1L’étude monographique du département actuel de l’Essonne1 pendant la décennie révolutionnaire ouvre de larges perspectives pour une réflexion sur les engagements et les destins des nobles, dans un espace de 196 communes, 109 000 habitants2. Les angles d’approche sont extrêmement variés, à l’image des noblesses qui vivent dans le sud de la Seine-et-Oise, à proximité des capitales politiques et économiques du pays, Versailles et Paris. Il n’existe pas à ce jour d’étude centrée sur le deuxième ordre, mais une multitude de publications éclatées3, qui rendent à la fois novatrice mais délicate toute tentative de synthèse et de confrontation avec les problématiques nationales ou générales récentes sur la ou les noblesses. Ne pouvant donner une image exhaustive ou prosopographique de ces destins, nous tenterons une réflexion thématique, en abordant au moyen d’exemples suggestifs ces questionnements, sans masquer les limites et les contradictions d’une telle entreprise. Le plan, classique mais rythmé par une série de questions-réponses4, définira la place et le poids des nobles dans l’espace essonnien au début de la décennie, les types de comportements face aux législations et à la périodisation de la Révolution entre adhésion, résistance et Terreur, et tentera un bilan raisonné des pertes, des continuités et des recompositions des familles nobles au moment de leur basculement dans le siècle des notables.

Quel est le poids de la noblesse en Essonne à la veille de la Révolution ?

2Il serait vain d’esquisser seulement un décompte de la population noble par rapport aux 109 000 habitants de l’Essonne. De multiples monographies permettent de relever les familles résidant, au moins en partie sur leurs terres, résidences partagées avec les hôtels parisiens. Plusieurs noblesses se distinguent, selon leur rang, leurs fortunes, leurs liens et réseaux. Pour le bailliage d’Étampes, une centaine de famille sont inscrites à l’assemblée générale du printemps 1789, mais le bailliage déborde par rapport au département actuel. Il en est de même pour le district de Dourdan. Pour celui de Corbeil, 90 paroisses et communes, le calcul est possible, sachant que la plupart des familles ont double résidence. On peut ainsi estimer à 400 chefs de famille et 1 500 nobles au total pour l’ensemble du département, soit près de 1,5 % de la population totale estimée en 1789.

3Une noblesse proche de la cour et de la monarchie a acheté des châteaux à une vingtaine ou trentaine de kilomètres de la capitale. Le comte de Provence, qui possède Brunoy et a créé en 1774 une capitainerie des chasses pour la forêt de Sénart, en est l’exemple le plus marquant5. Cette noblesse de cour, qui compte certains des grands noms de la noblesse d’épée, se fréquente assidûment, dans les salons des Grimaldi, des Noailles, des Condé ou des Bourbon. D’autres cercles sont animés par les familles de Talaru, de Vintimille (à Savigny-sur-Orge), de Mouchy, de Montmorency (à Brétigny-sur-Orge), de Bernard de Balainvilliers (intendant du Languedoc) à Montlhéry, de Boulainvilliers (prévôt de Paris) à Montgeron6, de Villeroy dans la région de Corbeil et Mennecy7, de la comtesse de Charolais à Athis, etc. Une noblesse de robe compte de grands noms des cours souveraines, comme les Joly (à Fleury), les Lamoignon (à Bâville), les Foulon d’Écotais ou les Bertier de Sauvigny autour de Sainte-Geneviève-des-Bois. Une noblesse plus récente, dont l’anoblissement a pu poser problème, vit fastueusement ou se convertit à la physiocratie et à l’économie politique moderne, comme les Laborde de Méréville8, comprenant quelques « fermiers gentilshommes9 ». Enfin, une noblesse « traditionnelle » se caractérise par une présence constante sur des terres dont les revenus seigneuriaux constituent l’essentiel des revenus. L’étude poussée des rôles d’imposition, possible pour 1789-1790, permettrait de situer ces nobles dans l’échelle sociale et économique de leurs communes respectives.

4L’état des châteaux et demeures de la noblesse « essonnienne » rend compte de son importance croissante au siècle des Lumières. Les châteaux de Courances, de Chamarande, de Courson, de Farcheville, du Marais, de Palaiseau, de Brunoy, entre autres, témoignent d’un mode et d’un art de vivre particulièrement homogènes. La chasse est d’ailleurs omniprésente dans les activités et les représentations des nobles, dans la forêt de la capitainerie de Sénart comme dans celles de Séquigny ou de Dourdan. Entre 1776 et 1789, le roi est ainsi venu chasser une quarantaine de fois chez son frère, le comte de Provence10. L’autre marqueur est l’art des jardins, particulièrement éloquent, du parc de Méréville, décoré par Hubert Robert, jusqu’au temple de la Gloire à Orsay11. Sur les sites de coteaux de la rive gauche de la Seine, des parcs se succèdent – 4 à Viry, 5 à Épinay-sur-Orge –, offrant un cadre de « statues, obélisques, rotondes, pavillons, grottes de rocaille, bassins, ruisseaux et cascades » sur les modèles de Versailles et de Choisy-le-Roi12. Dans l’ensemble, la noblesse « essonnienne » n’est cependant présente qu’une partie de l’année dans ses châteaux, où elle mène une vie conforme aux normes aristocratiques, fondée sur la villégiature, tandis que l’essentiel de son activité – et de sa résidence – se situe à Paris ou Versailles, dans les hôtels et les salons des capitales.

