Trégor, Goëlo, Penthièvre
|Première partie. Le pouvoir politique d’un haut lignage de l’Occident chrétien
Chapitre II. L’ascension des Comtes de Bretagne (1047-1136)
Texte intégral
1Allié du comte d’Anjou dès la première moitié du XIe siècle, le comte Eudes se montra un adversaire acharné et malchanceux du jeune Guillaume de Normandie. Paradoxalement, sa défaite et la disparition de ses alliés lui permirent de se rapprocher du Bâtard dans le courant des années 1060. La participation des Eudonides à la conquête de l’Angleterre apporta au lignage une puissance qu’il n’aurait pu acquérir de l’alliance angevine.
L’échec de l’alliance angevine (1047-1060)
2Tout juste arrivé en âge, Conan II contesta à son oncle le pouvoir sur la Bretagne. Il s’en suivit une guerre de dix ans, pendant laquelle Eudes évinça le duc en titre avant d’être vaincu. Le frère d’Alain III n’avait cessé de participer aux conflits politiques qui secouaient alors le royaume. Sa capture contribua à déstabiliser la coalition anti-normande où il avait suivi le comte d’Anjou.
L’éviction momentanée de Conan II
3Les années 1047-1057 marquent un tournant dans l’histoire des Eudonides. En effet, c’est à cette période, que les branches aînée et cadette des comtes de Rennes s’affrontèrent violemment pour s’emparer du pouvoir. S’il est établi que Conan II l’emporta finalement sur son oncle en 1057, le flou qui entoure les dix années précédentes donne une idée de l’âpreté du conflit.
- 1 Dom Morice P.-H., Histoire ecclésiastique et civile de Bretagne, composée sur les auteurs et les ti (...)
- 2 Sur le Penthièvre, cf. p. 194-195.
4D’après l’historiographie ancienne, en 1047, les grands délivrèrent le duc des geôles où l’avait jeté son oncle, et le reconnurent comme leur seigneur légitime1. Le comte Eudes, unanimement désavoué, se serait alors retiré sur ses terres du « Penthièvre2 ». Une fois encore, un réexamen des textes tendrait à nuancer cette vision par trop romantique.
- 3 MXLVII. – Conanus puer de custodia patrui sui elabitur Redonis, Cartulaire de l’abbaye Sainte Croi (...)
- 4 Si celui de « prison » existe bien, le sens courant de custodia, en latin classique, est « garde, (...)
5La chronique de Quimperlé rapporte que le jeune prince Conan se libéra de la garde de son oncle en 10473. Toutefois, cette « garde » (custodia) ne doit pas s’entendre dans le sens de « prison » mais dans celui de « tutelle », plus conforme à l’attitude protectrice d’Eudes envers son neveu depuis 10404. Né en 1033/1034, Conan avait atteint l’âge de la majorité.
6Le comte Eudes n’en abandonna pas le pouvoir à son neveu pour autant. Sa réaction s’explique sans doute en partie par l’inexpérience de Conan II. Si ce dernier était désormais en âge de gouverner, il lui restait encore beaucoup à apprendre. Alain III lui même n’avait pris les rênes du pouvoir que progressivement, profitant sagement des conseils de sa mère. En 1047, la légitimité d’Eudes reposait sur plus de vingt ans d’expérience politique ; celle de Conan n’était encore que virtuelle. En l’occurrence, le comte ne tenait sans doute pas à ce que son neveu engageât la Bretagne contre l’Anjou.
- 5 Guillotel H., op. cit., no 53 : Facta sunt hec in Redonensi civitate, coram Conano chomite, in die (...)
- 6 Eudes ne réapparaîtra qu’à une seule reprise dans les actes ducaux, lors de sa captivité de 1057. (...)
7Sur la foi de la chronique de Quimperlé, Hubert Guillotel avait daté de 1047 une donation en faveur de Redon, qui « eut lieu à Rennes, devant le comte Conan, le jour où il devint comte5 ». Absent à cette occasion, Eudes était supposé s’être alors retiré sur ses terres, en marge du pouvoir ducal tenu désormais par son neveu6.
- 7 Quelques semaines avant son décès, Hubert Guillotel était revenu sur son jugement.
- 8 Orderic Vital, tome III, livre V, p. 88 : In Britannia Eudo fratri suo Alanno successit, et XV ann (...)
8Cet acte non-daté serait en fait postérieur à 1057. Il marquerait le jour où Conan II fut reconnu comte de Rennes après la capture de son oncle. Quant au passage de la chronique de Quimperlé, il signalerait l’arrivée en âge du fils d’Alain III et sa fuite de Rennes en 10477. En effet, selon Orderic Vital, Eudes succéda à son frère et dirigea librement la Bretagne pendant quinze ans, sans se soumettre à l’autorité de quiconque8. L’unique témoignage d’un moine normand du XIIe siècle pourrait être mis en doute s’il n’était corroboré par des sources contemporaines des faits de provenance multiple.
- 9 Guillotel H., Bretagne et papauté…, op. cit., p. 268-269.
- 10 Ibidem. Juhel et semble-t-il les évêques d’Alet, de Quimper, de Saint-Brieuc, de Saint-Pol de Léon (...)
- 11 Dom Morice, Mémoires, col. 395-396 : Leo sanctae Sedi Apostolicae gratia dei Papa Eudoni Britonum P (...)
9En octobre 1049, Léon IX avait déposé l’évêque de Nantes Budic pour simonie et reçu une plainte sur le refus des évêques bretons de se soumettre au siège métropolitain de Tours. Cette dernière affaire avait été renvoyée au concile de Rome d’avril 1050, où avaient été mandés l’archevêque de Dol Juhel et ses suffragants9. Seuls l’évêque de Rennes Main et l’abbé de Redon Pérénèse s’y étaient rendus. Léon IX excommunia les absents10 et exhorta « Eudes, prince des Bretons, le comte Alain et les autres princes de Bretagne » de faire pression sur eux pour les induire à obéir aux ordres pontificaux11.
- 12 Ibidem : Et hoc te auctoritate hortamur Apostolica, ut per totum regnum tibi commissum pacem facia (...)
- 13 Werner K.-F., La naissance…, op. cit., p. 147. Sur la notion de princeps aux temps mérovingien et c (...)
- 14 Op. cit., p. 433-434.
- 15 Ibidem.
10Dans cette lettre, le pape n’hésitait pas à qualifier de regnum le territoire sur lequel s’exerçait le pouvoir du princeps12. Karl-Ferdinand Werner a montré l’étroite corrélation entre ces deux termes à travers l’âge chrétien. Dérivé de regere (« régler », « gouverner »), le regnum pouvait désigner tant le règne, la durée du gouvernement d’un empereur ou d’un roi, que le territoire sous l’autorité d’un princeps13. Aux Xe-XIIe siècles en France, les maîtres des principautés post-carolingiennes exerçaient un pouvoir quasi vice-royal. Ce dernier dépassait les droits comtaux du simple fait que le prince pouvait nommer des comtes14. Parmi ces princes du regnum Francorum, ceux dont les Etats étaient issus d’un ancien regnum carolingien constituaient une catégorie à part : leur pouvoir était un peu plus proche de la royauté15.
- 16 Ibidem.
11La puissance publique des princes ne se limitait pas aux territoires appartenant en propre au duc, au comte ou à leurs vassaux, mais concernait l’ensemble de leur « État princier » et l’ensemble de ses habitants. Le prince était le chef unique de la défense de son pays en temps de danger public émanant de l’extérieur16.
- 17 Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 11 : Alanus princeps Britanniae.
- 18 Op. cit., no 27 : Alanus comes et dux Britannorum.
- 19 Op. cit., no 28 : Alanus Britanniae gentis dux atque princeps.
12En l’espèce, la pluralité des destinataires permettait d’entendre regnum au sens large : un territoire sur lequel s’exerçait le pouvoir d’un princeps, que ce dernier soit duc, comte ou seigneur. Cependant, parmi ces princes, le pape reconnaissait à Eudes une primauté éminente. Le « prince des Bretons », rappelait étrangement Alain III « prince de Bretagne17 », « comte et duc des Bretons18 », « duc du peuple de Bretagne et prince19 ». Le regnum du princeps Eudes correspondait manifestement au duché de Bretagne, successeur du royaume breton du IXe.
- 20 Labbé P., Cossart G., Sacrosancta concilia, Paris, 1671, tome IX : Ab anno DCCCLXXII. Ad annum M. L (...)
- 21 Ibidem. : Tibi autem, carissime fili, mandamus ut te ab eorum conventibus cum omnibus fidelibus su (...)
13C’est d’ailleurs en des termes inspirés tout droit de la tradition carolingienne que le pape s’adressait à Eudes pour le rappeler à ses devoirs : « dans tout le royaume qui t’est confié, fais la paix, aime la justice, gouverne pieusement tes sujets20 ». En l’occurrence, Léon IX ordonnait au princeps, sous peine d’excommunication, d’écarter les fidèles des évêques simoniaques et d’intimer à ces derniers de se conformer aux préceptes pontificaux21.
- 22 Ibidem. : In scriptis veterum reperimus omnes episcopos tuae patriae archiepiscopo Turonico subjec (...)
- 23 La vente de Saint-Georges de Grehaigne par Roger fils d’Ascelin eu lieu « le comte Eudes exerçant (...)
- 24 Labbé P., Cossart G., op. cit. :… unus ex maximis Galliae principibus habearis…
14L’autorité que le pape reconnaissait à Eudes sur l’ensemble de la patria22 trouve un écho dans un acte de Saint-Georges de Rennes où le frère d’Alain III est dit exercer l’imperium sur les Bretons23. C’était en parfaite concordance avec le témoignage d’Orderic Vital : Eudes prétendait gouverner librement la Bretagne sans se soumettre à l’autorité de quiconque. Cette situation n’avait, d’ailleurs, rien d’illégitime aux yeux de la noblesse du royaume qui, de l’aveu même de Léon IX, considérait Eudes « comme l’un des plus grands principes de France24 ».
- 25 Jézéquel Y., Les monnaies des Comtes et Ducs de Bretagne, Xe au XVe siècle, Paris, Maison Florange, (...)
- 26 Guillotel H., op. cit., no 26 : Concesserunt eciam in villa monasterii fieri quoque burgum, forum, (...)
15C’est sans doute à cette époque que l’atelier monétaire de Rennes émit des deniers dont la légende proclamait Eudes dux Britanniae25. Ce monnayage donne tout son sens à un curieux passage de la Chronique de Gaël selon lequel, après la mort d’Alain III, « le comte Eudes dirigeant le regnum », les moines de Saint-Méen reçurent l’établissement d’un bourg, d’une foire, d’un marché, du change de l’or, de l’argent et des deniers, compte tenu de la fixité ou de la baisse de la monnaie de Rennes26. Par cette concession, Eudes s’inscrivait à nouveau dans la continuité de son frère et favorisait un de ses alliés, Raoul de Gaël.
- 27 Cartulaire de l’abbaye Saint-Georges de Rennes, [Cartulaire de Saint-Georges de Rennes] ed. P. de (...)
- 28 Op. cit., no xix.
- 29 Op. cit., no xiii. Après la mort du Duc en 1066, la comtesse Berthe institua Geoffroy Grénonat com (...)
16Eudes bénéficiait à Rennes du soutien spirituel et politique de sa sœur Adèle de Saint-Georges. Conformément aux pratiques du principat d’Alain III, le comte et l’abbesse agirent de concert, ici pour autoriser la construction d’un château27, là pour établir un prévôt28. Peut-être se partageaient-ils également la garde de Geoffroy Grénonat en attendant de placer ce fils naturel d’Alain III à la tête du comté29 ?
- 30 Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 45, 56 ; Cartulaire de Saint-Georges de Rennes, op. cit., no(...)
- 31 M. Brand’Honneur, Manoirs…, op. cit., p. 285.
- 32 Guillotel H., De la vicomté de Rennes à la vicomté de Porhoët, dans M.S.H.A.B., tome LXXIII, 1995, (...)
- 33 Cartulaire de Saint-Georges de Rennes, op. cit., no 19 : Hi autem sunt testes Eudo comes & uxor ej (...)
- 34 Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 61, 64. L’acte no 61 pourrait être postérieur au no 64 du fa (...)
17Le contrôle de Rennes, favorisé par l’aval de Saint-Georges, gonfla certainement les rangs des « eudonistes », comme le prouvent les souscriptions de Ricaladrus30, de Costard de Saint-Didier31, et surtout du vicomte de Rennes, Josselin. Détenteur de biens en Anjou32, ce dernier rejoignit naturellement le parti pro-angevin du nouvel homme fort du Rennais33. Peut-être trop âgé pour suivre Eudes en Anjou à l’occasion de la restitution de Bazouges, Josselin sût se rapprocher de Conan II après 1057 et assistait à l’intronisation de ce dernier. Son fils, le vicomte Eudes, lui succéda dans les années 1062-1066 mais fréquenta la cour ducale avec peu d’assiduité34.
- 35 Keats-Rohan K., Crime et châtiment à la manière du XIe siècle ? Note sur une charte bretonne en fav (...)
- 36 Il assistait à l’intronisation de Conan II à Rennes, Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 53.
18L’acte de restitution de Bazouges à Saint-Aubin d’Angers révèle la forte influence d’Eudes auprès des grands du Rennais peu avant sa capture. Fils du vicomte d’Alet Hammon II, chantre la cathédrale de Rennes en 1040-1047, l’évêque Main avait été placé sur le siège de Rennes dès 1049, sans doute par la volonté d’Eudes. Malgré son engagement aux côtés de ce dernier, sa dignité épiscopale et ses liens possibles avec Robert Ier de Vitré35 lui permirent de se rallier aisément à Conan II après 105736.
- 37 Op. cit., no 19, 27, 51.
- 38 Brand’Honneur M., Manoirs…, op. cit., p. 266 : le lignage de Raoul le Large prendra le nom de cette (...)
- 39 Op. cit., p. 178-179 ; Guillotel H., Les évêques d’Alet du IXe au milieu du XIIe siècle, dans Anna (...)
- 40 L’épouse de Rivallon vicarius se nomme Jernagande (Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 23 : cum (...)
19De même, Raoul le Large se rendait déjà à la cour des comtes de Rennes du vivant de la comtesse Havoise37. Etabli dans la région d’Aubigné38, il devait être apparenté aux Fougères, aux évêques d’Alet39 et de Rennes du début du xie, si ce n’est aux Marcillé40.
- 41 Guillotel M., Le lignage, point de cristallisation d’une nouvelle cohésion sociale. Les Goranton He (...)
- 42 Guillotel J.-P., ibidem.
20Les Goranton Hervé étaient justement possessionnés à Vitré où ils géraient d’anciens biens du fisc41. À l’instar de Raoul le Large, ils exerçaient également des droits sur Gahard42, ce qui favorisa peut-être un rapprochement entre les deux lignages.
- 43 Boüard M. de, Guillaume le Conquérant, op. cit., p. 394 ; K. S. B. Keats Rohan, Le rôle des Bretons (...)
- 44 Guillotel H., Les actes…, op. cit., nos 22, 28, 31.
21Quant à Raoul de Gaël, il était le fils de Raoul l’Ecuyer dit l’Anglais car familier du roi Edouard le Confesseur43. Son père n’intervenait plus auprès d’Alain III depuis 1032-103444, mais son lignage conservait des biens près de Saint-Méen de Gaël.
- 45 Guillotel H., op. cit., nos 30, 34, 42, 45, 56, 57, 60 ; Cartulaire de Saint-Georges de Rennes, no (...)
- 46 Hidrochius intervient aux côtés d’Adèle auprès d’Eudes (op. cit., no 13), puis à la cour ducale, p (...)
- 47 Guillotel H., op. cit., no 31, 42, 43.
- 48 Op. cit., no 31 : Raoul l’Escuyer, père de Raoul de Gaël, témoigne dans le même acte.
22À un rang plus modeste, Hidrochius (Hildrochius) et le prévôt Rivallon s’étaient distingués pour la première fois vers 1032-1034. Le premier resta très attaché à l’abbaye Saint-Georges de Rennes45 et suivit l’abbesse Adèle dans les ambiguïtés de sa politique46. Le second appartenait davantage à la suite d’Alain III47. Assurant sa charge dès 1032-103448, cet homme âgé dut mourir peu après son voyage en Anjou.
- 49 Cartulaire de Saint-Georges de Rennes, no 29 :… vendidit Rogerius Ascelini filius monasterium Sanc (...)
- 50 Saint-Georges-de-Gréhaigne est à moins de trois kilomètres au nord-est de Pontorson.
- 51 Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 22.
- 52 Il paraît d’ailleurs intéressant de souligner certaines similarités dans les listes de témoins des (...)
23Parmi les personnages plus obscurs, un certain Roger fils du moine Ascelin (Rogerus filius Ascelini monachi) mériterait un peu d’attention. Il pourrait s’agir du Roger fils d’Ascelin qui vendit ses droits sur le monastère Saint-Georges de Grehaigne à l’abbesse Adèle49. Etabli aux confins du comté de Rennes et de la Normandie50, le père de Roger pourrait être témoin de la restitution au Mont-Saint-Michel d’églises sises à Cancale effectuée par Alain III en 103251. La rareté du nom d’Ascelin et la proximité des lieux concernés permettraient au moins de le supposer52.
- 53 Dom Morice, Mémoires, tome I, col. 403-404 : Cum Tetbaldus Cognomento Illegiatus commanens apud Mar (...)
24Berceau de la dynastie ducale, le comté de Rennes était ainsi devenu l’enjeu d’une lutte sans merci. Un acte en faveur de Marmoutier rapporte qu’un certain Thibaud le Deslée, tenancier à Marcillé, fut capturé par les hommes du comte Eudes puis libéré contre une forte rançon53.
- 54 Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 24, 46, 47, 48, 49, 50, 52.
- 55 Main II et son épouse Adélaide eurent trois fils. L’aîné, Eudes, mourut pendant la minorité de Con (...)
- 56 Fauroux M., Recueil des actes…, op. cit., no 160, 161, 162 : la présence de Néel de Saint-Sauveur a (...)
- 57 Main II entraîna dans la mouvance normande certains fidèles qui ne regagnèrent la Bretagne que bie (...)
25Le frère d’Alain III dominait apparemment le nord et l’ouest du comté de Rennes mais la situation restait instable. Protégeant le nord-est des intrusions normandes, Main II de Fougères avait fréquenté assidûment la cour ducale pendant la minorité de Conan II54. En 1050, il souscrivait encore un acte de Robert de Marcillé mais il mourut vers 1054-105555, dans la fidélité de Guillaume de Normandie56. Son fils Raoul ne lui succédant qu’à la fin des années 1070, on ne sait trop comment s’exerça le contrôle de cette région pendant les vingt ans qui précédèrent57.
- 58 Brand’Honneur M., Manoirs…, op. cit., p. 101-102 : le basculement de Hervé de Martigné serait à l’o (...)
- 59 Keats-Rohan K., Crime et châtiment…, op. cit., p. 27-28.
- 60 Marchegay P., Charta fundationis, prioratus de Carbeio, dans Archives d’Anjou, Angers, tome II, 185 (...)
- 61 Brand’Honneur M., op. cit., p. 104-105 ; Brunterc’h J.-P., Puissance temporelle…, op. cit., p. 67.
- 62 Brand’Honneur M., ibidem.
26Au sud-est, Hervé de Martigné entra dans l’orbite de Geoffroy Martel : il reçut de ce dernier l’honor de Lorareis, puis aux alentours de 1060, le château de Pouancé58. De même, une guerre opposant Robert de Marcillé et Brient Ier de Châteaubriant contraignit le moine Jonas de quitter Marcillé et de se réfugier en Anjou59. Geoffroy Martel lui céda le domaine de Carbay dont les terres étaient alors dévastées par son ennemi Brient Ier60. Le seigneur de Châteaubriant s’était peut-être engagé aux côtés du comte de Nantes Mathias61. Il est en effet possible que ce dernier ait voulu se libérer des tutelles angevine et bretonne en s’appuyant sur Brient et d’autres seigneurs du Nantais. Mais, la mort subite de Mathias en 1050/1051 aurait ruiné ces velléités d’indépendance, Conan II profitant de cette disparition pour s’emparer du comté62.
- 63 Les années 1047-1057 sont marquées par un fléchissement de l’activité de la chancellerie ducale. S (...)
- 64 Successeur du sénéchal Geoffroy fils de Glevis. Il épousera la veuve de ce dernier et occupera ses (...)
- 65 Le nom d’Aubry est rare. Il est toutefois porté par un bâtard de Raoul le Large.
- 66 Guillotel H., Les origines du bourg de Donges. Une étape de la redistribution des pouvoirs ecclésia (...)
- 67 Brunterc’h J.-P., Puissance temporelle…, op. cit., p. 66, note 233.
- 68 Il était accompagné ici de son frère Thibaud dont il s’agissait apparemment de sa seule apparition (...)
- 69 Carioc possédait des droits à Piré-sur-Seiche.
- 70 Brand’Honneur M., Manoirs…, op. cit., p. 265.
- 71 Un fidèle de Conan II dès sa minorité. En 1090-1135, il intervient auprès de Guy de Laval et d’And (...)
- 72 Probablement Servon-sur-Vilaine. Le lignage devait être modeste et dépendre de Vitré. On trouve Ge (...)
- 73 Peut-être l’occupant du site énigmatique de Champ lion, autrefois Champ Léon, en Saint-Sauveur-des (...)
- 74 Le nom de Frioul le rattache-t-il aux vicomtes de Nantes (Keats-Rohan K., Le problème de la suzera (...)
- 75 Geoffroy de Mayenne et Geoffroy Pape-Bœuf, cf. Brunterc’h J.-P., Puissance temporelle…, op. cit. L (...)
27La mainmise sur le Nantais fut une excellente occasion pour Conan II de reprendre pied en Bretagne63. Il se rendit à la même époque auprès de son oncle Thibaud de Blois. Sa suite révélait alors une solide assise nantaise (Mainfinitus de Nantes64, Aubry de Vere65, Ascol fils du vicomte de Nantes Roald66, Papinus de Raheriis67), et de bons appuis autour de Rennes, essentiellement au sud (Sylvestre de la Guerche68, Giro de Châteaugiron, Carioc fils de Caradoc69, Suhard d’Acigné70) et à l’est (Hervé le Forestier71, Arthur de Servon72, Quinol de Léon73, Rivallon fils de Frioul74). Son influence concurrençait même celle de Geoffroy Martel, puisque deux vassaux du comte d’Anjou l’accompagnaient dans son voyage75.
- 76 Tours était alors tenue par Geoffroy Martel. Il autorisa probablement le passage de Conan II, ce q (...)
- 77 Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 54.
28Passant à Tours76, le duc confirma à l’abbaye de Marmoutier tout ce qu’elle possédait ou posséderait par don ou par achat « dans les terres soumises à son pouvoir », terres qu’il distinguait de « celles qui constituaient le domaine de son père au moment de sa mort ». Sur ces dernières, l’abbaye posséderait paisiblement les biens qu’elle détenait à la date de la confirmation, mais demanderait l’autorisation ducale pour les biens qui dorénavant pourraient lui être donnés ou vendus par un tiers77. Exerçant son pouvoir hors du domaine paternel, Conan II revendiquait ainsi l’héritage d’Alain III que son oncle lui disputait. Toutefois, s’il espérait récupérer le comté de Rennes, il n’envisageait pas de poursuivre Eudes sur les terres que ce dernier avait reçues du vivant de son frère aîné. Une trêve aurait-elle été conclue, gelant les positions de chacun jusqu’à une reprise des hostilités vers 1056/1057 ?
- 78 Baluze E. (éd.), Chronique de Quimperlé, op. cit., p. 265 : MLIV… Hoël principatum Nannetensium adi (...)
- 79 Quaghebeur J., La Cornouaille…, op. cit., p. 104, tableau 3.
- 80 Quaghebeur J., Stratégie lignagère et pouvoir politique…, op. cit., p. 17 et La Cornouaille du IXe (...)
29On ne sait trop à quel titre Conan II contrôla personnellement le Nantais. En effet, depuis la mort de Mathias en 1050/1051, ce comté semblait naturellement dévolu à Budic, frère du comte défunt. Pourtant, c’est le fils d’Alain Canhiart, Hoël, qui succéda à Mathias en 105478, probablement à la mort de Budic79. Cet interrègne de quatre ans permit à Conan II non seulement de résister à l’avancée de son oncle en Rennais, mais aussi de se rapprocher du comte de Cornouaille. Allié à la branche cadette et fidèle de la branche aînée, Alain Canhiart sut habilement tirer profit de la situation politique. Ainsi négocia-t-il l’union de son fils Hoël avec Havoise, la sœur de Conan II. Par ce moyen, le duc tentait, d’une part, d’affaiblir les effets du mariage d’Orguen et du comte Eudes et, d’autre part, de rallier l’ensemble du sud Bretagne à sa cause. Quant à Alain Canhiart, son lignage s’emparait du comté de Nantes et poursuivait son ascension vers la dignité ducale80.
- 81 Contrairement à son père, Hoël ne pouvait invoquer un mauvais état de santé pour échapper à ses ob (...)
- 82 Brunterc’h J.-P., Puissance temporelle…, op. cit., p. 68.
- 83 Guillot O., Le comte d’Anjou…, op. cit., tome I, p. 79 et suiv.
30Conan II ne semble pas avoir retiré les fruits qu’il escomptait de cette alliance. En effet, cette dernière n’inquiéta pas suffisamment le comte Eudes en Bretagne pour l’empêcher de participer au siège d’Ambrières. De même, la maison de Cornouaille ne se manifesta pas davantage auprès du duc les années suivantes81. Pire, la fidélité du Nantais demeura tout aussi vacillante, Hoël lui-même n’hésitant pas en 1057 à rendre la cité de Nantes à Geoffroy Martel82. Aussi n’est-il pas interdit de penser que la position de Conan II se détériora de nouveau lorsqu’il abandonna le comté de Nantes au fils d’Alain Canhiart. Le duc conserva probablement des alliés au sud de Rennes, cependant, son antagoniste ne désarmait pas : soutenues par un comte d’Anjou réconcilié avec le roi de France depuis 105283, les forces rassemblées sous la bannière d’Eudes en 1056/1057 révélaient dans quelle situation délicate Conan II se trouvait à cette date. La victoire inattendue de ce dernier quelques mois plus tard bouleversa tant le paysage politique breton que les plans du roi de France.
La vaine coalition anti-normande
- 84 Guillot O., op. cit., p. 67, note 295. Sur les Bellême, cf. Louise G., La seigneurie de Bellême (Xe(...)
- 85 Lemesle B., La société aristocratique dans le Haut-Maine (XIe-XIIe), Rennes, PUR, 1999 : Herbert Ba (...)
- 86 Gervais profita peut-être de l’absence de Geoffroy Martel lors du siège de Tours.
- 87 Guillot O., op. cit., p. 66, note 286.
31Inquiet de l’ambition de son allié qui venait pourtant de le sauver de la conjuration blésoise, Henri Ier laissa Geoffroy Martel achever la conquête de la Touraine tout en renouant avec l’évêque du Mans Gervais. Ce fidèle du comte de Blois était issu de la famille de Bellême dont le roi et le duc de Normandie se partageaient les faveurs84. Aussi faut-il reconnaître en Gervais à partir de 1043/1044 un instrument de la politique anti-angevine du Roi de France. D’ailleurs, notre évêque n’attendit pas longtemps pour user de sa capacité de nuisance. Il se débarrassa tout d’abord d’Herbert Bacon qui assurait jusqu’alors la garde du jeune Hugues IV, fils du défunt comte du Maine Herbert Eveille-Chien85. Même si Herbert Bacon avait toujours manifesté de l’animosité à l’égard du prélat, son éviction au profit d’Hugues IV révélait la volonté de Gervais de prendre indirectement le contrôle du comté86. Le comte d’Anjou n’apprécia sans doute pas cette hardiesse, cependant il ne s’y opposa apparemment pas et reçut l’hommage du nouveau comte du Maine87.
- 88 Peut-être à l’occasion du voyage de Geoffroy Martel à Rome pour le couronnement d’Henri III à la N (...)
- 89 Gersent, mère d’Étienne-Henri, fut répudiée avant 1049, puisque son cas fut évoqué devant le pape (...)
32Peu après88, l’évêque du Mans dévoila ses véritables intentions en mariant Hugues IV à la comtesse Berthe, veuve d’Alain III de Bretagne. Vers la même époque, le comte Thibaud III de Blois, frère de Berthe, épousa Gersent, la sœur du comte du Maine89. Le comte d’Anjou n’eut dès lors d’autre moyen que d’employer la force contre cette nouvelle conjuration blésoise.
- 90 Busson, Ledru (éd.), Actus Pontificum Cenomannis in urbe degentium, op. cit., p. 365 : Videns ergo (...)
- 91 La guerre entre Hugues IV et Geoffroy Martel éclata avant que le comte d’Anjou n’emprisonne l’évêq (...)
33Aux yeux de Geoffroy Martel, Hugues IV n’avait épousé la veuve d’Alain III que « pour sa ruine et à son détriment90 ». Quel danger Berthe représentait-elle ? Ses origines blésoises pesaient certainement très lourd dans la balance, mais son premier mariage n’était pas non plus anodin. Le comte d’Anjou pouvait légitimement craindre que cette « forte femme » n’usât de son influence sur son fils pour lui nuire, comme la prise de Craon devait rapidement le confirmer91.
- 92 Actus Pontificum…, op. cit., p. 365 : Hugo cum suis militibus propter uxorem abiit.
- 93 Ibidem. : Gaufridus autem castellum Lir igne cremavit.
- 94 Ibidem. : Judam portans in pectore, mandavit in dolo Gervasium episcopum ut traderet eum. Quem tra (...)
34On ne sait pas trop où demeurait Berthe avant son remariage. Si elle était encore en Bretagne, elle devait déjà avoir été reléguée par le comte Eudes. Peut-être avait-elle rejoint son frère à Blois, abandonnant son fils à son destin. Quoi qu’il en soit, Hugues IV usa d’une escorte pour la rejoindre92. Geoffroy Martel profita de son absence pour incendier Château-du-Loir93, convoquer Gervais et l’emprisonner94.
- 95 Guillot O., op. cit., tome I, p. 69-72.
- 96 Op. cit., tome I, p. 67-69.
- 97 Guillaume de Poitiers, p. 16 : Tres interea centuriae, quas reliquerat, subsequentes inuestigando (...)
- 98 Op. cit., p. 14 : Rex etenim Henricus contumeliosis Gaufredi Martelli uerbis irritatus, exercitum (...)
35Outre la captivité d’un des leurs, les Bellême subirent lourdement la progression angevine, abandonnant consécutivement Domfront et Alençon95. L’intérêt commun pour ce lignage rapprocha naturellement le roi et le duc de Normandie. C’est ainsi que ce dernier devint en 1048 l’auxiliaire privilégié d’Henri Ier contre le comte d’Anjou96. En octobre 1049, une importante armée royale se mit en branle. À cette nouvelle, Geoffroy Martel abandonna la défense de Domfront assiégée par Guillaume le Bâtard, perdant par là-même Alençon. Trop heureux de se venger de la perte de Tours, Thibaud de Blois rejoignit la coalition avec plus de cinq cent chevaliers97. Fort de ces appuis, le roi pénétra en Anjou et s’empara de Mouliherne98.
- 99 Guillot O., op. cit., tome I, p. 74.
- 100 Geoffroy Martel se sépara de son épouse Agnès entre janvier 1049 et le 15 août 1052, cf. Guillot O (...)
- 101 Cet événement pourrait être une conséquence de la répudiation de la sœur de Hugues IV, Gersent, pa (...)
- 102 Anselme Père, Histoire généalogique et chronologique de la maison royale de France, des pairs, gran (...)
- 103 Guillot O., op. cit., tome I, p. 86-87.
- 104 Guillaume de Poitiers, p. 62-63 : Idcirco germanam Hereberti, ex partibus Teutonum suae munificent (...)
- 105 Busson, Ledru (éd.), Actus Pontificum…, op. cit., p. 366 : Cives vero Cenomanici uxorem Hugonis, cu (...)
- 106 Busson, Ledru (éd.), Actus Pontificum…, op. cit., p. 366 : Comite autem Hugone, secundum legem Chri (...)
- 107 Cf. supra.
36Ce conflit spectaculaire dut s’apaiser très vite, puisque les antagonistes se réconcilièrent le 15 août 1052 au plus tard99. Entre-temps, le comte d’Anjou s’était éloigné de l’Empereur100, et avait « régularisé » sa position dans le Maine. En effet, Hugues IV était mort brutalement le 26 mars 1051, laissant à Berthe la charge du comté durant la minorité de leur fils Herbert II. La comtesse ne put se maintenir et le comte d’Anjou fit bientôt son entrée au Mans à la faveur d’un soulèvement populaire101. Selon l’historiographie traditionnelle102, la « veuve éplorée » se serait réfugiée auprès de son fils Conan II, la garde d’Herbert II étant confiée à Geoffroy Martel103. Pourtant, à en croire Guillaume de Poitiers, Berthe aurait gagné la Germanie104. Selon les actes des évêques du Mans, ses enfants l’auraient accompagnée105, ce qui expliquerait l’absence d’Herbert II dans le Maine à cette époque. Geoffroy Martel n’aurait donc pas veillé sur l’héritier d’Hugues IV mais l’aurait tout simplement évincé. Les actus ne font d’ailleurs aucune allusion à cette « tutelle » angevine, ils rapportent laconiquement que le comte d’Anjou reçut l’honneur manceau et le conserva pendant dix ans106, c’est-à-dire jusqu’à sa mort en 1060. Herbert II réapparaît toutefois dans le Maine vers 1058, mais toujours sous l’autorité du comte d’Anjou107.
- 108 Ce dernier revirement aurait pour origine le mariage du duc de Normandie avec Mathilde de Flandre (...)
- 109 Un acte de l’abbaye Saint-Vincent du Mans datant du 25 novembre 1058 qualifie encore Herbert II de (...)
- 110 Le comte Eudes avait même donné sa fille Adèle à Geoffroy Martel entre 1049 et 1054/1055. Celle-ci (...)
- 111 Brunterc’h J.-P., Geoffroy Martel…, op. cit., p. 313.
- 112 Bur M., La formation…, op. cit., p. 200-201.
- 113 Robert le Bourguignon est déjà investi de l’honneur de Craon le 26 mars 1053 (cf. Guillot O., Le c (...)
37L’annexion du Maine par l’Anjou servait les plans d’Henri Ier, qui, par un renversement radical de son système d’alliance, s’inquiétait désormais de l’irrésistible ascension de Guillaume le Bâtard108. À l’évidence, Geoffroy Martel était plus à même de s’opposer au duc de Normandie que ne le pouvait un Herbert II à peine sorti de l’enfance109. Outre un tempérament belliqueux qui lui avait sans doute valu son nom de Martel, le comte d’Anjou avait aussi pour lui les liens profonds qui l’unissaient au comte Eudes110. D’une part, l’expérience que ce dernier avait des affaires normandes en faisait un allié bien plus précieux que Conan II. D’autre part, le frère d’Alain III s’imposait alors dans le nord du comté de Rennes, ce qui le mettait en première ligne face aux armées normandes. L’intérêt du roi revenait dès lors à mettre fin à un conflit qui fragilisait le front breton. Henri Ier dut user de son influence pour amener l’oncle et le neveu à un modus vivendi111. Retranché dans le Nantais, Conan II pouvait d’autant moins s’opposer à la volonté royale que depuis le rapprochement franco-angevin, Thibaud de Blois semblait davantage attiré par la Champagne112. Peut-être est-ce d’ailleurs à cette occasion que le comte d’Anjou récupéra Craon que le duc de Bretagne avait investi en 1048113.
- 114 Guillaume d’Arques, comte de Tallou, était fils de Richard II et frère de Mauger, archevêque de Ro (...)
