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Les idées pédagogiques de Jean-Marie de la Mennais

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Pierre Perrin

Première partie. La congrégation des Frères de l'Instruction chrétienne

Chapitre I. L’enseignement primaire au début du xixe siècle

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Géographique :

France

Texte intégral

  • 1 AFIC 102.04.007, De l’Enseignement primaire en Bretagne, mémoire adressé le 27 juillet 1839 à Ambr (...)
  • 2 AN F17 12474. Émile Souvestre décrit ainsi la vie misérable d’un magister breton d’avant la Révolu (...)
  • 3 Il est difficile de chiffrer précisément le nombre des petites écoles et des effectifs d’élèves. O (...)

1« Les campagnes étaient abandonnées… Quelques maîtres particuliers apprenaient à lire et à écrire, suivant la méthode individuelle, aux enfants assez riches pour payer une rétribution : voilà tout1 ». C’est en ces termes que Jean-Marie de Lamennais évoque la situation de l’enseignement primaire dans les campagnes de Bretagne au début du xixe siècle. Le bilan semble néanmoins plus contrasté puisque lorsqu’éclate la Révolution, la France compte près de 32 000 communes et de 30 à 32 000 petites écoles dispensant une instruction rudimentaire : l’enseignement étant assuré soit par des congrégations, soit par des maîtres peu formés et mal payés qui exercent le plus souvent un autre métier, soit par des maîtres ambulants. « Hommes ignorants, grossiers, sans titre et sans garanties, inconnus aux autorités…, qui pour salaire d’une leçon de latin donnée aux enfants s’enivrent d’ordinaire avec les parens2 », écrivent en 1837 les inspecteurs généraux de Bretagne à propos de ces anciens « magisters » de campagne. Il est vrai qu’il faut relativiser le nombre des écoles en fonction de la répartition géographique des élèves3. De plus, si les établissements des villes offrent un réseau scolaire relativement dense et stable, les petites écoles de campagne se révèlent en revanche d’une durée très variable.

  • 4 J. Meyer, Essai sur l’instruction populaire en Bretagne du xvie au xixe siècle, dans les actes du (...)
  • 5 H.-Ch. Rulon, Ph. Friot, Un Siècle de pédagogie dans les écoles primaires (1820-1940), Histoire de (...)

2En ce qui concerne la Bretagne, Jean Meyer insiste sur la difficulté à dresser une carte scolaire fiable puisque de nombreuses écoles disparaissent en fonction de l’évolution du coût de la vie, qui dévalorise les rentes créées par les testaments et les fondations pieuses, ou en fonction des personnalités qui animent et, souvent, portent à bout de bras ces petites écoles4. Des cantons entiers se retrouvent ainsi sans écoles régulières : en 1817, on compte 56 instituteurs autorisés dans la Loire-Atlantique, 43 dans l’Ille-et-Vilaine, 32 dans les Côtes-d’Armor, 17 dans le Finistère et 10 dans le Morbihan5. Il reste que le nombre des petites écoles de campagnes ne laisse pas d’inquiéter à la fois les politiques, qui considèrent cet essor comme le ferment d’une possible contestation sociale, et les propriétaires terriens, qui craignent de voir une main-d’œuvre locale et bon marché, désormais plus instruite, s’éloigner vers les villes. En ce sens, La Chalotais, président du parlement de Rennes, et auteur de l’ouvrage, au titre évocateur sinon prémonitoire, Essai d’Éducation nationale paru en 1763, peut également affirmer que la nation a le devoir d’instruire chacun de ses membres mais qu’il faut proscrire l’étude chez les « laboureurs » et les « artisans » qui ne manqueraient pas alors de viser un autre état.

Des essais révolutionnaires à l’Université impériale

3Rapports, plans, projets de lois, décrets…, de 1790 à 1795, les assemblées révolutionnaires vont donc beaucoup débattre du droit à l’instruction et à l’éducation mais sans arriver à mettre en place un système d’enseignement structuré et durable. Après avoir placé, dès septembre 1789, l’instruction publique sous la surveillance des districts et des communes, la Constituante adopte une série de mesures destinées à laïciser davantage l’enseignement : confiscation des biens du clergé (novembre 1789), suppression des congrégations (juillet 1790), obligation du serment de fidélité à la constitution pour les ecclésiastiques (novembre 1790). Aussi, faute de ressources et d’enseignants, beaucoup d’établissements scolaires, aux mains du clergé, vont être obligés de fermer. En fait, la Constitution de 1791, accompagnée du projet de décret de Talleyrand, se contente de déclarer que sera organisée une instruction publique commune à tous les citoyens, gratuite mais non obligatoire et structurée en fonction des divisions administratives du royaume.

  • 6 C. Lelièvre, Histoire des institutions scolaires (1789-1989), Paris, 1990, p. 117.

