Tribulations corporelles et inhumation royale : les funérailles de René Ier d’Anjou (1480-1481)
p. 373-385
Texte intégral
1« L’an de l’Incarnation de Notre Seigneur 1480, le 10 juillet, l’illustre roi René, ce prince de paix et de miséricorde, a rendu son âme à Dieu au milieu des pleurs et des sanglots de tout son peuple [les Provençaux], et surtout de sa ville d’Aix. » C’est en ces quelques mots qu’Honorat de Mari, archivaire, rend hommage au roi dans un registre de la Chambre des comptes de Provence1. À sa mort, René avait soixante et onze ans2.
2On lui accorda, tant en Provence que dans son duché angevin, des funérailles qui surprennent par leur ampleur exceptionnelle3. Les sources qui les relatent sont à la hauteur de l’événement. Les trois testaments que René d’Anjou rédigea successivement manifestent déjà toute l’attention qu’il porta au rituel funéraire célébrant sa dépouille, mais également son cœur, enterré séparément : le premier fut écrit en 1453, année de la mort de sa première femme, Isabelle de Lorraine, et à la veille de son expédition italienne4 ; il le modifia une première fois en 1471 après le décès de son fils Jean de Calabre5, et une seconde fois en 1474 après la mort de son petit-fils et héritier, Nicolas, duc de Lorraine, afin de régler sa succession6. Autre document exceptionnel, les délibérations et les conclusions du chapitre de la cathédrale Saint-Maurice d’Angers – dont une copie subsiste à la Bibliothèque nationale de France – permettent de comprendre les diverses étapes qui ont permis le transfert du corps d’Aix à Angers ; le procès-verbal cite ainsi plusieurs lettres et « ordonnances » dictées par la veuve du roi, Jeanne de Laval, pour mettre en place la translation7. Enfin, le procès-verbal de l’ensevelissement, rédigé sur l’ordre de Jeanne de Laval par Balthazar Hirtenhaus, contrôleur des finances de la Chambre des comptes d’Aix, témoigne de l’importance des célébrations accordées au roi par sa région d’élection, le duché d’Anjou8.
3À partir de ces riches documents, et dans une perspective comparatiste, il convient d’insister sur les trois principales spécificités attachées à la mort de René d’Anjou : le choix surprenant qu’il fit d’une triple sépulture (corps, cœur, entrailles) à l’heure de la grande désaffection, dans les testaments du XVe siècle, à l’égard du découpage corporel ; la bataille acharnée, digne d’un roman, engagée autour de sa dépouille entre Provençaux et Angevins ; enfin l’utilisation, au-delà des codes et signes du paraître funèbre princier, de tous les rituels mettant en scène la majesté royale. Dans le cadre d’une concurrence possible des pouvoirs royaux et princiers par le cérémonial funèbre, les ducs de Bourgogne ou de Bretagne reprenant par exemple plusieurs symboles de souveraineté pour revendiquer l’autonomie de leur principauté, on peut s’interroger sur la signification politique des funérailles de René Ier9. Loin d’une présumée compétition cérémonielle, elles furent en réalité imaginées par Louis XI lui-même, neveu du défunt, et organisées, en collaboration avec Jeanne de Laval, à sa demande.
Élections sépulcrales et tribulations corporelles
Les nécropoles royales
4En dépit de ses dernières années passées en Provence, alors que le centre de gravité de sa principauté était en partie tourné vers ses terres méridionales, René choisit pour sa sépulture de rejoindre sa région « de cœur », berceau de son enfance, l’Anjou, et surtout la nécropole familiale, la cathédrale d’Angers, où il avait fait élever un tombeau qui contenait déjà les restes de sa première femme, Isabelle de Lorraine. Le choix de Saint-Maurice comme lieu d’inhumation familiale est ancien puisqu’il revient au fondateur de la nouvelle dynastie angevine, Louis Ier, qui y élit sépulture dans son testament dicté en 1383, non pour son corps cependant qui doit rejoindre le grand sanctuaire capétien de la Sainte-Chapelle de Paris et ses reliques salvatrices, mais pour son cœur10. Louis II en revanche choisit d’y déposer sa dépouille, et ce, dans ses trois testaments successifs11. Au-delà de la dévotion portée par les ducs à saint Maurice, saint militaire traditionnellement vénéré en Anjou12, il faut voir dans cette élection un élément de leur politique d’ancrer corporellement leur pouvoir et la célébration de leur mémoire dans leur principauté. Églises mères du diocèse, anciennes et prestigieuses, les cathédrales attirent logiquement les sépultures des grands. Au pouvoir spirituel de l’évêque correspond ainsi le pouvoir temporel, politique du prince, matérialisé après sa mort par sa sépulture. Le choix de René Ier de rejoindre la nécropole familiale est largement répandu dans l’aristocratie et répond à la nécessité de créer, sur le modèle royal, un « Saint-Denis » dédié à la célébration de la mémoire et du sang princier, et témoignant, par la proximité des sépultures, de la continuité lignagère. L’emplacement des monuments funèbres, regroupés dans le chœur, derrière le maître-autel, près de l’armoire-reliquaire du trésor de la cathédrale, est plus rare, et a sans doute fait l’objet d’âpres négociations13. Le célèbre tombeau royal est lui aussi original. La plupart des monuments funèbres aristocratiques du bas Moyen Âge sont des tombes dites « à pleurants », sur le modèle de celle de Philippe le Hardi à Champmol. Rien de tel ici. René Ier a choisi la veille forme de l’enfeu, ou tombeau sous arcature appuyé contre le mur, s’inspirant sans doute des grands monuments napolitains de la première maison d’Anjou14.