- 115 Dhondt J., op. cit., p. 479.
- 116 Neveu F., La Normandie des ducs…, op. cit., p. 134.
- 117 Dhondt J., op. cit., p. 476-478. Mortemer, dép. Seine-Maritime, ar. Dieppe, cant. Neufchâtel-en-Bra (...)
38Le roi marqua le début des hostilités en soutenant contre le duc de Normandie des rebelles tels que Guillaume d’Arques114, Guillaume Busac ou encore Guimond de Moulin-la-Marche115. Ces diverses tentatives de subversion se soldèrent par des échecs mais la cour royale sut accueillir les exilés qui contribuèrent à y entretenir un climat d’hostilité à l’égard de Guillaume le Bâtard116. Optant, en février 1054, pour une campagne militaire d’envergure, Henri Ier et Geoffroy Martel pénétrèrent en Normandie par l’Avre et le comté d’Evreux, alors que le frère du roi, Eudes, à la tête d’un autre corps, se dirigeait vers le pays de Bray par la Bresle. Mais l’expédition tourna court et après l’écrasement d’Eudes à Mortemer117, l’armée dirigée par le roi s’empressa de quitter la Normandie.
- 118 Guillot O., op. cit., tome I, p. 91 note 408.
- 119 Ambrières, département de la Mayenne, arrondissement de Mayenne, canton d’Ambrières.
- 120 Guillaume de Poitiers, p. 33 : Exercitus nostri mox diuulgat discessu, Martellus in auxilium suum (...)
- 121 S’il ne mentionne pas le comte Eudes, Guillaume de Poitiers insiste sur la participation des Breto (...)
39Cette nouvelle défaite amena Henri Ier à traiter avec son adversaire qui se vit reconnaître les conquêtes faites aux dépens du comte d’Anjou118 : Guillaume le Bâtard pénétra peu après dans le Maine et édifia le château d’Ambrières119. Délaissé provisoirement par le roi, Geoffroy Martel reçut toutefois le soutien du comte de Poitou et d’Eudes de Bretagne120. Ce dernier avait soutenu l’expédition de 1054 car, après la défaite de Mortemer, il assista à la fondation de Saint-Martin-du-Vieux-Bellême auprès du frère d’Henri Ier, du comte d’Anjou et de l’évêque Yves de Sées121. Ce fut probablement l’occasion pour Eudes et Geoffroy de préparer l’attaque d’Ambrières qui se solda, une fois encore, par un échec cuisant. Les trois comtes furent écrasés et Geoffroy de Mayenne, fidèle du comte d’Anjou, dut prêter hommage au duc de Normandie.
- 122 Musset L., Autour des modalités juridiques de l’expansion normande au XIe siècle : le droit d’exil, (...)
40L’engagement du comte Eudes dans la coalition anti-normande ne se limitait pas à un rôle purement militaire. La situation stratégique de la Bretagne en faisait un asile parfait pour les normands ayant à craindre la colère du duc122. Ainsi ne faut-il pas s’étonner de trouver auprès d’Eudes en 1056/1057, Néel de Saint-Sauveur, vicomte de Cotentin, dont la dimension méconnue mérite qu’on lui consacre quelques développements.
- 123 Neveu F., La Normandie…, op. cit., p. 112-119. Ce complot avait pour but d’assassiner le jeune duc (...)
- 124 Wace, Roman de Rou, A. J. Holden (éd.), Paris, 1970-1973, 3 vol.
- 125 Delisle L., Histoire du château et des sires de Saint-Sauveur-le-Vicomte, Valognes, 1867, 2 tomes, (...)
- 126 Guillaume de Poitiers, p. 12-13 : Supplicia item consociis, quae capitalia ex æquo irrogarentur, c (...)
- 127 Ibidem : Nigellum alio tempore, quoniam improbe offensabat, exilio punitum fuisse comperio.
41Le vicomte Néel passe pour le principal chef militaire de la rébellion de 1046-1047, soutenant Guy de Brionne contre Guillaume de Normandie123. Selon certains historiens s’appuyant sur Wace124, Néel, après sa défaite de Val-ès-Dunes, au printemps ou en été 1047, aurait été privé de ses fiefs et condamné à l’exil. Il se serait réfugié en Bretagne jusqu’en 1054, date où il aurait reparu à la cour de Guillaume125. Au contraire, selon Guillaume de Poitiers, le Bâtard aurait fait preuve de clémence envers les conjurés126 : Néel n’aurait été exilé que bien plus tard et pour une toute autre raison127.
- 128 Sur l’intérêt historique de Wace, cf. Boüard M. de, Aux sources du Roman de Rou, dans Recueil de t (...)
42L’hypothèse d’une fuite du vicomte en Bretagne suite à la défaite de Val-ès-Dunes, ne doit sa solidité qu’à des sources narratives tardives. Sur la foi de Wace, elle remet en cause le témoignage de Guillaume de Poitiers, pourtant contemporain des faits. S’appuyant sur une épopée de la fin du XIIe siècle, elle manipule les sources diplomatiques du XIe jusqu’aux limites de la vraisemblance128.
- 129 Brunterc’h J.-P., op. cit., p. 315.
- 130 Fauroux M., Recueil des actes des ducs de Normandie de 911 à 1066, Caen, Mémoires de la société des (...)
- 131 Marmoutier, cartulaire blésois [Cartulaire de Marmoutier pour le Blésois], abbé C. Métais (éd.), B (...)
- 132 Fauroux M., Recueil…, op. cit., no 219, p. 417 : Néel, qui semble avoir perdu son titre le 4 août 1 (...)
43À la suite de Jean-Pierre Brunterc’h, il semble plus logique de privilégier le récit de Guillaume de Poitiers et de n’envisager le bannissement du vicomte du Cotentin qu’après 1054/1055129, comme nous le suggèrent les sources diplomatiques. Néel apparaît en effet dans des actes normands entre 1047 et septembre 1054, sans interruption flagrante130. Sa présence « en milieu pro-angevin » lors de la donation de Bazouges à Saint-Aubin d’Angers par le comte Eudes de Bretagne fixe à 1057 le terminus ad quem de sa disgrâce. La version de Wace vient elle-même renforcer cette chronologie puisque les liens du seigneur de Saint-Sauveur avec des princes bretons se trouvent ainsi confirmés, mais à une époque un peu plus tardive que ne l’alléguait l’auteur du Roman de Rou. Très logiquement retrouve-t-on encore notre vicomte auprès du roi Henri Ier, lors du siège de la forteresse « normande » de Thimert en avril-mai 1059131. Les années suivantes, bien que sa trace s’estompe sensiblement, Néel ne semble pas être revenu en Normandie puisqu’il n’apparaît plus à la cour ducale et qu’un nouveau vicomte tient le Cotentin vers 1060-1066132.
44Si l’exil du seigneur de Saint-Sauveur est postérieur à 1054, il paraît assez difficile de l’expliquer par l’écrasement de la conjuration à Val-ès-Dunes huit ans plus tôt. Comment comprendre dès lors l’étrange attitude de Guillaume de Normandie à l’égard de Néel ? De quelle secrète félonie ce dernier fut-il coupable pour subir un châtiment qu’il avait pu éviter en 1047, malgré sa responsabilité manifeste dans une tentative d’assassinat contre le duc ?
- 133 Guillaume de Poitiers, p. 12-13 : Supplicia item consociis, quae capitalia ex æquo irrogarentur, c (...)
- 134 Guy de Bourgogne, seigneur de Brionne, était le fils légitime de Renaud de Bourgogne et d’Adèle, f (...)
- 135 Ibidem. : Recepto castro, in curia sua commanere eum concessit. Le siège de la forteresse de Brion (...)
- 136 Grimoult du Plessis, autre complice de Néel, fut emprisonné à Rouen et périt un peu plus tard dans (...)
45La magnanimité du bâtard était sans doute bien moins guidée par le cœur que par la raison133 : Guillaume devait avoir conscience que son autorité était encore trop fragile pour se priver définitivement du soutien des seigneurs qu’il venait de vaincre. Ainsi, le haut lignage de Guy de Brionne, qui avait placé celui-ci à la tête de la rébellion134, ne fut certainement pas étranger à son retour en grâce135. Le vicomte Néel bénéficia-t-il des mêmes protections136 ?
- 137 Delisle L., op. cit., pp. 1-27 : Néel I, dit le vieux, célèbre pour ses faits d’armes au début du X (...)
46La généalogie de ce dernier semble hélas encore mal établie. On admet communément, en effet, la succession de deux vicomtes Néel au cours du XIe siècle137, mais les critères de distinction entre ces deux personnages restent peu convaincants. Une analyse scrupuleuse des titulatures vicomtales à travers les actes des ducs de Normandie pourrait peut-être apporter un début de solution : en ne recherchant que l’association du patronyme Néel et du titre de vicomte, il paraît assez aisé d’écarter les homonymes et de clarifier le lignage des Saint-Sauveur au XIe siècle.
- 138 Fauroux M., Recueil…, op. cit., no 23, p. 109.
- 139 Op. cit., no 43, p. 150 ; no 31, p. 120 ; no 49, p. 162 ; no 33, p. 124 ; no 34, p. 131 ; no 35, p (...)
- 140 Op. cit., no 73, p. 214 : Nigellus vice comes, Nigellus filius ejus.
- 141 Bates D., Regesta…, op. cit., no 212 ; Musset L., Les actes de Guillaume le Conquérant et de la rei (...)
- 142 Op. cit., no 48 dans le même acte est mentionné un vicomte Eudes. S’agit-il du successeur de Néel (...)
- 143 Op. cit., no 30 : Nigellus de Constantino vicecomes (de Constantino figure en interligne).
- 144 Op. cit., no 260.
- 145 Gallia Christiana, XI, instr. 222 : Eadem namque nocte Assumtionis celeriter expetitus, ut Nigellu (...)
47Le vicomte Néel (Niellus vice comes) apparaît vers 1013-1020138. On le suit aisément jusqu’aux années 1054-1055139, son fils Néel ne l’accompagnant qu’une seule fois entre 1027-1035140. Après 1055, il n’est plus mentionné que dans quelques actes de confirmation141, émergeant à nouveau vers 1079142. Il intervient ensuite très officiellement le 2 juin 1080143 puis une dernière fois à Saint-Sauveur-le-Vicomte vers 1080-1085144. Selon un passage de la Gallia Christiana, il serait mort en 1091, le jour de l’Assomption145.
- 146 Ainsi, le vicomte Néel devait-il être au berceau lors de l’expédition d’Ethelred contre la Normand (...)
- 147 Fauroux M., op. cit., no 73, p. 214 ; Bates D., op. cit., no 197, p. 628 ; no 214, p. 674.
- 148 Bates D., op. cit., no 48.
- 149 Op. cit., no 54 : Néel de Constantino encore présent à la cour ducale vers 1081-1087.
48Cet examen nous conduit à voir un vicomte Néel, né probablement vers 1000146, fidèle des ducs de Normandie pendant un demi-siècle et exilé par Guillaume vers 1055. Son fils Néel, né peut-être vers 1020, serait resté auprès du duc malgré le bannissement de son père147. Il aurait adopté le titre vicomtal entre 1076 et 1079148, peut-être après la mort de son père, et fréquenté la cour ducale jusqu’à son décès en 1091149.
- 150 BNF ms. lat. 12880 fol. 14 ro-vo : Notum sit omnibus presentibus et futuris quod ego Niellus vicec (...)
49Le lignage de notre vicomte relevait sans aucun doute de la haute noblesse normande, ce qui pourrait expliquer « l’exemplaire » patience de Guillaume de Normandie envers son fidèle un peu trop « turbulent ». En effet, dans un acte des années 1050-1056, rapportant la vente de ses églises de Guernesey à Marmoutier150, le vicomte Néel intervient en compagnie de son épouse Adèle, de leurs fils Roger, Guillaume, Guillaume (sic.) Girard et des « sœurs de leurs fils » Emma, Bilehilde et Mathilde.
- 151 Bates D., op. cit., no 197 : Notum igitur perspicuitate istius carte fieri volumus fidelibus univer (...)
50Remarquons tout d’abord l’absence de Néel fils de Néel, qui pourtant, vingt ans plus tard, confirmera cet accord entre Marmoutier et son père151. Néel fils Néel serait donc issu d’un précédent mariage du vicomte du Cotentin.
- 152 Gallia Christiana, tome IX, Instr., 231 : Ecclesia sancti Salvatoris est libera ab omnibus episcop (...)
- 153 Selon l’extrait de la Gallia Christiana, le vicomte Néel en question établit les moines de Jumiège (...)
51La liste des enfants permet également de supposer que Néel et Roger appartenaient au stock onomastique des Saint-Sauveur. Cette hypothèse nous permettrait d’éclaircir la généalogie des vicomtes du Cotentin au XIe siècle. En effet, un curieux passage de la Gallia Christiana152, nous apprend qu’au temps du « comte Richard le Vieux » un certain vicomte Roger obtint l’exemption de droits épiscopaux pour l’église de Saint-Sauveur. Le même extrait associe un vicomte Néel au vicomte Roger, sans préciser une quelconque parenté entre eux. Ce vicomte Néel, que nous identifions à Néel fils Néel153, aurait eut lui-même pour successeurs ses nepotes, Néel et Roger.
- 154 La difficulté vient de la double interprétation de comes d’une part, et de vetulus d’autre part. L (...)
- 155 Selon l’extrait de la Gallia Christiana, le vicomte Roger obtint le privilège de l’église Saint-Sa (...)
52Si l’identification du comte Richard154 et du vicomte Roger155 peut poser quelques difficultés, il est probable que le vicomte Roger ait été le grand-père paternel de Néel fils Néel. Qu’en est-il des nepotes de ce dernier ?
- 156 Benoist E., Goelzer H., op. cit., nepos.
- 157 Delisle L. opte quant à lui pour « petit-fils ». Delisle L., op. cit., p. 27.
53Nepos peut désigner en latin tant le petit-fils que le neveu156. En l’occurrence, les sources ne permettent pas de trancher157. Ces nepotes pourraient être tout autant les enfants d’un frère ou d’une sœur cadette de Néel fils Néel que les petits-enfants de ce dernier. Cependant, le doublet « Néel – Roger » pourrait ouvrir une piste intéressante sur la destinée de ce lignage au XIIe siècle.
- 158 Dugdale W., Monasticon anglicanum, new edition by J. Caley et al., London, 1817-1830, reprinted 184 (...)
- 159 Saint-Martin-d’Aubigny est à une dizaine de kilomètres au nord-est de Coutances.
- 160 Dalton P., Conquest, anarchy & lordship, Yorkshire (1066-1154), Cambridge, Cambridge University Pre (...)
54Une notice de fondation de l’abbaye anglaise de Byland explique ainsi pourquoi le dit Roger « de Montbray » ne portait pas le cognomen de son père, Néel d’Aubigny158. Ce dernier était le jeune frère d’un comte de Clare et d’un comte d’Arundel à la cour d’Henri Ier Beauclerc. Néel d’Aubigny serait le fils cadet de Roger Ier d’Aubigny, seigneur d’un petit honor normand de Saint-Martin d’Aubigny159, frère cadet de l’échanson royal Guillaume d’Aubigny160. Devenu chevalier, Néel servit son seigneur avec tant d’empressement (à la bataille de Tinchebray, il aurait été celui qui captura Robert Courteheuse en tuant son destrier) qu’il obtint du roi les terres normandes de Roger de Montbray. Hélas, il tomba malade et mourut à Rouen alors qu’il recevait les droits sur le comté de Northumberland, autre possession de Roger de Montbray. Le roi voulant tenir ses engagements envers son fidèle ordonna que le fils de Néel d’Aubigny, Roger, et ses descendants soient désormais nommés « de Montbray ». Ce nouveau Roger de Montbray serait le fondateur de l’abbaye de Byland. Il eut pour fils aîné Néel de Montbray qui lui succéda. Ce dernier eut de son épouse Mabilia quatre fils, Guillaume, Robert, Philippe et Roger. Guillaume, fut lui-même le père de Néel et Roger. Néel épousa la fille de Roger de Canevilla qui lui donna un fils, Roger, gendre de Guillaume de Beauchamp et père de Roger.
- 161 Gallia Christiana, XI, instr. 222, précité.
55La simple comparaison des stocks onomastiques des familles Aubigny-Montbray et Saint-Sauveur révèle une évidente parenté. Quant au passage des biens des Montbray aux Aubigny-Montbray, il pourrait également s’expliquer par un lien de sang entre les premiers et les Saint-Sauveur. En effet, l’évêque de Coutances Geoffroy de Montbray considérait le vicomte Néel mort en 1091 (Néel fils Néel) comme son consanguineus161.
- 162 Delisle L., op. cit., p. 25 ; Fauroux M., op. cit., no 147, p. 329-330 : Nigello quodam ad se vocat (...)
- 163 Pour les hommes, Richard, Guillaume, Baudoin et Girard ; pour les femmes, Adèle, Emma, Bilehilde e (...)
- 164 Gilbert de Brionne, petit-fils de Richard Ier de Normandie, eut pour fils Richard de Bienfaite et (...)
- 165 Vers 1015, Robert comte de Mortain investit le monastère du Mont-Saint-Michel de son alleu de Tiss (...)
- 166 Raoul d’Ivry, demi-frère, par sa mère Sprota, de Richard Ier de Normandie, exerça probablement la (...)
- 167 Ce Guillaume Caritas était l’oncle d’un certain Richard fils de Baudoin. Il fréquentait assidûment (...)
56L’influence de Néel ne reposait pas uniquement sur une ascendance honorable mais aussi sur des alliances judicieuses : Adèle, seule épouse connue du vicomte de Cotentin, était très probablement la sœur de Richard de Reviers162. L’origine des Reviers est méconnue, mais ce lignage était suffisamment digne pour que Néel accepte que son épouse ne soit plus une jouvencelle. Ainsi, Emma, Bilehilde et Mathilde ne sont-elles pas présentées comme « les filles de Néel » mais comme « les sœurs des fils » de celui-ci : elles devaient être issues d’un premier mariage d’Adèle. Le stock onomastique de ce lignage163 pourrait révéler une parenté avec les seigneurs de Brionne164, les comtes d’Avranches165 ou d’Ivry166, ou encore Guillaume Caritas167.
- 168 Entre 1049 et 1055, Guillaume Werlenc, comte d’Avranches, Guillaume Busac, comte d’Eu, Guillaume, (...)
- 169 Les origines de la famille de Montbray sont méconnues mais d’après Orderic Vital, Geoffroy brillai (...)
- 170 Dans la premier tiers du XIe siècle, Robert le Magnifique concéda au Mont-Saint-Michel, la moitié (...)
57Le réseau lignager auquel appartenait Néel explique non seulement la magnanimité de Guillaume à son égard en 1047 mais aussi le bannissement qui frappa le vicomte une dizaine d’années plus tard. En effet, l’exil du seigneur de Saint-Sauveur eut lieu lors des vaines tentatives de déstabilisation des Richardides auxquels Néel était lié168. Outre son union avec Adèle de Reviers, il était probablement apparenté, par Geoffroy de Montbray, à Mauger, archevêque de Rouen, fils de Richard II de Normandie et frère de Guillaume d’Arques169. De là viendrait notamment que le vicomte et l’archevêque possédaient des domaines sur l’île de Guernesey170.
- 171 La politique de Guillaume aurait été de favoriser sa famille maternelle, supposée plus sûre, cf. B (...)
- 172 Guillaume Werlenc, arrière-petit-fils de Richard Ier, s’exila en Italie du Sud. Neveu F., La Norma (...)
58L’autorité ducale semblait s’estimer suffisamment forte pour enfin tirer les conséquences de Val-ès-Dunes171. Ainsi, le comte d’Avranches, Guillaume Werlenc aurait été banni et dépossédé pour une simple parole. Malgré le silence des sources, la cause probable devait être l’existence d’un nouveau complot172 ; or, le Bâtard avait toutes les raisons de craindre que ses anciens gardiens, Néel et le comte Eudes, ne conspirent à nouveau contre lui.
- 173 Notamment Raoul de Gaël, Raoul le Large ou Hervé fils de Goranton.
- 174 Cartulaire de Saint-Georges de Rennes, no v. Il est accompagné de son frère Ery.
- 175 Op. cit., no xiii.
59Le seigneur de Saint-Sauveur entraîna avec lui certains de ses fidèles, comme probablement Roald fils de Constantin (Roaldus filius Constantini). Parmi les témoins de la restitution de Bazouges, ce personnage suit immédiatement Néel, primant ainsi sur l’évêque de Rennes et les autres personnalités bretonnes173. Lui accordait-on cette place d’honneur en raison de ses liens avec le vicomte ? La présence d’un Constantin174 et même de Roald fils de Constantin175 dans d’autres actes de Saint-Georges de Rennes permettrait d’en douter et de considérer Roald d’origine bretonne. Pourtant, d’étonnantes similitudes onomastiques entre le Cotentin et la Bretagne demeurent troublantes.
- 176 Cartulaire de Saint-Georges de Rennes, no xxi (… illius terram quam filii Constantini ibidem teneb (...)
- 177 Fauroux M., op. cit., no 224, p. 431 :… et quartam partam terre filiorum Constantini, scilicet sex (...)
- 178 Cartulaire de Saint-Georges de Rennes, no xvi, précité.
- 179 Néel vient de l’Irlandais Niall (génitif Néill) adopté par les Normands sous la forme Njall, latin (...)
- 180 Fauroux M., ibidem.
- 181 Il se serait installé à Pleubian, près du port naturel de Port-Béni où il aurait fait souche. Cons (...)
- 182 Cartulaire de Saint-Georges de Rennes, no xiii.
60Les actes du prieuré de Pleubian, dépendant de Saint-Georges de Rennes, conserve le souvenir des « fils de Constantin176 ». Or, un acte de Guillaume de Normandie utilise exactement la même expression, les « fils de Constantin », précisant cette fois le nom de l’un d’eux : Néel fils de Constantin (Nigellus filius Constantini)177. Ce dernier n’apparaît pas à Pleubian mais on y retrouve étrangement un Constantin fils de Néel (Constantinus filius Nigelli)178. La rareté du nom de Néel en Bretagne179 et l’intérêt qu’Eudes porta longtemps à Pleubian ne permettent pas de croire raisonnablement à une coïncidence. Il y a fort à penser que Néel et Roald, fils de Constantin, étaient parents, si ce n’est frères, et liés, au moins par filiolage, aux vicomtes de Cotentin. Néel fils de Constantin serait parti vers l’Apulie en abandonnant ses terres au duc180. Il séjourna peut-être quelques temps en Bretagne dans l’espoir d’un éventuel pardon181, avant d’embarquer définitivement pour l’Italie du Sud. Quant à Roald, il apparut de nouveau auprès d’Eudes et de l’abbesse Adèle, mais lui non plus ne tarda pas à disparaître182.
- 183 Guillot O., Le comte d’Anjou…, op. cit., tome I, p. 80-81.
- 184 Le 4 mai 1057, le fils aîné du comte Eudes, Geoffroy Boterel Ier était auprès du roi, cf. Brunterc (...)
61La présence d’exilés normands en Bretagne révélait le rôle essentiel joué par le comte Eudes dans la partie d’échecs opposant le roi au duc de Normandie. Réduit à se défendre sur son territoire183, Guillaume tenta peut-être de briser le front ennemi en se rapprochant de Conan II. C’est du moins ce que permettent de supposer l’enchaînement des faits. Comme l’a bien décrit Jean-Pierre Brunterc’h, la restitution de Bazouges en 1056/1057 nous montre les comtes Geoffroy Martel et Eudes en guerre contre le duc de Bretagne. Ce dernier s’empara finalement de son oncle dans les quatre premiers mois de 1057184.
- 185 Brunterc’h J.-P., Geoffroy Martel, Conan II…, op. cit., p. 320.
- 186 Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 55.
- 187 Orderic Vital, livre III, p. 116 : Consilio Bertae matris suae se suumque patrimonium fortissimo du (...)
- 188 Brunterc’h J.-P., Geoffroy Martel, Conan II…, op. cit., p. 320.
- 189 Le 15 novembre 1058, Herbert II est mentionné d’un acte de Saint-Vincent du Mans (Cartulaire de Sa (...)
62Pour Henri Ier et Geoffroy Martel, la situation était grave : Conan II avait conduit son prisonnier à Chartres en contournant les armées angevines par la Normandie, ce qui supposait la complicité de Guillaume le Bâtard185. À la cour de Thibaud de Blois, le comte Eudes se retrouvait face à son éternelle rivale, Berthe, revenue d’exil pour savourer sa vengeance186. La comtesse disposait désormais d’une monnaie d’échange qu’elle pouvait utiliser pour rétablir ses deux fils dans leurs droits, quitte pour cela à s’allier avec le duc normand. D’ailleurs, c’est peut-être grâce à elle que Conan II put traverser la Normandie sans encombre jusqu’à Chartres. En effet, selon Orderic Vital, le jeune Herbert II se serait commandé à Guillaume, avec ses biens, sur les conseils de sa mère Berthe187. Bien sûr, le chroniqueur justifiait ainsi la conquête du Maine par le duc en 1063, mais il n’avait pas nécessairement travesti les faits. Guillaume était suffisamment habile pour profiter de la situation. En l’occurrence, Conan II avait bien conscience que la capture de son oncle heurtait Geoffroy Martel de front. Or, ce dernier était d’autant plus redoutable que le comté de Nantes basculait au même moment dans la mouvance angevine188. Le duc de Bretagne se trouvait donc dans l’impérieuse nécessité de trouver des alliés. Guillaume n’aurait-il pas alors permis à Conan II de rejoindre le comte de Blois en échange de l’hommage d’Herbert II pour le Maine189 ?
63La guerre qui se déclencha entre Geoffroy Martel et Thibaud de Blois fut probablement la conséquence directe de l’entrevue de Chartres. Elle servait trop les intérêts de Guillaume le Bâtard pour que le roi la laissât se prolonger au-delà de quelques mois. Le comte d’Anjou ne devait pas être retenu trop longtemps par un conflit qui pouvait à terme le détourner de la Normandie.
- 190 Ibidem. L’écrasement des Francs à Varaville en août 1057 précipita certainement les négociations.
- 191 Brunterc’h J.-P., Geoffroy Martel, Conan II…, op. cit., p. 323.
64En 1058, Geoffroy Martel repartit de nouveau avec son armée en compagnie d’Henri Ier pour lutter contre Guillaume190. Sans doute dès 1059, un accord fut conclu entre le comte d’Anjou et Conan II matérialisé par la restauration de Saint-Melaine de Rennes par les moines de Saint-Florent de Saumur. Le choix du nouvel abbé en révélait la portée politique : Even, alors prieur de l’abbaye angevine, n’était autre que le fils de Raoul le Large. Il s’agissait donc bien « d’un acte de réconciliation politique entérinant un rapprochement de Conan II avec le comte d’Anjou mais aussi avec les tenants du comte Eudes191 ».
- 192 Selon Guillaume de Poitiers, Eudes aurait été emprisonné par son neveu (Guillaume de Poitiers, p. (...)
65Le sort du frère d’Alain III reste en revanche un mystère. Fut-il emprisonné plusieurs années192 ou libéré contre une forte rançon ? Peut-être exilé ? À part une rapide mention dans un acte normand postérieur à la conquête de l’Angleterre, il semble avoir vécu retiré jusqu’à sa mort probable vers 1077-1079, laissant désormais ses fils agir au premier plan.
- 193 Fauroux M., op. cit., no 147, p. 329-330 ; Dondht J., Les relations…, op. cit., p. 4.
- 194 Fauroux M., ibidem. Selon Jean Dondht, s’appuyant sur le nécrologe de Saint-Père de Chartres, Richa (...)
- 195 Ibidem.
- 196 Cartulaire de Marmoutier pour le Vendomois, no cxvii, p. 191 (précité) ; Cartulaire de Marmoutier (...)
- 197 Dondht J., ibidem.
- 198 Fauroux M., op. cit., no 147 : In anno igitur quo finitum esse intestinum bellum dinoscitur, quod i (...)
- 199 Recueil des actes de Philippe Ier, roi de France (1059-1108), M. Prou (éd.), Paris, Académie des I (...)
- 200 La captivité d’Eudes fut peut-être un des sujets évoqués. En effet, Geoffroy Boterel Ier, fils du (...)
66D’une certaine façon, la contribution d’Eudes à la coalition anti-normande continua à porter ses fruits pendant quelques temps. Le hasard voulut que vers 1060, Richard de Reviers soit chargé par Guillaume le Bâtard de la garde du château de Thimert193. Lors du siège de cette forteresse par les armées du roi de France, Richard fut grièvement blessé194. Inquiet pour le salut de son âme, il pria son beau-frère, Néel de Saint-Sauveur, d’agir auprès de l’évêque de Chartres afin qu’il levât l’anathême pesant sur la forteresse195. Le vicomte était effectivement sur les lieux mais parmi les assiégeants196. Ce « face-à-face familial » dût jouer un rôle non négligeable dans les négociations qu’Henri Ier, se sentant malade, tentait d’établir avec Guillaume de Normandie. La mort du roi le 4 août mit probablement fin au conflit. Selon Jean Dondht, les parties n’avaient pas eu vraiment le temps de s’accorder197. Cependant, des donations croisées à Saint-Père de Chartres, de Richard de Reviers, confirmée par Guillaume de Normandie198, d’une part, et celle d’Albert fils de Ribald, confirmée par Philippe Ier199, suggèrent le contraire. Thimert fut ainsi l’occasion de pourparlers entre le roi de France, le duc de Normandie, et les comtes de Flandre, de Chartres, d’Anjou et de Poitou. Il est probable que les discussions dépassèrent le sort de la forteresse et que les grands problèmes du moment furent abordés200.
- 201 De nombreux disgrâciés partirent pour l’Italie du Sud. Néel aurait été d’autant plus enclin à s’y (...)
- 202 Une donation de la comtesse Adèle de Bourgogne, mère de Guy de Brionne, du château du Homme en Cot (...)
- 203 Van Houts E. M. C., L’exil…, op. cit., p. 120.
67Après l’affaire de Thimert, la trace de Néel se perd définitivement. Aurait-il suivi des Richardides en Apulie201 ? Aurait-il rejoint Guy de Brionne en Bourgogne202 ? Ne se serait-il pas établi plus simplement dans l’ouest de la France puisqu’il apparaît auprès du comte Eudes en 1056/1057 et auprès des alliés de celui-ci en 1059 ? Ces différentes hypothèses ne sont évidemment pas inconciliables : l’usage voulait à l’époque que l’on s’exilât d’autant plus loin que le bannissement était peu susceptible de pardon203. Ainsi pourrait-on concevoir que Néel soit tout d’abord resté aux abords de la Normandie, puis, désespérant progressivement d’un éventuel retour, il se serait éloigné de sa patrie, peut-être vers la Bourgogne ou l’Apulie.
La fructueuse alliance normande (1060-1136)
68Les Eudonides tirèrent les leçons de leur défaite contre les ducs de Bretagne et de Normandie. Ils se rapprochèrent progressivement de Guillaume de Normandie sans pour autant attaquer ouvertement le duc de Bretagne. Ce n’est que dans le dernier quart du XIe siècle qu’ils rappelèrent leur droit sur le titre ducal. Entre temps, le lignage avait étendu son influence au-delà de la Manche et allait atteindre son apogée dans le premier tiers du XIIe siècle, sous le principat d’Étienne.
Renversements d’alliance et reprise de la lutte
- 204 Sur vingt-quatre actes conservés de Conan II, huit sont antérieurs à 1047 et treize très probablem (...)
- 205 Op. cit., no 53.
- 206 Brand’Honneur M., Le lignage, point de cristallisation…, ibidem.
- 207 Brand’Honneur M., Manoirs…, p. 151, 266. Argentré-du-Plessis, Ille-et-Vilaine, Arr. Rennes, Cant. A (...)
- 208 Taillis, dans le canton de Vitré Ouest.
- 209 Tonnerre N.-Y., dans Chédeville A., Tonnerre N.-Y., La Bretagne féodale XIe-XIIIe siècle, Rennes, É (...)
- 210 Évidemment, cette notice pourrait ne donner qu’une vision partielle de la cour ducale. Rapportant (...)
69La mort d’Henri Ier et de Geoffroy Martel en 1060 avait décapité la coalition franco-angevine. En Bretagne, Conan II l’avait emporté sur son oncle et reprenait le duché peu à peu en main204. Lors de son intronisation à Rennes, le jeune duc était encore loin de réunir autour de lui l’unanimité de la noblesse205. Ses plus solides partisans étaient établis autour de Vitré. Robert Ier de Vitré figurait en bonne place, immédiatement suivi de Goranton et de son père Hervé206 (Goranton cum Herveo patre suo). Ils étaient accompagnés de personnages d’un rang plus modeste : Rivallon de la Rouvraie (Rivallonus de Roureia)207, Ribald du Taillis (Rivaldus de Tasleia)208, ou encore Normand du Feu (Normandus de Fou), trop souvent rattaché au lignage vicomtal du Faou209. Rennes n’était représentée que par son vicomte, Josselin, et son évêque, Main. En définitive, seul l’abbé de Redon était étranger au Rennais210.
- 211 Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 53 : Roberto Vitreiensium custode.
- 212 Brand’Honneur M., Manoirs…, op. cit., p. 104.
- 213 Guillotel H., op. cit., no 64 : Robertus princeps de Vitre.
70La fidélité de Robert Ier de Vitré était loin d’être gratuite. Établi à Marcillé, il n’était encore que le gardien de Vitré lors de l’avènement de Conan II211. Cette forteresse ne devait pas manquer d’attraits puisqu’en quelques années, Robert y déplaça ses principales activités aux dépens de Marcillé212. En 1062-1066 au plus tard, il en était devenu le princeps213.
- 214 Guillot O., op. cit., p. 337-338 ; Brunterc’h J.-P., Geoffroy Martel, Conan II…, op. cit., p. 315.
71En 1048, Conan II s’était fait ouvrir les portes de Craon par Suhard le Jeune, qui tenait pourtant cette place forte de Geoffroy Martel. Or, la première épouse de Robert de Marcillé, Berthe, n’était autre que la nièce et la seule héritière légitime de Suhard de Craon214. Dès lors, ne peut-on pas supposer que Robert favorisa la fuite de Conan II en 1047 ou du moins son accueil à Craon l’anné suivante ?
- 215 Le grand-père de Robert Ier, Rivallon vicarius, intervient à la cour ducale dès le premier quart d (...)
- 216 Sur les origines de Renaud le Bourguignon, cf. notamment W. Scott Jesse, The family of Robert The (...)
- 217 La maison de Craon (1050-1480), étude historique accompagnée du cartulaire de Craon, Bertrand de B (...)
- 218 Op. cit., p. 40-41, no 34 : Charte de Renaud donnée au profit de Saint-Aubin.
- 219 En supposant l’âge de tester vers quatorze ans.
- 220 Suhard le Jeune succédant à son frère aîné en 1028 au plus tard, la fille de ce dernier était néce (...)
72Malheureusement, la date du mariage de Robert et de Berthe n’est pas connue, mais certains indices le placeraient volontiers avant 1047. D’une part, la succession des générations chez les Vitré permet à Robert Ier d’être en âge de se marier avant 1040215. D’autre part, Innoguent, fille unique de Robert et de Berthe, figurait avec son époux, Renaud le Bourguignon216, dès le 11 mars 1070, dans un don à l’abbaye de la Sainte-Trinité de Vendôme217. Leur fils aîné, Maurice, était en âge de tester dès octobre 1072218, ce qui permettrait de placer l’union de Renaud et d’Innoguent à la fin des années 1050219. Innoguent serait donc née vers 1045 au plus tard, la naissance de sa mère, Berthe de Craon remontant aux années 1020-1030, probablement avant 1028220. Selon cette hypothèse, Robert Ier et Berthe de Craon se seraient mariés à vingt vingt-cinq ans pour l’un, quinze vingt pour l’autre, ce qui est conforme aux usages de l’époque.
