutôt l’intérêt pour la politique et pour les questions de société, qui entraîne un engagement au sein de divers groupements (Roudet, 2004).

    41L’enquête EUYOUPART nous révèle en outre que, si la socialisation parentale, donc intergénérationnelle, influe plutôt sur les orientations idéologiques et les choix partisans, la socialisation entre pairs, au sein d’une même génération, influe particulièrement sur les comportements politiques et sur les formes concrètes de participation. L’enquête Valeurs a ainsi mis en évidence, chez les jeunes des deux pays, un éloignement vis-à-vis des formes d’action politiques conventionnelles et une augmentation de la participation protestataire. L’appartenance à des groupements organisés peut apparaître comme une alternative à une vie politique instituée, dévalorisée dans les deux pays, ce dont témoigne le faible attrait des groupements politiques. Ainsi que le soulignent Marco Bontempi et Vincenzo Cicchelli, ces engagements s’organisent selon de nouvelles modalités : davantage ponctuels, pragmatiques, plus « activistes » que « militants », avec une recherche d’efficacité immédiate sur des objectifs délimités, moins liés à des grands systèmes de pensée et impliquant le désir de garder son autonomie au sein du groupement.

    42Pour interpréter les différences entre les deux pays, il faudrait aussi se référer aux systèmes politico-administratifs de chacun et aux poids respectifs des partis politiques, des mouvements de jeunesse et d’Éducation populaire. En France, pays très centralisé où l’État-nation s’est constitué tôt, mais qui a été fortement touché par la décentralisation dans les années 1980, le rôle important de mouvements d’Éducation populaire dans la mise en place de politiques locales de jeunesse et dans l’encadrement des jeunes s’est peu à peu effacé, comme s’est aussi effacée l’influence sociale de partis politiques et de syndicats, notamment du parti communiste depuis quelque vingt-cinq ans. En Italie, pays unifié plus tardivement et où les spécificités régionales restent fortes, le long règne de la démocratie chrétienne n’est pas sans avoir laissé de trace en matière d’organisation et d’encadrement de la jeunesse, de même que le poids du parti communiste dans certaines régions, jusqu’à une date plus récente. Enfin, une explication complémentaire peut-être envisagée. Les jeunes italiens ont des croyances et des pratiques religieuses plus élevées que dans d’autres pays d’Europe occidentale de culture catholique, exceptée peut-être l’Irlande. La force des convictions religieuses des jeunes italiens joue-t-elle en faveur de leur participation sociale, tant on sait que la morale de l’engagement peut être forte chez les catholiques pratiquants, le poids du système d’encadrement catholique en matière socioéducative étant aussi à prendre en compte ?

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    10.3406/debaj.2002.890 :

    Vulbeau A., 2002, Les inscriptions de la jeunesse, Paris, Injep.

    Notes de bas de page

    1 http://www.enviedagir.fr/

    2 http://www.anacej.asso.fr/

    3 On lit sur le site du Premier Ministre que pour l’année 2006, le montant de l’aide de l’État consacrée à développer l’engagement des jeunes a atteint 8,5 millions d’euros.

    4 B. O. n° 47 du 18 décembre 2003. Cf. http://www.education.gouv.fr/bo/2003/47/MENE0302768N.htm

    5 Cf. le numéro 30 de la revue Agora Débats/Jeunesses, 2002, p. 146-151.

    6 En Italie, les politiques de la jeunesse naissent à la fin des années soixante-dix, avec pour objectif l’intégration sociale des jeunes considérés « à risque » ou en situation difficile. Jusqu’à la fin des années quatre-vingt, les différentes politiques visant les jeunes (emploi, formation, loisirs, protection, etc.) sont organisées sans coordination nationale et dispersées entre les différents ministères. En effet, ce sont d’abord les autorités locales italiennes qui donnent vie aux politiques de la jeunesse, soit pour pallier les carences normatives de l’État, soit, en utilisant ces dernières à leur avantage, pour expérimenter des voies d’action et des projets novateurs (Pattarin 2002, p. 66). La loi de 1997 – qui finance et encourage les projets locaux relatifs au malaise et à la participation des jeunes – reconnaît et confirme l’autonomie des organismes locaux pour l’exécution des politiques de la jeunesse. C’est seulement depuis 2006 (grâce au gouvernement de Romano Prodi) que pour la première fois en Italie est constitué le Ministère pour les politiques de la jeunesse. La création des politiques de la jeunesse est donc encore essentiellement locale. Suite aux actions entreprises par certaines municipalités du nord (en particulier Milan et Turin), elle a ensuite été progressivement étendue surtout aux villes de l’Italie du nord et du centre.