5Les Angevins sont aussi les seuls à la fin du XIVe et au XVe siècle à demander une partition corporelle – corps, cœur, entrailles – dans leurs testaments. À l’heure de la grande désaffection pour une telle coutume, pour des raisons religieuses (par humilité afin d’être inhumé selon les pratiques communes), psychologiques (le refus d’envisager à l’avance un découpage de sa dépouille que le pape lui-même considérait comme une pratique monstrueuse) ou politique (le souci pour le roi de France d’affirmer l’unité de son corps, métaphore de l’unité du royaume déchiré par la guerre)15, René Ier affirme, comme ses prédécesseurs, sa différence. Si dans le cas de Louis III († 1434), la double élection s’explique aisément par sa politique italienne – le corps, ancrage mémoriel, demeure à Naples, où le prince était tombé malade16, le cœur lui est ramené dans la nécropole d’Angers –, pour René Ier l’explication est plus complexe. Il n’occupe pas un autre pôle de son territoire, mais choisit à nouveau la ville d’Angers comme réceptacle pour son cœur, au sein de l’église des Mineurs dans la chapelle dédiée à saint Bernardin de Sienne († 1444) qu’il avait fondée (il y élit sépulture pour son cœur dès juin 1453)17. Il s’agissait pour lui de reposer au plus près des reliques du saint, face à l’entrée, où se trouvait l’armoire du sanctuaire les abritant18. Grande figure de l’observance franciscaine, René d’Anjou avait connu Bernardin à son arrivée en Italie ; il en fit son confesseur et contribua à obtenir sa canonisation en 145019.
6Seules les entrailles du prince devaient finalement rester en Provence, comme le rapporte la notice d’Honorat de Mari : Cujus viscera in capella sua regali Nostre Domine de Monte Carmeli ejusdem civitatis, ante altare ejusdem capelle cepelliuntur20. René, alors « exilé » en Provence, avait en effet fondé une chapelle – la chapelle Notre-Dame – dans l’église des Carmes d’Aix pour abriter ces organes putrescibles, généralement enterrés sur le lieu même du décès21. Pour en orner le maître-autel, il avait commandé, vers 1475-1476, au peintre Nicolas Froment le célèbre retable du Buisson Ardent, aujourd’hui conservé dans la nef de la cathédrale Saint-Sauveur22. Une épitaphe indiquait l’emplacement de la tombe : Hic sunt viscera serenissimi Sicilie et Jerusalem regis Renati Andegavie et Bari ducis et Provinciae comitis23. Elle était gravée sur une plaque de fer taillée en forme de cœur et incrustée dans le pavage24.
Les tribulations de la dépouille
7Âgé de soixante et onze ans, le roi René s’éteignit dans son palais aixois le 10 juillet 1480. L’Angevin Bourdigné, dont le récit est le plus proche des événements (1529), insiste, dans une rhétorique bien rôdée, sur la « bonne mort » chrétienne du souverain, qui « après avoir reçu les saints sacrements de l’Église, en confessant le nom de Jésus Christ et disant par le mérite de sa sainte Passion croire avoir rémission de ses péchés à Dieu son Créateur rendit son vertueux esprit25 ». Embaumée et déposée dans un cercueil en plomb, sa dépouille fut exposée pendant trois jours dans une salle du palais puis inhumée solennellement dans la cathédrale Saint-Sauveur d’Aix, à droite du maître-autel26. Dans un style de plus en plus lacrymal, les historiographes provençaux des XVIIe-XIXe siècles se plurent à décrire les manifestations exacerbées du deuil mené par les habitants du comté, effondrés par la perte de ce souverain tant aimé. Au-delà de l’exagération littéraire, il est manifeste que les Provençaux se soucièrent de conserver dans leur principauté la dépouille princière. Le comte était une personne publique et son cadavre apparaissait en quelque sorte comme la possession de ses sujets. Le prieur du couvent des Frères prêcheurs de Saint-Maximin invoqua par ailleurs le désir que René lui aurait exprimé avant sa mort de reposer dans sa basilique27. Sanctuaire dynastique voué au culte de Marie-Madeleine, celui-ci avait été richement doté et par la première et par la seconde Maison d’Anjou28. On conçoit ici toute l’importance pour une église de conserver le corps princier, source d’un immense prestige et de revenus confortables.
8Cette appropriation provençale illicite, cette « séquestration corporelle », ne fut pas du goût de la veuve du roi René, Jeanne de Laval, ni bien évidemment du chapitre de Saint-Maurice d’Angers29. La récupération était toutefois difficile. Elle nécessitait l’accord du nouveau comte de Provence, Charles III, la complicité de quelques chanoines de Saint-Sauveur, et, surtout, le plus grand secret30. Un an après la mort du prince, Jeanne envoya deux de ses serviteurs, Jean du Pastis, huissier de salle, et Jacquemin Mahiers, valet de chambre, récupérer par ruse le corps. Le cercueil en plomb fut dissimulé parmi les effets de sa garde-robe. Le procès-verbal de la translation révèle tout le secret de l’opération : « Ledit corps et son cœur soient mis secretement en une garde robe que ladite dame envoye par-delà, feignant que ce soit pour mettre robbes et tapisseries qu’elle avoit laissées en Provence31. » Les transferts de corps sont assez fréquents au bas Moyen Âge, les successeurs attachant une grande importance, d’une part, au respect des clauses testamentaires du défunt et, d’autre part, au regroupement du sang princier. L’exemple des ducs de Bourgogne est éloquent : Philippe le Bon fit ramener en 1420 le corps de son père, Jean sans Peur, de Montereau où il avait été assassiné, à la Chartreuse de Champmol32. En 1473, quelques années après sa mort survenue en 1467, la dépouille du « grand duc de Bourgogne » fut à son tour acheminée de Bruges où il était décédé à Champmol, et ce sur décision de son fils, Charles le Téméraire. Ces pérégrinations funèbres, sur des centaines de kilomètres parfois, étaient fort délicates. Les difficultés inhérentes à de tels voyages furent renforcées, dans le cas de René d’Anjou, par le secret nécessaire à l’opération : les porteurs avaient ordre de prendre les plus grandes précautions et de ne s’arrêter qu’en dehors des villes. Le stratagème réussit : on embarqua le corps sur le Rhône, il remonta le fleuve jusqu’à Lyon et, de là, gagna Roanne pour rejoindre le cours de la Loire. Le 18 août, il arriva aux Ponts-de-Cé où il fut conduit de nuit dans la collégiale ducale de Saint-Laud d’Angers. La complexité du transfert et la peur d’une inhumation tronquée, avec un « faux cadavre », expliquent que les organisateurs de la cérémonie angevine, en particulier Jean de la Vignolle, doyen de la cathédrale Saint-Maurice et de la collégiale Saint-Laud, en présence de chanoines, aient fait ouvrir la bière pour identifier le cadavre33. Tous le reconnurent « par la face qui fut découverte ». Le procès-verbal nous apprend qu’elle « n’etoit en rien deformé, decheuste ou empirée34 », discours classique en de telles circonstances, signe, sinon de la sainteté du roi, du moins de l’excellence de sa personne et de son gouvernement.