4La Législative est davantage marquée par le plan présenté par Condorcet en février 1792. Celui-ci propose cinq degrés d’enseignements, la liberté de créer des écoles, l’enseignement gratuit mais non obligatoire aussi bien pour les filles que pour les garçons. Avec la Convention, se succèdent des séries de projets de loi (Lanthenas, Romme, Sieyès et Daunou, Lepelletier) qui aboutiront au décret Bouquier, adopté en décembre 1793, qui prévoit la liberté d’enseignement, la rémunération des maîtres du public et l’enseignement obligatoire des enfants. En 1794, Lakanal présente un nouveau projet qui à la fois donne le droit de créer des écoles particulières et instaure la création d’une école publique pour mille habitants, divisée en deux sections, filles et garçons, avec des maîtres nommés par des jurys et rémunérés par la République. La Convention s’achèvera avec la loi Daunou adoptée le 3 brumaire an IV (25 octobre 1795) ; loi qui occulte les avancées antérieures : gratuité, obligation, organisation d’un vrai service public. Mise en application par le Directoire, la loi Daunou renforcera en fait le clivage existant entre un enseignement public qui manque cruellement de moyens humains et financiers et un enseignement privé, soutenu et structuré par le clergé. Aussi peut-on dire qu’à la forte revendication d’éducation nationale, émise pour la première fois par La Chalotais en 1763, la première République ne répond dans les faits ni positivement, ni négativement6. Dans son livre, Réflexions sur l’état de l’Église en France pendant le xviiie siècle et sur sa situation actuelle, paru en 1808 et écrit en commun avec son frère, Jean-Marie de la Mennais dresse un bilan dramatique de l’instruction et de « l’éducation philosophique » de cette période pour conclure que seul un enseignement religieux peut donner une morale et assurer l’éducation du peuple :

  • 7 J.-M. et F. de la Mennais, Réflexions sur l’État de l’Église en France pendant le xviiie siècle et (...)

Presque partout les enfans du peuple, livrés à eux-mêmes, vivent dans un abandon absolu, dans un déplorable vagabondage, source de tous les désordres et de tous les vices. La moitié des vols commis dans la capitale le sont par des enfans. Le crime devient une habitude et un besoin avant d’être un calcul ou une passion ; et la conscience est étouffée avant même qu’elle naisse. Effrayé d’une immoralité si générale et si précoce, le gouvernement en a cherché le remède dans le rétablissement des écoles chrétiennes, où les enfans du pauvre reçoivent gratuitement l’instruction appropriée à leur état, et où ils acquièrent surtout des principes religieux, unique garant de la probité dans tous les états : institution vraiment sociale, qu’il est essentiel de protéger et d’étendre, si l’on compte pour quelque chose l’éducation du peuple7.

  • 8 Pour faire ratifier le Concordat par les Assemblées, Bonaparte rajoutera 77 articles organiques qu (...)

5Après le coup d’état du 18 brumaire an VIII (9 novembre 1799) qui met fin au Directoire et ouvre la période du Consulat, Bonaparte entreprend la réorganisation de l’ensemble du système d’enseignement français. Dès 1801, Chaptal est chargé de préparer un projet de réforme. Bien plus, persuadé que l’unité nationale ne peut se fonder que sur une unité religieuse, Bonaparte, avec le Concordat de 1801, redonne une nouvelle autorité à l’Église en contrepartie de sa soumission au pouvoir : le Concordat reconnaît le catholicisme comme la religion de la majorité des Français, les évêques sont nommés par le premier Consul et institués ensuite par le pape, le clergé reçoit une indemnité de l’État mais tous les ecclésiastiques doivent prêter serment de fidélité à l’État8. Le ministre des cultes Portalis peut ainsi, devant le Corps législatif, développer les idées du gouvernement en matière d’instruction et souligner l’importance d’un enseignement religieux :

  • 9 Extrait du discours du 15 germinal an X, paru dans le Moniteur du 16 germinal an X, cité par A. Ch (...)

« Nous sentons plus que jamais la nécessité d’une instruction publique. L’instruction est un besoin de l’homme ; elle est surtout un besoin des sociétés ; et nous ne protégerions pas les institutions religieuses qui sont comme les canaux par lesquels les idées d’ordre, de devoir, d’humanité, de justice coulent dans toutes les classes de citoyens ! La science ne sera jamais que le partage du petit nombre ; mais avec la religion, on peut être instruit sans être savant. C’est elle qui enseigne, qui révèle toutes les vérités utiles à des hommes qui n’ont ni le tems, ni les moyens d’en faire la pénible recherche9 ».

  • 10 Article 1er. – Il sera formé, sous le nom d’Université Impériale, un Corps chargé exclusivement de (...)