5D’une étude de Jean Jacquart13 aux rôles de tailles de 1789 (qui prennent en compte les revenus des nobles), on peut suivre l’importance foncière de la noblesse, entre le XVI^e et le XVIII^e siècle. La synthèse de Jean Bastié sur un ensemble d’une quinzaine de communes de l’Essonne (rive gauche de la Seine), de Paray à Brétigny, montre bien les contrastes de l’emprise des nobles sur les terroirs14. S’il existe de grands seigneurs, nobles et propriétaires comme le comte de Provence autour de Brunoy, le prince de Condé15 à Palaiseau, le duc de Villeroy autour de Corbeil et de Mennecy, les Vintimille à Savigny, les Bertier de Sauvigny autour de Morsang et Sainte-Geneviève, les Laborde à Méréville, les Noailles-Mouchy à Arpajon, de nombreuses communes sont plutôt en présence d’un clergé grand propriétaire, héritage des abbayes royales du Moyen Âge, voire à une noblesse sans biens propres comme à Bondoufle16. L’étude la plus précise concerne la région de Montlhéry, où des nobles comme Bernard de Balainvilliers17 peuvent posséder jusqu’à 47 % du terroir de certaines des treize paroisses étudiées. Les estimations d’ensemble oscillent entre un quart et un tiers des terres18, avant d’envisager la question plus délicate des droits seigneuriaux et du poids de la féodalité19. La situation économique semble donc conforme, voire supérieure aux estimations nationales, avec de très grandes disparités.

Quelles doléances relèvent de la noblesse au printemps 1789 ?

6Les cahiers de doléances ont été minutieusement analysés par des historiens, locaux et généralistes20. Leurs enseignements relatifs à la noblesse ont fait l’objet d’études ponctuelles, dont les conclusions partielles peuvent être esquissées ici. Plus de 160 cahiers sur 198 paroisses ont été retrouvés et partiellement publiés et étudiés au moment du bicentenaire de la Révolution21. On ne pourra pas faire état d’une unanimité, voire d’une majorité d’opinions négatives, tant les situations varient, du seigneur absentéiste et tatillon pour le recouvrement de ses redevances au seigneur présent et vu comme un bienfaiteur par une partie au moins de ses tenanciers.

7Si l’on s’en tient à l’essentiel, les paroisses de l’Essonne sont quasiment unanimes à dénoncer les abus, vexations et méfaits des chasses (royales et seigneuriales), soit 68 cahiers sur 75 considérés22. La plupart veulent l’abolition pure et simple de ce privilège, tandis que d’autres entendent dédommager les seigneurs23, voire partager avec eux le droit de détruire le gibier. Les colombiers et les pigeons sont particulièrement dénoncés dans le Val d’Yerres, autour de la forêt de Sénart24, et à Épinay-sur-Orge, où le seigneur de Montcloux doit passer un compromis avec ses paysans25. La question des pouvoirs et des droits seigneuriaux est bien plus complexe. Les doléances varient selon l’ampleur et le poids de la perception des redevances. Dans les confins de la Beauce étampoise, les champarts sont fortement dénoncés et les communautés demandent leur abolition26. De nombreux litiges opposent les communautés et les seigneurs autour des biens communaux, quand ils ont pu se maintenir, par exemple pour les Uzelles de Draveil27 ou les bois de Sequigny28, pour les habitants de Morsang-sur-Orge. Le duc de Villeroy voit contester certaines sources de revenus considérées comme arbitraires : péages, droit de plantation29, abus de corvées pour les chemins conduisant au château seigneurial. La question épineuse des justices seigneuriales alimentera le débat en cours sur la pertinence et la réception de ces institutions30. Si neuf cahiers demandent la suppression pure et simple des justices seigneuriales, arbitraires et partisanes, sept en acceptent le maintien. Il faudrait nuancer ces conclusions partielles par l’état des principaux rédacteurs des cahiers, plus ou moins proches des nobles en place, comme à Mennecy, où deux cahiers s’opposent, dans le conflit latent entre le seigneur et le curé contestataire31.

