1 Ainsi cette plaisanterie « qui veut tout dire » entendu récemment dans la bouche de professeurs en poste dans un collège « à recrutement mixte quartier (très) favorisé/quartier de relégation » en raison de son lieu d’implantation très particulier, collège nantais où nous avons nous-mêmes enseigné par le passé : « Les élèves du centre ville entrent peints en bleu par une porte ; ceux de la cité entrent peints en jaune par une autre porte. Il n’en est pas beaucoup qui ressortent peints en vert ! »… Les établissements de ce type ne possèdent pas le label ZEP en règle générale, mais ce sont pourtant ceux où « nos » anciens PLC 2 souffrent le plus, surtout lorsqu’ils « touchent le tiercé gagnant » (selon leur expression – en clair, lorsqu’ils se « récupèrent » plusieurs « mauvaises » classes dans leur service, en tant que derniers arrivés dans l’établissement –).
2 Des propos qui renvoient parfaitement à ceux d’A. Prost lors d’une conférence-débat à Nantes, à la même époque et en présence notamment de représentants de l’UNAPEL qui avaient commencé par critiquer la trop faible implication des parents dans l’enseignement public.
3 G. Gutman a également rédigé à la même période une Lettre ouverte à Madame la Ministre chargée de l’enseignement scolaire, adressée en l’occurrence à S. Royal, sur la situation pour le moins délétère dans son établissement après dix années de « direction indigne » ; une lettre ouverte où l’on retrouve la même colère, publiée cette fois-ci par Les Cahiers pédagogiques (n ° 383, avril 2000) et qui se termine ainsi : « Nous ressentons une immense amertume. Nous nous demandons si, croyant aider les plus défavorisés, nous n’avons pas simplement contribué efficacement à la paix dans les quartiers les plus explosifs, permettant ainsi aux enfants des classes bourgeoises d’étudier en toute tranquillité pour succéder un jour à leurs parents, à la tête de l’entreprise ou, pourquoi pas, au ministère. »
4 Cf. Le Monde du 16 mai 2004, article intitulé « Derrière la loi sur le voile, le malaise des chefs d’établissement ».
5 En sortie d’IUFM et concernant les professeur (e) s d’école, il est aujourd’hui 9 femmes environ pour 1 homme.
6 Dans un article majeur de la sociologie de l’Éducation, publié en 1973 et intitulé Le métier d’enfant, J.-C. Chamboredon et J. Prévot montrent que le développement et la diffusion des connaissances dans le domaine de la psychologie de l’enfant et de la relation adultes/enfants ont fortement contribué à donner une définition nouvelle de la prime enfance et de l’enfance et à introduire, sur la base de ces nouvelles définitions, une rupture profonde dans le rapport de l’adulte à l’enfant. Dès lors a pu s’élaborer, sous l’impulsion des classes moyennes et supérieures bénéficiant de conditions d’existence favorables, une nouvelle théorie pédagogique de l’apprentissage dans laquelle s’inscrivent ces nouvelles définitions et ce nouveau rapport à l’enfant. Il ne s’agit plus désormais d’inculquer des connaissances à un élève passif ; il faut l’aider à construire par lui-même ses savoirs et ses savoir-faire. Cette nouvelle théorie pédagogique de l’apprentissage se présente comme un projet éducatif à long terme englobant les différents degrés d’enseignement auxquels sont fixés des objectifs précis. Elle suppose au niveau de sa mise en œuvre l’instauration d’une collaboration pleine et entière entre enseignants et parents pour qu’il en soit fait « bon usage ». Au regard de l’histoire réelle de la pédagogie nouvelle, on peut fort bien considérer que l’analyse développée ici accorde sans doute une importance excessive à la variable sociale au détriment variables plus « culturelles », pour ne pas dire « cultuelles ». Mais c’est précisément cette insistance délibérée à mettre l’accent sur les enjeux sociaux du changement scolaire, comme dimension trop souvent oubliée par les « pédagogues » passés ou actuels, qui a constitué un électrochoc salutaire pour le praticien « en rupture » que nous étions dans les années soixante-dix-quatre-vingt, attiré comme tant d’autres par les principes « généreux » de la pédagogie Freinet ; un électrochoc salutaire lui-même entretenu par la thèse de J.-M. de Queiroz (1981) sur la désorientation scolaire des familles populaires face au nouvel ordre du jour pédagogique (ce qui correspondait tout à fait à nos observations sur le terrain) ou encore par une communication de P. Perrenoud mettant l’accent sur le caractère élitaire et « invisible » des pédagogies nouvelles :
« “L’éducation libérale avancée” est un luxe que toutes les classes sociales ne peuvent encore se permettre, compte tenu de leurs conditions et de leurs horaires, de leurs conditions de logement, de leurs revenus. L’enfant de l’école active est un enfant choyé, aimé, bien dans sa peau, habitué à être écouté et entendu, respecté dans son point de vue, disposant d’une sphère personnelle, choisissant ses loisirs. Toutes conditions qui sont loin d’être la règle dans tous les milieux » (P. Perrenoud, 1995, p. 114, reprise d’une communication effectuée en 1985).
