Une petite fédération du Sud-Ouest : le PSU en Gironde
p. 205-220
Texte intégral
1La Gironde est une terre socialiste. Du moins, l’est-elle devenue grâce aux nombreux succès électoraux que le Parti socialiste a obtenu depuis les années 1970 et qui ont fait de ce département un fief incontesté du PS. Auparavant, elle était plutôt répertoriée sur les cartes électorales du pays comme étant un département « bleu » tout en connaissant dans le même temps une des plus anciennes fédérations socialistes qui a toujours conservé au sein de la « vieille maison » une certaine importance numérique. Cette fédération avait déjà acquis après 1945 de solides positions électorales, concentrées dans l’agglomération bordelaise, autour de personnalités comme René Cassagne1 et Robert Brettes2. À défaut de s’imposer dans un département plutôt modéré, la SFIO locale est devenue la première force politique de la gauche locale, devançant le PCF. Mais le socialisme girondin était marqué sous la IVe République par ses notables, très anticommunistes et qui privilégiaient localement une stratégie de « Troisième force ».
2La fédération de la Gironde fournit un bon exemple du modèle social-républicain que présente Marc Sadoun dans sa typologie des fédérations SFIO3, avec des élus, des adhérents mais assez peu d’activités en dehors des campagnes électorales. Certains ont pu penser qu’il existait alors un espace politique pour le PSU et sa volonté de rompre avec les compromis qu’incarnait la SFIO. Mais le terrain n’était pas manifestement pas aussi favorable car la fédération girondine du PSU n’a jamais eu qu’une audience militante et électorale limitée dans le département.
3Alors doit-on n’envisager l’histoire du PSU en Gironde que comme la chronique d’un échec dont il faudrait rechercher les raisons. Ou, au contraire, ne peut-on pas plutôt s’interroger sur la pérennité d’une fédération qui, malgré sa faiblesse, parfois extrême, a su traverser de multiples crises pour se maintenir jusqu’à la fin de l’aventure du parti ? Pérennité qui se retrouve dans le rôle qu’ont continué à jouer certains de ses responsables au sein de la gauche locale ou nationale, comme par exemple, Pierre Brana, député socialiste de la Gironde, secrétaire national du PS dans les années 1980 et collaborateur de Michel Rocard, ou bien, Jean-Marie Harribey, un des fondateurs d’Attac.
4Cette réflexion, qui s’appuie sur des sources non exhaustives4, examinera dans un premier temps la faiblesse de cette fédération avant de se demander quelle était sa fonction et de s’interroger sur les conditions de sa dispersion.
L’existence troublée d’une petite fédération
La Gironde : une zone de faiblesse du PSU
5Le PSU est né en Gironde de la fusion du PSA et de l’UGS. Le congrès constitutif a eu lieu le 19 mars 1960 et la fédération annonce alors au siège national un effectif de 180 adhérents5. Quelle que soit la valeur accordée à ce chiffre, il représente dans les sources consultées un maximum et, après 1965, la fédération ne dépasse plus la centaine d’adhérents6.
6La faiblesse des effectifs n’empêche paradoxalement pas la Gironde d’occuper un rang honorable dans la hiérarchie du parti. Par exemple, en 1963, à la veille du congrès national, le département apparaît à la 25e place du classement des fédérations. Mais il s’agit d’une vision des choses trompeuse. Car le calcul du taux d’implantation militante7 pour cette même année 1963 nous montre que, dans le département, l’implantation du PSU est deux fois moins importante que sur l’ensemble du territoire8. En observant la situation dans les départements proches9, on peut s’apercevoir que cette faiblesse peut être généralisée au grand Sud-Ouest qui partage dans son ensemble le taux d’implantation de la Gironde, à l’exception de la Dordogne et de la Charente-Maritime10.
7La comparaison avec l’état du Parti socialiste dans le département est également très significative. Ainsi, l’effectif le plus faible alors revendiqué par la SFIO en Gironde est de 1 800 adhérents, minimum atteint en 1963-196411.
8L’échec de l’implantation du PSU se lit enfin au regard de ses résultats électoraux. Lors du seul scrutin où l’audience électorale du PSU peut être évaluée sur l’ensemble du département, c’est-à-dire l’élection présidentielle de 1969, Michel Rocard obtient en Gironde 3,7 % des suffrages exprimés, soit un résultat comparable à la moyenne nationale. À l’occasion des scrutins uninominaux, les candidats PSU ne dépassent que rarement les 5 %. Et, en 1966, la fédération recense deux élus municipaux membres du parti, mais qui le quittent en 1969, et trois autres, sympathisants12.
Comment expliquer cette faiblesse ?
9Les responsables locaux et nationaux du parti ont rapidement pris conscience du problème qui existait en Gironde, en particulier, et dans le Sud-Ouest, en général. Dès octobre 1961, une réunion interfédérale, à laquelle participe Édouard Depreux, propose des facteurs d’explication : l’absence d’audience dans les milieux ouvriers et paysans et, notamment, la « méconnaissance des problèmes agricoles » dans des départements encore majoritairement ruraux, la dispersion des efforts des bons militants, en particulier dans les syndicats ou des groupements laïques, l’intellectualisme du PSU et le contexte politique13.
10La configuration géographique et sociologique de la fédération girondine semble confirmer la difficulté de l’ancrage dans la société. Lors de la fusion, la Gironde compte 19 sections PSU dont quatre, seulement, se situent en dehors de l’agglomération bordelaise. La baisse des effectifs va de pair avec la disparition de certaines sections mais jusqu’au début des années 1970 les adhérents se répartissent dans une dizaine de sections dont une section étudiante. La concentration de l’implantation sur Bordeaux et son agglomération se confirme, bien qu’elle ait dans un premier temps régressé14 en raison de l’apparition de trois pôles situés hors de la capitale girondine15.
