Conclusion
p. 377-390
Texte intégral
1Lorsque le jeune Louis XIV ouvre le conseil extraordinaire qu’il a convoqué dans la matinée du 10 mars 1661, au lendemain du décès de son parrain, le cardinal Mazarin, il annonce son intention de gouverner sans « premier ministre » et de décider, dorénavant, seul :
« Et vous, mes secrétaires d’État, je vous ordonne de rien signer, pas même une sauvegarde ni un passeport, sans mon commandement ; de me rendre compte chaque jour à moi-même, et de ne favoriser personne dans vos rôles du mois1. »
2L’anecdote résonne comme un manifeste absolutiste. Au seuil de l’affirmation personnelle de son pouvoir, le souverain impose que dorénavant le moindre acte d’autorité aura à lui revenir. Il est amusant de constater que ce sont les « sauvegarde » et « passeport » qui lui arrivent spontanément à l’esprit. Rien d’étonnant à cela. Nous venons de voir combien la sauvegarde, par les définitions qui en sont construites à la fin du XVIIe siècle, mettait en jeu la souveraineté royale. Cardin Le Bret, dans une des acceptions juridiques du terme, avait depuis longtemps expliqué qu’il n’y a « que le Prince souverain qui les puisse octroier », du moins pour « celles qui sont conçûës en termes généraux, & qui ne specifient & ne dénotent aucune personne particulière » : seul « le Prince Souverain [peut] parler de la sorte2 ». De même, selon les dictionnaires du XVIIe siècle, la délivrance des passeports lui appartient en propre ; ou du moins relève-t-elle de ceux qui en détiennent le pouvoir « de laisser entrer, passer & demeurer un certain tems sur ses terres une, ou plusieurs personnes étrangères3 ». Le passeport traduit une claire conscience de la frontière ; il vise au contrôle des entrées et sorties du territoire. Dans cette tentative de monopoliser la moindre parcelle de son pouvoir – ces insaisissables passeports et sauvegardes –, Louis XIV participe de cette aspiration à la toute-puissance déjà partagée, nous l’avons vu, par Richelieu. Il trace ainsi l’horizon d’attente de son règne : l’indivisibilité d’une souveraineté absolue.
3Pour autant, dès lors que l’on place le point d’observation non plus à la Cour mais sur la frontière, en 1661, force est de constater que le jeune homme se leurre. Moins qu’un monopole croissant de l’autorité royale, ce serait plutôt sa fragmentation continue, profondément accentuée par la guerre, qui aurait été à l’œuvre depuis une trentaine d’années. Le roi reconnaît bien que la délivrance des documents lui échappe. Il semble cependant croire qu’elle relève au moins de la responsabilité des secrétaires d’État. Rien n’est plus faux. Les sauvegardes juridico-militaires que nous avons abordées, et qui ne sont sans doute pas celles que Louis XIV a en tête, sont délivrées par des gouverneurs de places et de provinces, sans que le pouvoir central en soit toujours averti. Leur histoire, telle que nous avons tenté de la reconstruire, rend compte d’une dispersion de l’autorité royale. Il en va de même pour les passeports. Certes, les souverains en délivrent. Mais ils ne les monopolisent pas : des villes, des gouverneurs ou des chefs militaires le font aussi. Les Messins en utilisent un grand nombre. Lorsqu’ils envoient des députés vers leurs ennemis, ils en sollicitent de tous côtés : des responsables de places adverses avec lesquels on négocie, mais aussi de tous les autres dont on craint les partis4. Et malgré l’escorte militaire que la sauvegarde autorise, la délégation ne quitte jamais le giron des murs urbains avant d’avoir obtenu la certitude de sa protection. Et comme elle prend ces initiatives le plus souvent pour négocier le paiement de ses contributions, la ville les obtient aisément des ennemis. Mais pas que d’eux. Les Messins sollicitent aussi les gouverneurs français. Leurs délégués s’apprêtent en effet à quitter l’espace contrôlé par le roi afin de rencontrer les autorités étrangères. Il convient cependant que les députés soient assurés, si ce n’est de l’autorisation, du moins de la protection des chefs militaires environnants dont ils pourraient croiser les soldats. Personne n’y voit d’ailleurs de difficultés. Tous, des autorités militaires régionales comme du gouverneur de Metz, leur accordent les documents demandés : si, vers 1651, le maréchal de Schomberg dénonce les sauf-conduits délivrés par son lieutenant de roi, Sérignan, aux députés de la ville pour qu’ils « allassent [...] traitter avec le duc de Havré gouverneur de Luxembourg5 », lui-même, deux ans plus tard, autorise les Messins à solliciter des frondeurs un sauf-conduit « affin de faire le traité contre [sic] le party des princes6 ».