Le paraître princier
9Le 10 octobre 1481, René Ier fut solennellement inhumé dans la cathédrale Saint-Maurice d’Angers. Tous les codes du paraître funèbre princier sont présents, tant dans l’organisation du convoi – qui mène la dépouille de Saint-Laud à la cathédrale – que dans la décoration de l’église ou le déroulement du rituel. Les habitants d’Angers ont fait le déplacement pour rendre au roi un dernier hommage : il est vrai qu’on avait pris soin de les réunir préalablement dans la cathédrale pour leur expliquer le déroulement de la cérémonie. De même, l’administrateur de l’évêché, Auger de Brie, et les vicaires de la cathédrale avaient convoqué tous les abbés d’Anjou35. Loin d’être spontanés, ces grands rassemblements ecclésiastiques et populaires étaient ainsi scrupuleusement organisés.
10De manière classique, les clercs de la ville cheminent en tête de la procession, convoi ici composé des quatre ordres mendiants, des chanoines séculiers et réguliers d’Angers, ainsi que des bénédictins des abbayes de Saint-Aubin, Saint-Nicolas et Saint-Serge36. Suivent cinquante pauvres dont la présence avait été spécifiquement réclamée par le roi René dans son testament de 147437. Choisis par la famille du défunt, leur rôle était d’adresser à Dieu des prières pour son salut. Entièrement vêtus de noir, le visage caché par leur chaperon, ils donnent une dimension pénitentielle à la cérémonie38. Tous tiennent des torches allumées, renforçant le pouvoir propitiatoire de la lumière. Celle-ci doit être éclatante, sa profusion participant à la définition même du pouvoir princier39. Le nombre de torches ici demandé reste cependant relativement limité, face aux 300 torches utilisées aux funérailles de Philippe le Bon en 146740 ou aux 500 torches qui seront employées pour Pierre II de Bourbon en 150341. Plus près du corps (devant et derrière) cheminent les chapelains, les chanoines et l’administrateur de la cathédrale, Auger de Brie, ainsi que les grands abbés de la région, « en pontifical », ceux de Saint-Florent-lès-Saumur, de La Roë, de Saint-Georges-sur-Loire, de Notre-Dame du Loroux, de Chalocé, de Pontron et de Toussaint42.
11Tout aussi classiquement, on retrouve dans le convoi l’oligarchie urbaine, sous-maire et « gens de justice » – probablement les officiers royaux du baillage d’Anjou-Touraine, instauré en 148043 – venus rendre hommage au roi. Un héraut de l’ordre du Croissant précède directement le corps, « vestu d’une coste de veloux cramoysy en laquelle estoient les armes de sainct Maurice44 ». Passionné des rites chevaleresques et courtois, René d’Anjou avait fondé en août 1448 l’ordre du Croissant dont les cinquante chevaliers et écuyers étaient placés sous la protection de saint Maurice – l’ordre avait sa chapelle dans la cathédrale d’Angers45. Dans d’autres cérémonies princières, ce n’était pas le héraut d’armes qui était ainsi présenté, mais le collier de l’ordre porté processionnellement46.
12De la même manière, les ornements liturgiques ou décoratifs font partie de la panoplie habituelle des funérailles des « grands », qu’il s’agisse du drap d’or posé sur le cercueil – que l’on souhaite le plus large possible –, de la chapelle ardente ou de la ceinture de deuil. Celle-ci servait de support au décor héraldique. Fixés à l’aide d’épingles et de clous, les blasons étaient placés à intervalles réguliers. Celle de René Ier est ainsi parée d’écussons à ses armes « près semées47 ». Tous les autels de la cathédrale sont par ailleurs ornés de la croix de Jérusalem, « potencée à escussons des armes dudit sire, faicte à argent48 ». L’église scintille de multiples cierges – un grand cierge éclaire ainsi chaque blason aux armes du roi –, image anticipatrice du royaume de lumière promis aux élus49. Les autels et les chapelles latérales en sont aussi pourvus50. Le signe lumineux est encore renforcé par la présence de la chapelle ardente, érigée au milieu du chœur, qui caractérise, au moins depuis le début du XIVe siècle, les funérailles royales et princières – cependant, c’est dans la relation des obsèques de René Ier que la terminologie de « chapelle ardente » apparaît pour la première fois51. Au sommet de celle-ci, le nombre de croisées formées reflète le statut du défunt52. Pour de simples obsèques nobiliaires, la chapelle n’en comporte qu’une alors que celle du roi René est « à quatre croesées53 », ornées chacune des blasons royaux tenus par des anges54. La structure de bois, garnie de fine toile noire55, sert de support à une multitude de cierges – plus de mille ici, mais la comptabilité, disparue, ne permet pas de nuancer ces chiffres, sans doute surévalués56. On dispose aussi des cierges de neuf livres de cire aux quatre coins de la chapelle57. « Dieu est lumière », et le prince, en se parant de son éclat, se rapproche un peu de l’univers divin58.
13C’est dans ce cadre que la cérémonie liturgique est célébrée, comprenant vigiles et messe de requiem, célébrée par l’évêque de Fréjus59, l’abbé de Notre-Dame du Loroux faisant le diacre et l’abbé de Pontron le sous-diacre60.