11Grâce au fichier de 196716, nous pouvons établir que la fédération est dominée, du moins dans les années 1960, par les employés du secteur public17, en général, et les enseignants18, en particulier. Cela va dans le sens de cet intellectualisme reproché au PSU d’autant plus que les personnalités qui représentent le parti localement sont pratiquement tous issus du monde enseignant, et ce quelles que soient les périodes, avec des membres de l’enseignement secondaire (Pierre Bernard19, Claude Jaumouillé, Laure Lataste, Jean-Marie Harribey) ou des universitaires comme Maurice Carmona20 ou Yves Hervouet21. Pierre Brana, qui devient secrétaire fédéral en 1969, représente une exception puisqu’il est cadre à EDF, mais son appartenance au monde de l’entreprise lui donne un poids supplémentaire22 dans une fédération qui n’est pas parvenue à mettre en place des sections d’entre23.
12Cependant, on peut se demander si le profil qui se dégage de la fédération est si éloigné de celui que peut présenter la SFIO locale à la même époque24 et s’il ne faut pas chercher ailleurs les raisons de la faiblesse de son implantation, en particulier dans les conditions de sa naissance.
13En Gironde, seuls le PSA et l’UGS ont participé à la création du PSU mais la seconde organisation est réduite à l’état d’un groupuscule25. Le PSA n’a néanmoins pas une audience beaucoup plus forte car la contestation de la ligne de Guy Mollet n’a trouvé au sein de la fédération SFIO qu’un écho limité. En 1958, la motion défendue entre autres par Édouard Depreux s’y est retrouvée très nettement minoritaire26 et René Cassagne, alors secrétaire fédéral, a su faire approuver par ses camarades la stratégie du secrétaire national. Le patriotisme de parti, sans doute un fonctionnement clientéliste, l’absence de ralliement d’élus influents, un tempérament radical qui privilégie l’activité électorale, et, enfin, un anticommunisme qui s’était développé depuis 1945 expliquent certainement que le PSU n’a pu compter localement sur un vivier originel27.
14Quant à l’attraction que le parti pouvait ensuite représenter, celle-ci est rapidement battue en brèche par les difficultés internes que celui-ci rencontre dès le début de son existence. Interrogé en 1963 par le centre national sur la baisse des effectifs girondins, le trésorier fédéral répond ainsi : « À première vue la baisse des effectifs provient surtout du fait que certains camarades n’ont pas repris leur carte pour la simple raison qu’elle ne leur a pas été présentée à domicile. Et pour ma part, je me refuse absolument à aller les “taper” en raison de la confusion qui règne dans le parti. Leur découragement et leur lassitude sont trop compréhensibles28. » Le responsable de la fédération met ici en cause les divisions nationales mais, localement, la vie du parti apparaît également très troublée : le secrétaire administratif écrit ainsi à Édouard Depreux en 1964 :
« Vous connaissez les convulsions dont a été victime la fédération. Beaucoup de camarades en restent traumatisés. De plus les difficultés du parti n’ont pas arrangé les choses. Malgré la bonne volonté, l’élan de jadis s’est évanoui. Cela nuit beaucoup à l’influence du PSU en Gironde29. »
Une fédération régulièrement en crise ?
15La vie de la fédération est en effet régulièrement rythmée par des tensions et des crises qui surprennent l’observateur, en droit de penser que la faiblesse de l’effectif aurait dû entraîner plus de cohésion et moins de disputes.
16Cependant, l’essentiel de ces crises ne fait que reproduire les débats qui existent dans l’ensemble du parti. Dès 1960, la cohabitation entre laïques et catholiques provoque un blocage du fonctionnement de la fédération30. À partir de 1963, celle-ci soutient l’action de Jean Poperen au sein du parti31 et quand celui-ci quitte le PSU à la suite des élections de 1967 le bureau fédéral marque sa solidarité en démissionnant. La scission de la tendance maoïste de la gauche révolutionnaire a son corollaire en 1972 dans le département. Enfin, lors des Assises du socialisme, le courant majoritaire, avec le secrétaire fédéral Pierre Brana à sa tête, rejoint le Parti socialiste.
17Il existe également des tensions spécifiques à la Gironde. Ainsi, en 1960 s’instaure un débat sur le fonctionnement de la fédération. Certains voulant éviter le mode de fonctionnement de la fédération SFIO, dominée par la personnalité de René Cassagne, prône un secrétariat collectif32 alors que le secrétariat unique est pour les autres synonymes d’efficacité. Les premiers obtiennent finalement gain de cause à l’occasion d’un congrès administratif, en novembre 1961, auquel participe Jean Poperen qui conclut qu’il est désormais temps de « créer une force véritable et locale33 ».
18D’autres discussions donnant lieu à des désaccords sont prétexte à des départs : visite de Pierre Mendès France à Bordeaux en décembre 196134, la stratégie électorale qui entraîne le départ du secrétaire administratif fédéral en 196435 ou de l’archiviste Jean Cavignac en 197136.
19L’impact de ces scissions37 est, en l’état de sources consultées, difficile à évaluer. Elles provoquent nécessairement un affaiblissement numérique, lequel pose plus de problèmes quand c’est la majorité qui quitte le parti38. Mais ce qui est aussi remarquable, c’est qu’aucune de ces crises ne mettent en cause l’existence d’une fédération qui parvient toujours à rebondir. Ce qui nous amène à poser la question de la fonction de cette organisation dans la vie politique locale.
Une fédération du PSU, pour quoi faire ?
L’adhésion au PSU
20En Gironde, comme ailleurs, le PSU ne sait pas retenir ses adhérents, qu’ils soient des militants de base ou des cadres. L’étude du fichier de 1967 est à ce titre éloquente. Sur les 68 cotisants de l’époque, la moitié a adhéré au moment de la fusion, ce qui représente 19 % des adhésions annoncées en 1960. Trois des dix-neuf secrétaires de section de 1960 sont encore membres du parti en 1967 ; pour ceux de 1961, le rapport est de cinq sur quinze. Et la moitié du premier bureau fédéral n’appartient plus au PSU en 1967. Ces départs39 sont sans doute d’abord liés à une lassitude provoquée par la situation nationale et locale du parti. Mais ces militants qui partent en croisent d’autres qui font le chemin inverse, certes pas assez nombreux pour compenser les pertes mais qui permettent à cette fédération de continuer à vivre. Et ce phénomène se retrouve lors de chaque crise. Ainsi, en 1972, le départ de la Gauche révolutionnaire amène les effectifs fédéraux à une trentaine de personnes ; dès l’année suivante, la fédération en revendique 73. En 1975, après les Assises du socialisme le PSU poursuit son activité avec 57 militants dont 29 sont des nouveaux adhérents.
