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    Plan détaillé Texte intégral Les Lyonnais à Cadix au XVIIIe siècle Les activités des négociants lyonnais à Cadix : Antoine Granjean et Guillaume Rey Notes de bas de page

    Lyon et la mer au XVIIIe siècle

    Ce livre est recensé par

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    Table des matières

    Chapitre X. Les négociants lyonnais à Cadix

    p. 317-352

    Texte intégral Les Lyonnais à Cadix au XVIIIe siècle La communauté marchande lyonnaise de Cadix (1714-1791) Le troisième corps de la Nation L’implantation des Lyonnais dans la ville La structure des maisons lyonnaises de Cadix Les activités des négociants lyonnais à Cadix : Antoine Granjean et Guillaume Rey Antoine Granjean, de la consignation au commerce des Indes Guillaume Rey : l’engagement d’un Lyonnais dans la Carrera de Indias Notes de bas de page

    Texte intégral

    1Pendant tout le XVIIIe siècle, les négociants français sont très présents dans la péninsule ibérique, avec une prédilection pour Madrid et quelques grandes places portuaires, dont Cadix. En janvier 1764, ils constituent de très loin la première communauté mercantile installée en Espagne, forte de 913 chefs de maisons, soit près des deux tiers (61,5 %) des marchands et négociants étrangers établis dans le royaume d’Espagne1. La communauté la plus importante se trouve alors à Cadix, avec 219 Français parmi les 506 négociants étrangers recensés et c’est là aussi que nous retrouvons la principale colonie de négociants lyonnais installés en Espagne, la plus importante en nombre et la plus dynamique, autant par l’ampleur des affaires qu’elle traite que par l’étendue de son rayon d’action2. Dans les autres grandes villes espagnoles leur présence est plutôt rare : apparemment absents parmi les nombreux Français qui pratiquent le commerce de gros à Alicante et à Valence, où le monde des affaires est dominé par des Provençaux, des Béarnais et quelques Dauphinois, les Lyonnais réapparaissent à Madrid, mais peu nombreux. Le recensement de 1764 ne signale ainsi qu’un Lyonnais parmi les 38 plus importants négociants français de la ville : François Solaimar, installé dans la capitale depuis 1752 et qui tient boutique calle Carretas. Quant à Pierre Prades, établi dans la même rue et associé, sous la raison Jean-Jacques Lantheaume et Cie, à un compatriote natif du Languedoc, il est originaire de Bédarieux, mais s’est installé à Madrid vers 1760 comme associé de la maison lyonnaise Delacour oncle et neveu et Cie, qui écoulait des articles de Lyon sur le marché madrilène, via des correspondants installés à Carthagène et à Orihuela3. Par contre aucun Lyonnais ne semble être établi ailleurs, ni sur la côte atlantique où, fort logiquement, les Basques et les Béarnais sont les plus nombreux, ni à Barcelone où le monde des affaires est dominé par des hommes du crû et où la nation française ne compte plus que six membres en 1764, contre 62 en 17194. En privilégiant le port de Cadix, les négociants lyonnais ont donc adopté, en Espagne, un mode d’implantation qui n’est pas sans rappeler celui des Bretons – les Malouins en particulier – certainement parce que, comme pour les toiles bretonnes, le marché hispano-américain absorbe la plus grande partie des étoffes de soie et des toileries, objets essentiels de leur commerce.

    Les Lyonnais à Cadix au XVIIIe siècle

    2Entre 1700 et 1791, la population de Cadix connaît une phase de croissance continue et augmente de près de 90 %, passant de 41 000 habitants au début du siècle à 77 500 en 1791, le cap des 50 000 âmes étant franchi en 1730 et celui des 60 000 en 17605. Cependant, en 1772, Antoine Granjean, un négociant lyonnais installé dans la ville depuis deux décennies estime, en s’appuyant sur des recensements effectués par les curés en 1769 et 1770, que la ville compte alors 4 867 maisons, 12 238 chefs de familles et entre 43 897 et 45 893 « communiants » auxquels il faut ajouter, précise-t-il, « ceux allant et venant qui n’ont point de domicile6 ». Alors que la population gaditane augmente, le nombre d’étrangers qui résident dans la ville croît dans des proportions encore plus importantes et, en 1791, ils seraient six fois plus nombreux qu’en 1713. Manuel Bustos Rodriguez et María del Carmen Lario de Oñate se sont penchés sur les recensements des étrangers effectués en 1713, 1773 et 1791, aujourd’hui conservés aux archives historiques municipales de Cadix7. En croisant les résultats de leurs travaux, il apparaît que le nombre de chefs de maison – vecinos cabeza de casa – d’origine étrangère serait passé de 773 en 1713 à 3 966 en 1773 et 5 067 en 1791, soit une croissance de 555 %. Au sein de cette importante colonie étrangère, les Français se taillent la part du lion, puisque si le padrón de 1713 recense 222 chefs de famille d’origine française (28,7 %), celui de 1773 en signale 1652 (41,6 %). Cela fait des Français la deuxième nation étrangère installée dans la ville, derrière les Italiens avec qui ils représentent un peu plus de 70 % de la population exogène en 1713 et 82 % en 17918. Entre ces deux dates, la colonie française de Cadix aurait vu ses effectifs quasiment doubler9.

    3Pendant toute la première moitié du siècle, les étrangers sont majoritaires au sein de la communauté négociante établie dans le port de Cadix. Ils auraient même représenté jusqu’à 88,5 % du monde marchand en 1713. Mais après 1763, la situation s’équilibre et les comerciantes espagnols reprennent progressivement le dessus, puisqu’ils sont 285 sur 529 (53,8 %) en 1763, puis 489 sur 907 (54 %) en 1773, tandis que le registre des étrangers de 1791 mentionne 489 noms à un moment où la ville compte autour de 1200 négociants (soit près de 60 % d’Espagnols)10. Trois phénomènes contribuent à expliquer ce renforcement de l’élément endogène au sein du monde marchand gaditan : l’apparition d’une vraie bourgeoisie mercantile espagnole renforcée par l’arrivée à Cadix de Castillans et de Basco-Navarrais, la naturalisation d’étrangers qui veulent s’impliquer directement et davantage dans le commerce des Indes en bénéficiant des privilèges alors réservés aux seuls Espagnols, et l’accession aux affaires de fils d’étrangers de mère espagnole, les jenízaros qui, à partir des années 1740, sont de plus en plus nombreux à prendre la suite des affaires paternelles. Mais, tandis que le poids relatif des étrangers se tasse dans le monde du négoce gaditan, les marchands et négociants français restent les plus nombreux : en moyenne, deux marchands étrangers sur cinq sont Français au cours de la première moitié du siècle ; en 1773, ils sont un peu plus de 200 sur 41811 et environ 250 au moment des réformes de 1778, répartis alors en une centaine de maisons. Mais à la fin de notre période leur nombre diminue considérablement, d’abord parce que Cadix perd son monopole et n’est plus la seule place d’où on peut armer des navires pour l’Amérique espagnole, mais aussi parce que la dégradation des relations entre l’Espagne et la France révolutionnaire débouche en 1793 sur une première vague d’expulsions de ressortissants français. En 1791, sur 489 étrangers dits « del comercio », 300 sont Français dont quelques 180 négociants12. Les trois quarts d’entre eux sont alors déclarés transeuntes et, à ce titre, jouissent de la protection consulaire, les autres (44 sur 178) ayant opté pour le statut de domiciliado que leur permettait une résidence de plus de dix années, le mariage avec une Espagnole et la possession de biens fonciers13. Aussi, après l’expulsion des transeuntes ordonnée au printemps 1793, la colonie mercantile française de Cadix ne compte-t-elle plus que 70 personnes. Mais cette situation n’est que temporaire puisqu’en 1795, une fois la paix signée, une grande partie des expulsés revient et, jusqu’à la seconde expulsion de 1808, le nombre de commerçants français établis à Cadix va se maintenir entre 100 et 15014.