Un hommage royal
14Cependant, au-delà des cadres habituels inhérents à ce type de célébrations, les funérailles du roi René comprennent des éléments spécifiques qui s’expliquent, et par la conjoncture, et par le rang particulier du défunt. Ainsi, les membres de l’Hôtel, ses officiers, ses vassaux, ses alliés et ses parents, qui composent coutumièrement le cœur même des processions funèbres, sont ici absents. Ils sont remplacés, dans les tâches qui sont les leurs, par les membres de l’université d’Angers : vingt écoliers licenciés portent le cercueil alors que le recteur et les docteurs de l’université (en droit canon, en droit civil et en théologie) soutiennent le poêle de drap d’or61. En réalité, les funérailles de René Ier ne ressemblent à aucune autre, d’une part, parce qu’elles se déroulent un an après le décès du prince – aucun serviteur ni vassal n’y participent donc, l’Hôtel est « rompu » depuis trop longtemps – et, d’autre part, parce que le duché appartient à la Couronne – on ne trouve donc aucun parent dit « du grand deuil », en particulier le successeur du défunt, Louis XI, le monarque n’assistant plus aux funérailles de ses proches depuis la fin du XIVe siècle62. Sa veuve, Jeanne de Laval, est également absente, et ce, de manière rituelle, les femmes ne participant pas aux convois masculins63. La première place est ainsi octroyée aux membres de l’université, signe du prestige et de la renommée de cette ancienne institution64.
15Autre particularité, le prince est représenté par un mannequin de cire, lui-même surmonté d’un dais, de velours noir, tenu par six docteurs, dais présent dans les convois royaux depuis 1322 (Philippe V)65, et symbolisant, au même titre que les Regalia, le pouvoir souverain. Un tel ciel était également employé depuis 1389 dans les entrées solennelles des monarques français66. En Provence, son utilisation est antérieure : il accompagnait le roi de Naples dans ses entrées depuis 1319 au moins – dès 1252 en Sicile67. Peu de princes du royaume bénéficiaient d’un tel insigne : seul Charles le Téméraire avait osé s’approprier ce symbole royal lors de la célébration des funérailles de son père Philippe le Bon à Bruges en 1467, et ce dans le contexte d’une affirmation de l’autonomie et de la souveraineté du duché de Bourgogne.
16L’utilisation de l’effigie est encore plus exceptionnelle, réservée exclusivement aux monarques (Charles VI en 1422, Charles VII en 1461) et à certaines de leurs épouses (Isabeau de Bavière en 1435, Charlotte de Savoie, veuve de Louis XI, en 148368), adoption liée à des raisons avant tout pratiques. Les dépouilles royales étaient en effet toujours exposées à découvert, avec leur habit d’apparat, et munies des Regalia. Rituel de souveraineté également pratiqué par la papauté et les souverains anglais, il différencie monde royal et princier – ducs et comtes reposant toujours dans un cercueil en plomb69. Or, l’intervalle entre la mort et l’inhumation augmentant, il avait fallu remplacer en 1422 le corps de Charles VI, impossible à présenter, par un mannequin aux visage et mains de cire, seules parties visibles de la dépouille par ailleurs recouverte du manteau royal. Celui façonné pour René Ier portait également « ung abillement royal de veloux cramoysi obscur, fourré de hermines ». Sa tête était ornée d’« une couronne moult riche, en sa main dextre tenoit ung ceptre doré de fin or, et en la senestre tenoit une pomme en laquelle avoit eslevé une petite croix, pareillement le tout doré ; et avecques ce avoit es mains gans, chausses et souliers, ainsi qu’il est de coustume es royaulx a avoir70 ».
17L’adoption de l’effigie s’explique ici par la titulature du défunt. René Ier, duc d’Anjou et comte de Provence, était aussi roi en titre de Jérusalem et de Sicile comme ses armes l’évoquaient à loisir71. Elle fut décidée par Louis XI, héritier des territoires angevins du prince, qui était intervenu dès sa mort pour honorer sa dépouille. Un mois après son décès, les 9 et 10 août 1480, il avait ainsi fait célébrer un service d’obsèques en sa mémoire dans la cathédrale Notre-Dame de Paris. Il y avait consacré plus de 900 livres tournois, tant le décor (tentures armoriées dans le chœur, chapelle ardente, grands blasons aux armes du prince) et le luminaire étaient importants (cierges fichés sur la chapelle, posés sur les autels, ou tenus par 200 pauvres). Le corps, alors inhumé à Aix, fut représenté, sans doute par un cercueil vide recouvert d’un poêle funèbre72. Ces cérémonies étaient fréquentes pour honorer un parent ou un grand serviteur royal. L’année suivante, Louis XI décida, sur l’insistance de Jeanne de Laval, d’organiser le transfert du corps d’Aix à Angers – le procès-verbal indique ainsi que la translation fut faite « par l’ordonnance du roy notre souverain seigneur et de ladite dame royne de Sicille73 ». Louis XI intervint ensuite directement auprès de la ville d’Angers pour que tous les honneurs soient rendus au prince : il manda par lettres « aux doyen et chappitre de la grant église [Saint-Maurice], et pareillement à l’université, au maire et soubz-maire et aux gens de justice de ladite ville d’Angiers, contenant comment ilz eussent, les presentes veuez, à ordonner et dispouser pour l’enterrement de son oncle […], et qu’ilz lui fissent l’onneur qui luy appartenoit74 ».
18Utilisée comme substitut corporel, l’effigie rendait possible l’exposition du prince dans toute sa majesté, muni de son habit royal et des Regalia afférentes à son statut – couronne, sceptre et globe doré crucifère avec lesquels il fut inhumé75. Par l’hommage qu’il rendait à son oncle, Louis XI se présentait comme son successeur incontesté et tentait de faire accepter plus facilement à ses nouveaux sujets angevins l’intégration du duché au royaume. Dans une moindre mesure, la cérémonie lui permettait aussi d’évoquer l’héritage napolitain du roi René, revendication dont son fils s’emparera.