21Donc le PSU continue, malgré ses vicissitudes, à susciter un intérêt que les quelques éléments que nous possédons sur les parcours des militants permettent de mieux comprendre. Pour certains, le PSU est le prolongement naturel d’un engagement à la SFIO, puis au PSA40, ou bien à l’UGS41. Cependant, en observant l’effectif de 1967, on constate que la majorité des adhérents n’ont pas d’antécédents partisans42.
22À l’origine de ce premier engagement politique, il y a bien sûr les chocs qu’ont pu représenter la guerre d’Algérie ou mai 1968, parfois les deux. C’est le cas de Pierre Brana qui déclare revenir de son service militaire en Algérie « très marqué par la trahison de la SFIO qui n’avait pas tenu les promesses du Front républicain43 ». Mais, peu enclin à rejoindre le PCF, il attend mai 1968 pour adhérer au PSU. Plus jeune, Jean-Marie Harribey déclare être né politiquement avec mai 196844. Mais, lui aussi n’adhère pas tout de suite et attend trois années avant de prendre une carte. Entretemps, il se dit séduit par la campagne présidentielle de Michel Rocard et, finalement, il présente son adhésion comme « la conséquence de rencontres amicales au sein de l’université. J’ai été entraîné au PSU plutôt que vers la Ligue car le PSU proposait une variété d’opinions qui pouvait séduire l’étudiant que j’étais, en recherche d’une ligne politique45 ». Chez Pierre Brana les rencontres ont aussi joué un rôle. Cadre d’EDF dans les Côtes-du-Nord, il sympathise avec Antoine Mazier et Yves Le Foll. Cependant, il analyse son adhésion au PSU comme le constat de l’impasse de la seule action syndicale dans laquelle il s’était engagé après son retour d’Algérie46. Le parcours de Pierre Brana met en exergue la place de la syndicalisation dans le parcours des adhérents du PSU en Gironde. En 1967, le taux de syndicalisation est de 70 %47 et, parmi ceux qui connaissent ici leur premier engagement politique, ils ne sont que sept à ne pas afficher une appartenance syndicale. L’adhésion au PSU peut présenter un débouché politique à une action engagée sur le terrain syndical laquelle est aussi l’occasion d’établir des liens personnels qui peuvent aboutir à prendre la carte du parti48.
23Amenés à adhérer au PSU, certains le quittent plus ou moins rapide49. Mais d’autres restent, y trouvant au moins pour un temps leur compte.
Un militantisme original ?
24D’abord, le PSU séduit parce qu’il est un lieu de débats, souvent à l’origine des tensions évoquées précédemment, mais qui constituent un « bouillonnement intellectuel50 », offrant à ceux qui s’y investissent le cadre d’une formation intellectuelle et politique à travers la lecture des ouvrages fondamentaux de la philosophie politique ou de l’économie politique51, ou à travers le contact de personnalités dont les travaux et la réflexion enrichissent l’approche théorique des cadres52. Bien qu’ils reconnaissent aujourd’hui que ces débats prenaient parfois, surtout après mai 1968, un caractère délirant ou absurde, les anciens du PSU admettent qu’ils furent aussi l’occasion de l’apprentissage de la rhétorique et de la stratégie politique.
25Ce souci de formation et de réflexion devant nourrir l’action politique se manifeste en particulier dans l’initiative de Jean Cavignac de créer l’Institut aquitain d’études sociales (IAES) en novembre 1968. Conservateur aux archives départementales de la Gironde, alors secrétaire fédéral du PSU, il veut développer les études sur le mouvement ouvrier en Aquitaine en regroupant des chercheurs, historiens ou sociologues par exemple, mais aussi des acteurs de ce monde ouvrier et tous ceux qui s’y intéressent. Le noyau fondateur de l’IAES est constitué de militants du PSU53 et cette institution permet à ceux-ci de se retrouver quand leurs options politiques respectives les auront éloignés.
26Quels thèmes étaient au cœur des discussions et étaient portés par les militants girondins du PSU ?
27Claude Jaumouillé, un des responsables fédéraux de la période 1960-1967, explique à l’occasion des élections cantonales de 1964 que « le PSU est le parti de l’unification socialiste. Il travaille avec persévérance à la constitution d’un front socialiste unissant toutes les organisations populaires pour offrir aux femmes et aux hommes de ce pays… une alternative socialiste54 ». Et il met en première place de son programme la défense de l’école publique et précise qu’il défendra avec énergie le programme du CNAL.
28Le thème de l’autogestion n’apparaît dans les professions de foi des candidats PSU qu’après mai 1968. Mais les militants n’ont pas attendu les événements pour être sensibilisés à cette question. Pierre Bernard, responsable fédéral défenseur de la motion de Poperen en 1963, estime ainsi que, malgré les désaccords qui pouvaient survenir, il est resté au PSU en raison de son attachement à la stratégie unitaire et à l’autogestion55. Mais, à part une approche théorique présentée dans les interventions des militants ou dans les opérations de soutien aux luttes exemplaires de Lip ou du Larzac, le thème du contrôle de l’entreprise ne trouve pas de débouchés dans le département.
29Ce qui n’est pas tout à fait le cas de l’autre thématique que développent les militants locaux et qui prolonge le thème de l’autogestion : « le contrôle des habitants sur leur vie quotidienne, leur quartier, leur commune, leur région56. » Ils s’investissent alors dans la lutte contre le projet d’aménagement de la côte aquitaine57 ou lancent des initiatives originales comme celle de l’association « Vivre au Grand Parc ? » dont est à l’origine Jean Cavignac.