    La communauté marchande lyonnaise de Cadix (1714-1791)

    4Pour connaître les origines géographiques des Français qui vivent à Cadix au XVIIIe siècle, nous disposons de deux listes précieuses établies à soixante-trois ans d’intervalle par les consuls Jacques de Mirasol, en janvier 1714, et Étienne du Plessis de Mongelas, en janvier 177715. Dans sa « liste des négociants établis à Cadix », De Mirasol énumère 80 noms de « marchands en gros » installés à Cadix et 30 noms de « boutiquiers », qui correspondent à 68 maisons de commerce « en gros » et à 27 boutiques. Si on ne relève aucun Lyonnais parmi les boutiquiers qui, pour un tiers d’entre eux, sont natifs d’Oloron en Béarn, par contre 12 marchands sont originaires de Lyon (15 %). Ils constituent ainsi la troisième communauté de marchands français implantés dans la ville, derrière les Provençaux (24 personnes – 30 %) et les Bretons (20 personnes – 25 %). Mais si on se limite aux seules origines urbaines, Lyon apparaît alors comme la deuxième ville du royaume d’où arrivent les marchands français qui viennent s’installer à Cadix, derrière Marseille (20 marchands) et assez nettement devant Saint-Malo (8 marchands) et Nantes (6 marchands). Signalons également que la moitié de ces Lyonnais sont arrivés depuis peu à Cadix, le consul les ayant en effet classés parmi les 17 « marchands en gros établis depuis la paix [d’Utrecht] ». D’ailleurs, dans une lettre datée de juin 1714 et adressée au marchand drapier lyonnais Raymond Moulins, son beau-frère Jean Boschet, présenté comme commis de Louis Robin, l’un des plus gros marchands français de Cadix, constate l’arrivée en ville d’une « grande quantité de Lyonnais », qu’il compare à un débordement massif de la Saône, avant d’ajouter que « si cela continue, on sera obligé d’agrandir cette ville où la misère est au-delà de ce que je pourrais vous exprimer »16.

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    Graphique IX. – Origines des « marchands en gros » français de Cadix (1714).

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    Graphique X. – Origines par villes des marchands français de Cadix (1714).

    Marchands en gros mariés
    – Pierre Tardy
    – Marc Antoine Beuillard
    Marchands en gros non mariés
    – Louis Robin, également député du commerce
    – André Casenède
    – Jean-Baptiste Lary et Antoine Athénas, commis de la maison lyonnaise Riverieux et Rolland
    Marchands en gros établis depuis la paix
    – Pons
    – Arvia
    – Jean Joseph Palerne et son associé Fayard
    – Guichard
    – Lambert

    Tableau XIV. – Les marchands en gros Lyonnais à Cadix (1714).

    5Quatre ans plus tard, le chancelier du consulat ne recense plus que neuf Lyonnais dans une deuxième « Liste des négociants et marchands français qui composent le corps de la Nation française à Cadix » : Lary, Arvia et Fayard n’y sont plus mentionnés, mais cela n’augure pas pour autant de leur départ, puisque ce nouvel inventaire n’énumère que des raisons sociales17. D’ailleurs, en 1721, Jean-Baptiste Lary est toujours cité par le consul Partyet comme associé de Jean-Antoine Athénas, quand leur maison, dans laquelle travaille également un troisième Lyonnais, Jean-François Sobias, qui fait fonction de commis, fait l’objet d’une visite de la part des autorités gaditanes18.

    6Près de soixante ans plus tard, en janvier 1777, la liste du consul De Mongelas énumère quant à elle 885 noms de Français installés à Cadix19. 119 d’entre eux sont associés dans une des 70 maisons de commerce et de négoce en gros qui dépendent alors de la nation française et sept sont qualifiés de « divers négociants », soit en tout 126 Français faisant ouvertement profession de commerce. Dix sept sont recensés comme natifs de Lyon : quinze sont associés en sociétés et appartiennent à neuf maisons de commerce différentes20, tandis que deux autres, Antoine Ginet et Fleury Barmond, sont répertoriés parmi les « divers négociants ». Presque aussi nombreux que les Bretons (18) et deux fois moins nombreux que les Basco-Béarnais (36), les Lyonnais forment donc le troisième contingent de négociants français installés dans la ville, soit 13,5 % de la classe négociante. En prenant en compte la présence de Jean-Claude Vial de Saint-Étienne, de Claude Monnot de Darthan en Bugey et de Louis François Garcin de Valromey, les natifs du Lyonnais supplantent même de peu les Basques. Mais en s’en tenant à un classement en fonction des villes d’origine uniquement, les Lyonnais s’imposent cette fois avec les Bayonnais, devant les Malouins et les Oloronais.

    7À Cadix où, selon Manuel Bustos Rodriguez, le terme de negociantes était assez peu usité, on qualifie alors ces négociants de hombres de negocio ou comerciantes. Ils ne tiennent pas boutique mais vendent en gros, « sous toile et sous corde », les caisses, balles et ballots de marchandises qui leur arrivent de France et qu’ils entreposent dans les magasins de leurs maisons ou dans des entrepôts situés sur le port. Dans un mémoire sur le commerce d’Espagne, le consul Partyet les qualifiait en 1723 de « hombres de negocio de puerta cerrada », pour les distinguer des marchands tenant « boutique ouverte21 ». Ils constituent donc l’élite de la société marchande. Mais dans leur ombre travaillent également de très nombreux marchands de moindre envergure et des petits boutiquiers22, ce qui porte à 375 personnes le nombre total de Français qui, en 1777, font profession de commerce à Cadix, commis compris. Parmi ces petits acteurs, nous avons repéré un marchand, deux boutiquiers, une boutiquière et sept commis venus de Lyon, ce qui monte au total à 28 le nombre de Lyonnais alors impliqués dans le monde du commerce gaditan23. Dans cette configuration, l’élément lyonnais constitue toujours la troisième entité de la colonie française avec 7,5 % des effectifs, toujours derrière les Bretons – 33 personnes, soit 8,8 % du total24 – et les Basco-Béarnais qui, à eux seuls, représentent la moitié des effectifs de la colonie marchande avec 189 ressortissants. Il apparaît donc incontestable que la communauté lyonnaise constitue un élément incontournable de la colonie marchande française établie à Cadix. Encore faut-il que cette forte représentation du négoce lyonnais présage du rôle effectivement joué dans l’économie gaditane.

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    Graphique XI – Origines des négociants français de Cadix (1777).

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    Graphique XII – Origines par villes des négociants français de Cadix (1777).

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    Tableau XV. – Les négociants et associés lyonnais à Cadix (1777).

    – Léonard Mallet, marchand
    – Jean Champagne, boutiquier
    – Maurice Joannon, boutiquier
    – Magdeleine Pinet, boutiquière qui emploie quatre ouvrières, toutes lyonnaises d’origine, Marie Pinet, Jeanne, Marie et Françoise Carrel
    – Étienne Mondet, un des quatre commis de Cayla Solier Cabanes Jugla et Cie
    – Antoine Granjean, commis dans la maison de David Rivet
    – Antoine Pitra, commis dans la maison Vial et Montaud
    – Joseph et Pierre Delabat, les fils d’Étienne Delabat
    – Joseph Delorme, commis du boutiquier aixois Guillaume Barthélemy
    – Henry Blay, commis du boutiquier Jean Brunet, de Lunac.

    Tableau XVI. – Marchands, boutiquiers et commis lyonnais installés à Cadix en 1777.

    8Faute d’avoir eu accès au Padrón de los extranjeros de 1791 et à l’état des Franceses domiciliados de 1794 conservés aux archives municipales de Cadix, il ne nous a pas encore été permis d’établir le nombre de négociants lyonnais toujours présents à Cadix en 1791, ni de déterminer si quelques uns d’entre eux avaient fait le choix d’une intégration plus prononcée en préférant le statut de domiciliado à celui de transeunte. Nous disposons néanmoins d’une liste de membres de la nation datée de 1791, malheureusement antérieure à la Real Cedula du 20 juillet puisque établie le 6 avril précédent25. Soixante deux maisons françaises y sont recensées dont quatre « lyonnaises » : Durand Christin et Cie, Jourdan et Bérard, Guillaume Rey et Henri Goiran. Comparée à une autre liste établie huit ans auparavant pour les mêmes raisons, le remboursement des dépenses des députés de la Nation, cet état de 1791 révèle une augmentation du nombre de maisons françaises enregistrées auprès du consulat (62 contre 55 en 1783), mais une moindre représentation des Lyonnais parmi ces négociants puisqu’ils sont alors au moins neuf à être répartis entre sept maisons26 : Barthélemy Goiran et neveux, Durand Christin et Cie, Étienne Delabat et Cie, Vial et Montaud, Jourdan et Bérard, Guillaume Rey et Laurent Dominique Morel. Quant aux actes de chancellerie postérieurs à la Real Cedula de juillet 1791, ils n’attestent de la présence à Cadix que de François Brun, un négociant installé rue de la Manzana et dont le frère était médecin à Lyon, de Madeleine Pinet, veuve du marchand Maurice Joannon, qui tient boutique également dans le quartier de Rosario, calle San Francisco, tout comme Jean-Baptiste Flurant, un négociant dont le frère, François Raphaël est dit « citoyen de Lyon », de Lazare Caillon, marchand boutonnier calle Manzana, et de Guillaume Rey, « négociant français établi depuis plus de vingt ans en cette ville de Cadiz où il demeure rue saint Charles, paroisse du Rosaire27 ».