8Il convient toutefois de ne pas se méprendre sur les conclusions liées à cet équilibre apparent. L’ampleur ou les limites de la « réaction seigneuriale32 » transparaissent à la lecture finale des cahiers et trouveront des prolongements dans le cours de la Révolution. De nombreux nobles engagés dans les projets de réforme de la société d’Ancien Régime, comme le comte de Canclaux à Ballancourt, demeurent des gestionnaires avisés de leurs domaines et recouvrent avec rigueur les redevances qui constituent l’essentiel de leurs revenus. Cela n’annule pas la gestion paternelle ou paternaliste de ces nobles qui restent les premiers employeurs de la paroisse et qui dotent souvent celle-ci d’établissements et de personnels utiles : école, lavoir, sage-femme, prison, etc. Les cahiers vantent aussi les « bonnes dames » de la noblesse, comme Bathilde de Bourbon, Mme de La Briche, ou Mme Laborde, qui subventionnent les hospices, dirigent les charités, patronnent les rosières. Entre des procès parfois séculaires et les marques de reconnaissance, la diversité des relations entre les nobles et leurs censitaires33 risque de brouiller la perception des enjeux essentiels, que le prolongement des cahiers et l’entrée en Révolution vont brutalement révéler.

Noblesse, clergé et Tiers en 1789

9La conduite des nobles dans l’espace essonnien révèle bien des fractures et des divisions au sein du deuxième ordre. Les trois circonscriptions de vote pour les États généraux (Paris, Dourdan et Étampes

10 Émile Couard, Les Bailliages royaux en 1789 : villes, bourgs, paroisses et annexes dont les territoires ont formé en 1790 le département de Seine-et-Oise, Versailles, Cerf, 1901.

) ont fait l’objet d’études approfondies34. Pour Étampes, trois conclusions s’imposent. D’une part, une querelle de la « sentence » oppose le lieutenant général et le grand bailli d’épée, dans un conflit qui dévoile l’importance des honneurs et des préséances dans la hiérarchie d’Ancien Régime. En deuxième lieu, de nombreux nobles sont absents de l’assemblée générale du 9 mars 178935 à l’église Sainte-Croix d’Étampes, dont le duc de Villeroy et le marquis de Mouchy. Il reste 72 nobles présents ou représentés, qui vont voter séparément des autres ordres36. Mais deux coups de théâtre émaillent le déroulement des états. D’un côté, le Tiers conteste l’élection de Cottin, noble seigneur de Guibeville, comme député de sa paroisse, ce qui entraîne une protestation véhémente de ce noble. Paradoxalement, le Tiers élit comme député aux États de Versailles un noble, le marquis de Laborde, contre l’avis de son ordre, rangé derrière Canclaux et Jumilhac. Il est vrai que ce jeune homme de 28 ans incarne les idées du « parti patriote », ayant combattu en Amérique en 1781, membre de la Société des Trente, franc-maçon, proche de Morellet37. Dénoncé le 13 mars par deux lettres anonymes pour corruption des voix et abus de « financier horriblement riche », il va s’opposer au député de la noblesse, Jacques-Auguste Poilloue de Saint-Mars, noble militaire, bien intégré à Limours38. Lors de la rédaction de son cahier, la noblesse de l’Étampois accepte d’envisager l’égalité fiscale, mais uniquement dans le cadre des États généraux, en une attitude ambiguë, qui accepte le dialogue entre les ordres sans abandonner ses prérogatives essentielles, défendues par exemple par le duc de Villeroy. La bourgeoisie étampoise, qui rédige le cahier du Tiers, ne semble marquer aucune hostilité à l’égard du deuxième ordre : « Les sentiments distingués qui animent aujourd’hui la noblesse ne permettent pas de penser qu’on éprouvera des difficultés de sa part pour la répartition des impôts. Elle abjurera d’elle-même les privilèges abusifs39. » Dans le bailliage de Dourdan, les manœuvres ont été dominées par la personnalité du fondé de pouvoir du duc d’Orléans, Lally-Tollendal, qui espère être élu comme Laborde par le Tiers et propose d’emblée un cahier commun aux trois ordres. En fait, la noblesse élit le baron de Gauville, et siège séparément, non sans démonstrations d’amitié pour les deux autres ordres40. Le cahier de la noblesse de Dourdan présente trois volets difficilement conciliables. D’une part, une volonté remarquable de réformes, pour la souveraineté des États généraux, incarnation de la nation contre l’arbitraire absolutiste. La suppression de la vénalité, l’égalité devant les emplois et les charges, la liberté d’expression, la condamnation des « traces du régime féodal », le « vote par tête en cas de résistance », la réduction des aides, la limitation des grosses fermes vont dans le sens d’une noblesse libérale et contestataire. Dans un deuxième temps, la noblesse affirme certaines solidarités avec le Tiers ou le clergé, préparant des reclassements à venir. Mais, dans une troisième direction, elle affirme sa spécificité quant au respect des privilèges essentiels, la détermination de centres urbains de décision, le rachat des champarts à des conditions délicates, reprenant d’une main ce qu’elle semble accorder de l’autre. La nuit du 4 Août est déjà en gestation dans ce cahier si complexe, qui peut donner naissance à toutes les interprétations. Quant aux 83 paroisses de Paris-hors-les-Murs, convoquées par Henri de Boulainvilliers, prévôt de la ville et vicomté de Paris, seigneur de Montgeron, elles connaissent une radicalisation des positions mise en valeur par Jean Jaurès41. Toute la complexité des « esprits » d’un noble du siècle des Lumières, exprimée par Condorcet42, est ainsi présente dans la campagne des États généraux : à l’esprit philosophique, l’esprit littéraire, l’esprit magistral, on pourrait ajouter l’esprit « national » incarné par le marquis de Laborde et l’esprit « réactionnaire », incarné par le duc de Villeroy…

Quel est le rôle de la noblesse dans le déclenchement de la Révolution ?