4D’autant que ces acteurs militaires, qui déjà s’échangent sauvegardes et contributions, se sollicitent les uns les autres pour obtenir des passeports : en 1653, le gouverneur de Metz, représentant le roi dans cette forteresse sur pied de guerre, prie le prince de Condé, frondeur, de lui accorder une sécurité pour lui, son carrosse et sa suite, afin qu’il puisse se rendre aux bains de Plombières et y séjourner quelques mois ; sa « lettre » viendrait alors compléter, comme un écho des sauvegardes négociées par la ville, celles octroyées, déjà, par le duc de Lorraine et les Espagnols, tous des ennemis de la France7. L’année suivante, c’est Caillet, l’administrateur des contributions princières, qui presse le Magistrat de lui en obtenir auprès du maréchal de Schomberg8. Et si, dans ce possible échange de politesses9, au bout du compte, il ne semble pas avoir eu satisfaction10, d’autres l’obtiennent. En 1655, le gouverneur de Sedan, Abraham Fabert, fidèle créature de Mazarin et indéfectible serviteur de la monarchie, accorde à l’épouse du comte de Montal, l’un des principaux militaires condéens, un passeport pour traverser son gouvernement et rejoindre Lille. Conscient des interrogations qu’une telle initiative pourrait susciter, le futur maréchal exige qu’elle n’y contacte personne qui puisse donner « du soubci à la Cour » ; il explique aussi que le document ne vaut que pour ses propres soldats et qu’il ne lui délivre pas un passeport général que le roi seul peut octroyer11. La précision traduit alors un double niveau de réalité : sous ces passeports généraux, qui effectivement remontent jusqu’au roi, et qui ne sont pas sans rappeler les sauvegardes « conçûës en termes généraux » évoquées par Cardin Le Bret, fourmillent une multitude de documents ponctuels dont la diversité des bénéficiaires comme des puissances émettrices est infinie. Aucun ne transite par les bureaux de la monarchie ; tous témoignent d’un émiettement de l’autorité royale. Dans cet espace frontalier confronté à la guerre, et à ses dangers, la réalité mouvante de ces passeports se situe sous le seuil de perception du pouvoir central. Le jeune Louis XIV ne l’entrevoit qu’à peine.
5Un amoindrissement identique de la souveraineté royale découle de la position des gouverneurs des places frontières. Jamais peut-être ils n’ont été aussi indépendants dans la pratique réelle et quotidienne de leurs pouvoirs. L’impératif de la guerre autorise tous les excès. Ce qui transparaît à Pont-à-Mousson avec M. de Gadagne, à Moyenvic avec Bourdonné ou à Metz avec La Contour, pourtant simple lieutenant de roi, c’est la domination étroite du territoire et des hommes dépendant de leurs forteresses. La pérennisation des Magistrats urbains, bien au-delà des renouvellements annuels, témoigne, à Metz en particulier, de leur mainmise sur le maître-échevin et sur ses conseillers. Quant au système des contributions, il renforce leur autonomie. Sans au préalable en référer au roi, les gouverneurs de places négocient des traités avec les ennemis. L’argent ainsi levé ne transite jamais par les caisses de l’État. Il reste la propriété des responsables militaires. Une plongée plus profonde dans les sources budgétaires et dans les archives familiales de ces aristocrates pourrait sans doute révéler, non sans de réelles difficultés, l’ampleur d’un drainage opéré au profit de ces représentants du roi. Les pouvoirs centraux, qu’ils soient parisiens ou bruxellois, n’en connaissent que quelques bribes. Vraiment, comme l’écrira fascinée par son beau-père la belle-fille du gouverneur Lambert à la fin du XVIIe siècle, « les gouverneurs de ce temps-là avaient la même autorité que les vice-rois12 ». Surtout, du point de vue de la souveraineté, et plus prosaïquement du « devoir de révolte », le système contributionnaire constitue le ressort financier d’un processus d’autonomisation confinant à une possible rébellion : à peine entré en sécession, Turenne lève des contributions sur les villes françaises, et dans le cas de Condé, Caillet, son intendant des contributions, met en place un vaste système de spoliation appuyé sur les places que les Frondeurs tiennent du roi en Champagne. Cette organisation militaro-financière est à la base, durant près d’une décennie, d’une partie de l’entretien des troupes princières, voire de la continuation d’une révolte portée jusqu’en 1659.
6Au-delà de ce financement, et à l’inverse d’un absolutisme triomphant, il s’agirait presque d’un retour du refoulé féodal où de petits seigneurs, tout-puissants, domineraient le plat pays du haut de leurs places fortes. Cette réactualisation des temps anciens serait d’abord guerrière. La possibilité, exaltante, de partir en chevauchés semble saisir les officiers, voire certains lieutenants de roi et gouverneurs13 ; l’espoir de faire coïncider la qualité belliqueuse d’un sang noble et ses actes, joint à l’attrait d’une vie aventureuse et lucrative y a participé14. Au temps des Lumières et de la guerre réglée, c’est avec nostalgie que l’aristocratie en crise d’identité regardera les exploits individuels de la « petite guerre » du siècle précédent. Elle permettait en effet de se faire un nom ; ses capitaines étaient célèbres ; on vantait leurs exploits15. Les nobles y retrouvaient les vertus traditionnelles de leur ordre – audace, témérité, initiative – que le caractère figé des sièges de places ne permettait plus d’exprimer16. Ainsi les officiers témoignent-ils d’un grand empressement à sillonner les campagnes : à la rupture officielle de la « petite paix » entre Charles IV et Louis XIII (été 1641), « la publication ne fut point presque affichée, ni le paquet destourtillé que le capitaine Bonnecasse avec sa compagnie montèrent à cheval et sans detaller s’en allèrent saisir la herde de Nomeny17 ».
7À l’entrée du conflit, l’appel du sang semble retentir sur tout l’espace frontalier. Les interventions se succèdent18. À Metz, dès mars 1636, le nouveau lieutenant de roi, Roquépine, se démène comme un diable. Les Messins placent dans ce « brave homme », au sens belliqueux de l’adjectif, de grands espoirs, car « les ennemis de toutes parts estoient sçans cesse et journellement anvenir prendre bestes et gens jusquau des portes de Metz19 ». Le militaire lance alors de nombreux raids, soutient un capitaine messin, Busselot, dans ses opérations et réduit les places les plus agressives comme celle de Marange20. Et en septembre, la ville se félicite déjà du « bon ordre » apporté par le commandant dans la campagne : « les courreurs [...] qui l’incommodoient en sont retirés en sorte que l’on peut presentement avec sureté travailler au labourage21 ». Dans ce cadre, sans doute faudrait-il accorder une plus grande attention aux compagnies de chevau-légers des gouverneurs, dont les responsables ressemblent étrangement aux milites des premiers temps féodaux. Ne constitueraient-elles pas le noyau des compagnies franches des garnisons partant en larges chevauchées lever des contributions sur les territoires ennemis ?