    9En recoupant et en croisant toutes nos sources, les listes dressées par les consuls et celles établies par les chanceliers lors de la tenue des assemblées de la Nation française28 ainsi que divers actes de chancellerie rédigés par les services consulaires comme, par exemple, des actes de procuration dont les signataires sont clairement identifiés comme « natifs de Lyon »29, nous sommes parvenus à identifier avec certitude 74 Lyonnais faisant pour leur compte profession de commerce à Cadix entre 1714 et 1793. Exceptés Louis Raymond qui se présente comme marchand orfèvre, Louise Zacharie, marchande de mode, Lazare Caillon, marchand boutonnier, Jean Bernard Mathieu qui dit « exercer son commerce », les douze « marchands en gros » de 1714 et les quatre boutiquiers de la liste de De Mongelas, tous les autres, soit près de trois sur quatre (72 %) sont désignés comme « négociants ». Ne soyons cependant pas dupes. Derrière le terme se profile une grande variété de situations dont témoignent les listes des membres de la Nation française qui regroupe les maisons qui ont pignon sur rue. On n’y retrouve que 41 de nos 74 patronymes, lesquels apparaissent dans 46 raisons sociales entre 1714 et 1791. Huit d’entre eux reviennent même régulièrement, dans 21 raisons sociales différentes : Lambert, présent dans trois sociétés entre 1714 et 1748 ; Vande, dans trois sociétés entre 1729 et 1778 ; Massip, dans quatre sociétés entre 1729 et 1777 ; Cusset dans deux sociétés en 1729 et 1736 ; Terrasson, dans deux sociétés, d’abord entre 1736 et 1746, puis de nouveau en 1777 ; Jourdan, dans trois sociétés entre 1755 et 1783 ; Delabat, dans trois sociétés entre 1757 et 1783 ; et Durand, dans deux sociétés entre 1763 et 1790.

    – Jean Albert (1742)
    – Arvia (1714)
    – Antoine Athénas (1714-1724)
    – Sébastien Barnier (1769-1774)
    – Charles Benoist (1750-1759)
    – Jean-Pierre Berard (1778-1790)
    – Marc Antoine Beuillard (1714-1718)
    – Jean Emmanuel Boisset (1766-1768)
    – Pierre Auguste Boisset (1771-1773)
    – Jean Boschet (1709-1719)
    – François Brun (1792)
    – Louis Cabaret (1783)
    – Lazare Caillon (marchand boutonnier ; 1792)
    – André Casenède (1714-1718)
    – Jean Zacharie Chalamel (1778-1779)
    – Jean Champagne (boutiquier ; 1777)
    – Philippe Charbonnet (1772)
    – Jean-Baptiste Chillet (1771-1790)
    – Daniel Cornabé (1736-1765)
    – Louis Cosme (1739-1745)
    – Charles Cureau (1753)
    – Dominique Cureau (1753)
    – Jean-Baptiste Cusset (1729-1736)
    – Étienne Defarge (1788)
    – Étienne Delabat (1762-1780)
    – Vital Delabat (1767)
    – Jean-François Demeure (1786-1791)
    – Frédéric Dubois (1751-1771)
    – Jean André Duon (1749)
    – Louis Durand (1771)
    – Pierre Durand (1771-1789)
    – Jean-Philippe Favar (1778-1786)
    – Claude Amédée Favre (1777-1778)
    – Fayard (1714)
    – Jean Baptiste Fluran (1793)
    – Maurice Joannon (boutiquier ; 1777)
    – Claude Jourdan (1777-1791)
    – Justinien Girardon (1749-1750)

    – Jacques Henri Goiran (1777-1791)
    – Philippe Guillaume Goiran (1777-1790)
    – Antoine Granjean (1753-1785)
    – Jean-Joseph Grivet (1768-1786)
    – Guichard (1714-1718)
    – Pierre Antoine Linossier (1780)
    – François Jourdan (1750-1783)
    – Pierre Jourdan (1755-1757)
    – Antoine Lambert (1714-1750)
    – Pierre Lambert (1746)
    – Jean-Baptiste Lary (1714-1721)
    – Léonard Mallet (marchand ; 1777)
    – Jean Massip (1729-1763)
    – Jean Augustin Massip (1777)
    – Jean Bernard Mathieu (1786)
    – Jean Laurent Dominique Morel (1771-1781)
    – Jean-Baptiste Morel (1777)
    – Jean Joseph Palerne (1714-1717)
    – Fleury (Florent) Palerne (1720-1723)
    – Magdeleine Pinet (boutiquière ; 1777-1783)
    – Pons (1714-1718)
    – Jean Querriau (1771)
    – Louis Raymond (md orfèvre ; 1784)
    – Guillaume Rey (1763-1792)
    – Louis Robin (1714-1742)
    – Jean-Baptiste Roubaud (1718-1726)
    – Jean-François Sobia (1721-1771)
    – Pierre Tardy (1703-1722)
    – Jean Terrasson (1736-1746)
    – Jean Vial (1743)
    – Antoine Vial (1764-1785)
    – Jean Chrisostome Vial (1772)
    – Claude Joseph Vial (1772-1774)
    – Jean Baptiste Vande (1729-1778)
    – Louise Zacharie (marchande de modes, 1785).

    Tableau XVII. – Liste des négociants lyonnais établis à Cadix (1714-1793).

    Le troisième corps de la Nation

    10Les négociants français qui comptent alors le plus dans le port andalou sont incontestablement ceux qui font partie de la Nation française et qui sont dûment enregistrés comme tels auprès de la chancellerie du Consulat. Trois à quatre fois par an, ses membres se retrouvent autour du consul et des députés qu’ils cooptent et renouvellent chaque année alternativement. Chargée de défendre auprès du ministre de la Marine et de l’ambassadeur de France à Madrid les intérêts et les privilèges du commerce et des ressortissants français installés dans la ville, cette assemblée a aussi pour tâche de secourir les compatriotes dans la difficulté, de gérer la chapelle Saint-Louis située dans le couvent San Francisco et d’organiser, pour toute la colonie française, fêtes et cérémonies pour partager les joies et les deuils de la famille royale, commémorer les victoires des armées du roi et célébrer la Saint Louis. Le dépouillement systématique des procès verbaux des assemblées de la Nation nous apprend qu’entre 1728 et 1791 le nombre de sociétés de commerce qui en sont membres a varié entre un minimum de 40 en 1748 et un maximum de 85 en 177130, l’effectif moyen étant supérieur à 60, compris la plupart du temps entre 62 et 65 maisons ou compagnies. Selon les années, le nombre de maisons lyonnaises que nous avons pu identifier évolue quant à lui entre deux et douze, le seuil de la dizaine n’étant atteint qu’à trois reprises en 1714, 1771 et 1777.

    11En fonction de leur capital et du volume d’affaires qu’elles traitent, ces maisons se répartissent en quatre classes jusqu’en 1771, puis en cinq, le seuil d’appartenance à la première classe étant fixé, après la réorganisation, à 150 000 piastres de capital31. Dix sociétés font alors partie de cette élite qui constitue à n’en pas douter l’aristocratie du commerce franco-gaditan, mais une seule est à direction lyonnaise, celle de Jean-Baptiste Vande.

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    Tableau XVIII. – Les maisons lyonnaises membres de la Nation française de Cadix, 1714-1791.

    12Pourtant, en 1729, une deuxième maison lyonnaise, Massip Cusset et Cie, faisait aussi partie des 14 sociétés de la première classe, jusqu’à sa dissolution en décembre 173132. D’abord associé à Jean-François Sobia sous la raison Sobia Vande et Cie, Jean-Baptiste Vande reste donc le seul Lyonnais au sein de l’élite, avant de s’associer en 1777-1778 avec Claude Amédée Favre, natif lui aussi des bords du Rhône. Dans la deuxième classe on trouve d’abord Cusset, associé entre 1732 et 1739 à Gilly de Montpellier, mais aussi Daniel Cornabé – Garnier et Cornabé – dans les années 1730 et 1740 puis, en 1771, quand le seuil d’admission est fixé à 75 000 piastres, les maisons de François Jourdan et de Pierre Durand – Durand Christin et Cie – et enfin, au terme de la décennie, celle des Goiran, après que Barthélemy Goiran ait associé à ses affaires ses deux neveux lyonnais, Philippe-Guillaume et Jacques-Henri. Dans la troisième classe sont d’abord apparus, au milieu des années 1730, les noms de Massip et Terrasson, puis celui de Lambert, sous les raisons Lambert père et fils, Pierre Lambert et Cie et Lambert et Marquès. En 1771, cette troisième classe, qui regroupe 14 sociétés dont le capital est compris entre 40 000 et 75 000 piastres, compte dans ses rangs deux maisons lyonnaises, Étienne Delabat et Cie et Vial et Montaud, qui sont rejointes par Jourdan et Bérard au début de la décennie suivante. Toutes les autres maisons et sociétés de négoce dans lesquelles sont associés des Lyonnais sont membres de la quatrième classe ou, après 1771, de la cinquième, créée pour séparer les compagnies dont le capital est compris entre 10 000 et 20 000 piastres de celles où il est inférieur à 40 000. Cette année-là, deux sociétés lyonnaises sont recensées parmi les 17 membres de la quatrième classe : celle de Guillaume Rey ainsi que Massip et Rouvière. Quant à la dernière classe, la plus nombreuse avec 33 sociétés inscrites, elle compte quatre Lyonnais parmi ses membres : Jean-Baptiste Chillet, Antoine Granjean, Frédéric Dubois et Laurent Dominique Morel. La liste de 1771 fait donc état de 11 « maisons lyonnaises » parmi les 84 répertoriées. C’est proportionnellement presque autant qu’en 1714 où on en comptait 10 sur 68 (17,6 %) et deux fois plus que dans les années 1730 à 1760 où le nombre de maisons de commerce tenues par des Lyonnais n’a jamais dépassé cinq. Ainsi, jusqu’à l’instauration du commerce libre en 1778, elles représentent entre 10 et 15 % des sociétés reconnues membres de la Nation française de Cadix.

