Version classiqueVersion mobile

La toge et les armes

 | 
Patrick Le Roux

Première partie. Sur le métier d'historien

Chapitre VIII. L’empereur romain et la chasse*

Texte intégral

  • * Paru dans J. Trinquier et C. Vendries (dir.), Chasses antiques. Pratiques et représentations dans (...)

En souvenir de toutes mes années rennaises.
À Michel Denis.

1L’activité cynégétique des empereurs romains est-elle susceptible de nous faire mieux comprendre la place et l’évolution de la chasse à l’époque romaine ? L’exercice impérial de la chasse peut-il éclairer de manière nouvelle le statut et le pouvoir de l’empereur ? Sachant que parmi les spectacles romains les plus prisés sous l’Empire, les uenationes offertes par les empereurs représentaient un divertissement très apprécié du peuple de Rome, peut-on établir un rapport de cause à effet entre le développement des spectacles dans l’amphithéâtre et la pratique de la chasse par les divers Césars ? Enfin, puisque l’imperator ne combattait plus lui-même et n’était, sauf exception, que rarement présent à la tête d’une expédition guerrière jusqu’en 235 apr. J.-C., la chasse impériale compensait-elle ou se substituait-elle à l’absence d’activité militaire et chez l’empereur la pratiquer avec ardeur et passion dénotait-il une inversion symétrique de l’activité guerrière du règne ?

  • 1 Le latin utilise le verbe uenari le plus souvent. La notion romaine la plus proche du « sport » se (...)
  • 2 Voir parmi les études récentes : J.-L. Voisin, 2002, p. 16-17 ; surtout, trois contributions dans (...)

2L’impression dominante est celle d’une pratique jugée secondaire ou peu intéressante, sauf exception, chez les empereurs, ce qui rendrait compte de la médiocrité des témoignages concernant leur pratique de ce « sport », mot anglais du XVe siècle et non latin1. Ce n’est donc pas totalement par hasard qu’il n’existe pas de synthèse appropriée sur le sujet. Toutefois, la littérature historique disponible et ses évolutions autorisent une enquête renouvelée, sans a priori d’aucune sorte, qu’il s’agisse de confirmer ou de transformer les résultats2. Comment retracer l’histoire de la pratique cynégétique des empereurs aujourd’hui ? Comment décrire leur perception de la chasse et de son déroulement ? La chasse induisait-elle chez les Césars un discours particulier sur les rapports avec le monde sauvage et le monde animal ? Constituait-elle d’emblée une composante non négligeable du portrait du bon et du mauvais empereur ? De quelles valeurs la chasse pouvait-elle être porteuse pour un empereur dans ses relations avec le reste de la cité ? Le plaisir du « sport » était-il étranger à une activité éminemment physique, doublée d’un art indéniable, signe d’un travail d’éducation, pour qui s’y adonnait avec ferveur et régularité ?

L’historiographie : Hadrien et la dignité impériale de la chasse

  • 3 J. Aymard, 1951, p. 173-184 et p. 522-537 ; L. Robert, 1978, p. 439. Aussi, J.-L. Voisin, 2002, p. (...)
  • 4 Récemment, A. Gutsfeld, 2000, p. 79-99.
  • 5 J. Aymard, 1951, p. 173-184. Il convient d’ajouter que des incertitudes demeurent concernant la ch (...)
  • 6 Voir, récemment, l’édition de J.-P. Callu, 1992, p. 1-48.
  • 7 Sur le goût d’Hadrien pour la chasse : Histoire Auguste, vit. Hadr., II, 1 ; XX, 12-13 ; XXVI, 3. (...)
  • 8 Sur le poème de Pancratès, connu par un fragment cité par Athénée de Naucratis et par un papyrus ((...)
  • 9 Désormais : ILN, IV, 33.
  • 10 J. Aymard, 1951, p. 527-535, qui indique qu’à l’origine il y en avait plus que huit ; plus récemme (...)
  • 11 Voir par exemple, L. Robert, 1978, p. 440 ; A. Gutsfeld, 2000, p. 81-82.
  • 12 L. Robert, 1978, p. 437-452, a bien mis en lumière le sens et la date (123-124) de l’inscription d (...)

3Il est banal de dire qu’Hadrien fut l’empereur chasseur par excellence3, le précurseur des « chasses royales ». On serait tenté d’ajouter qu’il fut le seul empereur à manifester un réel intérêt, voire une passion, pour cet exercice au point de lui donner une publicité exceptionnelle que les sources renvoient en écho4. Le bilan éloquent, proposé il y a plus de cinquante-cinq ans par J. Aymard5, constitue une base solide et ne peut pas être mis en doute. La biographie de l’empereur incluse dans l’Histoire Auguste, l’une des plus fiables et attribuée à Spartianus6, souligne le goût précoce pour la chasse du successeur de Trajan et rencontre un écho chez Dion Cassius en particu7. Les fragments du poème de Pancratès évoquant une chasse au lion d’Hadrien et Antinoüs en Égypte, l’inscription en grec du temple d’Éros de Thespies l’Héliconienne de Béotie8, le poème épigraphique, provenant sans doute de la cité d’Apt9 sur la mort de son cheval Borysthène, les huit médaillons ou « tondi » conservés par le remploi dans l’arc de Constantin (dont les problèmes de lecture et d’interprétation ne sont pas tous résolus et demeurent compliqués10), les monnayages à thème cynégétique11, la fondation d’Hadrianotherae à l’emplacement d’une chasse à l’ourse victorieuse fournissent un éclairage cohérent et allant clairement en ce sens12.

  • 13 J. Aymard, 1951, p. 176 (relié au séjour à Italica entre 15 et 17 ans, selon Histoire Auguste, vit (...)
  • 14 Titre du chapitre ix, p. 173.
  • 15 Histoire Auguste, vit. Hadr., I, 5.
  • 16 Pline Le Jeune, Panégyrique, LXXXI.
  • 17 J. Aymard, 1951, p. 493-495.
  • 18 J. Aymard, 1951, p. 173-174, qui rappelle à juste titre la remarque, essentielle, de Dion Cassius,(...)
  • 19 A. Gutsfeld, 2000, p. 537-552.

4Malgré un propos marqué au coin de la sensibilité littéraire et prudent, J. Aymard ne parvient pas à écarter l’idée d’un Hadrien empereur unique ou singulier en ce domaine. Il associe son activité cynégétique débordante à son « sang espagnol13 » et à ses voyages aux quatre coins de l’Empire, utilisant la formule anachronique des « grandes chasses coloniales14 ». La culture grecque du Graeculus de l’Histoire Auguste15, sans être bien sûr passée sous silence, n’est que peu mise en avant. Trajan est, pour sa part, gratifié d’un penchant semblable ne serait-ce qu’à cause du Panégyrique de Pline le Jeune16 et des Discours sur la Royauté de Dion Chrysostome (de Pruse)17 : mais l’empereur d’Italica n’est ici qu’un prédécesseur et contribue à faire entrer la chasse dans le portrait de l’empereur idéal qu’Hadrien incarna, de même qu’il participa à la grandeur du siècle de la paix romaine18. J. Aymard donne, en effet, à entendre que le goût de la chasse à Rome n’aurait, malgré tout, jamais été aussi présent que chez les empereurs du IIe siècle dont il aurait épousé la sensibilité. Ce n’est pas par hasard que l’ouvrage s’achève sur les chasses de Commode qui, à sa manière aussi étonnante que provocatrice19, manifesta avec excès son enthousiasme pour une activité censée révéler et exprimer les vertus héroïsantes du chasseur impérial. Quoi qu’il en fût, l’impression finale serait qu’Hadrien avait donné à la chasse sa vraie dimension impériale qui perdura, sans atteindre ensuite le degré auquel l’avait portée le compagnon d’Antinoüs.

  • 20 A. Gutsfeld, 2000, p. 183.
  • 21 CIL, II, 2660 a-e = CLE, 1526 ; AE, 2002, 781. Voir G. Alföldy, 1969b, p. 121, et les diplômes mili (...)
  • 22 Histoire Auguste, vit. Hadr., II, 1-2 ; J. Aymard, 1951, p. 523, « Trajan, le rude espagnol ».
  • 23 J. Aymard, 1951, p. 83 : « Avec cette possibilité de synthèse, ou plus exactement avec cet esprit (...)
  • 24 L. Robert, 1978, p. 442, se montre réticent sur les excès de développements contemporains concerna (...)
  • 25 J. Aymard, 1951, p. 156, ce qui est peut-être aller trop loin et faire dire beaucoup à des monnaie (...)

5Le poème cynégétique conservé à Legio VII Gemina de Q. Tullius Maximus, e Libya, est rapporté à l’époque d’Hadrien et à l’impérial modèle20 alors que le CIL, II indiquait aeui Traiani. Aujourd’hui il est démontré que le légat commanda la légion entre 163 et 166, sous Marc Aurèle et Verus21. L’« Hadrianocentrisme » de l’Essai est patent dans nombre de démonstrations, ce qui implique des déformations. La conclusion est servie et renforcée par un préjugé, véhiculé par l’Histoire Auguste22, concernant l’atavisme espagnol et le penchant particulier des Ibériques pour la chasse. J. Aymard entend distinguer aussi systématiquement ce qui est romain de ce qui ne le serait pas et mettre en valeur les originalités de la chasse romaine, qu’il s’agisse de préparation à la guerre, d’éducation, de loisir, de religion, de pouvoir. Les Romains, sans originalité et tolérants23, avaient fini par vaincre les préjugés d’une tradition qui regardait à Rome la chasse comme un officium seruile, « une tâche servile ». C’est par une adaptation progressive aux leçons de l’étranger et le truchement des uenationes que la cité impériale redécouvrit la chasse et ses vertus. II fallut attendre l’époque de sa plus grande splendeur civilisée, au siècle des Antonins, pour parvenir à l’acmé des chasses romaines, les chasses impériales. J. Aymard sait en revanche mettre en exergue la richesse et la subtilité des discours romains sur la chasse ou liés à la chasse : la chasse reflète, symbolise et imprègne tous les aspects de la vie sociale, morale, culturelle et politique. Son exercice parle des valeurs et de la civilisation de l’Empire qu’elle enregistre et avec lesquelles elle joue24. Les chasses impériales, limitées au IIe siècle, en constituent l’expression la plus achevée. Leur thématique, par la représentation de Diane sur des séries monétaires, s’insérerait même dans un discours dynastique suggérant la supériorité de l’adoption25.