6Chaptal nommé ministre de l’intérieur, c’est Fourcroy qui a la charge de présenter le projet de loi ; projet qui verra douze rédactions successives et sera finalement adopté le 1er mai 1802. La loi du 11 floréal an X abandonne aux communes l’organisation des écoles primaires et secondaires, notamment leur gestion financière. En réalité, il y aura très peu de créations d’écoles primaires publiques : les communes avançant leur manque de moyens et de locaux, et surtout la pénurie réelle d’instituteurs, pour ne rien organiser. De plus, les maîtres particuliers hésitent à s’engager dans un mode d’enseignement officiel pour préserver leur indépendance morale et financière. Cependant, dès 1802, vont se créer de nombreux établissements, tant privés que publics : privés, car le clergé, retrouvant toute son influence avec le Concordat, cherche à reconstituer ses cadres et ouvre partout en France des écoles ecclésiastiques, primaires ou secondaires, et des petits séminaires, auxquels s’ajoutent les pensions et institutions privées dirigées par des particuliers ; publics, car la loi du 11 floréal impose la création des lycées et l’ouverture d’écoles secondaires communales. Mais cette situation est loin de satisfaire Napoléon qui considère que l’enseignement doit préparer à l’unité et à la discipline nationales : il s’agit de former la nouvelle génération dans le « même moule » et d’assurer ainsi le renouvellement des cadres de l’État, civils et militaires. Cette volonté de réorganiser l’Instruction publique va se concrétiser, en trois courts articles, par la loi du 10 mai 180610. En 1814, le frère de Jean-Marie de la Mennais, Félicité, formulera une vigoureuse attaque contre l’Université impériale dans un article du Conservateur pour stigmatiser cette conception utilitariste de l’enseignement :

  • 11 F. Lamennais, De l’Université impériale, dans Mélanges religieux et philosophiques, Paris, 1836-18 (...)

De toutes les conceptions de Bonaparte, la plus effrayante pour l’homme qui réfléchit, la plus profondément antisociale, en un mot la plus digne de lui, je n’hésite point à le dire, c’est l’Université. Lorsque le tyran crut avoir assuré par tant d’horribles lois le malheur de la génération présente, il éleva ce monstrueux édifice comme un monument de sa haine pour les générations futures, et sembla vouloir ravir au genre humain l’espérance même. […]
Il résolut de livrer la masse de la nation à un abrutissement sauvage, en permettant à quelques individus de s’élever jusqu’à la barbarie savante. De cette sorte, il s’assurait, pour l’accomplissement des ses projets de conquête, un fonds presque inépuisable de matière première, et des hommes en état de mettre cette matière en œuvre […] Il fallait dans les instrumens de son ambition un dévouement absolu à ses volontés, quelles qu’elles fussent et, par conséquent, à des volontés immorales un dévouement immoral ; il fallait à la place de la religion qui avertit l’homme de ses devoirs, un culte politique qui les lui fit oublier ; à la place de l’honneur, le fanatisme de la fortune, et cette muette obéissance qui présente ou reçoit le cordon sans hésiter et sans murmure. L’Université suffit à tout11.

  • 12 M. Gontard, L’Enseignement primaire en France de la Révolution à la loi Guizot (1789-1833), Paris, (...)

7Pour ce qui relève de l’enseignement primaire, en dehors du fait que les petites écoles et leurs maîtres font partie intégrante de l’Université, le décret du 17 mars 1808 ne contient que peu d’éléments ; l’Empereur se désintéressant de cette partie de l’enseignement. De fait, seuls deux articles précisent les dispositions concernant la formation des maîtres et, comme par le passé, le fonctionnement des écoles primaires est laissé à la bonne volonté des communes ou aux initiatives individuelles. Pour comprendre, écrit Maurice Gontard, l’absence de hautes pensées et d’impulsions fécondes de la part d’un gouvernement tout puissant, il faut en rechercher les causes dans les intentions mêmes du créateur responsable de cette abstention : l’Empereur, héritier des aristocrates du xviie siècle, plus que jamais fidèle aux principes qui ont prévalu en floréal an X, méprise en son for intérieur le petit peuple, ne voit en lui qu’un instrument de travail, redoute pour son gouvernement tyrannique le développement des lumières12.

Un rapport sur l’enseignement primaire en Bretagne

  • 13 La Vigie de l’Ouest, numéro du 1er mai 1849.

8« C’est Carnot ! Carnot est le véritable fondateur de notre œuvre. Il faut rendre justice à qui de droit13 ». C’est par cette boutade que Jean-Marie de la Mennais répond, en 1849, au journaliste Louis de Kergolay qui lui demande si quelqu’un avait été l’inspirateur de la fondation des Frères de l’Instruction chrétienne. De fait, dès 1815 les deux frères Lamennais s’étaient opposés à l’enseignement mutuel prôné par Carnot mais l’abbé Jean précise, dans la suite de l’article, que la création de la congrégation trouve sa véritable origine, et sa réelle justification, dans la pénurie d’instituteurs religieux dans les campagnes bretonnes :

La Révolution avait détruit les écoles de campagnes sans rien mettre à la place. L’âme des enfants appartenait à qui saurait s’en emparer. Ni les programmes de Carnot, ni les maîtres préconisés par lui ne m’offraient de garanties […] Il fallait préparer la résistance […] Mais comment préserver les campagnes ? Je ne pouvais y envoyer les Frères de M. de la Salle, auxquels leur règle défend d’accepter des écoles tenues par un seul maître. Je fis venir et je formai quelques jeunes gens, qui consentirent à s’en aller, un à un, dans l’isolement d’une campagne perdue, instruire nos pauvres petits paysans. Ce furent les premiers Petits Frères.

