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    Plan détaillé Texte intégral DES USAGES SOCIAUX DU DIALOGUE PUBLIC RESCAPÉ AU QUOTIDIEN : ENTRE SURSIS ET INSERTION RESCAPÉ EN RÉUNION : PERFORMANCES ET POSITIONS DANS L’ENTRE-DEUX JEU DU DISPOSITIF ET DISPOSITIF DU JEU Bibliographie Notes de bas de page Auteurs

    La voix des acteurs faibles

    Ce livre est recensé par

    • Frédérique Giraud, Lectures, mis en ligne le 30 janvier 2019. URL : https://journals.openedition.org/lectures/615 ; DOI : https://doi.org/10.4000/lectures.615
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    Table des matières

    La voix des sans domicile

    Des usages sociaux du jeu démocratique dans les Espaces Dialogue en Belgique

    Mathieu Berger et Margarita Sanchez-Mazas

    p. 181-194

    Entrées d’index

    Index géographique : France

    Texte intégral Bibliographie BIBLIOGRAPHIE Notes de bas de page Auteurs

    Texte intégral

    1En 2001, Thierry Detienne, ministre régional des Affaires sociales, met en place la structure Relais social dans des villes wallonnes aux prises avec d’importants phénomènes d’exclusion – Charleroi et Liège, puis Mons, La Louvière, Verviers et Namur. Les Relais sociaux (désormais : RS) sont des plateformes coordonnant, à l’échelle de chacune de ces villes, les associations et services publics d’urgence sociale, d’accueil de jour/nuit et de travail de rue. Ils ont pour mission d’organiser le dépassement du stade de l’urgence sociale et de travailler, au-delà, aux conditions de la réinsertion des usagers. Ce dépassement est programmé à partir de deux catégories d’actions : celles orientées vers la mutualisation des savoirs et ressources, à travers la mise en réseau des structures existantes, et celles destinées à ouvrir le travail social à la perspective de l’usager, à faciliter « sa participation dans le processus d’aide » et à « mettre en œuvre une concertation régulière1 ». La charte fondatrice du RS, en articulant un double registre connexionniste et civique2 (Boltanski et Chiapello, 1999 ; Boltanski et Thévenot, 1990), participe directement d’un « nouvel esprit de l’action publique moderne » (Blondiaux et Sintomer, 2002, p. 17) ayant inspiré ces dernières années une multitude de dispositifs dans les champs du développement local, de la santé et de la culture. Les RS de Charleroi et de Liège ont à ce titre chacun leur assemblée participative, leurs rencontres mensuelles ouvertes aux usagers, bénévoles et professionnels des différentes structures partenaires, dont nous avons suivi les évolutions de janvier 2004 à décembre 20053. Bien qu’initiés dans des circonstances différentes, les Espaces Dialogue4 des RS de Charleroi et de Liège partagent nombre de similitudes. Celles-ci portent sur les qualités du public imaginé et du public effectivement mobilisé en séance (Blondiaux, 2003), sur les méthodes et valeurs avancées dans l’animation, sur les objectifs poursuivis à travers ces rassemblements réguliers, ou plutôt sur l’opacité, la multiplicité et la hiérarchisation tacite de ces objectifs.

    DES USAGES SOCIAUX DU DIALOGUE PUBLIC

    2Né de la volonté confuse de « faire quelque chose avec les usagers » en vue de « faire bouger les choses », l’Espace Dialogue (ci-après : ED) n’est ni le lieu politique d’une large démocratisation des mesures prises au niveau des RS, ni le lieu gestionnaire d’une évaluation et d’une régulation concertée des structures d’aide et du travail des praticiens. Installé en terrain neutre, en marge des scènes politiques décisionnelles et en marge des scènes du quotidien de l’aide sociale, l’ED offre un forum hybride (Callon et al., 2001) d’un type particulier, où la poursuite de projets communs est subordonnée à la possibilité, pour l’usager et le travailleur social, de « se rappeler à l’autre » (Blondiaux et Levêque, 1999, p. 68) dans « un régime du partage » (Cardon et al., 1995), sur le mode de la discussion en table ronde et devant une tasse de café.

    3Plutôt que politiques ou gestionnaires, les enjeux saillants dégagés de la pratique de ces espaces et du discours de leurs organisateurs sont d’ordre capacitaire et d’ordre social (Bacqué et Sintomer, 1999, p. 124). Ils renvoient d’abord à l’opportunité d’une capacitation expressive et « citoyenne » de la personne démunie, aux « vertus pédagogiques » – voire thérapeutiques5 – du dialogue en public à travers lequel l’usager recouvrerait dignité et estime de soi. Ils renvoient ensuite à des attentes en termes de « convivialité », de « lien social », de « respect » et d’estime réciproque entre usagers et travailleurs sociaux, à une certaine pacification des rapports quotidiens d’aide et de dépendance6. La réflexion collective sur les situations de détresse et d’injustice proposée en ED semble en cela déjà rencontrer l’un de ses objectifs dans la constitution du collectif de réflexion7 et dans la place centrale que celui-ci accorde à l’usager et à sa parole. On assiste alors à un phénomène singulier : l’espace public de dialogue s’institue, non pas tellement comme une modalité de régulation des dispositifs d’aide existants, mais comme un dispositif d’aide additionnel où sont expérimentées, le temps de ces réunions, de nouvelles formes et de nouvelles relations d’aide appuyées sur les valeurs et apprentissages du débat démocratique.