7 Rappelons qu’il existe au moins deux conceptions de la pédagogie différenciée : l’une « plutôt ZEP » et tournée prioritairement vers les élèves en difficulté ; l’autre alignée de fait sur les pratiques parascolaires des parents professionnels (cf. ces professeurs des collèges et lycées de « centre ville » qui se refusent à « ralentir la cadence » sous prétexte que leurs meilleurs élèves « s’ennuieraient » en cours).
8 L’école républicaine « à la française », telle qu’elle fut théorisée par le philosophe Alain, devait rester protégée du bruit et des tumultes de la cité. Elle se devait d’être un lieu clos, là où s’effectue la rencontre, source de joie, avec les grandes Œuvres de l’humanité ; là où souffle l’esprit universel du savoir, seul capable, selon ses concepteurs, de former le jugement et le sens critique…
9 Dans ce modèle dit « de la négociation », les caractéristiques psychologiques des individus pèsent davantage que le statut dans la définition des rôles et les processus de décision, et surtout le contrôle des comportements s’effectue davantage par explicitation verbale, arbitrage et ajustement, ce qui est à même de favoriser l’autonomie personnelle. Cf. J.-C. Forquin (1982).
10 En toile de fond, se situe ici le premier paradoxe sur lequel on débouche quand on s’intéresse de près aux instituteurs : c’est au moment même où la profession perd son prestige social qu’elle est de plus en plus pénétrée par la descendance, notamment féminine, de milieux sociaux favorisés ou relativement favorisés qui ne s’y intéressaient pas ou guère auparavant. Cela étant, le métier d’enseignant est un métier « élastique » (au sens de P. Bourdieu), d’où des tentatives de redéfinition symbolique (pour en revenir à J.-C. Chamboredon et J. Prévot) qui peuvent passer par l’utilisation en classe de la technologie la plus avancée et (ou) par la pédagogie rénovée. À travers les nouvelles méthodes, l’instituteur(-rice) n’est plus celui qui agit « simplement » par bon sens, intuition et expérience : il (elle) peut se penser et être pensé comme un spécialiste hautement formé à la psychologie de l’enfant et de la relation adulte/enfant (l’assise scientifique de la nouvelle théorie pédagogique de l’apprentissage).
