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Les bourgeois et la terre

 | 
Philippe Jarnoux

2e partie. La terre

Chapitre XII. Rennes, cas unique ou cas typique ?

Texte intégral

1L'image foncière de la bourgeoisie rennaise nous est désormais bien connue. Etendu sur une trentaine de kilomètres autour de la ville, le patrimoine foncier des Rennais, constitué surtout de métairies et d'exploitations moyennes, s'accroît au cours du siècle. Il représente plus de 10 % des terres du diocèse à la fin du siècle alors qu'on peut l'estimer à 5 ou 6 % vers 1720. C'est incontestablement la part la plus importante des fortunes bourgeoises mais il reste surtout le fait de la bourgeoisie de robe et d'office, plus présente dans la ville que les négociants. Cependant, l'évolution de la structure interne de la bourgeoisie rennaise où le commerce se renforce se répercute aussi dans ses attitudes face à la terre.

Un corpus comparatif limité

  • 1 Exception notable, la thèse de garnier (J.), Bourgeoisie et propriété immobilière en Forez aux xvi (...)

2Cette évolution de la bourgeoisie rennaise amène à s'interroger sur sa spécificité. La situation rennaise est-elle comparable à ce qui se passe ailleurs en France. La réponse est à priori délicate. Rares sont les historiens qui ont centré leurs études sur le patrimoine foncier de la bourgeoisie. Dans les études sur la bourgeoisie, on l'a très souvent évoqué comme une évidence qu'il n'était même pas nécessaire de mesurer, de quantifier, de délimiter dans l'espace. Parallèlement, les études foncières se sont surtout préoccupées de déterminer les équilibres globaux, la part respective de la noblesse, du clergé, de la paysannerie et de la bourgeoisie, sans détailler, pour cette dernière, ses origines géographiques ou socio-professionnelles. La plupart des points de comparaison possibles proviennent d'études brèves et ponctuelles, ne portant que partiellement sur la bourgeoisie1.

  • 2 elhai (H.), Recherches sur la propriété foncière des citadins en Haute-Normandie, Mémoires et Docu (...)
  • 3 garnier (J.), op. cit..
  • 4 poitrineau (A.), La vie rurale en Basse-Auvergne au xviiie siècle, Paris, 1965, 925 p.
  • 5 vovelle (M.), Ville et campagne au xviiie siècle : Chartres et la Beauce, Paris, 1980, 307 p.
  • 6 frèche (G.), Toulouse et la région Midi-Pyrénées au siècle des Lumières (vers 1670-1789). Paris, 1 (...)
  • 7 guignet (P.), Le pouvoir dans la ville au xviiie siècle, Paris, 1990, 591 p.
  • 8 beaur (G.), Le marché immobilier à la veille de la Révolution ; les mouvements de propriété beauce (...)
  • 9 vigouroux (M.), « La propriété foncière des citadins dans le bassin de l'Agly », Bulletin de la So (...)
  • 10 favier (R.), « Les petites villes dauphinoises face à leur environnement rural au xviiie siècle : (...)

3On possède cependant des éclairages partiels sur un grand nombre de cités ; des grandes villes comme Rouen2, Saint-Étienne3, Clermont-Ferrand4, Chartres5, Toulouse6 ou Valenciennes7, d'autres moins importantes dans la Beauce8, le Roussillon9 ou le Dauphiné10, d'autres enfin plus proches comme Nantes ou Vannes. La liste n'est pas exhaustive, loin de là. Un grand nombre de thèses ou de monographies locales fournissent des indications éparses sur la question. Nous n'avons relevé ici que celles qui sont assez complètes pour fournir des points de repères acceptables. Malgré les différences de point de vue évidentes dans toutes ces études, on peut tenter une synthèse car les phénomènes observés paraissent globalement concordants. Comment Rennes et la Haute-Bretagne s'insèrent-elles ou contrarient-elles les autres données du royaume ? C'est ce qu'il reste à analyser.

Les bassins fonciers : une image concordante

Du bourg à la grande ville

4Les bassins fonciers des villes se retrouvent partout et se répartissent généralement en trois groupes.