30Le « Grand Parc » est un grand ensemble immobilier de Bordeaux qui accueille à partir de la fin des années 1960 20 000 habitants d’origines sociales diverses. L’association, qui est animée par des membres du PSU, mais aussi d’autres hommes ou femmes de gauche58, propose un projet autogestionnaire dont l’objectif est de rendre les habitants acteurs de la Cité afin qu’ils puissent négocier avec le pouvoir municipal l’équipement de celle-ci et proposer une animation sociale et ludique. Elle collabore avec les autres associations dans le comité de quartier où elle doit affronter une autre conception, plus traditionnelle, de la vie de quartier. Mais l’association ne renie pas ses convictions politiques et soutient, par exemple, la grève du personnel de la grande surface locale, ce qui provoque la rupture au sein du comité de quartier. Finalement, elle disparaît en 1973, n’ayant pas su vraiment lever les réserves de la population à son égard.
31La vie militante semble plus développée après 196859 mais auparavant des initiatives ont pu être prises. Ainsi, la fédération a pu revendiquer une section étudiante60. Cependant, dans la réalité, son activité ne repose que sur le volontarisme de son responsable, Jacques Capet61. Il vend Travailleur socialiste et organise des réunions sur le campus, représente le PSU dans les assemblées étudiantes et rédige, seul, un bulletin spécial ESU Regards qui connaît cinq numéros entre 1963 et 1965.
32Les campagnes électorales sont également l’occasion de faire connaître les positions du parti et la fédération a toujours cherché à y jouer un rôle naturellement limité par la faiblesse des effectifs. Il lui est souvent difficile de présenter plus de deux candidats aux scrutins uninominaux, à l’exception d’une embellie, éphémère, qui suit mai 196862. Paradoxalement, c’est alors le temps où l’organisation affiche ses prétentions révolutionnaires et relativise le rôle des élections63. Mais les candidats expliquent à l’occasion du scrutin cantonal de 1970 qu’ils veulent utiliser l’élection comme « une tribune si restreinte soit-elle pour faire connaître ses conceptions de la lutte contre le régime et rechercher avec les travailleurs les conditions actuelles de la lutte64 ». Ils organisent alors des réunions-débats ou publient dans la presse régionale des communiqués sur les luttes sociales, la santé, les travailleurs immigrés, mais ils cherchent aussi à atteindre d’autres groupes sociaux, comme les agriculteurs ou les artisans et commerçants. Néanmoins, la faiblesse des résultats, la persistance de tensions, les départs plus ou moins discrets amènent les militants à se poser la question de la pertinence de la stratégie adoptée.
La dispersion du PSU
Une fédération peu présente dans la vie politique locale
33Pour assurer sa présence, la fédération a cherché à mettre en place des stratégies électorales différentes. Dans un premier temps, elle a fait appel ou a soutenu des sympathisants. Lors des élections municipales de 1965, les responsables locaux expliquent au Centre national que la faiblesse de leur présence sur les listes des communes les plus importantes du département est compensée par celle d’« alliés » ou de sympathisants. De qui s’agit-il ? D’après les militants locaux, il s’agit de personnalités qui partagent les idées du PSU, qui lisent parfois Travailleur socialiste mais qui n’ont pas adhéré ou qu’on n’a pas fait adhérer en raison de la confusion qui règne dans le parti65.
34L’autre stratégie consiste à se rapprocher d’autres forces politiques en vue de constituer au niveau local le front socialiste. Mais la SFIO locale reste dans une logique de troisième force, et de toute manière, le PSU pèse peu dans le département. D’après les correspondances envoyées par la fédération, le PCF prête dans un premier temps une oreille attentive aux demandes du PSU, sans doute pour gêner la SFIO locale et aussi compléter certaines de ses listes pour les élections municipales en donnant une image d’ouverture. Les PSU se retrouvent alors dans des listes à direction communiste contre, parfois, des listes de droite et, souvent, des listes de troisième force, à l’exception de Lormont, commune de la banlieue nord de Bordeaux où un véritable front socialiste se met en place, avec succès.
35Ensuite, un débat agite la fédération au sujet des relations avec la FGDS. Claude Jamouillé, secrétaire fédéral, préférerait éviter de trop montrer les faiblesses du PSU et participer à des campagnes communes. Maurice Carmona et Yves Hervouet prônent au contraire l’autonomie au premier tour. Ces derniers l’emportent pour les législatives de 1967 et ce débat n’est pas étranger à la crise fédérale de cette même année.
36Enfin, dernière voie adoptée, le PSU tente de se rapprocher d’autres composantes de la gauche qui s’apparentent plus au niveau local à des groupuscules. Lors du scrutin de 1967, Jean-Claude Cluzan est le suppléant de Pierre Biondini, de Jeune République. En 1970, les discussions avec la CIR échouent avant les cantonales de 1970. Les élections municipales de 1971 sont l’occasion de négociations avec Lutte Ouvrière. Elles échouent à l’exception de Bordeaux où la direction politique fédérale donne son aval pour une liste commune. Mais Pierre Brana, plutôt hostile au rapprochement avec les groupes révolutionnaires, obtient un nouveau vote contraire. Finalement, il n’y a pas de candidats PSU lors de ce scrutin.
37Là comme ailleurs, le découragement face à ce qui peut être vécu comme une absence de perspective politique entraîne un intérêt croissant pour l’entreprise de rénovation de la gauche non communiste.
Rejoindre le parti socialiste
38Il est difficile de savoir ce que font ceux qui abandonnent le PSU : refus d’un nouvel engagement, orientation vers l’extrême gauche comme Jean Cavignac ou bien adhésion au nouveau parti socialiste. Cette dernière trajectoire peut être illustrée par trois itinéraires différents.
39Claude Jaumouillé fut parmi les premiers à franchir le pas en rejoignant le nouveau Parti socialiste en 1969 en compagnie des amis de Jean Poperen ; il retrouvait ainsi une organisation qu’il avait quittée en 1960 pour adhérer au PSU.
40Pierre Bernard, camarade du précédent, rompt avec le PSU en 1969, dénonçant sa dérive gauchiste après le congrès de Dijon mais sans rejoindre le PS. Il crée dans sa ville, Libourne, un groupe d’études et d’actions municipales, et finalement, imitant un de ses mentors en politique, Gilles Martinet, adhère au PS en 1972 où il milite au sein du CERES66. Mais, comme Martinet, il n’y est pas très à l’aise et retrouve ses anciens camarades du PSU à l’occasion des Assises du socialisme.