11 L’enseignement catholique, bénéficiant d’un « cahier des charges » plus « souple » ou ayant autrement dit une marge de manœuvre bien supérieure pour choisir ses élèves en raison de son « caractère propre », accueille sur Nantes 40 % environ des élèves. « Dans un diocèse où la pratique religieuse est devenue comparable à celle des autres diocèses français, moins de 10 %, le maintien de cette puissante structure d’enseignement ne laisse pas de poser des questions… », ainsi que l’écrit F. MACÉ (2001, p. 48). Des questions qui commencent à trouver leurs réponses, quand on sait que la proportion des élèves boursiers n’est au niveau national que de 13 % dans les collèges et lycées privés (contre 27 % dans le secteur public en 2002) ; quand on sait que les collèges publics de l’agglomération nantaise possèdent au total 22 SEGPA (Sections d’enseignement général et professionnel adapté), cotre 4 seulement pour l’ensemble des collèges privés…
12 Tout porte à croire que la plupart de ces jeunes institutrices sont entrées directement dans le métier comme remplaçantes. Les recrutements par la « filière royale » (l’école normale) étaient alors très minoritaires.
13 Sur l’ensemble de la Loire Atlantique et avant 1968, il n’était jamais qu’une petite dizaine d’instituteurs à se réclamer du Groupe Freinet. Ce mouvement pédagogique s’est ensuite assez fortement développé, accueillant dans ses rangs nombre de « révoltés » pour qui il s’agissait surtout d’instaurer « d’autres relations » avec les élèves. Une évolution d’autant plus intéressante à étudier qu’elle permet de mieux comprendre la manière dont s’est opéré au niveau du système éducatif la récupération du « libertaire » (au sens large) par le « libéral » (cf. Y. Careil, 2002).
14 L’élève, autrement dit, pourra théoriquement acquérir dans le second degré les connaissances que l’école élémentaire n’aura pas pu ou pas eu le temps de lui transmettre. Ce changement de statut de l’école élémentaire s’accompagne d’un recentrage autour du français et du calcul : l’histoire, la géographie et les sciences naturelles passent au second plan. Un recentrage qui rend lui-même possible l’application de nouvelles méthodes pédagogiques moins livresques et laissant davantage la place à l’observation et à la curiosité intellectuelle de l’enfant. Parallèlement, un regard nouveau commence à être porté sur son développement corporel : rappelons que l’expérimentation du « tiers-temps » débute en 1964. Les évènements de mai 1968 et son mouvement de contestation de l’autorité et de la pédagogie traditionnelle n’ont fait qu’accélérer l’évolution en cours tout en lui donnant une coloration politique très particulière.
Il faut rappeler ici que les principes pédagogiques de l’école publique et laïque ont toujours été empreints de « modernité », aussi loin que l’on remonte en arrière dans les instructions officielles. L’objectif de rendre les élèves « actifs » a été très régulièrement affirmé, mais le nombre longtemps très élevé des élèves par classe n’a pas permis de réunir les conditions pédagogiques pour les « faire agir » ; la solution pour les rendre actifs consistait dès lors à les « faire parler », autrement dit à solliciter leur participation en cours, à les faire entrer dans le jeu (devenu traditionnel) des questions-réponses… La période des années soixante est également celle où les effectifs élèves ont commencé à baisser de manière significative, l’institution scolaire ayant de moins en moins à faire face à l’afflux massif des enfants du baby boom de l’après-guerre…
15 … même si elles ne sont pas seules à y enseigner (nous y reviendrons).
16 … sauf chez une minorité d’entre eux ; des parents influencés par l’idéologie personnaliste, possédant certaines caractéristiques sociales qui les rattachent aux classes moyennes et (ou) retirant des profits symboliques de l’« ouverture » de l’école sur l’extérieur (nous y reviendrons également).
17 Rappelons cependant que l’enseignement public n’a jamais eu historiquement les moyens de subvenir à l’ensemble de ses besoins. D’où des pratiques de recherche de financements extérieurs « institutionnalisées » de longue date (les fêtes d’école, les tombolas…).