  • 26 Sur ce thème, bien qu’il s’agisse d’une période beaucoup plus récente, voir l’ouvrage de K. Thomas (...)
  • 27 J. Aymard, 1951, p. 119.

6Malgré l’attention portée à la chronologie, J. Aymard est plus sensible à l’esthétique, à la symbolique et à la virtuosité technique de la pratique cynégétique qu’à la place sociale et culturelle de la chasse dans le monde romain, pour ne pas parler de la dimension anthropologique26. Se fondant très largement sur les œuvres littéraires reconnues, il construit un ouvrage « impressionniste » dans lequel s’accumulent les éclairages sans qu’il y ait une conclusion, une véritable synthèse. Le livre est surtout daté par un grand nombre de préjugés historiographiques liés à l’époque de son élaboration. L’Empire romain n’est qu’une construction militaire qui prolongea, sans rien y ajouter, la civilisation gréco-hellénistique. Le « siècle des Antonins » est un apogée durant lequel la chasse, tardivement promue en dignité, fut aussi à l’honneur avant de décliner avec la civilisation. Tant que l’utilité fut seule en question, les Romains se détournèrent d’une activité peu intéressante à leurs yeux, malgré une Italie riche en gibier. Au temps de Virgile, l’intérêt pour les techniques particulières et savantes de la chasse demeure limité27. Ce n’est que de Nerva à Commode que s’affirma le « siècle d’or » de la chasse romaine. On pourrait résumer abruptement : hors de la dimension dynastique point de salut !

  • 28 Histoire Auguste, vit. Hadr., XXVI, 1, indique promissa barba, ut uulnera, quae in facie naturalia (...)
  • 29 Histoire Auguste, vit. Hadr., XXVI, 3.
  • 30 Apparemment, c’est avec Hadrien seulement que le lapin apparaît sur les monnaies relatives à l’His (...)
  • 31 Voir le poème de Pancratès.
  • 32 Dion Cassius, LXIX, 22, 2.
  • 33 Histoire Auguste, vit. Hadr., XXVI, 10.
  • 34 J. Aymard, 1951, p. 175.

7D’un point de vue strictement documentaire et événementiel, il est indéniable que la concentration sur la personne et le règne d’Hadrien des données concernant les relations entre les empereurs et la chasse ne peut pas laisser l’historien indifférent. La chasse rythme toute la durée de la vie d’un homme qui se laissa pousser la barbe non pour masquer une blessure mais des taches de naissance28. En revanche, c’est à cette activité précoce qu’il dut une fracture d’une côte et d’une clavicule29. L’éloge funèbre de Borysthène semble montrer que l’empereur chassait chaque fois qu’il en avait le loisir au cours de ses déplacements et la présence du lapin sur la monnaie célébrant l’exercitus Hispanicus mérite peut-être d’être versée au dossier du zèle d’Hadrien pour la chasse qu’il pratiqua et encouragea dans la péninsule même30. Les exploits cynégétiques en compagnie d’Antinoüs, notamment en Égypte31, l’appel à Mastor le Iazyge et auxiliaire d’Hadrien à la chasse pour sa vigueur et son audace32, le rêve qu’il fit avant sa mort, où un lion le terrassait33, les revers de monnaies des dernières années du règne évoquant la chasse au sanglier confirment, s’il en était besoin « l’importance de la cynégétique dans la vie d’Hadrien34 ». L’explication par la passion et le plaisir qu’en retirait un empereur doué pour ces exercices n’est pas que de convention. La chasse était affaire de goût individuel et d’éducation comme la peinture, la poésie chantée, la bonne chère ou un spectacle de gladiateurs.

8Il semblerait plus difficile de comprendre pourquoi aucun autre empereur ne manifesta apparemment le même enthousiasme cynégétique avant et après Hadrien. J. Aymard paraît se satisfaire d’une conjoncture et d’un contexte favorables, invoque le « nomadisme » et la personnalité exceptionnelle de l’empereur voyageur qui chassa sans doute le lièvre mais principalement l’ours, le sanglier et le lion. Hadrien aurait donc essentiellement instauré la grande chasse impériale romaine, la chasse au lion, qui mobilisait des moyens et des énergies jamais égalés auparavant. Les sources disponibles présentent Hadrien comme l’empereur qui, à titre personnel, éleva la chasse au rang d’une activité supérieure digne de la majesté de l’empereur. Cependant, des efforts ont été déployés récemment pour mieux situer Hadrien dans une évolution nuancée tendant à assouplir grandement l’idée que les Romains n’aimaient guère la chasse ou s’en détournaient volontiers, en vérité au nom de motivations mal connues ou non décrites en détail dans la documentation.

Avant Hadrien : autour du Domitien de Misène

  • 35 Ce dont J. Aymard ne rend compte que de manière diluée tout au long de l’ouvrage, sans offrir un p (...)
  • 36 Polybe, Histoires, XXXI, 29.
  • 37 C. M. C Green, 1996, p. 246 et suiv.
  • 38 Dion Cassius, LXIX, 10, 2 : « cependant il ne négligea aucun des devoirs de sa charge (τῶν τῇ ἀρχῇ (...)
  • 39 Plutarque, Pompée, XII.

9Dans le passé, le pharaon, Cyrus, Alexandre avaient ouvert la voie aux exploits cynégétiques de monarques à la recherche de la gloire35. Polybe, après Xénophon, rappelle à la faveur d’un témoignage sur Scipion Émilien36 que la chasse comme divertissement sportif entrait de plain-pied dans l’éducation grecque, la paideia, ce qui voulait dire que cette activité participait depuis longtemps à la formation du caractère et à la préparation physique du futur citoyen. Comme l’a noté C. M. C. Green37, Polybe met en exergue le comportement du jeune Scipion qui rompt avec la tradition romaine : au lieu de rechercher au forum la gloire et d’y manifester, par ses talents d’orateur et le goût de la persuasion, la légitimité de ses ambitions à devenir le meilleur, Scipion est un exemple, redouté par les vieux Romains, d’andreiva ou uirtus exprimée à la chasse, exercice privé et royal, opposé à la nécessaire recherche, en public et sous les yeux de tous, d’une reconnaissance légitime par ses pairs. S’y ajoute le fait que la chasse est un plaisir moralement condamnable qui détourne le jeune noble ou le citoyen de ses responsabilités auxquelles elle ne saurait pourtant se substituer sans risque ni danger. Dion Cassius exprime une idée semblable, on l’a vu, lorsqu’il note qu’Hadrien pratiqua avec ardeur et excès la chasse sans négliger pour autant ses devoirs politiques38. Si l’on se souvient que Pompée s’adonna à la chasse au lion et à l’éléphant en Afrique en 81 av. J.-C.39, on constate que le débat sur la chasse romaine rejoint celui sur l’hellénisation de Rome et sur les liens entre cette mutation culturelle et l’avènement de la monarchie.

  • 40 Voir le Catalogue de l’exposition : AA. VV., Domiziano/Nerua. La statua equestre da Miseno. Una pr (...)
  • 41 Le cou et l’arrière de la tête originelle sont conservés. Seule la partie faciale a été changée.
  • 42 Les auteurs du Catalogue, p. 25, écrivent « semiaperta », ce qui paraît contestable vu l’angle dro (...)
  • 43 Catalogue, AA. VV., op. cit., p. 32.
  • 44 S. L. Tuck, 2005, p. 226-232 où est soulignée, p. 231-232, la présence d’Hercule enfant étouffant (...)

10C’est dans cet esprit que S. L. Tuck a placé le réexamen de la question fondé sur la réinterprétation de la statue dite de Domitien/Nerva, trouvée entre 1968 et 1972 dans le sacellum des Augustales de Misène40. La statue patiemment reconstituée morceau par morceau, incomplète, est une statue équestre en bronze d’un empereur cuirassé, au départ Domitien auquel on a substitué, comme on le sait aussi par ailleurs, une tête du successeur, Nerva41 (fig. 1). Le bras droit levé vers le haut portait assurément une arme de jet alors que le cheval, les jambes antérieures arquées, semble se cabrer devant un obstacle. La bouche est grande ouverte42 et entre les oreilles de la monture, au milieu du crâne, le toupet est maintenu à la base par un cylindre ouvert qui permet aux touffes de se développer en forme de flammes torsadées, serrées qu’elles sont par une fine bandelette qui en assure la tripartition (fig. 2). Comme le signalent les éditeurs43, il s’agit de la première statue équestre d’un empereur chevauchant un cheval qui se cabre. Sur la cuirasse, Domitien portait, suivant l’habitude, le paludamentum. Le bras droit a été réajusté dès les débuts de la modification (fig. 3). Le mouvement du corps et la position des jambes indiquent le moment où l’empereur s’apprête à lancer son arme, sans que l’on sache a priori s’il s’agit d’un instantané ou d’une scène de convention dans laquelle figurait aussi l’adversaire. Tirant parti des incertitudes reconnues, S. L. Tuck récuse la conclusion qu’il s’agit d’une statue de l’empereur foulant aux pieds un barbare en raison de l’absence de bouclier et de casque, des scènes figurées de la cuirasse et de l’attitude terrorisée du cheval. L’empereur n’est pas en tenue pour une scène de bataille. Domitien porte un costume mixte qui évoque aussi Alexandre et qui sied à une chasse au lion mais non à un triomphe militaire ni à une scène de combat44.