41Pour Pierre Brana, c’est la signature du programme commun qui lui a fait prendre conscience que quelque chose changeait au sein de la gauche française67. Fatigué par la guerre des tendances, le secrétaire fédéral hésite lui aussi alors à suivre Gilles Martinet. Finalement, il reste mais soutient l’initiative des Assises du socialisme. Et avec une trentaine de ses camarades locaux, il adhère alors au PS.
42Comment se passe l’intégration dans une fédération qu’ils avaient souvent dénoncée comme dévoyant la cause socialiste ? Les militants socialistes ne sont pas indifférents à l’arrivée de cette nouvelle tendance. L’amendement Martinet déposé à l’occasion du congrès de Pau obtient en Gironde 28,5 % des mandats, soit le double, ou presque, de son score national. Pierre Brana donne une explication à ce résultat : « Beaucoup d’adhérents girondins avaient été intrigués par notre esprit militant qui contrastait énormément avec l’esprit gestionnaire pépère qui régnait dans la fédération. Et puis comme cela n’était qu’un amendement au texte majoritaire, beaucoup se sont dit : cela ne coûte rien de le voter68. » Mais il ne fait qu’amplifier la méfiance des cadres et des élus du PS69. Les nouveaux venus pensent apporter avec eux une vraie culture militante. « Les dirigeants du PS girondin avaient peur que les gens des Assises n’importent une sensibilité gauchiste. Ils n’étaient pas vraiment habitués à ce que toutes les questions de fond soient discutées70 » pense Pierre Bernard. En outre, ils estiment qu’ils ont amené la fédération socialiste à s’intéresser à certaines questions comme la lutte dans les entreprises ou le cadre de vie. Intégré à la majorité du parti, Pierre Brana devient secrétaire fédéral aux entreprises tandis que Laure Lataste, « figure de proue du PSU71 » dans les années 1970, prend la responsabilité de l’action féminine en 1978. Avec le recul, Pierre Brana regrette la méfiance qui a pu exister à cette époque car il estime qu’une vraie complémentarité pouvait exister entre la culture militante des anciens du PSU et la culture électorale héritée de la SFIO. Si on peut s’interroger sur l’influence de la première sur les militants socialistes, on peut par contre observer que les anciens du PSU ont su adopter la seconde. Les trois personnalités citées ont tous entamé une carrière municipale72. Pierre Bernard et Pierre Brana sont élus au conseil général et le second, leader du courant rocardien73, est député du Médoc74. D’autres anciens militants du PSU sont devenus des élus socialistes. Joëlle Dusseau fut conseillère municipale de Bruges75 en 1983 avant d’accéder au conseil régional et au conseil général. Et elle devient sénatrice en 199376. Un autre parcours intéressant est celui de Jean-Jacques Benoit, conseiller général de Pessac en 1988 puis maire de la ville en 2008 après avoir été un des dirigeants des ESU au début des années 1970 et avoir quitté le PSU avec la Gauche révolutionnaire77.
Rester au PSU
43Ceux qui rejettent cette stratégie comprennent et ressentent la frustration que peut représenter l’absence de débouchés politiques à l’action militante engagée. Mais ils ne croient pas au Parti socialiste : « Nous pensions que le PS n’était pas dans une perspective révolutionnaire autogestionnaire et qu’il n’était pas possible de transformer le Parti socialiste de l’intérieur78. » Pour eux, le départ vers le PS est à la fois une illusion, celle de changer le PS79, et une clarification car ceux qui partent défendaient à leurs yeux une option réformiste.
44La fédération PSU poursuit donc sa route avec une cinquantaine de militants, dont la moitié vient de prendre sa carte et une autre moitié appartient à la CFDT80. L’année suivante, l’effectif augmente d’une vingtaine de membres grâce au renfort, éphémère, de l’Alliance marxiste révolutionnaire81. Les militants PSU participent alors à des combats de nature écologique comme la lutte contre l’installation de la centrale de Braud Saint-Louis à proximité de Blaye sur l’estuaire de la Gironde. L’élection présidentielle de 1981 marque la fin d’une autre illusion, celle la capacité du PSU à légitimer son existence au sein de la gauche. Pour les derniers adhérents, cette élection, où la joie est mêlée au scepticisme, signifie la fin de l’aventure du parti82.
45En conclusion, que retenir de l’aventure du PSU en Gironde ? La permanence de l’organisation contraste avec l’absence d’une réelle influence de cette fédération dans la vie politique locale. Et inversement, la vie politique locale semble n’avoir eu que peu d’influence sur l’histoire du PSU girondin qui reproduit dans ses grands traits, et à une plus petite échelle, celle de l’ensemble de l’organisation. L’adhésion, la mobilisation ou le retrait répondent à l’examen d’une situation globale et non à des considérations locales.
46Pourquoi le PSU n’a pu se développer en Gironde ? Bien sûr, les querelles intestines dans lequel s’enferment des militants, de culture politique différente, finissent par les exaspérer car ne leur permettant pas d’accomplir leur aspiration à un renouveau du socialisme. Mai 1968 a pu représenter un espoir, mais non concrétisé à cause de cette difficulté à vivre ensemble dans l’organisation. Mais ce type d’organisation éprouve des difficultés à obtenir une audience au sein d’un département comme la Gironde car ici « gauche » a du mal à rimer avec « transformation de la société ». La gauche obtient des succès dans le département quand elle arrive à allier une proximité, qui peut être militante mais qui est surtout celle des élus, avec un discours où peuvent se reconnaître celles et ceux qui se sentent à l’écart de l’évolution économique et sociale. Une pratique partisane axée, plus ou moins volontairement, sur le militantisme et sur une perspective révolutionnaire a peu de chances de succès en Gironde.