19René Ier bénéficia enfin de funérailles de cœur exceptionnelles76. Il l’avait voulu ainsi, décrivant très précisément dans son testament les honneurs funèbres qui devaient lui être rendus, ce qui était alors peu courant. Il y sollicite la présence de toutes les églises d’Angers et de cinquante pauvres vêtus de noir, portant chacun une torche de trois livres de cire. Richement illuminée, munie d’une chapelle ardente, l’église des Frères mineurs devait être parée de tentures noires77.
20Ses désirs furent scrupuleusement respectés78. Si la richesse de l’ornementation ou l’utilisation d’une chapelle ardente ne sont pas une nouveauté dans de telles funérailles, on honora ici de manière particulière le cœur du défunt. Dans le convoi qui le menait de la cathédrale d’Angers aux Franciscains, le cœur, enchâssé dans une boîte d’argent, et porté, sur un large carreau de drap d’or rouge armorié, par quatre docteurs de l’université, était surmonté d’un dais de velours noir79. C’est la première fois qu’un tel baldaquin était utilisé pour des funérailles de cœur. Par la forme même prise par l’écrin cordial, le ciel s’apparente ici, au moins dans l’esprit des spectateurs, à celui porté au-dessus du Corpus Christi lors de la Fête-Dieu ou au-dessus des corps saints. De manière identique à la célébration accordée au corps, il était précédé du héraut de l’ordre du Croissant. Puis Jean de La Vignolle célébra la messe et déposa le précieux organe dans un trou creusé dans le mur de la chapelle Saint-Bernardin, devant l’autel de saint Michel, cavité ensuite refermée par une pierre, elle-même munie d’une grille80. Une épitaphe évoquait la mémoire du roi, et rappelait, par l’énumération de ses titres, l’étendue de son pouvoir, réel ou fictif :
« Cy gist le cueur de très haut et très puissant roi René, roy de Jerusalem et de Sicile, duc d’Anjou et de Bar, comte de Provence, lequel trespassa en la cité d’Aix, audit pays de Provence, l’an IIIIc IIIIxx le Xe jour de juillet, duquel le corps fut très honorablement mis en sepulture en l’eglise de Sainct-Maurice d’Angers en l’an ensuyvant81. »
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21Les funérailles de corps et de cœur de René Ier sont donc exceptionnelles, à l’image du prince qui était honoré. Dais, effigie, regalia mettaient en scène le grand roi que René rêva de devenir. S’il n’y parvint pas concrètement sur le terrain politique à la suite, notamment, de l’échec de ses entreprises italiennes, il le fut néanmoins pendant sa vie par l’ampleur de ses commandes et de ses œuvres artistiques et littéraires82, et après sa mort par la célébration de funérailles véritablement royales. Son neveu, Louis XI, l’avait voulu ainsi. Héritier des terres angevines du prince, il insistait ici, d’une part, sur leur incorporation complète à la Couronne et, d’autre part, sur l’héritage italien du roi René – même s’il ne fut pas lui-même l’initiateur des campagnes dans la péninsule, il laissait une porte ouverte à de possibles revendications, dont son fils Charles VIII se servit. En 1481, Louis XI était lui-même malade, atteint par des hémiplégies successives. Il mourut deux ans plus tard, le 30 août 1483, renonçant pour lui-même, dans une démarche inverse, et à la nécropole dynastique de Saint-Denis – il fut enterré, selon son désir, dans la collégiale Notre-Dame de Cléry – et au faste des funérailles monarchiques. Sans effigie, ni dais, ni convoi imposant, le roi fut inhumé « comme un simple fidèle », témoignant une fois encore de sa profonde originalité.
Notes de bas de page
1 « Die qua obiit serenissimus inclitus dominus noster rex Renatus. Anno Incarnationis Domini Nostri Jhesus Christi millesimo IIIIc LXXX, die lune decima mensis julii, hora secunda post meridiem vel circa, serenissimus et inclitus dominus noster rex Renatus, cujus anima in requie sempiterna permaneat, amen, princeps pacis et misericors, cum plantu et ploratu Provincialium et insuper Aquensium, obiit et suos dies clausit extremsos » (Arch. dép. des Bouches-du-Rhône [désormais ADBdR], B 18, fo 2, passage publié et traduit par Lecoy de La Marche A., Le roi René. Sa vie, son administration, ses travaux artistiques et littéraires d’après les documents inédits des archives de France et d’Italie, Paris, 1875, p. 426). Aussi Coulet N., « La mort et les obsèques aixoises du roi René : une prolifération narrative tardive », Les narrations de la mort, Bertrand R., Carol A. et Pelen J.-N. (dir.), Le temps de l’histoire, Aix-en-Provence, 2005, p. 89. Je remercie Noël Coulet de m’avoir aimablement fourni son article.
2 Matz J.-M. et Verry É. (dir.), Le roi René dans tous ses États (1409-1480), Paris, 2009.
3 Sur sa mort et ses funérailles provençales, Coulet N., « La mort et les obsèques… », op. cit., p. 89-100.
4 ADBdR, B 205.
5 Il meurt en 1470. Testament de 1471, ADBdR, B 690.
6 Calmet Dom A., Histoire de Lorraine depuis l’entrée de Jules César dans la Gaule jusqu’à la cession de la Lorraine, arrivée en 1737, Nancy, 1745-1757, t. III : Preuves, p. 676-685.
7 Une lettre datée du 23 juin 1481 rédigée sur l’ordre de Jeanne de Laval certifie qu’elle avait envoyé en Provence deux serviteurs, Jean du Pastis et Jacquemin Mahiers, pour ramener des effets personnels laissés dans le comté de Provence ; l’ordonnance est dictée par la reine le 24 juin et prescrit point par point à Jean du Pastis le stratagème prévu pour récupérer le corps (BnF, ms. fr. 24108, p. 16-21 [copies, extraits des registres des conclusions du chapitre de la cathédrale d’Angers, 1481] ; procès-verbal publié par Quatrebarbes Th. de, Œuvres complètes du roi René, Angers, 1845, t. I, p. 119-124). Pour les délibérations du chapitre d’Angers, Paris, BnF, ms. fr. 22450, p. 141-143 (copies, extraits des archives, cartulaires, nécrologes et obituaires des abbayes et prieurés d’Anjou).