Fig. 1. – La statue de Domitien/Nerva recomposée (Musée de Baia, Museo archeologico dei campi flegrei) : vue de face. Cliché Mimmo Iodice pour la Sopraintendenza archeologica per le province di Napoli e Caserta (1987) (Courtoisie du regretté Gaetano Macchiaroli)

  • 45 Voir AE, 1975, 212 et AE, 2000, 345 a-c.
  • 46 Ce que paraît conforter l’inscription à Nerva apparue également : AE, 2000, 345 c.
  • 47 Une des difficultés méthodologiques des comparaisons ordinairement effectuées tient à la recherche (...)
  • 48 S. L. Tuck, 2005, p. 230, indique à juste titre que les chaussures sont du type du calceus patrici (...)

11La statue entrait dans une composition dynastique en l’honneur des Flaviens, Vespasien et Titus étant divinisés45. Malgré la minutie des reconstitutions visant à ne travestir aucun détail utile à la description exacte de la posture du cavalier et de sa monture, subsistent de nombreuses incertitudes en dehors même de la mise en scène pouvant avoir modifié les proportions de l’image retenue. Le support avait sans doute reçu un hommage à Domitien, au datif (si l’inscription retrouvée incomplète en est bien la dédicace46), et n’était pas une commande du Prince, même si un contrôle avait dû être exercé. Rien ne prouve, en outre, que l’adversaire visé avait été représenté, s’agissant d’un groupe en l’honneur de la famille impériale. L’absence d’attributs désignant à coup sûr une statue triomphale n’autorise pas à proposer une scène de chasse au lion, sans parallèle avéré et peu vraisemblable dans le contexte d’un collège des Augustales47. Il est vrai que le Domitien de Misène mêle des thèmes iconographiques caractéristiques de la statuaire grecque – ce qui ne peut surprendre en Campanie – et des traits propres à l’imperator romain depuis Auguste48. L’impression dominante est celle du cavalier en plein effort et sachant maîtriser sa monture. Domitien est assimilé, semble-t-il, à un dominus invincible, à un nouvel Alexandre. Une conclusion en forme de question s’impose : aurait-on substitué Nerva à Domitien s’il s’était agi d’une chasse au lion ?

Fig. 2. – Tête du cheval bouche ouverte (Cliché Mimmo Iodice pour la Sopraintendenza archeologica per le province di Napoli e Caserta, 1987). Courtoisie du regretté Gaetano Macchiaroli

  • 49 Selon S. L. Tuck, 2005, p. 241 et suiv., Caligula mit l’accent sur les antécédents grecs et l’imit (...)
  • 50 Voir J. B. Campbell, 1984, p. 141-142. Domitien a reçu XXIII salutations impératoriennes au total, (...)
  • 51 On rappellera ici, après P. Veyne, que l’Empire romain et le pouvoir impérial étaient culturelleme (...)
  • 52 Il me semble que rien ne milite dans les sources en faveur d’une occultation des exploits de Domit (...)

12La démarche de S. L. Tuck porte sur la uirtus, thème très présent dans l’ouvrage de J. Aymard. Il s’intéresse à la uirtus impériale et à son évolution au premier siècle de l’Empire : Domitien aurait intégré à la uirtus romaine l’aretè grecque au nom d’un goût prononcé pour la chasse, suivant ainsi des voies ouvertes par Caligula et Néron49, mais plaçant dans la cynégétique sa touche personnelle et accroissant par là l’éventail des « vertus » flaviennes incarnées par Vespasien et Titus. De manière plus modérée que ses prédécesseurs, Domitien aurait cherché à adoucir le caractère militaire de la uirtus, ce qui est en contradiction avec sa politique conquérante, la présence de Domitien à la tête des expéditions qu’il entreprit et le désir de briller sur ce plan après en avoir été privé par son père50. Si l’on en juge par les inscriptions du collège des Augustales de Misène, la statue correspondrait aux années 94-95 et pourrait faire écho à la politique dynastique en faveur de la gens Flauia dont le temple fut inauguré au Quirinal à cette époque. Les rapports entre les traditions grecques et hellénistiques et les empereurs sont trop complexes pour qu’on en tire des conclusions visant à identifier tel ou tel héritage exclusif51. Enfin, plusieurs représentations sculptées montrent que le cheval cabré et effrayé appartenait également au registre d’une bataille. S’il y avait une représentation figurée sous le cheval de Domitien à Misène ce n’était sûrement pas un lion, au mieux un barbare. La statue paraît cependant se suffire à elle-même. Hadrien est resté dans la tradition comme le créateur impérial de la chasse au lion52.

Fig. 3. – L’empereur, bras droit en action, tête et buste cuirassé (Cliché Mimmo Iodice pour la Sopraintendenza archeologica per le province di Napoli e Caserta, 1987) Courtoisie du regretté Gaetano Macchiaroli

  • 53 Suétone, Domitien, XIX (trad. H. Ailloud, Paris, Les Belles Lettres, 1932).

13Le seul document qui parle avec certitude d’un intérêt de Domitien pour l’art de la chasse est le texte de Suétone53 :

Armorum nullo, sagittarum uel praecipuo studio tenebatur. Centenas uarii generis feras saepe in Albano secessu conficientem spectauere plerique atque etiam ex industria ita quarundam capita figentem ut duobus ictibus quasi cornua efficeret.

L’escrime ne l’intéressait pas, mais il était passionné pour le tir à l’arc ; souvent, dans sa retraite du mont Albain, bien des personnes lui virent abattre coup sur coup cent animaux divers, et même s’amuser à planter deux flèches sur la tête de quelques-uns d’entre eux, pour figurer des cornes.

  • 54 Centenas, mis en exergue, évoque les hécatombes plutôt que l’art cynégétique.
  • 55 Domitien ne dédaigna pas les exercices physiques et sportifs (Suétone, Domitien, XIX, 1 ; Dion Cas (...)
  • 56 Ce que suggère judicieusement J. Aymard, 1951, p. 194. On notera qu’il n’est jamais question de ch (...)
  • 57 Pline le Jeune, Panégyrique, LXXXI (trad. M. Durry, Paris, Les Belles Lettres, 1959).
  • 58 Suétone parle non de damnatio memoriae mais de memoria abolenda (Caligula, LX, 2 ; Domitien, XXIII (...)

14La malveillance du propos est évidente : Domitien préférait le massacre des bêtes sauvages à la pratique de l’art militaire. L’extrait, qui s’achève par l’épisode des flèches impériales passant entre les doigts du jeune esclave sans le blesser54, souligne malgré tout l’adresse exceptionnelle de Domitien archer, mais également une certaine paresse physique. Indépendamment de la malveillance du biographe envers un « mauvais » empereur55, on note que les chasses pratiquées avaient lieu dans l’Albanum (la villa d’Albe) où existait un amphithéâtre tenant lieu de « paradis » ou « parc de chasse56 ». S’agissant de la traque du gibier dans la nature sauvage ou de la pratique cynégétique proprement dite, Trajan apparaît assurément comme le premier empereur s’y étant adonné par plaisir à suivre le Panégyrique de Pline le Jeune57. Il ne s’agit pas ici de « chasse impériale » mais d’une activité privée semblable à celle que pratiquaient de nombreux grands propriétaires terriens nettement distinguée de la chasse boucherie à laquelle se livrait le prédécesseur abominé, non mentionné car innommable58. Trajan, par la chasse telle qu’il la pratiquait, s’était préparé à son métier d’imperator (« voici les exercices qui formaient les futurs chefs », his artibus futuri duces imbuebantur) et avait contribué, à la manière ancienne, à protéger l’agriculture contre les bêtes nuisibles auxquelles il déclarait une véritable guerre (« et l’on ne tenait pas pour un mince honneur en temps de paix […] de délivrer d’un véritable siège les travaux des champs », nec mediocre pacis decus habebatur […] obsidione quadam liberatus agrestium labor). Domitien s’était bassement contenté de parquer des bêtes sans agressivité ni défense et de les abattre par simple amusement (« car ils [les princes] rabattaient avec une habileté feinte des bêtes apprivoisées et abâtardies par la captivité et qu’ensuite on lâchait pour leur amusement », ita ut domitas fractasque claustris feras ac deinde in ipsorum quidem ludibrium emissas mentita sagacitate colligerent).

  • 59 CIL, VI, 8555 = ILS, 1762.
  • 60 C’est le mot utilisé à côté de refectio, déjà mentionné, par Pline le Jeune dans le Panégyrique, L (...)
  • 61 Toutefois, il s’agit ici de successeurs d’Hadrien qui, à leur manière, ont promu en ce domaine l’i (...)
  • 62 Voir Histoire Auguste, vit. Ver., II, 10 et VI, 9 par exemple.
  • 63 Voir J. Aymard, 1951, p. 537-558, avec les sources.

15Une épitaphe de Rome59 fait écho au témoignage de Pline le Jeune. L’affranchi M. Vlpius Euphrosynus y est mentionné comme a ueste uenatoria, fonction non attestée par ailleurs. Le libertus de Trajan était chargé des vêtements de chasse de l’empereur que suivait pour l’occasion tout un équipage jusqu’aux territoires choisis pour les moments d’otium et de détente ou remissio60. Il est vraisemblable qu’à l’image des jeunes nobles, les empereurs avaient tous été formés dès leur jeunesse à la discipline de la chasse. Tous n’éprouvaient pas une passion pour ce sport et la plupart, à l’exemple d’Auguste, se contentaient d’une pratique privée et très épisodique. Ce fut le cas et d’Antonin le Pieux et de Marc Aurèle qui ne cherchèrent ni l’exploit à tout prix ni la publicité forcée61. L. Verus manifesta un penchant particulier pour la pratique cynégétique, ce que lui permettait son âge et son tempérament62. Commode renoua avec la tradition de Domitien en substituant à la chasse réelle la chasse-spectacle qui ne l’empêchait pas de briller et de manifester sa vigueur physique et son adresse63. Les uenationes ou chasses-spectacles, cependant, ne peuvent pas être mises sur le même plan que la traque du gibier ni que la « chasse impériale » proprement dite effectuée sur des territoires appropriés à la manière de Trajan ou Hadrien.