8Enfin la frontière. Ces étonnantes initiatives urbaines peuvent traduire une prégnante illusion d’autonomie ; elles s’inscrivent surtout dans un temps long caractéristique des espaces d’entre-deux. Les trêves, inspirées des Landfriede impériales, et inaugurées par la Commune Trêve de 1343 – signée à Metz, elle regroupait la plupart des princes territoriaux de l’espace lorrain ainsi que ses principales villes22 – avaient marqué les deux derniers siècles du Moyen Age. Les accords commerciaux qui ouvrent l’époque moderne, puis les neutralités recherchées par les Messins au XVIe siècle, enfin ce système contributionnaire des années 1640, pourraient s’inscrire dans le sillage de ces procédures de négociations visant au contrôle de la violence : quand nulle puissance supérieure ne réussit à imposer la paix dans les campagnes, et la sécurité des routes commerciales, s’impose, à la fois comme longue tradition et comme structure née d’un espace périphérique, l’accord avec un ennemi tellement voisin.
9À contre-courant de l’évolution générale, la guerre, à Metz, ne produit donc pas la frontière. Bien plutôt, elle la gommerait. Sur certains points, et notamment dans le cadre d’une conception symbolique et héritée de l’impôt, versé en contrepartie d’une protection, la ville glisse sous des souverainetés étrangères. La contribution, liée à la sauvegarde, semble construire, dans ses mots comme dans ses procédures administratives, une véritable fiscalisation d’un territoire ennemi. Alors que la déclaration du 19 mai 1635 suspendait toute relation économique entre les belligérants, les marchands locaux, munis de leurs sauvegardes, peuvent poursuivre leurs activités dans l’Empire et jusque dans les Pays-Bas espagnols. De même, les contacts presque quotidiens menés avec les gestionnaires ennemis, les poursuites des infractions portées devant les autorités de Bruxelles, ou de Luxembourg, rapprochent les Messins de leurs voisins. Ces initiatives obligent la ville à manipuler, à maîtriser les structures administratives ennemies ; voire à s’y intégrer lorsqu’elle se place sous la juridiction lorraine du Conseil souverain en exil, ou lorsqu’on lui propose de porter ses plaintes devant l’audiencier à Bruxelles, comme un vulgaire sujet du roi catholique. Et les négociations menées de l’autre côté de la frontière, dans leurs fréquences et dans leurs structures – intercessions ou corruptions –, s’apparentent à celles conduites au même moment vers Paris.
10Car la cité négocie aussi, et ardemment, dans la capitale du royaume. Ce dialogue habituel, développé avec la monarchie, éclaire ainsi d’un jour particulier la relation politique entre la périphérie et le centre. Loin d’être une soumission entière et immédiate à la décision prise par un pouvoir administratif et éloigné, la négociation infinie avec tous les hommes titulaires d’une part du pouvoir royal en caractérise la moindre des applications. La ville défend ses intérêts partout où ils se jouent : du camp des soldats avec les capitaines et les colonels, aux ministres littéralement assiégés parfois à leurs domiciles, ou aux portes des conseils. Ses agents, ses avocats, ses soutiens de toutes sortes, et d’abord les courtiers de la faveur royale que sont les gouverneurs, tout ce front d’intercession pousse la monarchie, et ses armées, au compromis constamment négocié et contesté. L’ampleur de cette diplomatie urbaine, l’ampleur aussi de la mobilisation des Messins au service de l’effort de guerre de la monarchie, conduit la ville à trouver des voies autonomes pour contraindre la population. Elles passent par le compromis et de nouveau, par la démultiplication des négociations, notamment avec l’élite urbaine. Le groupe restreint des hommes participant au pouvoir, comme ceux qui ponctuellement apportent leur aide, s’élargit bien au-delà d’une configuration institutionnelle que la monarchie, ironie de l’histoire, venait de profondément réformer sur le modèle parisien. Le mouvement apparent du pouvoir urbain appartient à une politique de réduction forcée des équipes municipales, selon une procédure habituelle de la monarchie depuis Henri IV ; dans le même temps, la pratique réelle aboutit à une dilatation inconnue jusqu’alors dans la ville, et rendue indispensable par les charges militaires supportées par les Messins.
11Bref, si les premiers mots de Louis XIV prennent tout leur sens dans la projection qu’ils semblent opérer du règne futur, ils valent aussi par le passé qu’ils abordent furtivement. Le jeune roi perçoit que son pouvoir, malgré les péremptoires affirmations des écrits juridiques, se partage avec les secrétaires d’État et les ministres. En refusant de donner un successeur à Mazarin, il entend monopoliser définitivement ce qu’il juge être son autorité. Mais limitée à la tête de l’État, son étroite perception ne peut mesurer l’ampleur réelle du problème : « infinies négociations » et « étrange division de la souveraineté » semblent en effet s’être additionnées, trente ans durant, pour réduire à peau de chagrin les pratiques absolutistes sur ces terres de frontières.
12Pour autant, entre conjoncture et structure, ne nous laissons pas prendre d’une illusion d’optique. L’épreuve de la guerre a été imposée à l’État durant une décennie politiquement effroyable, de la mort de Richelieu (1642) à la fin de la Fronde (1653). Alors, les effets de structure jouèrent à plein. Les réflexes sociopolitiques acquis depuis la Renaissance, ceux d’une monarchie consultative aux décisions de plus en plus médiatisées et discutées au fur et à mesure de l’éloignement de la sphère décisionnelle, étaient toujours présents23. Ils renaissent, ou bien plutôt se redéployent avec force, telles des habitudes profondément ancrées, dès l’unicité du pouvoir à nouveau contestée. Et l’absence d’une présence ancienne des « hommes du roi » dans la région, à la différence par exemple de la Champagne où les intendants participent de la gestion des contributions, permet le retour de ces mécanismes anciens.