11Il paraît évident que certains nobles ont joué un rôle déclencheur dans la pré-Révolution, alors que d’autres prenaient rapidement le parti inverse et les voies d’une émigration précoce. Une étude prosopographique mettrait ainsi en lumière les engagements du marquis de Laborde, de Stanislas de Clermont-Tonnerre43, ou d’Hérault de Séchelles44. Mais il s’agit d’engagements individuels, qui ne représentent pas de cohérence régionale, en l’absence de résidence permanente de ces hommes dans leur seigneurie. On peut ainsi opposer des destins contrastés, comme celui de Louis-Joseph de Condé45, qui émigre au moment de la prise de la Bastille et commandera l’armée des émigrés, à celui de sa parente, Bathilde de Bourbon, cousine de Louis XVI, « citoyenne Vérité » dans son domaine de Petit-Bourg, et auteure d’une Chimère en matière de gouvernement46. Mais tous deux sont favorables aux idées nouvelles avant 1789, francs-maçons, philosophes et amis des sciences et des arts, généreux envers les indigents. À Chalo-Saint-Mars, le seigneur Henri de Prunelé émigrera après avoir défendu la monarchie jusqu’au 10 Août, alors que Hénin de Chérel, maître à la Cour des comptes, secrétaire de la noblesse au bailliage d’Étampes, fera une carrière administrative brillante dans les institutions révolutionnaires47. Mais le premier a rédigé des brochures réformistes pour Necker et le roi et commandé la garde nationale de son village ! On ne voit donc pas de spécificité « essonnienne », mais des groupes de pression comparables à ceux de la zone d’influence de Versailles et Paris : un noyau réformateur très actif autour du duc d’Orléans, que l’on retrouvera avec les Monarchiens, à la suite de la Société des Trente, et qui tiendra un rôle décisif dans la nuit du 4 août 1789. Le comte de Canclaux, philosophe, franc-maçon, en fait partie, à l’évidence, dans son château du Saussay48, mais sa tante et ses sœurs seront accusées de royalisme ! De nombreux nobles se signalent par une implantation locale réussie, et une vie sociale et intellectuelle active, comme Mesdames de La Briche49 et Laborde50, de Noailles51, ce qui ne les entraîne cependant pas à s’engager dans les débuts de la Révolution. Une minorité subit de plein fouet l’entrée dans celle-ci, horrifiée par le sort de Foulon et Bertier de Sauvigny. Inquiétée au moment de la Grande Peur, elle émigre parfois précocement, comme le prince de Condé52 et le duc de Castries53 (dès le 26 juillet 1789). L’intérêt est moins dans une étude prosopographique que dans l’appartenance de ces familles aux types déjà repérés de comportements, pour éclairer tout essai de synthèse.

Comment interpréter les affaires Foulon-Bertier54 ?

12Le 22 juillet, deux nobles apparentés, habitant en partie l’espace essonnien, sont tués à Paris dans des circonstances dramatiques. Cette affaire montre les liens entre le contexte national et le contexte local, entre les contraintes politiques et les questions économiques. Bertier de Sauvigny, intendant de la généralité de Paris, est un administrateur compétent, réalisateur de la taille tarifée55, mais il jouit d’une immense impopularité et se voit traiter d’« ennemi de la nation » dans une affiche du 13 juillet, apposée au Palais-Royal. Son beau-père, Foulon d’Écotais, ancien intendant des Finances et conseiller d’État, est accusé de complot contre Necker et le duc d’Orléans par les « patriotes ». Tous deux font partie de la noblesse de robe, sont seigneurs en Essonne. Foulon serait « haï de ses vassaux et de ses serviteurs », même si ce n’est pas si évident dans sa paroisse de Morangis, tandis qu les régisseurs de Bertier font l’unanimité contre eux à Morsang, Viry et Sainte-Geneviève56. Les sentiments antiseigneuriaux se combinent aux accusations de complot aristocratique pour expliquer les deux arrestations, et les exécutions décalées, quand les têtes du gendre et du beau-père sont fichées au bout des piques parisiennes le 22 juillet 178957. Plus qu’une campagne antinobiliaire, il faut y voir une marque de la politisation des villageois d’Île-de-France (à Compiègne et Viry58) dans un contexte très particulier de Grande Peur59, qui ne débouche cependant sur aucune attaque de château, ni autre manifestation mettant en danger la vie de familles nobles, en dehors de la confiscation des canons au château du Marais, à Mennecy60, Villeneuve et à Montgeron.