  • 64 Voir récemment A. Gutsfeld, 2000, p. 79-99. Il m’apparaît que l’exemple d’Alexandre, ses propres i (...)
  • 65 Histoire Auguste, vit. Ver., IX, 8 : Verus, à la différence d’Hadrien, incarne un type d’empereur q (...)

16On doit constater qu’Hadrien constitue, comme il a été écrit depuis longtemps, un cas particulier, quelles que soient les traditions mêlées qui semblent définir ses relations à la chasse64. Lui seul semble avoir affronté avec constance et enthousiasme tant le lion dans le désert d’Égypte que le lièvre et le sanglier en Occident, que l’ourse en Mysie et en Béotie. L. Verus serait par la passion de la chasse le plus proche de l’empereur philhellène65. Il passait pour un « mauvais » empereur. Quoi qu’il en soit, entre Hadrien et Verus le point commun n’est pas le penchant pour la guerre et la bataille et ce n’est donc pas sous cet éclairage qu’on peut approcher le plus efficacement les chasses impériales ni les rapports entre les empereurs et la chasse.

Empereur et chasseur : nimia voluptas Hadriani66

  • 66 Histoire Auguste, vit. Hadr., XIV, 6.
  • 67 Salluste, Conjuration de Catilina, IV, 1.
  • 68 Platon, Lois, VII, 823e-824a : voir A. Schnapp, 2000, p. 142 et suiv.
  • 69 C. M. C. Green, 1996, p. 257-258.
  • 70 Horace, Épîtres, I, 18, 49 (trad. F. Villeneuve, Paris, Les Belles Lettres, 1934).

17Pendant longtemps, l’analyse de la chasse à Rome a été tributaire du texte de Salluste et de sa formule officium seruile67. Le dédain pour la chasse était, disait-on, en quelque sorte ancré dans la culture et les mœurs romaines. On ne tenait pas compte du jugement de Platon qui avait déjà exprimé des idées semblables mais en distinguant la bonne et la mauvaise chasse68. On ne tenait guère compte non plus de ce que Salluste associait dans sa réprobation de la chasse l’agriculture et donc la vie de propriétaire campagnard qu’il opposait, toutes deux, à la dignité de l’activité intellectuelle qu’il avait choisie en décidant de se consacrer à l’histoire. C. M. C. Green69 a récemment relu sans préjugé la documentation fournie par Polybe et Salluste. Elle conclut en rappelant le vers d’Horace définissant la chasse70 : Romanis sollemne uiris opus, « c’est, à Rome, un exercice traditionnel pour nos hommes ». Trois échelons hiérarchisaient, dit-elle, l’activité cynégétique dans le monde romain : nécessité pour le simple paysan qui en avait l’utilité, passe-temps familier du propriétaire rural, loisir sportif pour l’aristocrate. Un élément doit être ajouté à la réflexion et évalué : quelle fut l’influence des uenationes de l’amphithéâtre sur les conceptions et les pratiques romaines de la chasse à l’époque impériale ?

  • 71 G. Ville, 1981, p. 168-173, qui souligne l’irrégularité au Ier siècle des munera impériaux en insi (...)
  • 72 Voir Martial, Livre des spectacles.
  • 73 P. Le Roux, 1990a, p. 209 et suiv.
  • 74 AE, 1987, 867 (147 apr. J.-C.) : on note la formule ob uenationem Caesarianam iniunctam a Cl. Satu (...)
  • 75 Dion Cassius, LXXVI, 14, 3.
  • 76 AE, 2004, 1643, datée de 144 : les îles Farasân au sud de la mer Rouge sont sous le contrôle de l’ (...)

18Tous les empereurs, selon les sources, se firent une obligation d’offrir des chasses en spectacle à la plèbe urbaine et dans les cités et capitales où ils passaient. G. Ville a montré que la uenatio s’intégra progressivement au munus des empereurs et des magistrats au cours du Ier siècle pour ne plus s’en séparer, participant au deuxième rang à une programmation à caractère exceptionnel soumis à l’autorisation impériale71. Ces mises en scène en milieu urbain, enfermées dans l’arène, coupées de leur contexte naturel et des régions éloignées ou périphériques de l’Empire, tentaient de reproduire l’environnement même des théâtres cynégétiques par la reconstitution de paysages forestiers (siluae) ou exotiques (paysages nilotiques). Les chasses de Titus pour l’inauguration du Colisée72, celles de Trajan à l’occasion de son triomphe dacique sont parmi les plus fameuses73. Les grandes dates anniversaires des empereurs et de Rome donnaient lieu à ces chasses prévues à l’avance. Il fallait mobiliser les armées concernées pour capturer les bêtes sauvages. Pour la 900e année de la fondation de Rome, Antonin le Pieux avait fait organiser par son légat de Mésie inférieure une chasse aux ours et bisons qualifiée de uenatio Caesariana74. Dion Cassius rapporte un épisode de parodie de chasse par des centurions cantonnés en mer Rouge s’emparant, sur ordre de Plautien, de zèbres sacrés voués à un sanctuaire d’Helios75. Il me semble que l’historien de Nicée apporte un éclairage possible à l’inscription datée d’Antonin le Pieux (144-145 apr. J.-C.) et provenant des îles Farasân76 qui peut se comprendre dans le contexte des préparatifs du neuvième centenaire de la naissance de Rome.

  • 77 Voir P. Le Roux, 1990a, p. 215, note 135.
  • 78 H.-I. Marrou, 1977, p. 39-40. La villa de Sicile n’est pas liée à Maximien puisqu’elle est aujourd (...)

19Ce type de chasse à l’aide de l’armée concernait des bêtes sauvages de grande taille. Julius Africanus, dans ses Cestes, a conservé la description de la capture d’un lion dans de telles conditions77. Dans les secteurs géographiques qui s’y prêtaient, cette forme d’exercice ou d’entraînement militaire n’était jamais négligée et alimentait les parcs des amphithéâtres. L’essentiel était la capture de l’animal vivant ; toutes les ruses étaient permises, qu’il se fût agi de l’entraîner sur un terrain défavorable, de l’effrayer par des cris et des sonneries de trompette puis par le feu, de l’attirer dans le piège en usant d’un appât (un chevreau). Comme l’a noté H.-I. Marrou, c’est un événement semblable qui motive l’embarquement et le transfert des animaux sur la mosaïque mutilée de la grande chasse à Piazza Armerina78. La recherche de l’exotisme, de l’étrange, de l’inédit caractérisait les chasses romaines du Colisée et parfois les spectateurs étaient appelés à participer. La chasse proprement dite était au second plan. L’empereur manifestait sa maîtrise de l’univers et la soumission des provinces les plus reculées, son pouvoir d’étonner et d’offrir ce que personne n’avait pu offrir auparavant. Il organisait des uenationes pour le peuple qui les attendait comme marque de reconnaissance pour la conquête de l’Empire qu’il fallait protéger et conserver. Même rapprochés des chasses réelles, ces spectacles ne pouvaient se confondre avec une chasse impériale ; ils suggéraient les dangers qu’affrontait celui qui s’y adonnait, mais n’en démontraient pas la nécessité en dehors de la valeur expérimentale et éducative. Le peuple assemblé à l’amphithéâtre apprenait à connaître la faune dans sa diversité et était censé admirer l’art et le courage des combattants capables d’affirmer leur supériorité sur les bêtes sauvages.

  • 79 Il n’est pas possible d’insister ici sur l’apparat monarchique d’une chasse impériale qui incluait (...)
  • 80 J. Aymard, 1951, p. 537-540.

20On ne peut pas exclure que le développement des uenationes produites en spectacle aurait contribué à maintenir la chasse et la recherche impériale de l’exploit cynégétique en retrait. Comme je l’ai évoqué, la chasse dans l’arène exprimait avant tout l’incertitude et la fragilité de la domination impériale de Rome pour des urbains éloignés des menaces et des maux porteurs du chaos et de la barbarie tout en excitant leur attrait pour la violence et leur fascination pour le sang mêlée à la peur. Une dimension religieuse entourait aussi ces manifestations et permettait de croire que les dieux avaient donné leur accord et que l’empereur bienfaiteur était sous leur protection. La valeur éducative, la mise en contact avec des êtres vivants peu familiers, dont on pouvait observer les comportements et la beauté, ajoutait encore au succès des spectacles. La chasse impériale proprement dite, celle qui avait pour cadre le théâtre de la nature, demeurait cachée au plus grand nombre malgré le cortège plus ou moins fourni de témoins qui pouvaient ensuite raconter ce qu’ils avaient vu79. Le choix d’empereurs comme Commode de s’exposer dans l’amphithéâtre et d’y manifester leurs qualités d’habileté et d’adresse impliquait la volonté de communiquer directement avec le peuple et de le convaincre par l’exemple qu’il valait mieux que ceux qui contestaient son pouvoir et son statut supérieur. Les critiques concernaient les excès et la facilité, la chasse qui n’avait de chasse que le nom et qui, malgré toute l’adresse de l’empereur, tournait au sacrifice et à l’hécatombe80. Domitien avait fait de son « paradis » une véritable arène et Commode confondit volontairement arène et parc de chasse.