18 Une « continuité » dont les enseignants commencent cependant à s’apercevoir qu’elle pourrait mener fort loin puisqu’en échange des services pédagogiques et financiers désormais rendus, certains de ces parents n’hésitent plus à dire ouvertement qu’ils aimeraient davantage intervenir sur le choix des enseignants de leurs enfants, ou encore qu’ils seraient favorables à l’idée que le salaire de ces « innovateurs pédagogiques » (par opposition ici aux « fonctionnaires ») soit davantage individualisé en fonction du plus ou moins grand « dynamisme » dont ils font preuve en réponse à leurs attentes…
Une « continuité » qui peut aboutir aussi à des pratiques de mise à l’écart des élèves n’entrant pas dans la clientèle « attitrée ». Nous donnerons ici l’exemple d’une école « publique » nouvelle version implantée dans un ancien quartier populaire aujourd’hui surinvesti par les classes moyennes diplômées. Une école que nous avons suivie pendant dix ans et où tout irait désormais pour le mieux dans le meilleur des mondes des classes moyennes diplômées si elle n’accueillait aussi des enfants du voyage. Ces élèves se sont vus presque tous regroupés dans la classe pour « primo arrivants » (héritage du passé), les institutrices de cette école nous ayant elles-mêmes avoué en 1997 qu’elles « ne pouvaient rien y faire », que « les parents, à force d’être trop présents, avaient pris le pouvoir ». Cette classe « pour primo arrivants » a été supprimée peu après par l’Inspection académique. Il s’en est suivi l’élaboration d’un projet (très bien construit) d’intégration de ces enfants du voyage aux classes ordinaires… Le résultat ne s’est pas fait attendre. Cette école s’est retrouvée évitée par les parents alors qu’elle bénéficiait jusque là d’un « taux de drainage » de 95 %, ce qui signifie en clair que 5 % seulement des enfants du quartier fréquentaient l’école privée voisine. Aux dernières nouvelles, certains de ces parents sont cependant revenus « au bercail », estimant insuffisant le « dynamisme » des enseignants des écoles voisines…
Des pratiques ségrégatives très similaires sur le fond peuvent être constatées dans certaines écoles à recrutement mixte quartier de relégation/zones pavillonnaires. Les parents de ces dernières en arrivent désormais à exiger du directeur, sur la base d’un « chantage au privé », que leurs enfants soient par exemple regroupés dans un CM2 « pur », le CM1-CM2 se voyant alors « réservé » aux enfants de la cité. On aurait tort de croire que le premier degré échappe à la « fabrication » des classes, même si elle est évidemment beaucoup plus visible au niveau du collège où il est plusieurs classes par échelon du cursus.
19 … en ces temps pionniers de l’installation des toutes premières salles informatiques dans les écoles.
20 Nous avons compté jusqu’à 18 mères pour une seule école, se répartissant les créneaux horaires sur l’ensemble de la semaine ; deux d’entre elles (l’une et l’autre responsables d’associations) intervenaient davantage au niveau de la salle informatique, jouant de fait un rôle de monitrice à part entière.
21 Tendance que l’on retrouve au niveau des « comités de lecture », comme autre structure tripartite novatrice, mais réunissant cette fois les parents, les enfants et les enseignants autour de « valises de livres » prêtées par le CRV aux groupes scolaires qui en font la demande. Ces « valises de livres » permettent tout à la fois d’approfondir le travail effectué en lecture et d’opérer une sélection des meilleurs ouvrages à acheter pour la BCD : « Il en existe une vingtaine sur Nantes, mais pas un seul en quartier défavorisé [hélas ! – sous entendu par la tonalité de la réponse –] » (entretien réalisé en 1997 auprès du responsable du CRV).
22 Cette évolution est toujours en cours et peut fort bien déboucher aujourd’hui sur des épisodes très surprenants de prime abord, traduisant surtout l’accentuation des contradictions devant lesquelles se trouvent placés les enseignants se voulant ici « de gauche » et parfois « très à gauche ». Nous prendrons l’exemple de ce groupe scolaire où le directeur avait organisé dans sa classe l’un de ces multiples débats décentralisés sur l’École qui ont accompagné le travail de la Commission Thélot au printemps 2003. Plusieurs de ses adjoints décident de boycotter cette réunion et distribuent des tracts aux parents les incitant à se méfier de ce genre de débat « ne posant pas les vrais problèmes ». Des parents qui se voient invités dans le même temps et par ces mêmes instituteurs réfractaires… à financer un voyage scolaire en achetant les productions artistiques réalisées en classe par leurs enfants ! Notons que le thème de la gratuité de l’école publique et laïque ne faisait pas partie des 22 thèmes prioritaires de la Commission Thélot, la proposition le concernant ayant été rejetée (2 voix contre, 1 voix pour, abstention des autres membres de la commission lors du vote).