- 221 Brunterc’h J.-P., ibidem.
73On se souvient que les Goranton Hervé avaient soutenu le comte Eudes au point de l’accompagner en Anjou peu avant sa capture. Établi à Vitré, ce lignage eut à souffrir de l’installation de Robert Ier qui se fit à ses dépens. Perdant peu à peu de leur assise sur Vitré, les Goranton durent se recentrer sur Gahard221, où Raoul le Large, autre allié d’Eudes, avait également des possessions.
- 222 Geoffroy le Barbu et son frère Foulque le Réchin étaient les fils d’Ermengarde, sœur de Geoffroy M (...)
74À l’extérieur du duché, Conan II n’avait plus à s’inquiéter de l’Anjou où le faible Geoffroy le Barbu avait succédé à son oncle222. Quant au roi de France, il n’était qu’un enfant de huit ans laissé à la garde du comte de Flandre, beau-père de Guillaume de Normandie. Ce dernier sortait renforcé de ces longues années de guerre. Resté invaincu, rien ne semblait désormais s’opposer à son ambition. La délicate succession mancelle lui donna bientôt l’occasion de s’étendre vers le sud.
- 223 Cf. Guillot O., Le comte d’Anjou…, op. cit., tome II, C 231.
- 224 Geoffroy Martel conserva le Maine dans sa main jusqu’à sa mort. Selon Guillaume de Poitiers, le co (...)
- 225 Neveux F., La Normandie des ducs aux rois…, op. cit., p. 137-138 ; B. Lemesle, La société aristocra (...)
- 226 Guillaume la fit venir à grand frais des régions teutoniques où elle avait dû fuir avec sa mère et (...)
- 227 Ibidem.
75À l’instigation de leur mère Berthe, le comte du Maine et le duc de Bretagne avaient joué la carte normande contre Geoffroy Martel. Rétabli dans ses droits après la mort de ce dernier, Herbert II avait reconnu l’autorité de Geoffroy le Barbu223 ; mais le 9 mars 1062, le demi-frère de Conan II disparut à son tour, sans héritier direct. Guillaume le Bâtard argua de l’hommage qu’on lui aurait prêté pour revendiquer le comté224. Il lui restait toutefois à le conquérir. Face à lui se dressait Gaultier de Mantes, successeur du comte défunt, notamment soutenu par le comte d’Anjou, le vicomte du Mans, Hubert de Sainte-Suzanne, et Geoffroy de Mayenne. Le duc de Normandie pénétra dans le Maine en 1063, s’emparant en quelques mois du Mans puis du château de Mayenne225. Pour légitimer sa conquête, le duc de Normandie fiança son fils aîné Robert à Marguerite, sœur d’Herbert II226, et le fit prêter hommage à Geoffroy le Barbu. La mort prématurée de la jeune fille empêcha la consommation de ce mariage, Guillaume n’en garda pas moins le contrôle du Maine au nom de son fils227.
- 228 Brand’Honneur M., Manoirs…, op. cit., p. 114.
- 229 L’origine de ce conflit reste mystérieuse. Il pourrait s’agir de la construction par Rivallon Ier (...)
- 230 Brand’Honneur M., Manoirs…, op. cit., p. 115.
76Depuis longtemps, l’influence normande s’était infiltrée au nord-est de la Bretagne. Vers 1050-1055, Main II de Fougères avait déjà basculé du côté normand mais sa mort prématurée avait atténué la portée de cette félonie228. Cette fois, Guillaume avait attiré à lui le seigneur de Dol-Combour. Rivallon Ier, qui apparaît auprès du Bâtard peu après la conquête du Maine, entra en conflit avec Conan II l’année suivante. Ce dernier vint assiéger son vassal229, ce qui donna à Guillaume l’occasion d’intervenir. À l’annonce de l’arrivée des armées normandes, le duc de Bretagne se serait prudemment réfugié à Rennes. Le Bâtard vint peut-être défier Conan au pied des remparts mais ne s’empara pas de la cité230.
- 231 Ibidem. ; Guillaume de Poitiers, 74-77 : At excedenti iam Britanniae limitem repent indicatur Gauf (...)
77Selon l’unique témoignage de la Tapisserie de Bayeux, Conan II aurait capitulé à Dinan : ainsi le voit-on tendre les clefs de la place au moyen d’une perche. Les historiens ont souvent mis en doute cette victoire que Guillaume de Poitiers n’évoque pas. Pour ce dernier, le Bâtard serait retourné en Normandie faute de vivres et d’adversaire, mais il est probable que la jonction des armées de Conan II et de Geoffroy le Barbu, dont l’auteur fait maladroitement mention, ne fut pas étrangère à ce replis précipité231.
- 232 Une charte de Renaud de Château-Gontier précise qu’il fut libéré en février 1064 après sa capture (...)
- 233 Guillot O., op. cit., tome II, C 279, Livre noir de Saint-Florent de Saumur, BNF, n. a. lat. 1930, (...)
- 234 Ce rapprochement se négocia peut-être autour de la libération de Renaud de Château-Gontier en févr (...)
- 235 Guillot O., Le comte d’Anjou…, op. cit., tome II, no C 252. Il est intéressant de relever qu’au mêm (...)
- 236 On ne sait pour quel motif Hoël et Conan II s’étaient opposés.
- 237 Depuis plusieurs années, Geoffroy le Barbu s’opposait à son frère cadet Foulque le Réchin. En 1067 (...)
- 238 Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 58.
78Ce rapprochement avait de quoi étonner. Pendant des années, Conan II avait affronté Geoffroy Martel et encore en 1063, il avait profité du conflit manceau pour pénétrer en Anjou232. De même, Geoffroy le Barbu avait entériné vis-à-vis de la Bretagne les options politiques de son prédécesseur comme le prouve la présence à Saumur de Geoffroy Boterel Ier, fils aîné du comte Eudes, peu après la mort de Geoffroy Martel233. Par la suite, la disparition soudaine des fils du comte Eudes des actes angevins signalerait ainsi la réconciliation de Geoffroy le Barbu avec Conan II234. Cette alliance ne fut sans doute que momentanée puisque Geoffroy Boterel Ier témoignait de nouveau à Angers le 2 août 1066235. Pris en étau entre les possessions des Eudonides au nord et celles de Geoffroy le Barbu au sud, Conan II se réconcilia avec son beau-frère Hoël de Cornouaille236 et assiégea Château-Gontier à la faveur des dissensions qui secouaient alors l’Anjou237. Il y mourut le 11 décembre 1066238.
- 239 Contra., Keats-Rohan K. S. B., William I and the breton contingent …, op. cit., p. 166.
79Apparemment, la branche cadette des comtes de Rennes restait irrémédiablement hostile à la branche aînée. Choisit-elle pour autant le camp adverse dès 1064, soutenant Rivallon Ier de Dol-Combour contre le duc de Bretagne ? Si cela avait été le cas, Guillaume de Normandie n’aurait probablement pas battu si vite en retraite. À l’inverse, aucune source ne permet de supposer que les Comtes de Bretagne soutinrent exceptionnellement Conan II contre l’ennemi de la patria239.
- 240 Everard J. A., The Foundation of an Alien Priory at Linton, Cambridgeshire, Proceedings of the Camb (...)
- 241 Ibidem. : Testes qui hoc viderunt et interfuerunt his sunt Eudo comes pater Alani Ruffi qui tunc N (...)
- 242 Contrairement à certains de ses fils, Eudes n’apparaît pas dans les actes de Guillaume le Conquéra (...)
- 243 Esch A., Chance et hasard de transmission. Le problème de la représentativité et de la déformation (...)
80Depuis sa capture en 1057, Eudes n’avait pas reparu. Était-il toujours prisonnier de son neveu, en exil ou retiré sur ses terres ? Une notice rapportant la fondation de Linton par Alain le Roux, peu après la conquête de 1066, permet de lever un coin du voile : « au temps de Guillaume, le très grand roi d’Angleterre, Alain dit le Roux fils d’Eudes comte des Bretons » céda aux moines de Saint-Jacut l’église de Linton en Angleterre240. Or, était notamment présent « le comte Eudes père d’Alain le Roux qui alors revenait de Normandie avec beaucoup de nobles et avait obtenu l’hospitalité de l’abbaye241 ». Ainsi, le frère d’Alain III n’avait-il pas fini sa vie en captivité malgré le silence des sources. Il avait survécu à son neveu et s’était rapproché de Guillaume le Conquérant, si ce n’est personnellement, du moins par l’intermédiaire de ses fils installés outre-Manche242. Bien qu’il faille toujours se méfier de la transmission irrégulière des sources243, Eudes semblait avoir opté pour une politique plus prudente : il utilisait adroitement sa nombreuse progéniture pour étendre l’influence de son lignage.
- 244 Dom Morice, Preuves, tome I, col. 427-428 : Bertha comitissa mater ejus & Gauffridus Nothus ejusdem (...)
81À la mort de Conan II, le comté de Rennes fut confié à Geoffroy Grénonat, fils naturel d’Alain III, à l’instigation probable de la comtesse Berthe244, mère du duc défunt.
- 245 La transmission du titre ducal par les femmes sera étudiée en deuxième partie.
- 246 Cf. p. 167 et suiv.
- 247 Tel n’était pas le cas du fils aîné d’Hoël, Alain, futur Alain IV Fergent, qui pouvait rassembler (...)
- 248 Revenant de Rome, Hoël avait fait le vœu d’enrichir les biens de saint Corentin s’il triomphait de (...)
- 249 Une donation d’Hoël à Saint-Aubin d’Angers est faite lors du siège mis devant Ancenis, aux confins (...)
82La veuve d’Alain III montrait une fois encore son grand sens politique qui n’avait d’égal que l’hostilité qu’elle nourrissait de longue date à l’égard du comte Eudes. Berceau de la dynastie ducale, le Rennais avait été l’enjeu central de la guerre opposant Eudes et Conan II. Ce dernier mort sans descendance légitime, le titre ducal passa à Hoël de Cornouaille, fils d’Alain Canhiart et mari d’Havoise, sœur de Conan II245 ; mais à une époque où le pouvoir se transmettait par le sang, généralement de mâle en mâle246, Hoël ne disposait pas de l’autorité suffisante pour s’imposer dans le Rennais247. Fait plus grave encore, il voyait son pouvoir également contesté en Cornouaille248 si ce n’est en Nantais249. Quant à Eudes, il n’était pas homme à renoncer à ses prétentions mais le souvenir de la guerre civile était sans doute trop récent pour que la noblesse rennaise, qui s’était rachetée une virginité après la victoire de Conan II, l’accueille unanimement
- 250 Rappelons qu’en Bretagne, le titre ducal s’était toujours transmis par successions légitimes.
83Le recours à Geoffroy Grénonat permettait l’établissement provisoire d’un statu quo. Fils d’Alain III et porteur d’un nom qui l’appelait à un rôle politique majeur, Geoffroy Grénonat pouvait prétendre à la direction du comté de Rennes à titre viager, sa bâtardise l’empêchant de concurrencer les prétentions d’Havoise sur le titre ducal250. Berthe conservait ainsi une forte influence dans le Rennais, préservait les intérêts de sa fille et barrait une éventuelle progression des Eudonides vers le sud. En l’occurrence, ces derniers devaient être davantage préoccuper par la conquête de l’Angleterre à laquelle participaient plusieurs membres du lignage. Il n’était sans doute pas question pour eux d’ouvrir un second front en Bretagne qui compromettrait cette délicate mais fructueuse expédition. Les difficultés d’Hoël à contenir sa noblesse et l’installation d’un bâtard à la tête du Rennais leur laissaient opportunément les mains libres sans hypothéquer l’avenir.
- 251 Guillotel H., op. cit., no 76 : Ego Berta comitissa, Alani Redonensis ducis uxor, pro redemptione a (...)
- 252 Cf. Guillotel H., Les actes…, op. cit., p. xxxxxxxxxxxx.
- 253 Guillotel H., op. cit., no 76 : Vitalis et Gualterius Carnotenses, familiares comitisse Haduis nept (...)
84Après la mort de sa fille Havoise en 1072, Berthe pourrait avoir souhaité obtenir des Eudonides quelques garanties sur le maintien du statu quo en leur offrant une alliance avantageuse. En 1075, la veuve d’Alain III se rendit à Nantes et céda aux moines de Sainte-Croix de Quimperlé l’église Notre-Dame de Nantes, que lui avaient jadis donnée son gendre Hoël et sa fille, peut-être à l’occasion de leur mariage251. Dans l’entourage de la comtesse se détachaient deux personnages originaires de Chartres, Vitalis et Gaultier, des « familiers de la comtesse Havoise ». Cette dernière, considérée jusqu’à présent comme une petite-fille de Berthe252, pourrait être en fait sa nièce253.
- 254 Bur M., La formation du comté de Champagne…, op. cit., p. 194-195.
- 255 Op. cit., p. 200, note 24.
- 256 Op. cit., p. 199, 208-211.
85Fille d’Eudes II, la veuve d’Alain III n’avait que deux frères : Thibaud III comte de Blois et Étienne comte de Troyes et de Meaux254. À sa mort, entre 1044 et 1048255, ce dernier semble n’avoir laissé qu’un jeune fils, Eudes III, futur comte d’Aumale et d’Holderness, dont Thibaud III assura la garde jusqu’au début des années 1060256. Havoise pourrait être une sœur d’Eudes III mais l’origine chartraine de ses familiers la désigne davantage comme une fille du comte de Blois.
- 257 Rappelons que Hugues IV avait lui-même épousé la sœur de Thibaud III, Berthe, veuve d’Alain III de (...)
- 258 Le fils de Thibaud III fut baptisé du nom d’Henri. Ce n’est que plus tard qu’il prit le cognomen d (...)
- 259 Raoul IV était fils de Raoul III de Valois et d’Alix de Breteuil, neveu de l’évêque Foulques d’Ami (...)
86Thibaud III avait épousé en premières noces, Gersent, sœur d’Hugues IV du Maine257 et mère du futur Étienne-Henri258. L’ayant répudiée en 1049 au plus tard, il se serait marié vers 1058/1060 avec Adèle, fille de Raoul IV de Valois et d’Adélaïde de Bar-sur-Aube259. Quel qu’ait été le lit dont Havoise était issue, sa présence en Bretagne restait à expliquer.
87À notre connaissance, les sources bretonnes mentionnent trois comtesses Havoise au XIe siècle : Havoise de Normandie, mère d’Alain III et d’Eudes ; Havoise « de Rennes », fille d’Alain III et de Berthe de Blois, épouse d’Hoël de Cornouaille ; enfin l’épouse d’Étienne de Bretagne, dernier fils légitime du comte Eudes. Seule cette dernière était encore en vie en 1075, mais l’historiographie régionaliste a toujours voulu voir en elle l’héritière du « comté de Guingamp » qu’elle aurait apporté en dot à son mari, supposé « comte de Penthièvre ». Un réexamen des sources ne nous autorise pas à confirmer cette hypothèse. En revanche, certains indices, certes ténus, permettent au moins de supposer que la belle-fille du comte Eudes était bien la nièce de la comtesse Berthe, fille de Thibaud III de Blois et d’Adèle de Valois.
- 260 Gallia Christiana, tome VIII, Paris, 1774, col. 1390 : Biennio post Radulfus episcopus Trecorensis (...)
- 261 Dufief A., Les Cisterciens en Bretagne, XIIe-XIIIe siècles, Rennes, PUR, 1997, p. 70-73.
88Cette alliance pourrait expliquer tout d’abord les bons rapports que les Comtes de Bretagne entretinrent avec les abbayes bléso-chârtraines. Ainsi, en 1134, l’église Sainte-Croix de Guingamp fut-elle concédée à Notre-Dame de Blois pour y établir un abbé et douze moines dépendants de l’abbaye de Bourg-Moyen260. De même, l’Aumône, surnommée le « Petit-Citeaux », aurait été à l’origine de l’implantation des Cisterciens en Bretagne, par l’intermédiaire de Bégard, fondée par Étienne ou tout au moins par ses fils, dans la première moitié du XIIe siècle261.
89Autre indice : le dernier fils d’Étienne reçut le nom d’Henri, inconnu jusqu’alors dans le capital onomastique des Eudonides. Il devait donc s’agir d’une influence maternelle, ce qui est habituel pour un cadet. Or, le fils de Thibaud III, né de son premier mariage, fut justement baptisé Henri.
- 262 Barthélémy J. B. A. A., Nouveau manuel complet de Numismatique du Moyen Âge et moderne, Paris, Libr (...)
- 263 Jézéquel Y., Les monnaies des Comtes et Ducs de Bretagne, op. cit., p. 15-16.
90Enfin, remarquons l’évidente parenté des pièces dites « à tête guingampaise » frappées sous le principat d’Étienne avec celles dites « à tête chinonaises » courantes en Blésois : même profil de barbare tourné vers la droite avec une étoile ou une croix devant la bouche262. Ce type anépigraphe à la tête n’avait rien de commun avec ceux adoptés par Eudes, Conan II ou Hoël263 : il s’imposa sous Étienne et survécut même à ce dernier puisque ses fils et petits-fils l’utilisèrent encore.
- 264 Âgé d’au moins 67 ans en 1075, Eudes était soit déjà mort soit trop affaibli pour assurer son rôle (...)
- 265 Cf. p. 105.
- 266 La fuite de Raoul de Gaël en Bretagne suite à sa participation à la révolte des earls en 1075 cont (...)
- 267 L’importance de l’enjeu suggère qu’Havoise était bien issue du second mariage de Thibaud III de Bl (...)
91Le mariage d’Havoise et du comte Étienne de Bretagne dut être célébré peu avant la donation de Notre-Dame de Nantes à Sainte-Croix de Quimperlé à laquelle les familiers d’Havoise assistèrent seuls. Ils avaient probablement escorté la jeune femme jusque sur les terres de son futur époux. Leur mission accomplie, ils regagnaient Chartres. Leur présence auprès de Berthe révélait suffisamment le rôle essentiel qu’avait dû jouer la comtesse. Son grand âge et la disparition de sa fille Havoise, mariée à Hoël de Cornouaille, avaient sans doute incité Berthe à préserver autant que possible les intérêts de ses petits-enfants. Eudes ne devait plus être en âge de partir en campagne264, mais ses fils avaient prouvé leur vaillance lors de la conquête anglaise. Hoël ne pouvait guère espérer leur tenir tête sans de puissants alliés265. Toutefois, les affaires anglaises et bretonnes étaient trop imbriquées pour qu’une crise d’un côté de la Manche n’ait pas de dangereuses répercutions de l’autre côté266. La situation en Angleterre était encore trop instable pour que les Eudonides remettent en cause l’équilibre politique de la Bretagne dont ils avaient tiré profit sans renoncer à leurs prétentions au titre ducal. Consciente de la faiblesse de la dynastie ducale de Cornouaille, Berthe plaçait ses espoirs dans cette « paix armée » qu’elle avait réussi à instaurer une dizaine d’années plus tôt mais que sa fin prochaine risquait de compromettre267.
- 268 Guillotel H., Bretagne et papauté…, op. cit., p. 281.
92Depuis la mort de Conan II, Geoffroy Grénonat s’était maintenu à la tête du comté de Rennes sans apparente contestation, lorsqu’en 1076, il dut affronter Guillaume le Bâtard, devenu le Conquérant. Obéissant aux injonctions de Grégoire VII, la population et le clergé dolois avaient chassé l’archevêque simoniaque Juhel, qui avait gagné le Mont-Saint-Michel, d’où il menait de fréquentes attaques contre son ancienne cité. Les Dolois lui désignèrent comme successeur le fils de Rivallon Ier de Dol-Combour, Gelduin, qu’ils envoyèrent à Rome pour être sacré : Grégoire VII jugea le candidat trop jeune et lui préféra l’abbé de Saint-Melaine de Rennes, Even, qui faisait partie de la délégation bretonne. Pendant ce temps, le duc de Normandie prenait parti pour Juhel : il assiégea Dol en septembre 1076 afin d’empêcher le nouvel archevêque de prendre possession du siège268. Les défenseurs de la cité avaient reçu l’appui de milites angevins probablement envoyés par l’abbé de Saint-Florent de Saumur qui n’était autre que le frère aîné de Gelduin et l’ancien supérieur d’Even. Dol résista jusqu’à l’arrivée des armées du roi de France, à l’annonce de laquelle Guillaume abandonna le siège précipitamment.
- 269 Les fils d’Eudes établis en Angleterre auraient pu suivre Guillaume le Conquérant à Dol. Ce pourra (...)
- 270 Dans une lettre non-datée, mais indéniablement postérieure au 27 septembre 1076, Grégoire VII exho (...)
- 271 Suite aux injonctions de Léon IX dans sa lettre de 1050, Eudes plaça vers 1053-1054 sur le siège d (...)
93L’échec normand suggère que Guillaume le Conquérant n’avait pas obtenu le soutien des Comtes de Bretagne, comme cela aurait pu paraître naturel, compte tenu de leur participation à la conquête de l’Angleterre. Les Eudonides semblent avoir affiché lors de ce conflit une prudente réserve269. Leur position était assez délicate : affronter le duc de Normandie pouvait compromettre leurs possessions anglaises mais le soutenir signifiait favoriser la simonie, fermement condamnée par le pape270. Dès 1050, le comte Eudes avait manifesté sa volonté d’obéir, autant que possible, aux ordres pontificaux271. De plus, une participation au siège de Dol aurait condamné l’équilibre sur lequel reposait la coexistence des trois cours comtales bretonnes.
- 272 Dom Morice, Mémoires, tome I, col. 102 : MLXXVI. Hoel faciens bella apud Comitem Gaufridum cognomen (...)
- 273 La tournure de la phrase donne le rôle principal à Hoël et non à Guillaume le Conquérant, comme le (...)
- 274 Avec la prudence qui le caractérise, Hubert Guillotel avait préféré ne pas utiliser ce passage pou (...)
94Tel n’aurait pas été le choix du comte de Cornouaille. En effet, les Chroniques Annaulx relatent qu’en 1076, Hoël, faisant la guerre à Geoffroy Grénonat, assiégea en vain le château de Dol pendant quarante jours, avec l’aide de Guillaume de Normandie272. Bien que cette mention soit suspecte273, le fait qu’elle rapporte pourrait être exact274. Hoël se serait ainsi allié à Guillaume le Conquérant aux dépens du comte de Rennes. S’érigeant en légitime successeur de Conan II, il entendait probablement chasser un bâtard du berceau de la famille ducale. Quant au duc de Normandie, il espérait sans doute assouvir ses prétentions territoriales qui avaient échoué en 1064.
- 275 Dans la formule de corroboration d’un diplôme accordé à l’abbaye de Montierneuf, le roi de France (...)
- 276 The Anglo-Saxon Chronicle. A Revised Translation, D. Whitelock with D. C. Douglas and S. I. Tucker(...)
- 277 Chronicon Kemperlegiense, Étienne Baluze (éd.), op. cit., p. 265 : MLXXVII. Hoël a Vicecomite Eudo (...)
- 278 Guillotel H., De la vicomté de Rennes à la vicomté…, op. cit., p. 14-15.
- 279 Il n’apparaît jamais auprès de Geoffroy Boterel Ier.
95Le roi Philippe Ier pouvait légitimement s’inquiéter de l’alliance, même circonstancielle, du roi d’Angleterre et du duc de Bretagne : il considérait d’ailleurs que l’attaque de Dol était en fait dirigée contre lui275. Le soutien du duc d’Aquitaine permit au roi de surprendre les assiégeants à revers et de les mettre en fuite. Guillaume put rapidement rejoindre la Normandie, abandonnant toutefois « aussi bien des hommes que des chevaux et un trésor incalculable276 ». Hoël réussit apparemment à échapper au roi de France mais l’épisode de Dol dut ébranler sa légitimité. Ainsi fut-il capturé l’année suivante par le vicomte de Rennes Eudes277. Depuis que Geoffroy Grénonat dirigeait le Rennais, le fils du vicomte Josselin s’était retiré sur ses terres familiales en Porhoët278. De même se tenait-il éloigné des comtes de Bretagne279. En conséquence, la capture d’Hoël n’était peut-être guidée que par l’appât du gain.
- 280 Livre blanc de Saint Florent de Saumur, fol. lxxv, lxxvi : Hoc ipsum etiam comes goffredus filius (...)
- 281 À au moins 70 ans, Eudes n’était peut-être pas encore mort mais sans doute très affaibli. On fixe (...)
96Concomitamment, Geoffroy Boterel Ier et Geoffroy Grénonat se rencontrèrent à Plouasne, en marche de leurs domaines respectifs280. Malgré sa victoire sur Hoël et le duc de Normandie, le comte de Rennes ne tenait sans doute pas à prolonger cette guerre. Il devait espérer rétablir la coexistence des trois cours princières de Bretagne. Le comte de Cornouaille n’était probablement pas en état de repartir immédiatement en campagne. En revanche, les Eudonides restaient tout aussi redoutables. Ce colloquium permettait de s’assurer de leurs intentions, essentiellement de celles de Geoffroy Boterel Ier qui désormais semblait s’afficher en chef du lignage281.
- 282 Caspar E., Das Register Gregors VII, Berlin, 1920-1923, 2 vol., V, 23, p. 387-388 : Gregorius episc (...)
- 283 Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 80.
- 284 Chronicon Kemperlegiense, op. cit., p. 266 : MLXXXIV. Hoël Comes moritur Idibus April. Gauffridus (...)
- 285 Guillotel H., op. cit., no 102 : Concedo etiam monachabus hujus loci consulatum meum de Johi quantu (...)
97Ces démarches diplomatiques portèrent les fruits escomptés, comme le prouve une lettre de Grégoire VII, datant du 22 mai de l’année suivante, adressée aux « nobles comtes de Bretagne », Hoël, Geoffroy de Rennes et Geoffroy fils d’Eudes282. Cette trêve semble s’être prolongée jusqu’à la mort d’Hoël le 13 avril 1084283. Son fils et successeur, Alain IV Fergent, voulut à son tour prendre le contrôle du Rennais. Il exigea ainsi de Geoffroy Grénonat que les portes de Rennes lui soient ouvertes. Ayant essuyé un refus, le duc s’empara de la ville et emprisonna son oncle qui s’éteignit, peu après, le 25 octobre 1084284. Le sang des comtes de Rennes coulait dans les veines du jeune duc285. Fils naturel d’Alain III, Geoffroy Grénonat avait pu s’imposer aux dépens d’Hoël, mais sa naissance le condamnait tôt ou tard à céder le pas devant le rejeton d’une union légitime.
- 286 Quaghebeur J., La Cornouaille…, op. cit., p. 299, note 165.
98Un tel argument ne pouvait évidemment pas être invoqué contre les fils d’Eudes dont le lignage contrôlait héréditairement le littoral nord depuis une cinquantaine d’années. À bien y réfléchir, les Eudonides pouvaient tout autant revendiquer la suprématie sur le Rennais que le fils d’Hoël qui n’avait acquis ses droits que par les femmes. D’ailleurs, Geoffroy Boterel Ier donna à son fils le nom de Conan, ce qui révélait ses intentions de préserver les droits de son lignage sur le titre ducal. Pour l’heure, tout équilibre politique étant désormais rompu, le fils aîné du comte Eudes entendait profiter du grand âge de Berthe286, de la disparition d’Hoël et de l’emprisonnement de Geoffroy Grénonat pour prendre le contrôle de Dol.
- 287 La présence de l’abbé de Marmoutier Bernard suppose que ce dernier a succédé à Barthélémy, inhumé (...)
- 288 Anciens évêchés, tome IV, chap. v, no i : juxta Lambalam terram ad burgum faciendum, et ad ecclesi (...)
- 289 Arch. Dépt. Maine-et-Loire H 3713 : Livre blanc de Saint-Florent de Saumur, fol. 76 : Hamo vicecom (...)
- 290 Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 67 : Vuillelmus filius Urfoen ; Anciens Evêchés, tome IV, ch (...)
- 291 Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 66 : Roaldus, Aymo et Herveus filii ejus ; Livre blanc de Sa (...)
- 292 Livre blanc de Saint-Florent de Saumur, fol. 75 (Hugo Taons), fol. 76 (Hugo cognomento Taon), fol. (...)
- 293 Livre blanc de Saint-Florent de Saumur, fol. 75 (Herveus butellarius), fol. 76 (Herveus butillariu (...)
- 294 Livre blanc de Saint-Florent de Saumur, fol. 75 (Hamo filius Eveni), fol. 77 (Hamo filius Eveni), (...)
- 295 Livre blanc de Saint-Florent de Saumur, fol. 77 : Goffredus cantor ; Anciens Evêchés, tome IV, cha (...)
- 296 Livre blanc de Saint-Florent de Saumur, fol. 77 (Guihomarus) ; Les Anciens évêchés, op. cit., tome (...)
- 297 Anciens évêchés, tome IV, chap. v, ii.
99En 1084, entre le 24 février et le 30 mars287, Geoffroy Boterel Ier cédait à l’abbaye de Marmoutier une terre près de Lamballe pour y construire un bourg, une église et les bâtiments des moines288. De nombreux fidèles s’étaient déplacés pour l’occasion, pour la plupart de la région de Dol-Combour : le vicomte d’Alet Hammon289, Guillaume fils d’Urfoen290, Hammon fils de Roald291, Hugues Taons292, Hervé le Bouteiller (probablement bouteiller de l’archevêque de Dol)293, Hammon fils d’Even294 ou encore Geoffroy295 et Guihomar296, deux chanoines du chapitre cathédrale de Dol. Une autre charte notice, probablement de la même époque bien que non datée, présente justement le fils aîné du comte Eudes recevant très officiellement l’abbé de Marmoutier dans la forteresse de Dol297.
- 298 Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 91 : Donation à Ste Croix de Quimperlé de sept villas des Cl (...)
- 299 Livre blanc de Saint Florent de Saumur, fol. 88 vo-89 : Quod factum est Doli in platea iuxta eccle (...)
- 300 Ibidem. : Comes Goffredus. Guillelmus filius urfoeni. Hamo filius evani. Escaridus vicarius. Gaufr (...)
- 301 Guillotel H., op. cit., no 89 : Hac itaque sperande salutis, Alanus, cognomento Fergandus, comes Br (...)
- 302 Livre blanc de Saint Florent de Saumur, fol. 86 vo : Anno ab incarnatione domini M. LXXX. VI. – co (...)
100Le contrôle de ce castrum était au cœur du conflit opposant alors Alain IV Fergent et Geoffroy Boterel Ier298. Le 6 janvier 1087, devant la cathédrale Saint-Samson299, l’aîné des Eudonides se portait garant d’un accord passé entre Geoffroy fils d’Asketil et Saint-Florent de Saumur300. Or, le 14 juillet 1086, Alain IV Fergent avait cédé à ce monastère l’église de la Sainte-Trinité de Dol, en présence de Giro fils d’Asketil de Châteaugiron301. Quelques mois plus tard, le 8 décembre 1086, ce dernier avait suivi l’exemple de son seigneur, abandonnant aux moines des biens à Pleine-Fougères302. Il ne s’agissait là que de revendications inutiles. En effet, ces donations avaient été passées depuis Nantes et Châteaugiron, bien loin du Dolois que Geoffroy Boterel Ier tenait toujours fermement au début 1087.
- 303 Guillotel H., op. cit., no 43 : $. Anschitilli filii Hugonis.
- 304 Op. cit., no 45 ; Brand’Honneur M., Manoirs…, op. cit., p. 100.
- 305 Guillotel H., op. cit., no 45, 54, 56, 89, 102 ; Cartulaire de Saint-Georges de Rennes, no 39, 45. (...)
- 306 Livre blanc de Saint-Florent de Saumur, fol. 86 vo : Anno ab incarnatione domini M. LXXX. VI. – co (...)
- 307 Guillotel H., op. cit., no 109 : […] ita prossus Deo et beato Martino Majoris Monasterii et nobis, (...)
- 308 BNF Ms. lat. 5441, t. III, p. 236 : (Donation à Marmoutier par Yves fils d’Urvoy de la chapelle Sa (...)
- 309 Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 109 ; Anciens Evêchés…, op. cit., tome IV, chap. viii, iii.
- 310 Il apparaît semble-t-il pour la dernière fois dans la confirmation de Saint-Malo de Dinan à Marmou (...)
101La présence du seigneur de Châteaugiron auprès d’Alain IV n’avait rien d’étonnant. En effet, ce lignage appartenait à la militia des comtes de Rennes depuis la première moitié du XIe siècle. Le fondateur de la famille devait être cet Asketil fils d’Hugues apparaissant auprès d’Alain III vers 1034/1040303. Son fils, Giro fils d’Asketil lui succéda au plus tard en 1040304, et demeura proche de l’autorité ducale pendant plus d’un demi-siècle305. Devenu moine de Marmoutier entre 1087306 et 1104-1107307 (peut-être 1095308), il usa probablement de son influence en Bretagne pour susciter des donations au profit de l’abbaye tourangelle309. Il dut mourir vers 1108310, certainement à plus de 75 ans.
- 311 Brand’Honneur M., Manoirs…, op. cit., p. 126.
- 312 Guillotel H., Des vicomtes d’Alet aux vicomtes de Poudouvre, op. cit. De même, Judith et Rivallon a (...)
102Asketil avait eu un autre fils qui ne suivit pas les options politiques de son frère Giro : possessionné en Dolois, Geoffroy fils d’Asketil s’était naturellement rallié à Geoffroy Boterel Ier après la mort de Geoffroy Grénonat. Cette installation doloise devait être liée au mariage de Rivallon Ier de Dol-Combour avec Aremburge du Puiset, fille de Gelduin vicomte de Chartres, et à celui unissant Giro fils d’Asketil avec Constance, fille du même vicomte311. De même, Geoffroy fils d’Asketil avait-il certainement contracté une alliance avec la noblesse locale. Ainsi avait-il épousé une certaine Judith qui lui avait donné trois fils : Junguené, Gueguen et Rivallon. Or, les noms de Junguené et de Rivallon appartenaient au stock onomastique des vicomtes d’Alet, auxquels étaient apparentés les Dinan, les Dol-Combour et les Châteaubriant312.
- 313 Rappelons que le vicomte d’Alet Hammon apparaît auprès de Geoffroy Boterel Ier lors de la fondatio (...)
103À l’image des Châteaugiron, les vicomtes d’Alet semblaient divisés sur la question doloise. La branche aînée, représentée par le vicomte Hammon III, soutenait alors Geoffroy Boterel Ier313, contrairement aux cadettes.
- 314 M. Brand’Honneur, Manoirs…, op. cit., p. 126-127.
104Jean Ier de Dol-Combour, entre 1079 et 1083, devenu veuf, s’était fait moine de Saint-Florent de Saumur314. La seigneurie fut dévolue à son fils aîné Rivallon II puis, après la disparition mystérieuse de celui-ci, au cadet Gelduin Ier. La prise de contrôle de Dol par le fils du comte Eudes dut se faire à leurs dépens.
- 315 Le vicomte d’Alet apparaît auprès de Geoffroy fils d’Olivier de Dinan lors de la donation de l’égl (...)
105Quant aux Dinan, le vicomte Hammon III était encore en bon terme avec eux en 1081-1084, mais il ne semble pas avoir réussi à les entraîner dans le camp eudonide315.
- 316 La Borderie A. de, Recueil des actes inédits des ducs et princes de Bretagne (XIe, XIIe, XIIIe sièc (...)
- 317 Il pourrait être lié à la prise de contrôle de Combour par Guillaume l’Ismaélite au détriment des (...)
- 318 Guillaume l’Ismaélite était d’un tempérament belliqueux et peu conciliant. Nul doute que la démarc (...)