13Mais, sur le temps long de l’histoire urbaine, de 1552 à 1661, s’inscrit un puissant courant d’affirmation absolutiste et d’intégration au royaume. Mesurons la distance parcourue. Avant que la guerre ne pénètre en Lorraine, en 1631, la « bonne ville » de Metz jouissait d’une autonomie élargie sous l’autorité d’un gouverneur, puissant mais finalement assez discret. Placée sous la bénigne protection des rois de France depuis sa conquête au milieu du XVIe siècle, elle ne payait ni taille, ni gabelle, ni aucun impôt royal et possédait, comme les pays d’états à quoi elle tendait d’ailleurs, un droit de remontrances utilisé indifféremment vers le gouverneur ou vers le roi. Une trentaine d’années plus tard, la mutation est impressionnante. Elle est d’abord fiscale : en 1661, les évêchois payent à la monarchie deux impôts, la gabelle, depuis 1633, et la subvention, le nom local de la taille ; en 1698, ils en payeront sept, une fois ajoutés aux deux premiers, les étapes, l’imposition des chemins, des fortifications, la levée pour les appointements des officiers généraux de la Lorraine et, de manière commune avec le reste du royaume, la capitation24.
14Par ailleurs, érigée depuis 1648 à la tête d’une province à part entière du royaume, celle des Trois-Évêchés, la ville a été dotée d’une panoplie presque exhaustive des représentants du pouvoir central : le gouverneur, fermement contrôlé maintenant par la monarchie au terme d’une véritable reconquête de la tête militaire de la ville, impulsée par Richelieu et parachevée par Mazarin, le parlement, de retour de Toul depuis 1658, un tribunal de bailliage, deux Trésoriers de France, une Chambre des Comptes et le Bureau des Finances de la généralité de Metz-Alsace. Quant aux incontournables intendants de police, justice et finance, qui s’érigent à la fin des années 1650 comme le pouvoir prééminent en lieu et place des gouverneurs, ils proviennent des milieux les plus proches du pouvoir. Entre 1657 et 1663, ce sont deux Colbert, cousin et frère du futur contrôleur général des finances, qui se succèdent à la tête de la généralité messine : Jean-Baptiste Colbert de Saint-Pouange (1602-1663), de 1657 à 1661, puis Charles Colbert (1625-1696), marquis de Croissy, de 1662 à 1663. La lettre de commission de ce dernier, qui marque le passage de l’un à l’autre, précise ainsi que, pour « les peuples de nos frontières qui ont souffert des dommages et des incommodités de la guerre », et qui sont « les plus exposés aux passages de nos armées et aux courses des ennemis », il ne fallait y placer, comme « intendant de la justice, police et finance, que des personnes recommandables par leur propre mérite et par leur capacité et intégrité et qui par leur autorité sussent y maintenir l’ordre au plus grand soulagement des peuples25 ». Par la suite, et dans cette continuité, leurs successeurs, tous de fins administrateurs, appartiendront étroitement à la clientèle du secrétariat de la Guerre et des Le Tellier. Quant à la situation militaire de la ville, bientôt, elle revêtira une mission géostratégique à l’échelle du royaume : « les places que l’on a fortifiées ailleurs sont pour couvrir des provinces, mais il faut fortifier Metz pour couvrir l’État », déclare Vauban vers 169626. Ne subsiste donc plus rien, pour sacrifier à une certaine nostalgie, de l’antique république messine et de l’une des principales villes libres d’Empire.
15Nous retrouvons ici notre point de départ. Deux lignes de force semblent toujours structurer la période, sans que de réels points d’intersections puissent relier entre elles des évolutions contradictoires : d’un côté, le contrôle croissant et étroit, bref absolu, de la ville par la monarchie ; de l’autre, l’amoindrissement majeur de l’autorité du roi sur cette frontière et dans la ville elle-même. Comment expliquer une telle contradiction ? Comment rendre compte d’un effet de ciseau déjà identifié au début de ce texte ? C’est que les niveaux de perception, et d’action, sont différents ; c’est que le contexte guerrier, à partir de 1635, s’impose comme le premier angle d’analyse. Indéniablement, l’État comme le royaume se confrontèrent à l’épreuve du conflit27. L’engagement dans la guerre de Trente ans conduit la monarchie au bord du gouffre : contestée par les révoltes populaires, mise en cause par la Fronde, ruinée par un effort militaire surdimensionné, c’est à la ténacité de Richelieu puis de Mazarin qu’elle doit d’avoir résisté à la tempête qu’elle avait elle-même déclenchée. La stratégie d’ensemble, suivie de 1635 à 1659, est alors des plus simples : préserver l’essentiel ; reculer sur l’accessoire. Là se délie en toute clarté notre paradoxe, pour peu que se dévoile la priorité des dirigeants : soutenir l’effort militaire du royaume, c’est-à-dire permettre la mise sur pied, le renouvellement et l’entretien des armées en campagne. Tout l’effort fiscal y conduit ; la construction d’un outil militaire impulsé par Sublet des Noyers puis par les Le Tellier, réorganisé, hiérarchisé et opérationnel, le permet. Le reste, et notamment la défense du royaume et de ses populations, passe au second plan. On en confie la mission aux forteresses dont la relative anarchie annonce déjà la « ceinture de fer » de Vauban. Surtout, fort des calculs des poliorcètes qui estiment que l’effectif combattant d’une ville assiégée peut être dix fois inférieur à celui des assiégeants, l’on s’appuie bien plus sur les fortifications que sur les hommes : leurs garnisons fondent aux profits des armées en campagne, et les soldats qui y demeurent se recrutent parmi des hommes vieillissants, estropiés, voire au sein de troupes de mendiants envoyés depuis la capitale. Dans cet effort gigantesque, l’État impécunieux délègue la protection du royaume : aux gouverneurs de maintenir leurs places en état de se défendre, même si cela nécessite violences sur les populations et enrichissements personnels ; aux habitants de s’accommoder avec la guerre, au prix, s’il le faut, de négociations particulières avec l’ennemi. C’est à ce point précis que se comprennent les exactions des uns, les militaires, comme les initiatives de sorties de conflit des autres, les civils : faute de pouvoir contrôler ces processus, et surtout de répondre à leurs causes, la monarchie préfère fermer les yeux. Finalement, l’autonomie accordée aux frontières, de fait et à l’inverse du droit énoncé, et ignorée plutôt qu’octroyée, n’est que l’envers de l’effort de guerre de la monarchie et de l’emprise croissante qu’elle déploie sur son outil militaire de campagne.