23 Une autre manière de le dire est que l’on perçoit mieux dans les départements de « guerre scolaire » de l’Ouest de la France les grands systèmes d’opposition qui traversent la profession, puisque l’écart entre instituteurs « se voulant progressistes chacun à leur manière » (à partir de visions radicalement différentes de la place que se devraient d’occuper respectivement l’État et la société civile) y est à l’évidence plus grand qu’il ne l’est ailleurs ; puisque le SNUDI FO, d’un côté, et le SGEN CFDT, de l’autre, représentent ici ce que S. Moscovici appelle des « minorités actives ». L’existence d’un fort courant laïque intransigeant (« laïcard ») a retardé par exemple la création des ZEP sur l’agglomération nantaise. Créées par A. Savary en 1981, elles ne sont apparues ici qu’en septembre 1988.
24 Deux ans dans une école « traditionnelle » située sur le quartier nantais des Dervallières, voisin de celui de Bellevue ; deux ans dans une école « moderniste – ouverte sur l’extérieur », située sur Bellevue – Saint Herblain (nous allons en parler un peu plus loin) ; deux ans, à titre de comparaison, dans une école située sur Couëron, commune ouvrière de l’estuaire de la Loire et voisine de Saint Herblain.
25 … pour une « République Une et Indivisible », sa condamnation de l’Europe maastrichtienne des régions préparant le « sacre des notables », son inflexibilité en matière de laïcité, son hostilité virulente à l’égard de la deuxième gauche décentralisatrice et des composantes de l’ancienne « forteresse laïque enseignante » l’ayant rejointe peu à peu, qu’il s’agisse ici de la FCPE ou de la Ligue de l’enseignement accusées d’avoir promu la notion de « laïcité plurielle » (comme « nouveau credo pour l’intégration ») tout en abandonnant la revendication des fonds publics à réserver exclusivement à l’école publique.
26 À avoir enseigné en Loire Atlantique, on comprend mieux l’enjeu politique que représentent les conseils d’école. C’est ailleurs désormais qu’ils posent le plus de problèmes, et notamment dans les départements du Sud de la France où les parents élus peuvent fort bien être porteurs des idées du Front national.
27 On trouvera des militants FCPE dans les écoles ZEP à recrutement mixte quartier de relégation/zones pavillonnaires, mais qui alors se recrutent presque exclusivement au sein de ces dernières. C’est toute l’histoire de la FCPE, émanation du milieu professionnel à l’origine (1947), qu’il faudrait relater ici. Disons simplement que cette fédération, suite à l’instauration des conseils d’école, a très vite prôné le participationnisme et la pédagogie différenciée, tandis que ses représentants issus du monde ouvrier, ne se retrouvant pas dans cette nouvelle orientation, passaient de 5 % à 1 % (cf. Que choisir ?, n ° 220, septembre 1986). La FCPE s’est alors fort logiquement tournée vers le SGEN CFDT au niveau de l’action… avant de « revenir » dans le giron laïque suite à des problèmes financiers occasionnés par le lancement (en accord avec la Ligue de l’enseignement) de sa propre assurance-élèves qui venait concurrencer de fait la MAE (autre pièce importante de la « forteresse laïque enseignante »). Aujourd’hui, l’équipe dirigeante de la FCPE est clairement au niveau national d’orientation rocardienne et cédétiste.
28 Ce qui signifie très concrètement et à titre d’exemple le passage à la trappe de toute approche un tant soit peu consistante du subjonctif (fin de CM). Nous rappellerons simplement à quel point son « bon usage » représente un puissant marqueur social…
29 … sans systèmes de péréquation à même de pouvoir empêcher l’accroissement des écarts entre territoires.