    4En proposant un travail de mise en discours des situations de détresse sociale et une expérience d’écoute réciproque, les ED parviennent difficilement – et toujours ponctuellement – à mobiliser leur public cible : d’un côté, les travailleurs sociaux de première ligne, et de l’autre, surtout, les usagers des structures d’hébergement, la population vivant ces situations de détresse au quotidien (sans-abrisme, prostitution de rue, drogues dures…). Qui sont alors les individus durablement engagés dans ces espaces, échangeant, chaque mois et pendant plus de deux heures, informations, avis, témoignages, encouragements, reproches, plaisanteries, autour de thèmes récurrents (hébergement, santé, hygiène, aide alimentaire, assuétudes…) ? Du côté des aidants, de jeunes stagiaires et quelques représentants d’associations militantes et/ou bénévoles s’ajoutent au personnel du Relais social qui prend en charge la préparation, l’animation et le secrétariat de chaque réunion. Du côté des personnes précarisées, les ED de Charleroi et Liège peuvent compter sur la présence de cinq à dix participants réguliers : un « noyau dur » composé d’anciens usagers de l’urgence sociale, des « ex-sans-abri », des hommes qui se présentent parfois comme des « rescapés de la rue ». Malgré une frustration manifestée devant l’impossibilité d’agir concrètement sur les conditions de l’aide sociale depuis l’ED, ces participants manquent peu de rencontres. Leur présence, en qualité de personnes démunies, justifie lors de chaque séance l’existence d’un espace de discussion ; leur assiduité favorise au fil des séances la continuité des débats et une certaine épaisseur dans l’expérience collective.

    5En disposant actuellement d’un endroit où se loger, en bénéficiant de revenus d’insertion ou d’un chômage, d’un petit boulot ou d’un stage, ces personnes ne constituent plus à proprement parler un public en situation de « détresse sociale aiguë ». En échappant dans leur quotidien actuel aux réalités de la rue, elles ne se trouvent plus vitalement impliquées par les thèmes (la qualité de l’accueil dans les abris de nuit, les ravages de la toxicomanie, l’interdiction de la mendicité…) sur lesquels elles sont amenées à réagir en réunion. La place centrale que ces « rescapés » trouvent en séance invite à spécifier à nouveau les enjeux du dispositif de parole. On a moins affaire, en ED, à un ensemble de travailleurs sociaux faisant face aux revendications directes de sans-logis, qu’à un groupe de nouveaux professionnels du social (coordinateurs/animateurs) s’employant à faciliter, chez d’anciens usagers, l’émergence d’une parole solidaire et réflexive.

    RESCAPÉ AU QUOTIDIEN : ENTRE SURSIS ET INSERTION

    6Les enjeux d’une prise de parole régulière en ED, identifiés en termes de création de capacités individuelles et de lien social, méritent d’être pris au sérieux pour ces « rescapés » qui n’ont bien souvent échappé au sans-abrisme – au sort des « naufragés » étudiés par P. Declerck (2001) – que pour connaître l’existence du « sans domicile fixe ». Ils ont quitté les bancs publics, les abris de nuit, les métros, les halls, les gares, les immeubles abandonnés, ou le service urgences d’un hôpital (Hopper, 2003, p. 66) pour un petit appartement social, une roulotte, un lit chez des parents ou des proches. En quittant la rue, les « rescapés » que nous avons rencontrés ne se positionnent qu’à la lisière de la société, et éprouvent les tourments d’une nouvelle errance. Cette mobilité sociale minimale implique pour eux une désocialisation et la perte de certains avantages. En se voyant octroyer un appartement social exigu en périphérie de Charleroi, un individu peu mobile perd par exemple contact avec ses camarades du centre urbain. Quand il se rend en ville, il n’a plus accès au lieu d’accueil de jour et à la cafétéria sociale dont il était coutumier, et qui sont depuis peu réservés aux personnes qui n’ont pas de logement. Il n’a plus accès à certaines réductions, à des billets gratuits pour différents événements culturels ou sportifs. En revanche, en retrouvant un logement et une adresse, il est assailli par de nombreuses factures impayées. Il se dégage de ces nouvelles épreuves (surendettement, isolement, angoisse du retour à la rue, dépression, etc.) une détresse sociale et psychologique méconnue à laquelle ne correspond aucune aide adéquate.