16Pour autant, si la conjoncture est au recul, la tendance générale, elle, est au renforcement de l’autorité royale, non sur la totalité de la frontière, mais sur ses principaux points d’appuis. Le pouvoir central s’attache à tenir fermement les têtes – gouverneurs, intendants, Magistrats – d’un grand corps qui lui échappe. Dans une vaste subsidiarité, il relâche son emprise au plus près de la gestion quotidienne de la guerre mais, pour la superstructure urbaine, politique ou militaire, celle des maîtres-échevins, des intendants et des gouverneurs, il l’amène à des niveaux jamais atteints : à Metz, dans un puissant mouvement d’assimilation, le Magistrat est reconfiguré sur le modèle parisien et son autorité partagée avec les officiers du bailliage nouvellement créés, mais au quotidien, et au même moment, cet Hôtel de ville « à la française » gère en toute autonomie la charge de la guerre, que ce soient les passages de troupes ou les suspensions du conflit avec les ennemis. Les outils de contrôle utilisés par la monarchie sont divers. Le premier s’appuie sur les chaînes de fidélités et d’amitiés. Nous l’avons vu avec Richelieu et Mazarin. La domination exercée sur le cardinal de La Valette et sur La Contour s’apparente au clientélisme le plus étroit ; il ne suffit pourtant pas. Les structures ecclésiastiques y participent aussi : l’ancrage abbatial des cardinaux ministres, voire épiscopal pour le second, leur fournit une sorte d’ubiquité dans la ville. Enfin, dans cette histoire des pratiques politiques, sans doute faudrait-il faire une place plus importante aux réalités institutionnelles et financières de cet « état » de gouverneur : commission ou office ? L’enjeu monétaire, et les possibles bénéfices tirés d’une revente de la charge, ne sont pas étrangers à des réflexes de révolte ou, à l’inverse, de soumission28.
17La domination peut aussi emprunter d’autres chemins. Sur cette frontière en bien des points anarchique – passages de troupes, circulations d’argent, confrontations des autorités civiles et militaires, et militaires entre elles, etc. –, le recouvrement infini des responsabilités, qui accentue ces confusions, interroge. Il s’agit là d’une caractéristique connue de l’Ancien régime mais poussée ici à des niveaux déconcertants. Le cas de M. de Robertot est exemplaire. Ce fidèle de Mazarin gère les troupes envoyées en repos durant la mauvaise saison sur les terres épiscopales du cardinal, alors évêque de Metz, de 1653 à 1657. Il y prend le titre rapide et quelque peu usurpé d’« intendant de l’évêché de Metz29 ». Et durant les quartiers d’hiver, il revendique un pouvoir qui lui donne « la direction de la subsistance et police des troupes » dans la totalité des trois évêchés. À ce moment, il « possède » donc une autorité qui s’oppose directement à celle de l’intendant de Lorraine, Charles Le Jay30. De ces recouvrements de champs d’action respectifs, de cette relative absence d’une subordination des responsabilités, naissent de multiples tensions. Robertot s’oppose avec une vigueur confinant à la brutalité, à la fois au Magistrat messin – il lui envoie des officiers intervenir dans ses assemblées afin d’en obtenir les fournitures qu’on lui refuse31 –, au parlement – il investit sa grande salle des délibérations pour y organiser un bal32 –, à l’intendant de Lorraine – de sa seule autorité, il accorde des surséances de paiement33 – et au « prévost de conestablye et mares-chaussée de France à la résidence de Nancy », Pierre Denize, sieur de la Forest. Pour ce dernier, l’homme du cardinal dépasse les bornes : alors que le prévôt venait à Vic-sur-Seille, capitale de l’évêché de Metz, apposer des ordonnances de l’intendant prises contre lui, Robertot le surprend dans l’une des auberges de la ville, le fait violemment molester par ses soldats avant de le conduire à Metz, humilié et en sang, attaché sur son cheval34. « Tous les ordres de la ville de Metz et de la province témoignent contre vous » lui écrit Mazarin : il le rappele à la fin du quartier d’hiver 165735.