8 ADBdR, B 168, publié par Lecoy de La Marche A., Le roi René…, op. cit., t. II, pièces justificatives, p. 387-394.
9 Gaude-Ferragu M., D’or et de cendres. La mort et les funérailles des princes dans le royaume de France au bas Moyen Âge, Villeneuve-d’Ascq, 2005.
10 Testaments et codicille de Louis Ier, duc d’Anjou (rédigés entre septembre 1383 et septembre 1384), Paris, Arch. nat., P 1334/17, no 33, 34 et 35. Ses dernières volontés ne furent pas respectées : à sa mort, survenue en septembre 1384 à Bari, la dépouille demeura longtemps dans cette ville avant d’être, d’après certains historiens, probablement transportée à la cathédrale d’Angers (Farcy L. de, « Les sépultures princières à la cathédrale d’Angers », Mémoires de la Société nationale d’agriculture, sciences et arts d’Angers, t. 8, 1905, p. 350).
11 Testaments de Louis II d’Anjou (rédigés en 1411, 1412 et 1417), Paris, Arch. nat., P 1334/17, no 42, 43 et 44.
12 Robin Fr., La cour d’Anjou-Provence. La vie artistique sous le règne de René, Paris, 1985, p. 54.
13 L’inhumation dans une cathédrale n’était pas toujours facile à obtenir et supposait de bonnes relations avec l’évêque du diocèse ; Jean de Berry se vit ainsi refuser un emplacement au sein de la cathédrale de Bourges (Lehoux Fr., Jean de France, duc de Berri. Sa vie, son action politique, 1340-1416, Paris, 1968, t. 3, p. 10). Sur le trésor en reliques de la cathédrale et l’armoire-reliquaire, Matz J.-M. et Comte Fr., Fasti ecclesiae gallicanae. Répertoire prosopographique des évêques, dignitaires et chanoines de France de 1200 à 1500, t. 7 : Diocèse d’Angers, Turnhout, 2003, p. 41.
14 Il en avait formé le projet dès son retour d’Italie : en 1444, il décide qu’il sera placé dans le chœur de la cathédrale d’Angers, du côté nord. Commencé en 1447-1448, il ne fut sans doute achevé que peu de temps avant l’ensevelissement du roi. Les principaux artistes de ce monument furent Jean Poncet, et surtout son fils Pons. Il comprenait un sarcophage de marbre noir orné d’armoiries, soutenant les gisants de René et de sa première femme, Isabelle de Lorraine, et encastré sous la deuxième arcature du chœur. Au-dessus du sarcophage, René avait fait placer une peinture réalisée par Coppin Delf représentant un Roi mort, squelette couronné, vêtu du manteau royal, et laissant échapper le sceptre, symbole de la vanité des choses terrestres (Robin Fr., La cour d’Anjou-Provence…, op. cit., p. 233-238).
15 Bande A., Le cœur du roi. Les Capétiens et les sépultures multiples XIIIe-XVe siècles, Paris, 2009, p. 150-151.
16 Paris, Arch. nat., P 1334/17, no 46 (testament de 1434).
17 ADBdR, B 205, fo 90.
18 Mérindol Ch. de, « Programmes de la décoration des demeures et des chapelles du roi René d’après l’héraldique et l’emblématique », Artistes, artisans et production artistique au Moyen Âge, Paris, 1987, t. 2, p. 244.
19 À Gênes en 1438, ou dans le royaume de Naples, Robin Fr., La cour d’Anjou-Provence…, op. cit., p. 56. Matz J.-M, « René, l’Église et la religion », Matz J.-M. et Verry É. (dir.), Le roi René dans tous ses États …, op. cit., p. 133. Les travaux de la chapelle se poursuivent jusqu’en 1460 environ, Mérindol Ch. de, Le roi René et la seconde maison d’Anjou. Emblématique, art, histoire, Paris, 1987, p. 68.
20 ADBdR, B 18, fo 2, cité par Coulet N., « La mort », op. cit., p. 89.
21 Mérindol Ch. de, Le roi René et la seconde maison d’Anjou…, op. cit., p. 75.
22 Robin Fr., « Le roi René, amateur d’art et mécène », L’Europe des Anjou. Aventure des princes angevins du XIIIe au XVe siècle, Paris, 2001, p. 262.
23 Bouche H., La chorographie ou description de Provence et l’histoire chronologique du même pays, Aix, 1664, t. I, p. 477, cité par Coulet N., « La mort et les obsèques… », op. cit., p. 96.
24 Farcy L. de, « Les sépultures princières… », op. cit., p. 382.
25 Jean de Bourdigné, Histoire aggrégative des Annales et chroniques d’Anjou, Angers, 1529, p. 172 vo, texte cité par Coulet N., « La mort et les obsèques… », op. cit., p. 90.
26 Voir le témoignage – très indirect – de Bourdigné, la « funébreuse solennité » fut célébrée « à grand appareil et triomphe » en l’église d’Aix. « En laquelle fut le corps royal, premièrement de précieuses et aromatiques liqueurs embaumé, et clos en un cercueil de plomb magnifiquement inhumé » (Jean de Bourdigné, Histoire aggrégative…, op. cit., p. 172 vo, texte cité par Coulet N., « La mort et les obsèques… », op. cit., p. 95). Certains jours de fête, la reine Jeanne de Laval faisait étendre un drap d’or sur le tombeau du roi dans la cathédrale (ibid., p. 95).
27 Voir la lettre de Charles III, nouveau comte de Provence, adressée au doyen et au chapitre de la cathédrale d’Angers en date du 10 octobre 1480 qui les informe de cette revendication provençale, Paris, BnF, ms. fr. 22450, p. 141-143, et Coulet N., Planche A. et Robin Fr., Le roi René. Le prince, le mécène, l’écrivain, le mythe, Aix-en-Provence, 1982, p. 43.
28 Matz J.-M, « René, l’Église et la religion », op. cit., p. 139.
29 Voir les délibérations du chapitre d’Angers, BnF, ms. fr. 22450, p. 141, qui demande à Jeanne de Laval et à Charles III que les dernières volontés du roi soient respectées.