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    Graphique XIII. – Les maisons lyonnaises membres de la Nation française de Cadix, 1714-1791.

    13La décennie qui précède la disparition du système monopolistique de la Carrera de Indias semble bien être la période où la présence des Lyonnais à Cadix et leur implication dans le négoce gaditan atteignent leur apogée. À cette époque ce sont très certainement une cinquantaine de Lyonnais qui vivent à Cadix. En effet, en parcourant dans son intégralité la liste dressée en 1777 par De Mongelas, on peut repérer 47 Lyonnais parmi les 885 noms énumérés par le consul (5,3 %). Certes, ils sont nettement moins nombreux que les Limousins (336) et les Basco-Béarnais (201), mais ils n’en constituent pas moins la troisième communauté française installée dans le port andalou33, une communauté dans laquelle l’élément marchand est dominant puisque, rappelons-le, les deux tiers d’entre eux au moins (28 à 31) exercent une profession directement liée au commerce.

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    Tableau XIX. – Négociants lyonnais membres de la Nation française (1729-1783)34.

    L’implantation des Lyonnais dans la ville

    14Il est possible, en s’appuyant sur les actes de chancellerie du consulat, de se faire une idée de la manière dont les négociants Lyonnais se répartissent dans la ville, car la plupart de ces actes indiquent l’endroit où réside le contractant. La quasi-totalité d’entre eux sont ainsi domiciliés « paroisse Sainte Croix ». La maison Sobia Vande et Cie se trouve d’abord « rue de Murguia », avant de se déplacer « rue du Vestuario » ; Delabat et Cie s’étaient d’abord installés « rue de la Véronique », comme Antoine Granjean domicilié lui aussi « rue Véronica » ; Guillaume Rey et Jean Zacharie Chalamel vivent « rue de Flamencos Borrachos » ; Jean-Baptiste Chillet « rue de la Palme » puis « rue de la Saline » ; Laurent Dominique Morel « rue Saint-Pierre » ; Pierre Durand « rue du Rosaire » ; les frères Vial « rue de Los Doblones » comme Pierre Charbonnet ; les autres noms de rues cités sont « rue de la Carne », « rue Saint-François », « rue Large », « rue Saint-Augustin », « rue du Chemin », « rue de la Manzana ».

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    Le quartier de Santa Cruz est indiqué en noir. Les quartiers où les négociants étrangers sont les plus nombreux sont El Ave Maria (no 3), El Rosario (no 4), San Roque y Boquete (no 2), Las Angustias y San Carlos (no 5) et Candelaria (no 10).
    Ill. I. – Les négociants lyonnais dans la ville de Cadix (d’après M. C. Lario de Oñate,La colonia mercantil británica e irlandesa..., op. cit).

    15Cette « paroisse de Sainte-Croix », que nous identifions comme le quartier de Santa Cruz, se trouve au sud de la ville. Dans son étude sur les colonies de négociants anglais et irlandais, María del Carmen Lario de Oñate, qui a étudié dans le détail le recensement de 1773, écrit ne disposer pour cette année là d’aucune donnée démographique sur ce quartier. Or, il ressort de son travail qu’à cette époque un tiers de la communauté étrangère de Cadix se partage entre les quartiers de El Ave María et de El Rosario situés à l’Est, côté baie, dans une partie de la ville qui, quand on y rajoute les quartiers de San Roque y Boquete, Las Angustias y San Carlos et Candelaria, abrite 2 202 des 3 966 étrangers alors dénombrés dans la cité andalouse35. Léna Le Roux, qui a étudié plus spécifiquement la colonie française de Cadix, a constaté que sur les 1 450 Français qu’elle a pu localiser dans la ville, un peu plus d’un tiers (36,75 %) vit dans les quartiers de El Rosario et Candelaria, dont les deux tiers de la communauté marchande, laquelle constitue alors 40 % de la population de ces deux quartiers36. Près de vingt ans plus tard, le recensement des étrangers fait en août 1791 en décompte 226 sur 5 067, soit 4,5 % seulement, dans le quartier de Santa Cruz, confirmant par ailleurs leur localisation dans l’Est de la ville et plus particulièrement dans les quartiers de El Ave Maria et de El Rosario où vit alors un quart de cette population exogène, l’ensemble des cinq quartiers cités précédemment abritant alors 2 438 étrangers, soit 48,1 % du total contre 55,5 % en 177337. El Rosario et Candelaria sont toujours les deux quartiers où les Français sont les plus nombreux – 499 sur 1 651, soit 30 % de la colonie – mais ils se sont davantage répartis dans la ville, notamment dans les quartiers de La Cuna (163 – no 9), El Ave Maria (150 – no 3), Las Angustias y San Carlos (138 – no 5), La Cruz de la Verdad (115 – no 17) et San Antonio (107 – no 8), les marchands représentant près de la moitié des Français qui résident dans les quatre premiers quartiers cités38. Il apparaît donc que les négociants lyonnais ne se sont pas vraiment établis dans un quartier où les étrangers représentent une part significative de la population, pas plus qu’ils ne résident là où les Français sont le mieux implantés. On les trouve donc plutôt en marge dans l’espace urbain gaditan. En outre, il est établi qu’à cette époque les négociants préfèrent de loin habiter face à la baie, là où se trouvent également le port, les entrepôts et les sièges des institutions qui gèrent les affaires de la Carrera de Indias. C’est donc dans cette partie Est et Nord-Est de la ville que se trouvent les plus riches demeures des maîtres du négoce gaditan, de grandes et belles demeures de pierre caractérisées notamment par leurs célèbres tours-miradors du haut desquelles on peut avoir l’œil sur toutes les activités qui se déroulent dans la baie39. Le quartier de Santa Cruz est par contre un quartier nettement plus populaire, où vivent plutôt des gens qui exercent des activités qui se trouvent dans l’orbite du grand commerce, en situation subalterne de dépendance par rapport à celui-ci, ainsi que des artisans mais aussi des nécessiteux40. Est-ce à dire pour autant que cet éloignement relatif de la zone portuaire et de la Calle Nueva, où bat si fort le pouls de l’économie gaditane, puisse signifier quelque chose quant à la nature des activités des négociants lyonnais ? Nous ne pouvons pas nous avancer dans cette direction sans précaution car, la ville étant petite, le port et ses entrepôts ne sont jamais très loin, quel que soit le quartier où l’on réside.

    La structure des maisons lyonnaises de Cadix

    16Comme c’est alors la règle dans les ports français de la façade atlantique, les maisons de négoce gaditanes sont, pour la plupart d’entre elles, des sociétés en commandite de type familial ou en nom collectif. Les maisons lyonnaises n’échappent pas à la règle. Parmi les maisons familiales, nous retrouvons Lambert père et fils, Massip et fils ou Delabat et Cie qui associe d’abord Étienne Delabat à son frère Vital, puis à ses fils Joseph et Pierre. Quant à Philippe-Guillaume et Jacques-Henri Goiran, arrivés de Lyon vers 1777, ils font vraisemblablement leurs premières armes sur la place de Cadix comme commis de leur oncle Barthélemy (natif de Saint-Hippolyte en Languedoc) qui les associe ensuite à son affaire sous la raison Barthélemy Goiran et neveux, avant qu’ils ne prennent sa succession au cours des années 1780. La dimension familiale de la société peut également s’étendre à des membres restés en France et qui, souvent en tant que partenaires commerciaux privilégiés, sont associés au capital de l’entreprise : c’est le cas, par exemple, d’Étienne Muret et de Pierre Roger, tous deux marchands à Lyon, que leur beau-frère Jean Terrasson associe au capital de la maison qu’il fonde à Cadix avec Jean Massip en septembre 173741. Mais l’association à caractère familial n’est pas la règle, pas plus que l’association entre Lyonnais, même si elle paraît être fréquente. Parmi les neuf maisons repérées dans la liste de 1777 pour compter au moins un Lyonnais parmi leurs associés, six regroupent exclusivement des partenaires originaires de la cité rhodanienne. Les exceptions sont alors Pierre Durand, associé à un Suisse d’Aubonne, Gabriel Christin, Antoine Vial, associé à Pierre Montaud de Bayonne mais aussi à un parent stéphanois, Jean-Claude Vial, et les Delabat qui, à cette époque, ont associé à leur affaire un Marseillais, Jean Durbec.