106Le 5 mai 1085, le seigneur de Tinténiac, Guillaume l’Ismaélite concéda la donation de la terre de Landhuan aux moines de Saint-Florent, alors qu’il accompagnait Alain IV Fergent pour faire la paix avec Geoffroy de Dinan316. Quelles que soient les cause de ce conflit317, le duc n’avait aucun intérêt à ce qu’il se prolongeât. Ainsi fit-il sans doute pression sur Guillaume l’Ismaélite pour qu’il se réconcilie avec son adversaire318.
107Apparenté tant aux vicomtes d’Alet qu’aux Dol-Combour, Geoffroy de Dinan était naturellement concerné par les prétentions de Geoffroy Boterel Ier sur la cité archiépiscopale. De plus, par sa situation géographique, Dinan offrait sans doute le moyen le plus sûr de passer la Rance. Pourtant, la prise de Dol par les Eudonides ne s’était pas nécessairement faite avec le concours des Dinan. En effet, si tel avait été le cas, ce lignage serait apparu au moins épisodiquement dans l’entourage de Geoffroy Boterel Ier.
- 319 Langouët L., Les mottes castrales de l’arrondissement de Dinan, Les dossiers du Ce.R.A.A., 9, 1-27.
- 320 Langouët L., Un vicus gallo-romain, routier et portuaire : Taden (Côtes-du-Nord), sur les bords de (...)
- 321 Hingant S., Les mottes médiévales des Côtes-d’Armor, Rennes, Institut culturel de Bretagne, Centre (...)
108Les méandres de la Rance permettaient de traverser le fleuve en évitant Dinan par le Nord319. Ainsi, à Taden, la découverte de monnaies romaines, la présence d’importants vestiges d’habitat gallo-romain, attestent de l’existence d’un ancien vicus portuaire et routier, au bord de la Rance, au point de passage à gué des voies romaines de Corseul à Avranches et à Rennes320. La motte de la Grande Prévôtais, toute proche, devait en contrôler encore le passage au Moyen-Age321.
- 322 Hingant S., ibidem.
- 323 Langouët L., Approche archéologique des mottes castrales, dans Dinan au Moyen Âge, p. 66, 70.
- 324 Chevallier R., Les Voies romaines, Paris, Picard, 1997, p. 127 : « Les gués naturels se situent aux (...)
- 325 La Vicomté-sur-Rance tiendrait son nom des vicomtes de Poudouvre (cf. Tanguy B., Dictionnaire des (...)
109De même, à Saint-Samson-sur-Rance, la motte du Châtelier barre un éperon imposant à la confluence du ruisseau de Rochefort et de la Rance322. La presqu’île aux parois abruptes qu’elle commande semble avoir défini une base-cour naturelle relativement importante par ses dimensions et sa situation au-dessus du fleuve323. Ce site répondait au désir de contrôler la navigation fluviale à marée haute mais peut-être aussi le franchissement des sables à marée basse324. Or, sur l’autre rive, la Vicomté-sur-Rance semble conserver dans sa micro-toponymie la mémoire d’une ancienne résidence des vicomtes d’Alet325.
- 326 Eveillard J.-Y., La voie romaine de Condate (Rennes) à Vorgium (Carhaix), Brest, 1980, fig. 15, p. (...)
- 327 Brand’Honneur M., Manoirs…, op. cit., p. 105-106.
110Encore plus au nord, le Port-Saint-Hubert offrait un autre passage à la faveur d’un nouveau rapprochement des rives326. Châteauneuf-d’Ille-et-Vilaine pourrait justement avoir été édifié dans le but de contrôler cette voie de pénétration dans le pagus Racter. Or, cette puissante forteresse fut justement établie dans le ressort des vicomtes d’Alet, précisément dans le pagus minor dit du Clos Poulet327.
111L’alliance d’Hammon III et de Geoffroy Boterel Ier prenait dès lors tout son sens. Le vicomte contrôlait la rive est de la Rance : il permettait donc aux Eudonides d’atteindre Dol depuis Lamballe sans craindre le verrou de Dinan. Taden étant peut-être trop proche pour échapper à l’influence de cette cité, Saint-Samson et le Port-Saint-Hubert pouvaient offrir un passage plus sûr mais dépendant de la marée.
- 328 La quasi-totalité des donations d’Alain IV sera destinée à des abbayes angevines ou de Bretagne Su (...)
- 329 En 1086, l’évêque de Tréguier cédait Hyrglas à l’abbaye du Mont-Saint-Michel avec l’assentiment de (...)
- 330 Brand’Honneur M., Manoirs…, op. cit., p. 126-127.
112Toutefois, le soutien des vicomtes d’Alet, bien qu’essentiel, n’était sans doute pas à l’origine du rapide basculement de Dol. Dès 1084, le chapitre cathédral de Dol avait préféré Geoffroy Boterel Ier à Alain IV dont les origines cornouaillaises ne permettaient sans doute pas d’espérer d’importantes donations328. À l’inverse, depuis la conquête anglaise, les Eudonides s’étaient rapprochés du duc de Normandie329 avec qui le Dolois entretenait historiquement des liens ambigus330. Dès lors, la noblesse et le clergé du littoral nord ne pouvaient que céder à cette puissante attraction.
- 331 Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 90.
- 332 Avant 1090, il confirme la donation à Saint-Jacut de la terre en Pléhérel dite « l’abbaye », cf. A (...)
- 333 Jean Ier est qualifié de moine pour la dernière fois en 1087.
- 334 Le duc de Normandie mourut le 9 septembre 1087 (Neveux F., La Normandie…, op. cit., p. 439).
- 335 Cartulaire de Saint-Serge d’Angers, no B 192.
- 336 Brand’Honneur M., Manoirs…, op. cit., p. 121.
- 337 Guillotel H., op. cit., no 92, 96, 99, 110.
- 338 Brand’Honneur M., Manoirs…, op. cit., p. 287, 288 tab. 31.
- 339 Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 76, 78, 79 ; Cartulaire de Saint-Serge d’Angers, no B 25, B (...)
113Le mariage d’Alain IV avec une fille de Guillaume le Conquérant entre le 14 juillet et le 8 décembre 1086331 ne modifia pas immédiatement la situation, puisque Geoffroy Boterel Ier intervenait encore à Dol le 6 janvier 1087332. En revanche, après cette date, le fils du comte Eudes n’apparaît plus dans les actes concernant cette région. Or, concomitamment, Jean Ier de Dol-Combour, qui s’était retiré à Saint-Florent de Saumur, fut élu à la dignité archiépiscopale333. Alain IV pouvait s’en féliciter car tout incitait le lignage de Jean Ier à rentrer dans la mouvance ducale. D’une part, les seigneurs de Dol avaient été évincés par Geoffroy Boterel Ier. D’autre part, la Normandie traversait une période d’instabilité depuis l’entrée en agonie de Guillaume le Conquérant en juillet 1087334. Et en effet, l’archevêque ne tardait pas à apparaître, si ce n’est auprès du duc, du moins dans son entourage335. Etaient mentionnés notamment, l’évêque de Rennes Sylvestre de la Guerche336, Gervais abbé de Saint-Melaine337, les Laval, les Vitré, les du Taillis338, Goranton II et Alain fils de Rivallon339.
- 340 Cf. Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 96 : Judicaël episcopus Sancti Machuti.
- 341 Un certain Hammon de Dol est cité dans une charte d’Alain le Roux dans laquelle ce dernier cède de (...)
- 342 Hammon III aurait eu un fils du nom de Gervais qui se serait démarqué aux Croisades, cf. Guillotel(...)
114De même, le 31 juillet 1089, l’évêque d’Alet, Judicaël, assistait à Rennes à une concession d’Alain IV en faveur de Saint-Florent de Saumur, ancienne abbaye de Jean Ier de Dol-Combour340. Le retrait de Geoffroy Boterel Ier et la reconnaissance de l’autorité ducale dans ces deux évêchés seraient-ils à l’origine de la disparition de la branche aînée des vicomtes d’Alet ? Hammon III n’est plus mentionné dans les actes bretons après 1084341 et sa lignée s’efface rapidement au profit des branches cadettes de Dinan et de Dol-Combour342. L’allié des Eudonides aurait-il été victime de représailles ?
- 343 Guillotel H., Bretagne et papauté…, op. cit.
- 344 En 1093, Urbain II accorda le pallium à l’évêque de Dol Roland qui était venu le lui réclamer comm (...)
- 345 Pour les annales de Rhuys, le fils du comte Eudes serait mort en 1092 et le 24 août 1093, à la sui (...)
- 346 Avant 1090, Geoffroy Boterel Ier confirmait la donation de la terre dite « l’abbaye » en Pléhérel (...)
- 347 Les chroniques ne précisent pas s’il attaquait ou défendait les remparts de Dol. Cependant, certai (...)
115Jean Ier de Dol n’étant qu’élu, il lui fallait encore obtenir la consécration épiscopale. Il était alors délicat de s’adresser à l’archevêque de Tours qui n’appréciait guère l’émergence d’une métropole bretonne343. Aussi Jean Ier entreprit-il un voyage à Rome afin d’être consacré par le Pape. Il y mourut le 10 octobre 1092344. Or, c’est justement en 1092/1093 que les chroniques datent la mort de Geoffroy Boterel Ier, à Dol345. Il peut difficilement s’agir d’une coïncidence. Le fils d’Eudes s’était retiré sur les terres familiales, guettant une nouvelle occasion de franchir la Rance346. Il dut saisir sa chance à la mort de Jean Ier mais il fut tué peut-être sans même avoir repris la cité archiépiscopale347.
116Après ce dernier échec, les Comtes de Bretagne abandonnèrent toute revendication du Dolois qui rentra définitivement dans la mouvance de Rennes. Geoffroy Boterel Ier ne laissait qu’un héritier, Conan, qui se distinguerait lors de la première Croisade. Avec la mort de ce dernier s’ouvre une nouvelle ère pour ce lignage. En effet, Étienne, dernier fils légitime du comte Eudes, allait rassembler dans sa main, toutes les possessions familiales, fruits de l’ambition de son père et de ses frères aînés.
Les fruits de la conquête : le prestigieux principat du comte Étienne
- 348 Cartulaire de Saint-Aubin d’Angers, no 677 : Eudo comes Britannie… uxor ejus Orguen, et filii eoru (...)
- 349 Orderic Vital, tome III, livre V, 88. Selon Orderic Vital, Eudes n’aurait eu que sept fils mais ce (...)
- 350 La mort d’Étienne en 1135/6 le désigne très probablement comme le dernier fils légitime d’Eudes. Q (...)
- 351 L’apparition du nom de Brient dans le stock onomastique de ce lignage peut surprendre. Pourtant, i (...)
- 352 Bien qu’il n’y soit pas mentionné explicitement, la confiance que lui accorde très tôt le Conquéra (...)
- 353 Regesta Regum Anglo-Normannorum, the acta of William I (1066-1087), Bates D. (éd.), Oxford, Claren (...)
117En 1056/1057, cinq fils du comte Eudes assistaient avec leur mère Orguen à la restitution par leur père de Bazouges à l’abbaye Saint-Aubin d’Angers : Geoffroy [Boterel], Alain [le Roux], Guillaume, Robert et Richard348. Manquaient à l’appel Brient, Alain le Noir et Étienne349. Les deux derniers devaient être trop jeunes, s’ils étaient nés, pour participer à une telle assemblée350. L’absence du premier était, en revanche, plus énigmatique car Brient comptait certainement parmi les plus âgés351. Il aurait ainsi participé à la bataille d’Hastings352 et trois ans plus tard, il apparaissait dans l’entourage du nouveau roi d’Angleterre avec le titre de comte353.
- 354 Anciens évêchés, tome IV, chap. v, ii : Omnes fratres ejus : Briencius videlicet comes Anglice ter (...)
- 355 The Anglo-Saxon Chronicle, Swanton M. J. (éd.), Londres, Dent J. M., 1996, p. 203 (D) : « After th (...)
- 356 Guillaume de Jumièges, tome II, p. 90-91, 180-183 : Brientius filius Eudonis comitis Britanie mino (...)
- 357 Dom Wilmart A., Alain le Roux et Alain le Noir, comtes de Bretagne, dans Annales de Bretagne, XXXVI (...)
118Brient tenait-il cette titulature comtale de ses origines ou de responsabilités que lui avait confiées le Conquérant ? Les actes des Eudonides ne semblent la lui accorder qu’en référence à l’Angleterre354. Les sources narratives le confirment en rendant compte du rôle essentiel que le « comte Brient355 », le « fils du comte Eudes de petite Bretagne356 » joua dans l’écrasement de la grande révolte de 1069. Près d’Exeter notamment, il rejeta à la mer l’armée que les fils d’Harold avaient obtenue du roi d’Irlande357. Or, l’acte de Guillaume le Conquérant dans lequel Brient porte le titre comtal date de 1069 et concerne justement Exeter.
- 358 Cf. p. 201 et suiv.
- 359 E. Y. C., no 12 : pro redemptione anime Brientii avunculi mei, de cujus hereditate terram Cornubie (...)
- 360 Potter K. R. (éd.), Gesta Stephani, Londres, Oxford University Press, Oxford Medieval Texts, 1976, (...)
- 361 Keats-Rohan K. S. B., Le rôle des Bretons dans la politique de colonisation normande de l’Angleterr (...)
119En 1140, Alain, petit-fils d’Eudes et considéré comme le premier « comte de Richmond358 », déclarait posséder la « terre de Cornouaille » (Cornwall) de l’héritage de son oncle Brient359. En réalité, le roi Étienne Ier venait de lui confier ce comté360 que Robert de Mortain contrôlait dans sa quasi-totalité en 1086361. Cependant, certaines terres tenues par ce demi-frère de Guillaume le Conquérant avaient effectivement appartenu au « comte Brient », mais elles étaient en Suffolk. Le neveu de ce dernier aurait-il fait l’amalgame entre ces domaines d’origine différente ? Alain avait des raisons politiques de le faire en ces temps de guerre civile, cependant cela n’explique pas la titulature de Brient en 1069 et n’identifie pas le comté dont celui-ci avait la charge.
- 362 Keats-Rohan K. S. B., op. cit., p. 194.
- 363 Il ne semble pas avoir participé à la révolte de 1075 contre Guillaume le Conquérant.
- 364 Certains ont imaginé que, blessé au combat, il se serait retiré en Bretagne pour y mener une vie d (...)
- 365 Les sources aurait certainement conservé le souvenir d’une mort au combat.
120On reconnaît aujourd’hui que le sud-ouest de l’Angleterre ait pu être le foyer d’une importante seigneurie dont le maître aurait été Brient, avant d’être allouée un peu plus tard à Robert de Mortain362. Toutefois, les historiens demeurent réticents à considérer le fils d’Eudes comme le premier comte de Cornwall. Cette hypothèse paraît pourtant intéressante. Brient n’aurait tenu cet honor que peu de temps, sa trace se perdant en Angleterre dès 1069363. Il était peut-être déjà mort en 1086. Cependant, selon une notice de Saint-Martin de Lamballe, il aurait assisté à la fondation du prieuré en 1084364. Avait-il quitté l’Angleterre après une blessure au combat ? Mourut-il de vieillesse ou de maladie365 ? Quoi qu’il en soit, il ne semble pas avoir eu de descendance.
- 366 Cartulaire de Saint-Aubin d’Angers, no cclxxxvii (pour la datation, cf. Guillot O., Le comte d’Anj (...)
- 367 Bates D., Regesta…, op. cit., no 244. Cet acte rapporte la donation à Saint-Ouen par Alain le Roux (...)
- 368 Selon Wace, Alain Fergent aurait participé à la bataille, mais le fils du duc Hoël était encore tr (...)
121On ne peut qu’être frappé par l’étonnante synchronie entre le « retrait » de Brient et l’entrée d’Alain le Roux sur la scène anglaise. Jusqu’alors, ce dernier était intervenu sur le continent, plus particulièrement en Anjou, vers 1056-1060366. Il n’est pas impossible qu’il ait été en Normandie dès avant la conquête367. Il aurait même participé à la bataille d’Hastings368, mais les sources ne sont pas assez sûres pour l’affirmer.
- 369 Ego Wil(el)mus cognomine Batardus Rex Anglie do et concedo tibi nepoti meo Alano Britannie Comiti (...)
- 370 Dom Wilmart A., ibidem.
122Selon une miniature du Registre de Richmond, lors du siège d’York, Alain « comte de Bretagne » aurait reçu de son « oncle » Guillaume le Conquérant les domaines en Yorkshire du comte Edwin, qui s’était alors révolté contre son autorité369. Comme l’a très bien vu Dom Wilmart, la formule est trop maladroite pour la tenir pour la reproduction d’un acte authentique. Cependant elle pourrait être une sorte de résumé tardif et maladroit d’une pièce écrite370.
- 371 Si Alain le Roux participa vraiment au siège d’York de 1069, pourquoi n’est-il jamais question de (...)
- 372 Dom Wilmart A., Alain le Roux…, op. cit., p. 581, note 15 ; Dalton P., Conquest, anarchy & lordship (...)
- 373 Bates D., Regesta…, op. cit., no 169, 237. D’autres actes de Guillaume le Conquérant mentionnent Al (...)
- 374 Il est à Caen le 13 septembre 1077 et le 7 janvier 1080 (Bates D., Regesta…, op. cit., no 46 et 26 (...)
- 375 Dom Wilmart A., Alain le Roux…, op. cit., p. 586-587.
123Bien que le siège d’York de 1069 soit explicitement évoqué371, Alain le Roux dut recevoir l’honor de Richmond vers 1071-1072, de la volonté du Conquérant de réorganiser le Yorkshire, après la dernière révolte d’Edwin de Mercia372. Les sources diplomatiques confirment cette hypothèse en ne révélant la présence certaine du comte Alain (Alanus comes) auprès du roi d’Angleterre qu’à partir de 1070373. Dès lors, la confiance de Guillaume à l’égard de son cousin ne se démentit pas. Le fils d’Eudes séjournait habituellement en Angleterre mais n’hésitait pas à suivre la cour sur le continent374. Il fut même employé dans des entreprises militaires de grande envergure dont notamment le long siège de Saint-Suzanne. Pendant la majeure partie de cette affaire, le roi s’était retiré en Angleterre, laissant au comte Alain le soin de diriger les troupes375.
- 376 Cf. Annexe XIV.
124Sans effort d’imagination l’on aperçoit Alain le Roux au premier rang, dans l’entourage du seigneur auquel il avait lié sa fortune. Le Domesday Book révèle de façon éclatante l’autorité dont jouissait le fils d’Eudes. Le Conquérant l’avait gratifié de l’honor le plus important d’Angleterre après celui de Robert de Mortain, s’étendant sur onze comtés anglais376.
- 377 C’est peut-être ainsi qu’il faudrait interpréter l’affirmation maladroite de la pancarte de Saint- (...)
125Une telle générosité avait tout de même de quoi étonner. En effet, Alain le Roux, quels qu’aient pu être ses mérites, restait le fils d’un des ennemis les plus acharnés de Guillaume dans les années 1040-1060. La miséricorde, toute politique, du duc-roi était légendaire mais n’expliquait pas tout. Il n’est pas impensable que le rôle de Brient lors de la conquête y soit en partie pour quelque chose. Alain bénéficia peut-être du retrait récent de son frère. Il lui aurait en quelque sorte succédé, si ce n’est dans ses possessions, du moins dans l’estime du Conquérant377.
- 378 E. Y. C., no 1 : pro anima domini sui regis Anglorum Willelmi et pro anima Mathildis regine, cujus (...)
- 379 Lors de la révolte de Robert Courteheuse contre son père, Mathilde eut recours aux services d’un c (...)
- 380 Keats-Rohan K. S. B., Le rôle des Bretons…, op. cit., p. 194.
- 381 Cf. p. 205-206.
126La reine Mathilde semble avoir joué un rôle dans l’attribution de Richmond au comte Alain. C’est du moins ce que laissait entendre ce dernier alors qu’il cédait l’église de Swavesey à l’abbaye Saint-Serge d’Angers378. L’intervention de la reine reste inexpliquée, bien que Mathilde ait eu l’habitude d’accorder sa confiance à des bretons, parfois au grand dam de son époux379. Guillaume suivit les conseils de sa femme mais peut-être n’est-ce pas un hasard s’il envoya Alain dans les régions les plus éloignées tant de la Bretagne que du Cornwall, afin d’éviter tout risque de collusion avec ses frères ou d’anciens fidèles de Brient380. Le fils du comte Eudes se montra d’une fidélité inébranlable envers le roi. Il ne fut même pas troublé par la révolte de 1075 fomentée pourtant par Raoul de Gaël, comte de Norfolk et complice de son père vingt ans plus tôt. Il reçut même une grande partie des terres que le félon abandonna dans sa fuite en Bretagne381.
- 382 Dom Wilmart A., op. cit., p. 584.
- 383 Orderic Vital, tome IV, livre VIII, p. 272 : Alanus enim Rufus Britannorum comes Mathildem quae pri (...)
- 384 Dom Wilmart A., Alain le Roux…, op. cit., p. 595, note 60.
- 385 Ibidem. Selon Orderic, Alain demanda la main de Mathilde à Guillaume le Roux mais serait mort avan (...)
127Alain le Roux conserva son rang après la mort du Conquérant sous le règne de Guillaume II le Roux comme le prouve notamment le rôle essentiel qu’il joua dans le procès de l’évêque de Durham, Guillaume de Saint-Calais382. Il s’éteignit quelques années plus tard, en 1093, sans postérité. Sa disparition fut certainement subite car le fils d’Eudes cherchait justement à se marier. Selon Orderic Vital, il espérait épouser Edith dite Mathilde, fille de Malcolm III d’Écosse383. Persuadé qu’Alain était mort en 1089, Dom Wilmart rejetait cette hypothèse car la jeune fille n’avait alors que huit ans384. Cependant, des fiançailles étaient possibles dès cet âge. De même, quatre ans plus tard, un tel projet n’était plus impensable. Toutefois, le passage d’Orderic Vital révèle des contradictions manifestes permettant de douter de l’assertion de l’auteur385.
- 386 Keats-Rohan K. S. B., Le rôle des Bretons…, op. cit., p. 189. Dom Wilmart A., op. cit., p. 599.
- 387 Ibidem. : Et quid si idcirco subtraxit Deus comitem Alanum de hac vita, ne ille te Deo subtraheret (...)
- 388 Keats-Rohan K. S. B., ibidem.
- 389 La lettre de saint Anselme semble avoir été écrite entre le 4 décembre 1093 et 1095, cf. Keats-Roh (...)
128Plus digne de confiance, une lettre de saint Anselme, adressée à Gunhilde, fille du défunt roi Harold, révélait les véritables intentions du comte Alain. Saint Anselme semblait considérer Gunhilde comme une moniale en raison de la fuite de celle-ci, après 1066, à l’abbaye de Wilton. Il est permis de douter de cette interprétation compte tenu du fait que la fille d’Harold envisageait d’épouser Alain le Roux386. Dieu avait retiré de cette vie le séducteur387 mais le frère de ce dernier, Alain le Noir, avait à son tour noué une liaison avec Gunhilde388. L’archevêque de Canterbury adjurait donc Gunhilde d’écarter le mirage de cette union terrestre et de reprendre l’habit. Nul doute que cette alliance reposait sur un calcul politique qui demeure obscur. On ne sait si la fille d’Harold obtempéra, mais Alain le Noir mourut en 1098 apparemment sans descendance389.
- 390 S’appuyant sur un acte non relevé dans les Regesta Regum Anglo-Normannorum (C. Johnson, H. A. Cron (...)
- 391 Heers J., Libérer Jérusalem. La première Croisade 1095-1107, Paris, Perrin, 1999, p. 114 : « Si l’o (...)
- 392 Orderic Vital, tome V, livre IX, p. 54 et 58 : Tandem Cristiani duces in unum convenerunt et hoc or (...)
- 393 Orderic Vital, tome V, livre IX, p. 58 : Die qua Nicena obsidio soluta est ad quendum pontem peruen (...)
- 394 Sur ce personnage, cf. p. 243-244.
129Dès lors, Étienne veilla sur l’ensemble des domaines familiaux tant bretons qu’anglais390. En effet, son neveu Conan avait entendu le pape Urbain II adjurer les guerriers d’Occident de libérer Jérusalem. Bien que les préparatifs de cette expédition restent flous391, le fils de Geoffroy Boterel Ier, dut quitter la Bretagne du vivant d’Alain le Noir, dans le courant de l’année 1096, probablement à la suite de Robert Courteheuse, d’Étienne-Henri de Blois et de Robert de Flandre, auprès de qui on le retrouve au siège de Nicée, en mai-juin 1097392. Sa présence auprès de ces princes révèle le prestige des Comtes de Bretagne à l’époque. Conan était non seulement le fils du « comte Geoffroy » mais aussi le neveu d’Alain le Noir, puissant comte d’Angleterre, et d’Étienne de Bretagne, beau-frère du comte de Blois. Étienne-Henri avait lui-même épousé Adèle de Normandie, fille de Guillaume le Conquérant et de Mathilde de Flandre : il était donc le beaufrère de Robert Courteheuse et le cousin par alliance de Robert de Flandre. Dans ce maillage complexe de parentés, Conan trouvait tout naturellement sa place. Il n’était pas parti pour l’Orient avec des inconnus, mais avec des alliés plus ou moins éloignés. Il n’était d’ailleurs pas le seul breton à avoir suivi le duc de Normandie393 : il côtoyait notamment Raoul de Gaël et son fils Alain, Hervé fils de Dudomanus394 ou encore le sénéchal de Dol, Alain.
- 395 Sur les Bretons et les croisades, cf. Jones M., Les Bretons et les croisades, dans M.S.H.A.B., tom (...)
130Conan mourut le 9 février 1098 à Antioche. Sa brève participation à la première croisade marqua davantage les chroniqueurs que celle d’Alain IV Fergent lui-même395. L’aura du fils de Geoffroy Boterel Ier était-elle suffisante pour nuire à l’autorité du duc de Bretagne ? Peut-être, du moins si Conan avait vécu plus longtemps. Quoi qu’il en soit, c’était certainement ce qu’espérait son père en le baptisant ainsi : il s’agissait d’une revendication du titre ducal, passé par les femmes à la maison de Cornouaille. Cette position ne manquait pas de partisans en Bretagne nord où l’influence normande dominait mais la disparition du Conquérant puis des aînés du lignage eudonide donna l’avantage à Alain IV, du moins provisoirement.
- 396 Cartulaire du Mont-Saint-Michel, ms. 210 de la Bibl. d’Avranches, fol 64 ro vo : +. Signum Gaufred (...)
- 397 L’acte no 4 des E. Y. C. semble marquer une véritable prise en main des terres anglaises. Étienne (...)
- 398 Pour connaître les valeurs successives du marc d’argent jusqu’en 1330, cf. colonel L. Borrelli de (...)
- 399 Vercauteren F., Actes des comtes de Flandre (1071-1128), Commission Royale d’histoire, Recueil des (...)
131La première mention d’Étienne semble dater de 1086. Le dernier fils légitime du comte Eudes souscrivait en même temps que son frère aîné à une donation de l’évêque de Tréguier au Mont-Saint-Michel396. Il restait apparemment dans l’ombre de ses aînés et ce n’est qu’après la mort d’Alain le Noir et, probablement celle de son neveu Conan, qu’Étienne put se révéler dans toute sa dimension. Si on connaît mal les relations qu’il entretint avec Guillaume II le Roux397, on le retrouve auprès d’Henri Ier Beauclerc dès le début du XIIe. À Douvres, le 10 mars 1103, il se portait garant à hauteur de cent marcs d’argent398 du traité que le nouveau roi d’Angleterre avait passé avec le comte Robert II de Flandre399. Ce dernier s’engageait à aider Henri Ier Beauclerc à défendre son pays, sous réserve de la fidélité qu’il devait au roi de France.
132La familiarité d’Étienne avec la haute noblesse d’Occident n’avait rien d’étonnant. D’une part, il était l’un des plus puissants seigneurs d’Angleterre et de Bretagne. D’autre part, il était un proche parent du roi Henri Ier Beauclerc. En effet, la sœur de ce dernier, Adèle, avait épousé Étienne-Henri de Blois, beau-frère d’Étienne. Ainsi, le hasard des successions révélait toute la portée de l’alliance négociée par Berthe de Blois vers 1075. Prévue sans doute à l’origine pour contenir l’ambition des Eudonides en Bretagne, elle était devenue un élément essentiel de leur ascension.
- 400 Anciens évêchés, tome IV, chap. vi, no I, p. 335 :… dum idem comes Stephani de curia regis Angloru (...)
- 401 Ibidem : Et quoniam castrum de Jugon, antequam in dominium Gauffredii Dinanensis vel heredum ejus (...)
133Malgré l’étendue de son domaine qui le contraignait à de nombreux déplacements, Étienne ne délaissa pas la Bretagne pour autant. La pancarte de Jugon le montre revenant de la cour du roi d’Angleterre400 et confirmant les donations qu’Olivier de Dinan, seigneur du lieu, avaient faites à Marmoutier. Cette intervention d’Étienne mérite un peu d’attention car elle pourrait donner un nouvel éclairage sur le fameux siège de Dol où Geoffroy Boterel Ier trouva la mort. En effet, selon la pancarte, le château de Jugon, avant d’être contrôlé par Geoffroy de Dinan et ses héritiers, avait appartenu aux prédécesseurs et parents du comte Étienne401, c’est-à-dire probablement à Eudes et certainement à Geoffroy Boterel Ier qui dans les années 1080-1092/3 étendait son influence jusqu’à Dol. À prendre la phrase au sens strict, la perte de Jugon n’était pas le fait d’Étienne : il n’en avait pas hérité.
- 402 Cf. infra.
134Dans quelles circonstances Geoffroy de Dinan s’était-il emparé du château ? Par la violence, il en était bien capable402, mais d’une part avait-il les forces suffisantes pour s’attaquer aux Eudonides ? D’autre part, la complaisance avec laquelle Étienne confirmait la donation de Jugon supposait plutôt une cession amiable. L’intérêt de cette négociation paraît assez évident. À l’époque, Geoffroy Boterel Ier convoitait Dol et Dinan offrait le moyen le plus pratique de franchir la Rance. Le fils aîné du comte Eudes avait réussi à s’emparer de la cité archiépiscopale dans les années 1080 grâce à la complicité du vicomte d’Alet qui contrôlait la rive est du fleuve. La disparition soudaine de ce dernier avait contraint Geoffroy Boterel Ier de se retirer vers 1087. Pourtant, quelques années plus tard, profitant de l’absence de Jean Ier de Dol, il avait à nouveau assiégé la cité. Privé cette fois du soutien d’Hammon III, il pouvait difficilement contourner Dinan par le nord. Si tel avait été encore le cas, un gué était trop soumis aux marées pour permettre une attaque aussi rapide.
- 403 La Madeleine du Pont notamment, fut fondée à Dinan en 1070, sans l’intervention quelconque ou même (...)
135Les Dinan apparaissent aussi peu dans les actes des ducs que dans ceux des Comtes de Bretagne. Prudemment, Geoffroy de Dinan semblait se tenir loin de ce conflit, mais il profitait de la situation troublée pour renforcer ses positions403. Fort de son contrôle de la Rance, il proposait ses services au plus offrant. En 1085, Alain IV Fergent était intervenu dans la guerre qui l’opposait à Guillaume l’Ismaélite, probablement pour s’attirer les faveurs du seigneur de Dinan au détriment de Geoffroy Boterel Ier qui occupait alors Dol. À la suite de son repli, le fils d’Eudes dut entamer à son tour des négociations avec Geoffroy de Dinan dans l’attente d’un retour de fortune. Jugon pourrait avoir été l’objet de cette tractation. Geoffroy de Dinan y gagnait un nouveau château, quant à Geoffroy Boterel Ier, outre l’ouverture sur le Dolois, il trouvait peut-être l’occasion de se débarrasser d’un lignage de Jugon encombrant.
- 404 Anciens évêchés, tome IV, chap. vi, no i, p. 333-334 : Cum Gaufredus, dominus Dinanensis, longo te (...)
- 405 Anciens évêchés, tome IV, chap. vi, no i :
136La pancarte de Jugon précise en effet que Geoffroy de Dinan s’interrogeait sur la possibilité de céder aux moines de Marmoutier des droits sur les églises et leurs dîmes dépendantes du fief des Brient, dont il s’était emparé par la violence404. Brient l’Ancien, chef de ce lignage, accepta finalement la donation, à la grande satisfaction du seigneur de Dinan. Brient l’Ancien avait épousé la fille de Giro fils d’Asketil, en un mot, la fille du seigneur de Châteaugiron405. Les fils d’Asketil avaient joué un rôle essentiel dans « l’affaire doloise » : Giro avait suivi le duc Alain IV pendant que son frère cadet Geoffroy soutenait Geoffroy Boterel Ier. Les Brient restèrent probablement fidèles à Giro, constituèrent ainsi un foyer de résistance au cœur du domaine des Comtes de Bretagne. Le fils du comte Eudes contourna habilement la difficulté, abandonnant une place forte dont le contrôle n’était plus sûr, en échange du passage de la Rance. Geoffroy de Dinan s’était ensuite chargé de la répression.
- 406 Guillotel H., La proto-histoire de Combour…, op. cit.
- 407 Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 109 : monachi nostri Guarinus de Lanrigant et Gilo filius An (...)
137Le comte Étienne dut tirer les leçons de la mort de son frère aîné : le Dolois était définitivement perdu ; il valait mieux chercher un modus vivendi avec le duc de Bretagne. Ce dernier ne pouvait rester insensible au sort des Brient, mais ni les Dinan, ni Étienne ne devaient tenir à ce qu’ils soient rétablis à Jugon. Une donation à un établissement ecclésiastique permit de sauver la situation. Le choix se porta naturellement sur Marmoutier. L’abbaye tourangelle était liée aux Comtes de Bretagne depuis la fondation de Lamballe en 1084. De plus, l’abbé Guillaume appartenait à la famille du Chat, bien établie en Dolois et proche des Combour406. Enfin, Giro fils d’Asketil était lui-même devenu moine de Marmoutier407. Aussi ne faut-il pas s’étonner de voir, en 1104-1107, Brient l’Ancien, cité parmi les barons d’Alain IV Fergent, assister à la donation ducale de la forêt de Puizay à Marmoutier ou, s’étant lui-même retiré à Marmoutier, insister pour que son ancien fief de Jugon ne soit cédé qu’à saint Martin, fondateur de Marmoutier.
- 408 Étienne-Henri de Blois était mort en 1102, mais son fils Thibaud lui avait succédé. Cf. Bur M., op (...)
138Étienne était influent en Angleterre. De plus, le fils d’Eudes marié à une princesse de Blois et les Châteaugiron eux-mêmes établis en Blésois, ceci n’aurait-il pas contribué à l’apaisement des conflits en Bretagne à cette époque408 ?
- 409 Anciens évêchés, tome IV, chap. viii, iii : Consulibus Britannie Alano atque Stephano.
139Les rapports entre les deux cours princières semblaient s’être pacifiés. La puissance d’Étienne était telle que les actes de la pratique en venaient à le placer sur un pied d’égalité avec Alain IV409. Toutefois, le fils d’Eudes ne tentait apparemment pas de s’emparer du pouvoir ducal, comme s’y étaient risqués, en vain, son père et son frère aîné. Il chercha davantage à consolider ses positions par une sage politique matrimoniale.
- 410 Par convention, nous appelons Alain le Noir, un frère aîné d’Étienne, successeur d’Alain le Roux à (...)
140Contrairement à ses aînés, Étienne eut une nombreuse progéniture. Les sources mentionnent au moins six enfants ayant atteint l’âge adulte : Geoffroy Boterel II, Alain dit « le Noir410 », Henri, Mathilde, Olive et Typhaine.
- 411 Guillotel H., op. cit., p. 272.
- 412 Elle fut la mère de Raoul II de Fougères qui joua un rôle si important sous Henri II Plantegenêt.
- 413 E. Y. C., no 390 : Matildis filia consulis Stephani Britannie, uxor Walteri de Gaunt.