18Au-delà de l’anecdote liée aux personnalités affirmées de ces différents personnages, une lecture stratégique peut sans doute être faite de ces recouvrements d’autorités organisés par la monarchie. Ne constitueraient-ils pas un mode empirique de domination ? Ces différents conflits génèrent vers la Cour un flot de délations intéressées. D’autres que Robertot s’y confrontent. L’évêque de Mende, Sylvestre Crusy de Marcillac († 1659), qui prend la « direction des vivres pour la subsistance des armées » en Lorraine entre 1635 et 1638, succombe aux manœuvres de ses « ennemis », un vocable significatif alors largement utilisé, qui dénoncent auprès de Richelieu ses supposées, et sans doute réelles, prévarications36. L’intendant de Lorraine, Nicolas Vignier, se débat à la fois contre les insinuations du bailli de Nancy, le sieur de Chambley, qui revendique dans la capitale des duchés un pouvoir équivalent à celui de l’intendant comme prix de son adhésion à la France37, mais aussi contre celles du « procureur du roi au duché de Lorraine », Louis Gillot38 : les deux hommes l’accusent d’incompétence, d’intelligence avec Charles IV et de détournement de blé39. Le second va jusqu’à dénoncer, en plein Conseil du roi, les attaches familiales supposées – de réels liens de clientèles – entre Vignier et son protecteur, le chancelier Séguier. L’audace, une folie sans mesure, lui vaut la suspension de tous ses offices, une condamnation à 3 000 livres d’amende et une demande de pardon, faite tête nue et à genoux40. Les exemples sont légion. Ils transforment cette configuration particulière du pouvoir dans l’espace lorrain en un champ clos des rivalités et des ambitions. On peut y lire la fragmentation de l’autorité royale ; on peut aussi y voir une manœuvre des plus subtiles : ces limites incertaines et mouvantes entre l’autorité des uns et des autres organisent une sorte d’équilibre concurrentiel des pouvoirs, une surveillance panoptique qui vient pallier l’impossible contrôle, au quotidien, de ces responsables si éloignés de Paris. Les gouverneurs de l’espace lorrain, en s’opposant les uns les autres pour concentrer sous leurs autorités des charges et des revenus, recherchent ainsi, toujours, l’arbitrage de la monarchie. Et les premiers accords de contributions, noués en toute discrétion, à Metz, par Lambert, sont rapidement éventés par ses pairs auprès du secrétaire d’État de la guerre. Cette délation, déjà courtisane dans son épistolarité, neutralise une part des trahisons comme des malversations. Et si le procédé introduit une certaine confusion des responsabilités, elle permet cependant, dans une zone frontalière quelque peu anarchique et face à la lenteur des communications, de contrôler les hommes et leurs passions. La délation s’érige alors au rang d’une vertu... et d’un mode indispensable de gouvernement.
19De même, l’infinie discussion de la décision royale, à tous les niveaux de son application, ne constituerait-elle pas une part du compromis nécessaire à la mise en œuvre souhaitée ? Les médiations des agents messins, que l’on retrouve à l’identique pour les autres communautés du royaume, ne sont sans doute que l’inéluctable aménagement de la subsidiarité, c’est-à-dire de la prise en main, volontaire et active, d’une part croissante du fardeau militaire sous les espèces, d’abord et surtout, des quartiers d’hiver. Certes, la ville n’y échappe pas. Mais elle parvient, ici à les retarder, là à les détourner, le plus souvent à les payer par elle-même : alors, elle jouit d’une entière liberté de manœuvre. De nouveau, il nous aurait fallu creuser plus profondément les dessous fisco-financiers de cet « effort » – fournitures aux troupes comme paiements des contributions aux ennemis – endossé par les élites messines : chaque guerre suscite ses profiteurs. Jean Bauchez, s’il nous décrit les tourments des campagnes, trace aussi, parfois, le portrait riant et inattendu d’une certaine prospérité urbaine41. Et c’est peut-être cette dernière, odieuse en ces temps de misère, que dénonce Bossuet dans la péroraison d’un sermon prononcé à Metz en 1658 :
« Chrétiens, armons-nous de zèle ; que chacun renverse Ninive en soi-même. Ville de Metz, que n’es-tu ainsi renversée ! Je désire ta grandeur et ton repos autant qu’il se peut ; et plût à Dieu que je visse descendre sur toi les bénédictions que je souhaite ! Toutefois ne t’offense pas si j’ose désirer aujourd’hui que tu sois entièrement renversée. Plût à Dieu que je visse à bas et les tables de tes débauches, et les banques de tes usuriers, et les retraites honteuses de tes impudiques ! Plût à Dieu que j’entendisse bientôt cette heureuse nouvelle : Toute la ville de Metz est abattue ; mais elle est heureusement abattue aux pieds des confesseurs devant les tribunaux de la pénitence, qui sont érigés de toutes parts dans ce temple auguste ! Que tardes-tu, ô ville ? renverse-toi par la pénitence ; cette chute te relèvera jusqu’à la gloire éternelle42. »
20« Tables de tes débauches », « banques de tes usuriers » et « retraites honteuses de tes impudiques », voilà sans doute les pistes d’une recherche future, menée à contrecourant des perceptions jusqu’à alors doloristes des « malheurs de la guerre ».
21Telle une inattendue dialectique, thèse – affirmation d’une souveraineté absolue – et antithèse – dilution et fragmentation de l’autorité – semblent se dépasser et se résoudre dans une ultime synthèse : en tenant fermement la tête de ces villes et provinces stratégiques, en reculant là où il n’était pas possible d’avancer, l’État monarchique y a assuré définitivement sa prise. Plus qu’on ne pourrait le croire. Cet ultime épisode de « libertés urbaines » accordées à la ville, ancré sans aucun doute dans une histoire particulière, celle de la République messine et des États d’entre-deux, l’a laissé épuisée. Le retrait conjoncturel de souveraineté royale fut peut-être créateur d’un véritable retour du refoulé d’une autorité accrue. À bien y réfléchir, la nette fixation d’une frontière, la domination du roi, le retour du parlement – et du pouvoir d’achat de ses officiers –, la subvention même qui se révèle moins lourde que les contributions ennemies, le soldat aussi, que l’on recherche dorénavant plus qu’on ne le craint, tout cela constitue un cadre adéquat à une autorité royale acceptée, et espérée autant que la paix. La tranquillité, la stabilité, la sécurité et une certaine prospérité, sans doute, ont été mieux accueillies qu’une liberté épuisante dans laquelle on semblait renouer avec les impasses de 1552. Une fois encore, mieux que la réduction à l’obéissance, la soumission volontaire semble le concept adéquat pour saisir, dans sa confrontation avec le soldat, l’évolution profonde de ce premier XVIIe siècle messin.