  • 81 Pline Le Jeune, Panégyrique, LXXXI, 1-3. Voir aussi A. Gutsfeld, 2000, p. 80, qui distingue justem (...)
  • 82 C. M. C. Green, 1996, p. 246 et suiv.
  • 83 Comme propriétaire terrien, il chassait lui-même le sanglier sur les terres de sa villa des Tusci,(...)
  • 84 Voir M. Corbier, 1989, p. 234-237.
  • 85 Les dispositions les plus claires concernant la chasse classent les animaux parmi les a natura pro (...)

21L’empereur chasseur ne faisait en principe que se comporter comme un aristocrate, ce que traduit clairement la description de Pline à propos de Trajan81. Ce type de chasse relativement commun dans la classe dirigeante était désormais intégré à la formation et à l’éducation de la jeunesse romaine et ne s’opposait plus à l’apprentissage jugé supérieur au Forum82. La chasse contribuait au contraire à mettre en valeur les personnalités et à forger la volonté, l’endurance et le courage. Pline le Jeune sait de quoi il parle83 quand il insiste sur l’effort, l’intrépidité et l’audace, le flair, la célérité, la force et l’art de déjouer les ruses, sans oublier le respect des dieux, la pietas. Toutes les sources établissent un lien avec la préparation à l’art de la guerre qui nécessitait de la grandeur d’âme et des qualités sportives. L’animal valeureux, tel le sanglier, par sa ténacité, son entêtement, sa force incontrôlable, sa résistance, son instinct et son intelligence préfigurait l’ennemi barbare qu’il faudrait affronter au combat. Contrairement à ce qu’on pourrait croire, le lièvre n’était pas dédaigné et le cerf, malgré une réputation de couardise, entraînait le chasseur dans des poursuites interminables. La consommation de viande et de gras84 s’alimentait des produits de la chasse mais, en dehors de menus d’apparat, le gibier, notamment le gros, ne constituait pas un ingrédient indispensable d’un repas ni même d’un banquet. La chasse impériale n’obéissait à aucun critère d’utilité autre que sociale. Il n’y eut pas à ma connaissance de législation impériale visant l’organisation et la réglementation de la chasse en dehors des questions de propriété du gibier et de capture85.

  • 86 J. Aymard, 1951, p. 535 et suiv. ; S. L. Tuck, 2005, p. 240. La vraie chasse au lion, même chez Ha (...)
  • 87 S. L. Tuck, 2005.
  • 88 Voir T. Kasulke, 2000, p. 110-111, qui parle de chasse « bienfaisante » à propos d’Hercule et plac (...)
  • 89 Il convient de le souligner, comme le rappellent à loisir les inscriptions et les monnaies impéria (...)
  • 90 A. Gutsfeld, 2000, p. 89-95, tente d’expliciter le discours cynégétique d’Hadrien exprimé sous tou (...)

22Si l’on se rapporte aux documents numismatiques d’Hadrien et aux « tondi » de l’arc de Constantin, on enregistre avec J. Aymard et S. L. Tuck l’invocation à la Virtus Augusti en liaison avec la chasse au lion86. Cette vertu se retrouve associée à des épisodes cynégétiques sur des médaillons d’Antonin à Commode et sur une gemme de Commode chevauchant un cheval cabré attaqué par un lion87. Que l’image du chasseur impérial exalte une vertu avant tout militaire, faite de courage physique et de force morale, et porteuse de victoire signifie que l’empereur veille à la continuité et à la domination de l’empire avec l’aval des dieux que lui vaut sa pietas. L’imitation d’Hercule88, d’Alexandre et d’Hadrien, permet de repousser les forces obscures et joue sur le caractère dangereux et risqué de la chasse. Il y a dans ces thèmes autant qu’une extension et un renouvellement du thème de la Virtus, au demeurant non limitée à ce type de représentation89, une forme d’exorcisation de l’inquiétude croissante face aux difficultés de l’empire et du métier d’empereur. Nous en apprenons autant sur la communication impériale et sur la perception politique des milieux dirigeants90 que sur les développements de la chasse chez les empereurs. Le succès d’un thème figuré, essentiellement monétaire, n’implique aucunement que les faits représentés aient constitué des activités ordinaires du César.

  • 91 T. Kasulke, 2000, p. 114-115, insiste sur la dimension agonistique des trophées de chasse dans un (...)
  • 92 Ses blessures de jeunesse, signalées par l’Histoire Auguste, ont certainement contribué chez Hadri (...)
  • 93 Dion Cassius, LXIX, 2, 5.
  • 94 Histoire Auguste, vit. Car., Carin. et Num., XIII-XV. Aper signifie le « sanglier », d’où le parti (...)
  • 95 Ibid., XIV, 3 (trad. F. Paschoud, Paris, Les Belles Lettres, 2001).

23La chasse ne paraît pas avoir été une occupation très valorisante sur le plan politique91, car le chasseur courait le risque d’être comparé au général victorieux dans la bataille. Hadrien, le seul empereur à avoir érigé la chasse au rang d’une activité de premier plan, digne du statut impérial, ne s’est pas contenté de jouer sur ce qu’elle reflétait des qualités essentielles de l’empereur92. Hadrien, en associant aussi ceux de sa domus destinés à lui succéder, exprime combien le métier d’empereur est risqué, dangereux et semé d’embûches à l’image d’une chasse loyale contre des animaux féroces. Dion Cassius explique que Trajan avait failli être victime d’un complot ourdi par Palma et Celsus alors qu’il se trouvait à la chasse93. L’Histoire Auguste file la métaphore cynégétique avec complaisance autour de l’avènement de Dioclétien qui tua le préfet du prétoire Aper, au nom prédestiné94. L’anecdote est complétée par la pseudoprophétie de la druidesse qui avait prédit : « Ne plaisante pas, Dioclétien, car tu seras empereur le jour où tu auras tué un Sanglier », Diocletiane, iocari noli, nam eris imperator, cum Aprum occideris95. Dioclétien depuis ce jour se serait mis à chasser les sangliers avec frénésie, sans résultat : « Je passe mon temps à tuer des sangliers, mais c’est un autre qui profite du fricot », ego semper apros occido, sed alter utitur pulpamento. La chasse, école de violence et de ruse, impliquait que le chasseur fût parfois le chassé, surtout quand la compétition pour le pouvoir était ouverte. Elle exposait l’empereur en l’isolant et en l’éloignant, d’où la méfiance qu’elle suscitait également chez les sénateurs attachés à la tradition.

  • 96 Le passage Histoire Auguste, vit. Hadr., XX, 12 : Equos et canes sic amauit ut eis sepulchra const (...)
  • 97 Pline le Jeune, Panégyrique, LXXXI, 2 : haec uoluptas erat.
  • 98 Suétone, Tibère, XLII, 2 (le poste fut créé par Tibère pour T. Caesonius Crispus). CIG, II, 1813 b (...)
  • 99 W. Martini et E. Schernig, 2000, p. 146 émettent l’idée, intéressante, que les divers animaux évoq (...)
  • 100 A. Gutsfeld, 2000, p. 85, qui oppose uirtus et uoluptas, ce qui ne me semble pas nécessaire : chez (...)

24En dehors des chasses exotiques ou de l’affrontement avec des animaux impressionnants et difficiles à vaincre, la chasse n’était pas une occupation qui flattait a priori l’image de l’empereur. La pratiquer signifiait qu’à l’instar de ses pairs il y trouvait du délassement (remissio) et qu’il n’avait rien à craindre de ses adversaires. La place de la pratique cynégétique chez Hadrien relève d’un choix personnel, d’une expression monarchique du pouvoir qui suggère que, face à tous les dangers qui pèsent sur l’empire, lui seul détient la solution avec l’accord des dieux. Par ses choix culturels, Hadrien colore son sport favori d’une dimension grecque qui privilégie en la matière l’amitié virile (ici la liaison avec Antinoüs qui chasse le lion en sa compagnie) sur les pièges érotiques tendus par les génies et divinités résidants et pense, avec Aristote, que l’ordre du monde place les hommes au-dessus des animaux domestiques et non domestiqués96. Plus subtilement, Hadrien percevait dans la chasse la profonde duplicité de l’homme et de l’empereur : il savait que vaincre le lion supposait de se faire lion soi-même et que la loyauté réclamée appelait, pour ne pas perdre, de se faire rusé et truqueur. Pline le Jeune définit la bonne chasse comme un plaisir particulièrement apprécié de la iuuentus97. L’emploi de uoluptas évoque le procurator uoluptatum ou a uoluptatibus attesté à plusieurs reprises parmi les personnels impériaux98. Il est évident qu’Hadrien ne pouvait se réclamer de la uoluptas sur les monuments publics et que la Virtus Augusti était un fondement essentiel de l’édifice impérial, conférant une légitimité au Prince titulaire. Faute de conquêtes glorieuses et de grandes victoires, Hadrien recourut à la Virtus pour manifester sa valeur militaire que son mode de gouvernement et la chasse révélaient. Le choix d’inclure les « tondi » dans l’arc de Constantin éclaire leur signification : Constantin y avait vu le modèle de l’empereur attaché à protéger la civilisation, tendu vers cette tâche décisive pour rendre vains les efforts dangereux des « Barbares » à attaquer l’Empire99. Cependant, la uoluptas fut certainement le ressort des chasses de l’empereur et de la publicité, répétons-le exceptionnelle, qu’elles reçurent avec lui. Hadrien privilégia les scènes de chasse et donna à la chasse un droit de cité officiel parce que la chasse révélait son goût profond en ce domaine et mettait en exergue son habileté, ses succès, son art de chasseur attaché à la beauté de l’exploit. La chasse était résolument placée du côté de l’éducation, de la contemplation et de la civilisation, d’où les critiques, excessives. D’où, à la fin de l’Empire, le comportement d’Honorius et Théodose II qui rattache la chasse à la uoluptas, au bon plaisir de l’empereur100.