- 414 Keats-Rohan K. S. B., Domesday people…, op. cit., p. 210.
- 415 Keats-Rohan K. S. B., Domesday descendants…, op. cit., p. 729.
141Les alliances qu’Étienne négocia pour ses enfants révélaient les préoccupations d’un prince dont le domaine s’étendait des deux côtés de la Manche. Son fils aîné, Geoffroy Boterel II fut marié à H., fille de Jean Ier de Dol-Combour et de Godehilde de Fougères411. De même, Olive épousa Henri, fils aîné de Raoul Ier de Fougères412. Ainsi, Étienne espérait-il étendre son influence tant au nord-est de la Bretagne, qu’en Angleterre, Dol-Combour et Fougères entretenant depuis longtemps des rapports avec la Normandie. La volonté d’Étienne de resserrer davantage les liens avec la noblesse anglo-normande apparaissait encore plus clairement dans les mariages de Mathilde et de Typhaine. La première épousa Gaultier de Gand413, fils et successeur de Gilbert Ier de Gand. Parent éloigné de la reine Mathilde, ce dernier occupait le premier rang des Flamands d’Angleterre414. Quant à la seconde, Typhaine, elle épousa Rabel de Tancarville, fils de Guillaume de Tancarville, camérier de Normandie du roi Henri Ier Beauclerc415.
142Henri ne se maria qu’en 1151, bien après la mort de son père, à Mathilde de Vendôme. Reste la question épineuse de l’union d’Alain « le Noir » et de Berthe, fille du duc de Bretagne Conan III.
- 416 Lors de l’entrevue de l’Ormeteau-Ferré entre Louis VI et Henri Ier Beauclerc, il n’était encore qu (...)
- 417 Op. cit., no 146, 147.
- 418 La Borderie A. de, Nouveau recueil…, op. cit., p. 28 : Postea, in vita patris, decessit G. comes, c (...)
- 419 Op. cit., p. 31-32 : Hec sunt nomina illorum qui concordant in processum subscriptum : Alanus, fil (...)
143Le mariage de Conan III, fils d’Alain IV Fergent, avec Mathilde, fille naturelle d’Henri Ier Beauclerc dut avoir lieu entre 1113 et 1118416. Leur fille Berthe, probablement l’aînée, était mariée au fils d’Étienne le 6 décembre 1138417, mais il ne s’agit que d’un terminus ad quem. Selon un vieux chanoine, témoignant lors de l’enquête de 1235 en faveur d’Henri d’Avaugour, Alain « le Noir » aurait été rappelé d’Angleterre par son père et ses amis pour épouser la fille de Conan III. Cependant, ce vieil homme n’était plus très sûr du cours des évènements puisqu’il était persuadé que c’était après la mort de son frère aîné qu’Alain avait regagné le continent418 ; or, Geoffroy Boterel II survécut non seulement à Étienne mais aussi à Alain « le Noir ». Des témoignages plus sérieux contenus dans cette même enquête affirme au contraire, que le mariage d’Alain « le Noir » eu lieu après la mort d’Étienne, survenue en 1135-1136419.
144Cette union paraissait un succès politique pour les deux parties : Conan III semblait obtenir le ralliement de parents en marge du pouvoir ducal depuis un siècle et les descendants d’Eudes renouaient avec des prétentions sur le duché. La stratégie de ces derniers se révéla d’ailleurs fructueuse puisque Conan IV, successeur de Conan III, naquit de ce mariage.
145Cependant, cette alliance avait de quoi contrarier Geoffroy Boterel II. Descendant en ligne directe masculine des comtes de Rennes, ce dernier n’aurait sans doute jamais accepté de corrompre son sang avec une Cornouaille dont, qui plus est, la mère était illégitime. En revanche, son frère cadet Alain « le Noir » trouvait là le moyen d’atteindre une dignité à laquelle seul Geoffroy Boterel II et ses descendants pouvaient normalement prétendre. Quant à Conan III, il espérait retourner la puissance de Richmond contre le seul lignage comtal concurrent du sien en Bretagne.
146L’harmonie entre les Eudonides était brisée : la guerre de succession anglaise allait permettre aux deux frères désormais rivaux de s’affronter. Bien qu’affaibli, le lignage résistera à l’emprise ducale jusqu’au début du XIIIe siècle. En revanche, les calculs de Conan III allaient bien vite se retourner contre sa propre Maison. Intégré dans le domaine ducal, le comté de Richmond allait devenir le cheval de Troie par lequel les Plantegenêts s’immisceraient bientôt dans les affaires bretonnes. À leurs dépens cette fois, les Comtes de Bretagne participeraient encore aux grands conflits politiques du moment.
Conclusion
147Évinçant en 1047 son neveu Conan II, le dux Eudes, princeps Brittonum, exerça l’imperium sur le regnum breton pendant une dizaine d’années. Le comte d’Anjou auquel il s’était allié l’entraîna dans les méandres de sa politique. Le rapprochement de Geoffroy Martel et du roi vers 1052 fit entrer Eudes dans la coalition anti-normande qui se constituait alors. Cette dernière fut ébranlée par la capture du frère d’Alain III par Conan II en 1057. Le comte d’Anjou et le roi de France disparus, le comte Eudes, battu et sans allié, se rapprocha de son ennemi d’hier, Guillaume le Bâtard qui préparait la conquête de l’Angleterre. Les fils d’Eudes s’y couvrirent de gloire offrant au lignage les moyens de revendiquer à nouveau le titre ducal breton. Les Eudonides atteignirent leur apogée sous le principat d’Étienne qui réunit dans sa main les terres anglaises et continentales de sa famille. Leur déclin s’annonça lorsqu’à la génération suivante, ils sacrifièrent l’intérêt commun à l’ambition personnelle.
Notes
1 Dom Morice P.-H., Histoire ecclésiastique et civile de Bretagne, composée sur les auteurs et les titres originaux, ornée de divers monumens, & enrichie d’une dissertation sur l’établissement des bretons dans l’Armorique, & de plusieurs notes critiques, [Dom Morice, Histoire] Paris, Delaguette, 1750, 3 vol., tome I, livre II, p. 72 : « Cependant Eudon tenoit (sic) son neveu si resserré qu’il ne paroissoit plus en public. Les différens qu’il avoit eu avec le feu duc, firent craindre avec raison qu’il n’attentât à la vie de son neveu afin de mettre la couronne dans sa maison. Pour rompre ses vues et pour procurer la liberté au jeune prince les seigneurs du Porhoët, de Vitré, du Fou, de la Rouaia, de Tasle et autres formèrent un parti et choisirent pour chef Geoffroi comte de Rennes. Leurs pratiques furent si secrètes que Conan fut enlevé de la prison avant que son oncle en eut connoissance. »
2 Sur le Penthièvre, cf. p. 194-195.
3 MXLVII. – Conanus puer de custodia patrui sui elabitur Redonis, Cartulaire de l’abbaye Sainte Croix de Quimperlé, British Museum, ms. Egerton 2802, fol. 41, cité par Guillotel H., Les actes…, op. cit., p. 192.
4 Si celui de « prison » existe bien, le sens courant de custodia, en latin classique, est « garde, surveillance ». Cf. Benoist E. et Goelzer H., op. cit. Au Moyen Âge, ce mot peut désigner explicitement « la tutelle d’un mineur ». Cf. Niermeyer J.-F., op. cit. En l’espèce, les textes ne font aucune allusion à un quelconque emprisonnement.
5 Guillotel H., op. cit., no 53 : Facta sunt hec in Redonensi civitate, coram Conano chomite, in die qua chomes factus est…
6 Eudes ne réapparaîtra qu’à une seule reprise dans les actes ducaux, lors de sa captivité de 1057. Guillotel H., op. cit., no 55 : « Eudes, comte, prisonnier ».
7 Quelques semaines avant son décès, Hubert Guillotel était revenu sur son jugement.
8 Orderic Vital, tome III, livre V, p. 88 : In Britannia Eudo fratri suo Alanno successit, et XV annis ita libere ut sine dominio alicuius esset principatum exercuit.
9 Guillotel H., Bretagne et papauté…, op. cit., p. 268-269.
10 Ibidem. Juhel et semble-t-il les évêques d’Alet, de Quimper, de Saint-Brieuc, de Saint-Pol de Léon et de Tréguier.
11 Dom Morice, Mémoires, col. 395-396 : Leo sanctae Sedi Apostolicae gratia dei Papa Eudoni Britonum Principi & Alano Comiti & caeteris Principibus Britanniae, secundum Deum vivere volentibus, vita & salus.
12 Ibidem : Et hoc te auctoritate hortamur Apostolica, ut per totum regnum tibi commissum pacem facias, justitiam diligas, subditos pie regas.
13 Werner K.-F., La naissance…, op. cit., p. 147. Sur la notion de princeps aux temps mérovingien et carolingien, cf. récemment Guillot O., À propos d’un début d’enquête sur le rôle à l’époque mérovingienne de la tradition du princeps et du principatus, et Remarques sur le sens du mot princeps au temps de Charlemagne dans Guillot O., Arcana imperii (IVe-XIe siècle), recueil d’articles, CIAJ, no 10, Limoges, Pulim, 2003, p. 221-267 et p. 315-339.
14 Op. cit., p. 433-434.
15 Ibidem.
16 Ibidem.
17 Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 11 : Alanus princeps Britanniae.
18 Op. cit., no 27 : Alanus comes et dux Britannorum.
19 Op. cit., no 28 : Alanus Britanniae gentis dux atque princeps.
20 Labbé P., Cossart G., Sacrosancta concilia, Paris, 1671, tome IX : Ab anno DCCCLXXII. Ad annum M. LXXIII, col. 993-994 : per totum regnum tibi commissum pacem facias, justitiam diligas, subditos pie regas.
21 Ibidem. : Tibi autem, carissime fili, mandamus ut te ab eorum conventibus cum omnibus fidelibus subtrahas, deinde eos commoneas ut nostris praeceptis obsecundent, simoniacam haeresim deponant, secundum Deum vivant.
22 Ibidem. : In scriptis veterum reperimus omnes episcopos tuae patriae archiepiscopo Turonico subjectos esse debere.
23 La vente de Saint-Georges de Grehaigne par Roger fils d’Ascelin eu lieu « le comte Eudes exerçant l’imperium sur les Bretons », Cartulaire de l’abbaye Saint-Georges…, op. cit., no 29 : Imperante comite Eudone Britannis…
24 Labbé P., Cossart G., op. cit. :… unus ex maximis Galliae principibus habearis…
25 Jézéquel Y., Les monnaies des Comtes et Ducs de Bretagne, Xe au XVe siècle, Paris, Maison Florange, 1998, p. 15-16 : + EDO DUX BRITANIE ou + EDO DUX BAITANI. ; Coativy Y., Les pseudoblancs d’Alain III et d’Eudon, dans Armorique numismatique, no 105, 1994, p. 9 ; Pilet-Lemière J., Trois deniers découverts à Landévennec attribués à Eudon de Penthièvre (1040-1047), BSFN, t. 40, 1985, p. 637-639.
26 Guillotel H., op. cit., no 26 : Concesserunt eciam in villa monasterii fieri quoque burgum, forum, mercatum, commutacionem auri et argenti et denariorum, Redonensi moneta firma stante vel decidente, quod, regnante Eudone comite, post mortem Alani factum est.
27 Cartulaire de l’abbaye Saint-Georges de Rennes, [Cartulaire de Saint-Georges de Rennes] ed. P. de La Bigne Villeneuve, Rennes, Société archéologique d’Ille-et-Vilaine, 1876 op. cit., no xiii : Noverit posteritas futura castellum quod Gaufridus Salomonis filius edificat in Nulliaco, Eudone comite et abbatissa ejus sorore Addela nomine, fieri esse permissum hac conventione…
28 Op. cit., no xix.
29 Op. cit., no xiii. Après la mort du Duc en 1066, la comtesse Berthe institua Geoffroy Grénonat comte de Rennes aux dépens de son gendre, Hoël de Cornouaille.
30 Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 45, 56 ; Cartulaire de Saint-Georges de Rennes, op. cit., no iii, xix, xxx, xxxii, lviii. Ce personnage aurait un neveu du nom de Bernard, op. cit., no xxii : Bernardus nepos Ricaladri.
31 M. Brand’Honneur, Manoirs…, op. cit., p. 285.
32 Guillotel H., De la vicomté de Rennes à la vicomté de Porhoët, dans M.S.H.A.B., tome LXXIII, 1995, p. 5-23, p. 13, note 32.
33 Cartulaire de Saint-Georges de Rennes, op. cit., no 19 : Hi autem sunt testes Eudo comes & uxor ejus. Joscelinus Vicecomes… Cf. Guillotel H., De la vicomté de Rennes…, op. cit., p. 12. Il paraît possible de resserrer la datation proposée par Hubert Guillotel. Tout d’abord, l’intervention du comte Eudes sans Conan II nous placerait après 1047. De plus, l’épouse du comte Eudes est mentionnée sans leurs enfants qui apparaissent pour la première fois en 1056/1057. Ensuite, Geoffroy Grénonat, pourtant sous la garde de son oncle, doit être lui aussi encore trop jeune pour tester. Enfin, le vicomte Josselin ne semble pas avoir suivi le comte Eudes en Anjou en 1056/1057. Il devait être déjà âgé à cette époque puisque vers 1024-1032, une de ses filles devint moniale de Saint-Georges de Rennes (Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 28). En revanche, Josselin était à Rennes lorsque Conan II y fut reçu après la capture d’Eudes (Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 53). Son fils lui avait succédé au plus tôt en 1062, cf. Guillotel H., De la vicomté de Rennes…, op. cit., p. 14, note 34. En définitive, cet acte doit être postérieur à 1047 et antérieur à 1056/1057.
34 Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 61, 64. L’acte no 61 pourrait être postérieur au no 64 du fait de la présence de Josselin II auprès de son père dans le premier, ce qui n’est pas le cas dans le second. Josselin II semble intervenir pour une affaire comparable auprès de Geoffroy Grénonat, mais cette fois sans son père, Cartulaire de Saint-Georges de Rennes, no xvii. S’il ne porte pas le titre vicomtal, c’est pour la simple raison que le vicomte Eudes est encore vivant : ce dernier reparaît d’ailleurs auprès d’Hoël en 1089. Cette absence peut éventuellement s’expliquer par l’état de santé d’un homme vieillissant ou par une disgrâce à l’époque de Geoffroy Grénonat. Le comte de Rennes demeurant à Rennes, un vicomte n’y était peut-être plus nécessaire.
35 Keats-Rohan K., Crime et châtiment à la manière du XIe siècle ? Note sur une charte bretonne en faveur du Mont Saint-Michel, dans M.S.H.A.B., tome LXXIII, 1995, p. 25-30.
36 Il assistait à l’intronisation de Conan II à Rennes, Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 53.
37 Op. cit., no 19, 27, 51.
38 Brand’Honneur M., Manoirs…, op. cit., p. 266 : le lignage de Raoul le Large prendra le nom de cette localité.
39 Op. cit., p. 178-179 ; Guillotel H., Les évêques d’Alet du IXe au milieu du XIIe siècle, dans Annales de la Société d’Histoire et d’Archéologie de l’Arrondissement de Saint-Malo, 1980, p. 251-266.
40 L’épouse de Rivallon vicarius se nomme Jernagande (Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 23 : cum conjuge mea Junnargande), tout comme l’épouse de l’évêque de Rennes Thibaud (Dom Morice, Mémoires, tome I, col. 353 : Iste Tetbaldus factus episcopus auxilio parentum matris suae duxit uxorem filiam Alvei Namnetensis Archidiaconi nomine Oirelan, de qua genuit filium Galterium. Qua defuncta duxit aliam nomine Genragant de qua suscepit filios Menguenei de Guirchia & Triscannum.) et celle de Raoul le Large (Guillotel H., op. cit., no 51 : animae Junargandis uxoris suae). Contrairement aux deux premières, la dernière n’eut pas de fils baptisé Triscan. Toutefois, on retrouve dans le lignage de Raoul le Large le nom de Robert, comme chez les Vitré, descendants de Rivallon vicarius. On retrouve encore une Jernagande chez les Boutier de Tinténiac, cf. Brand’Honneur M., Manoirs…, op. cit., p. 288.
41 Guillotel M., Le lignage, point de cristallisation d’une nouvelle cohésion sociale. Les Goranton Hervé de Vitré aux XIe, XIIe et XIIIe siècles, dans M.S.H.A.B., tome LXX, 1993, p. 65-87 ; Brunterc’h J.-P., Geoffroy Martel, Conan II…, op. cit., p. 314.
42 Guillotel J.-P., ibidem.
43 Boüard M. de, Guillaume le Conquérant, op. cit., p. 394 ; K. S. B. Keats Rohan, Le rôle des Bretons dans la politique de colonisation normande de l’Angleterre (vers 1042-1135), dans Mémoires de la Société d’Histoire et d’Archéologie de Bretagne, LXXIV, 1996, p. 181-207.
44 Guillotel H., Les actes…, op. cit., nos 22, 28, 31.
45 Guillotel H., op. cit., nos 30, 34, 42, 45, 56, 57, 60 ; Cartulaire de Saint-Georges de Rennes, no 3, 13, 21, 30, 32, 39, 55. Hidrochius avait un frère du nom d’Olivier (op. cit., no 58 : Hidrochus, Olivarius frater ejus). Ce nom appartenait sans doute au capital onomastique de son lignage puisqu’il le donna également à son fils (op. cit., no 39 : Heidrochus… Olivarius Heidrochii filius). Il eut peut-être un autre fils qu’il nomma Triscan (op. cit., no 21 : Triscan filius Haedochi).
46 Hidrochius intervient aux côtés d’Adèle auprès d’Eudes (op. cit., no 13), puis à la cour ducale, probablement après la capture d’Eudes (Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 60). Il s’agit d’une notice dans laquelle l’abbesse Adèle revendique une coutume sur la vente de vin dans le cimetière de Saint-Pierre-du-Marché. Le retour d’Hidrochius dans la mouvance suppose que cet acte est postérieur à la capture du comte Eudes.
47 Guillotel H., op. cit., no 31, 42, 43.
48 Op. cit., no 31 : Raoul l’Escuyer, père de Raoul de Gaël, témoigne dans le même acte.
49 Cartulaire de Saint-Georges de Rennes, no 29 :… vendidit Rogerius Ascelini filius monasterium Sancti Georgii [ in ] Hyrhana villa… Le premier témoin de cette vente se nomme Alain le Roux (Alanus Ruffus). Pourrait-il s’agir du fils du comte Eudes ?
50 Saint-Georges-de-Gréhaigne est à moins de trois kilomètres au nord-est de Pontorson.
51 Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 22.
52 Il paraît d’ailleurs intéressant de souligner certaines similarités dans les listes de témoins des actes de 1032 et de 1056/1057. Le premier mentionne ainsi : Goranton (Gorenton), Ascelin (Adselinus), Raoul l’Anglais (Radulfus Anglus) et Audren (Aldronus) ; le second : Hervé fils de Goranton (Herveus filius Coranti), Roger fils d’Ascelin le moine (Rogerius filius Ascelini monachi), Raoul fils de Raoul l’Anglais (Radulfus filius Radulfi Englesi) et Audren (Aldroenus). Ces lignages auraient-ils tous des droits dans la région du Mont-Saint-Michel ?
53 Dom Morice, Mémoires, tome I, col. 403-404 : Cum Tetbaldus Cognomento Illegiatus commanens apud Marcilliacum in pago Redon, captus esset ab hominibus Eudonis Comitis…
54 Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 24, 46, 47, 48, 49, 50, 52.
55 Main II et son épouse Adélaide eurent trois fils. L’aîné, Eudes, mourut pendant la minorité de Conan II. Le cadet, Juhel, était encore très jeune, lorsqu’il apparaît avec ses parents auprès de Robert Ier de Vitré en 1050 (Keats-Rohan K., Crime et châtiment…, ibidem. : Mainus de Castro Felicensis, Adelaidis uxor ejus, Juthalis puer filius eorumdem qui vagiens adductus inter amplexus matris ab Hernaldo monacho duodecim denariis pacificatus quievit…) et un peu plus tard à la cour de Guillaume le Bâtard (Fauroux M., Recueil des actes…, op. cit., no 162). Encore dépendant de sa mère, il ne pouvait accompagner son père dans ses chevauchées. Ainsi ce dernier se rendit-il seul en Normandie lorsqu’Adélaïde se retrouva probablement à nouveau enceinte (op. cit., no 160, 161). Main II disparut peu après, suivi quelques années plus tard par Juhel. Dans le courant des années 1060, Adélaïde se retrouva avec un fils unique, Raoul, qui tomba à son tour gravement malade. Mais, le Ciel s’émût des prières de cette veuve éprouvée par la perte de deux fils et d’un mari. Ainsi, la guérison de Raoul fut-elle à l’origine du prieuré de la Trinité de Fougères (Dom Morice, Mémoires, tome I, col. 423-424 : Defuncto Mainone Filgeriarum Domino, sed & Judhale filio ejus jam mortuo Adelaidis uxor ipsius Mainonis cum unico filio suo Rodulfo vidua remansit. Quem Rodulfum non longe post mortem patris gravissima quadam sed tamen transitoria egritudo in tantum oppressit ut non esset dubium quin mortem minaretur. Quod videns mater misera quo se verteret nesciebat. Tandem conversa ad Deum flebilibus cum vocibus deprecata est ut suum sibi filium de tanto mortis periculo festinaret eripere…). En 1055, une vente d’un moulin à Ercé-près-Liffré eut lieu au château de Fougères sans que Main II ou Juhel ne soit mentionné. Main n’était-il pas déjà mort ? Ses dernières apparitions vers 1050-1056/1057 ne s’y opposeraient pas. (Archives départementales du Maine-et-Loire, Livre blanc de Saint-Florent de Saumur, fol. 64 vo : anno ab incarnatione domini nostri ihesu xpi millesimo quinquagesimo quinto in castro quod vocatur felgerias.) Quant à Juhel, s’il vivait encore vers 1060-1064, les sources ne révèlent pas une grande activité de sa part dans la région.
56 Fauroux M., Recueil des actes…, op. cit., no 160, 161, 162 : la présence de Néel de Saint-Sauveur auprès de Guillaume de Normandie entraîne une nouvelle datation de ces actes. Ils sont nécessairement antérieurs au bannissement dont fut victime le vicomte de Cotentin entre 1054 (Fauroux M., Recueil des actes…, op. cit., no 132 : dernière apparition datée de Néel auprès de Guillaume. Elle eut lieu avant septembre) et 1056/1057 (Cartulaire de Saint-Aubin d’Angers…, op. cit., no 677 : mention de Néel auprès du comte Eudes en Anjou).
57 Main II entraîna dans la mouvance normande certains fidèles qui ne regagnèrent la Bretagne que bien plus tard. Ainsi Thibaud fils de Bernier fréquentait-il la cour de Conan II dès 1040-1047 (Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 50). Il accompagna systématiquement Main II dans ses déplacements en Normandie (Fauroux M., op. cit., no 160, 161, 162) et resta attaché à Guillaume le Bâtard jusqu’au moins 1063 (op. cit., no 157). Ce n’est qu’à la mort de Conan II qu’il revint en Bretagne (Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 68bis). Une reprise de Fougères par le fils d’Alain III, à la faveur de la disparition de Main II, l’empêchait-elle de rentrer ? Ou, au contraire, l’autorité du duc breton restait-elle suffisamment faible pour lui permettre de fréquenter la cour normande ? De même, un certain Hugues Brito, témoignait dans les mêmes actes normands que Main II et Thibaud fils de Bernier. Or, en 1068, il céda à Saint-Martin de Troarn la dîme de sa terre de Filgeriis, Bates D., Regesta…, op. cit., no 280, 281. Il s’agirait de Feugères dans la Manche, toutefois la ressemblance avec Fougères est troublante. Ce toponyme normand semble d’ailleurs poser quelques problème d’identification. Ainsi, lui rattache-t-on hypothétiquement un certain Néel de Felgoriis et son frère Raoul dans un acte du début du XIIe siècle, Musset L., Les actes de Guillaume le Conquérant et de la reine Mathilde pour les abbayes caennaises, Caen, Société des Antiquaires de Normandie, Mémoires de la Société des Antiquaires de Normandie, tome XXXVII, 1967, no 27. Est-ce un hasard si ces noms nous renvoient aux lignages de Saint-Sauveur et de Fougères ?
58 Brand’Honneur M., Manoirs…, op. cit., p. 101-102 : le basculement de Hervé de Martigné serait à l’origine de la création de la Guerche.
59 Keats-Rohan K., Crime et châtiment…, op. cit., p. 27-28.
60 Marchegay P., Charta fundationis, prioratus de Carbeio, dans Archives d’Anjou, Angers, tome II, 1853, p. 1-9, p. 1-2.
61 Brand’Honneur M., op. cit., p. 104-105 ; Brunterc’h J.-P., Puissance temporelle…, op. cit., p. 67.
62 Brand’Honneur M., ibidem.
63 Les années 1047-1057 sont marquées par un fléchissement de l’activité de la chancellerie ducale. Sur les vingt-cinq actes de Conan II, deux datent certainement de 1047-1057 (Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 54, 55 ; encore que le second soit de 1057 mais postérieur à la défaite d’Eudes) contre huit de 1040-1047. Les autres semblent en grande majorité postérieurs à la capture d’Eudes par son neveu.
64 Successeur du sénéchal Geoffroy fils de Glevis. Il épousera la veuve de ce dernier et occupera ses fonctions sous Geoffroy Grénonat (Guillotel H., La place de Châteaubriant dans l’essor des châtellenies bretonnes (XIe-XIIe siècles), dans Mémoires de la Société d’Histoire et d’Archéologie de Bretagne, tome LXVI, 1989, p. 5-46, p. 24). Il semble à l’époque au début de sa carrière.
65 Le nom d’Aubry est rare. Il est toutefois porté par un bâtard de Raoul le Large.
66 Guillotel H., Les origines du bourg de Donges. Une étape de la redistribution des pouvoirs ecclésiastiques et laïques aux XIe-XIIe siècles, dans Annales de Bretagne, tome 84, 1977, p. 31-68.
67 Brunterc’h J.-P., Puissance temporelle…, op. cit., p. 66, note 233.
68 Il était accompagné ici de son frère Thibaud dont il s’agissait apparemment de sa seule apparition. Michel Brand’Honneur ne fait pas figurer ce dernier dans sa généalogie des seigneurs de La Guerche.
69 Carioc possédait des droits à Piré-sur-Seiche.
70 Brand’Honneur M., Manoirs…, op. cit., p. 265.
71 Un fidèle de Conan II dès sa minorité. En 1090-1135, il intervient auprès de Guy de Laval et d’André de Vitré au sujet de Bréal-sous-Vitré (Cartulaire de l’abbaye de Saint Serge…, op. cit., tome I, B 4, p. 2-4 : consilio cujusdam forestarii Hervei nomine). Son frère Robert est moine, peut-être de Marmoutier (Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 50, 57).
72 Probablement Servon-sur-Vilaine. Le lignage devait être modeste et dépendre de Vitré. On trouve Geoffroy de Servon vers 1060 dans l’entourage des Martigné (Dom Morice, Mémoires, tome I, col. 415 : Gaufridus de Servon), ainsi que Hubert de Servon et son fils à Vitré en 1093. Il s’agit peut-être d’Arthur de Gahard à la fin du XIe siècle (Dom Morice, Mémoires, tome I, col. 387).
73 Peut-être l’occupant du site énigmatique de Champ lion, autrefois Champ Léon, en Saint-Sauveur-des-Landes, cf. Brand’Honneur M., Manoirs…, op. cit., p. 55-56.
74 Le nom de Frioul le rattache-t-il aux vicomtes de Nantes (Keats-Rohan K., Le problème de la suzeraineté et la lutte pour le pouvoir : la rivalité bretonne et l’état anglo-normand, 1066-1152, dans M.S.H.A.B., tome LXVIII, 1991, p. 45-69, p. 63). Il appartiendrait au lignage de Montgermont.
75 Geoffroy de Mayenne et Geoffroy Pape-Bœuf, cf. Brunterc’h J.-P., Puissance temporelle…, op. cit. La présence du premier pourrait permettre de dater cet acte après la mort du comte du Maine en 1051.
76 Tours était alors tenue par Geoffroy Martel. Il autorisa probablement le passage de Conan II, ce qui suppose une accalmie dans leurs relations ou du moins une sorte de modus vivendi. La question de Craon n’aurait-elle pas été déjà réglée ?
77 Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 54.
78 Baluze E. (éd.), Chronique de Quimperlé, op. cit., p. 265 : MLIV… Hoël principatum Nannetensium adipiscitur Cornubiae comes.
79 Quaghebeur J., La Cornouaille…, op. cit., p. 104, tableau 3.
80 Quaghebeur J., Stratégie lignagère et pouvoir politique…, op. cit., p. 17 et La Cornouaille du IXe au XIIe, op. cit., p. 126. Comme le fait remarquer l’auteur, il n’était alors pas prévisible que Conan mourrait prématurément, permettant à Hoël de bénéficier d’une dévolution de pouvoir inespérée. Toutefois, cette alliance montrait bien la place que les Cornouaille entendaient occuper au sein du duché.
81 Contrairement à son père, Hoël ne pouvait invoquer un mauvais état de santé pour échapper à ses obligations vassaliques envers le duc. Pourtant, il n’apparaît jamais dans les actes de Conan II.
82 Brunterc’h J.-P., Puissance temporelle…, op. cit., p. 68.
83 Guillot O., Le comte d’Anjou…, op. cit., tome I, p. 79 et suiv.
84 Guillot O., op. cit., p. 67, note 295. Sur les Bellême, cf. Louise G., La seigneurie de Bellême (Xe - XIIe siècle), Flers, Le Pays Bas-Normand, no 199-202, 1990-1991, 2 vol.
85 Lemesle B., La société aristocratique dans le Haut-Maine (XIe-XIIe), Rennes, PUR, 1999 : Herbert Bacon était le frère d’Hugues III et donc l’oncle d’Herbert Eveille-Chien, mort entre 1032 et 1035 alors que son fils Hugues était encore enfant. L’hostilité entre Gervais et Herbert Bacon n’était pas récente. Le comte aurait ainsi interdit pendant deux ans l’entrée de la cité au nouvel évêque afin de s’emparer du trésor de Saint-Julien, cf. Busson, Ledru (éd.), Actus Pontificum Cenomannis in urbe degentium, Le Mans, Archives historiques du Maine, 1902, p. 363 : Qui cum esset benedictionem adeptus, Herbertus comes, cognomine Baco, avunculus Herberti, qui fuit temporis Avesgaudi episcopi, invidiae stimulo inflammatus, eo quod rebus ditior vel melior illo diceretur a multis, simulque causa invadendi thesaurum sancti Juliani, per duos annos, aditum intrandi prohibuit ei. Il est vrai que Gervais avait hérité de la puissante seigneurie du Château-du-Loir ce dont le comte avait pris ombrage.
86 Gervais profita peut-être de l’absence de Geoffroy Martel lors du siège de Tours.
87 Guillot O., op. cit., p. 66, note 286.
88 Peut-être à l’occasion du voyage de Geoffroy Martel à Rome pour le couronnement d’Henri III à la Noël 1046, cf. Guillot O., op. cit., p. 66.
89 Gersent, mère d’Étienne-Henri, fut répudiée avant 1049, puisque son cas fut évoqué devant le pape Léon IX au concile de Reims le 3 octobre 1049 : Vocavit etiam comitem Theobaldum quoniam suam dimiserat uxorem, cité par Bur M., La formation du comté de Champagne, v. 950-v. 1150, Nancy, Mémoires des annales de l’Est, no 54, 1977, p. 199, note 22.
90 Busson, Ledru (éd.), Actus Pontificum Cenomannis in urbe degentium, op. cit., p. 365 : Videns ergo Gaufridus quod, consilio domni Gervasii episcopi, ad ruinam et suum detrimentum, Hugo comes uxorem fortissimam duxisset…
91 La guerre entre Hugues IV et Geoffroy Martel éclata avant que le comte d’Anjou n’emprisonne l’évêque Gervais. Ce dernier événement dut avoir lieu au plus tôt en mars 1047 et avant le concile de Reims début octobre 1049, approximativement en 1048, cf. Guillot O., Le comte d’Anjou…, op. cit., tome I, p. 67-68, note 297. La prise de Craon ayant eu lieu cette même année, pourrait-elle expliquer la violente colère de Geoffroy Martel à l’égard de Berthe ?
92 Actus Pontificum…, op. cit., p. 365 : Hugo cum suis militibus propter uxorem abiit.
93 Ibidem. : Gaufridus autem castellum Lir igne cremavit.
94 Ibidem. : Judam portans in pectore, mandavit in dolo Gervasium episcopum ut traderet eum. Quem traditum misit in carcerem, ac tenuit eum in vinculis… En 1050, Léon IX excommunia Geoffroy Martel pour cela.
95 Guillot O., op. cit., tome I, p. 69-72.
96 Op. cit., tome I, p. 67-69.
97 Guillaume de Poitiers, p. 16 : Tres interea centuriae, quas reliquerat, subsequentes inuestigando (timebant enim ejus fidentiae) repente comitem Tedbaldum perspiciunt cum equitibus quingentis.
98 Op. cit., p. 14 : Rex etenim Henricus contumeliosis Gaufredi Martelli uerbis irritatus, exercitum contra eum duxit et castrum eius quod Molendinum Herlae uocabatur, in pago Andegauensi, cum manu ualida obsedit et expugnavit. Mouliherne, dép. Maine-et-Loire, ar. Saumur, cant. Longué-Jumelles.
99 Guillot O., op. cit., tome I, p. 74.
100 Geoffroy Martel se sépara de son épouse Agnès entre janvier 1049 et le 15 août 1052, cf. Guillot O., op. cit., tome I, p. 77.
101 Cet événement pourrait être une conséquence de la répudiation de la sœur de Hugues IV, Gersent, par le frère de Berthe, Thibaud de Blois.
102 Anselme Père, Histoire généalogique et chronologique de la maison royale de France, des pairs, grands officiers de la couronne, Paris, Compagnie des libraires, 1726-1733, 9 tomes, tome III, p. 47 : « Après la mort de son mary (sic.), Berthe se réfugia en Bretagne avec ses enfants, où Hoël, comte de Nantes, luy (sic.) donna un azile (sic.) contre le comte d’Anjou. Elle mourut en 1085, selon la Chronique de Kemperlé. »
103 Guillot O., op. cit., tome I, p. 86-87.
104 Guillaume de Poitiers, p. 62-63 : Idcirco germanam Hereberti, ex partibus Teutonum suae munificentiae maximis impensis adductam, nato suo conjugare decrevit,…. Les éditeurs de ce texte ne croient pas à la fuite de Berthe en Germanie et préfèrent reprendre l’explication de Latouche selon laquelle il s’agirait d’une erreur. On aurait confondu Teutonum et Britonum (ibidem, note 2) : Berthe aurait en fait trouvé refuge auprès de Conan II. Outre le fait qu’elle trahisse le texte, cette hypothèse paraît peu conciliable avec l’agitation régnant alors en Bretagne.
105 Busson, Ledru (éd.), Actus Pontificum…, op. cit., p. 366 : Cives vero Cenomanici uxorem Hugonis, cum infantibus, plorantem, per unam portam projecerunt, et Gaufridum comitem gaudentem intrare fecerunt.
106 Busson, Ledru (éd.), Actus Pontificum…, op. cit., p. 366 : Comite autem Hugone, secundum legem Christianorum sepulto, Gaufridus comes honorem suscepit usque ad decem annos.
107 Cf. supra.
108 Ce dernier revirement aurait pour origine le mariage du duc de Normandie avec Mathilde de Flandre vers 1050-1051. Le père de cette dernière, Baudoin V se rapprochait alors de l’Empereur, ce qui fit sans doute craindre au roi que la menace qu’il venait d’écarter en Anjou ne réapparaisse en Normandie. Cf. Guillot O., Le comte d’Anjou…, op. cit., p. 78-79.