    7 (http://www.sora.at/euyoupart) La partie française de l’enquête a été conduite par Anne Muxel (CEVIPOF), la partie italienne par Gloria Cornolti, Paolo Franceschini et Renato Pocaterra (IARD).

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    • Vincenzo Cicchelli
    • Marco Bontempi
    • Bernard Roudet
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    1 http://www.enviedagir.fr/

    2 http://www.anacej.asso.fr/

    3 On lit sur le site du Premier Ministre que pour l’année 2006, le montant de l’aide de l’État consacrée à développer l’engagement des jeunes a atteint 8,5 millions d’euros.

    4 B. O. n° 47 du 18 décembre 2003. Cf. http://www.education.gouv.fr/bo/2003/47/MENE0302768N.htm

    5 Cf. le numéro 30 de la revue Agora Débats/Jeunesses, 2002, p. 146-151.

    6 En Italie, les politiques de la jeunesse naissent à la fin des années soixante-dix, avec pour objectif l’intégration sociale des jeunes considérés « à risque » ou en situation difficile. Jusqu’à la fin des années quatre-vingt, les différentes politiques visant les jeunes (emploi, formation, loisirs, protection, etc.) sont organisées sans coordination nationale et dispersées entre les différents ministères. En effet, ce sont d’abord les autorités locales italiennes qui donnent vie aux politiques de la jeunesse, soit pour pallier les carences normatives de l’État, soit, en utilisant ces dernières à leur avantage, pour expérimenter des voies d’action et des projets novateurs (Pattarin 2002, p. 66). La loi de 1997 – qui finance et encourage les projets locaux relatifs au malaise et à la participation des jeunes – reconnaît et confirme l’autonomie des organismes locaux pour l’exécution des politiques de la jeunesse. C’est seulement depuis 2006 (grâce au gouvernement de Romano Prodi) que pour la première fois en Italie est constitué le Ministère pour les politiques de la jeunesse. La création des politiques de la jeunesse est donc encore essentiellement locale. Suite aux actions entreprises par certaines municipalités du nord (en particulier Milan et Turin), elle a ensuite été progressivement étendue surtout aux villes de l’Italie du nord et du centre.

    7 (http://www.sora.at/euyoupart) La partie française de l’enquête a été conduite par Anne Muxel (CEVIPOF), la partie italienne par Gloria Cornolti, Paolo Franceschini et Renato Pocaterra (IARD).

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    Cicchelli, V., Bontempi, M., & Roudet, B. (2012). Chapitre 4. De nouvelles formes d’engagement ?. In A. Cavalli, V. Cicchelli, & O. Galland (éds.), Deux pays, deux jeunesses ?. Rennes: Presses universitaires de Rennes. https://doi.org/10.4000/books.pur.13229
    Cicchelli, Vincenzo, Marco Bontempi, et Bernard Roudet. « Chapitre 4. De nouvelles formes d’engagement ? ». In Deux pays, deux jeunesses ?, édité par Alessandro Cavalli, Vincenzo Cicchelli, et Olivier Galland. Rennes: Presses universitaires de Rennes, 2012. doi:10.4000/books.pur.13229.
    Cicchelli, Vincenzo, et al. « Chapitre 4. De nouvelles formes d’engagement ? ». Deux pays, deux jeunesses ?, édité par Alessandro Cavalli et al., Presses universitaires de Rennes, 2012, https://doi.org/10.4000/books.pur.13229.

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    Cavalli, A., Cicchelli, V., & Galland, O. (éds.). (2012). Deux pays, deux jeunesses ?. Rennes: Presses universitaires de Rennes. https://doi.org/10.4000/books.pur.13209
    Cavalli, Alessandro, Vincenzo Cicchelli, et Olivier Galland, éd. Deux pays, deux jeunesses ?. Rennes: Presses universitaires de Rennes, 2012. doi:10.4000/books.pur.13209.
    Cavalli, Alessandro, et al., éditeurs. Deux pays, deux jeunesses ?. Presses universitaires de Rennes, 2012, https://doi.org/10.4000/books.pur.13209.
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