  • 14 AFIC 102.04.007, De l’Enseignement primaire en Bretagne. Ce mémoire de 1839, divisé en sept chapit (...)
  • 15 J.-F. Brousmiche, Voyage dans le Finistère en 1829, 1830 et 1831, Quimper, 1977, t. II, p. 220.

9En quelques phrases, Jean-Marie de la Mennais présente ainsi l’une des originalités de son entreprise : ne pas regrouper les frères dans des maisons mais, pour faire face à la demande pressante d’instituteurs, les disséminer dans les communes rurales qui les réclament. Réponse à la fois simple et innovante à un problème récurrent : puisque les enfants ne vont pas à l’école, il décide donc que l’école ira vers les enfants. Dans un rapport adressé au Conseil royal de l’Instruction publique sur la situation de l’enseignement primaire en Bretagne et sur les obstacles à l’instruction dans les campagnes au début du xixe siècle, Jean-Marie de la Mennais relève en effet que la dispersion de l’habitat représente un frein important à la scolarisation des enfants : « Nos communes rurales sont fort étendues ; les bourgs, en général, sont peu peuplés, et souvent ils sont situés à l’extrémité de la paroisse ; par conséquent, pour se rendre à l’école, les enfants n’ont pas moins d’une ou deux lieues à faire par des chemins affreux, surtout en hiver14 ». La situation semble d’ailleurs inchangée dans les années 1830 puisque dans son ouvrage Voyage dans le Finistère en 1829, 1830 et 1831, Jean-François Brousmiche fait le même constat sur l’éloignement des écoles pour les enfants des campagnes : « Combien aussi d’écoles sont illusoires dans nos campagnes ? Les enfants d’un bourg populeux, ceux des fermes qui sont rapprochées de ce bourg, peuvent seuls assister aux leçons du maître. L’éloignement des villages, des simples hameaux, est souvent tel dans notre Basse-Bretagne, qu’il y a impossibilité à ce que les écoliers puissent se rendre chez l’instituteur15 ».

  • 16 Désapprouvée par l’Église, désormais privée de toute autorité sur l’enseignement avec seulement un (...)
  • 17 Ainsi par exemple en 1837, dans les Côtes-du-Nord, seules 22 communes sur 375 acquittent en entier (...)
  • 18 AN F17 9319.
  • 19 AFIC L104B054, lettre du 7 novembre 1837 à Salvandy.

10Le deuxième obstacle à l’implantation des écoles de campagne, évoqué par Jean-Marie de la Mennais, concerne le manque de ressources des communes : « les communes étant très pauvres, on ne peut guère compter sur elles pour aucune dépense extraordinaire en faveur de leurs écoles : presque partout les ressources sont au-dessous des besoins ». En effet, si depuis l’ordonnance du 29 février 181616, les communes étaient tenues à ce que les enfants reçoivent l’instruction primaire, et à ce que les enfants pauvres soient scolarisés gratuitement, la plupart d’entre elles, faute de moyens et de locaux, ne pouvaient assurer l’instruction dans de bonnes conditions17. L’instituteur recevait les enfants dans son logement ou dans une chambre ou un grenier qu’il louait : « presque nulle part, constate l’abbé de la Mennais, on ne trouvait un local assez grand pour y placer cinquante enfants assis, avec des tables et des bancs ». L’inspecteur de Guingamp souligne encore en 1855 la difficulté de trouver des salles adaptées à l’enseignement : « elles sont ordinairement peu convenables, petites, mal distribuées, mal aérées, sombres et souvent humides18 ». De plus la rétribution des familles était minime à cause de l’absentéisme des enfants, obligés de participer aux travaux des champs : « les écoles, écrit Jean-Marie de la Mennais, ne sont au complet qu’après la récolte des pommes, c’est-à-dire à la mi-novembre ; les enfants se retirent au plus tard à la Saint-Jean pour aller travailler aux foins et à la moisson : ils n’ont donc que de sept à huit mois d’école ». Dans une lettre adressée au ministre de l’Instruction publique Salvandy, il déplore les conséquences de cette faible fréquentation scolaire : « Ce sont surtout les paroisses pauvres qui souffrent de cet état de choses : en effet, les instituteurs laïcs ne peuvent y vivre avec un traitement de 200 fr., auquel les communes même riches n’ajoutent pas un centime : les rétributions ne produisent presque rien. Les parents croient faire et font réellement un sacrifice bien grand pour eux, en se privant des services que leurs enfants rendraient dans le ménage, quand ils les envoient à l’école ; et leur demander en outre de l’argent, c’est leur demander ce qu’ils n’ont pas19 ». Quant à la gratuité de l’enseignement pour les enfants pauvres, le témoignage de J.-F. Brousmiche nous éclaire sur les réactions que cette mesure suscite :

  • 20 J.-F. Brousmiche, op. cit., p. 220.