47Alors pourquoi l’organisation a-t-elle pu se maintenir malgré tout ? Le PSU fut le refuge des hommes et des femmes de gauche qui aspiraient ou imaginaient une nouvelle voie vers le socialisme, qu’elle soit stratégique (le front socialiste) ou idéologique (l’autogestion et les thèmes qui en découlent). Ils ne furent pas très nombreux dans le département mais la présence de l’agglomération bordelaise leur permettait de l’être assez pour conserver une structure. Certains sont partis pour des raisons stratégiques, d’autres pensaient rester fidèles à leurs convictions et quelques-uns ont gardé la maison jusqu’au bout. La fonction du PSU fut ensuite assumée par d’autres organisations où des anciens du parti ont pu s’y retrouver, comme le montre le parcours de Jean-Marie Harribey. Après une parenthèse politique, et syndicale83, il reprend son engagement au moment des grèves de 199584 et adhère aux Verts en 1997, croyant pouvoir concilier la perspective révolutionnaire avec les thèmes écologiques. Mais très vite déçu, il se lance dans l’aventure d’Attac85 où il peut à la fois exprimer sa critique du capitalisme, son souci d’éducation populaire, sans, peut-être, connaître les difficultés de la compétition électorale. À Attac, il dit avoir retrouvé beaucoup d’anciens du PSU : « tous ceux qui ont la même couleur de cheveux que moi sont passés par le PSU86. » Le mouvement écologique dans les années 1990, l’altermondialisme dans les années 2000, peut-être aujourd’hui une extrême gauche emmenée par la figure d’Olivier Besancenot ont pris le relais du PSU.
48L’observation de cette petite fédération PSU du Sud-Ouest nous confirme que si désormais le Grand Sud-ouest et la Bretagne sont devenus les deux grandes zones de force électorales du PS, l’implantation et le développement du socialisme n’y reposent pas sur les mêmes matrices. Et elle doit inciter à approfondir notre connaissance de cette implantation socialiste dans le département et dans la région.
Notes de bas de page
1 René Cassagne (1913-1968) fut maire de Cenon, sur la rive droite de l’agglomération bordelaise, de 1948 à sa mort. Secrétaire fédéral de 1957 à 1965, il est député de la Gironde à partir de 1958.
2 Robert Brettes (1902-1974) est maire de Mérignac sans discontinuité à partir de 1945, conseiller de La République de 1946 à 1958, député de 1962 à 1973.
3 Sadoun Marc, « Sociologie des militants et sociologie du parti : le cas de la SFIO sous Guy Mollet », Revue française de Science Politique, vol. 38-3, 1988, p. 348-369.
4 Nous pensions pouvoir nous appuyer sur le fonds d’archives détenu par l’Institut aquitain d’études sociales et déposé aux archives départementales de la Gironde. Ceux-ci sont en train de rénover leur annexe réservée aux archives contemporaines. Malgré l’accord et le soutien des responsables de l’IAES, le conservateur des archives a refusé catégoriquement l’accès au fonds.
5 Ce chiffre est extrait des « statistiques de la fédération de la Gironde » envoyées au siège national : Archives Nationales (AN), fonds PSU : 581 AP 130 dossier 446. Mais Pierre Brana et Joëlle Dusseau écrivent dans l’article qu’ils consacrent à l’origine du PSU en Gironde que le trésorier fédéral recensait avant le congrès d’octobre 1960 137 cartes : Brana Pierre, Dusseau Joëlle, « Contribution à l’histoire d’un parti, le PSU en Gironde des origines à 1968 », Bulletin de l’Institut Aquitain d’Études Sociales, 2e semestre 1974.
6 Il nous manque des données chiffrées pour la période qui suit mai 1968. Joëlle Dusseau parle alors d’un chiffre record de 200 adhérents : Dusseau Joëlle, « Histoire de la fédération de la Gironde du PSU de mai 1968 à octobre 1974 », Bulletin de l’Institut Aquitain d’Études Sociales, 2e semestre 1980. La seule statistique que nous possédons est un état vraisemblablement partiel qui date du 7 juin 1969 et indique 98 adhérents (AN, fonds PSU : 581 AP 84).
7 C’est-à-dire le nombre d’adhérents déclarés (AN : fonds PSU : 581 AP 84) divisé par le nombre d’habitants du département (recensement de 1962) multiplié par 10 000.
8 Le taux d’implantation est de 17 pour 10 000 en Gironde, 35 pour 10 000 pour la France entière.
9 Les autres départements de l’Aquitaine et les départements charentais.
10 24 pour 10 000 pour la Dordogne, 27 pour 10 000 pour la Charente-Maritime.
11 Moyenne des feuillets de la fédération pour la période 1963-1964 : rapports statutaires pour le congrès national de 1965.
12 AN, fonds PSU : 581 AP 59.
13 AN, fonds PSU : 581 AP 130. Compte rendu de cette réunion dans Socialisme girondin, le bulletin fédéral, en novembre 1961.
14 Bordeaux regroupe 51 % des adhérents en 1961, 28 % en 1967 ; son agglomération 79 % des adhérents en 1961, 65 % en 1967.
15 Arcachon-La Teste, Libourne et Sainte-Foy-la-Grande : pôles tout relatifs car il s’agit de groupes d’une dizaine de personnes.
16 AN, Fonds PSU : 581 AP 104.
17 31 des 68 adhérents.
18 24 soit un peu plus d’un tiers de l’effectif de la fédération.
19 Celui-ci est en fait conseiller d’orientation psychologue.
20 Maître-assistant en histoire moderne à l’université de Bordeaux.
21 Professeur de chinois à l’Université de Bordeaux.
22 Il écrit en 1998 : « J’avais tout pour plaire dans un parti qui avait très peu d’ouvriers », Bulletin de l’IAES, 71, novembre 1998.
23 Il faut néanmoins souligner l’existence d’une section que l’on peut qualifier de rurale. Créée en 1963, la section de Sainte-Foy-La-Grande accueille en 1967 trois cultivateurs, issus de la même famille dont le père est un ancien de la SFIO. On y observe aussi la présence d’un inséminateur, de l’instituteur et du boulanger.
24 Il n’y a pas malheureusement d’études sur la SFIO girondine dans les premières années de la Ve République.
25 Il n’y avait en 1960 que 18 membres de l’UGS en Gironde dont 10 auraient rejoint alors le PSU, d’après Brana Pierre et Dusseau Joëlle, op. cit.