25Le dossier documentaire n’évolue que peu et un réexamen n’autorise que quelques apports de détail. La chasse ne fut ni dédaignée ni profondément transformée par les Romains sous l’Empire. Les empereurs s’y frottèrent au cours de leur jeunesse mais peu la cultivèrent par la suite en dehors peut-être des occasions fournies à la faveur des expéditions militaires, comme le suggèrent L. Verus et Dioclétien. Hadrien n’en est pas pour autant une énigme – et devint même un modèle, l’imitatio Hadriani – que la pacification de l’Empire, la culture grecque, l’imitation d’Hercule et d’Alexandre contribuent à éclairer. Activité plus aristocratique qu’impériale, la chasse d’apparat ne pouvait rivaliser avec la guerre et personne ne cherchait à le faire : la dimension aulique avec la cour d’amis, des moyens inégalés, des cohortes de serviteurs, une mise en scène savante suffisait à l’expression de la supériorité du monarque. Toutefois, la valeur éducative de la chasse impliquait qu’elle fît aussi partie du langage de la cité et du pouvoir, d’autant que les « chasses urbaines » de l’amphithéâtre y contraignaient ou y conviaient en obligeant l’empereur à se montrer généreux et original et à partager les goûts des spectateurs. Elle plaçait au centre des préoccupations la violence, l’animalité et la rivalité. C’est en ce sens qu’elle put jouer le rôle d’une métaphore sur le métier et la condition d’empereur sans pour autant devenir une activité centrale et imprescriptible des princes au pouvoir. Comme pour bien d’autres manifestations relevant de l’otium impérial, l’attrait personnel et la volonté de le faire valoir furent décisifs. Les liens qui unissaient guerre et chasse en termes de formation aristocratique ou d’épreuve pour la manifestation de qualités exceptionnelles et dans l’ordre, plus restreint qu’on ne croit, des symboles, ne signifièrent jamais que l’une pouvait être prise pour le substitut de l’autre, réellement.

Addendum

  • 101 T. Opper (dir.), 2008.

26Ce n’est qu’après avoir rédigé ce travail que j’ai eu connaissance du Catalogue de l’exposition de Londres (British Museum, 24 juillet-26 octobre 2008)101 sur l’empereur Hadrien dont on sait (voir le titre) qu’elle voudrait réagir contre un portrait partiel – imposé par M. Yourcenar – de l’empereur considéré comme éloigné de la chose militaire, vu comme un intellectuel imprégné de culture grecque et ami d’Antinoüs. J’ai cru bon d’insister sur le fait qu’Hadrien fut d’abord un empereur romain qui mit son goût pour la chasse au service de son autorité et de son pouvoir qui était assurément celui de tous les empereurs, à savoir en premier lieu celui d’un imperator soucieux de la guerre et de la paix, des armées (le discours de Lambèse), de la puissance de Rome fondée sur la Victoria Augusti et sur le modèle triomphal. Son hellénisme n’excluait ni la guerre ni la conquête d’Alexandre.

27Le Catalogue, p. 173, offre une version anglaise du poème de Pancratès accompagnée d’une photographie du papyrus fragmentaire qui le fait connaître (fig. 155). Les « tondi » de l’Arc de Constantin sont introduits comme suit (p. 172) : « Somewhere in or near Rome a splendid memorial to these hunting exploits must once have stood. Eight large relief tondi, later reused in the Arch of Constantine, appear to be all that remains of this monument. » L’idée de ce monument me semble peu répandue et intéressante. Toutefois, avec prudence, l’exposé, qui résume ce qui est dit ordinairement de la passion d’Hadrien pour la chasse, indique que le sujet est controversé et insiste surtout sur l’identification possible ou non d’Antinoüs sur les « tondi » où il faudrait voir une forme de représentation de la suite d’Hadrien au cours de différentes chasses.

28La chasse n’est qu’un élément particulier que les organisateurs ont surtout associé à la jeunesse, à l’éducation et à la relation avec Antinoüs. L’ensemble des aspects du « règne » sont largement illustrés et donnent une image multiforme et complexe des actions et de la personnalité de l’empereur qui reste finalement un objet de discussions parce qu’insuffisamment servi par la documentation, lacunaire et parfois déformée.

Bibliographie

Post-scriptum

Bibliographie : P. 144 (sur les chasses dans l’amphithéâtre et les spectacles impériaux), l’inscription de l’île Farasân Kabir a été commentée par M. A. Speidel, ZPE, 163, 2007, p. 297-300 = AE, 2007, 1659. Pour le texte des Cestes de Julius Africanus, se reporter à sa transcription infra chap. X, p. 187. Le site de Piazza Armerina était occupé par un premier établissement rural dès le Haut-Empire. La grande villa du IVe siècle, de propriétaire non identifié, est désormais datée, selon les spécialistes, des années 330-350 ou 350-370 : voir récemment P. Pensabene, Piazza Armerina, villa del Casale e la Sicilia tra Tardoantico e Medioevo, Rome, L’Erma di Bretschneider, 2010. Aussi, P. Pensabene, E. Gallochio, E. Gasparini, R. Montalbano et G. Paternicò, « Villa del Casale di Piazza Armerina : nuovi scavi », dans Fasti Online. Documents and Research, Rome, 2009 [PDF].

Notes

1 Le latin utilise le verbe uenari le plus souvent. La notion romaine la plus proche du « sport » serait otium dans la mesure où le mot met l’accent sur le divertissement, le loisir. Il est remarquable que Pline le Jeune, Panégyrique, LXXXI, 1, parle de refectio pour mieux mettre en valeur l’attitude de Trajan, pour qui la « remise en forme » n’était qu’une mutatio laboris, « un changement d’activité ».

2 Voir parmi les études récentes : J.-L. Voisin, 2002, p. 16-17 ; surtout, trois contributions dans W. Martini (dir.), 2000, avec la bibliographie.

3 J. Aymard, 1951, p. 173-184 et p. 522-537 ; L. Robert, 1978, p. 439. Aussi, J.-L. Voisin, 2002, p. 16-17 ; A. Gutsfeld, 2000, p. 79-99.

4 Récemment, A. Gutsfeld, 2000, p. 79-99.

5 J. Aymard, 1951, p. 173-184. Il convient d’ajouter que des incertitudes demeurent concernant la chronologie précise (non leur séquence) des événements, d’où des divergences perceptibles, souvent à un ou deux ans, dans les différents travaux. Pour chaque document, je m’en tiendrai donc, au cas par cas, à la démonstration la plus raisonnable.

6 Voir, récemment, l’édition de J.-P. Callu, 1992, p. 1-48.

7 Sur le goût d’Hadrien pour la chasse : Histoire Auguste, vit. Hadr., II, 1 ; XX, 12-13 ; XXVI, 3. Dion Cassius, LXIX, 7, 3 ; 10, 2-3 ; 22, 2.

8 Sur le poème de Pancratès, connu par un fragment cité par Athénée de Naucratis et par un papyrus (P. Oxy,. 8, 1085) : T. Kasulke, 2000, p. 108-110 ; l’inscription de Thespies : IGR, VII, 1828. L. Robert, 1978, p. 440, hésitait sur l’existence de deux captures d’une ourse (Mysie et Béotie) en peu de temps, mais aucun indice n’autorise vraiment à mêler les deux événements : les poèmes d’Hadrien ont été un temps considérés comme des fictions littéraires sans aucun rapport avec la réalité, d’où l’idée qu’à une année de distance la capture extraordinaire aurait été doublement célébrée par Hadrien. Le contexte particulier de Thespies permet de préférer l’hypothèse de l’offrande des dépouilles d’une capture d’origine locale. L’argument que la tradition eût mentionné comme exceptionnel un double succès à une année d’intervalle n’est qu’un argument e silentio. J. Aymard, 1951, p. 180-181, parle, à juste titre, d’hypothèse « hasardée » et signale que la région béotienne était connue pour ses ours.

9 Désormais : ILN, IV, 33.

10 J. Aymard, 1951, p. 527-535, qui indique qu’à l’origine il y en avait plus que huit ; plus récemment, W. Martini et E. Schernig, 2000, p. 129-155.

11 Voir par exemple, L. Robert, 1978, p. 440 ; A. Gutsfeld, 2000, p. 81-82.

12 L. Robert, 1978, p. 437-452, a bien mis en lumière le sens et la date (123-124) de l’inscription de Stratonicée-Hadrianoupolis (AE, 1977, 804) et l’appellation de Zeus Kynégésios qui s’adressait à Hadrien, célébrant une vraie chasse, non une uenatio d’amphithéâtre ; il indique que l’empereur fut le refondateur de la ville du Haut-Caïque et associe cet acte à la politique de développement des cités dans les zones forestières d’Asie Mineure occidentale, ce qui rend également compte de la création d’Hadrianoutherae. Les chasses victorieuses, en revanche, devraient être considérées comme des prétextes et non comme la cause essentielle de ces fondations (p. 451-452).

13 J. Aymard, 1951, p. 176 (relié au séjour à Italica entre 15 et 17 ans, selon Histoire Auguste, vit. Hadr., II, 1-2) et 182 : l’Espagne, qui paraît avoir tiré son nom de sa qualité de « côte aux lapins » pour les Phéniciens, avait la réputation d’être particulièrement giboyeuse. Une monnaie d’Hadrien (BMC, III, 501) en relation avec l’exercitus péninsulaire y fait figurer un lapin.

14 Titre du chapitre ix, p. 173.

15 Histoire Auguste, vit. Hadr., I, 5.

16 Pline Le Jeune, Panégyrique, LXXXI.

17 J. Aymard, 1951, p. 493-495.

18 J. Aymard, 1951, p. 173-174, qui rappelle à juste titre la remarque, essentielle, de Dion Cassius, LXIX, 10, à savoir que la passion cynégétique ne s’exerça pas au détriment du métier d’empereur, ce qui doit être interprété comme l’écho d’une critique des sénateurs : A. Gutsfeld, 2000, p. 92.