  • 11 favier (R.), idem, p. 327.
  • 12 vigouroux (M.), op. cit., p. 185-188.
  • 13 Voir les différents travaux de beaur (G.) ou vovelle (M.), op. cit..
  • 14 poitrineau (A.), La vie rurale en Basse-Auvergne..., op. cit..

5À la base, les petits bourgs n'exercent une emprise foncière que sur quelques kilomètres. R. Favier le constate dans le Dauphiné. « Dans deux cas sur trois, l'investissement concerne des fonds situés dans le terroir même de la ville. Au-delà de celui-ci, seules les communautés du premier cercle (c'est-à-dire limitrophes) connaissent une notable présence citadine11 ». Dans le Roussillon, des bourgs comme Rivesaltes ou Saint-Paul-de-Fenouillet ont aussi une emprise très réduite, comparable en bien des points à celle de Combourg ou Saint-Aubin-du-Cormier12. On pourrait multiplier les exemples avec la Beauce13 ou l'Auvergne14. Il y a là une constante claire. L'emprise de ces petits bourgs est géographiquement très concentrée. On peut même s'interroger sur la notion d'emprise ou d'influence foncière dans ce cas ; la présence foncière des citadins ne se distingue que modestement de celle des ruraux des alentours.

  • 15 vigouroux (M.), op. cit., p. 170.
  • 16 poitrineau (A.), op. cit., p.321.
  • 17 garnier (J.), op. cit., p.254.
  • 18 beaur (G.), « Une petite ville, Maintenon, et son marché foncier à la fin de l'Ancien Régime », Le (...)
  • 19 Le goff (T.), Vannes et sa région. Ville et campagne dans la France du xviiie siècle, Loudéac, 198 (...)

6Au-dessus, les petites villes ont un rayon d'action plus large, une douzaine de kilomètres pour Perpignan15, une dizaine à Riom16, Montbrison17, Maintenon18, Vannes19, Vitré ou Fougères. C'est le deuxième niveau, la constitution d'un micro-espace régional, d'un « pays » effectivement dominé par une petite ville.

  • 20 elhai (H.), op. cit., p. 58.
  • 21 vovelle (M.), op. cit., p. 213-227.
  • 22 bois (P.), « Répartition sociale de la propriété foncière rurale dans les pays de la Basse-Loire. (...)

7Les villes importantes dépassent ce cadre assez limité. À Rouen, le périmètre foncier s'étend sur une trentaine de kilomètres au nord de la Seine et s'estompe seulement à proximité des zones d'influence de Dieppe, de Fécamp ou du Havre20. Clermont-Ferrand étend ses possessions sur une bonne partie du sud de la Limagne tout comme Chartres rayonnant sur la Beauce et contrariée seulement par des grandes cités assez lointaines, Orléans et surtout Paris21. En Bretagne, le rayonnement nantais est évident sur les bords de la Loire et jusqu'à Nort-sur-Erdre22.

  • 23 Rennes agit sur Vitré ou Fougères comme Rouen sur Dieppe ou Fécamp. Sa présence ne disparaît pas t (...)
  • 24 frèche (G.), op. cit., p. 325.
  • 25 garnier (J.), op. cit., p. 187 et favier (R.), op. cit., p. 328.

8Le bassin foncier rennais s'inscrit dans des dimensions semblables. Sur une vingtaine de kilomètres au moins, les citadins sont très présents et acquièrent des terres. Leur importance ne disparaît pas totalement dans les bassins fonciers des petites villes et elle recouvre très souvent ceux des bourgs23. Plus loin, nos citadins sont encore parfois présents. C'est le cas des Toulousains dans la vallée de la Garonne24, des Lyonnais dans le Forez ou en Dauphiné25 ou des Rennais en Basse-Bretagne, dans le pays nantais ou l'Avranchin. Mais il ne s'agit plus alors d'une politique délibérée d'investissement foncier mais plutôt de liquidation d'héritages lointains, trop difficiles et coûteux à gérer. C'est ce que constatent R. Favier ou J. Garnier pour les Lyonnais, P. Bois pour les Nantais. C'est aussi ce que nous voyons à Rennes.