Quelle partie de la noblesse émigre ?

13Le prince de Condé n’est qu’un exemple d’une émigration très variable selon les communes et les relations locales. On connaît la plupart des émigrés du district d’Étampes par les recherches sur les biens nationaux, devenus biens de seconde catégorie, mis sous scellés et vendus aux enchères, parfois61. Sur 25 émigrés nobles, la moitié a quitté la France en 1789, un tiers au moment de Varennes et le reste après le 10 août 1792. Il s’agit de grands noms comme Rohan, Noailles-Mouchy, de Valory, des Mazis, Anne Joseph Mauroy, seigneur d’Huison ou Jérôme de Cély à Soisy-sur-École62. Mais il ne s’agit que des biens vendus, alors que l’enquête devrait porter sur les biens mis sous scellés, bien plus importants. La proportion doit être semblable dans le district de Corbeil, où le comte de Provence est l’émigré le plus représentatif63. Ris-Orangis compte ainsi trois émigrés : le comte de Saint-Priest, Turpin de Cissé et Pileur de Brévannes64, mais d’autres communes n’ont aucun émigré. La proportion est probablement plus forte dans le district de Versailles. Si Verrières-le-Buisson hésite à qualifier l’émigration de Fontaine de Biré, au gré des scellés et des levées successives65, la comtesse de Brionne66 émigre de Limours avec le prince de Lambesc, et ses biens sont vendus en avril 1793. Progressivement, deviennent suspects d’émigration des nobles réputés « révolutionnaires », comme le marquis de Laborde, député du Tiers en 178967. Une estimation première, avant une enquête plus poussée, permettrait de chiffrer autour de 110 le nombre de chefs de famille émigrés68, soit le quart des chefs de famille et autour de 10 % de la population probable des nobles de l’Essonne. La Seine-et-Oise est un département de faible émigration sur les cartes nationales69. On comprend combien serait utile une étude prosopographique de l’émigration, qui permettrait de connaître les nobles restés dans leurs demeures, et les liens entretenus avec les municipalités dont ils dépendent. Le cas de de Selve, propriétaire du château de Villiers à Cerny est à cet égard exemplaire. Il aurait émigré, et sa famille a été emprisonnée au château de Dourdan avant d’être libérée par Augustin Crassous. Mais il réapparaît en l’an III, récupère ses biens, est rayé de la liste des émigrés en germinal, puis reprend ses armes, sur décision du district d’Étampes70. Il reste acquis que la grande majorité des nobles (et des familles) n’a pas émigré…

Quels sont les nobles suspects et soumis à la Terreur ? Les affaires les plus significatives

14Les études en cours sur la Terreur et les comités de surveillance71 vont permettre une mise au point sur les suspects, les détenus, les personnes jugées et les condamnés sur l’ensemble du département. Les bilans, quasi exhaustifs, réalisés pour le bicentenaire de la Révolution, font état d’une cinquantaine d’exécutions, dont une quinzaine de nobles72. Ce chiffre, qui doit être interprété cas par cas, ne paraît pas significatif d’un comportement antinobiliaire avéré dans la plupart des communes essonniennes73. Il peut s’agir de contentieux liés aux fonctions exercées sous l’Ancien Régime, pour la comtesse du Barry, l’ancien fermier général Gilbert de Montcloux, d’Épinay-sur-Orge, accusé de « complot » contre la nation74, ou le banquier Laborde de Méréville, négociant international, soupçonné de comploter avec Londres75. Dans plusieurs affaires, la condamnation suit un conflit de longue durée et de grande tension avec des élites révolutionnaires, qui dénoncent et chargent leurs adversaires, comme Anisson Duperon à Ris76 ou le duc de Villeroy à Mennecy77. Parmi les chefs d’accusation, on trouve l’accaparement de bois et l’incitation à la « guerre civile » pour 10 témoins de Ris ; les bornes, les corvées, les doléances et la garde nationale pour le duc de Villeroy ! D’autres cas paraissent plus tragiques, liés à des circonstances exceptionnelles comme celui de la citoyenne du Portal – l’abbesse de l’Ouye78. Le marquis de Brancas à Crosne, défendu par ses concitoyens, échappe à l’exécution comme Gouffé de Beauregard, inculpé avec Dupéron. Quatre femmes nobles – dont Madame de Noailles-Mouchy79 – sont comprises dans ces exécutions. Les domestiques de ces nobles sont parfois compris dans les groupes de condamnés.