Une objection que présentent beaucoup de municipaux contre le système d’éducation primaire, c’est que les sommes imposées extraordinairement par les communes, tournent exclusivement au profit des indigents, admis seuls gratuitement dans les écoles ; que, nonobstant les sacrifices qui sont faits en leur faveur, ces indigents restent tout de même à leur charge, attendu qu’ils doivent les employer à garder leur bétail, ou à de légers ouvrages dans les fermes. Nos cultivateurs disent encore, que si cette ressource leur est enlevée, ils sont obligés, eux, de laisser leurs fils sans instruction, puisqu’il faut qu’ils leur rendent les services auxquels on employait les enfants pauvres. Ils ajoutent de plus que, forcés de faire des manœuvres de leurs enfants, ils ne voient pas la nécessité de créer des savants à leurs dépens20.

  • 21 M. Lagrée, Religion et cultures en Bretagne, 1850-1950, Paris, 1922, p. 222. Sur les différentes a (...)

11À ces difficultés, s’ajoute l’obstacle de la compréhension du français car les frères se heurtent parfois au barrage de la langue : « On ne plaçait dans les paroisses bretonnes, écrit l’abbé de la Mennais dans son mémoire, que des maîtres sachant les deux langues ; cependant l’école se faisait toujours de manière à ce que les enfants apprissent le français : c’est ainsi que plusieurs communes bretonnes sont devenues françaises en fort peu de temps ». Michel Lagrée note précisément que c’est dans ces fractions du clergé étroitement associées au champ scolaire que se rencontrent les cas les plus explicites de préférence francophone ; Jean-Marie de la Mennais en constituant l’exemple parfait21. Un frère des Côtes-d’Armor évoque cette situation lorsqu’il décrit les débuts de son établissement en 1829 : « Pour anéantir les funestes préjugés qu’on avait sur l’enseignement congréganiste, je fis tous mes efforts pour amener mes élèves à parler entre eux le français, au lieu du breton qui était seul connu dans ce lieu. Les enfants des douaniers, qui en savaient déjà quelque peu, me furent très utiles pour arriver à mon but.

  • 22 Mémoires d’un Ancien, dans Chronique des Frères de l’Instruction chrétienne, t. I, Ploërmel, 1874- (...)
  • 23 L’article 11 de l’ordonnance du 29 février 1816 distinguait trois degrés au brevet : le premier po (...)

12Bientôt les principaux habitants furent surpris d’entendre les petits écoliers du Frère parler une langue étrangère à la leur22 ». Dans son rapport à Ambroise Rendu, Jean-Marie de la Mennais insiste donc sur l’obligation, pour l’instituteur, de connaître la langue bretonne : « des enfants bretons ne peuvent être instruits par des maîtres qui ne savent que la langue française, puisque ceux-ci n’auraient d’autre moyen que les signes pour se faire entendre d’eux et de leurs parents. Cette difficulté diminuera avec le temps, mais elle ne disparaîtra entièrement que dans un temps fort éloigné ». En 1838, pour se plaindre de la difficulté de l’examen du brevet23, l’abbé de la Mennais attirait déjà l’attention du ministre sur la situation particulière des instituteurs du Finistère :

  • 24 AFIC L104C006, lettre du 8 janvier 1838 à Salvandy. Il reste que le Finistère est un département o (...)

Que les instituteurs du Finistère soient obligés de savoir la langue bretonne, cela est évident puisque la population n’en parle pas d’autre ; et encore, dois-je vous faire remarquer que le dialecte de Léon est différent de celui de Cornouaille, et ce dernier, de celui du Morbihan, si bien qu’à quelques lieues de distance, ces braves gens ne s’entendent pas plus entre eux qu’ils ne s’entendraient avec les Basques. Combien donc ne faudra-t-il pas de temps pour que mes novices du Finistère se familiarisent assez avec la langue française pour l’écrire correctement et pour être brevetés, si l’on n’adoucit pas pour eux l’extrême rigueur des examens ?24