    7Cette expérience du « rescapé » est celle de la liminalité (Hopper, 2003, p. 22), où, « pour la durée du passage, la personne est dans l’entre-deux, suspendue entre le rôle familier qu’elle a délaissé et les exigences inconnues d’une nouvelle vie ». Si, pour certains, ce passage est vécu de manière dynamique dans la perspective d’un retour à la société, d’autres errent dans l’intervalle depuis des années, en sursis. Une participation à l’Espace Dialogue accompagne ainsi pour certains un processus de réaffirmation identitaire, quand, pour d’autres, elle s’intègre plus modestement à une série d’activités sociales de tous ordres fonctionnant comme autant de « garde-fou » prévenant un retour à la rue. Tous trouvent une place reconnue autour de la table ronde : celle de la personne affaiblie capable d’articuler une parole en public, capable de répondre aux exigences d’une expérience collective basée sur le respect et l’écoute.

    RESCAPÉ EN RÉUNION : PERFORMANCES ET POSITIONS DANS L’ENTRE-DEUX

    8Après avoir esquissé l’intérêt de l’ED en regard de la situation particulière du public démuni qui l’investit, passons les portes des locaux de réunion et étudions plus précisément l’engagement de ces participants réguliers « rescapés », développé dans l’interaction et en référence à celui d’autres acteurs présents : les participants occasionnels usagers et les différents travailleurs sociaux. Dans cette section, nous voyons dans un premier temps comment les participants réguliers « rescapés », par une appropriation éclairée des codes de l’Espace Dialogue, par des capacités en termes de présentation et de maintien de soi, par la nature et le ton de leurs interventions, produisent un rôle de passeur tout en publiant la preuve de leur distinction sociale vis-à-vis du « gars de la rue » ou du participant occasionnel. Nous présentons ensuite plus succinctement le rapport ambigu, entre concurrence et connivence, que ces acteurs émergents en viennent à entretenir avec les travailleurs sociaux et les animateurs des Espaces Dialogue.

    Anciens usagers et usagers sur la scène publique

    Maîtrise des codes spatiaux et temporels de l’engagement

    9Lors de leur arrivée en réunion, et après avoir salué les personnes déjà présentes, les différents participants prennent place sur les sièges disponibles. Les chaises sont organisées en un espace qui, à Charleroi, se présente comme hiérarchisé. La salle propose une première ronde de chaises, un devant, invariablement occupé par les animateurs du Relais Social, et un fond, situé près de l’entrée et épais de trois à quatre rangées de sièges (voir croquis).

    Image

    10On remarque une tendance générale chez les participants occasionnels usagers à occuper les sièges du fond, par choix quand la salle est vide, et au moins par nécessité quand, lors de leur arrivée, la réunion bat déjà son plein et qu’il ne reste plus que ces sièges disponibles situés près de l’entrée. Le sociologue et autres curieux s’installent eux aussi, généralement, au fond.

    11Les participants réguliers « rescapés », souvent ponctuels, n’hésitent pas à rejoindre les animateurs sur le devant, à s’installer en première ligne. En jouant avec les codes, un régulier pourra s’installer tout au fond, affalé sur la table à café, et marquer ainsi une distance parlante à l’égard du cercle de dialogue et du « blabla » ; ou, dans une même défiance, s’asseoir par terre presque au centre du cercle de discussion.

    12Ces tendances dans la distribution des places s’accompagnent généralement d’une restriction du dialogue fluide aux participants du devant et en particulier de la première ronde. Si certains participants – à l’instar du « rescapé » invariablement installé sur la table du fond – n’hésitent pas à modifier cette donne, cela ne survient que par interférences ; suite à quoi le plein échange reprend entre les participants des premières lignes. L’engagement soutenu des participants « rescapés » et des animateurs/coordinateurs dresse la carte d’une rencontre (Goffman, 1961 ; Gamson, 1985), où s’organisent des régions (Goffman, 1959, p. 109-149) et s’établissent des frontières (Goffman, 1963, p. 151-165). À côté des participants ratifiés d’une séquence d’interaction, on retrouvera des spectateurs (1963, p. 91), les participants usagers ou professionnels installés de manière moins centrale et, la plupart du temps, silencieux.

    13La difficile inscription d’un participant dans la temporalité d’une réunion peut également poser des obstacles à son intégration au dialogue proposé. Ainsi, il arrive régulièrement que quelques usagers, ayant rejoint la réunion avec beaucoup de retard, initient entre retardataires une autre rencontre au fond de la salle, créent un chœur venant à concurrencer la communication dominante (Goffman, 1981, p. 134).

    14Comme le montrent ces exemples, le setting est pleinement constitutif des événements de langage (Hymes, 1972), en tant que ressource « collectivement orchestrée et à partir de laquelle les participants peuvent donner le ton de leur propre performance et gagner en perspicacité sur le potentiel et les contributions des autres » (Duranti, 1994, p. 55). Les activités de positionnement (Goffman, 1981, p. 124-159) auxquelles se livrent les intervenants peuvent s’appuyer sur – et se trouver contraintes par – la configuration des positions tenues dans l’espace physique. Ainsi, le rôle de passeur joué en réunion par certains « rescapés » est-il produit à travers des performances qui ont une orientation spatiale – quand par exemple un « rescapé », participant ratifié d’un échange situé à l’avant de la salle, se retourne vers le fond pour solliciter la réaction de tiers sans-logis8. La maîtrise de ces codes, dans le rapport à l’agencement (Callon, 2003) et aux contextes pratiques de la communication, renvoie à la constitution d’habitudes, chez des acteurs qui, plus que d’autres, habitent ces espaces.