15Mais un deuxième aspect est notable, pour nuancer la problématique de la Terreur en Essonne. Nombre des accusés ont été défendus par les populations locales, élites et villageois unis80. Les pétitions réclamant leur élargissement ont été conservées, à Crosne pour Brancas-Céreste81, comme à Méréville et Angerville pour le marquis de Laborde, « un père, un amy, un bienfaiteur, et le modèle le plus parfait des vertus républicaines » selon ses défenseurs82. Elles rejoignent celles qui émanent des municipalités en faveur de nobles détenus pendant cette période. Madame de Saint-Sauveur est louée par les Draveillois – la municipalité et le comité de surveillance, pour « son civisme, son amour de la Patrie », comme une « bonne républicaine qui ne mérite que la justice83. » Ces déclarations, en pleine Terreur, plaident pour des relations bien plus apaisées que la rumeur ne le laisse supposer, entre les ci-devant et leurs anciens tenanciers. Les municipalités de Crosne et Villeneuve-Saint-Georges rappellent en l’an II que « la loi révolutionnaire qui concerne les ci devant nobles de quelques grades qu’ils aient été n’a point d’objet que ceux justement suspects ». Car les comités de surveillance ne semblent pas avoir fait de zèle, dans les cas connus pour les districts d’Étampes84 et de Versailles85. Les visites domiciliaires, les recherches d’armes et d’armoiries86 ont constitué ainsi la trame des relations du pouvoir local avec les nobles pendant la période, dans un climat qui varie selon les monographies, mais qu’il conviendra de relativiser par une synthèse sur le moyen terme dépassant la seule décennie révolutionnaire.

Quelles sont les relations entre les nobles (seigneurs) et les populations ?

16Ce dossier relève essentiellement de la question seigneuriale et de la lutte entre les anciens et les nouveaux pouvoirs. Peu de nobles participent à la révolution municipale, et aucun – à part Bathazar de la Chevardière à Verrières-le-Buisson87 – n’est élu maire de sa commune sur 196 élections au début de 179088. Il en est de même pour les juges de paix89, en dehors des priorités des anciens privilégiés, sauf lorsqu’ils se débarrassent d’une particule gênante comme Pierre de Bénezech à Sucy-en-Brie90. Les responsabilités sont occupées parfois à d’autres niveaux. Hénin de Chérel, de vieille noblesse flamande, sera président de district et l’un des directeurs du département de Seine-et-Oise. Se détachent naturellement les deux députés du Tiers, le marquis de Laborde et le comte de Clermont-Tonnerre. Le discrédit que les lois et décrets de la Convention portent progressivement sur l’ensemble de l’ordre n’atteint pas les notables locaux avec la même ampleur91. De nombreux nobles, comme les Bérard à Draveil, continuent à exercer des responsabilités civiles ou civiques, en tant que commissaire aux indigents ou généreux donateurs pour équiper des cavaliers et soldats de la République. Il est vrai que, comme de nombreux ci-devant, ils ont abandonné la particule pour se fondre dans l’ensemble des citoyens. Nombreux sont ceux qui ne sont pas inquiétés sous la Terreur, en dehors de visites domiciliaires et de demande de destruction des titres féodaux. De fait, si les titres et les symboles sont bien brûlés publiquement, la préservation de nombreux terriers prouve les limites de la « déféodalisation », une fois abolies les redevances les plus contraignantes92. Les disparités entre les communes sont cependant considérables, comme le montre l’exemple des frères Bérard. Celui de Draveil est défendu par la municipalité modérée, qui ne connaît guère de suspects en l’an II93, alors que celui de Savigny est dénoncé, jugé et exécuté. Le retour progressif de nobles aux affaires s’amorce ainsi lentement sous le Directoire.

Quel rôle militaire les nobles jouent-ils dans la décennie ?

17On aborde ici un thème original dans la question du pouvoir local et de la politique au village. Contrairement à la noblesse bretonne94, la noblesse francilienne va jouer un rôle important dans le commandement des gardes nationales, voire dans celui des armées françaises au cours de la Révolution.

18C’est le cas de Monsieur de Fréminville à Draveil, à titre d’exemple. Claude de La Poix de Fréminville, propriétaire à Champrosay, épouse les idées de la Révolution. Il abandonne ses titres de noblesse et se fait appeler Claude Fréminville. Le 11 juillet 1790, il est élu commandant de la garde nationale de Draveil95 et, le 14 juillet, il participe à la fête locale de la Fédération à la tête de la garde. Le dimanche 1^er août 1790, le curé Charles Laroque, en l’église paroissiale, bénit le drapeau de la garde nationale de Draveil, offert par le commandant Fréminville. Le 23 juin 1791, celui-ci perquisitionne à l’Ermitage de Sénart avec des officiers des gardes nationales des paroisses d’alentour (Villeneuve-Saint-Georges, Montgeron, Ris et Soisy-sous-Étioles). Dans la même veine, les gardes de Lisses (M. de Montaron), de Ballancourt (Canclaux), de Limours (Poilloue de Saint-Mars), d’Épinay-sur-Orge (M. de Montcloux) sont également commandées par des nobles au moment de la fête de la Fédération. À Ris, le seigneur, Anisson Duperon, est nommé commandant honoraire de la garde pour la Fédération, malgré la guerre civile qui l’oppose à la moitié de la population96 ! À Corbeil et Méréville, deux nobles libéraux commandent en 1790-91 : le comte de Clermont-Tonnerre la garde du district, le colonel Laborde celle du canton. En 1792, Charlemagne Gouffé de Beauregard, de noblesse récente (1777) et vite abandonnée, est à la tête de la garde nationale du district de Corbeil97. La duchesse de Bourbon fournit le drapeau de la garde de Petit-Bourg pour le 14 juillet 1790 ! Toutefois, la garde est l’un des enjeux du pouvoir local et peut être âprement disputée entre le noble et la municipalité, à l’exemple de Ris et de Mennecy. La présence de nobles à sa tête recule après Varennes et le 10 août 1792, pour devenir anecdotique pendant la République. Il reste à établir l’existence de telles responsabilités dans toute l’Île-de-France.