13Le problème de la compréhension du français n’est cependant pas propre à la Bretagne puisque le ministre Salvandy, dans la circulaire aux recteurs d’Académie du 25 octobre 1838, constate que « sur différents points de la France où les habitants des campagnes parlent un idiome particulier, il arrive fréquemment que les enfants qui suivent les Écoles primaires ne comprennent pas les lectures qu’ils font en français. Le ministre demande alors que les instituteurs primaires aient soin de s’assurer que les enfants ne procèdent pas machinalement au travail de lecture » et « qu’ils se fassent rendre compte par les enfants de tout ce qui leur est donné à lire ». Il faudrait même, précise-t-il, « si quelques élèves les y forçaient… par une ignorance absolue de la langue française, qu’ils exigeassent, en ce cas, une sorte d’analyse verbale ou traduction dans l’idiome local ». Ces recommandations pédagogiques répondent précisément au souci de vérifier si l’enseignement dispensé est à même de former un citoyen français ; en effet, le ministre rappelle la nécessité pour les instituteurs de vérifier si les lectures instructives ou morales que font leurs élèves sont bien comprises par eux, et peuvent « conséquemment porter le fruit que l’on doit en attendre ». Dans le même temps, il leur demande de veiller à « purger la prononciation et le langage de tout ce qui rappelle les temps où la même instruction et la même langue n’étaient pas communes à tous les français ».

Implantations des écoles des Frères de l’Instruction chrétienne en Bretagne en 1830 et 1860

96 écoles en 1830

96 écoles en 1830

296 écoles en 1860

296 écoles en 1860
  • 25 . J.-F. Brousmiche, op. cit., t. II, p. 219-220.

14Le dernier point évoqué par Jean-Marie de la Mennais concerne le traitement de l’instituteur. S’il développe longuement cette partie, en déplorant l’état misérable des instituteurs, c’est pour mieux présenter, par la suite, les avantages financiers qu’il y a pour une commune à posséder une école tenue par un frère de l’Instruction chrétienne : « il logeait toujours au presbytère et, par conséquent, il n’y avait pour lui ni loyer à payer, ni ménage à tenir. Les rétributions appartenaient aux fondateurs de l’école, sauf à eux à payer le traitement du frère et sa pension chez le curé […] mais très souvent messieurs les curés la donnaient gratuitement aux frères, du moins en partie, parce que ceux-ci les soulageaient dans leur ministère ». Dans son Voyage dans le Finistère…, Brousmiche montre ainsi que l’insuffisance du traitement peut en partie expliquer la médiocrité des maîtres : « La plupart de nos instituteurs dans les campagnes sont d’une ignorance achevée […] Mais comment aussi vouloir rencontrer des instituteurs dignes de la noble mission qu’on leur confie, pour la rétribution modique que la plupart des communes peuvent leur allouer, rétribution à peine égale à celle que les riches cultivateurs assurent à leurs premiers valets de ferme ? Un salaire de cent cinquante à deux cents francs est-il suffisant pour attacher aux pénibles devoirs du professorat, pour tenter des hommes capables, obligés par leurs fonctions de résider au fond de la campagne25 ? » L’abbé de la Mennais s’attache donc à démontrer que, malgré les charges supportées par la commune, un instituteur laïc ne peut vivre décemment avec son traitement. Pour cela, il dresse le bilan précis des dépenses et recettes d’un maître d’école :

Un maître laïc qui ne vit pas comme les simples paysans, qui ne va pas habituellement manger et boire chez eux, est dans un état voisin de la misère. En supposant que la commune lui fournisse le logement et qu’elle se charge de l’entretien du mobilier de l’école, sa dépense personnelle ne peut être évaluée à moins de 750 francs par an, si l’on veut qu’il tienne un rang convenable […] L’instituteur est-il marié, a-t-il une famille, 750 fr. ne lui suffiront plus, et pourtant à quelle somme montent les recettes ? Tout au plus à 600 fr., savoir : 200 fr. de traitement fixe et 400 fr. de rétributions, s’il parvient à réunir, pendant dix mois de l’année, 40 élèves, dont la moitié paient 1 fr. 25 par mois et les autres 0 fr. 75. Or cette évaluation des revenus du plus habile et du plus heureux de nos magisters de village est évidemment exagérée.

  • 26 Sur la vie et les œuvres de l’abbé Deshayes, on peut lire la biographie d’Alexis Crosnier, L’Homme (...)

15Manque de motivation des parents (« un grand nombre de parents, quoique dans l’aisance, ne veulent faire aucun sacrifice pour procurer à leurs enfants une éducation qu’ils n’ont pas eux-mêmes reçue, et dont, par conséquent, ils ne sentent pas le prix », note-t-il dans son rapport), pénurie de maîtres et d’écoles, dispersion des élèves, pauvreté des communes… c’est dans ce contexte que Jean-Marie de la Mennais va rencontrer celui avec lequel il va fonder les Frères de l’Instruction chrétienne : Gabriel Deshayes26.

Notes

1 AFIC 102.04.007, De l’Enseignement primaire en Bretagne, mémoire adressé le 27 juillet 1839 à Ambroise Rendu alors membre du Conseil royal de l’Instruction publique.