22Dans une sorte de « stratégie du choc », peut-être faut-il chercher dans l’épreuve de la guerre, et dans le retour de la paix, les origines de cette acceptation soudaine de l’absolutisme par les élites locales, de cette « sidération » de 1661 décrite pour d’autres régions43. Le conflit franco-espagnol, tel qu’il est endossé, et perçu, à Metz et sur les frontières, ne renforça pas l’État. Du moins à court terme. La paix à l’inverse se traduit par le retour du pouvoir royal. À Metz, la toute-puissance de La Contour, fondée sur la confiance de Schomberg, puis sur la protection de Mazarin et l’alliance avec l’Hôtel de ville, s’estompe avec le retour du parlement en 1658 et l’implication croissante de l’intendant qui s’érige alors, au nom du roi, comme l’arbitre des conflits de pouvoir. D’une certaine manière, la visite de Louis XIV en 1657, roi de guerre et de paix lorsqu’il conquiert une place forte ennemie – Montmédy – menaçante, donne le coups d’envoi de cette (re)conquête, non simplement de la tête de la ville, mais de l’autorité royale à l’intérieur des murs. Par un étrange aléa de l’histoire en ces années charnières, les archives messines ne contiennent aucune délibération de l’Hôtel de ville entre juin 1661 et août 166544. Et lorsqu’elles réapparaissent, le 15 septembre, le monde a changé45. Le pouvoir urbain ne s’occupe plus que du détail : la voirie, les digues, les étals des marchands, les chambres de fournitures, etc. Il ne se réunit que quelques fois par an46. Les acteurs sont différents. Une autre génération semble avoir pris en main les destinées de la ville. La mémoire elle-même disparait. Dans les histoires ultérieures, rien ou presque ne subsistera de la grande diplomatie urbaine développée trente ans durant, tant vers Paris que vers Luxembourg ou Bruxelles, ainsi que des sauvegardes et des contributions. Les attestations de paiement, qui prouvaient les protections négociées par la ville, et délivrées en masse par son secrétaire, disparaissent alors au plus profond des archives familiales47. C’est cette histoire ignorée, c’est cette inversion de paradigme, que ce texte a tenté de faire renaître.
Notes de bas de page
1 Brienne comte de, Mémoires inédits de Louis-Henri de Loménie, comte de Brienne, secrétaire d’État sous Louis XIV publ. sur les ms. autographes, avec un Essai sur les mœurs et sur les usages du XVIIe siècle, éd. Barrière Fr., Paris, 1828, t. II, p. 157.
2 Le Bret, C., Les œuvres de messire C. Le Bret, op. cit., p. 137-138.
3 Richelet P., Dictionnaire françois contenant les mots et les choses, plusieurs nouvelles remarques sur la langue françoise, ses expressions propres, figurées et burlesques, la prononciation des mots les plus difficiles, le genre des noms, le régime des verbes, avec les termes les plus connus des arts et des sciences, le tout tiré de l’usage et des bons auteurs de la langue françoise, Genève, 1680.
4 Quelques-uns nous sont parvenus : celui du gouverneur de Bitche au 12 avril 1655 (AMM, EE 5, liasse 7, p. 14) ou celui du commandant lorrain à Bouquenom au 12 octobre 1653 (ibid., p. 15). La plupart sont évoqués dans les délibérations urbaines.
5 MAE, CP Lorraine, 34, fol. 608-614.
6 AMM, BB 57, non folioté, délibération du 24 septembre 1653.
7 AC, P, vol. XIII, fol. 86-87, demandes évoquées dans une lettre du duc de La Rochefoucauld au comte de Guitaut, le 2 mai 1653.
8 AMM, AA 41, liasse 2, p. 41, lettre du 26 mars 1654.
9 Sur les ordres de son maître, Caillet est très attentif au possible mécontentement des gouverneurs de places à qui il n’hésite pas à offrir l’aide de sa force armée. Ceci afin d’entretenir de possibles dissensions avec Mazarin. Cette stratégie donne lieu à des échanges de civilités (voir Béguin K., Les Princes de Condé, op. cit., p. 135).
10 Nous ne connaissons pas la suite donnée à la demande. Caillet précise cependant, quelques mois plus tard que « les gouverneurs de la frontière [lui] ont refusé des passeports » (AC, P, vol. XV, fol. 96-97, lettre de Pierre Caillet à Jacques Caillet, le 4 mai 1655).
11 AC, P, vol. XV, fol. 86 r°-v°, lettre de Fabert à Montal, le 22 avril 1655.
12 Granderoute R. (éd.), Œuvres de Madame de Lambert, Paris, Honoré Champion Éditeur, 1990, « Avis d’une mère à son fils », p. 48.
13 Journal de Jean Bauchez, op. cit., p. 399-400.
14 Zeller G., « La vie aventureuse des classes supérieures en France sous l’Ancien Régime : brigandage et piraterie », Aspects de la politique française sous l’Ancien Régime, Paris, PUF, 1964, p. 375-385.
15 Il est frappant de constater leur célébrité : la ville connaît ainsi jusqu’à l’identité précise de certains des soldats ennemis (AMM, AA 39, p. 165, lettre du Magistrat à un responsable lorrain, le 20 décembre 1654), Jean Bauchez manie le nom des capitaines – Maillard, Busselot, Huaulx, etc. – sous la forme de l’ubiquité métonymique ; une célébrité que l’on retrouve dans Grimmelshausen.