30 «SGEN CFDT – SNUIPP » en réactualisant…
31 Des instituteurs ou institutrices d’autant plus engagés dans le mouvement de rénovation pédagogique que l’on trouve chez eux une double, voire une triple appartenance (ou forte sympathie). Cf. Y. Careil, 1994, tableau des liens organiques (annexe VI).
32 SE (Syndicat des enseignants) en réactualisant.
33 Le féminin s’impose par le fait que les instituteurs-hommes de moins de 30 ans sont ici très rares (fort logiquement compte tenu de l’évolution de la structure de recrutement des instituteurs et institutrices).
34 Cette présentation de pôles et de sous-pôles tendanciels établis à partir du traitement statistique des réponses fournies par les enquêtés en un moment et en un lieu donnés « appartient » bien évidemment au contexte de référence. Cependant, elle n’a rien puisse véritablement surprendre, « ailleurs » et pour partie encore actuellement, pour peu qu’au-delà de certaines censures et autocensures, on accepte effectivement de prendre pleinement en considération les adhérences sociologiques, psychologiques et militantes des enseignants concernés. En raison de la violence du débat actuel sur l’école, on sait bien désormais d’où proviennent les résistances « de fond » au changement, bien au-delà de ce qui offre le plus de visibilité, à savoir le poids des habitudes prises de longue date, conjugué au « prix à payer » pour rompre significativement avec le passé. Quant aux instituteurs qui ne veulent pas (ou plus) se satisfaire de l’ancienne culture de métier, les constats auxquels nous sommes parvenus renvoient aux travaux de J. Houssaye (1987). Ils renvoient aussi, même si c’est avec d’autres mots et selon une autre perspective, à l’approche des rénovateurs en termes de « mondes » de référence pouvant être très divers qui est celle de P. Meirieu et M. Develay (1992).
35 Raison pour laquelle nous l’avions demandée à des fins de nouvelles observations tant directes que participantes.
36 Une construction qui passe nécessairement par la maîtrise du Savoir dont il est porteur, là où se joue fondamentalement la légitimité de tout instituteur ou professeur ; une construction de l’autorité qui suppose aussi chez l’enseignant tout un travail de distanciation par rapport à son identité sociale et culturelle (au risque, si ce travail n’est pas entrepris ou insuffisamment entrepris, de « fausses notes » auprès des élèves, pouvant avoir elles-mêmes de graves conséquences) ; une construction de l’autorité dont on perçoit facilement, à s’être intéressé de près à l’interactionnisme symbolique, tout ce qu’elle peut gagner encore à intégrer les apports des recherches menées sous cette perspective théorique (cf. J.-M. de Queiroz et M. Zlotkovski, 1994), mais qui n’en dépend pas moins par ailleurs de la diversité des contextes d’enseignement rencontrés (d’où les limites des « recettes » en la matière).
37 L’école la plus évitée sur Bellevue-Nantes est celle qui accueille la plus forte proportion d’enfants du voyage. Le taux d’évitement, mesuré lors d’une enquête récente, y atteint 48 % dès la maternelle.
38 Et plus exactement la partie haute du quartier de Chantenay où l’on peut d’ailleurs constater une relative stabilité du prix de l’immobilier sur ces 10 dernières années. Il n’en va pas de même pour la partie basse de cet ancien quartier populaire nantais, située plus près de la Loire et par là-même beaucoup plus éloignée du quartier de Bellevue ; une partie basse où les prix de l’immobilier ont flambé durant les années quatre-vingt-dix et qui est aujourd’hui totalement investie par les fractions intellectuelles des classes moyennes et supérieures.
39 Le collège situé au centre de Bellevue est le seul du secteur (au sens large) à ne pas posséder d’option allemand en LV1.
40 … où nous avons enseigné à deux reprises et à dix ans d’intervalle.