2 AN F17 12474. Émile Souvestre décrit ainsi la vie misérable d’un magister breton d’avant la Révolution et ses méthodes d’enseignement : « Les leçons de celui-ci ne se donnaient point dans un local commun ; le professeur allait chercher ses élèves de cabane en cabane. Il les trouvait tantôt dans le pré, coupant l’herbe nouvelle ; tantôt aux champs, gardant les troupeaux. Tous deux s’asseyaient où ils s’étaient rencontrés, sur l’auge de pierre ou sur le fossé verdoyant ; les livres étaient ouverts, et les leçons se donnaient […] Tout le jour était employé ainsi à courir les fermes isolées, et le dernier dimanche de chaque mois, le maître d’école recevait cinq sous de chaque famille […] Les maîtres d’école menaient d’habitude vingt ou trente ans cette vie pauvre et laborieuse ; puis, les infirmités venant, ils prenaient le bissac de toile grise, le bâton blanc, et allaient mendier de porte à porte, jusqu’à ce que le seigneur ou le curé eût pitié d’eux et leur obtint une place à l’hospice le plus voisin ! ». E. Souvestre, Souvenirs d’un Basbreton, Paris, 1860, p. 39-40.

3 Il est difficile de chiffrer précisément le nombre des petites écoles et des effectifs d’élèves. On sait cependant qu’une ligne Saint-Malo -Genève sépare une France du Nord bien scolarisée d’une France du Sud mal scolarisée. Au Nord, on trouve nombre de régions où 90 à 98 % des paroisses ont une école, alors qu’au Sud il y en a plus de 50 % qui n’en ont pas. Ch. Nique, C. Lelièvre, Histoire biographique de l’enseignement en France, Paris, 1990, p. 101.

4 J. Meyer, Essai sur l’instruction populaire en Bretagne du xvie au xixe siècle, dans les actes du 95e congrès national des sociétés savantes : Histoire de l’enseignement de 1610 à nos jours, Paris, 1974, p. 334.

5 H.-Ch. Rulon, Ph. Friot, Un Siècle de pédagogie dans les écoles primaires (1820-1940), Histoire des méthodes et des manuels scolaires utilisés dans l’Institut des Frères de l’Instruction chrétienne de Ploërmel, Paris, 1962, p. 26.

6 C. Lelièvre, Histoire des institutions scolaires (1789-1989), Paris, 1990, p. 117.

7 J.-M. et F. de la Mennais, Réflexions sur l’État de l’Église en France pendant le xviiie siècle et sur sa situation actuelle, Paris, 1836-1837, t. III, p. 108-109. Éditées en 1808, les Réflexions furent réimprimées en 1814 et une nouvelle édition fut signée par Félicité en 1819. Certains auteurs ont voulu attribuer la paternité de certaines parties de cet ouvrage, né d’une réflexion commune aux deux frères, à l’un ou à l’autre – voir A. Laveille, Jean-Marie de La Mennais (1780-1860), Vannes, 1910, t. I, p. 76 à 78.

8 Pour faire ratifier le Concordat par les Assemblées, Bonaparte rajoutera 77 articles organiques qui rétablissent en fait le gallicanisme politique : notamment l’obligation d’enseigner dans les séminaires les quatre articles de la Déclaration de 1682 ; obligation contre laquelle vont s’élever fortement les frères Lamennais sous la Restauration (cf. infra).

9 Extrait du discours du 15 germinal an X, paru dans le Moniteur du 16 germinal an X, cité par A. Chevalier, Les Frères des Écoles chrétiennes et l’enseignement primaire après la Révolution, Paris, 1887, p. 55.

10 Article 1er. – Il sera formé, sous le nom d’Université Impériale, un Corps chargé exclusivement de l’enseignement et de l’éducation publique dans tout l’Empire. Art. 2. – Les membres du Corps enseignant contracteront des obligations civiles, spéciales et temporaires. Art. 3. – L’organisation du Corps enseignant sera présentée en forme de loi, au Corps Législatif, à la session de 1810. En réalité, Napoléon n’attendra pas 1810 pour arrêter l’organisation de l’Université. Il charge Fourcroy de lui présenter un projet qui, après vingt-trois rédactions, sera adopté par le décret du 17 mars 1808.

11 F. Lamennais, De l’Université impériale, dans Mélanges religieux et philosophiques, Paris, 1836-1837, t. III, p. 308 à 310.

12 M. Gontard, L’Enseignement primaire en France de la Révolution à la loi Guizot (1789-1833), Paris, 1959, p. 241.

13 La Vigie de l’Ouest, numéro du 1er mai 1849.

14 AFIC 102.04.007, De l’Enseignement primaire en Bretagne. Ce mémoire de 1839, divisé en sept chapitres (I- Des obstacles à l’établissement des écoles ; II- Des moyens qui ont été employés pour triompher des obstacles ci-dessus ; III- Des changements survenus depuis la publication de la loi du 28 juin 1833 ; IV- De la fondation des écoles ; V- De la méthode d’enseignement, VI- De l’organisation des écoles ; VII- De la maison principale) avait pour but d’informer le ministre Villemain de la situation de l’enseignement en Bretagne et plus particulièrement de celle des Frères de l’Instruction chrétienne.