26 Au congrès fédéral de septembre 1958, cette motion n’obtient que 327 mandats contre 1 583 à celle d’Augustin Laurent et 217 à celle d’Albert Gazier.
27 La fédération SFIO de la Gironde n’est pourtant pas une fédération molletiste. La motion Gazier arrive en tête en 1961 et, si, René Cassagne parvient alors à faire adopter une motion de synthèse fédérale, il soutient l’initiative de Gaston Defferre en 1965. Une étude de la fédération SFIO locale avant Épinay nous manque mais nous pouvons avancer la double hypothèse que les socialistes girondins aspirent peut-être à un renouveau de leur parti mais dans le cadre d’une stratégie de troisième force ou centriste. En d’autres termes, le front socialiste est loin d’avoir leurs faveurs.
28 AN, fonds PSU : 581 AP 85. Lettre de Tauzin-Fin, trésorier fédéral à J. Blaise, trésorier national (13 octobre 1963).
29 AN, fonds PSU : 581 AP 330. Lettre de Jean-Louis Minville à Édouard Depreux.
30 L’épisode est raconté par Pierre Brana et Joëlle Dusseau, op. cit. Yves Hervouet, qui est une des personnalités de la fédération dans les années 1960, se plaint de ne pas être convoqué aux réunions de sa section à Talence. Celle-ci vote une motion décidant de l’incompatibilité d’être élu au comité politique fédéral et de militer dans des organisations religieuses. Le fonctionnement de la fédération est alors bloqué : le comité fédéral est mis en sommeil, un secrétariat fédéral provisoire « neutre » est constitué, et une commission de conciliation est mise en place.
31 Tout en réalisant une synthèse au congrès de 1963 avec les partisans de la motion B de Gilles Martinet.
32 AN, fonds PSU : 581 AP 130. « Le secrétaire fédéral unique devient, suivant sa personnalité, tôt ou tard irremplaçable. Cela est très grave pour un parti de style nouveau et le secrétaire fédéral ne doit pas diriger comme il entend la fédération ». Compte rendu du congrès administratif du 5 novembre 1961, extrait de Socialisme girondin, novembre 1961.
33 Ibid.
34 Lettre au national du 13 décembre 1961 qui indique que six membres du parti ont démissionné après la visite.
35 Le secrétaire administratif, Jean-Louis Minville, n’admet pas le maintien du candidat PSU dans le 3e canton de Bordeaux en 1964 qui aurait, selon lui, contribué à faire élire le candidat UNR.
36 Celui-ci avait accepté de participer à une liste commune aux élections municipales de Bordeaux avec Lutte ouvrière. Ce désaccord entraîne le départ de Jean Cavignac pour l’organisation trotskyste.
37 Pour 1967, les chiffres manquent. La gauche révolutionnaire représentait en 1970 une trentaine de mandats dans la fédération. Or, Pierre Brana, alors secrétaire fédéral, nous a expliqué que la faiblesse de l’effectif l’avait incité à remplacer les congrès par des assemblées générales où tous les adhérents pouvaient être présents : le nombre de mandats correspond donc alors à peu près à un nombre d’adhérents. Selon Joëlle Dusseau, les Assises du socialisme ont vu le départ vers le PS de trente adhérents sur soixante-quinze en 1974 : Dusseau J., op. cit.
38 En 1972, le départ de la Gauche révolutionnaire amène la fédération à un effectif minimum d’une trentaine d’adhérents. Mais Pierre Brana estime que cette scission était une clarification nécessaire. Après 1974, les nouveaux responsables écrivent au national que la « fédération est très touchée par le départ du courant 1 » : AN, fonds PSU : 581 AP 119 : dossier 395.
39 Qui précédent la première grande scission que connut la fédération.
40 En 1965, le PSU présentait sept candidats aux élections municipales de Bordeaux dont six avaient appartenu à la SFIO ; parmi eux, un ancien maire du Bouscat, commune de l’agglomération bordelaise, Marius Marchandou. Mais tous les PSA n’étaient pas des anciens SFIO. Maurice Carmona, secrétaire fédéral dans les années 1960, candidat aux élections législatives de 1967, est un ancien radical mendésiste.
41 Parmi ceux-ci, les personnalités qui comptèrent le plus dans la fédération furent Yves Hervouet et Pierre Bernard.
42 La carte d’adhésion mentionne l’appartenance politique d’origine. Mais les renseignements qui proviennent pourtant de l’intéressé ne sont pas toujours viables : Pierre Bernard, par exemple, n’a pas indiqué sur sa carte son appartenance à l’UGS.
43 Entretien avec l’auteur.
44 Entretien avec l’auteur.
45 Entretien avec l’auteur.
46 Il est responsable départemental du syndicat des cadres CGT, responsabilité qu’il assume en Gironde lors de sa mutation en 1968.
47 80 % si on ne tient pas compte des retraités et des femmes qui ne travaillent pas. Au niveau national, ce taux est de 59 % (d’après Kesler Jean-François, De la gauche dissidente au nouveau parti socialiste. Les minorités qui ont rénové le PS, Paris, Privat, 1990, 471 p.).
48 Pierre Bernard a connu une trajectoire similaire puisqu’il raconte que sa prise de conscience politique, liée à la guerre d’Algérie, l’a d’abord amené au SNET avant de rejoindre l’UGS, puis le PSU. Jean Cavignac a milité à la CFTC puis à la CGC avant d’adhérer au PSU. En 1967, les syndicats enseignants sont majoritaires (SNI, SNES ou SNESUP, SGEN-CFDT) ; la CGT a douze représentants.
49 40 % des adhérents n’ont pas repris leur carte en 1969 : Dusseau Joëlle, op. cit.
50 L’expression est de Jean-Marie Harribey, entretien avec l’auteur.
51 Jean-Marie Harribey affirme avoir vraiment appris l’économie au PSU plutôt qu’à l’université où il termine alors ses études… d’économie.
52 Pierre Bernard, secrétaire fédéral dans les années 1960-1963, échange ainsi avec Jean Poperen qui, raconte-il, lui fait régulièrement la leçon, lui expliquant qu’un parti n’était ni un bureau d’études, ni une conscience mais un outil au service d’un projet de société.