    Présentation de soi, maintien de soi

    15En ED, certaines choses sont faites pour que la présentation de soi ne représente pas un trop grand obstacle. Par un accueil chaleureux, des mots d’humour, l’utilisation de sobriquets (« Ah, voilà le grand chef ! »), les animateurs promettent en quelque sorte à la personne démunie de « maintenir la conception du soi » qu’elle propose en arrivant (Goffman, 1967, p. 60). Les pratiques vouées à rassurer d’emblée les usagers quant aux attentes à leur égard n’éliminent pas pour autant ces questions de présentation de soi et de distinction entre participants précarisés. Les débuts de réunion sont, à nouveau, des moments privilégiés pour l’étude de ces phénomènes.

    16Les participants réguliers « rescapés » apparaissent en réunion généralement sobres et propres9. En entrant, ils s’emploient à saluer toute personne présente en l’appelant par son prénom. Ils expliquent alors souvent combien ils sont occupés par leurs activités, leurs projets, et traitent à cet égard la séance à venir comme une « réunion de travail ». Beaucoup viennent munis d’un calepin, certains apportent un classeur dans lequel ils organisent les documents distribués. Les rares sans-logis présents, quant à eux, après s’être servi une tasse de café, prennent place en silence – souvent à côté du travailleur social ou du bénévole les accompagnant.

    17Une fois la séance ouverte, commence le tour de table des présentations. Les participants occasionnels usagers se présentent rapidement par leur prénom, parfois complété de leur nom de famille. D’autres, ayant actuellement un logement, ne manquent pas de le mentionner (« J’étais sans-abri jusqu’il n’y a pas longtemps »). Parmi les réguliers, l’énonciation du nom est souvent complétée d’un titre. Certains font état de leur nouveau statut : « X, bénévole », « X, je fais des études d’éducateur ». De nombreux participants réguliers représentent en réunion un groupe, une association, une organisation de base : « X, pour le Front Commun SDF », « X, du Comité de l’espérance », « X, bénévole à la cafétéria sociale. » L’ouverture de la réunion est un moment privilégié pour revendiquer publiquement une distance par rapport au statut de simple usager des services sociaux, où s’affiche une responsabilité active, l’association à un collectif ou à l’œuvre d’une structure. Les plus indépendants des participants réguliers y affirment également une distinction, en référence ici à une caractéristique personnelle rare : « X, emmerdeur professionnel », « Moi, c’est X, je suis le petit diable qui sort de sa boîte pour emmerder le monde », « X, indéfini », « X, apatride », etc. Le tour de table entamé, l’animateur tend une feuille de papier : « On fait passer une liste avec les noms et les adresses. Si vous n’avez pas de logis, vous n’inscrivez rien ou le nom de la structure qui vous loge. » Cette activité, développée dans le même temps que la présentation orale, renforce la distinction entre participants « rescapés » et usagers de l’urgence sociale.

    18L’observation de hiérarchies en train de se faire (Duranti, 1994, p. 47-84) dans ces moments introductifs devrait nous inviter à considérer deux compétences articulées, sur lesquelles certains participants peuvent appuyer leur travail de figuration, et desquelles d’autres sont privés. Premièrement, toute technique de présentation de soi en public est conditionnée par la possibilité première d’un maintien de soi (Breviglieri, 2002), dont font preuve la plupart des participants « rescapés de la rue », à la différence des rares sans-logis présents10. Ensuite, ces capacités s’ancrent, chez les « réguliers », dans une temporalité longue. Pour ceux-ci, et à la différence des « occasionnels », l’arrivée en réunion et le tour de table de présentation ne renvoient pas seulement à une succession de coups et de performances, mais aussi à la formation d’habitudes, à « la possibilité de pouvoir à coup sûr se maintenir dans l’espace du vivre ensemble » (p. 328).

    Expression et prise de rôles

    19L’affichage public des distinctions à marquer entre anciens sans-abri et participants actuellement usagers de l’urgence sociale fonctionne enfin au niveau de la nature et du ton des interventions, au niveau des ressources discursives et des orientations dans la prise de rôles en réunion.