19 A. Gutsfeld, 2000, p. 537-552.

20 A. Gutsfeld, 2000, p. 183.

21 CIL, II, 2660 a-e = CLE, 1526 ; AE, 2002, 781. Voir G. Alföldy, 1969b, p. 121, et les diplômes militaires AE, 1998, 1623-1624. La formule initiale aequora conclusit campi a été comprise sous un angle religieux à cause de la suite diuisque dicauit et templum statuit tibi Delia uirgo triformis. Il me paraît plus probable qu’il s’agisse, de la part d’un sénateur grand propriétaire d’Afrique, d’un « terrain de chasse » uoluptati suae, à l’image de ceux que décrivent Varron et Columelle, probablement créé à l’initiative de l’officier pour ses loisirs et destiné à durer le temps de sa charge de légat. Le campus n’est pas davantage le lieu d’exercice voisin des castra. Le campus Martis est ici mué en campus Dianae : l’allusion au paramus, le « páramo » ou vaste étendue plane de piémont (qui fait écho à aequora), montre qu’il ne peut s’agir du terrain d’exercice militaire ni de l’enceinte du sanctuaire, mais d’un espace de chasse créé pour l’accomplissement d’une activité regardée désormais comme une imitatio imperatoris. Voir AE, 2002, 781, qui dissocie le sanctuaire et le lieu de la chasse, évoqué, selon moi, par aequora conclusit campi. Il est étonnant que J. Aymard ait mentionné l’inscription juste avant son exposé sur les « parcs de chasse » pour ne retenir que le caractère propice des terres espagnoles à l’exercice cynégétique (p. 68) ou ce que le poème révèle du gibier de la terre d’Hispania (p. 183), des techniques propres aux provinces dans la chasse au cerf (p. 346) ou de l’association dans un même exercice du sanglier et du cerf. Si l’hypothèse est admissible, le texte ouvre une recherche sur la pratique de la chasse chez les officiers, ce que je me réserve d’étudier bientôt à partir du texte de Q. Tullius Maximus.

22 Histoire Auguste, vit. Hadr., II, 1-2 ; J. Aymard, 1951, p. 523, « Trajan, le rude espagnol ».

23 J. Aymard, 1951, p. 83 : « Avec cette possibilité de synthèse, ou plus exactement avec cet esprit de tolérance mêlé à l’absence d’originalité, qui reste un de leurs traits caractéristiques, les Romains ont simultanément pratiqué, connu, adopté la chasse alimentaire des uenatores seruiles, la chasse d’entraînement physique ou de délassement des propriétaires ruraux, la grande vénerie, la chasse “coloniale” : celles de la Grèce et de l’Orient hellénistique, celles de l’Afrique, de la Gaule et de l’Espagne. »

24 L. Robert, 1978, p. 442, se montre réticent sur les excès de développements contemporains concernant les significations idéologiques et symboliques de la chasse, non sans raison.

25 J. Aymard, 1951, p. 156, ce qui est peut-être aller trop loin et faire dire beaucoup à des monnaies jugées « énigmatiques », dont ni les légendes ni les représentations ne parlent de ces questions. Diane chasseresse n’est pas un thème très original ni attaché au langage dynastique, quelle qu’ait été la dévotion de Nerva à l’égard de la divinité de l’Aventin.

26 Sur ce thème, bien qu’il s’agisse d’une période beaucoup plus récente, voir l’ouvrage de K. Thomas, 1985.

27 J. Aymard, 1951, p. 119.

28 Histoire Auguste, vit. Hadr., XXVI, 1, indique promissa barba, ut uulnera, quae in facie naturalia erant.

29 Histoire Auguste, vit. Hadr., XXVI, 3.

30 Apparemment, c’est avec Hadrien seulement que le lapin apparaît sur les monnaies relatives à l’Hispania : J. Arce, 1980a, p. 93.

31 Voir le poème de Pancratès.

32 Dion Cassius, LXIX, 22, 2.

33 Histoire Auguste, vit. Hadr., XXVI, 10.

34 J. Aymard, 1951, p. 175.

35 Ce dont J. Aymard ne rend compte que de manière diluée tout au long de l’ouvrage, sans offrir un point de vue complet sur ce thème. Ajouter W. Decker et J.-P. Thuillier, 2004, p. 20-34 sur le pharaon chasseur en particulier.

36 Polybe, Histoires, XXXI, 29.

37 C. M. C Green, 1996, p. 246 et suiv.

38 Dion Cassius, LXIX, 10, 2 : « cependant il ne négligea aucun des devoirs de sa charge (τῶν τῇ ἀρχῇ προσηκόντων) à cause de ce passe-temps ».

39 Plutarque, Pompée, XII.

40 Voir le Catalogue de l’exposition : AA. VV., Domiziano/Nerua. La statua equestre da Miseno. Una proposta di ricomposizione, Naples, G. Macchiaroli, 1987 ; S. L. Tuck, 2005, p. 221-245 avec l’essentiel de la bibliographie.

41 Le cou et l’arrière de la tête originelle sont conservés. Seule la partie faciale a été changée.

42 Les auteurs du Catalogue, p. 25, écrivent « semiaperta », ce qui paraît contestable vu l’angle droit que fait la mâchoire inférieure avec la base horizontale de la tête. Le cavalier a sans doute actionné le mors dont il ne reste que des traces.

43 Catalogue, AA. VV., op. cit., p. 32.

44 S. L. Tuck, 2005, p. 226-232 où est soulignée, p. 231-232, la présence d’Hercule enfant étouffant deux serpents. Le lien avec la chasse est d’autant moins lisible qu’il s’agit d’un épisode de la vie d’Hercule soulignant seulement sa capacité à affronter tous les dangers, ce que chaque empereur s’efforçait de prouver à ses pairs et aux citoyens par sa uirtus et sa pietas supposées.

45 Voir AE, 1975, 212 et AE, 2000, 345 a-c.

46 Ce que paraît conforter l’inscription à Nerva apparue également : AE, 2000, 345 c.

47 Une des difficultés méthodologiques des comparaisons ordinairement effectuées tient à la recherche de modèles empruntés aux monnaies ou à des bas-reliefs dont on ne sait pas jusqu’à quel point ils imitaient des statues en ronde bosse réellement existantes.

48 S. L. Tuck, 2005, p. 230, indique à juste titre que les chaussures sont du type du calceus patricius et sont identiques à celles de Marc Aurèle « in Campidoglio » qui figure, à mon avis, l’empereur lors d’un aduentus au retour d’une expédition. Elles chaussent aussi le Trajan de la frise de l’arc de Constantin lors d’une scène de bataille. Il n’y a donc pas d’incompatibilité avérée avec la représentation militaire de l’empereur. Le calceus patricius n’était pas réservé à des togati ni aux empereurs. Le petit objet en bronze dénommé « Alexandre à cheval » d’Herculanum (S. L. Tuck, 2005, p. 234, fig. 7) porte également ce type de chaussures et appartient à une scène de bataille au cheval cabré.

49 Selon S. L. Tuck, 2005, p. 241 et suiv., Caligula mit l’accent sur les antécédents grecs et l’imitation d’Alexandre par le biais de la gladiature et Néron sur agôn et aretè lors de ses participations aux concours de poésie et de chant.

50 Voir J. B. Campbell, 1984, p. 141-142. Domitien a reçu XXIII salutations impératoriennes au total, la dernière datant de 92.

51 On rappellera ici, après P. Veyne, que l’Empire romain et le pouvoir impérial étaient culturellement gréco-romains. Alexandre était un modèle pour tous les imperatores dès la fin de la République.

52 Il me semble que rien ne milite dans les sources en faveur d’une occultation des exploits de Domitien sur ce plan : il n’y a donc pas à chercher à le réhabiliter ni à lui attribuer une vision pacifiée du courage militaire.

53 Suétone, Domitien, XIX (trad. H. Ailloud, Paris, Les Belles Lettres, 1932).

54 Centenas, mis en exergue, évoque les hécatombes plutôt que l’art cynégétique.

55 Domitien ne dédaigna pas les exercices physiques et sportifs (Suétone, Domitien, XIX, 1 ; Dion Cassius, LXVII, 6), même si ce penchant révèle finalement le goût de la débauche : voir le « clinopalen » de Suétone, Domitien, XXII, 1.

56 Ce que suggère judicieusement J. Aymard, 1951, p. 194. On notera qu’il n’est jamais question de chasse au lion. A. Gutsfeld, 2000, p. 86-87, crédite Domitien d’une imitation du roi de Perse ou du monarque hellénistique à partir de Suétone, Domitien, XIX, ce qui n’apparaît pas même entre les lignes dans le passage cité et n’implique pas, en tout cas, la chasse aux grands fauves exotiques.

57 Pline le Jeune, Panégyrique, LXXXI (trad. M. Durry, Paris, Les Belles Lettres, 1959).

58 Suétone parle non de damnatio memoriae mais de memoria abolenda (Caligula, LX, 2 ; Domitien, XXIII, 2).

59 CIL, VI, 8555 = ILS, 1762.

60 C’est le mot utilisé à côté de refectio, déjà mentionné, par Pline le Jeune dans le Panégyrique, LXXXI, 1.

61 Toutefois, il s’agit ici de successeurs d’Hadrien qui, à leur manière, ont promu en ce domaine l’imitatio Hadriani : voir Histoire Auguste, vit. Ant., XI, 2 ; vit. Marc., IV, 9. Voir aussi, A. Gutsfeld, 2000, p. 94.

62 Voir Histoire Auguste, vit. Ver., II, 10 et VI, 9 par exemple.

63 Voir J. Aymard, 1951, p. 537-558, avec les sources.

64 Voir récemment A. Gutsfeld, 2000, p. 79-99. Il m’apparaît que l’exemple d’Alexandre, ses propres infirmités consécutives à une chasse, le pouvoir et la vie de Cour, le souci d’être le meilleur se conjuguaient pour éclairer l’activité cynégétique d’Hadrien.