    17D’autres négociants lyonnais sont venus s’installer à Cadix pour y représenter les intérêts d’un commanditaire établi dans leur cité d’origine. Les plus aisés à identifier restent ceux qu’un lien de parenté unit à leur maison mère. Ainsi Louis Cosme travaille en liaison avec son frère Jean Mathieu, marchand commissionnaire lyonnais pour le compte de qui il charge pour les Indes des textiles et des quincailles de Thiers42. De la même manière, Frédéric Dubois est certainement lié à ses débuts à la maison Archimbaud Dubois et Cie, dont son frère Louis est un des associés43. Cusset, associé avec Massip, puis avec Gilly, est très certainement lié à la maison lyonnaise du même nom, Cusset et Cie. Jean-Baptiste Chillet écoule de son côté des pièces d’étoffes et des vestes achetées à son cousin Fiard, jusqu’à ce que les prix « très surchargés » de celui-ci l’obligent « à baisser pavillon » et se tourner vers d’autres fournisseurs44. Quant à Justinien Girardon, il conduit des affaires en commun avec son frère Étienne, négociant établi sur le quai des Augustins45. Mais la maison Rey Brandenbourg et Cie est le meilleur exemple que nous connaissions de société en commandite liée à une maison lyonnaise, en l’occurrence Rey Magneval. Fils d’Antoine Rey et neveu de Barthélemy Magneval, Guillaume Rey est arrivé à Cadix en 1763, comme la chose était alors fréquente dans les milieux du grand négoce, pour parfaire sa formation et s’initier au commerce gaditan auprès de Louis Feyt, alors principal commissionnaire de la firme familiale. Après un an et demi d’apprentissage, il quitte son mentor pour s’associer avec Jean-Frédéric Brandenbourg, un négociant d’origine suédoise. Guillaume se substitue alors à Feyt dans l’organigramme de la maison Rey Magneval en prenant en main la défense des intérêts commerciaux et financiers de la société lyonnaise, pour le compte de qui il prospecte le marché gaditan, charge des marchandises sur les navires de la Carrera, réceptionne et fait suivre les retours d’Amérique, conclut des prêts à la grosse, etc. Le décès de son oncle et la disparition de la maison mère en 1767 le libèrent de ses obligations, lui permettant alors de poursuivre ses activités pour son seul compte et de les élargir vers de nouveaux horizons, le Nord et les ports de la Baltique en particulier. Nous le retrouvons en 1777, recensé sous son seul nom, au côté de ses deux frères Philippe et Pierre, puis répertorié, lors des assemblées de la Nation, parmi les représentants des maisons de la troisième classe, une position qui témoigne à la fois de sa réussite dans les affaires et de son implantation durable au sein de la colonie française de Cadix qui, d’ailleurs, l’a désigné comme député dès 1771. Autre exemple sur lequel nous reviendrons par la suite, Antoine Granjean s’installe à Cadix à la fin de l’année 1752 à l’initiative de son beau-frère Antoine Linossier, un important marchand passementier de Lyon. Pendant une dizaine d’années, il travaille exclusivement à son service avant de s’émanciper non sans difficultés de cette tutelle. Travaillant seul et, de ce fait, traitant des affaires de moindre envergure que celles que peuvent faire des maisons en nom collectif qui emploient un ou plusieurs commis, Antoine Granjean est, à partir de 1771, enregistré dans la cinquième classe de la Nation, comme Jean-Baptiste Chillet. Quant à Jean Palerne, il s’installe à Cadix au lendemain du traité d’Utrecht pour y représenter au mieux les intérêts de la société de commerce qu’il avait fondée quelques mois plus tôt, le 1er juillet 1712, avec deux autres marchands lyonnais, Rousseau et Simonnet. En juillet 1717 la société est dissoute46 mais Palerne reste sur place.

    18Si les maisons auxquelles appartiennent ces Lyonnais sont à l’image de toutes leurs consœurs françaises présentes sur la place gaditane dans le dernier tiers du XVIIIe siècle, alors elles pourraient être assez souvent animées par des hommes plutôt jeunes, trentenaires ou quadragénaires, et célibataires. C’est le cas notamment de Charles Benoist qui, après avoir mené une « vie solitaire [...] dans ce pays, sans femme, enfant ni maîtresse47 » meurt ab intestat le 13 juin 1759, avec pour seuls légataires sa tante, Mme Dessain de Lyon et une fille naturelle avec qui elle décide de partager « à l’amiable [...], soit par générosité et amitié, soit pour éviter les longueurs d’une liquidation » un héritage estimé aux environs de 10 000 piastres48. Toutefois, il est assez risqué d’extrapoler sans avoir eu la possibilité d’étudier de plus près cette petite communauté lyonnaise à partir des sources de recensements disponibles aux Archives Historiques Municipales de Cadix. Et ce d’autant que, au sommet de la hiérarchie, se trouvent en général des négociants plus âgés et plus intégrés dans la société gaditane comme doivent vraisemblablement l’être Pierre Tardy, le plus ancien négociant de la Nation en 172249, ou Jean-Baptiste Vande un demi siècle plus tard. Malheureusement, les sources dont nous disposons en France ne nous permettent pas de nous faire une idée précise du degré d’intégration de ces Lyonnais à la société espagnole, au-delà du fait qu’ils puissent parfois être mariés à une Espagnole, comme Marc Antoine Beuillard ou Pierre Tardy par exemple. Aussi nous n’irons pas au-delà pour l’instant et nous contenterons d’émettre l’hypothèse que quelques uns de nos négociants, par exemple Massip, Lambert et peut-être Delabat, ont pu faire souche à Cadix dans la mesure où, après eux, leurs fils paraissent prendre la suite de leurs affaires.

    19Il ne saurait alors y avoir en Europe de place marchande aussi parfaite que Cadix pour initier aux subtilités du grand commerce de jeunes négociants entreprenants ou pour compléter la formation de fils appelés un jour à prendre les rênes d’une maison familiale déjà engagée dans ce type de négoce. Comme André Lespagnol a pu le montrer, les grandes familles du négoce malouin, qui se sont imposées dès la fin du XVIIe siècle à la tête de la colonie française de Cadix, ont été les premières à mettre en place entre leur ville et Cadix un procédé, d’« apprentissage par le comptoir50 » incluant un long séjour de formation aux commerces d’Espagne et des Indes auprès d’un oncle, un cousin ou une relation d’affaires établie dans le port andalou, afin de préparer leurs fils à prendre un jour la succession de leurs pères et de leurs oncles à la tête des affaires familiales. C’est en effet chose courante dans le monde du grand négoce international que le cursus de formation suivi par les fils comprenne un stage de plusieurs années à l’étranger, dans une maison amie. Ainsi les Bordelais envoient-ils leurs fils en apprentissage en Hollande, en Allemagne ou en Suisse, mais parfois aussi en Angleterre ou en Irlande51, à la fois pour parfaire leur connaissance des réseaux et des circuits commerciaux et pour s’y perfectionner dans la pratique des langues étrangères. Lorsque le jeune Guillaume Rey arrive à Cadix en décembre 1763, il a certainement déjà acquis dans un des quelques trente pensionnats privés que compte alors sa ville natale, et que fréquentent les fils de la bourgeoisie marchande lyonnaise, tout ce qu’un jeune homme de sa condition doit savoir pour devenir un « parfait négociant »52 : une belle écriture et une bonne orthographe, toutes les connaissances indispensables en « arithmétique marchande » et dans le domaine des changes, des bases solides en histoire et en géographie, sans oublier les rudiments des principales langues étrangères qu’il pourrait être amené à utiliser dans le cadre de son activité future, laquelle le prédispose naturellement à s’orienter vers ce commerce d’Espagne, devenu une part essentielle de l’activité de la maison Rey Magneval. Recommandé par son père et son oncle, il entre au service de leur nouvel associé, Louis Feyt, qui accepte de « l’occuper à quelque chose pour ne pas le rendre oisif53 ». Cette pratique n’est pas exceptionnelle, puisqu’au même moment André Linossier fait ses premières armes « dans une maison où il se fait de grosses affaires » et où l’a placé son oncle Antoine Granjean, afin de l’initier lui aussi au commerce de Cadix54. Elle n’est pas nouvelle non plus puisque déjà, en 1713, Rolland et Chambon avaient accepté de prendre chez eux, moyennant le paiement d’une pension, le fils d’un des associés de la maison Chalut-Lamure, un jeune homme âgé « de 20 ou 22 ans » pour qui ils promettaient alors d’avoir « tous les égards possibles55 ». Aussi pouvons-nous mettre en parallèle ces jeunes Lyonnais avec les jeunes Malouins, les Magon, les Eon ou les Le Fer, qui rejoignaient pour plusieurs années les succursales gaditanes de leurs maisons familiales, non pas pour y travailler comme simples apprentis mais, comme l’écrit André Lespagnol, en tant que « juniors partners » dotés d’instructions très précises concernant la conduite des affaires familiales et d’un capital leur permettant de s’associer avec un négociant plus aguerri afin de se préparer à une installation durable dans le port andalou. D’ailleurs en 1751 et 1753, Magneval avait eu l’occasion à deux reprises de recommander à son correspondant d’alors, Charles Benoist, deux autres jeunes gens, d’abord un dénommé Durand, arrivé à Cadix le 29 octobre 1751 et entré quatre jours plus tard au service de Benoist qui avait profité de « ses quelques lumières sur les parties doubles » pour lui confier la tenue de ses livres56 ; puis Granier, un autre jeune Lyonnais en quête d’une maison gaditane où se placer, chose devenue difficile tant en raison du nombre important de jeunes gens qui arrivaient « quotidiennement » dans le port andalou que du contexte qui incitait davantage les maisons de commerce à réduire leur personnel plutôt qu’à l’augmenter57. Mais si des négociants lyonnais envoient leurs fils compléter leur formation à Cadix, la réciproque existe aussi. Cette même année 1753, Magneval prend à son service pour quatre ans un « petit bonhomme » du nom de Marin, que lui a recommandé Benoist. Il envisage alors de récupérer le montant de la pension du jeune homme auprès du père de Durand, l’employé de Benoist à qui il propose d’en faire autant auprès du père de Marin, démarche qui « répugne beaucoup » à Benoist au motif, affirme-t-il, que « lorsque l’on travaille, l’on doit tout au moins gagner la table »58.