    Le rapport à la critique

    20Les participants démunis investissent régulièrement un régime critique. Typiquement, les participants « rescapés » avancent des arguments d’ordre juridique ou politique, soulèvent la prétendue « illégalité » des procédures en vigueur dans les structures sociales, interrogent la « légitimité » des travailleurs sociaux. Ils en ont après « l’État », « la municipalité », « la loi », « le règlement », etc. Chez les usagers, la critique prend plus facilement la forme de l’invective, de l’injure, de l’attaque personnelle. Elle ne s’inscrit pas, à la différence de celle des « rescapés », dans des épreuves de grandeur et fait l’économie de justifications (Boltanski et Thévenot, 1991, p. 164). Chez les plus affaiblis des sans-logis, souvent, le discours amer « n’a plus de cohérence, semble ne plus rien concerner, ni personne, dégénérant en soliloque et s’exhibant soit dans une parole étouffée à peine audible, soit dans de violents éclats de voix » (Breviglieri, 2002, p. 329). Ces moments de démonstration de violence ou de fragilité extrême, de la part de nouveaux venus, peuvent jeter un trouble profond sur l’espace de discussion et son animation, provoquer de longs silences, des échanges de regards embarrassés et parfois des départs.

    21Si par moments les participants réguliers « rescapés » peuvent se montrer agressifs, irrespectueux, arrogants, vulgaires, ces excès seront plus facilement tolérés. S’ils font soupirer certains, ils feront sourire les autres. Des mois, des années de dialogue ont créé et renforcé des relations d’interconnaissance, de familiarité et une civilité contraignante (Pharo, 1992). La plupart du temps, le recours à une vulgarité même excessive chez un « régulier » ne met pas la poursuite du dialogue en danger et, à cet égard, n’est pas soulevé : ça fait partie du personnage par ailleurs si généreux et enthousiaste.

    Le rapport à l’Espace Dialogue et à ses règles

    22La critique des participants sans-abri va aussi, bien souvent, à l’existence même du dispositif de parole. Ce dernier cas est intéressant, car s’il arrive aux « réguliers » de critiquer les contenus abordés en ED ou de regretter vivement l’absence d’un rapport plus clair à l’action, jamais ils n’en arrivent à remettre en question le bien fondé d’un espace de discussion. Les critiques adressées à l’ED par les « réguliers » le sont sur un ton grave, qui détonne avec l’ironie des « occasionnels ». Ils sont d’ailleurs souvent les premiers à pointer l’aspect sacré de ces rencontres et à en rappeler rituellement les normes aux contrevenants (« Ici, on ne pointe pas du doigt quelqu’un en particulier ! »; « Tout le monde a le droit de venir à l’Espace Dialogue »…).

    Le rapport à l’information

    23Le participant occasionnel se pose en consommateur d’informations précises directement relatives à son quotidien (nouveaux horaires des abris de nuit, disponibilité de nouveaux lits, lieux des distributions de nourriture, infos sur les cautions locatives, etc.). Les participants réguliers sont également en demande d’informations concernant le sort de leurs camarades de la rue, s’inquiètent de leur qualité ou de leur véracité (articles de loi, copie de documents officiels, de lettres). Parallèlement, ils proposent des informations aux travailleurs sociaux, en fonction de l’« actualité de la rue ». Ils ont souvent à cœur de valoriser ce rôle de relais, exercé depuis et vers la rue (« Moi, je suis le tam-tam »).

    Le rapport à la voix

    24Les « rescapés » associent nombre de leurs interventions à la voix absente, inaudible, inarticulée ou éphémère des sans-abri. Ils se posent en porte-parole (« Nous voulons plus de lits ! »), en défenseurs des opprimés et en dénonciateurs des injustices (« Je ne sais pas si quelqu’un en a quelque chose à foutre, mais trois personnes ont encore dormi le long du canal cette nuit »). En s’appuyant sur les revendications directes des participants occasionnels, ils développent un discours réflexif et engagent des montées en généralité (« Ce que tu dis, ça vaut pour l’ensemble des miséreux de Charleroi… C’est inhumain de refuser l’abri à quelqu’un, qui que ce soit… »). Le témoignage, registre fréquent chez les « anciens de la rue », très rare chez les sans-abri effectifs, est également utilisé afin d’apporter un éclairage en réunion sur les logiques et motifs des sans logis (« Moi avant, je ne parlais pas. Je n’avais pas confiance »).

    25Au fil des mois, l’expression des participants « rescapés » s’organise ainsi autour de registres variés. Leur engagement se stabilise à travers la composition d’un répertoire de rôles à partir duquel ils travaillent leur position, au gré des discussions. En disposant de davantage de liberté que les usagers effectifs – contraints par l’urgence – et que les travailleurs sociaux – tenus par une déontologie et un « devoir de réserve » –, ils cumulent des rôles qu’ils jouent tour à tour dans l’intervalle (le porte-parole, le défenseur des miséreux, le relais, le traducteur, le médiateur, le garant des règles). On touche peut-être ici, avec la possibilité d’une expérimentation politique de soi, à un potentiel de l’expérience liminale des « rescapés », dont ils se saisissent pour faire entendre une autre voix : celle s’efforçant de publier, de valoriser, de faire reconnaître leur distinction, mais aussi leur identité, comme acteurs pivot, centraux dans l’Espace Dialogue, comme « bénévoles » plutôt qu’anciens « bénéficiaires ».