65 Histoire Auguste, vit. Ver., IX, 8 : Verus, à la différence d’Hadrien, incarne un type d’empereur que la chasse détourne de ses devoirs.

66 Histoire Auguste, vit. Hadr., XIV, 6.

67 Salluste, Conjuration de Catilina, IV, 1.

68 Platon, Lois, VII, 823e-824a : voir A. Schnapp, 2000, p. 142 et suiv.

69 C. M. C. Green, 1996, p. 257-258.

70 Horace, Épîtres, I, 18, 49 (trad. F. Villeneuve, Paris, Les Belles Lettres, 1934).

71 G. Ville, 1981, p. 168-173, qui souligne l’irrégularité au Ier siècle des munera impériaux en insistant sur la difficulté à faire la part de ce qui était uenatio et gladiature. Sans doute faut-il se défier des impressions, mais entre Suétone, Tacite, Dion Cassius, Martial, Stace et l’Histoire Auguste on a l’impression que les munera et la uenatio étaient une obligation relativement régulière de l’empereur en séjour à Rome ou y célébrant un événement important dans la vie de l’Empire.

72 Voir Martial, Livre des spectacles.

73 P. Le Roux, 1990a, p. 209 et suiv.

74 AE, 1987, 867 (147 apr. J.-C.) : on note la formule ob uenationem Caesarianam iniunctam a Cl. Saturnino leg. Aug. pr. pr. ursis et uisontibus prospere captis.

75 Dion Cassius, LXXVI, 14, 3.

76 AE, 2004, 1643, datée de 144 : les îles Farasân au sud de la mer Rouge sont sous le contrôle de l’administration de l’Égypte comme le montre l’intervention de la légion II Traiana en garnison dans la province.

77 Voir P. Le Roux, 1990a, p. 215, note 135.

78 H.-I. Marrou, 1977, p. 39-40. La villa de Sicile n’est pas liée à Maximien puisqu’elle est aujourd’hui placée vers 330-350 et n’est pas considérée comme une « villa impériale ».

79 Il n’est pas possible d’insister ici sur l’apparat monarchique d’une chasse impériale qui incluait des amis et invités, des serviteurs, des spécialistes de toute sorte, notamment pour les chiens, et constituait donc une occasion de mise en scène et d’affirmation de la supériorité impériale. Le déroulement de la chasse, dans la forêt, restait invisible pour le plus grand nombre. Sur le protocole d’une partie de chasse, voir par exemple : A. Gutsfeld, 2000, p. 83-84.

80 J. Aymard, 1951, p. 537-540.

81 Pline Le Jeune, Panégyrique, LXXXI, 1-3. Voir aussi A. Gutsfeld, 2000, p. 80, qui distingue justement la chasse de l’empereur comme activité privée et comme activité publique.

82 C. M. C. Green, 1996, p. 246 et suiv.

83 Comme propriétaire terrien, il chassait lui-même le sanglier sur les terres de sa villa des Tusci, même s’il admet préférer Minerve à Diane : Lettres, I, 6, 3 ; IX, 10, 1.

84 Voir M. Corbier, 1989, p. 234-237.

85 Les dispositions les plus claires concernant la chasse classent les animaux parmi les a natura prodita et relèvent de l’occupatio comme le montre le livre XLI du Digeste (XLI, 1, 3, d’apr. Gaius) : il en résulte que le gibier appartenait à celui qui le capturait indépendamment du lieu où il avait été capturé.

86 J. Aymard, 1951, p. 535 et suiv. ; S. L. Tuck, 2005, p. 240. La vraie chasse au lion, même chez Hadrien, fut quelque chose d’exceptionnel : c’est pour cette raison qu’elle a acquis le rang de chasse à proprement parler « impériale », dans la tradition d’Alexandre, et a été parodiée par Commode et Caracalla.

87 S. L. Tuck, 2005.

88 Voir T. Kasulke, 2000, p. 110-111, qui parle de chasse « bienfaisante » à propos d’Hercule et place, de façon raisonnable, le symbolisme de la chasse des empereurs sur le plan du conflit entre civilisation et monde sauvage ou « barbarie ».

89 Il convient de le souligner, comme le rappellent à loisir les inscriptions et les monnaies impériales, ce qui signifie que la chasse n’est qu’une des expressions possibles du courage physique et moral de la personne impériale, au moins depuis Hadrien, et n’offre donc pas d’originalité véritable sur ce plan.

90 A. Gutsfeld, 2000, p. 89-95, tente d’expliciter le discours cynégétique d’Hadrien exprimé sous toutes ses représentations par la volonté de relations apaisées avec le Sénat prompt à y déceler un caractère monarchique. Il me semble que la thèse de l’empereur soucieux du Sénat au IIe siècle relève du « mythe » du caractère républicain de l’empire au IIe siècle, qui était assurément monarchique. L’idée que le Sénat veillait aussi à limiter les dépenses d’apparat manque d’appui documentaire. Les chasses d’Hadrien sont représentées dans leur dimension réaliste parce qu’elles convenaient ainsi au style de l’époque, apaisée, et correspondaient à des faits vécus. Elles participent de la compétition entre l’empereur et les sénateurs, chasseurs par éducation.

91 T. Kasulke, 2000, p. 114-115, insiste sur la dimension agonistique des trophées de chasse dans un contexte grec et civilisé et propose ainsi, à mon avis, une approche satisfaisante d’une partie du contenu de la dédicace de Thespies.

92 Ses blessures de jeunesse, signalées par l’Histoire Auguste, ont certainement contribué chez Hadrien à élever la chasse à la dignité d’une activité éducative et d’école de courage et de risque réel.

93 Dion Cassius, LXIX, 2, 5.

94 Histoire Auguste, vit. Car., Carin. et Num., XIII-XV. Aper signifie le « sanglier », d’où le parti pris de l’auteur.

95 Ibid., XIV, 3 (trad. F. Paschoud, Paris, Les Belles Lettres, 2001).

96 Le passage Histoire Auguste, vit. Hadr., XX, 12 : Equos et canes sic amauit ut eis sepulchra constitueret est assurément une critique qui évoque aussi celle de Suétone concernant Incitatus, le cheval de Caligula devenu consul. Pourtant l’attitude d’Hadrien ne peut pas surprendre : des épitaphes à des animaux de compagnie (par exemple celle de la chienne Myia à Auch : CIL, XIII, 488) montrent que c’était une pratique normale dans le monde romain, témoignage d’affection pour des êtres animés et capables de communiquer avec les humains au même titre que les esclaves.

97 Pline le Jeune, Panégyrique, LXXXI, 2 : haec uoluptas erat.

98 Suétone, Tibère, XLII, 2 (le poste fut créé par Tibère pour T. Caesonius Crispus). CIG, II, 1813 b = ILS, 8849 (un chevalier peut-être sous Hadrien mais on ne peut pas exclure Trajan) ; CIL, XIV, 2932 = ILS, 1569 (sous Domitien) : Paean Aug. lib. proc. castrens. proc. hereditat. proc. uoluptat. proc. Alexandr. sibi posterisque suis. On ne saurait donc limiter la fonction à des appétits vils et grossiers : il faut probablement y inclure la chasse et d’autres loisirs à caractère culturel.

99 W. Martini et E. Schernig, 2000, p. 146 émettent l’idée, intéressante, que les divers animaux évoquaient la diversité des provinces et de l’étendue impériale. Ils ajoutent, p. 146-148, que la chasse au lion est caractérisée par le port de la cuirasse, ce qui assimilerait la chasse au lion, et elle seule, chez Hadrien, à la guerre ou plutôt à un privilège de l’imperator. À la p. 150, le souvenir de l’Hercule vainqueur du lion de Némée paraît devoir jouer aussi en faveur de l’apothéose d’Hadrien.

100 A. Gutsfeld, 2000, p. 85, qui oppose uirtus et uoluptas, ce qui ne me semble pas nécessaire : chez Hadrien les deux registres existent, complémentaires, entre la dimension publique et la dimension personnelle de l’art de chasser.

101 T. Opper (dir.), 2008.

Notes de fin

* Paru dans J. Trinquier et C. Vendries (dir.), Chasses antiques. Pratiques et représentations dans le monde gréco-romain (IIIe siècle av.-IVe siècle apr. J.-C.), Rennes, PUR, coll. « Archéologie et Culture », 2009, p. 23-35.

Table des illustrations

Légende Fig. 1. – La statue de Domitien/Nerva recomposée (Musée de Baia, Museo archeologico dei campi flegrei) : vue de face. Cliché Mimmo Iodice pour la Sopraintendenza archeologica per le province di Napoli e Caserta (1987) (Courtoisie du regretté Gaetano Macchiaroli)
URL http://books.openedition.org/pur/docannexe/image/122778/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 192k
Légende Fig. 2. – Tête du cheval bouche ouverte (Cliché Mimmo Iodice pour la Sopraintendenza archeologica per le province di Napoli e Caserta, 1987). Courtoisie du regretté Gaetano Macchiaroli
URL http://books.openedition.org/pur/docannexe/image/122778/img-2.jpg
Fichier image/jpeg, 351k
Légende Fig. 3. – L’empereur, bras droit en action, tête et buste cuirassé (Cliché Mimmo Iodice pour la Sopraintendenza archeologica per le province di Napoli e Caserta, 1987) Courtoisie du regretté Gaetano Macchiaroli
URL http://books.openedition.org/pur/docannexe/image/122778/img-3.jpg
Fichier image/jpeg, 212k

Le texte et les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont sous Licence OpenEdition Books, sauf mention contraire.

Rechercher dans OpenEdition Search

Vous allez être redirigé vers OpenEdition Search