19Quant aux questions militaires98, tout oppose le prince de Condé et le maréchal de Castries, d’une part, à la tête des armées émigrées, et le marquis de Canclaux99, général de la République dans les armées de l’Ouest, qui protège Nantes contre l’armée vendéenne en juin 1793. Il est vainqueur en octobre 1793 avant d’être rappelé comme privilégié, mais négocie ensuite le traité de La Jaunaye en février 1795. Dans le même temps, Castries commande 12 000 hommes et participe à la prise de Verdun avec l’armée prussienne, avant de devenir le Premier ministre du comte de Provence100. Condé combat avec Brunswick et sera la cible des caricaturistes révolutionnaires101. Entre ces extrêmes, la majorité des nobles de l’espace étudié s’est réfugiée dans une prudente neutralité, refusant l’émigration comme le service de la République.

Quel est le sort des biens de la noblesse ?

20Les études précises sur les biens nationaux ont été menées dans les districts d’Étampes et de Dourdan102. Dans le cas d’Étampes, la conclusion est mitigée. D’une part, la noblesse a perdu probablement 3 000 hectares de terres dans tout le district, par la vente des biens des émigrés, vente d’ailleurs très inégale en fonction de situations et de solidarités complexes. Toutefois, de nombreux biens sont gardés par des prête-noms ou seront rendus aux nobles, sous le Directoire ou sous l’Empire. Des quatre familles d’émigrés à Châlo, une seule perd définitivement ses biens. La comtesse de Brionne perd tout à Limours, quand ses biens sont vendus en avril 1793 et que le château et le parc sont détruits en 1796. Mais en même temps, la noblesse étampoise s’est maintenue, par l’achat de biens de première catégorie, terres et fermes du clergé, soit 2 280 hectares pour le district. 26 gros acquéreurs nobles achètent ainsi 30 % des biens mis aux enchères. Avec les biens de famille rachetés pour la seconde origine, les chiffres s’équilibrent dans le cadre d’une redistribution au sein de l’ordre.

21Par contre, les biens mis sous scellés font l’objet de dégradations à bien établir et nuancer. D’une part, il est évident qu’un « vandalisme quotidien » a entraîné bien des dégâts sur les terres, dans les bois et dans les demeures mis sous scellés, en particulier pour les biens du comte de Provence à Brunoy : « des gens sans aveux ont pillé, volé, dispersé… aux seuls motifs de la vengeance ou de l’intérêt personnel »103. Pourtant, deux limites fortes doivent être évoquées à propos de ce dossier sensible. D’une part, le travail de la Commission des arts, chargée de conserver et préserver les objets culturels a été remarquable : « Grâce à la clairvoyance de certains artistes beaucoup d’œuvres d’art ont pu être sauvées du vandalisme révolutionnaire104 » ; et la plupart des collections et bibliothèques ont pu être sauvegardées et placés dans les dépôts de la nation105. De l’autre, il n’a pas été constaté d’atteinte grave aux châteaux et au patrimoine des familles nobles en Essonne. Certes, la campagne de destruction des armoiries a bien eu lieu, et les armoiries du château de Farcheville ont bien été effacées106. Mais aucun château n’a brûlé, ni n’a été démoli lorsqu’il était sous la surveillance des autorités révolutionnaires107. Dans le cas de Limours par exemple, on procède bien à la suppression des armoiries du château de Poilloue de Saint-Mars, le 20 janvier 1794 – les girouettes, les aigles –, mais selon le rapport des commissaires « sans rien endommager, ni fracturer, ni casser de carreaux aux fenêtres sous peine de l’adjudicataire de les réparer108 ». Le château nous paraît un révélateur essentiel des tensions entre noblesse et villageois, quand il brûle comme en Franche-Comté, en Saintonge ou en Auvergne. Pour l’Essonne, il s’agit d’un bilan départemental sûr, qui permet de nuancer les enquêtes en cours sur le « vandalisme révolutionnaire109 » et tempère l’impression de déclin général de l’ordre dans la décennie révolutionnaire.