109 Un acte de l’abbaye Saint-Vincent du Mans datant du 25 novembre 1058 qualifie encore Herbert II de jeune garçon (puerulus). Cartulaire de l’abbaye de Saint-Vincent (ordre de Saint Benoit), [Cartulaire de Saint-Vincent du Mans] publié et annoté par l’Abbé R. Charles et le Vte Menjot d’Elbenne, Premier cartulaire : 572-1188, Mamers Le Mans, Société historique et archéologiqe du Maine, 1886-1913, p. 18, no 15 : Item Warinus ejusdem Reginaldi nepos. Actum hoc Cenomannis, in capitulo Sancti Juliani, XVIIo. kal. Xbris, luna XXVa, Hainrico Rege, Herberto puerulo comite, Vulgrino presule, Ernardo notario.
110 Le comte Eudes avait même donné sa fille Adèle à Geoffroy Martel entre 1049 et 1054/1055. Celle-ci dut mourir prématurément puisque bientôt l’épouse légitime du comte d’Anjou, Grécie, réapparaissait.
111 Brunterc’h J.-P., Geoffroy Martel…, op. cit., p. 313.
112 Bur M., La formation…, op. cit., p. 200-201.
113 Robert le Bourguignon est déjà investi de l’honneur de Craon le 26 mars 1053 (cf. Guillot O., Le comte d’Anjou…, op. cit., tome II, C 143).
114 Guillaume d’Arques, comte de Tallou, était fils de Richard II et frère de Mauger, archevêque de Rouen. Durant la guerre du Maine, entre Normandie et Anjou, son attitude suspecte aurait poussé le duc de Normandie à occuper son château. Mais le seigneur soudoya la garnison ducale et s’enferma dans sa forteresse où le duc vint l’assiéger. Malgré le secours du roi, Guillaume de Normandie s’empara finalement d’Arques à la fin de l’année 1053. Dhondt J., op. cit., p. 475-476. Auparavant, le roi encouragea peut-être la révolte de Guillaume Busac, comte d’Eu. Exilé par le duc de Normandie, Guillaume se réfugia auprès d’Henri Ier qui le maria à Alix de Soissons. Il est difficile de dater cette révolte, cependant elle pourrait avoir eu lieu entre septembre 1052 et octobre 1053, cf. Dhondt J., op. cit., p. 473-474.
115 Dhondt J., op. cit., p. 479.
116 Neveu F., La Normandie des ducs…, op. cit., p. 134.
117 Dhondt J., op. cit., p. 476-478. Mortemer, dép. Seine-Maritime, ar. Dieppe, cant. Neufchâtel-en-Bray.
118 Guillot O., op. cit., tome I, p. 91 note 408.
119 Ambrières, département de la Mayenne, arrondissement de Mayenne, canton d’Ambrières.
120 Guillaume de Poitiers, p. 33 : Exercitus nostri mox diuulgat discessu, Martellus in auxilium suum adiunctis Guillelmo Pictauorum comite domino suo et Eudone Britannorum comite, necnon undequaque copiis collectis, Ambreras contendit. Une note correspondant à ce passage désigne à tort le frère d’Alain III sous le nom d’Eudes de Porhoët.
121 S’il ne mentionne pas le comte Eudes, Guillaume de Poitiers insiste sur la participation des Bretons à l’expédition de 1054. Compte tenu des rapports privilégiés qu’il entretenait avec le comte d’Anjou et de l’hostilité qu’il vouait à Guillaume de Normandie, on peut supposer qu’Eudes suivit l’ost royal en Normandie (Guillaume de Poitiers, p. 46-47 : Eas ob res, post consultationem infausto omine communicatam, edicto regio bellum iubente, innumerosissimae copiae in Normanniam expeditae sunt. Burgundiam, Aruerniam, atque Wasconiam properare videres horribiles ferro ; imo vires tanti regni, quantum in climata mundi quatuor patent cunctas ; Franciam tamen et Britanniam quando nobis uiciniores, tanto ardentius infestas). (Cartulaire de Marmoutier pour le Perche, publié et annoté par M. l’Abbé Barret, Mortagne, 1894 (Documents sur la Province du Perche, 3e série, no 2), no 5 : + Signum Ivonis Sagiensis episcoi. Testes de auctoramento comitis Gauffredi : Comes Eudo, Odo, frater regis Henrici…
122 Musset L., Autour des modalités juridiques de l’expansion normande au XIe siècle : le droit d’exil, dans Musset L. et alii, Autour du pouvoir ducal normand Xe-XIIe siècles, Cahier des Annales de Normandie, no 17, Caen, 1985, p. 45-59 ; Van Houts E. M. C., L’exil dans l’espace anglo-normand, dans La Normandie et l’Angleterre au Moyen Âge, Actes du colloque de Cerisy-la-Salle (4-7 octobre 2001), Caen, Publication du CRAHM, 2003, p. 117-127.
123 Neveu F., La Normandie…, op. cit., p. 112-119. Ce complot avait pour but d’assassiner le jeune duc pour le remplacer par Guy de Bourgogne, seigneur de Brionne, fils de Renaud de Bourgogne et d’Adèle de Normandie, fille de Richard II, sœur de Robert le Magnifique. Contrairement à l’avis de F. Neveu, il nous semble évident que la bâtardise de Guillaume explique au moins partiellement ce soulèvement : Guy de Bourgogne était lui aussi petit-fils de Richard II, par sa mère il est vrai, mais issu d’une union légitime.
124 Wace, Roman de Rou, A. J. Holden (éd.), Paris, 1970-1973, 3 vol.
125 Delisle L., Histoire du château et des sires de Saint-Sauveur-le-Vicomte, Valognes, 1867, 2 tomes, rééd. du volume I, Brionne, G. Monfort, 1980, p. 20-21 ; Douglas D. C., William the Conqueror, Londres, 1964, p. 54 ; Boüard M. de, Guillaume le Conquérant, op. cit., p. 131, 143.
126 Guillaume de Poitiers, p. 12-13 : Supplicia item consociis, quae capitalia ex æquo irrogarentur, condonare maluit ob rationabiles causas.
127 Ibidem : Nigellum alio tempore, quoniam improbe offensabat, exilio punitum fuisse comperio.
128 Sur l’intérêt historique de Wace, cf. Boüard M. de, Aux sources du Roman de Rou, dans Recueil de travaux offert à Clovis Brunel, Paris, Société de l’École des chartes, 1955, 2 vol., tome I, p. 178-182.
129 Brunterc’h J.-P., op. cit., p. 315.
130 Fauroux M., Recueil des actes des ducs de Normandie de 911 à 1066, Caen, Mémoires de la société des antiquaires de Normandie, tome XXXVI, 4e série, 6e volume, 1961, p. 305-307, no 132.
131 Marmoutier, cartulaire blésois [Cartulaire de Marmoutier pour le Blésois], abbé C. Métais (éd.), Blois, Moreau et Cie, 1889-1891, no xxxii, p. 40 : Hec omnia ut firmius roborarentur suo postea auctoramento francorum rex Henricus firmavit, eo videlicet anno quo filium suum regem fecit ordinari Philippum, paucis ante illam ordinationem diebus, tunc scilicet quando obsidebat castrum Theodemerense nuncupatum in pago carnoteno noviter a quodam Guaszone constructum, cartamque istam proprio, ut cernitur sigillo munivit testibus si et hinc adhibendi sunt istis quorum nomina hec sunt : […] Niellus vicecomes. Cartulaire de Marmoutier pour le Vendomois, publié sous les auspices de la Société Archéologique du Vendomois par M. de Trémault, Paris-Vendome, 1893, no cxvii, p. 191 : Haec omnia ut firmius roborarentur suo postea francorum Rex auctoramento Heinricus, ut promissum est, firmavit, eo videlicet anno quo filium suum fecit regem ordinari Philippum, paucis ante illam ordinationem diebus, tunc scilicet quando obsidebat castrum Teodemerense nuncupatum, in pago Carnoteno noviter a quodam Guaszone constructum, cartamque istam proprio, ut cernitur, sigillo munivit, testibus, scilicet hinc adhibendis istis quorum hec sunt nomina : […] Niellus vicecomes. Léopold Delisle rejetait cette identification (Delisle L., op. cit., p. 21, note 2).
132 Fauroux M., Recueil…, op. cit., no 219, p. 417 : Néel, qui semble avoir perdu son titre le 4 août 1060, a dû être remplacé par ce vicomte Eudes. Il s’agirait d’Eudes Haldub, fils de Richard dit Thurstan Haldub. Cf. Delisle L., op. cit., p. 22-23.
133 Guillaume de Poitiers, p. 12-13 : Supplicia item consociis, quae capitalia ex æquo irrogarentur, condonare maluit ob rationabiles causas.
134 Guy de Bourgogne, seigneur de Brionne, était le fils légitime de Renaud de Bourgogne et d’Adèle, fille de Richard II de Normandie, et donc sœur de Robert le Magnifique. La disparition du bâtard l’aurait conduit naturellement à la tête du duché.
135 Ibidem. : Recepto castro, in curia sua commanere eum concessit. Le siège de la forteresse de Brionne où s’était réfugié Guy après Val-ès-Dunes a pu durer trois ans : la soumission des rebelles ne se serait donc pas passée aussi rapidement que le laisse supposer le récit de Guillaume de Poitiers. Après sa soumission, Guy de Brionne préféra retourner en sa Bourgogne natale, cf. Boüard M. de, op. cit., p. 132.
136 Grimoult du Plessis, autre complice de Néel, fut emprisonné à Rouen et périt un peu plus tard dans des conditions obscures. Guillaume lui aurait d’autant moins pardonné qu’il n’appartenait ni à la haute aristocratie ni à l’entourage ducal, Cf. Neveu F., op. cit., p. 118.
137 Delisle L., op. cit., pp. 1-27 : Néel I, dit le vieux, célèbre pour ses faits d’armes au début du XIe serait mort vers 1042. Son fils Néel II, dit le jeune, lui aurait succédé et aurait suivi Guy de Brionne dans sa révolte contre le duc Guillaume.
138 Fauroux M., Recueil…, op. cit., no 23, p. 109.
139 Op. cit., no 43, p. 150 ; no 31, p. 120 ; no 49, p. 162 ; no 33, p. 124 ; no 34, p. 131 ; no 35, p. 134 ; no 55, p. 176 ; no 72, p. 210 ; no 76, p. 218 ; no 93, p. 245 ; no 100, p. 257 ; no 103, p. 262 ; no 110, p. 271 ; no 98, p. 253 ; no 160, p. 349 ; no 161, p. 350 ; no 141, p. 321 ; no 132, p. 307.
140 Op. cit., no 73, p. 214 : Nigellus vice comes, Nigellus filius ejus.
141 Bates D., Regesta…, op. cit., no 212 ; Musset L., Les actes de Guillaume le Conquérant et de la reine Mathilde pour les abbayes caennaises, Mémoires de la Société des Antiquaires de Normandie, tome XXXVII, Caen, Caron, 1967, no 21, p. 129 ; Bates D., op. cit., no 58.
142 Op. cit., no 48 dans le même acte est mentionné un vicomte Eudes. S’agit-il du successeur de Néel en Cotentin vers 1060 ?
143 Op. cit., no 30 : Nigellus de Constantino vicecomes (de Constantino figure en interligne).
144 Op. cit., no 260.
145 Gallia Christiana, XI, instr. 222 : Eadem namque nocte Assumtionis celeriter expetitus, ut Nigellum vicecomitem consanguineum suum defunctum sepeliret, summo mane ipsius festivitatis profectus est.
146 Ainsi, le vicomte Néel devait-il être au berceau lors de l’expédition d’Ethelred contre la Normandie vers 1000-1001. Ce serait donc à tort qu’on lui attribue l’anéantissement des envahisseurs anglosaxons, débarqués en Cotentin. Guillaume de Jumièges, qui nous rapporte cet événement ne parle nullement du « vicomte Néel », mais seulement de « Néel » : Quod ut Nigellus a speculatoribus comperit, militibus Constantiniensibus congregatis cum multitudine vulgi, repentino impetu super eos irruit, tantaque illos strage delevit, ut nullus penitus remaneret, qui facta posteris nuntiaret (Guillaume de Jumièges, vol. II, p. 12). Vers 1013, à l’occasion du conflit entre Richard II de Normandie et Eudes II de Blois, il est à nouveau question de « Néel de Cotentin » : Sumptisque ex Odonis comitatu alimoniis, eandem munitionem habundantissime replevit, Nigellum Constantiniensem atque Rodulfum Totiniensem necnon Rogerium filium eiusdem cum eorum militibus custodes in ea relinquens (op. cit., p. 22). Vers 1027, la garde de Chéruel lui aurait même été confiée, et c’est à ce titre qu’il aurait affronté l’armée d’Alain III venue envahir l’Avranchin : Cui Nigellus atque Aluredus cognomento Gigas pretitulati castelli custodes, cum suis occurrentes, et cum eo commisso certamine confligentes (op. cit., p. 58). En revanche, lorsqu’il énumère les complices de Guy de Brionne, Guillaume de Jumièges entend éviter toute confusion en désignant « Néel vicomte de Cotentin » : Is etenim fastu inuectus superbie plurimos proceres uelut Absalon ab eius fidelitate cepit auertere et in sue perfidie uoragine complicare in tantum ut Nigellum Constantiniensem presidem in hac conspiratione annecteret… (op. cit., p. 120). Le Néel, originaire du Cotentin, vainqueur des anglo-saxons, gardien de Tillières puis de Chéruel ne serait qu’un homonyme. Il pourrait s’agir de Néel le Vieux (Nigellus vetulus) encore vivant vers 1035 (Fauroux M., op. cit., no 89, p. 231). Ce personnage aurait eu pour fils Néel le jeune (Nigellus juvenis), que l’on a souvent assimilé à « Néel II de Saint-Sauveur » (Fauroux M., op. cit., no 111, p. 272 ; Delisle L., ibidem).
147 Fauroux M., op. cit., no 73, p. 214 ; Bates D., op. cit., no 197, p. 628 ; no 214, p. 674.
148 Bates D., op. cit., no 48.
149 Op. cit., no 54 : Néel de Constantino encore présent à la cour ducale vers 1081-1087.
150 BNF ms. lat. 12880 fol. 14 ro-vo : Notum sit omnibus presentibus et futuris quod ego Niellus vicecomes donum sex ecclesiarum de insula Grenerodii, quod dominus meus Willelmus Normannorum comes fecit liberum et quietum sicut in scripto quod de hoc ipso sic continetur et ab eodem comite formatum constat absque cuiuslibet calumnie inquietudine que de me vel de meis surgere possit sancto Martino Maioris Monasterii eiusque monachis perpetualiter pro anima mea annuo uxore mea Adila simul filiis nostris Rotgerio videlicet, Willelmo alteroque Willelmo et Girardo una cum sororibus eorum Emma, Bilelde atque Mahelde id ipsum similiter pro animabus suis annuentibus. L’acte original fut l’objet d’une vente chez Sotheby le 30 novembre 1971. L’acquéreur est inconnu mais le catalogue de la vente produit une photo réduite du parchemin, un vélin de 525 mm sur 360 mm de 25 lignes. Cf. Sotheby & Co., Catalogue de manuscripts on papyrus, vellum and paper on the 7th century to the 18th century from the celebrated collection formed by Sir Thomas Phillipps (1792-1872), The property of the Trustees of the Robinson Trust, Day of sale : Tuesday, 30th November 1971, lot no 488. Cf. Annexes, p. 28.
151 Bates D., op. cit., no 197 : Notum igitur perspicuitate istius carte fieri volumus fidelibus universis et maxime successoribus nostris quod Niellus alterius filius, donationem quam suus pater fecerat sancto Martino, apud Maius Monasterium, in capitulo, de sex ecclesiis consistentibus in insula que appellatur Greneroduim…
152 Gallia Christiana, tome IX, Instr., 231 : Ecclesia sancti Salvatoris est libera ab omnibus episcopalibus consuetudinibus a tempore vetuli Ricardi comitis, et Rogerii vicecomitis qui ecclesiam inchoavit, et liberam eam construxit, qui pro hac libertate ecclesiam S. Nicholai de Hulmo et vicum qui vocatur Giffanda in eadem villa sancta Mariae Constantiensi concessit. Deinde Nigellus vicecomes qui ibi monachos posuit & abbatiam inde fecit, ab omnibus consuetudinibus sibi monachos posuit & abbatiam inde fecit, ab omnibus consuetunibus sibi pertinentibus ex toto eam liberam & quietam fecit. Nepotes autem ejus, Nigellus videlicet & Rogerius hanc honorifice tenentes, suis propriis possessionibus augmentarunt et extulerunt ; ipsi enim dederunt, & c.
153 Selon l’extrait de la Gallia Christiana, le vicomte Néel en question établit les moines de Jumièges à Saint-Sauveur-le-Vicomte. Or, vers 1080/1-1085, Guillaume le Conquérant atteste la notice relatant l’installation des moines de Jumièges en l’église de Saint-Sauveur par le vicomte Néel (Bates D., op. cit., no 260). Il s’agit de la dernière apparition de Néel fils Néel. Probablement très âgé, il préparait son âme à l’approche de la mort.
154 La difficulté vient de la double interprétation de comes d’une part, et de vetulus d’autre part. Le titre de comes peut-être porté à l’époque par un comte au sens littéral du terme ou par un duc. S’il est probable que notre extrait désigne un duc Richard, encore faut-il savoir lequel : Richard 1er (942-996) ? Richard II (996-1026) ? Richard III (1026-1027) ? Le qualificatif vetulus semblerait logiquement désigner le plus ancien des trois. La date de fondation de l’église Saint-Sauveur, citée dès 998, ne contredirait pas cette hypothèse (dom Beaunier, dom Besse et alii, puis dom J. Becquet, Abbayes et prieurés de l’ancienne France : recueil historiques des archevêchés, évêchés, abbayes et prieurés de France, nouvelle édition par les Bénédictins de Ligugé, Ligugé-Paris, depuis 1905, tome VII, 155). Peut-être pourrait-on même situer cette fondation du vicomte Roger dans les années 989-996 en la rapprochant de la donation faite alors aux chanoines de l’église de Coutances par Richard Ier (Fauroux M., op. cit., no 6, p. 76-77) ? Dans un acte de Richard II datant de 1025, on remarque cependant la souscription d’un vicomte Roger suivant celle de Néel de Saint-Sauveur (op. cit., no 33, p. 124).
155 Selon l’extrait de la Gallia Christiana, le vicomte Roger obtint le privilège de l’église Saint-Sauveur en échange de la concession à Notre-Dame de Coutances de l’église Saint-Nicolas du Homme et du vicus de Giffaula situé en cette même ville. D’où Roger tenait-il ces biens ? Originaire du Homme, se serait-il établi vers la fin du Xe siècle à Saint-Sauveur-le-Vicomte ? Le Homme (aujourd’hui l’Isle-Marie) semble intimement lié aux Saint-Sauveur, ainsi cet acte de 1075 où la comtesse Adèle de Bourgogne rapporte qu’elle avait acheté de son frère Robert le Magnifique le château du Homme, puis que son fils Guy de Bourgogne, seigneur de Brionne, le lui avait injustement enlevé et l’avait donné au vicomte Néel, qui l’avait ensuite tenu en qualité de minister de la comtesse, et non à titre héréditaire (Musset L., Les Actes…, op. cit., no 21, p. 128-129).
156 Benoist E., Goelzer H., op. cit., nepos.
157 Delisle L. opte quant à lui pour « petit-fils ». Delisle L., op. cit., p. 27.
158 Dugdale W., Monasticon anglicanum, new edition by J. Caley et al., London, 1817-1830, reprinted 1846, 6 vols., tome V, p. 346-347.
159 Saint-Martin-d’Aubigny est à une dizaine de kilomètres au nord-est de Coutances.
160 Dalton P., Conquest, anarchy & lordship, Yorkshire (1066-1154), Cambridge, Cambridge University Press, Cambridge studies in medieval life & thought, 1994, p. 88-89. D. E. Greenway, Charters of the Honour of Mowbray 1107-1191, British Academy, 1972 ; Early Yorkshire Charters, The Honour of Richmond, Wakefield, 1935, vol. IV, no 19 : Nigellus d’Alben’pater Rogeri de Molbray ; Painter S., The family and the feudal system in twelfth century England, dans Speculum, janvier 1960, vol. XXXV, p. 1-16, p. 6.
161 Gallia Christiana, XI, instr. 222, précité.
162 Delisle L., op. cit., p. 25 ; Fauroux M., op. cit., no 147, p. 329-330 : Nigello quodam ad se vocato, qui sororem suam in conjugio habebat… En appui de cette hypothèse, un frère de Richard de Reviers se nomme Guillaume, nom que l’on retrouve chez les fils cadets de Néel de Saint-Sauveur. L. Delisle fait mention, pour la rejeter, d’une autre version du mariage de « Néel II », figurant dans l’ancienne chronique de Normandie en prose. Robert le Magnifique aurait donné en mariage une de ses sœurs à « Néel fils de Néel » pour récompenser « Néel Ier » de la glorieuse campagne qu’il venait de mener contre Guillaume de Bellême. Le duc aurait doté sa sœur de la seigneurie de Ballon, que le vicomte de Cotentin avait conquise sur Robert de Bellême. Si ce récit est romanesque, peut-être détient-il une part de vérité : les noms des enfants de Néel et d’Adèle se retrouvent tous dans le stock de la famille ducale.
163 Pour les hommes, Richard, Guillaume, Baudoin et Girard ; pour les femmes, Adèle, Emma, Bilehilde et Mathilde. Le nom d’Emma pourrait être éventuellement un héritage du premier mari d’Adèle.
164 Gilbert de Brionne, petit-fils de Richard Ier de Normandie, eut pour fils Richard de Bienfaite et Baudoin de Meulles. Le nom de ce dernier suggère une alliance avec les comtes de Flandre. L’existence d’une Mathilde chez les Reviers irait dans le même sens, l’épouse de Guillaume le Conquérant étant elle-même fille de Baudoin V de Flandre. Si cette piste s’avérait exacte, elle renforcerait l’influence du comte de Flandre dans les négociations autour du siège de Thimert. Cf. Dhondt J., ibidem.
165 Vers 1015, Robert comte de Mortain investit le monastère du Mont-Saint-Michel de son alleu de Tissey, pour le salut de son âme, de celles de sa première épouse, défunte, Bilehilde, de sa femme Asceline, et de ses fils Guillaume, Robert et Richard, Fauroux M., op. cit., no 16, p. 97. K. S. B. Keats-Rohan s’appuyant sur le même acte suppose que l’épouse de « Néel I de Saint-Sauveur » était « une fille de Robert d’Avranches et de Bilehildis dont le nom fut porté par une fille de Néel II », Keats-Rohan K. S. B., « Bilichildis », Problèmes et possibilités d’une étude de l’onomastique et de la parenté de la France du nord-ouest, in Keats-Rohan K. S. B., Settipani C., Onomastique et Parenté dans l’Occident médiéval, Oxford, The Contributors, Prosopographica et Genealogica, vol. 3, 2000, p. 57-68, p. 62-63. D’une part, cet auteur reprend la généalogie classique des Saint-Sauveur que nous contestons et, d’autre part, ne semble pas avoir vu que Bilehildis n’était probablement pas la fille de Néel mais celle de son épouse Adèle de Reviers. S’il y a parenté entre les vicomtes de Cotentin et les comtes d’Avranches, ce ne peut être qu’indirectement, via Adèle de Reviers.
166 Raoul d’Ivry, demi-frère, par sa mère Sprota, de Richard Ier de Normandie, exerça probablement la réalité du pouvoir ducal pendant la minorité de son « neveu » Richard II. Ce comte d’Ivry avait donné sa fille Emma à Osbern de Crépon, union dont était issu Guillaume fils Osbern, père de Guillaume de Breteuil, de Roger de Breteuil et d’Emma qui épousera Raoul de Gaël.
167 Ce Guillaume Caritas était l’oncle d’un certain Richard fils de Baudoin. Il fréquentait assidûment la cour de Guillaume de Normandie. Musset L., Les Actes…, op. cit., no 8 (pp. 83, 90), no 11 (p. 94), no 14 (p. 108) ; Bates D., op. cit, no 26, no 53, no 59, no 59 (I), no 82.
168 Entre 1049 et 1055, Guillaume Werlenc, comte d’Avranches, Guillaume Busac, comte d’Eu, Guillaume, comte d’Arques, furent exilés et Mauger, archevêque de Rouen fut déposé, Neveu F., La Normandie…, op. cit., p. 130-131.
169 Les origines de la famille de Montbray sont méconnues mais d’après Orderic Vital, Geoffroy brillait par sa noblesse (Orderic Vital, tome IV, p. 278). Originaire du Cotentin, l’évêque avait plusieurs frères : l’un s’appelait Roger et eut pour fils Robert de Montbray qui devint plus tard comte d’Angleterre. Un autre se nommait Mauger ; or, il s’agissait d’un nom rare à l’époque. Il est probable que les Montbray et l’archevêque Mauger étaient au moins liés par filiolage. Sur Geoffroy de Montbray, cf. Le Patourel J., Geoffrey of Montbray, Bishop of Coutances 1049-1093, dans Historical Review, vol. LIX, no ccxxxiv, 1944, p. 161-219 ; Musset L., Un grand prélat normand du XIe siècle : Geoffroy de Montbray, évêque de Coutances (1049-1093), dans Revue du département de La Manche, tome 25, 1983, p. 5-17. Chibnall M., La carrière de Geoffroi de Montbray, dans Les évêques normands du XIe siècle, Colloque de Cerisy-la-Salle (30 septembre-3 octobre 1993), Caen, Presses Universitaires de Caen, 1995, p. 279-293.
170 Dans la premier tiers du XIe siècle, Robert le Magnifique concéda au Mont-Saint-Michel, la moitié de l’île de Guernesey, les coutumes qu’il s’était réservées sur l’autre moitié de l’île, fief de son fidèle le vicomte Néel (Fauroux M., op. cit., no 73). Quelques années plus tard, Guillaume le Bâtard échangea, avec les moines du Mont, les îles de Serc et d’Aurigny contre la moitié de Guernesey concédée autrefois par son père et qu’il restitua à Ranulf fils d’Asketil (op. cit., no 111). Peu avant de quitter la Normandie, Néel fit également don à Marmoutier de domaines sis en Guernesey (Bibliothèque municipale de Grenoble, ms. 3909, tome XII, fol. 147 ro. Copie du XVIIe siècle par p. Mangon). L’archevêque Mauger possédait aussi des biens sur cette île et après avoir été déposé, il s’y retira.
171 La politique de Guillaume aurait été de favoriser sa famille maternelle, supposée plus sûre, cf. Boüard M. de, Guillaume le Conquérant, op. cit., p. 137-139.
172 Guillaume Werlenc, arrière-petit-fils de Richard Ier, s’exila en Italie du Sud. Neveu F., La Normandie…, op. cit., p. 129-130.
173 Notamment Raoul de Gaël, Raoul le Large ou Hervé fils de Goranton.
174 Cartulaire de Saint-Georges de Rennes, no v. Il est accompagné de son frère Ery.
175 Op. cit., no xiii.
176 Cartulaire de Saint-Georges de Rennes, no xxi (… illius terram quam filii Constantini ibidem tenebant de eo…), no lv (… illius terre quam filii Costentini ibidem de eo tenebant…).
177 Fauroux M., op. cit., no 224, p. 431 :… et quartam partam terre filiorum Constantini, scilicet sex vavassores, quod Nigellus filius Constantini dimisit consuli, quando ivit in Apuliam…
178 Cartulaire de Saint-Georges de Rennes, no xvi, précité.
179 Néel vient de l’Irlandais Niall (génitif Néill) adopté par les Normands sous la forme Njall, latinisée en Nigellus. Quant à Constantinus, ne pourrait-il pas s’agir d’un sobriquet signifiant que le personnage ainsi nommé venait du Cotentin ? Nous remercions Jean-Pierre Brunterc’h de nous avoir suggéré cette interprétation.
180 Fauroux M., ibidem.
181 Il se serait installé à Pleubian, près du port naturel de Port-Béni où il aurait fait souche. Constantin fils de Néel cité dans les actes de Saint-Georges de Pleubian serait peut-être son fils.
182 Cartulaire de Saint-Georges de Rennes, no xiii.
183 Guillot O., Le comte d’Anjou…, op. cit., tome I, p. 80-81.
184 Le 4 mai 1057, le fils aîné du comte Eudes, Geoffroy Boterel Ier était auprès du roi, cf. Brunterc’h J.-P., Geoffroy Martel, Conan II…, op. cit., p. 316. Parallèlement, Alain le Roux, un autre fils d’Eudes, apparaissait seul auprès du comte d’Anjou entre le 14 janvier 1056 et le 14 novembre 1060, cf. Bertrand de Broussillon A., Cartulaire de Saint-Aubin…, op. cit., tome I, no cclxxxvii : Alanus Rufus, filius Eudonis comitis. Pour la datation, cf. Guillot O., op. cit., tome II, C 214. Très vraisemblablement, tous deux cherchaient le soutien des alliés de leur père en vue de sa libération.
185 Brunterc’h J.-P., Geoffroy Martel, Conan II…, op. cit., p. 320.
186 Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 55.
187 Orderic Vital, livre III, p. 116 : Consilio Bertae matris suae se suumque patrimonium fortissimo duci Normannorum commendaverat…, cité par Guillot O., op. cit., tome I, p. 86, note 385.
188 Brunterc’h J.-P., Geoffroy Martel, Conan II…, op. cit., p. 320.
189 Le 15 novembre 1058, Herbert II est mentionné d’un acte de Saint-Vincent du Mans (Cartulaire de Saint-Vincent du Mans, p. 18, no 15 : Hainrico Rege, Herberto puerulo comite…). Un autre acte semble décrire la situation du Maine à cette époque : Gaufrido comite presidente, Herberto puero comite vivente, Henrico rege regnante (op. cit., p. 114-115, no 184). En fait, il ne s’agit que de synchronismes. Herbert II n’est pas présent dans le Maine mais sa légitimité progresse probablement depuis la défaite du comte d’Anjou à Varaville en 1057. Il y est qualifié de puer, ce qui nous placerait après le 15 novembre 1058 où il est encore puerulus, et avant la mort de Geoffroy Martel.
190 Ibidem. L’écrasement des Francs à Varaville en août 1057 précipita certainement les négociations.
191 Brunterc’h J.-P., Geoffroy Martel, Conan II…, op. cit., p. 323.
192 Selon Guillaume de Poitiers, Eudes aurait été emprisonné par son neveu (Guillaume de Poitiers, p. 72 : capto Eudone patruo suo, atque vinculis ergastularibus mancipato). En 1060, la comtesse Berthe était à la cour de son frère Thibaud de Blois, en compagnie de « l’autre comte de Bretagne ». S’agissait-il du fils de Berthe, Conan II, ou de son beau-frère, le comte Eudes qu’elle gardait ? (Cartulaire de l’abbaye cardinale de la Trinité de Vendôme, publié sous les auspices de la Société archéologique du Vendomois, par l’Abbé C. Métais, Paris, Picard, 1893, no cxlii : in plena curte comitis apud Blesis, quando ipse Tetbaldus comes et Berta comitissa et alius comes de Britannia erant ibi). Berthe était encore à Blois en 1061, cette fois sans le « comte de Bretagne » (Cartulaire de Marmoutier pour le Blésois, no xl : atque Berta, sorore sua britanniae quondam at cynomannes postmodum Comitissa).
193 Fauroux M., op. cit., no 147, p. 329-330 ; Dondht J., Les relations…, op. cit., p. 4.
194 Fauroux M., ibidem. Selon Jean Dondht, s’appuyant sur le nécrologe de Saint-Père de Chartres, Richard de Reviers serait mort le 21 juin 1060.
195 Ibidem.
196 Cartulaire de Marmoutier pour le Vendomois, no cxvii, p. 191 (précité) ; Cartulaire de Marmoutier pour le Blésois, no xxxii, p. 40 (précité).
197 Dondht J., ibidem.
198 Fauroux M., op. cit., no 147 : In anno igitur quo finitum esse intestinum bellum dinoscitur, quod inter regem Hainricum et Willelmum comitem diu duraverat supradictus miles Richardus a comite cum aliis Normanis missis fuerat, custodiendi gratia Tedmarum castrum : quod castrum cum habitatoribus suis tunc anathematum erat. Qui dum ibidem esset, infirmitate corporis qua et mortuus est tactus, diligenter animae suae detrimentum timens, Nigello quodam ad se vocato, qui sororem suam in conjugio habebat […].
199 Recueil des actes de Philippe Ier, roi de France (1059-1108), M. Prou (éd.), Paris, Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, Chartes et Diplômes relatifs à l’Histoire de France, 1908, no 2, p. 3-7. Albert fils de Ribald, qui vivait dans la première moitié du XIe siècle était le seigneur de Brézolles (Eure-et-Loir). Il était probablement apparenté aux Le Riche, possessionnés dans la vallée de la Seine moyenne et dans le sud de la région parisienne, et qui se rattachaient aux Vermandois donc à Charlemagne. Une sœur d’Albert fils de Ribald avait épousé Guazo de Thimert. Leur fils Hugues leur succéda ainsi qu’à son oncle mort sans enfant (Chédeville A., Chartres et ses campagnes, XIe-XIIIe siècles, Paris, 1973, p. 259-260).
200 La captivité d’Eudes fut peut-être un des sujets évoqués. En effet, Geoffroy Boterel Ier, fils du comte de Bretagne, et Néel, allié de ce dernier, étaient à l’époque proches du roi de France.
201 De nombreux disgrâciés partirent pour l’Italie du Sud. Néel aurait été d’autant plus enclin à s’y réfugier que le duc de Pouille était lui-même originaire du Cotentin. En mars 1065, Robert Guiscard donnait au monastère Sainte-Sophie de Bénévent le Castellum Novum qu’avait édifié Niellus dans la forêt de Ripalonga avec tous ses hommes et dépendances. S’agissait-il du vicomte Néel de Saint-Sauveur ? Recueil des actes des Ducs normands d’Italie (1046-1127), I Les premiers ducs (1046-1087), L.-R. Ménager (éd.), Bari, Societa di storia patria per la Puglia, Documenti e monographie, vol. XLV, 1981, no 14 : Ego supradicto Rubberto dux declaro q (uonia) m habeo castello novo qui fecit Niello in ipsa silva qui vocatur da Ripe Longe, qui michi est pertinentem et per inspiratione Dei omnipotentis aodem castello novo, qualiter illud fecit nominato Niello, congruum michi est illud pro anima mea et anima parentum meorum offerire in monasterio Sancte Sophie de civitate Beneventum, ut in futura vita requiem ego et parentes meos invenire possamus et mansionem apud altissimo domino accipere valeamus. Nous remercions le professeur Olivier Guillot de nous avoir prêté ce recueil d’actes si difficile à trouver.
202 Une donation de la comtesse Adèle de Bourgogne, mère de Guy de Brionne, du château du Homme en Cotentin montre les liens unissant son fils à Néel de Saint-Sauveur. L’absence de ce dernier lors de la donation d’un château qu’il tenait laisse supposer qu’en 1075, notre vicomte n’est toujours pas revenu en Normandie. N’était-il pas auprès de Guy de Bourgogne ? Musset L., Les actes…, op. cit., no 21, p. 128-129 : Quod postea Guido, filius suus, injuste sibi auferens, dedit illud Nigello vicecomiti. Si autem prefatus Nigellus dixerit se hoc jure herediatrio habuisse, sciendum est quia pater ejus hoc aliter minime habuit, nisi quia vicecomes erat ejusdem patrie et precepit sibi comitissa Adeliz ut sibi inde vetuli minister serviret.