30 Le 12 juillet, au vu des lettres de la reine, Charles III ordonna au doyen et aux chanoines de Saint-Sauveur de leur remettre la dépouille. L’archevêque d’Aix fut mis dans la confidence et s’entendit avec les chanoines qui paraissaient les plus sûrs (Lecoy de La Marche A., Le roi René…, op. cit., p. 427). Certains historiens accusèrent les chanoines de s’être laissés corrompre (Coulet N., « La mort et les obsèques… », op. cit., p. 99).
31 Quatrebarbes Th. de, Œuvres complètes …, op. cit., p. 119. Dans la cathédrale Saint-Sauveur, il fallut « rompre la muraille où étoit en sépulture les corps et cœur ».
32 Gaude-Ferragu M., D’or et de cendres…, op. cit., p. 68.
33 Sur Jean de La Vignolle, doyen de la cathédrale de 1465 à son décès survenu en 1495, et proche de Louis XI (Matz J.-M. et Comte Fr., Fasti ecclesiae gallicanae…, op. cit., p. 280-281).
34 Quatrebarbes Th. de, Œuvres complètes …, op. cit., p. 119. Le procès-verbal de l’ensevelissement indique que le cadavre était « aussi froiz que si n’y eust eu que cinq ou six jours qu’il eust été trespacé » (Lecoy De La Marche A., Le roi René…, op. cit., t. II, p. 388).
35 La situation du diocèse d’Angers était alors délicate. À la mort de Jean de Beauvau (évêque de 1447 à 1467, puis administrateur de 1476 à 1479), Louis XI imposa l’élection d’Auger de Brie, mais il ne fut jamais consacré et porta seulement le titre d’administrateur jusqu’à sa démission en 1482. Jean Balue en était normalement le titulaire depuis 1467 aux yeux de la papauté, malgré son arrestation sur ordre du roi en 1469 et son exil jusqu’en 1482 (Matz J.-M. et Comte Fr., Fasti ecclesiae gallicanae…, op. cit., p. 188-192). De ce fait, Auger de Brie n’officia pas lors de la célébration des funérailles de René dans la cathédrale.
36 Outre les quatre couvents mendiants, il y avait cinq collèges de chanoines séculiers de la ville (La Trinité, Saint-Mainbœuf, Saint-Maurille, Saint-Pierre et Saint-Julien), des chanoines réguliers (l’aumônerie Saint-Jean-l’Évangéliste et l’abbaye de Toussaint), surtout les collégiales comtales de Saint-Laud et de Saint-Martin, et les abbayes bénédictines de Saint-Aubin d’Angers, Saint-Nicolas et Saint-Serge (Lecoy de La Marche A., Le roi René…, op. cit., t. II, p. 391).
37 Calmet Dom A., Histoire de Lorraine…, op. cit., t. III, p. 677.
38 Aladjidi P., Le roi, père des pauvres (France XIIIe-XVe siècle), Rennes, 2008, p. 355.
39 Lecuppre-Desjardin É., « Les lumières de la ville : recherche sur l’utilisation de la lumière dans les cérémonies bourguignonnes (XIVe-XVe siècles) », Revue historique, t. 301, 1999, p. 23-43 ; Vincent C., « Fiat lux ». Lumière et luminaires dans la vie religieuse en Occident du XIIIe au XVIe siècle, Paris, 2004, p. 495. Dans les entrées royales, le signe lumineux semble beaucoup moins présent (ibid., p. 193).
40 Lory E.-L., « Les obsèques de Philippe le Bon, duc de Bourgogne, mort à Bruges en 1467 », Mémoires de la commission des antiquités du département de la Côte-d’Or, 1869, p. 237.
41 La Mure J.-M. de, Histoire des ducs de Bourbon et des comtes de Forez, Paris, 1860-1897, t. III : Preuves fondamentales, p. 224.
42 Saint-Florent-lès-Saumur : abbaye bénédictine, fondée vers 940, par Thibault, comte de Blois ; La Roë : Notre-Dame, abbaye d’Augustins, puis de chanoines réguliers, née vers 1091 autour de l’ermitage de Robert d’Arbrissel ; Saint-Georges-sur-Loire : abbaye d’Augustins, fondée vers 1152 ; Notre-Dame du Loroux : abbaye cistercienne, fondée en 1121 par Foulques V comte d’Anjou ; Chaloché : monastère de la congrégation de Savigny, fondé avant 1119 par Hamelin de Ingrandes, devenu cistercien en 1147 ; Pontron : abbaye cistercienne, filiale du Louroux-en-Monnaie, 1134 ; Toussaint : Angers (voir note 37). Lecoy de La Marche A., Le roi René…, op. cit., t. II, p. 391.
43 Il peut aussi s’agir de représentants des justices seigneuriales, sans oublier que les familles de maires et d’échevins donnent aussi des présidents d’audiences seigneuriales. Je remercie Jean-Michel Matz de m’avoir fourni ces renseignements.
44 Lecoy de La Marche A., Le roi René…, op. cit., t. II, p. 393.
45 Dès sa fondation, le duc ordonna que les manteaux des chevaliers soient de velours cramoisi, également couleur du tabard des officiers d’armes. Les manteaux des princes étaient en velours fourrés d’hermines, ceux des chevaliers en velours fourrés de menu vair et ceux des écuyers en satin fourré de menu vair (Coulet N., Planche A. et Robin Fr., Le roi René…, op. cit., p. 31).
46 Lors de la cérémonie commémorative célébrée en l’honneur d’Amédée VI de Savoie (1383), le collier de l’ordre qu’il avait créé (l’Ordre du collier) fut arboré (Pollini N., La Mort du Prince. Rituels funéraires de la Maison de Savoie, 1343-1451, Lausanne, 1994, p. 93). Sur les hérauts d’armes, Wagner A. R., Heralds and heraldry in the Middle Ages: an inquiry into the growth of the armorial function of heralds, Oxford, 2000.