Comment se fait la sortie de la Révolution ? Les nobles retrouvent-ils leurs biens et leur prestige sous l’Empire et la Restauration ?

22L’antinobilisme qui continue à régner pendant le Directoire n’empêche pas des retours d’émigration et de nombreuses conservations ou rachats de biens nationaux de seconde origine. Les héritiers de Bertier de Sauvigny, et ceux de Bernard de Balainvilliers ont pu ainsi préserver le patrimoine familial. La législation consulaire et impériale étant favorable aux retours des anciens nobles (amnistie et restitution de biens), ils peuvent être associés à la nouvelle noblesse impériale, qui se met en place entre 1802 et 1810. Il faut souligner que la nouvelle noblesse se taille la part du lion, entre Paray et Brétigny par exemple, le long de la rive gauche de la Seine : le maréchal Davoust à Savigny (en lieu et place des Vintimille), le duc de Raguse Marmont à Viry, Corvisart, médecin de l’empereur, ou Bérard. Mais ils côtoient des familles anciennes, qui font également partie des plus imposés et des notables à la fin de l’Empire110. Les Joly de Fleury ont conservé 676 hectares et les châteaux sur Fleury-Mérogis et Grigny ; les descendants de Bertier de Sauvigny dominent Sainte-Geneviève et Morsang, comme par le passé. Maires de leurs communes, ils rachètent les droits d’usage sur la forêt de Séquigny111 ! De Selve, soi-disant émigré en l’an II, est nommé maire de Cerny par le préfet Garnier, en l’an IX112 ! S’il s’est bien produit une redistribution au sein de la noblesse, celle-ci a conservé, voire renforcé, l’essentiel de son patrimoine foncier, et continue de constituer un modèle de promotion sociale, courtisé par les électeurs. La Restauration, par ses lois d’indemnisation et de revalorisation, par les votes dans les conseils d’arrondissement et de canton113, accentue ce phénomène, qui met en position de notables les Laborde, Bertier de Sauvigny, Lebrun de Grignon, des familles qui avaient été inquiétées ou victimes de la Révolution. Sur le moyen terme, les tendances égalitaires des années 1792-1797114 sont ainsi ramenées à de plus justes proportions pour l’espace considéré, même si les biens nationaux ne sont pas tous restitués et si la féodalité a été bien abolie, pour l’essentiel ! Les châteaux aristocratiques font toujours partie des plus beaux fleurons du patrimoine touristique du département115.

23L’étude d’un département, même récent, peut aider la construction d’une histoire dépassionnée des nobles et de la noblesse, en apportant des éclairages sur les problèmes récurrents de l’histoire et de l’historiographie116. Il est possible, d’après une connaissance monographique des familles implantées dans les paroisses et les communes117, de compter les chefs de famille et les parents, qui résident au moins plusieurs mois dans l’année dans les châteaux et résidences seigneuriales. On peut, grâce aux rôles d’imposition et aux cadastres, évaluer la propriété nobiliaire et son évolution en amont et en aval de la Révolution. L’étude de quelques 160 cahiers de doléances peut faire la part de l’antiféodalisme, voire des sentiments favorables aux nobles, en les dégageant des généralités nationales, entre dénonciations et éloges. Les conduites des nobles en Révolution sont dès lors un objet de recherche intéressant, entre l’adhésion des députés nobles du Tiers d’une part et l’émigration, la résistance armée d’un prince de Condé ou d’un comte de Provence de l’autre. L’histoire locale nuance et précise ces destins individuels et familiaux, donnant matière à une typologie et une géopolitique opératoires, traversant la Terreur et les législations conjoncturelles. Le maintien des biens, des honneurs, des fonctions compense-t-il la perte des privilèges et des honneurs et avantages seigneuriaux ? Que reste-t-il de l’identité du second ordre du royaume au terme d’une décennie où ses valeurs, sa culture118 ont été remises en cause, voire niées119 ? L’intérêt du colloque de Vizille sur les noblesses est de pouvoir croiser ces questions et ces débats avec de nombreux espaces et destins comparables120, d’apporter quelques pierres à ce chantier passionnant des noblesses en Révolution française, d’en nuancer les bases et les fondations. Je voudrais, pour terminer, rendre hommage aux passionnés d’histoire locale sans lesquels une telle étude n’aurait pas été possible, aux défricheurs du bicentenaire et d’aujourd’hui. Quel meilleur porte-parole pour cette évidence qu’un historien contemporain, héritier d’une famille noble de l’Essonne au destin particulièrement tragique, Guillaume Bertier de Sauvigny, quand il salue « la foule hétéroclite des supplétifs volontaires, armés parfois de leur seule passion : les praticiens de l’histoire locale. Et pourtant, ce sont eux qui donnent son véritable sens à l’histoire121 » ?