203 Van Houts E. M. C., L’exil…, op. cit., p. 120.
204 Sur vingt-quatre actes conservés de Conan II, huit sont antérieurs à 1047 et treize très probablement postérieurs à 1057, cf. Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 53, 55, 56, 60, 61, 62, 63, 64, 65, 66, 67, 68, 69.
205 Op. cit., no 53.
206 Brand’Honneur M., Le lignage, point de cristallisation…, ibidem.
207 Brand’Honneur M., Manoirs…, p. 151, 266. Argentré-du-Plessis, Ille-et-Vilaine, Arr. Rennes, Cant. Argentré-du-Plessis.
208 Taillis, dans le canton de Vitré Ouest.
209 Tonnerre N.-Y., dans Chédeville A., Tonnerre N.-Y., La Bretagne féodale XIe-XIIIe siècle, Rennes, Éditions Ouest-France Université, coll. Histoire de Bretagne, 1987-1994, p. 42. Normand du Feu, établi à Liffré, intervient à l’est de Rennes, généralement auprès des Vitré et des Goranton Hervé. Normand apparaît en 1093, accompagné de son frère Guéhénoc, lors de la concession de droits accordés aux Moines de Sainte-Croix par Hervé fils de Goranton, cf. Dom Morice, Mémoires, tome I, col. 481 : Normandus de Fo, Guihenocus frater ejus.
210 Évidemment, cette notice pourrait ne donner qu’une vision partielle de la cour ducale. Rapportant la confirmation par Conan II de la donation de Montautour à Saint-Sauveur de Redon, elle n’aurait retenu que les personnages directement concernés : l’abbé de Redon d’une part, les détenteurs de droits sur l’église concédée d’autre part. Cependant, ce document rend très bien compte des appuis de Conan II au début de son principat effectif. En l’occurrence, on peut s’étonner de l’absence du comte Alain Canhiart. Ce dernier souffrait depuis longtemps de crises ophtalmiques qui pouvaient l’immobiliser plusieurs mois. Mort en 1058, le comte de Cornouaille était peut-être trop affaibli voire déjà mort, lorsque Conan II fut reçu à Rennes. Quoi qu’il en soit, son fils Hoël aurait pu être présent, mais ce dernier n’apparaîtra jamais dans les actes ducaux, avant son propre avènement à la tête de la principauté bretonne.
211 Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 53 : Roberto Vitreiensium custode.
212 Brand’Honneur M., Manoirs…, op. cit., p. 104.
213 Guillotel H., op. cit., no 64 : Robertus princeps de Vitre.
214 Guillot O., op. cit., p. 337-338 ; Brunterc’h J.-P., Geoffroy Martel, Conan II…, op. cit., p. 315.
215 Le grand-père de Robert Ier, Rivallon vicarius, intervient à la cour ducale dès le premier quart du XIe et meurt entre 1034 et 1040, cf. Guillotel H., op. cit., no 10, 13, 19, 20, 22, 23, 24, 28, 30, 31, 34, 38, 42 ; Brand’Honneur M., Manoirs…, op. cit., p. 99, 290. Son fils Triscan, présent dès 1013-1022, disparaît après 1032-1034, cf. Guillotel H., op. cit., no 13, 22, 23, 30, 34. Rivallon vicarius pourrait être né vers 980, Triscan vers 1000 et Robert vers 1020. À l’appui de cette hypothèse relevons qu’une fille de Rivallon est assez âgée pour devenir moniale à Saint Georges de Rennes dès la fondation de l’abbaye en 1024-1032. L’édition du cartulaire de Redon par Aurélien de Courson contient trois actes mentionnant Robert mais leur datation voire leur authenticité ont été remises en cause par Guillotel H., op. cit., no 16, no 53, no 64. Avant 1047, Robert souscrit avec son père l’acquisition d’une terre qui avait été donnée à un clerc par Rivallon vicarius pour l’instruction de son fils Gaultier encore jeune (parvulus), cf. Dom Morice, Mémoires, tome I, col. 386-387. Cet achat intervint probablement bien après la donation originelle, sans doute après la mort de Rivallon et peut-être celle de Gaultier. Ce dernier aurait-il succédé à son père dans sa charge de vicarius comme pourrait l’indiquer une donation à Marmoutier d’une église du Vendelais par Main II de Fougères, lors de la minorité de Conan II (Guillotel H., op. cit., no 46 : S. Walterii vicarii ; cf. Brand’Honneur M., Manoirs…, op. cit., p. 99) ? Cela paraît peu vraisemblable. Tout d’abord, Gaultier est un nom trop répandu pour se fier uniquement à une homonymie. De plus, Gaultier, vraisemblablement le cadet, devait être logiquement supplanté par son frère aîné puis par son neveu. Enfin, Triscan et Robert renoncèrent au titre de vicarius encore porté par Rivallon : pourquoi Gaultier l’aurait-il soudainement relevé ?
216 Sur les origines de Renaud le Bourguignon, cf. notamment W. Scott Jesse, The family of Robert The Burgundian and the creation of the Angevin March of Sable and Craon, Medieval Prosopography, autumn 1995, volume XVI, no 2, p. 31-67.
217 La maison de Craon (1050-1480), étude historique accompagnée du cartulaire de Craon, Bertrand de Broussillon A. (éd.), Paris, 1893, 2 tomes, tome I, p. 22.
218 Op. cit., p. 40-41, no 34 : Charte de Renaud donnée au profit de Saint-Aubin.
219 En supposant l’âge de tester vers quatorze ans.
220 Suhard le Jeune succédant à son frère aîné en 1028 au plus tard, la fille de ce dernier était nécessairement née avant cette date. Cartulaire de Saint-Aubin no 160, tome I, p. 186 : Fuit autem in hac donatione auctoramentum Fulconis comitis et Hucberti, Andegavorum presules, et Warini primum, deinde Suhardi, dominorum castri Credonis, ad quorum casamentum pertinebat. Pour la datation, cf. Guillot O., Le comte d’Anjou…, op. cit., tome II, C 41 : 13 juillet 1006-14 juillet 1028. Suhard le Vieux, père et prédécesseur de Garin, est attesté comme seigneur de Craon vers 1006-1020, cf. Guillot O., op. cit., tome I, p. 457, tome II, C 161 bis, et Cartulaire de Saint Aubin, op. cit., no 721.
221 Brunterc’h J.-P., ibidem.
222 Geoffroy le Barbu et son frère Foulque le Réchin étaient les fils d’Ermengarde, sœur de Geoffroy Martel. Sans enfant, ce dernier avait associé ses neveux au pouvoir quelques années avant sa mort. Le partage qu’il imagina pour préserver les intérêts du cadet tourna au détriment de l’aîné. Les huit ans de principat de Geoffroy le Barbu prirent rapidement l’allure d’un déclin quasi catastrophique. Finalement, Foulque le Réchin s’empara de son frère aîné. Cf. Guillot O., Le comte d’Anjou…, op. cit., tome I, p. 105-106.
223 Cf. Guillot O., Le comte d’Anjou…, op. cit., tome II, C 231.
224 Geoffroy Martel conserva le Maine dans sa main jusqu’à sa mort. Selon Guillaume de Poitiers, le comte du Maine fuit en Normandie par peur du comte Geoffroy. Olivier Guillot a relevé qu’il ne s’agissait peut-être pas de Geoffroy Martel mais de Geoffroy le Barbu, cf. Guillot O., Le comte d’Anjou…, op. cit., tome II, C 230.
225 Neveux F., La Normandie des ducs aux rois…, op. cit., p. 137-138 ; B. Lemesle, La société aristocratique dans le Haut-Maine (XIe-XIIe), Rennes, PUR, 1999, p. 33-36.
226 Guillaume la fit venir à grand frais des régions teutoniques où elle avait dû fuir avec sa mère et son frère.
227 Ibidem.
228 Brand’Honneur M., Manoirs…, op. cit., p. 114.
229 L’origine de ce conflit reste mystérieuse. Il pourrait s’agir de la construction par Rivallon Ier d’une tour à Dol sur le domaine épiscopal et contre la volonté du pontife Juhel, cf. Brand’Honneur M., ibidem. Le seigneur de Combour était déjà dans la mouvance normande peu après la conquête du Maine par Guillaume (Fauroux M., op. cit., no 159), cependant il paraît peu probable que ce renversement d’alliance remonte au début des années 1050, comme le suppose Michel Brand’Honneur. L’acte de Guillaume le Bâtard que Rivallon Ier souscrit date de 1063 au plus tôt. De même, les actes de Conan II laissent plutôt entrevoir ce conflit vers la même époque, cf. Guillotel H., Les actes…, op. cit., nos 57, 65, 66, 67.
230 Brand’Honneur M., Manoirs…, op. cit., p. 115.
231 Ibidem. ; Guillaume de Poitiers, 74-77 : At excedenti iam Britanniae limitem repent indicatur Gaufredum Andegauensem cum ingentibus copiis Conano fuisse coniunctum, et ambos postero die praeliatum affuturos. L’embarras de Guillaume de Poitiers dissimule mal le quasi-échec de cette expédition. En effet, Rivallon Ier se réconcilia bientôt avec Conan II, sans doute par l’entremise de sa sœur Innoguent, épouse du seigneur de Châteaubriant. Cf. Guillotel H., La place de Châteaubriant…, op. cit., p. 49. L’intervention d’Innoguent se déduit notamment de la donation de Rivallon confirmée par Conan II à Châteaubriant, Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 66.
232 Une charte de Renaud de Château-Gontier précise qu’il fut libéré en février 1064 après sa capture in bello a Britannis. Cartulaire de Marmoutier pour le Blésois, no xlii, d’après Keats-Rohan K. S. B., William I and the breton contingent in the non-norman conquest 1060-1087, dans Anglo-Norman Studies XIII, The Boydell Press, Woodbridge, 1991, p. 157-172, p. 165. Pour la datation, Guillot O., Le comte d’Anjou…, op. cit., tome II, no 247.
233 Guillot O., op. cit., tome II, C 279, Livre noir de Saint-Florent de Saumur, BNF, n. a. lat. 1930, fol. 98 vo-99 : Omnibus notum sit fidelibus tam presentibus quam futuris quod comes auzfridus junior virtutis magne et christiane religionis vir, ut apud omnipotentem dominum suorum impetret veniam peccaminum et anime avunculi sui majoris Gauzfridi parentumque suorum Dominus misereatur propiciis, Salmurensis ecclesie sancti Florentii monachis […] Ut autem firmius scriptulum hoc credatur et conservetur signum + dominice hoc propria manu impresst, videntibus nobilium personis videlicet istis Machello, Gauzfrido filio comitis Edonis […]. Cette donation est datée par Olivier Guillot entre le 14 novembre 1060 et le 19 juin 1068. Pour nous, le fait que cette donation soit faite pour le pardon des péchés de Geoffroy Martel révélerait la proximité de la mort de ce dernier.
234 Ce rapprochement se négocia peut-être autour de la libération de Renaud de Château-Gontier en février 1064. Geoffroy le Barbu était encore en Anjou le 3 avril 1064, cf. Guillot O., Le comte d’Anjou…, op. cit., tome II, no 247. D’après Guillaume de Poitiers, l’expédition normande en Bretagne se déroula alors que les blés étaient encore verts, peut-être autour de fin mai, début juin, cf. Keats-Rohan K. S. B., William I and the breton contingent…, op. cit., p. 166.
235 Guillot O., Le comte d’Anjou…, op. cit., tome II, no C 252. Il est intéressant de relever qu’au même moment, un autre fils d’Eudes, Alain le Roux se trouvait en Normandie alors que le Bâtard concentrait ses forces avant de traverser la Manche. Le frère d’Alain III menait ainsi une politique très opportuniste, plaçant ses enfants dans les différentes cours afin d’en tirer le meilleur parti.
236 On ne sait pour quel motif Hoël et Conan II s’étaient opposés.
237 Depuis plusieurs années, Geoffroy le Barbu s’opposait à son frère cadet Foulque le Réchin. En 1067, ce dernier eut finalement le dessus sur son aîné.
238 Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 58.
239 Contra., Keats-Rohan K. S. B., William I and the breton contingent …, op. cit., p. 166.
240 Everard J. A., The Foundation of an Alien Priory at Linton, Cambridgeshire, Proceedings of the Cambridge Antiquarian Society LXXXVI, p. 173, no 4 : Tempore Guillelmi gloriossimi Anglorum Regis Alanus qui vocatus est Ruffus filius Eudonis comitis Britannorum venit ad locum Sancti Jacuti ubi tunc erat abbas Guidomarus cum multitudine monachorum. Dedit ergo illis in elemosina pro anima patris sui Eudonis comitis et pro animabus parentum suorum vivorum et defunctorum in Anglia terra, ubi tunc erat comes constitutus a Rege Anglorum, quandam ecclesiam de Linton’…
241 Ibidem. : Testes qui hoc viderunt et interfuerunt his sunt Eudo comes pater Alani Ruffi qui tunc Normannia veniebat cum multi nobilibus viris apud cenobium Sancti Jacuti hospitandi gratia venerat et donum quod filius ejus dedit multum laudabat et Judicael filius Gicael et Hystomar filius Adam et multis alii.
242 Contrairement à certains de ses fils, Eudes n’apparaît pas dans les actes de Guillaume le Conquérant.
243 Esch A., Chance et hasard de transmission. Le problème de la représentativité et de la déformation de la transmission historique, dans Les tendances actuelles de l’histoire du Moyen Âge en France et en Allemagne, sous la direction de Jean-Claude Schmitt et Otto Gerhard Oexle, Paris, Publications de la Sorbonne, 2002, p. 15-29.
244 Dom Morice, Preuves, tome I, col. 427-428 : Bertha comitissa mater ejus & Gauffridus Nothus ejusdem frater, qui ei in regno successit.
245 La transmission du titre ducal par les femmes sera étudiée en deuxième partie.
246 Cf. p. 167 et suiv.
247 Tel n’était pas le cas du fils aîné d’Hoël, Alain, futur Alain IV Fergent, qui pouvait rassembler toutes les sources de légitimité, comte de Cornouaille et de Nantes du chef de son père, de Rennes de celui de sa mère, contrôlant ainsi simultanément pays roman et terre bretonnante, cf. Quaghebeur J., La Cornouaille…, op. cit., p. 126.
248 Revenant de Rome, Hoël avait fait le vœu d’enrichir les biens de saint Corentin s’il triomphait de ses ennemis de Cornouaille contre lesquels il se préparait à combattre, Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 82 : Dum consul Hoellus, olim Roma reversus, in hostes suos, scilicet Cornubie tyrannos, bellum pararet, vovit, si hostes superaret, ecclesie sancti Chorentini bona se ampliaturum.
249 Une donation d’Hoël à Saint-Aubin d’Angers est faite lors du siège mis devant Ancenis, aux confins du comté de Nantes, Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 80.
250 Rappelons qu’en Bretagne, le titre ducal s’était toujours transmis par successions légitimes.
251 Guillotel H., op. cit., no 76 : Ego Berta comitissa, Alani Redonensis ducis uxor, pro redemptione anime ejusdem et mee et filie nostre Hadevis comitisse, Hoelis ducis Britannie conjugis, et incolumitate filiorum suorum, meorum videlicet nepotum Alani et Mathiae…
252 Cf. Guillotel H., Les actes…, op. cit., p. xxxxxxxxxxxx.
253 Guillotel H., op. cit., no 76 : Vitalis et Gualterius Carnotenses, familiares comitisse Haduis neptis mee, testes. Au début de cette donation, Berthe utilise le terme de nepos pour désigner ses petits-fils, Alain et Mathias, issus du mariage d’Hoël avec sa fille. Or, même s’il s’agit de termes voisins, nepta n’est pas le féminin de nepos. Selon Niermeyer, nepta signifie nièce, fille du frère ou de la sœur.
254 Bur M., La formation du comté de Champagne…, op. cit., p. 194-195.
255 Op. cit., p. 200, note 24.
256 Op. cit., p. 199, 208-211.
257 Rappelons que Hugues IV avait lui-même épousé la sœur de Thibaud III, Berthe, veuve d’Alain III de Bretagne, mère de Conan II.
258 Le fils de Thibaud III fut baptisé du nom d’Henri. Ce n’est que plus tard qu’il prit le cognomen d’Étienne en signe de prétention à l’héritage troyen, cf. Bur M., op. cit., p. 199, note 22 et p. 200, note 27.
259 Raoul IV était fils de Raoul III de Valois et d’Alix de Breteuil, neveu de l’évêque Foulques d’Amiens et du comte Dreux d’Amiens-Vexin. Son oncle maternel, Hardouin de Breteuil, vicomte de Chartres, avait pour frère Galeran, abbé de Montiéramey, et Hugues, évêque de Langres, déposé par le concile de Reims de 1049. Quant à Adélaïde, elle était l’héritière du comté de Bar-sur-Aube, petite-nièce de l’évêque Béraud de Soissons, nièce du comte Renaud de Soissons et de l’archevêque de Reims Guy, la cousine germaine du vidame de Reims Manassès Calva Asina et du comte d’Arcis-Ramerupt Hilduin III, époux d’Adèle de Roucy. De ce mariage naquirent deux fils, Gaultier et Simon, et trois filles qui s’unirent, l’une à Barthélémy, fils d’Hugues Bardoul, l’autre à Herbert IV, dernier comte carolingien de Vermandois, et la troisième à Thibaud de Blois. Cf. Bur M., op. cit., p. 211-214.
260 Gallia Christiana, tome VIII, Paris, 1774, col. 1390 : Biennio post Radulfus episcopus Trecorensis anno 1134 ecclesie beate marie Blesencis concedit ecclesiam sanctis crucis de Quingampo, ut in ea abbatem et duodecim canonicos constituat ecclesie Burgi-medii subjectos.
261 Dufief A., Les Cisterciens en Bretagne, XIIe-XIIIe siècles, Rennes, PUR, 1997, p. 70-73.
262 Barthélémy J. B. A. A., Nouveau manuel complet de Numismatique du Moyen Âge et moderne, Paris, Librairie encyclopédique de Roret, p. 161-166 ; Cabinet de Numismatique Boudeau, Catalogue général illustré, Monnaies françaises provinciales. Duché de France, Normandie, Bretagne, Anjou, Maine, Touraine, Orléanais, Berri, Nivernais et Bourbonnais, Paris, 2e édition, p. 25, no 187, p. 26, no 190 ; Babelon J., Les monnaies racontent l’histoire, Paris, Fayard, coll. Résurrection du passé, 1963, p. 128 ; Dhénin M., Un denier de Chartres au types anépigraphe à la tête, dans Le club français de la médaille, bulletin no 58, 1er trimestre, 1978, p. 154-158 ; Bélaubre J., Histoire numismatique et monétaire de la France médiévale (de la période carolingienne à Charles VIII), précédée de : Nony D., Les Monnaies en Gaule avant les Carolingiens, Paris, Le Léopard d’Or, 1986, p. 210 ; Bompaire M., Dumas F., Numismatique médiévale, Turnhout, Brepols, coll. L’Atelier du Médiéviste no 7, 2000, p. 107 ; Coativy Y., La monnaie en Bretagne de l’an mil à 1499, Brest, Université de Bretagne occidentale, 2000. Cf. Annexe VI.
263 Jézéquel Y., Les monnaies des Comtes et Ducs de Bretagne, op. cit., p. 15-16.
264 Âgé d’au moins 67 ans en 1075, Eudes était soit déjà mort soit trop affaibli pour assurer son rôle politique, lorsque, deux ans plus tard, Geoffroy Boterel Ier semble prendre en main les intérêts du lignage. Cf. p. 106.
265 Cf. p. 105.
266 La fuite de Raoul de Gaël en Bretagne suite à sa participation à la révolte des earls en 1075 contre Guillaume le Conquérant en est un exemple manifeste.
267 L’importance de l’enjeu suggère qu’Havoise était bien issue du second mariage de Thibaud III de Blois, comme semble d’ailleurs le confirmer l’âge approximatif des époux. Née du premier mariage, Havoise aurait eu au moins 26 ans en 1075, ce qui paraît âgé. En revanche, si elle eut Adèle de Bar-sur-Aube pour mère, elle avait tout au plus 17 ans. Quant à Étienne, il mourut vers 1136 mais sa date de naissance n’est pas connue. Il n’est pas cité parmi les fils du comte Eudes dans la restitution de Bazouges vers 1056/1057, sans doute était-il trop jeune pour témoigner. Il se serait marié à une vingtaine d’années et serait mort vers 80 ans, ce qui est l’espérance de vie moyenne des hommes de son lignage. D’ailleurs, son dernier fils, Henri, affirme dans un acte de 1180 avoir atteint cet âge. Il serait donc né au début du XIIe siècle, ce qui recule d’autant plus la date de mariage de ses parents.
268 Guillotel H., Bretagne et papauté…, op. cit., p. 281.
269 Les fils d’Eudes établis en Angleterre auraient pu suivre Guillaume le Conquérant à Dol. Ce pourrait être une explication supplémentaire de « l’inertie » de Geoffroy Boterel Ier qui aurait craint de se trouver face à ses frères. Quoi qu’il en soit, il n’y a aucune trace dans les sources, d’une quelconque intervention de ce lignage lors de ce siège, ni d’une éventuelle opposition à l’époque entre la « branche bretonne » et la « branche anglaise ». Contra. Keats-Rohan K. S. B., Wiliam I and the Breton Contingent…, op. cit., p. 167 et suiv.
270 Dans une lettre non-datée, mais indéniablement postérieure au 27 septembre 1076, Grégoire VII exhortait Guillaume le Conquérant à ne plus soutenir la cause de l’archevêque Juhel, cf. Guillotel H., Bretagne et papauté…, op. cit., p. 280-281.
271 Suite aux injonctions de Léon IX dans sa lettre de 1050, Eudes plaça vers 1053-1054 sur le siège de Tréguier, Martin, ancien chapelain de Geoffroy Martel et chanoine du chapitre cathédral d’Angers. Le 13 novembre 1054, ce dernier, aux côtés de Barthélémy, archevêque de Tours, et d’Eusèbe Brunon, évêque d’Angers, fut l’un des prélats consécrateurs lors de la dédicace de l’église abbatiale de Cormery. Un peu plus d’un an après, il figurait parmi les pères d’un concile réuni à Chalon-sur-Saône vers la mi-février sous la présidence du légat pontifical Hildebrand, le futur Grégoire VII. (cf. Guillotel H., Le dossier hagiographique de l’érection du siège de Tréguier, dans Bretagne et pays celtiques. Langues, histoire, civilisation. Mélanges offerts à la mémoire de Léon Fleuriot, Saint-Brieuc-Rennes, 1992, p. 213-226, plus spécialement p. 216-217 ; Brunterc’h J.-P., Geoffroy Martel, Conan II…, op. cit., p. 312, note 4). La carrière épiscopale de Martin prouve que, par son choix, Eudes renforçait ses liens avec Geoffroy Martel tout en favorisant la réforme de l’Église.
272 Dom Morice, Mémoires, tome I, col. 102 : MLXXVI. Hoel faciens bella apud Comitem Gaufridum cognomento Granonem apud castrum Doli, Comite Guillermo Normanorum sibi auxiliante, per XL. Dies ingeniis ac aliis machinationibus obsedit ; quod minime capere potuit.
273 La tournure de la phrase donne le rôle principal à Hoël et non à Guillaume le Conquérant, comme le rapportent pourtant les sources de l’époque. Ce passage dut être réécrit postérieurement pour mettre en valeur le duc de Bretagne. Cette manipulation pourrait dater du XVe siècle, lorsque l’on cherchait à justifier l’indépendance immémoriale de la Bretagne à l’égard du roi de France, quitte pour cela à falsifier les sources.
274 Avec la prudence qui le caractérise, Hubert Guillotel avait préféré ne pas utiliser ce passage pour expliquer le siège de Dol de 1076. Cf. Guillotel H., Bretagne et papauté…, op. cit., p. 280, note 51.
275 Dans la formule de corroboration d’un diplôme accordé à l’abbaye de Montierneuf, le roi de France déclare, le 14 octobre 1076 : « Nous voulons également que soit clair pourquoi nous n’avons pas ordonné d’apposer à cette charte l’impression de notre sceau car nous ne l’avions pas avec nous ; en effet à ce moment nous nous étions rendu en grande hâte et de façon très intime à Poitiers auprès de Geoffroy, duc d’Aquitaine, afin qu’il nous prête aide contre Guillaume roi d’Angleterre et duc de Normandie, qui alors en Bretagne faisait contre nous le siège d’une place forte », cité par Guillotel H., op. cit., p. 279-280.
276 The Anglo-Saxon Chronicle. A Revised Translation, D. Whitelock with D. C. Douglas and S. I. Tucker (éd.), Londres 1961, p. 158, cité par Guillotel H., dans Bretagne et papauté…, op. cit., p. 280.
277 Chronicon Kemperlegiense, Étienne Baluze (éd.), op. cit., p. 265 : MLXXVII. Hoël a Vicecomite Eudone capitur, & infra undecim dies ab exercitu suo vi redditur. Devant les dates contradictoires proposées par les Chroniques Annaulx, la Chronique de Quimperlé paraît la source la plus fiable.
278 Guillotel H., De la vicomté de Rennes à la vicomté…, op. cit., p. 14-15.
279 Il n’apparaît jamais auprès de Geoffroy Boterel Ier.
280 Livre blanc de Saint Florent de Saumur, fol. lxxv, lxxvi : Hoc ipsum etiam comes goffredus filius comitis eudonis. cum venisset ad colloquium cum goffredo redonensi comite in regionem que ploasna dicitur. petente iohanne concessit.
281 À au moins 70 ans, Eudes n’était peut-être pas encore mort mais sans doute très affaibli. On fixe traditionnellement la date de la mort d’Eudes en 1079, cf. Dom Morice, Histoire…, op. cit., tome I, livre II, p. 80. Il aurait été inhumé en la cathédrale Saint-Étienne de Saint-Brieuc. Rien ne semble pouvoir le confirmer ou l’infirmer. Signalons qu’il existe sous le chœur de cette cathédrale, trois tombes médiévales non identifiées. Selon Du Paz, Eudes serait mort un 7 janvier, Du Paz A., Histoire généalogique de plusieurs maisons illustres de Bretagne, enrichie des armes et blasons d’icelles avec l’histoire chronologique des Evesques de tous les diocèses de Bretagne, Paris, Buon, 1620, p. 5.
282 Caspar E., Das Register Gregors VII, Berlin, 1920-1923, 2 vol., V, 23, p. 387-388 : Gregorius episcopus servus servorum Dei Oelli Gauffredo Redonensi item Gausfredo filio Eudonis, nobilibus comitibus Britannie, salutem et apostolicam benedictionem.
283 Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 80.
284 Chronicon Kemperlegiense, op. cit., p. 266 : MLXXXIV. Hoël Comes moritur Idibus April. Gauffridus Comes Redonensis nothus in captione apud sanctum Courentium moritur XXV. Octobris.
285 Guillotel H., op. cit., no 102 : Concedo etiam monachabus hujus loci consulatum meum de Johi quantum mihi pertinet et quodcumque antecessores mei carnales Alanus, Conanus, Eudo, Goffredus dederunt et sicut tenere concesserunt concedo et volo et jubeo esse firmum et ratum. Dans cette charte, Alain IV s’intègre dans la lignée des comtes de Rennes, sans y oublier d’ailleurs Eudes et Geoffroy Grénonat.
286 Quaghebeur J., La Cornouaille…, op. cit., p. 299, note 165.
287 La présence de l’abbé de Marmoutier Bernard suppose que ce dernier a succédé à Barthélémy, inhumé le 24 février 1084, cf. Dom Martène E., Histoire de l’abbaye de Marmoutier, tome I, p. 443. La fondation de Saint-Martin de Lamballe est sans doute postérieure à cette date, car on imagine mal Bernard, même élu du vivant de son prédécesseur, quitter Marmoutier avant la mort de ce dernier. Dès lors, si l’acte porte la date de 1083, c’est que les moines ont utilisé le style de Pâques. Or, en 1084, cette fête tombait le 31 mars ce qui signifie que la donation eut lieu au plus tard la veille, dernier jour de l’année précédente, cf. A Handbook of Dates, For students of British history, C. R. Cheney (éd.), revised by Jones M., Cambridge University Press, Royal Historical Society Guides and Handbooks no 4, 1945-2000.
288 Anciens évêchés, tome IV, chap. v, no i : juxta Lambalam terram ad burgum faciendum, et ad ecclesiam faciendam, et ad officinas monachorum faciendas… Pour une description de Saint-Martin de Lamballe, cf. Mussat A., Lamballe, Congrès archéologique de France, CVIIe session, Paris, Société Française d’Archéologie, 1950, p. 34-55 ; Déceneux M., La Bretagne romane, Rennes, Ouest-France, coll. Références, 1998, p. 55.
289 Arch. Dépt. Maine-et-Loire H 3713 : Livre blanc de Saint-Florent de Saumur, fol. 76 : Hamo vicecomes ; Anciens évêchés…, op. cit., tome IV, chap. v, I : Haimo vicecomes.
290 Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 67 : Vuillelmus filius Urfoen ; Anciens Evêchés, tome IV, chap. v, i : Guillelmus filius Urfoendi ; Livre blanc de Saint-Florent de Saumur, fol. 88 vo-89 : Guillelmus filius Urfoeni.
291 Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 66 : Roaldus, Aymo et Herveus filii ejus ; Livre blanc de Saint-Florent de Saumur, fol. 75 (Hamo filius Roaldi), fol. 77 (Hamon filius Roaldi) ; Les Anciens évêchés, op. cit., tome IV, chap. v, i : Haimo filius Roaldi.
292 Livre blanc de Saint-Florent de Saumur, fol. 75 (Hugo Taons), fol. 76 (Hugo cognomento Taon), fol. 88 vo-89 : Hugo Taon ; Anciens évêchés, op. cit., tome IV, chap. v, i : Hugo Taons. Ce personnage céda à Saint-Florent quatre arpents de terres à Roz.
293 Livre blanc de Saint-Florent de Saumur, fol. 75 (Herveus butellarius), fol. 76 (Herveus butillarius et Hamo frater ejus ; annuentibus Hamone et Hugone), fol. 77 (Herveus Butellarius, Hamo frater ejus) ; Les Anciens Evêchés, op. cit., tome IV, chap. v, i : Herveus Butellarius. Hervé fit donation à Saint Florent de son butellagium en Mezoit.
294 Livre blanc de Saint-Florent de Saumur, fol. 75 (Hamo filius Eveni), fol. 77 (Hamo filius Eveni), fol. 88 vo-89 (Hamo filius Eveni) ; Anciens évêchés, tome IV, chap. v, i : Haimo filius Evani.
295 Livre blanc de Saint-Florent de Saumur, fol. 77 : Goffredus cantor ; Anciens Evêchés, tome IV, chap. v, i : Gauffredus cantor. Il s’agit probablement du même personnage apparaissant dans un acte de Foulque le Réchin des années 1067-1076. Cf. Chauvin Y., Premier et Second livres des Cartulaires de l’abbaye Saint-Serge et Saint-Bach d’Angers, op. cit., 2 vol., no B 200 : Gaufridis cantoris, Josberti canonici Sancti Laudi. En effet, Geoffroy y est accompagné d’un certain Gosbert chanoine de Saint-Laud [d’Angers] que l’on retrouve auprès du comte Eudes d’une part lors de la restitution de Bazouges en 1056/1057 et de Geoffroy Boterel Ier d’autre part lors de la rencontre de Plouasne de 1077.
296 Livre blanc de Saint-Florent de Saumur, fol. 77 (Guihomarus) ; Les Anciens évêchés, op. cit., tome IV, chap. v, i : Guihummarus canonicus.
297 Anciens évêchés, tome IV, chap. v, ii.
298 Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 91 : Donation à Ste Croix de Quimperlé de sept villas des Cleruc par Alain IV contre les embuscades de Geoffroy Boterel Ier (1085-1086, avant le 8 décembre).
299 Livre blanc de Saint Florent de Saumur, fol. 88 vo-89 : Quod factum est Doli in platea iuxta ecclesiam sancti sansonis […] Actum anno ab incarnationne domini M. LXXXVII. VIII idus ianarii. Die epiphanie.
300 Ibidem. : Comes Goffredus. Guillelmus filius urfoeni. Hamo filius evani. Escaridus vicarius. Gaufridus filius junkenei, qui quatuar sunt et fide iussores et testes huius conventionis.
301 Guillotel H., op. cit., no 89 : Hac itaque sperande salutis, Alanus, cognomento Fergandus, comes Brittannie, fredus fiducia, ecclesiam Dolis in honorem sancte Trinitatis et memoriam beate Dei Genitricis sanctique Florentii confessoris fabricatam, rogatu et ammonitione domni Johannis Dolensis, a quo ipsa res cepit exordium, monachis sancti Florentii concessi. Actum est hoc in Nannetica urbe, tercia feria, pridie idus julii, anno fundationis ejusdem aecclesiae octavo, ab incarnatione vero Domini MLXXX VI. […] Signum Gironis filii Ansquitilli.
302 Livre blanc de Saint Florent de Saumur, fol. 86 vo : Anno ab incarnatione domini M. LXXX. VI. – concessit giro filius ansquitilli. Deo et sancto florentio ac monachis eius quicquid ipse in decima et in ecclesia plene filgeriae aliquomodo inclamabat. Vel habebat. Vel habere debebat […] Actum apud castellum ansketili in domo eiusdem gironis tercia VI idus decembris Alano brittanorum duce. Constancia eiusdem uxore. Silvestro redonensium presule.
303 Guillotel H., op. cit., no 43 : $. Anschitilli filii Hugonis.
304 Op. cit., no 45 ; Brand’Honneur M., Manoirs…, op. cit., p. 100.
305 Guillotel H., op. cit., no 45, 54, 56, 89, 102 ; Cartulaire de Saint-Georges de Rennes, no 39, 45. Livre blanc de Saint-Florent de Saumur, fol. 86 vo : Donation par Giro fils d’Asketil à Saint-Florent de Saumur de biens à Pleine-Fougères (Châteaugiron – 8 décembre 1086).
306 Livre blanc de Saint-Florent de Saumur, fol. 86 vo : Anno ab incarnatione domini M. LXXX. VI. – concessit giro filius ansquitilli. Deo et sancto florentio ac monachis eius quicquid ipse in decima et in ecclesia plene filgeriae aliquomodo inclamabat. Vel habebat. Vel habere debebat.
307 Guillotel H., op. cit., no 109 : […] ita prossus Deo et beato Martino Majoris Monasterii et nobis, annuente Conano filio eorum, dederunt et in perpetuum concesserunt et monachi nostri, Garinus videlicet de Lanrigant et Gilo filius Ansquitilli, apud Elradium catrum idem donum de manu prenominati comitis susceperunt.
308 BNF Ms. lat. 5441, t. III, p. 236 : (Donation à Marmoutier par Yves fils d’Urvoy de la chapelle Saint-Aubert et de l’église d’Antrain, en présence de Giro 1095) : Notum etc. quod Ivo filius Urvodii accepto beneficio nostre societatis dedit B. Martino majoris Monasterii et nobis medietatem decime capelle S. Otberti […] Testes Giro. Alanus filius comitis Conani. Hamelinus de Cornilliaco. Richardus filius haimonis. Haimo filius maini. Actum anno ab incarnatione domini. 1095. Anno 13. Ordinationis Bernardi abbatis.
309 Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 109 ; Anciens Evêchés…, op. cit., tome IV, chap. viii, iii.
310 Il apparaît semble-t-il pour la dernière fois dans la confirmation de Saint-Malo de Dinan à Marmoutier, Anciens évêchés…, tome IV, chap. viii, iii (précité).