    Anciens usagers et travailleurs sociaux sur la scène publique

    26En réunion, beaucoup de travailleurs sociaux partagent avec les participants occasionnels usagers une posture de spectateurs. Ils sont là avant tout pour écouter la parole des gens de la rue. Les animateurs, eux-mêmes, s’en tiennent souvent au minimum (introduction de la réunion, modération des propos, informations, clôture). L’ED, en demeurant sans prise réelle sur l’action publique, reste avant tout « l’espace de la personne démunie ». Quand se pose par exemple la question d’ouvrir l’espace de parole à l’étranger, à la télévision ou à l’université, « la parole de l’usager », à travers celle du participant régulier « rescapé », fait office de sentence. Suite à notre demande d’observer les réunions organisées à Charleroi, l’animateur se tourne, hésitant, vers deux participants « rescapés » de la première heure. L’un d’eux déclare : « S’il veut observer, il observe. L’Espace Dialogue, c’est pour tous. » Tout se passe comme si ces anciens de la rue, par leur assiduité, par le fait même qu’ils puissent porter un discours raisonné en leur qualité d’individus précarisés, faisaient valoir une autorité morale sur ces espaces, c’est-à-dire sur les professionnels du social et avec leur complicité.

    27Installés dans ce rôle de sages, les « habitués » soutiennent parfois les travailleurs sociaux dans leurs tâches de mobilisation et de prévention/résolution de conflit, en utilisant couramment un « Nous » ou un « On » supra-ordonné (« C’est notre problème à tous, travailleurs et usagers, parce qu’on est tous des utilisateurs de l’Espace Dialogue ») ou en rappelant eux-mêmes les règles de respect de l’autre à appliquer.

    28Nous l’avons dit, à Charleroi, les coordinateurs et les participants installés sur le devant de la salle entretiennent un rapport privilégié et définissent souvent, sur de longues séquences, la communication dominante. Celle-ci se compose d’échanges d’informations, de témoignages, de propositions, de remerciements, de coups de gueule, de conflits routinisés entre personnes qui ont appris à se connaître. À travers le respect des grammaires constituantes d’une culture civique propre à l’Espace Dialogue, s’organise un travail d’équipe concourant – si ce n’est dans la visée, du moins dans les faits – à éviter ou retarder la prise de parole potentiellement contraignante d’inconnus (Futrell, 2002 ; Goffman, 1959, p. 83-108). Cette collaboration entre travailleurs et habitués jouant le jeu n’est pas à l’abri d’interventions extérieures par lesquelles se présentent des éléments pouvant affaiblir le travail d’équipe. Ces interventions peuvent être le fait d’« occasionnels », mais aussi d’autres « réguliers » qui peuvent à tout moment – depuis le fond de la salle par exemple – lever le voile sur cette collusion et la dénoncer publiquement.

    29À travers la familiarité, l’interconnaissance et le travail d’équipe en réunion, il s’établit une double relation de connivence/concurrence entre, d’une part, les participants « rescapés », critiques mais disciplinés (Foucault, 1971), et, d’autre part, les travailleurs et animateurs du Relais social. La pratique soutenue du dialogue nourrit « une relation compliquée et symbiotique » et contribue à l’assimilation – jamais complète cependant – des perspectives de l’autre (Wiseman, 1969, p. 269). Cette relation incite parfois ces protagonistes à d’étonnantes performances. Lors d’une rencontre de collectifs citoyens à laquelle le RS de Charleroi était convié, celui-ci choisit de présenter son Espace Dialogue par un sketch parodique. On y voit les participants réguliers « rescapés » et les animateurs responsables reproduire en direct l’une de leurs réunions, tout en intervertissant leurs rôles. Cet exercice, convaincant dans la performance – par la capacité à assimiler et à produire publiquement la perspective de l’autre – mais tout à fait burlesque par ailleurs – à en juger par les éclats de rire dans la salle –, illustre l’un des effets ambivalents de l’Espace Dialogue.

    JEU DU DISPOSITIF ET DISPOSITIF DU JEU

    30Dans ce texte, nous avons essayé de montrer comment certaines personnes précarisées et affaiblies pouvaient se mobiliser durablement sur un espace institutionnel de discussion et parvenaient à imposer une figure intermédiaire et de nouveaux rôles – relais, porte-parole, traducteur, passeur, etc. – au cœur de la relation asymétrique entre l’institution d’urgence sociale et ses usagers. C’est à travers l’engagement de ces « rescapés de la rue » que se considèrent les enjeux capacitaires et de lien social ayant, semble-t-il, motivé la création d’assemblées participatives à Charleroi et à Liège. Pour ces individus maintenus entre deux paliers sociaux, c’est à travers la menée en public d’activités pratiques et discursives de positionnement et de présentation de soi que s’administre la preuve répétée de capacités et d’une distinction sociale engageant une référence au public absent, périphérique ou inaudible des sans-logis. C’est à travers la stabilisation d’un collectif de protagonistes précarisés et professionnels, d’une équipe privilégiant et protégeant des valeurs de convivialité, d’écoute et de respect mutuels, que s’obtient et opère un certain lien social.