47 Lecoy de La Marche A., Le roi René…, op. cit., t. II, p. 389.
48 Ibid., p. 389.
49 Vincent C., « Fiat lux »…, op. cit., p. 483.
50 Dix cierges (de cinq livres de cire chacun) furent ici placés sur le maître-autel alors que deux cierges (d’une livre de cire) ornaient les vingt-huit autels secondaires (Lecoy de La Marche A., Le roi René…, op. cit., t. II, p. 389).
51 « En laquelle grant eglise avoit, ou meilleu du cueur, une chapelle ardente moult belle et magnifique » (ibid., p. 389). L’édifice fut longtemps désigné par plusieurs expressions, « maison au luminaire », « maison de bois », « chapelle de bois », ou « traveil ».
52 Vale M., « A Burgundian Funeral Ceremony: Olivier de La Marche and the Obsequies of Adolf of Cleves, Lord of Ravenstein », English Historical Review, 1996, p. 932.
53 Lecoy de La Marche A., Le roi René…, op. cit., t. II, p. 389.
54 Ibid., p. 389.
55 Ibid., p. 389.
56 Selon Jacques du Clercq, la chapelle ardente de Philippe le Bon en 1467 comprenait 1 400 cierges alors que la relation de ses funérailles fait mention de deux cents chandelles seulement, Du Clercq J., Mémoires, éd. Frédéric, baron de Reiffenberg, Bruxelles, 1823, p. 305.
57 Lecoy de La Marche A., Le roi René…, op. cit., t. II, p. 389.
58 Vincent C., « Fiat lux »…, op. cit., p. 37.
59 En réalité, l’identification de l’évêque mentionné est difficile puisque le terme de « Verjeuce » est employé. Le rapprochement avec Fréjus est probable, mais sans aucune certitude. L’évêque de Fréjus est alors Urbain de Fiesque (ou Fieschi), nommé par Sixte IV en 1472, mais sans l’accord du roi René, ce qui provoqua une grave crise entre Rome d’une part, le duc et les chanoines de la cathédrale d’autre part, crise qui s’acheva quatre ans plus tard (Lecoy de La Marche A., Le roi René…, op. cit., t. I, p. 544).
60 Sur ces établissements, voir note 43.
61 Lecoy de La Marche A., Le roi René…, op. cit., t. II, p. 390.
62 Pour des raisons conjoncturelles mais aussi politiques, la « souillure » inhérente au cadavre ne convenait plus à la sacralité royale, Gaude-Ferragu M., D’or et de cendres…, op. cit., p. 245-246.
63 Depuis le début du XIVe siècle, avec quelques exceptions cependant (ibid., p. 157-164).
64 Issu des écoles du XIIIe siècle, le studium fut consacré par les statuts promulgués par Charles V en 1373. Seul foyer d’enseignement supérieur de la province ecclésiastique de Tours, son rayonnement s’étendait à tout l’ouest de la France (Verger J. [dir.], Histoire des universités en France, Toulouse, 1986, p. 40). Au départ, l’université ne délivrait qu’un enseignement de droit canon et de droit civil, puis à la demande de Yolande d’Aragon, une bulle du pape Eugène IV (1432) permit l’ouverture de trois nouvelles facultés pour l’enseignement des arts libéraux, de la théologie et de la médecine (Matz J.-M., « Le duc en son apanage », Matz J.-M. et Verry É. [dir.], Le roi René dans tous ses États…, op. cit., p. 69).
65 Brown E. A. R., « The Ceremonial of Royal Succession in Capetian France: the Funeral of Philip V », The Monarchy of Capetian France and Royal Ceremonial, Aldershot/Brookfield, 1991, p. 290-293.
66 Guenée B. et Lehoux Fr., Les entrées royales françaises de 1328 à 1515, Paris, 1968, p. 13.
67 Coulet N., « Les entrées solennelles en Provence au XIVe siècle. Aperçus nouveaux sur les entrées royales françaises au bas Moyen Âge », Ethnologie française, t. 7, 1977, p. 76. L’origine de l’adoption du dais est sans doute à chercher dans les cérémonies pontificales : depuis le XIIe siècle, on portait en certaines occasions au-dessus du souverain pontife un ciel, la mappula (ibid., p. 77).
68 Gaude-Ferragu M., « L’honneur de la reine : la mort et les funérailles de Charlotte de Savoie (1er -14 décembre 1483) », Revue historique, no 652, 2009, p. 779-804.
69 Gaude-Ferragu M., D’or et de cendres…, op. cit., p. 127-128.
70 Lecoy De La Marche A., Le roi René…, op. cit., t. II, p. 391. Le cercueil était placé sous l’effigie.
71 Le pape Eugène IV lui avait donné l’investiture du royaume le 17 février 1436 (Coulet N., Planche A. et Robin Fr., Le roi René…, p. 23).
72 Paris, Arch. nat., KK 248, fo 22-30, cité par Ferré R.-M., La commande artistique à la cour de René d’Anjou : un concert de mots et d’images, thèse de doctorat d’histoire de l’art, université Paris IV-Sorbonne, 2008, p. 395-398.
73 Quatrebarbes Th. de, Œuvres complètes …, op. cit., p. 119.
74 Lecoy de La Marche A., Le roi René…, op. cit., t. II, p. 388.
75 Après sa conquête du royaume de Naples, Charles VIII porta aussi couronne, sceptre et globe (au lieu de la main de justice française). La pomme d’or signifiait la terre du royaume. Charles VIII la porte sans croix (ce n’est donc pas le globe des empereurs) [Labande-Mailfert Y., Charles VIII, Paris, 1986, p. 320].
76 Bande A., Le cœur du roi…, op. cit., p. 168-169.
77 Calmet Dom A., Histoire de Lorraine…, op. cit., t. III, p. 678.
78 Lecoy de La Marche A., Le roi René…, op. cit., t. II, p. 392.
79 Ibid., p. 392.
80 Ibid., p. 394.
81 Farcy L. de, « Les sépultures princières… », op. cit., p. 381-382.
82 Robin Fr., « Le roi René, amateur d’art et mécène… », op. cit., p. 259-265.
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