    Les activités des négociants lyonnais à Cadix : Antoine Granjean et Guillaume Rey

    20Présents tous deux à Cadix dans les années 1760 et 1770, Antoine Granjean et Guillaume Rey sont représentatifs des négociants lyonnais établis dans la ville et présentent un certain nombre de traits communs. à près de dix ans d’intervalle, ils s’installent en Andalousie pour représenter les intérêts de parents déjà coutumiers du commerce de Cadix, un beau frère pour le premier, un père et un oncle pour le second, qui les recommandent chacun à une de leurs relations d’affaires, afin qu’ils soient initiés rapidement aux subtilités du commerce gaditan. Au cours de leur long séjour à Cadix, tous deux suivent des parcours parallèles : ils agissent d’abord comme simples consignataires pour le compte de leur maison mère, puis s’émancipent de cette tutelle pour travailler d’abord en commissions, avant de devenir des négociants reconnus au sein de la communauté française de Cadix. Tous deux font des marchandises de Lyon le principal objet de leur commerce et s’emploient d’abord à leur trouver des débouchés auprès des marchands et boutiquiers de la ville. Puis ils élargissent leurs activités en s’engageant dans le commerce des Indes, d’abord par l’intermédiaire de chargeurs (cargadores), puis en recourant aux services de testaferros. Profitant d’un contexte redevenu favorable au commerce américain après la guerre de Sept ans, ils investissent dans le prêt à la grosse aventure, notamment en fournissant des marchandises à des marchands qui partent pour les colonies. De son côté, en fondant une société en commandite avec des partenaires suédois et russe, Rey se lance également dans le commerce avec la Baltique, tandis que Granjean, lui, conçoit un projet de société d’assurances maritimes. Enfin, grâce aux liens épistolaires qu’ils ont toujours maintenus avec leur ville d’origine, nous disposons pour tous les deux d’une correspondance très riche, par son volume dans le cas de Granjean, par son contenu dans le cas de Rey, ainsi que de papiers d’affaires qui permettent de reconstituer en partie leurs activités sur la place de Cadix.

    21En 1777, le consul de Mongelas mentionne Rey et Granjean dans sa liste des négociants et boutiquiers français de Cadix59. Guillaume Rey est alors associé à ses frères, Philippe et Pierre, emploie deux commis, Pierre Pauque et Francis Cap, tous deux Basques, et six domestiques. Antoine Granjean, qui a fait faillite en 1775, est quant à lui enregistré parmi les commis, au service de la maison David Rivet, une des principales maisons languedociennes de la ville. Mais quelques années plus tôt, en 1771, nous les retrouvons tous deux parmi les signataires d’un procès verbal d’une assemblée de la nation. Recensé depuis 1755 au sein de la quatrième classe de la nation, Granjean vient d’être relégué dans la cinquième classe créée pour rassembler les maisons dont le capital est inférieur à 20 000 piastres. Rey, dont le capital est compris entre 20 000 et 40 000 piastres, émarge parmi les membres de la quatrième classe, où on le retrouve encore en 178360. Mais entre temps, il a l’opportunité de devenir député de la nation, et à ce titre porte-parole des négociants français de Cadix, en 1772 et 1773.

    Antoine Granjean, de la consignation au commerce des Indes61

    22Fils d’un marchand-banquier lyonnais originaire de Saint-Chamond, Antoine Granjean a presque 33 ans quand il s’installe à Cadix, en décembre 1752. Il arrive de Bordeaux, où il a travaillé pendant quelques années chez Antoine Limonas, un négociant bordelais qui pratiquait le commerce des Îles, et où il a également représenté les intérêts de son beau-frère Antoine Linossier, un des plus importants passementiers de la place de Lyon. En s’installant chez Pierre Bastia, un négociant français à qui Linossier l’a recommandé, il découvre les particularités du commerce gaditan. Exécutant scrupuleux des directives de son beau-frère, il réceptionne les caisses de rubans qui arrivent de Marseille, du Havre ou de Bayonne, les remet à leurs destinataires, au besoin règle avec eux quelques litiges portant sur la qualité des marchandises reçues, recouvre, non sans difficultés, les créances ou, sur requête de son commettant, retire de chez certains débiteurs les « effets et marchandises » encore en leur possession. Comme tout consignataire, il s’emploie également à prospecter de nouveaux clients pour Linossier qui, à cet effet, lui envoie régulièrement des coupons d’étoffes ou des cartes d’échantillons, afin qu’il puisse leur présenter les dernières nouveautés de la maison. Il lui arrive aussi d’agir ponctuellement comme procureur d’autres marchands lyonnais, auprès de qui il a été recommandé par Linossier. Ses premières commissions portent bien entendu sur des rubans et sur des soieries, « taffetas et autres », sur des bas, des brandebourgs, des garnitures de soie, et même sur « quelques caisses de clous » de Saint-Chamond et sur « onze exemplaires de six volumes chacun du Dictionnaire du commerce et du Parfait négociant »62. Un an après son arrivée, Granjean est déjà au fait de beaucoup de choses mais, la conjoncture s’étant assombrie après la banqueroute de plusieurs maisons françaises pourtant réputées solides, Antoine Linossier préfère « resserrer [son] commerce » et repousser son projet de confier à Granjean la direction d’une filiale, dans l’attente de « temps plus favorables63 ». Alors que les articles de Lyon se vendent moins bien qu’auparavant, la rupture entre la France et Angleterre, instaure de nouveau sur les mers une insécurité préjudiciable au commerce. Linossier envisage alors de mettre définitivement fin à ses activités en Espagne, au point de presser Granjean de vendre ses rubans « à quelque prix que ce soit [...], pourvu que ce soit à des bons débiteurs et de prompt paiement64 ». Le spectre de la faillite menace :

    « Depuis votre départ, au lieu d’avoir augmenté, mon fonds a diminué d’un quart puisque, Dieu le veut, le nombre des banqueroutes que j’ai essuyées ou que j’essuie tous les jours, altère mon crédit. C’est pourquoi je suis contraint de ramasser tout le peu que je peux pour resserrer mon commerce et vivre un peu plus tranquille. C’est pourquoi je vous prie de sacrifier tout ce qui vous reste pour ensuite prendre la route de Lyon65. »

    23Mais Antoine Granjean n’entend pas rentrer. Après trois années passées à Cadix, il sent que son tour est venu de se lancer « pour son compte » dans les affaires, fort de la connaissance qu’il a désormais des rouages du commerce gaditan :

    « Je vous dirai sincèrement que je pense pouvoir mieux faire mes affaires ici parce que, comme je commence à y être un peu connu, il me serait aujourd’hui plus facile de pouvoir y former un établissement où vous seriez le maître d’y prendre l’intérêt que vous souhaiteriez66. »