  • 26 elhai (H.), vovelle (M.), beaur (G.), op. cit.. La présence parisienne existe aussi en Haute-Breta (...)

9Il faut donc établir une hiérarchie de trois niveaux dans les bassins fonciers urbains. Depuis la simple présence éparse des notables des bourgs au petit bassin structuré et déjà assez conséquent des villes moyennes jusqu'à celui des grandes cités qui s'étend sur 20 à 30 kilomètres, dominant et recouvrant partiellement celui des petites villes proches et se diluant ensuite jusqu'à 50, voire 100 kilomètres, sous la forme d'héritages dont on se sépare mais qui sont eux-mêmes une trace des réseaux d'activité et de relations de la ville en question. Seule Paris échappe sans doute à cette catégorie et étend encore beaucoup plus loin sa zone d'influence foncière. Elle est en tout cas sensible en Normandie, dans la Beauce et le Perche26. Mais l'étude de la fortune foncière des Parisiens reste encore à faire.

Les contraintes de l'espace

  • 27 Garnier (J.) parle d'une distance optimale d'une douzaine de kilomètres pour Saint-Étienne. (A.) P (...)
  • 28 Le déséquilibre est/ouest est très net pour les habitants de Clermont et de Riom, situés préciséme (...)

10L'étendue de la présence foncière des citadins est aussi fonction des conditions naturelles. Elle est assez restreinte dans le Dauphiné, en Forez ou en Auvergne en raison du relief et des conditions de circulation27, mais plus étendue dans la Beauce ou en Normandie. Simultanément, les citadins privilégient les régions les plus riches. C'est très sensible en Auvergne où les domaines de la bourgeoisie urbaine sont concentrés dans la Limagne au détriment de la montagne28. On le constate aussi à Perpignan où la grande propriété citadine est localisée dans la plaine de l'Agly ou en Normandie où le département de l'Eure est moins touché que les riches terres du pays de Caux. De même, les Nantais répugnent apparemment à investir dans le Nord du diocèse, les Vannetais préfèrent la côte et, autour de Rennes, les régions les plus pauvres (vallée de la Vilaine, région de Saint-Aubin-du-Cormier) sont aussi celles où l'implantation urbaine est la plus faible. Les difficultés de communications expliquent souvent les choix des citadins mais elles ne sont pas seules en cause. L'investissement urbain choisit en toute connaissance de cause les régions où l'on peut espérer de meilleurs revenus. Cela n'est sans doute pas sans conséquence sur les transformations économiques locales et contribue à intégrer étroitement certaines zones dans des circuits économiques larges et, au contraire, à former ailleurs des isolats économiques, sociaux et culturels.

La bourgeoisie urbaine face à la terre

L'attrait de la moyenne et grande propriété

11Où qu'ils soient et quels qu'ils soient, les citadins s'orientent presque toujours vers la moyenne et la grande propriétés. Ces termes doivent s'entendre, bien évidemment, en fonction de critères locaux très variables. Mais, dans la Beauce comme dans le pays nantais, dans le Forez comme autour de Rennes, l'observation du marché foncier par le Centième Denier ou par les actes notariés conduit aux mêmes conclusions. La valeur moyenne des transactions auxquelles participe la bourgeoisie urbaine est deux à trois fois plus élevée que la valeur moyenne du marché. C'est dire que l'action essentielle porte sur des exploitations entières. L'acquisition de seigneuries reste généralement assez rare et ne concerne qu'une petite élite de la bourgeoisie ou, pour la Beauce et la Normandie, la grande bourgeoisie parisienne. Mais le caractère le plus représentatif de la bourgeoisie sur le marché foncier est sans aucun doute l'achat régulier d'exploitations aux dépens des nobles ou, plus encore, d'autres bourgeois ruraux ou urbains et de gros paysans. Dans aucune région cependant, cela n'exclut les acquisitions modestes de parcelles, de maisons, de jardins...

Les pratiques d'acquisition : une forme de domination

  • 29 AD I.-&-V., 2 C 33 59.
  • 30 AD I.-&-V., 2 C 33 58.
  • 31 C'est la terminologie employée dans les registres du Centième Denier !