16 Drévillon H., « L’héroïsme à l’épreuve de l’absolutisme. L’exemple du maréchal de Gassion (1609-1647) », Cahiers du CEHD, no 23, 2004, p. 149-169, p. 160-162.
17 Journal de Jean Bauchez, op. cit., p. 419, le 15 août 1641.
18 Ibid., p. 190-192 ou encore p. 236.
19 Ibid., p. 301-302.
20 Ibid., p. 338-340.
21 AMM, BB 30, fol. 68 v°, délibération du 12 septembre 1636.
22 Parisse M., Histoire de la Lorraine. Austrasie, Lotharingie, Lorraine, Nancy-Metz, PUN-Éditions Serpenoise, 1990, p. 197-198.
23 Hamon P., « Une monarchie consultative ? », J. Cornette, La Monarchie entre Renaissance et Révolution, op. cit., p. 27-31.
24 Brasme P., « L’impôt dans la généralité de Metz-Alsace (1664-1698) : de l’assimilation politique à l’assimilation fiscale », Les Cahiers Lorrains, no 3-4, 1992, p. 265-274.
25 Commission d’intendant pour Colbert de Croissy, le 10 mai 1661, reproduite dans Cadilhon Fr. et Coste L., L’Europe des XVIIe siècle et XVIIIe siècles : textes et documents, Bordeaux, PUB, 2008, p. 77-78.
26 Sur la postérité de cette phrase, popularisée dès le XVIIIe siècle sous la contraction de « Metz défend l’État », voir Le Moigne, Fr.-Y., « Au lendemain du congrès lorrain... l’histoire à la médiathèque de Metz », Les Cahiers Lorrains, no 4, 1978, p. 114-122.
27 Drévillon H., Les Rois absolus (1629-1715), Paris, Belin, 2011, p. 30-64.
28 Ce point doit beaucoup aux remarques de M. Drévillon. Qu’il en soit ici remercié.
29 MAE, CP Lorraine, 37, fol. 237, lettre à Robertot, le 12 mai 1656.
30 Ibid., fol. 426, ordonnance de l’intendant Le Jay, le 3 mars 1657.
31 AMM, BB 60, fol. 10, délibération du 24 février 1657.
32 MAE, CP Lorraine, 37, fol. 413, ordonnance du parlement, le 19 février 1657.
33 Ibid., fol. 422-425, lettre de Le Jay à Mazarin, le 3 mars 1657.
34 Marsy A.-Ch.-A. de et Grouchy E.-H. de, Un Administrateur au temps de Louis XIV, op. cit., p. 148-165.
35 MAE, CP Lorraine, 37, fol. 474, lettre de Mazarin à Robertot, le 8 avril 1657.
36 Legrand-Girarde É.-E., L’Arrière aux armées sous Louis XIII, op. cit., p. 103-107.
37 BNF, FF 16890, fol. 409-413, mémoire contre Chambley, s. d. [vers 1643]. Sur ce personnage, voir Vignal-Souleyreau M.-Chr., Richelieu et la Lorraine, op. cit., p. 221.
38 Plusieurs lettre sur ces différends dans Mousnier R., Lettres et Mémoires, op. cit. : le 28 mai (p. 606-607), le 19 décembre (p. 607), le 22 décembre 1643 (p. 574-575), etc. Voir aussi le mémoire qu’il constitue dans BNF, FF 16890, fol. 417-422, s. d. [vers 1643].
39 MAE, CP Lorraine, 33, fol. 179 (lettre de Du Bellay) et fol. 180 (lettre de Chambley), les 17 et 21 février 1643 : ils évoquent un festin et une « ivrognerie sans nom » qu’il aurait faits à deux ou trois lieues de Nancy avec des Lorrains. Voir sa défense, le 15 mars suivant, dans Mousnier R., Lettres et Mémoires, op. cit., p. 509-510.
40 BNF, FF 16890, fol. 426-429, projet d’arrêt contre Gillot, le 4 février 1645.
41 Voir le séjour joyeux et dépensier de seigneurs allemands réfugiés à Metz au début du conflit dans Journal de Jean Bauchez, op. cit., p. 279-280.
42 Lebarq J. (éd.), Œuvres oratoires de Bossuet, édition revue et augmentée par Urbain Ch. et Levesque E., Paris, 1914-1923, op. cit., vol. 2, p. 450-462.
43 Hanlon Gr., L’Univers des gens de bien : culture et comportements des élites urbaines en Agenais-Condomois au XVIIe siècle, Bordeaux, PUB, 1989, p. 42.
44 L’inventaire du greffe de l’hôtel de ville, fait le 7 janvier 1743, valorise la date de 1665 comme coupure pour les délibérations de la Chambre. Il évoque cependant un registre des délibérations des Trois ordres entre 1661 et 1667 (BMM, ms. 914, fol. 649). Par ailleurs, on sait que l’intendant Choisy a entrepris un inventaire des titres de la ville en 1664, du 24 mars au 24 octobre (ibid., fol. 601-638). Enfin, une remontrance de l’hôtel de ville, de 1663, évoque la décrépitude de leur chambre, le seul endroit que le parlement leur a laissé. Ce dernier avait aussi fait détruire un cabinet, sans prévenir les Messins, qui n’avaient pu en retirer certains papiers de la ville : ils furent longtemps « exposés aux injures du temps » (Emmery J.-L.-Cl., Recueil des édits, op. cit., tome IV, p. 62-93).
45 AMM, BB 62, fol. 1 v°-2 r°.
46 La délibération qui suit la précédente, du 15 septembre, a lieu près de trois mois après, le 4 décembre (ibid., fol. 2 v°).
47 Voir les sauvegardes conservées par la famille Couët du Vivier dans Léonard J., Le Ministère de Paul Ferry à Metz, op. cit., p. 707.
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