    31Pour ces « rescapés », souvent fort éprouvés par un parcours et un quotidien marqués par l’errance, la solitude et l’inconsidération, le fait d’émerger sur ces espaces comme sujets expressifs, interprètes capables et membres reconnus prend une importance toute particulière, que le sociologue serait mal avisé d’ignorer. À l’heure où ces lieux de parole sont appelés à se multiplier dans le domaine de l’urgence sociale, l’observateur pourra par contre interroger le cadre à l’intérieur duquel se réalisent actuellement ces capacités et ce lien social. Ce cadre qui semble être celui du jeu.

    32Il y a « du jeu », premièrement, dans le sens d’une marge de manœuvre entre les objectifs assignés par l’institution d’aide sociale à son Espace Dialogue. Entre les discours hétérogènes qu’articule le dispositif, « il y a comme un jeu, des changements de positions, des modifications de fonctions » (Foucault, 2001, p. 299). En l’absence de connexions entre l’ED et les différents lieux de la décision et de l’action, les éléments d’un discours démocratique (« espace public », « participation », « citoyenneté », etc.) tendent ici à « justifier et masquer une pratique » assistantielle ou thérapeutique, et à « fonctionner comme réinterprétation seconde de cette pratique » (ibid., p. 299). Si l’ED vient compléter la politique d’accompagnement individuel d’une dimension collective, c’est alors pour inscrire ses enjeux dans l’interface entre une « politique personnalisée » et un « activisme thérapeutique » (Lichterman, 2003, p. 36).

    33À ce jeu du dispositif correspond un dispositif du jeu : l’Espace Dialogue à la fois comme espace scénique de représentation et comme espace ludique d’expérimentation. C’est dans les circonstances informelles d’un lieu de parole sans prise sur les pratiques et les réponses apportées sur le terrain que le participant « rescapé » émerge comme acteur de l’urgence sociale. En jouant une partition valorisée (tour à tour le porte-parole, le défenseur des opprimés, le relais, le traducteur…), il se dote d’une parole à laquelle on accordera une importance centrale dans les limites du jeu, mais reste privé d’une voice (Hirschman, 1970) susceptible de porter au-delà. Ainsi, l’ED est-il aussi potentiellement l’espace de l’illusion : illusion d’une omnipotence chez la personne affaiblie mise sur un piédestal (Winnicott, 1975 ; Zaccaï-Reyners, 2006), illusion d’une « mutualité respectueuse » dans « l’identification croisée » (Declerck, 2001 ; Zaccaï-Reyners, 2006) mise en scène dans le sketch, illusion du changement dans ces moments d’apparition publique précédant un retour aux tourments du quotidien.

    34Les « rescapés » le comprennent bien : ils sont actuellement les acteurs forts de ce qui pourrait s’appeler peut-être un dispositif faible (cf. également Corinne Rostaing dans cet ouvrage). Leur engagement solidaire ne profite, dans l’essentiel, qu’à eux-mêmes, dans les conditions ambivalentes du jeu, et à travers une certaine confiscation de l’espace de discussion. Ce dernier point nous semble important : si les responsables des ED renoncent au pari de la concertation politique au profit d’un espace d’édification de la personne et du groupe misant sur l’expression raisonnée, l’écoute et le respect mutuels, ces ED deviennent des lieux d’euphémisation de la relation d’aide sociale, où la parole du sans-logis, celle de l’urgence, est construite comme malvenue.

    Bibliographie

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    Blondiaux, L., & Sintomer, Y. (2009). L’impératif délibératif. Rue Descartes, 63(1), 28. https://doi.org/10.3917/rdes.063.0028
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    Cette bibliographie a été enrichie de toutes les références bibliographiques automatiquement générées par Bilbo en utilisant Crossref.

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    Zaccaï-Reyners N., « Respect et relations asymétriques. Quelques figures de la relation de soin », Esprit, janvier, 2006, p. 95-108.

    Notes de bas de page

    1 Charte du Relais social (2001).

    2 Les notions de « réseau », de « relais », d’« ouverture » croisent celles de « solidarité », de « citoyenneté », de « participation ».

    3 Mathieu Berger a assisté à 23 réunions (16 à Liège/7 à Charleroi), de janvier 2004 à décembre 2005 Bruno Rochet, dans le cadre de son mémoire de maîtrise en Psychologie sociale, a observé 7 réunions à Charleroi, de novembre 2004 à mai 2005 Notre matériel se constitue des notes manuelles restituant pour chaque réunion, et, de la manière la plus complète possible, de l’ensemble des interventions orales, ainsi qu’un maximum d’indications scéniques Outre ces notes de réunions, Bruno Rochet a mené trois entretiens approfondis avec d’anciens sans abri Mathieu Berger a pu bénéficier de nombreux moments informels en leur compagnie.

    4 Ces lieux sont appelés « Espace Dialogue » à Liège, et « Parlons-en » à Charleroi Par facilité, nous parlerons d’Espace Dialogue (ED) dans les deux cas.