41 Ce qui ne veut pas dire que Couëron échappe aux stratégies consuméristes. Le collège public situé sur cette commune ouvrière tend à être d’autant plus évité (et notamment par les familles enseignantes) qu’il est accolé à un lycée professionnel, ce qui n’est jamais « bon » pour un collège. La municipalité (PS) s’efforce pour sa part de veiller au grain en dispatchant les enfants du voyage sur plusieurs écoles primaires.
42 Cf. INSEE, fiche profil – catégories socioprofessionnelles, recensement de 1999. La prédominance de ces trois catégories socioprofessionnelles signifie, compte tenu du contexte géopolitique de référence, que la ville est dorénavant acquise pour le parti socialiste, même s’il doit attendre parfois le second tour pour l’emporter. Les résultats du premier tour des municipales 2001 laissent quant à eux clairement entrevoir l’influence qu’exerce ici, du moins en toile de fond, un catholicisme social dont on sait qu’il se décline aujourd’hui de différentes manières sur le plan politique : liste de gauche conduite par C. Gautier (PS) : 46 % ; liste de droite conduite par M. Bocher (UDF) : 28 % ; liste « ensemble St Herblain autrement » conduite par P. Trogier (soutenue par les « alternatifs » et comptant dans ses rangs plusieurs écologistes dissidents) : 24 %.
43 Pour le dire au plus vite. En fait dans l’une des deux écoles situées sur ce « sous-quartier » de Bellevue – Saint Herblain ; une école qui sera fermée au milieu des années quatre-vingt-dix, les élèves et les enseignants de ce groupe scolaire se voyant alors rattachés à l’autre école.
44 Le travail de maintenance en BCD représentait pour cette école le haut lieu de l’intervention parentale, et il n’était de fait (par le jeu du copinage) que des mères « françaises de souche » à y participer (contrairement aux sorties et autres ateliers décloisonnés qui voyaient également la participation de mères d’origine immigrée). Les instituteurs et institutrices de ce groupe scolaire, d’origine plutôt populaire, dotés d’une expérience militante à l’extérieur, n’étaient certes pas du genre à se formaliser outre mesure du langage « cru » parfois tenu en BCD et en présence des élèves. Ils acceptaient par contre beaucoup plus difficilement le rigorisme éducatif excessif dont certaines de ces intervenantes pouvaient faire preuve à l’égard d’enfants qui, pour certains d’entre eux, étaient devenus leurs « têtes à claques » (des élèves qui ne manquaient pas de se plaindre à leurs parents en rentrant chez eux). Ils ont encore moins apprécié quand l’une de ces mères, enceinte et obligée de céder sa place à une autre d’origine africaine, est venue expulser manu militari sa « rivale ».
45 Exemple parmi quantité d’autres du « double langage » (aujourd’hui de plus en plus dénoncé par les médis et de nombreux intellectuels – mais pas tous –) que tiennent les membres de l’UOIF.
46 Comme en témoigne par exemple sa présence à la manifestation du 27 janvier 2004, appelée par M. Latrèche, dirigeant du PMF (Parti des musulmans de France, incarnant l’extrême droite arabo-musulmane). Ce jour-là, F. Alaoui, secrétaire général de l’UOIF, avait donné comme consigne à ses troupes de s’abstenir d’y participer.
47 Le pourcentage des voix recueillies par le Front national varie sur Bellevue entre 15 et 35 %, selon la nature des élections et en fonction des bureaux de vote. Autres résultats électoraux qui fourniront un meilleur cadrage à notre enquête : en mai 2005, le «OUI » au traité constitutionnel européen l’a emporté largement sur Nantes (avec près de 60 % des voix, mais avec de grosses disparités selon les quartiers : plus de 70 % en centre ville ; moins de 40 % sur Bellevue) et d’une courte tête sur Saint Herblain (50,5 %). Le «NON » a été par contre très majoritaire sur Couëron (59 %) et sur les autres communes ouvrières de l’estuaire de la Loire. Source : Ouest France du 11 mai 2005.