12L'occasion de ces acquisitions est souvent liée à des difficultés économiques des propriétaires ruraux et en particulier à leur endettement vis-à-vis de prêteurs bourgeois. J. Garnier y voit l'un des outils principaux de la progression bourgeoise dans le Forez. De tels phénomènes existent aussi autour de Rennes. Les ventes judicielles après saisie, mentionnées dans les registres du Centième Denier, donnent presque toutes lieu à des acquisitions bourgeoises. Parfois les mentions sont plus explicites encore. Le 8/11/1740, Mme de la Gaudinais acquiert ainsi de Jean Soulais la moitié du lieu du Pas, en Piré, pour 300 livres, « ledit Soûlais étant quitte de la somme de 300 livres qu'il doit29 ». Dans la même paroisse, en 1730, Pierre Colliot de la Bussonnière, un marchand rennais, achète trois maisons, une cour, un four, deux jardins et une pièce de terre pour la modique somme de 375 livres. Jacques Haislouët, l'ancien propriétaire, devra désormais acquitter un loyer pour la petite maison où il continuera à résider30. Derrière des « ventes volontaires » de ce type31, on devine la détresse économique du vendeur. Mais il ne semble pas pourtant que ce soit le type d'acquisition le plus fréquent. Si le vendeur est souvent dans une situation économique difficile, le responsable n'en est pas toujours l'acheteur potentiel, surtout s'il s'agit de transactions portant sur des exploitations. La bourgeoisie rennaise semble prêter assez peu d'argent dans les campagnes, si l'on en croit les inventaires après décès qui énumèrent les diverses créances des défunts. Ses créances portent beaucoup plus souvent sur d'autres citadins, petits artisans ou bourgeois, de Rennes ou d'ailleurs. La bourgeoisie rurale est sans doute beaucoup plus impliquée dans le crédit aux paysans. En fait, les occasions de ventes et d'achats sont beaucoup plus nombreuses et diverses. Les difficultés financières ne sont peut-être pas plus fréquentes que les réorganisations de patrimoine consécutives à des changements familiaux.

La terre dans la fortune bourgeoise

13L'importance relative des transactions foncières moyennes de la bourgeoisie laisse à penser qu'il s'agit généralement de la base des fortunes, ou du moins qu'on y consacre une part considérable des richesses. Mais il est impossible d'évaluer précisément la fortune foncière de la bourgeoisie d'une ville et encore moins de mesurer la part qu'elle représente dans la fortune totale. On ne peut que considérer des cas d'espèce et les présenter comme exemplaires avec tous les risques méthodologiques que cela comporte.

La priorité des robins

  • 32 D'après le partage entre les héritiers. AD I.-&-V., 1 F 2004.

14Là encore on retrouve des points de convergence évidents entre Rennes et d'autres villes. À Saint-Etienne comme à Chartres ou à Lille, les officiers et hommes de loi placent la grande majorité de leur revenu dans la terre. C'est aussi très largement le cas à Rennes où les robins sont incontestablement les plus présents sur le marché foncier. Mais les très grandes fortunes ne sont pas nécessairement complètement enfouies dans la terre. En témoigne celle de René Pinot de la Gaudinais, mort en 173532

15Avec ses trois seigneuries, c'est sans aucun doute alors l'un des Rennais les mieux possessionnés mais dans l'ensemble cependant, les biens fonciers ne représentent qu'un peu plus du tiers de sa fortune.

Les retards des commerçants

  • 33 AD I.-&-V., 2 F 51.
  • 34 A. D. I.-&-V., 2 Em 138.

16D'autres exemples dans le monde du commerce vont dans le même sens. La succession de Julien Guichard, gros marchand de vin mort en 1759, s'élève à 80 492.07 livres mais les biens fonciers n'en représentent que 4,9 % tandis que les rentes constituées montent à 35 %, l'argent liquide à 21 %, les crédits commerciaux à 18,1 % et les obligations à 16,4 %33. Guy Martin de la Morandais, marchand de draps de soie annonce 90 000 livres de marchandise lors de son mariage mais jusqu'à sa mort il ne possédera que sa maison rue Royale (estimée 17 500 livres) et une métairie à Saint-Grégoire (estimée 10 000 livres)34. Dans tous ces cas, les biens fonciers, fussent-ils considérables comme chez Pinot de la Gaudinais, n'occupent qu'une place parmi d'autres dans la fortune. Rennes est sans aucun doute une ville où la terre compte beaucoup, où le patrimoine foncier est un élément important, mais, quand les fortunes deviennent très considérables (et c'est le cas dans les exemples cités précédemment), cela n'est plus suffisant. On se tourne volontiers alors vers le crédit ou les opérations commerciales.