    24L’association avec Linossier ayant pris fin, les affaires d’Antoine Granjean prennent une autre ampleur. De simple consignataire, il devient marchand commissionnaire et construit son propre réseau de fournisseurs et de clients, en utilisant à la fois les relations qu’il s’est faites dans l’entourage de Linossier, les contacts qu’il a eus avec des Lyonnais de passage à Cadix et les liens noués sur place avec des compatriotes avecindados ou avec des marchands et des boutiquiers espagnols. Le détail de sa correspondance nous permet d’identifier une quarantaine de maisons lyonnaises avec lesquelles il entretint des relations épistolaires au cours de ses 13 années d’activité à Cadix. Outre Antoine Linossier et ses fils et successeurs, nous retenons parmi ses principaux contacts les maisons Miremont et Cie (1756-1759), Jean Prost (1761-1763), Dupré et Poncelet (1758-1762) puis Poncelet et Cie (1761-1769), Alhumbert frères (1760-1769), Verrier et Perrottier (1760-1766) et Rouge et Cie (1762-1766). Tant que l’état de guerre perdure, Granjean agit tantôt en commissionnaire de maisons gaditanes, tantôt pour son propre compte. Il achète des rubans – en dorure, en velours, or et argent – des étoffes, mais aussi toute la gamme des « articles de mode » qui font la réputation de Lyon, bas de soie, jarretières, gants, mitaines, chapeaux, garnitures brodées, bourses à cheveux, galons, boutons, qu’il redistribue ensuite auprès de marchands et de détaillants gaditans dont il n’est malheureusement pas possible d’établir la liste détaillée, dans la mesure où leurs relations devaient être directes et non épistolaires. Dans sa correspondance avec Lyon il n’est d’ailleurs question que d’« amis » de Cadix qui lui remettent leurs mémoires, sans précision d’identité. Certains noms peuvent toutefois être repérés sur ses registres de factures67 mais, en les parcourant, nous n’avons pas retrouvé de grandes maisons de commerce françaises, ces dernières préférant en effet se fournir directement auprès de fournisseurs ou de commissionnaires attitrés, ce qui semble confirmer notre hypothèse selon laquelle les clients et commettants de Granjean sont plutôt des détaillants et des boutiquières. Aussi le réseau d’affaires d’Antoine Granjean nous apparaît-il à son échelle, un réseau assez modeste qui intègre d’un côté des marchands et des fabricants lyonnais auxquels le rattachent parfois des liens familiaux68, et de l’autre des détaillants et quelques chargeurs gaditans.

    25Avec le retour de la paix, Antoine Granjean élargit encore le champ de ses activités et peut dorénavant être considéré comme un négociant à part entière. Enregistré une première fois sur les listes de la Nation en 1755, quand il est rajouté avec trois autres marchands à la liste des 25 maisons de la quatrième classe, il y figure toujours en février 1763, avant d’être reclassé parmi les 33 négociants membres de la cinquième classe après la réorganisation de 1771, auprès des Lyonnais Jean-Baptiste Chillet, Frédéric Dubois et Laurent Dominique Morel, ce qui permet alors d’estimer son capital entre 10 000 et 20 000 piastres69. Pendant cette deuxième décennie d’activité, Granjean, qui a désormais rompu avec Linossier après que ce dernier ait décidé, en 1762, de « [se] retirer de ce maudit pays qui ne [lui] a causé que perte et inquiétude70 », étend ses activités à d’autres marchandises et articles de mode de Lyon, élargit son aire commerciale aux villes voisines de Puerto de Santa María, Sanlúcar et Jerez, ou plus éloignées comme Séville, Grenade, Valence et Madrid, mais surtout s’engage ouvertement dans le commerce des Indes en faisant, dès que l’occasion se présente, charger des marchandises pour la Mer du Sud ou sur les flottes de la Nouvelle-Espagne. Devenu bon connaisseur des affaires de Cadix, il est régulièrement consulté par ses neveux Linossier et Cibial et n’hésite pas à prodiguer de judicieux conseils à tous ceux que tente le commerce de Cadix et qui cherchent des renseignements sur la solvabilité de telle ou telle maison gaditane71. Ainsi, quand après la mort d’Antoine Linossier, ses deux neveux, qui viennent de fonder chacun leur propre maison sous les raisons de Linossier fils aîné et François et Linossier Peyrol et Cie, le sollicitent pour reprendre leurs relations d’affaires, il ne leur cache pas que les conditions du commerce entre Lyon et Cadix ont changé au cours de la décennie écoulée. D’une manière générale, les marchandises de Lyon sont moins recherchées qu’auparavant en Espagne et si Cadix reste, avec Madrid, en mesure d’offrir des débouchés, ceux-ci sont désormais américains. Le temps des commissions est par ailleurs révolu et le marché gaditan n’est désormais accessible qu’à ceux qui acceptent de s’implanter sur place ou, à défaut, de « s’intéresser dans une maison » et qui sont prêts à courir tous les risques inhérents au grand commerce maritime et à se plier aux longs délais de paiement :

    « Il y a plusieurs villes en Espagne où vous pouvez faire des affaires relativement aux marchandises que l’on tire de vos fabriques. Les principales sont Bilbao, Barcelone, Pampelona, Saragosa, Madrid, Toledo, Ciudad Rodrigo, Cordoba, Jaén, Sevilla, Granada y Cadiz. Mais à l’exception de Madrid et de Cadix, je pense que les autres villes ne font pas aujourd’hui une grande consommation. Dans ces dernières il y a peu de bons débiteurs. Il s’y en trouve un ou deux et en général les difficultés y sont à craindre. C’est pourquoi, si vous prenez des mémoires, vous devez bien prendre garde à connaître parfaitement les maisons de qui vous les recevez. Il me doute que plusieurs négociants de chez vous et d’ailleurs y ont fait les uns après les autres beaucoup de mauvaises affaires. La maison de Rey et Magneval et celle de Miremont, qui l’une et l’autre ont travaillé avec ce qu’il y avait de meilleur et de plus solide à Madrid et dans les autres villes, s’y sont ruinées, malgré du commerce considérable et avantageux qu’elles y ont fait autrefois en ouvrages de mode et broderie. Vous trouverez à y placer des marchandises, mais ce ne sera pas en grande quantité, attendu que Valence, Grenade, Séville et Barcelone fournissent aujourd’hui la majeure partie des soieries et galons qui se consomment et que les étoffes en dorures n’y ont plus le même débouché qu’elles y avaient il y a quelques années.
    [...] il vous conviendrait d’être intéressé dans une maison que vous auriez formée. Vos affaires lui seraient toujours plus présentes qu’elles le seraient à toute autre avec qui vous n’auriez que des liaisons interrompues. En travaillant aux siennes, elles travailleront à vous procurer celles qui seraient relatives à votre commerce particulier. Vous la soutiendriez dans ses opérations et elle serait peut-être aussi dans le cas de soutenir quelques fois les vôtres lorsque de part et d’autre elles auraient été bien réfléchies. Les circonstances sont aujourd’hui plus favorables pour former cet établissement qu’elles ne l’ont été depuis longtemps. Il paraît que les affaires seront plus solides à l’avenir, qu’elles seront plus partagées qu’elles ne l’ont été et que l’on pourra travailler avec plus de sécurité que l’on ne travaillait auparavant72. »

    26Depuis que le système des flottes a été rétabli par l’ordonnance du 11 octobre 1754, Antoine Granjean nourrit d’autres ambitions, bien que la conjoncture soit toujours difficile. Soieries et rubans abondent à la Vera Cruz, à Carthagène et à Lima, et se vendent mal. De leur côté, les plus grandes maisons gaditanes, comme Magon Le Fer frères par exemple, préfèrent miser sur les toiles de Silésie et déclarent sans détour ne vouloir « spéculer sur aucun article de Lyon73 ». Pour réussir dans son entreprise, Granjean doit donc disposer des meilleurs articles qui soient, des étoffes de qualité mais pas trop chères, en mesure de rivaliser avec les articles de Nîmes ou de Valence. Il doit aussi traiter avec les plus grandes maisons de Cadix, celles de la première classe de la Nation, les seules avec qui, estime-t-il, de bonnes affaires peuvent encore être conclues, à condition toutefois de se plier aux pratiques et aux usages locaux et d’accepter de vendre en participation74. « Il faut du temps dans ce pays pour pouvoir réussir. Mais quand l’on commence à travailler, les affaires sont souvent brillantes et avantageuses75. » Pour répondre au mieux aux demandes des marchés américains, Antoine Granjean se renseigne sur ce qui s’y vend le mieux. Ainsi il peut expliquer à Dupré et Poncelet que, face à la concurrence des bas noirs et blancs de Nîmes et de Gênes qui se débitent bien au Pérou, il vaut mieux privilégier les bas de soie de couleurs et assortis pour femmes tandis que, face aux soieries valenciennes bon marché, il faut miser désormais sur les gros de Tours « sans nuances or et argent » ou « blanc et or avec nuances », tout en veillant à ce que les dessins soient nouveaux et d’un très joli goût, que les dorures soient bien distribuées et que les prix soient modérés76 ». Aucun détail ne doit être négligé, et Granjean informe à la fois ses fournisseurs sur les couleurs à privilégier – « les couleurs les plus courantes pour la Mer du Sud sont [...] cerise fin, incarnat, cramoisi, pourpre, bleu mignon, jonquille, jaune citron [et] vert77 » – et sur les motifs les plus appréciés :