15 J.-F. Brousmiche, Voyage dans le Finistère en 1829, 1830 et 1831, Quimper, 1977, t. II, p. 220.

16 Désapprouvée par l’Église, désormais privée de toute autorité sur l’enseignement avec seulement un rôle de surveillance, l’ordonnance définissait, en 42 articles, à la fois le rôle des communes et des parents, la compétence des instituteurs, organisait le contrôle des écoles avec les comités cantonaux et la commission d’Instruction publique et dotait même l’enseignement primaire d’un budget.

17 Ainsi par exemple en 1837, dans les Côtes-du-Nord, seules 22 communes sur 375 acquittent en entier les dépenses de leur école publique ; 214 (57 %) sont obligées d’avoir recours à l’aide du département ou de l’État. G. Nicolas, Instituteurs entre politique et religion. La première génération de normaliens en Bretagne au 19e siècle, Rennes, 1993, p. 127.

18 AN F17 9319.

19 AFIC L104B054, lettre du 7 novembre 1837 à Salvandy.

20 J.-F. Brousmiche, op. cit., p. 220.

21 M. Lagrée, Religion et cultures en Bretagne, 1850-1950, Paris, 1922, p. 222. Sur les différentes attitudes du clergé face à la langue bretonne, on lira le chapitre Politiques de langue.

22 Mémoires d’un Ancien, dans Chronique des Frères de l’Instruction chrétienne, t. I, Ploërmel, 1874-1875-1876, p. 55. Dans ce récit en trois épisodes, les noms et les localités sont anonymes mais Laveille qui en cite un passage, nomme le frère Armel, enseignant à Pleubian (Côtes-d’Armor). Voir A. Laveille, Jean-Marie de La Mennais (1780-1860), Vannes, 1911, t. II, p. 31-32.

23 L’article 11 de l’ordonnance du 29 février 1816 distinguait trois degrés au brevet : le premier pour les instituteurs possédant la grammaire et l’arithmétique et des notions d’arpentage et de géographie, le deuxième pour ceux possédant bien l’orthographe, la calligraphie et le calcul et le troisième pour ceux sachant suffisamment lire, écrire et chiffrer.

24 AFIC L104C006, lettre du 8 janvier 1838 à Salvandy. Il reste que le Finistère est un département où les écoles mennaisiennes sont traditionnellement peu implantées : en effet, en 1824, l’évêque de Quimper, Mgr de Poulpiquet, avait refusé la création d’un noviciat à l’abbé de la Mennais pour donner la priorité aux Frères de Saint-Yon. Il faudra attendre 1836 pour voir les premières implantations se développer et, en 1860, le Finistère ne compte seulement que 20 écoles, soit 7 % de l’ensemble des écoles de Bretagne (voir cartes p. suivante sur l’évolution de la répartition des écoles des frères en Bretagne en 1830 et 1860).

25 . J.-F. Brousmiche, op. cit., t. II, p. 219-220.

26 Sur la vie et les œuvres de l’abbé Deshayes, on peut lire la biographie d’Alexis Crosnier, L’Homme de la divine Providence, Gabriel Deshayes, 2 v., Paris, 1917 et sur sa correspondance, l’ouvrage de Jean-Baptiste et Marcel Gendrot, Gabriel Deshayes, l’Audace de la Foi, Écrits et paroles, St-Laurent-sur-Sèvre, 1995. A. Crosnier dresse un portrait savoureux des deux prêtres, sans doute plus avantageux pour l’abbé Deshayes…: « L’un, le curé de Saint-Gildas, était grand, avec de l’embonpoint ; figure épanouie et colorée, air souriant et paternel, de grosses lèvres et des yeux bruns très doux. L’autre était de petite taille ; visage irrégulier, osseux, basané ; large front avec cheveux en broussailles ; grand nez, et des yeux de feu. Tous les deux étaient des soldats, des conquérants, armés de la ténacité bretonne, plus calme chez l’un, plus ardente chez l’autre. Le curé de Saint-Gildas était plus homme d’action qu’homme d’étude ; Jean-Marie de La Mennais, qui s’était formé à peu près seul, avait plus de goût pour l’étude et pour les livres, mais ce goût n’empêchait pas chez lui l’activité pour les affaires. M. Deshayes, quand il en avait le loisir, aimait à conter de belles histoires, où il excellait ; l’autre ne parlait que par phrases brèves, incisives, lumineuses. Si l’on voulait pousser le parallèle, à la manière antique, on ajouterait que l’un était plus curé, l’autre plus professeur. Ils se complétaient. » A. Crosnier, op. cit., t. II, p. 129-130.

Table des illustrations

Titre 96 écoles en 1830
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Titre 296 écoles en 1860
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