53 Les trois secrétaires fédéraux de l’époque, Pierre Brana, Pierre-Émile Meyer et Jean Cavignac, Joëlle Dusseau, agrégée d’histoire, Gilles Bourseau, philosophe et, faisant le lien avec cette nouvelle génération d’adhérents, Maurice Carmona. Voir « Les 30 ans de l’IAES », Bulletin de l’IAES, 71, novembre 1998.
54 Archives départementales de la Gironde (AD 33) : 1 W 208.
55 Ce qui explique qu’il n’ait pas suivi ses camarades en 1967, s’étant rapproché notamment des idées développées par Michel Rocard.
56 Arch. Dép. de la Gironde : 1 W 218. Profession de foi de Laure Lataste, candidate aux élections cantonale des 1973.
57 Dans ce même document, la candidate PSU estime que les habitants refusent de voir cette région uniquement vouée au tourisme de luxe et réclament un développement qui leur permettrait de rester au pays.
58 Le premier conseil d’administration de l’association comporte 10 membres dont 3 PSU : Jean Cavignac, « Vivre au Grand Parc (1969-1973) », Actes du XXVIIe congrès d’Études régionales de la Fédération Historique du Sud-ouest, Société des sciences, Lettres et Arts de Pau et du Béarn, 1975, p. 197-205.
59 Cette affirmation est à nuancer en l’absence d’archives disponibles et parce qu’elle s’appuie sur la lecture des articles de Pierre Brana et de Joëlle Dusseau, tous deux acteurs du PSU après 1968.
60 À l’origine, il existe deux sections de jeunes, JSU et ESU. Nous n’avons pas d’éléments chiffrés sur celles-ci. En 1967, il ne reste plus qu’une section étudiante ne comprenant que cinq membres : trois garçons et deux filles, deux littéraires, un scientifique, un juriste et un élève de l’ENITA (École d’agriculture). En 1967, 10 % des adhérents ont moins de 25 ans et 16 % moins de 30 ans (22 % au niveau national) alors que les 2/3 de l’effectif ont entre 30 et 50 ans.
61 Arch. Nat., fonds PSU : 581 AP 42. Dans un courrier daté du 17 mars 1965, il explique que la section étudiante… c’est lui.
62 Cinq candidats sont présentés aux élections législatives de juin 1968, sept aux élections cantonales de 1970.
63 Les candidats PSU aux cantonales de 1970 écrivent dans leur profession de foi : « Parti qui entend donner la priorité à la lutte de masse, le PSU ne veut cependant pas refuser les combats électoraux mais relativiser leur rôle. » AD Gironde, 1 W 215.
64 Sud Ouest, 3 mars 1970.
65 Lors des cantonales de 1964, deux sortants sont ainsi présentés par la fédération comme de « tendance PSU ». Le premier, Marceau Dupuy, vient de quitter le parti : il s’agit d’un mendésiste, passé par le PSA et qui ne bénéficie que d’un soutien discret du PSU local afin de ne pas le gêner. Par contre, le soutien à un socialiste indépendant dans le canton de Sainte Foy la Grande est clair car le candidat ose dans sa profession de foi s’attaquer au pouvoir personnel, afficher des valeurs laïques et pacifiques, et prôner l’union revendicative des professions.
66 Il raconte dans Dellu A., Le PS en Gironde (1971-1981) : variations et permanences du socialisme girondin, TER, Histoire, Bordeaux 3, 1995 : « Nous avons demandé à écouter un responsable du PS. On nous a envoyé un “mitterrandiste”. Nous n’avons pas trouvé son discours extraordinaire. Alors quand on a reçu Didier Motchane nous présenter le CERES, il nous a parlé d’autogestion ; nous nous sommes dit : “Voilà un discours construit”. »
67 Entretien avec l’auteur.
68 Cité par Dellu A., op. cit.
69 « Je crois que beaucoup d’élus pensaient que nous nous battrions pour contrôler les sections car ils voyaient en nous des espèces de gauchistes qui en voulaient à leur place » ajoute Pierre Brana. Dellu A., op. cit.
70 Dellu A., op. cit.
71 L’expression est de Jean-Marie Harribey.
72 Claude Jaumouillé est maire du Porge, dans le Médoc, à partir de 1989. Pierre Bernard, déjà conseiller municipal PSU de Libourne en 1965 est réélu en 1977. Leader de l’opposition municipale à Robert Boulin, il doit néanmoins laisser la place à Gilbert Mitterrand dont il sera l’adjoint de 1989 à 2001. Pierre Brana est maire d’Eysines, dans la banlieue de Bordeaux, de 1977 à 2008.
73 Il est également un des animateurs du courant au niveau national.
74 De 1988 à 1993, puis de 1997 à 2002.
75 Commune de l’agglomération bordelaise.
76 Elle est frappée par le cumul des mandats. Elle choisit contre l’avis de la fédération de quitter le conseil général mettant en minorité le groupe socialiste. Exclue du parti, elle rejoint le parti radical de gauche. Elle n’est pas réélue au Sénat en 1998.
77 Il rejoint le PS dans les années 1980.
78 Entretien avec Jean-Marie Harribey.
79 Jean Marie Harribey raconte que Laure Lataste lui aurait assuré prendre le pouvoir en six mois au sein du PS.
80 Dont Jean-Marie Harribey qui prend la direction fédérale du syndicat à la suite de l’affaire des comités des soldats dans laquelle l’union girondine de la CFDT s’est retrouvé en première ligne. C’est cette même affaire qui lui vaut d’être suspendu un an après par la direction nationale du syndicat.
81 D’après Jean-Marie Harribey, Bordeaux était un des quelques pôles d’implantation de l’AMR. Mais ce rapprochement ne dure pas et en 1978 la fédération ne dispose plus que de 26 militants.
82 Entretien avec Jean-Marie Harribey.
83 Il quitte la CFDT au début des années 1980.
84 Il adhère alors à Sud Éducation.
85 Il en est un des cofondateurs.
86 Entretien avec l’auteur.
Auteur
pierre.simon25@wanadoo.fr
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