17Les commerçants en effet placent moins leur argent dans les domaines fonciers. C'est évident dans le cas rennais où on les retrouve toujours moins présents sur le marché de la terre qu'ils ne le sont dans la réalité de la ville. C'est vrai aussi dans les villes du Nord, à Saint-Étienne, à Rouen et probablement à Nantes. Si l'intérêt de la bourgeoisie nantaise pour la terre était aussi fort que celui des Rennais, le domaine foncier de la ville devrait être beaucoup plus étendu. Or, à observer le marché foncier, cela ne semble pas le cas. Il y a donc des attitudes différentes face à la terre au sein de la bourgeoisie et aucune ville ne semble échapper au phénomène.

Au sommet de la richesse : la concurrence du grand commerce

18Il apparaît enfin qu'il y ait, au moins localement, une attitude convergente de la bourgeoisie quant à sa participation au marché foncier.

19Autour de Rennes, la croissance de la propriété citadine est plus marquée dans la première moitié du siècle. Après 1760-1770, la progression du patrimoine urbain est réduite et se limite à quelques villes et quelques régions. Or, la bourgeoisie vannetaise suit, à une échelle plus modeste, le même rythme et l'évolution nantaise paraît assez comparable. Dans la deuxième moitié du xviiie siècle, les seules zones où la propriété citadine progresse (Le Pellerin, Saint-Étienne-de-Montluc, Nort) sont proches de Nantes. Ailleurs, elle connaît un net recul. À Rennes comme à Nantes, ce sont les ruraux, paysans mais surtout bourgeois, qui font les gains les plus importants sur le marché foncier. La similitude de l'évolution des deux grandes cités bretonnes est significative. Elle indique probablement une double mutation. Dans les campagnes existe une bourgeoisie active et riche qui prend alors conscience de sa puissance en profitant probablement des difficultés paysannes. Dans les villes, la terre n'apparaît pas comme la seule source de richesse et de placements. Cela n'est guère surprenant à Nantes mais peut-être plus inattendu à Rennes.

  • 35 AD I.-&-V., 2 Ed 45.
  • 36 AD I.-&-V., 2 B 609.
  • 37 Mention dans le rôle de capitation de 1777.
  • 38 AD I.-&-V., 2 F 51.

20Mais cela n'est pourtant pas nouveau. Dès les années 1760, une manufacture de faïence a été établie au Pavé Saint-Laurent par un officier richissime, M. de Charmois, receveur des Consignations. Elle sera ensuite reprise par une société dont les principaux actionnaires sont deux avocats et un procureur... d'origine nantaise. C'est cependant avec des marchands de Saint-Malo que les actionnaires envoient en 1763 un navire à Saint-Domingue, au Cap Français et à Léoganne, pour y écouler leurs productions35. À la même époque, Joseph Léon des Ormeaux, directeur général des Monnaies, surveille par courrier la bonne marche de ses plantations à l'île Bourbon36 tandis que d'autres Rennais se font servir par des domestiques noirs37. Quelques années plus tard, M. Le Breton de Ranzégat vend des toiles et afferme des dîmes à Saint-Malo-de-Beignon pendant que son cousin, Charles Le Breton de Beauregard, est établi comme négociant à Cayenne et charge son beau-frère, un procureur, de surveiller les marais salants et les vignes qu'il possède auprès de Guérande38. La terre n'est certes pas le seul investissement de nos bourgeois !

Notes

1 Exception notable, la thèse de garnier (J.), Bourgeoisie et propriété immobilière en Forez aux xviie et xviiie siècles, Saint-Étienne, 1982, 515 p.