311 Brand’Honneur M., Manoirs…, op. cit., p. 126.
312 Guillotel H., Des vicomtes d’Alet aux vicomtes de Poudouvre, op. cit. De même, Judith et Rivallon appartenaient notamment au stock onomastique de la famille du Chat apparentée aux Combour, d’où était issu Guillaume moine puis abbé de Marmoutier de 1104 à 1124. Or, c’était justement cette abbaye que Geoffroy Boterel Ier avait établie à Lamballe en 1084, alors qu’il étendait son autorité vers l’est, cf. Guillotel H., Combour : proto-histoire d’une seigneurie et mise en œuvre de la réforme grégorienne, dans Family Trees and the Roots of Politics. The Prosopography of Britain and France from the Tenth to the Twelfth Century. Edited by Keats-Rohan K. S. B., Woodbridge, 1997, p. 269-298, p. 274-277.
313 Rappelons que le vicomte d’Alet Hammon apparaît auprès de Geoffroy Boterel Ier lors de la fondation de Lamballe en 1084.
314 M. Brand’Honneur, Manoirs…, op. cit., p. 126-127.
315 Le vicomte d’Alet apparaît auprès de Geoffroy fils d’Olivier de Dinan lors de la donation de l’église de Miniac à Saint-Florent de Saumur par Hingand fils de Gosbert, Dom Morice, Mémoires…, op. cit., col. 495. Cet acte est généralement daté des années 1081-1085, cf. Guillotel H., Des vicomtes d’Alet…, op. cit., p. 210-211. Hammon III apparaissant en 1084 à Lamballe, il paraît assez logique de penser que la donation de Miniac est antérieure à cette date.
316 La Borderie A. de, Recueil des actes inédits des ducs et princes de Bretagne (XIe, XIIe, XIIIe siècles), Société archéologique d’Ille-et-Vilaine, Rennes, 1888, p. 46-47, no xx : Actum hoc anno ab incarnatione Domini M o. LXXXo. Vo. Nonas Maii, cum praedictus Guillelmus iret cum comite Alano Fergan, ad faciendam pacem cum Gosfredo de Dinan, ad caput calciede castelli Hatduei, secus domum leprosum.
317 Il pourrait être lié à la prise de contrôle de Combour par Guillaume l’Ismaélite au détriment des fils de Rivallon Ier de Dol. Geoffroy de Dinan aurait pris la défense de ses cousins.
318 Guillaume l’Ismaélite était d’un tempérament belliqueux et peu conciliant. Nul doute que la démarche qu’il fit auprès de Geoffroy de Dinan lui avait été imposée par le duc. Cf. La Borderie A. de, Recueil d’actes inédits des ducs…, op. cit., p. 48, note 9.
319 Langouët L., Les mottes castrales de l’arrondissement de Dinan, Les dossiers du Ce.R.A.A., 9, 1-27.
320 Langouët L., Un vicus gallo-romain, routier et portuaire : Taden (Côtes-du-Nord), sur les bords de la Rance, Revue archéologique de l’Ouest, tome II, 1985, p. 73-82. Idem., La voie romaine Fanum Martis-Reginca et son insertion dans le paysage, dans Les Dossiers du CeRAA, 24, 1996, p. 5-16. Cf. Annexe X.
321 Hingant S., Les mottes médiévales des Côtes-d’Armor, Rennes, Institut culturel de Bretagne, Centre régional d’archéologie d’Alet, coll. Patrimoine archéologique de Bretagne, 1994, p. 77.
322 Hingant S., ibidem.
323 Langouët L., Approche archéologique des mottes castrales, dans Dinan au Moyen Âge, p. 66, 70.
324 Chevallier R., Les Voies romaines, Paris, Picard, 1997, p. 127 : « Les gués naturels se situent aux endroits de moindre profondeur d’eau, dans un méandre, près d’un île, avec accès par un plan incliné et passage en biais pour lutter contre le courant. Mais la plupart ont été aménagés à l’aide de troncs d’arbres, de pierres, puis, à l’époque romaine, de dalles ou de briques. Les ponts doublent souvent les gués, plus qu’ils ne les remplacent, les aménagements se succédant. »
325 La Vicomté-sur-Rance tiendrait son nom des vicomtes de Poudouvre (cf. Tanguy B., Dictionnaire des noms de communes, trèves et paroisses des Côtes-d’Armor, Douarnenez, ArMen-Le Chasse-Marée, 1992, p. 355 ; Saint-Jouan R. de, Dictionnaire des communes. Département des Côtes-d’Armor, éléments d’histoire et d’archéologie, Saint-Brieuc, Conseil général des Côtes-d’Armor, 1990, p. 800-802), successeurs vers le XIIIe des vicomtes d’Alet (cf. Guillotel H., Des vicomtes d’Alet…, op. cit.). Des gisements de tegulae, des traces de structures gallo-romaines (Langouët L., Daire M.-Y., La civitas gallo-romaine des Coriosolites. Le milieu rural, ICB – Ce.R.A.A., coll. Patrimoine archéologique de Bretagne, 1989, p. 65) et le lieu-dit La Vieille Vicomté pourraient indiquer un ancien site de peuplement contrôlé vers le XIe par les vicomtes d’Alet.
326 Eveillard J.-Y., La voie romaine de Condate (Rennes) à Vorgium (Carhaix), Brest, 1980, fig. 15, p. 74.
327 Brand’Honneur M., Manoirs…, op. cit., p. 105-106.
328 La quasi-totalité des donations d’Alain IV sera destinée à des abbayes angevines ou de Bretagne Sud.
329 En 1086, l’évêque de Tréguier cédait Hyrglas à l’abbaye du Mont-Saint-Michel avec l’assentiment de Geoffroy Boterel Ier. Cette donation ne révèle-t-elle pas les liens qui unissaient alors les Comtes de Bretagne et Guillaume de Normandie ?
330 Brand’Honneur M., Manoirs…, op. cit., p. 126-127.
331 Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 90.
332 Avant 1090, il confirme la donation à Saint-Jacut de la terre en Pléhérel dite « l’abbaye », cf. Anciens Evêchés…, op. cit., tome IV, chap. iv, i.
333 Jean Ier est qualifié de moine pour la dernière fois en 1087.
334 Le duc de Normandie mourut le 9 septembre 1087 (Neveux F., La Normandie…, op. cit., p. 439).
335 Cartulaire de Saint-Serge d’Angers, no B 192.
336 Brand’Honneur M., Manoirs…, op. cit., p. 121.
337 Guillotel H., op. cit., no 92, 96, 99, 110.
338 Brand’Honneur M., Manoirs…, op. cit., p. 287, 288 tab. 31.
339 Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 76, 78, 79 ; Cartulaire de Saint-Serge d’Angers, no B 25, B 190bis, B 192.
340 Cf. Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 96 : Judicaël episcopus Sancti Machuti.
341 Un certain Hammon de Dol est cité dans une charte d’Alain le Roux dans laquelle ce dernier cède des biens à l’abbaye Saint-Serge d’Angers, The Honour of Richmond, based on the manuscript of the late William Farrer and edited by C. T. Clay, [E. Y. C.] The Yorkshire Archaelogical Society, Early Yorkshire Charters, vol. IV-V, Record Series, Extra Series, 1935-1936, tome IV, no 1 : Hujus elemosine sunt testes Guinomarus dapifer, odo camerarius, Guidonis, Ribaldus et Bardulfus fratres comitis, et Hammus de Doll’, qui precepto comitis obedientiam monachis deliberavit, scilicet Gervasio, Garnerio et Waltero.
342 Hammon III aurait eu un fils du nom de Gervais qui se serait démarqué aux Croisades, cf. Guillotel H., Des vicomtes d’Alet…, op. cit., p. 208.
343 Guillotel H., Bretagne et papauté…, op. cit.
344 En 1093, Urbain II accorda le pallium à l’évêque de Dol Roland qui était venu le lui réclamer comme archevêque des Bretons, cf. Dom Morice, Mémoires, tome I, col. 482-483.
345 Pour les annales de Rhuys, le fils du comte Eudes serait mort en 1092 et le 24 août 1093, à la suite de l’évêque Sylvestre, pour les Chroniques annaux (Dom Morice, Mémoires, tome I, col. 103 : MXCIII. Obiit Silvester Episcopus Redonensis. Eodem anno IX. Kal. Septembris interfectus est Comes Gauffridus filius Eudonis Ducis apud Dolum Archiepiscopatum Britanniae). Le Chron. Brit. date l’événement de 1091, l’année d’un tremblement de terre.
346 Avant 1090, Geoffroy Boterel Ier confirmait la donation de la terre dite « l’abbaye » en Pléhérel à Saint-Jacut par Gaultier fils de Trehan Mab, cf. Anciens Evêchés, tome IV, chap. iv, i.
347 Les chroniques ne précisent pas s’il attaquait ou défendait les remparts de Dol. Cependant, certains actes de la pratique datés de 1093 désignent Alain IV comme comte de Rennes. Or, il s’agit là d’une titulature rarement utilisée par le duc. Doit-on en conclure que ce dernier perdit à nouveau le Dolois au profit de Geoffroy Boterel Ier ? Dans ce cas, le fils du comte Eudes serait mort en défendant sa récente conquête, cf. Dom Morice, Mémoires, tome I, col. 387, 480, 481-482.
348 Cartulaire de Saint-Aubin d’Angers, no 677 : Eudo comes Britannie… uxor ejus Orguen, et filii eorum Gausfridus, Alanus, Willelmus, Rotbertus, Ricardus.
349 Orderic Vital, tome III, livre V, 88. Selon Orderic Vital, Eudes n’aurait eu que sept fils mais cet auteur du xiie dut confondre Alain le Roux et Alain le Noir. Il ne s’agissait que des fils légitimes car le frère d’Alain III eut de nombreux enfants naturels.
350 La mort d’Étienne en 1135/6 le désigne très probablement comme le dernier fils légitime d’Eudes. Quant à Alain le Noir, il apparaît très tardivement dans les actes de la pratique, lorsqu’en 1093, il succède à son frère Alain le Roux à la tête de l’honor de Richmond. Cette dévolution a poussé les historiens à placer les deux Alain à la suite dans l’ordre des naissances, mais tel n’est pas forcément le cas.
351 L’apparition du nom de Brient dans le stock onomastique de ce lignage peut surprendre. Pourtant, il ne s’agit peut-être pas d’une nouveauté. En effet, on le retrouve à plusieurs reprises dans la dynastie ducale, à partir des Cornouaille. Selon la Chronique anglo-saxonne, Alain IV aurait eu un fils de ce nom (Guillaume de Jumièges, tome II, p. 241, note 3). De même, Conan IV avait un frère naturel baptisé ainsi, cf. E. Y. C., op. cit., tome IV, chap. ii, p. 91.
352 Bien qu’il n’y soit pas mentionné explicitement, la confiance que lui accorde très tôt le Conquérant permet de le supposer.
353 Regesta Regum Anglo-Normannorum, the acta of William I (1066-1087), Bates D. (éd.), Oxford, Clarendon Press, 1998, no 138 : Ego Brient comes. Cet acte daté de 1069 mentionne la présence de la reine Mathilde. Cette dernière embarqua pour la Normandie après Pâques (13 avril), peut-être au début de l’été (Boüard M. de, Guillaume le Conquérant, op. cit., p. 368). Brient est mentionné dans un autre acte de Guillaume le Conquérant datant de Pâques 1069, sous le seul nom de Brient (Brien), cf. Bates D., Regesta…, op. cit., no 254. Cependant, cette donation à Saint-Denis est trop douteuse pour s’appuyer sur elle. Le Domesday Book en revanche accorde bien le titre comtal à Brient (Domesday Book, A complete Translation, Williams A., Martins G. H. (éd.), Alecto Historical Editions, Londres, Penguin Books, 2002, p. 1194-1195 : fol. 291 ro-vo).
354 Anciens évêchés, tome IV, chap. v, ii : Omnes fratres ejus : Briencius videlicet comes Anglice terre et Alanus Rufus ejus scilicet successor, atque alter Alanus qui et Niger dicebatur. Les auteurs des Anciens évêchés prétendent que cette mention a été ajoutée a posteriori. Après vérification sur l’original, il ne semble pas que ce soit le cas. Il s’agit tout simplement d’une notice rédigée quelques années après les faits. À la suite de Brient sont cités ses deux successeurs, ses deux frères Alain le Roux et Alain le Noir, morts respectivement en 1093 et 1098. En revanche, il n’est fait aucune allusion à Étienne qui héritera de leurs terres anglaises. Il est donc possible que cette notice ait été faite du vivant d’Alain le Noir.
355 The Anglo-Saxon Chronicle, Swanton M. J. (éd.), Londres, Dent J. M., 1996, p. 203 (D) : « After these events, toward midsummer, the sons of Harold came from Ireland with 64 ships into the mouth of the Taw, and went up there carelessly. And Earl Brian came against them by surprise with no little company, and fought against them, and killed all the best men who were in the fleet ; and the others, with little company, fled to the ships. And Harold’s sons went back again to Ireland. » Orderic Vital, tome II, livre IV, 228 : Idem apud Exoniam Exoniensis comitatus habitatores fecere et undique coadunata turba ex Cornu Britanniae. Nam supremi fines Anglorum occidentem versus et Hiberniam Cornu Britanniae, id est Cornuallia nominantur. Exoniae cives regi favebant non immemores pressurarum quas olim fassi fuerant. Protinus rex ubi haec accepit comites duos Guillelmum et Briennum laborantibus subvenire parecepit. Verum priusquam illi Scrobesburiam pervenissent urbe combusta hostes discesserant. Defensores quoque Exoniae subito eruperunt et impetu in se obsidentes abegerunt. Fugientibus obuii Guillelmus et Briennus grandi cede temeritatem punierunt.
356 Guillaume de Jumièges, tome II, p. 90-91, 180-183 : Brientius filius Eudonis comitis Britanie minoris.
357 Dom Wilmart A., Alain le Roux et Alain le Noir, comtes de Bretagne, dans Annales de Bretagne, XXXVIII, 1928-1929, p. 576-602, p. 583, note 21. cassagnes-brouquet S., Histoire de l’Angleterre médiévale, Paris, Ophrys, coll. Synthèse Σ Histoire, 2000, p. 66.
358 Cf. p. 201 et suiv.
359 E. Y. C., no 12 : pro redemptione anime Brientii avunculi mei, de cujus hereditate terram Cornubie possideo… Afin d’éviter toute confusion avec la Cornouaille bretonne, nous désignerons la Cornouaille anglaise sous le nom de Cornwall.
360 Potter K. R. (éd.), Gesta Stephani, Londres, Oxford University Press, Oxford Medieval Texts, 1976, p. 102-103 : Audiens siquidem rex et in patria Cornubiensi rebellium, ut praemisimus, adversum se concitatum, festinus illuc et improvisus advenit, resumptisque, quae Reinaldus invaserat, castellis, Alano comiti, viro summae crudelitatis et doli, patriam commisit…
361 Keats-Rohan K. S. B., Le rôle des Bretons dans la politique de colonisation normande de l’Angleterre (vers 1042-1135), dans M.S.H.A.B., tome LXXIV, 1996, p. 187.
362 Keats-Rohan K. S. B., op. cit., p. 194.
363 Il ne semble pas avoir participé à la révolte de 1075 contre Guillaume le Conquérant.
364 Certains ont imaginé que, blessé au combat, il se serait retiré en Bretagne pour y mener une vie d’invalide jusqu’à sa mort entre 1084 et 1086.
365 Les sources aurait certainement conservé le souvenir d’une mort au combat.
366 Cartulaire de Saint-Aubin d’Angers, no cclxxxvii (pour la datation, cf. Guillot O., Le comte d’Anjou…, op. cit., tome II, no C 214 : 14 janvier 1056 – 14 novembre 1060) et cccccclxxvii.
367 Bates D., Regesta…, op. cit., no 244. Cet acte rapporte la donation à Saint-Ouen par Alain le Roux de l’église Saint-Sauveur, hors les murs de Rouen, que lui avait cédée Guillaume de Normandie. Sans mettre nécessairement en doute son authenticité, il souffre d’évidents problèmes de datation et de transmission. Il serait dès lors imprudent de trop s’y fier.
368 Selon Wace, Alain Fergent aurait participé à la bataille, mais le fils du duc Hoël était encore trop jeune pour cela. Il est possible que l’auteur ait fait une confusion avec Alain le Roux, cependant, il est troublant que ni Orderic Vital ni Guillaume de Poitiers ne citent le fils d’Eudes parmi les compagnons de Guillaume le Conquérant. Seul Geoffroy Gaimar dans sa chronique rimée chante les exploits d’Alin de Bretaigne mais cette œuvre fut composée entre 1135 et 1147, cf. Dom Wilmart A., Alain le Roux…, op. cit., p. 578-579.
369 Ego Wil(el)mus cognomine Batardus Rex Anglie do et concedo tibi nepoti meo Alano Britannie Comiti et heredibus tuis imperpetuum omnes villas et terras que nuper fuerunt Comitis Edwyni in Eborashira cum feodis Militum et ecclesiis et aliis libertat(ibus) et consuetudinibus ita libere et honorifice sicut idem Edwinus ea tenuit. Dat(um) in obsidione coram Civitate Ebor(aci), cité par Dom Wilmart A., Alain le Roux…, op. cit., p. 581. Cf. Annexe XII.
370 Dom Wilmart A., ibidem.
371 Si Alain le Roux participa vraiment au siège d’York de 1069, pourquoi n’est-il jamais question de lui à cette occasion dans les sources narratives ? Cf. la description du siège d’York par Orderic Vital, tome II, livre IV, 5, 11.
372 Dom Wilmart A., Alain le Roux…, op. cit., p. 581, note 15 ; Dalton P., Conquest, anarchy & lordship. Yorkshire, 1066-1154, Cambridge, Cambridge University Press, coll. Cambridge Studies in medieval life and thought, 1994, p. 67.
373 Bates D., Regesta…, op. cit., no 169, 237. D’autres actes de Guillaume le Conquérant mentionnent Alain antérieurement à cette date, mais ils sont suspects (no 185, 244, 301) voire manifestement faux (no 290, 318, 331). La donation du prieuré de Linton à Saint-Jacut pourrait suivre de peu cette promotion du fils du comte Eudes. Une notice de la fin du XIe siècle précise qu’au temps du roi Guillaume, Alain le Roux vint à Saint-Jacut pour y céder en aumône l’église de Linton en terre anglaise, où il avait été alors établi comte par le roi d’Angleterre (ubi tunc erat comes constitutus a Rege Anglorum). Cette dernière formule ne révélerait-elle pas une promotion récente, peut-être à l’occasion du premier retour d’Alain en Bretagne ? Quoi qu’il en soit, la présence d’Eudes à Saint-Jacut lors de cette donation en fixe le terminus ad quem vers 1077-1079.
374 Il est à Caen le 13 septembre 1077 et le 7 janvier 1080 (Bates D., Regesta…, op. cit., no 46 et 267 II), à Saint-Georges de Boscherville trois semaines plus tard (op. cit., no 266 II). On le retrouve du 2 au février 1081 à Salisbury (op. cit., no 154 et 268), puis quelques jours plus tard à Londres (op. cit., no 193) et près de Bénouville en automne de cette même année (op. cit., no 201). Fin 1082, il séjourne à Downtown et en 1086 à Lacock (op. cit., no 253 et 146). Il lui arrive parfois de retourner en Bretagne comme le prouve la notice de Saint-Jacut concernant Linton et la pancarte du prieuré Saint-Florent-sous-Dol où il figure auprès de Geoffroy Boterel Ier lors de la rencontre en marche de Plouasne. Le titre de comes qu’il porte à cette occasion le distingue définitivement de son frère Alain le Noir.
375 Dom Wilmart A., Alain le Roux…, op. cit., p. 586-587.
376 Cf. Annexe XIV.
377 C’est peut-être ainsi qu’il faudrait interpréter l’affirmation maladroite de la pancarte de Saint-Martin de Lamballe, dans son passage apocryphe. Son auteur n’était probablement pas très au fait des affaires anglaises. À son époque, en 1093 au plus tôt, le détail exact des responsabilités assumées par Brient devait commencer à s’estomper. On se souvenait que les fils d’Eudes avaient été successivement comtes d’Angleterre, ce qui avait suffit pour faire de Brient le prédécesseur de ses frères.
378 E. Y. C., no 1 : pro anima domini sui regis Anglorum Willelmi et pro anima Mathildis regine, cujus auxilio honorem adquisivit… Cet acte ne figure pas l’édition récente du cartulaire de l’abbaye Saint-Serge et Saint-Bach d’Angers.
379 Lors de la révolte de Robert Courteheuse contre son père, Mathilde eut recours aux services d’un certain Samson le Breton pour rester en contact avec son fils. Quand il l’apprit, Guillaume entra dans une colère noire, espérant mettre la main sur le messager pour lui crever les yeux. Le pauvre homme se réfugia à l’abbaye de Saint-Evroult où il devint moine. C’est en ce lieu qu’Orderic Vital recueillit son témoignage, Orderic Vital, tome III, livre V, p. 104-105.
380 Keats-Rohan K. S. B., Le rôle des Bretons…, op. cit., p. 194.
381 Cf. p. 205-206.
382 Dom Wilmart A., op. cit., p. 584.
383 Orderic Vital, tome IV, livre VIII, p. 272 : Alanus enim Rufus Britannorum comes Mathildem quae prius dicta est Edith in coniugem sibi a rege Rufo requisivit, sed morte preventus non optinuit.
384 Dom Wilmart A., Alain le Roux…, op. cit., p. 595, note 60.
385 Ibidem. Selon Orderic, Alain demanda la main de Mathilde à Guillaume le Roux mais serait mort avant de l’obtenir. Guillaume de Warenne aurait été le prétendant suivant. Or, ce dernier mourut en 1088, donc cinq ans avant Alain le Roux. Selon Dom Wilmart, Orderic aurait confondu Mathilde fille de Malcolm et Gunhilde, fille d’Harold.
386 Keats-Rohan K. S. B., Le rôle des Bretons…, op. cit., p. 189. Dom Wilmart A., op. cit., p. 599.
387 Ibidem. : Et quid si idcirco subtraxit Deus comitem Alanum de hac vita, ne ille te Deo subtraheret, sicut disponebat ?
388 Keats-Rohan K. S. B., ibidem.
389 La lettre de saint Anselme semble avoir été écrite entre le 4 décembre 1093 et 1095, cf. Keats-Rohan K. S. B., The Bretons and Normans…, op. cit., p. 77.
390 S’appuyant sur un acte non relevé dans les Regesta Regum Anglo-Normannorum (C. Johnson, H. A. Cronne [éd.], Oxford, 1956, tome II, no 405), Farrer suppose qu’Étienne perdit quelques temps l’administration de l’honor anglais, cf. E. Y. C., no 6 note.
391 Heers J., Libérer Jérusalem. La première Croisade 1095-1107, Paris, Perrin, 1999, p. 114 : « Si l’on excepte une lettre écrite, fin décembre 1095, par Urbain II “aux princes et au peuple de Flandre” qui fixait le départ au 15 août suivant, rien n’est dit sur les façons dont les hommes furent conviés à se rassembler et ceci nous échappe complètement. Aucun auteur ne dresse le moindre tableau des échanges d’informations, des appels, des premières réunions, du choix des chefs à différents niveaux. Rien ne permet d’évoquer, sauf à tout inventer, ce que fut, dans sa réalité concrète, cette mobilisation de milliers d’hommes de guerre, abandonnant leurs terres et, souvent, leurs familles. Comment ont-ils été gagnés par cet enthousiasme magnifiquement évoqué certes par quelques chroniqueurs, mais sans rien en dire de précis ? Qui, ensuite, les a appelés, “sermonnés” de venir en tel ou tel lieu ? Tout ce que nous lisons nous les montre rassemblés en gros corps de troupes et déjà en route. Mais d’où sont-ils partis, et à quelles dates ? »
392 Orderic Vital, tome V, livre IX, p. 54 et 58 : Tandem Cristiani duces in unum convenerunt et hoc ordine Niceam Bithiniae urbem obsederunt. Ex una parte obsederunt eam Buamundus et Tancredus juxta quos cum fratribus suis dux Godefredus. Deinde Rodbertus Flandriae comes strenuus vir et miles audacissimus. Juxta hunc Rodbertus Normannorum dux et Stephanus Carnotensis comes, et Hugo comes de Sancto Paulo, Conanus quoque Brito filius Gaufredi comitis, et Radulfus de Guader, et Rogerius de Barnaevilla cum suis agminibus… Étienne-Henri partit pour la croisade en septembre 1096, en compagnie de Robert Courteheuse et de Robert de Flandre. Arrivé devant Antioche, il fit brusquement demi-tour le 2 juin 1098 et rentra en Europe, d’où il repartit en 1100. Il trouva la mort devant Rames en mai 1102, mais la nouvelle de son décès ne fut connue en France que dix-huit mois plus tard. Depuis 1096, c’est sa femme Adèle qui gouvernait le comté de Blois. Cf. Bur M., La formation…, op. cit, p. 235. Sur le siège de Nicée, Cf. Heers J., op. cit., p. 162-170.
393 Orderic Vital, tome V, livre IX, p. 58 : Die qua Nicena obsidio soluta est ad quendum pontem peruentum est, ubi sua Christianus polpulus tentoria collocavit. Duos ibi dies fecerunt, et tercia die ante lucem iter preproperi arripuerunt. Et quoniam nox tenebrosa erat, incertam incerti viam tenuerunt. Divisi ergo ab invicem duorum iter dierum consummerunt. Buamundus et Rodbertus Normannus, Blesensisque comes Stephanus et Tancredus, Hugo de Sancto Paulo et Girardus de Gornaco, Gualterius de Sancto Gualerico et Bernardus filius ejus, Guillelmus filius Rannulfi vicecomitis et Guillelmus de Ferrarriis, Herveus filius Dodemanni, et Conanus filius comitis Gaufredi, Radulfus de Guader et Alanus filius ejus, Riou de Lohoac et Alanus dapifer Dolensis, et alii plures erant in uno agmine. In altero Tolosanus comes et Podiensis episcopus, Godefredus dux et Balduinus et Hugo Magnus et Flandrensis Rodbertus cum copiosis commeantium examinibus.
394 Sur ce personnage, cf. p. 243-244.
395 Sur les Bretons et les croisades, cf. Jones M., Les Bretons et les croisades, dans M.S.H.A.B., tome LXXI, 1994, p. 367-380 ; Tricot M.-M., La noblesse bretonne et la première croisade, mémoire de maîtrise, Brest, 1968.
396 Cartulaire du Mont-Saint-Michel, ms. 210 de la Bibl. d’Avranches, fol 64 ro vo : +. Signum Gaufredi comitis. +. Signum Rivalloni vicecomitis. +. Signum Stephani filii Eudonis… Acta est haec donatio anno ab incarnatione domini millesimo octuagesimo VI. regnante rege Philippo in Francia. In Anglia vero ; rege Guillelmo sub archiepiscopo Rothomagensi Guillelmo. et Michaele Abrincensi episcopo. et abbate eiusdem loci Rogerio feliciter. Selon le même acte, tous les frères de Geoffroy Boterel Ier avaient donné leur consentement, mais seul Étienne apparaissait dans la liste des souscripteurs (ibidem. : Assensu domini mei Gaufredi comitis. et omnium fratrum eius. filiorum scilicet comitis Eudonis). Probablement n’avaient-ils pu se déplacer pour l’occasion.
397 L’acte no 4 des E. Y. C. semble marquer une véritable prise en main des terres anglaises. Étienne y fait une donation à Notre-Dame d’York, « pour l’âme du roi Guillaume son seigneur et pour l’âme de son père, de sa mère, de ses frères, de tous ses parents, et la sienne ». Le roi Guillaume en question ne peut-être que Guillaume le Roux, Étienne n’étant arrivé en Angleterre que plus de dix ans après la mort du Conquérant. Cet acte serait donc postérieur à la disparition de Guillaume II intervenue le 2 août 1100 (cf. Neveu F., La Normandie des ducs …, op. cit., p. 460). La mention d’Alain sénéchal de Dol prouve que ce dernier rentra de la première croisade qu’il avait rejointe en 1097, ce que confirme le nom qu’il donna à son fils, Jordan, en souvenir du Jourdain. La présence de Roland, archevêque de Dol, fixe le terminus ad quem à 1107, car son successeur fut élu avant la fin de cette année (E. Y. C., no 4).
398 Pour connaître les valeurs successives du marc d’argent jusqu’en 1330, cf. colonel L. Borrelli de Serres, Les variations monétaires sous Philippe le Bel et les sources de leur histoire, dans Gazette numismatique française, t. 5-6, 1901-1902, p. 245-367 et p. 9-67.
399 Vercauteren F., Actes des comtes de Flandre (1071-1128), Commission Royale d’histoire, Recueil des actes des princes belges), Bruxelles, 1938, no 30 : Et de istis conven] tionibus adten [endis dedit rex] H. comite R. [subscriptos obsides : Robertum, filium Haimonis, pro CC. marcas argenti, Stephanum comitem Britannie pro C. marcas argenti, Gilbertum filium Ricardi pro C. marcas, Rogerum de Nonant] pro [C. marcas, Hugonenm M] annot pro C. [marcas, Manasellum Arsic pro C. marcas, Haimonem dapiferum pro C. marcas, Willelmum de Corceceio pro C. marcas, Milonem Crispinum pro C. marcas, Ernulfum de Monte Gomerico pro C. marcas, Hugonem de Bello] Campo [pro C. marcas. Et isti tali conditione sunt obsides erga comitem, quali conditione comitis obsides erga regem, et obsides utriusque regis et comitis assecuraverunt, quod non diffugient summ ] onitionem et quod summonitores securi erunt ab eis et ab omnibus, quos prohibere poterunt a nocumento ipsorum].
400 Anciens évêchés, tome IV, chap. vi, no I, p. 335 :… dum idem comes Stephani de curia regis Anglorum veniens per Jugon transiret…
401 Ibidem : Et quoniam castrum de Jugon, antequam in dominium Gauffredii Dinanensis vel heredum ejus devenret, antecessorum et parentum comitis Stephani fuisse dignoscitur…
402 Cf. infra.
403 La Madeleine du Pont notamment, fut fondée à Dinan en 1070, sans l’intervention quelconque ou même la mention d’Eudes ou d’Hoël.
404 Anciens évêchés, tome IV, chap. vi, no i, p. 333-334 : Cum Gaufredus, dominus Dinanensis, longo tempore dubitasset si posset dare en non in elemosinam aliquid de ecclesiis vel de decimis earum de feudo Britennensium quod habebat in terra sua, et tollet (sic) eis per violencie rapinam…
405 Anciens évêchés, tome IV, chap. vi, no i :
406 Guillotel H., La proto-histoire de Combour…, op. cit.
407 Guillotel H., Les actes…, op. cit., no 109 : monachi nostri Guarinus de Lanrigant et Gilo filius Ansquitilli.
408 Étienne-Henri de Blois était mort en 1102, mais son fils Thibaud lui avait succédé. Cf. Bur M., op. cit., p. 199, note 22, 230, 233. Vers 1108-1111, Geoffroy de Dinan et Gelduin de Dol-Combour conclurent un foedum pacis sous l’impulsion de l’archevêque Baudry de Bourgueil (Dom Morice, Mémoires, tome I, col. 455 et Guillotel H., Combour…, op. cit., p. 294).
409 Anciens évêchés, tome IV, chap. viii, iii : Consulibus Britannie Alano atque Stephano.
410 Par convention, nous appelons Alain le Noir, un frère aîné d’Étienne, successeur d’Alain le Roux à la tête de Richmond à la fin du XIe siècle, et Alain « le Noir », Alain dit « le Noir » ou Alain de Richmond, deuxième fils du même Étienne, qui contrôla également Richmond mais à partir de 1135/1136, soit près de quarante ans après son oncle homonyme.
411 Guillotel H., op. cit., p. 272.
412 Elle fut la mère de Raoul II de Fougères qui joua un rôle si important sous Henri II Plantegenêt.
413 E. Y. C., no 390 : Matildis filia consulis Stephani Britannie, uxor Walteri de Gaunt.
414 Keats-Rohan K. S. B., Domesday people…, op. cit., p. 210.
415 Keats-Rohan K. S. B., Domesday descendants…, op. cit., p. 729.
416 Lors de l’entrevue de l’Ormeteau-Ferré entre Louis VI et Henri Ier Beauclerc, il n’était encore question que de fiançailles entre Conan et Mathilde (Guillotel H., op. cit., no 115). Mathilde est qualifiée pour la première fois d’épouse de Conan dans un acte ducal du 9 octobre 1118 (op. cit., no 124).
417 Op. cit., no 146, 147.
418 La Borderie A. de, Nouveau recueil…, op. cit., p. 28 : Postea, in vita patris, decessit G. comes, cui successit Ruallonus, filius ejus, in Lambal’et in Pentevr. Mortuo vero Gaufredo, pater ejus Stephanus et amici ejus miserunt in Angliam pro comite Alano, qui in adventu suo contraxit cum Berta, filia Conani comitis Redonensis. Postea, mortuo Stephano, comes Henricus, filius ejus, avus istius Henrici, successit ei in terra Trecorie et in Guengampo et tenuit ea aliquo tempore, sed nescit per quantum.
419 Op. cit., p. 31-32 : Hec sunt nomina illorum qui concordant in processum subscriptum : Alanus, filius Paganus, miles. Dominus Gellinus. Guehenocus filius Jocii. Gaufr’prepositus de Lanvolon. Gillebertus dictus Miles. Herveus presbyter. Stephanus filius Enysan, miles. Herveus filius Oliverii et Alanus, fratres, milites ; et frater Petrus, conversus Cisterciensis ordinis et quondam miles et quidam alii. Comes Stephanus habuit tres filios videlicet, Gaufridum Boterel, Alanum, et Henricum. Istis tribus dimisit terram suam : Gaufrido primogenito dedit comitatum Pentevr ; Alano medio dedit comitatum Richemondie ; Henrico juniori dedit Trecoriam et Goloiam. Mortuo predicto Stephano, Alanus filius ejus duxit in uxorem filiam Conani Grossi comitis Nannetensis ; postea spoliavit fratres suos per violentiam teriis suis. On ne connait pas exactement la date de la mort d’Étienne. Il était à Bury Saint Edmond en 1135, du vivant du roi Henri Ier Beauclerc soit avant le 1er décembre (E. Y. C., op. cit., no 11). Son fils Alain « le Noir » apparait comme « comte de Richmond » dans une charte royale de 1136 (Calendar of documents preserved in France, illustrative of the history of Great Britain and Ireland, vol. I, A. D. 918-1206, Round J. H. [éd.], Londres, 1899, no 1390). Étienne serait donc mort entre 1135 et 1136. La « généalogie » de Richmond fixe la date de la mort d’Étienne à idus aprilis anno gracie millesimo CLXIIIIo. Dom Wilmart interpréte cette erreur manifeste de copie en proposant l’année 1138 (Dom Wilmart A., Alain le Roux…, op. cit., p. 602) mais il paraît plus prudent d’en rester au témoignage des sources diplomatiques. En revanche, le quantième du mois pourrait être éventuellement retenu. Étienne serait peut-être mort le 13 avril 1135 ou 1136. Selon la même généalogie, il aurait été enseveli à Bégard mais il aurait ordonné que son cœur reposât à Notre-Dame d’York qu’il avait fondée (Dom Wilmart A., ibidem).
Table des illustrations
Légende | Figure 5. – Généalogie supposée de Néel de Saint-Sauveur. |
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Légende | Figure 6. – Place de Geoffroy Grénonat dans le conflit dynastique breton. |
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Légende | Figure 7. – Ascendance d’Havoise, épouse d’Étienne de Bretagne, et sa parenté avec Berthe de Blois. |
URL | http://books.openedition.org/pur/docannexe/image/128031/img-3.jpg |
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Légende | Figure 8. – Descendance simplifiée d’Étienne fils du comte Eudes. |
URL | http://books.openedition.org/pur/docannexe/image/128031/img-4.jpg |
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