    5 Dans l’un des RS wallons, il était question à un moment que l’animation des séances soit assurée par un duo psychologue – infirmière sociale.

    6 À Charleroi, l’espace « Parlons-en » fut mis en place suite à une violente agression dont fut victime une personne travaillant dans un abri de nuit.

    7 Ce qui rapproche les Espaces Dialogue de groupes de parole à visée thérapeutique (alcoolisme, santé mentale…).

    8 Erving Goffman appelle cantonnade (crossplay) cette « communication entre participants ratifiés et tiers, par-dessus les frontières de la rencontre dominante » (1981, p 134 ; 1987, p 143).

    9 Pour l’un d’entre eux, c’est à travers un look et une attitude punk que se travaille une face favorable.

    10 Selon Marc Breviglieri, l’incapacité à se maintenir est en effet l’horizon qui menace la personne sans-logis, précisément dans la mesure où elle quitte la « relation d’habiter » (2002, p. 319), « comme lieu où s’assure un vivre dans la proximité et comme moment d’édification de la personnalité » (ibid, p. 321).

    Auteurs

    • Mathieu Berger
    • Margarita Sanchez-Mazas
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    2012

    Le passage à l'écriture

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    1 Charte du Relais social (2001).

    2 Les notions de « réseau », de « relais », d’« ouverture » croisent celles de « solidarité », de « citoyenneté », de « participation ».

    3 Mathieu Berger a assisté à 23 réunions (16 à Liège/7 à Charleroi), de janvier 2004 à décembre 2005 Bruno Rochet, dans le cadre de son mémoire de maîtrise en Psychologie sociale, a observé 7 réunions à Charleroi, de novembre 2004 à mai 2005 Notre matériel se constitue des notes manuelles restituant pour chaque réunion, et, de la manière la plus complète possible, de l’ensemble des interventions orales, ainsi qu’un maximum d’indications scéniques Outre ces notes de réunions, Bruno Rochet a mené trois entretiens approfondis avec d’anciens sans abri Mathieu Berger a pu bénéficier de nombreux moments informels en leur compagnie.

    4 Ces lieux sont appelés « Espace Dialogue » à Liège, et « Parlons-en » à Charleroi Par facilité, nous parlerons d’Espace Dialogue (ED) dans les deux cas.

    5 Dans l’un des RS wallons, il était question à un moment que l’animation des séances soit assurée par un duo psychologue – infirmière sociale.

    6 À Charleroi, l’espace « Parlons-en » fut mis en place suite à une violente agression dont fut victime une personne travaillant dans un abri de nuit.

    7 Ce qui rapproche les Espaces Dialogue de groupes de parole à visée thérapeutique (alcoolisme, santé mentale…).

    8 Erving Goffman appelle cantonnade (crossplay) cette « communication entre participants ratifiés et tiers, par-dessus les frontières de la rencontre dominante » (1981, p 134 ; 1987, p 143).

    9 Pour l’un d’entre eux, c’est à travers un look et une attitude punk que se travaille une face favorable.

    10 Selon Marc Breviglieri, l’incapacité à se maintenir est en effet l’horizon qui menace la personne sans-logis, précisément dans la mesure où elle quitte la « relation d’habiter » (2002, p. 319), « comme lieu où s’assure un vivre dans la proximité et comme moment d’édification de la personnalité » (ibid, p. 321).

    La voix des acteurs faibles

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    Ce livre est cité par

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    Berger, M., & Sanchez-Mazas, M. (2008). La voix des sans domicile. In F. Giuliani, D. Laforgue, & J.-P. Payet (éds.), La voix des acteurs faibles (1‑). Presses universitaires de Rennes. https://doi.org/10.4000/books.pur.13080
    Berger, Mathieu, et Margarita Sanchez-Mazas. « La voix des sans domicile ». In La voix des acteurs faibles, édité par Frédérique Giuliani, Denis Laforgue, et Jean-Paul Payet. Rennes: Presses universitaires de Rennes, 2008. https://doi.org/10.4000/books.pur.13080.
    Berger, Mathieu, et Margarita Sanchez-Mazas. « La voix des sans domicile ». La voix des acteurs faibles, édité par Frédérique Giuliani et al., Presses universitaires de Rennes, 2008, https://doi.org/10.4000/books.pur.13080.

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    Giuliani, F., Laforgue, D., & Payet, J.-P. (éds.). (2008). La voix des acteurs faibles (1‑). Presses universitaires de Rennes. https://doi.org/10.4000/books.pur.13048
    Giuliani, Frédérique, Denis Laforgue, et Jean-Paul Payet, éd. La voix des acteurs faibles. Rennes: Presses universitaires de Rennes, 2008. https://doi.org/10.4000/books.pur.13048.
    Giuliani, Frédérique, et al., éditeurs. La voix des acteurs faibles. Presses universitaires de Rennes, 2008, https://doi.org/10.4000/books.pur.13048.
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