2 elhai (H.), Recherches sur la propriété foncière des citadins en Haute-Normandie, Mémoires et Documents, T. X/3, Paris, 1965, 107 p.

3 garnier (J.), op. cit..

4 poitrineau (A.), La vie rurale en Basse-Auvergne au xviiie siècle, Paris, 1965, 925 p.

5 vovelle (M.), Ville et campagne au xviiie siècle : Chartres et la Beauce, Paris, 1980, 307 p.

6 frèche (G.), Toulouse et la région Midi-Pyrénées au siècle des Lumières (vers 1670-1789). Paris, 1974, 982 p.

7 guignet (P.), Le pouvoir dans la ville au xviiie siècle, Paris, 1990, 591 p.

8 beaur (G.), Le marché immobilier à la veille de la Révolution ; les mouvements de propriété beaucerons dans les régions de Maintenon et de Janville de 1761 à 1790, Paris, 1981,601 p.

9 vigouroux (M.), « La propriété foncière des citadins dans le bassin de l'Agly », Bulletin de la Société Languedocienne de Géographie, 1968, n° 2, p. 163-206.

10 favier (R.), « Les petites villes dauphinoises face à leur environnement rural au xviiie siècle : emprise foncière, financière et humaine », Les petites villes du Moyen Age à nos jours ; Actes du colloque de Bordeaux, 1987, p. 323-334.

11 favier (R.), idem, p. 327.

12 vigouroux (M.), op. cit., p. 185-188.

13 Voir les différents travaux de beaur (G.) ou vovelle (M.), op. cit..

14 poitrineau (A.), La vie rurale en Basse-Auvergne..., op. cit..

15 vigouroux (M.), op. cit., p. 170.

16 poitrineau (A.), op. cit., p.321.

17 garnier (J.), op. cit., p.254.

18 beaur (G.), « Une petite ville, Maintenon, et son marché foncier à la fin de l'Ancien Régime », Les petites villes du Moyen Age à nos jours, Actes du colloque de Bordeaux, 1987, p. 335-350.

19 Le goff (T.), Vannes et sa région. Ville et campagne dans la France du xviiie siècle, Loudéac, 1989, 397 p. et henrio (R.), La propriété foncière de la bourgeoisie vannetaise au xviiie siècle, Mémoire de dea, dactyl, Rennes II, 1990, 86 p.

20 elhai (H.), op. cit., p. 58.

21 vovelle (M.), op. cit., p. 213-227.

22 bois (P.), « Répartition sociale de la propriété foncière rurale dans les pays de la Basse-Loire. Son évolution dans la deuxième moitié du xviiie siècle », Enquêtes et Documents, T. IV, 1978, p. 41-61 et T.V, 1980, p. 95-97.

23 Rennes agit sur Vitré ou Fougères comme Rouen sur Dieppe ou Fécamp. Sa présence ne disparaît pas totalement à proximité de la petite ville. L'inverse est exceptionnel.

24 frèche (G.), op. cit., p. 325.

25 garnier (J.), op. cit., p. 187 et favier (R.), op. cit., p. 328.

26 elhai (H.), vovelle (M.), beaur (G.), op. cit.. La présence parisienne existe aussi en Haute-Bretagne mais surtout sous la forme de domaines dont on se sépare.

27 Garnier (J.) parle d'une distance optimale d'une douzaine de kilomètres pour Saint-Étienne. (A.) Poitrineau admet une quinzaine pour Clermont.

28 Le déséquilibre est/ouest est très net pour les habitants de Clermont et de Riom, situés précisément au point de contact entre plaine et montagne.

29 AD I.-&-V., 2 C 33 59.

30 AD I.-&-V., 2 C 33 58.

31 C'est la terminologie employée dans les registres du Centième Denier !

32 D'après le partage entre les héritiers. AD I.-&-V., 1 F 2004.

33 AD I.-&-V., 2 F 51.

34 A. D. I.-&-V., 2 Em 138.

35 AD I.-&-V., 2 Ed 45.

36 AD I.-&-V., 2 B 609.

37 Mention dans le rôle de capitation de 1777.

38 AD I.-&-V., 2 F 51.

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