    « Il faut que la dorure soit bien belle et les dessins de très bon goût, propres pour les vestes [...], que les nuances [des fonds d’or] soient en lilas ou bleu et très peu de rouge, que dans les dessins il n’y ait ni châteaux ni tours, mais seulement des fruits et des fleurs bien légèrement distribués pour ne pas éteindre l’éclat de la dorure qui doit être d’un bel or [...], que l’étoffe [des gros de Tours] ait beaucoup de corps, que les dessins soient beaux et nobles et propres pour habits des femmes78. »

    27Après le rétablissement de la paix en 1763, Granjean s’engage davantage encore dans le commerce avec l’Amérique espagnole. Toujours attentif aux évolutions des marchés espagnol et américain, il continue d’informer ses partenaires lyonnais sur le mouvement des flottes et des registros, en les incitant d’ailleurs à privilégier les expéditions vers la Mer du Sud ou vers Buenos Aires, génératrices de meilleurs profits pour qui s’informe bien sur les besoins et les goûts spécifiques à chacun de ces marchés. Attentif aux recommandations de ses compatriotes les plus aguerris comme Jean-Baptiste Vande et Sobia, Granjean ne manque pas de prodiguer à ses correspondants lyonnais « les indications, les conseils et les lumières79 » les plus précieux qui soient pour réaliser de belles affaires, et les renseigne à la fois sur l’état des marchés américains et sur les mouvements de navires entre Cadix et les Indes :

    « L’on se flatte aussi que dans le mois de septembre prochain nous aurons ici les fonds de la dernière Flotte qui sont restés à la Nouvelle Espagne pendant la guerre. Ce sera un objet de 25 à 27 millions de piastres et de 2 à 3 millions de fruits comme cochenille et indigos. Ce secours donnera une face brillante aux affaires qui sont actuellement languissantes par la rareté de l’argent sur cette place80. »

    28Lorsqu’il rédige en 1772 son « idée générale du commerce actuel de Cadix », dans le but de proposer un projet de compagnie d’assurances maritimes, Granjean joint à son mémoire deux relevés très intéressants qui témoignent à la fois de sa connaissance de tous les rouages du négoce gaditan et de son envie d’intégrer l’élite de la Nation française81. Le premier détaille le nombre « des vaisseaux des Indes et des fonds qu’ils ont rapportés en argent et en fruits registrés » entre 1753 et 1767, ainsi que le nombre de navires de registre qui ont quitté Cadix au cours de cette même période. Le second recense le nombre de « navires d’Europe qui sont entrés à Cadiz dans le courant des 14 années [1753 à 1766] ». Selon le premier décompte, 392 vaisseaux seraient revenus des Indes entre 1753 et 1767, rapportant pour plus de 322 millions de piastres « en argent et en fruits », des cargaisons, dont il détaille d’ailleurs une partie dans une « Récapitulation de l’or, l’argent et les fruits qui sont venus de l’Amérique espagnole », dans laquelle il précise, pour chacun des 243 navires dont il a eu communication de la « note imprimée », le détail et la valeur des cargaisons. Dans le même temps, 307 registros ont appareillé pour les Indes, en plus des 24 vaisseaux des flottes de 1765 et 1768. Quant au grand cabotage européen, il a fait passer par la baie de Cadix 5699 navires soit, à l’exception de l’année 1762 qui n’en voit passer que 130, une moyenne de 428 par an, les deux tiers d’entre eux transportant des denrées alimentaires et des matières premières, « fer, bois, etc », et le tiers restant des « marchandises, soieries, toiles, lainages » indispensables à l’activité de nos négociants lyonnais. Ces quelques documents témoignent alors de la bonne santé générale du négoce gaditan au début des années 1770, alors que Madrid vient de prendre les premières mesures en faveur de la libéralisation du commerce américain en permettant aux étrangers de charger ouvertement des marchandises sur les flottes sous le couvert de cargadores espagnols « matriculés dans la Carrière des Indes »82. Les affaires reprennent et le retour des Lyonnais à Cadix se confirme : « Il n’y a point de place dans le royaume où l’on puisse faire des affaires solides et d’une certaine étendue comme Cadix. Il n’y faut pas actuellement pour les Indes ou pour le pays peut-être le quart des marchandises de Lyon qui s’y consommaient autrefois, mais le commerce qui s’y fait a plusieurs autres branches avantageuses où l’on peut s’attacher83. » Pour répondre à la demande de soieries, de rubans, de galons et autres productions de leur Fabrique, les négociants lyonnais n’hésitent plus désormais à envoyer « des personnes qui résident à Cadix et qui vendent les marchandises qu’on leur remet » et auprès de qui les Espagnols « peuvent choisir ce qui leur convient mieux [plutôt] que de demander des assortiments qui, souvent, ne leur plaisent pas lorsqu’ils les reçoivent84 », une pratique à laquelle la maison Rey Magneval fut certainement l’une des toutes premières à recourir en installant sur place, dès 1763, le fils d’Antoine Rey, Guillaume.

    Guillaume Rey : l’engagement d’un Lyonnais dans la Carrera de Indias

    29La période d’activité de Guillaume Rey correspond à ce qui nous semble être l’apogée du commerce entre Lyon et Cadix. Entré au service de Louis Feyt à la fin de l’année 1763, il ne tarde pas à s’émanciper et fonde sa propre maison dès 1765 en association avec les marchands Jean Frédéric Brandenbourg, chargé d’affaires de la Suède à Cadix et consul de Russie, et Jean Kabatskoy, beau-frère de Brandenbourg et natif de Saint-Pétersbourg. Depuis Lyon, la maison Rey Magneval ne reste certainement pas étrangère à l’affaire, puisque la société sera dissoute en 1767, suite à la liquidation de la maison mère, pour qui Rey Brandenbourg et Kabatskoy n’aurait pu être qu’un satellite, un prête-nom lui permettant d’écouler directement les articles de son commerce sur la place andalouse. D’emblée les objectifs de Guillaume Rey sont affichés. Il n’entend pas se limiter à la seule consignation des articles de Lyon et s’inscrit dans une dynamique atlantique en se connectant à trois routes commerciales complémentaires, la méditerranéenne, entre Marseille et Cadix, la septentrionale entre l’Andalousie et la Baltique, et l’atlantique qui lui ouvre la voie des deux Amériques, l’espagnole et la française. Il participe de ce fait à plusieurs courants d’échanges, notamment en exportant les produits manufacturés de l’intérieur de l’Europe vers les colonies américaines et en redistribuant piastres et « fruits de l’Amérique » vers les marchés de l’intérieur et de la Baltique. Tandis qu’à Lyon le monde du négoce, toujours soucieux d’élargir davantage ses marchés, s’ouvre de plus en plus au commerce ultramarin, Guillaume Rey incarne la nouvelle génération de négociants lyonnais qui s’installe progressivement à Cadix au cours des années 1760 et qui contribue à repositionner le groupe marchand lyonnais parmi les plus importants de la communauté française.

    30Dès son arrivée à Cadix, Guillaume Rey fut mis à contribution par son père et son oncle pour récupérer auprès de plusieurs marchands de la ville quelques créances ainsi que des marchandises invendues. L’occasion lui fut alors offerte de s’essayer lui-même à la vente, sous la surveillance de Louis Feyt qui lui apportait des conseils utiles et des recommandations précieuses. Une année complète suffit au jeune homme pour parfaire sa formation et s’initier aux subtilités du commerce gaditan. Dès la fin de l’année 1764, Rey et Magneval lui confièrent ses premières commissions, portant sur des rubans et du taffetas. Décidé à réussir dans son entreprise, il n’attendit pas les consignes familiales et saisit au plus vite les opportunités qui s’offraient à lui, n’hésitant pas à expédier à Lima les rubans de velours qu’il n’arrivait pas à vendre sur place, ainsi que 58 aunes de taffetas et quatre caisses d’étoffes en dorures qu’il fit charger pour la Nouvelle Espagne85. Il comprit aussi qu’il ne pouvait limiter son activité aux seules productions de la Fabrique lyonnaise qui n’offraient plus les débouchés d’antan, y compris en Amérique où elles souffraient de la concurrence de productions locales de moindre qualité mais meilleur marché. En s’associant avec Brandenbourg et Kabatskoy en avril 1765, il s’ancre dans le domaine du grand commerce maritime et fait de l’Amérique son premier débouché pour les articles qu’il reçoit de Lyon et d’autres provinces du royaume.

    31Le commerce avec les Indes espagnoles étant en théorie interdit aux marchands étrangers, ceux qui le pratiquent ont depuis longtemps pris l’habitude de contourner les règlements et de s’y engager en utilisant des prête-noms espagnols, les testaferros, des confrères espagnols enregistrés auprès du Consulat des Indes (Universidad de cargadores a Indias) ou, quand ils sont mariés avec des Espagnoles, en chargeant leurs marchandises sous le nom de leurs épouses ou de leurs enfants sujets du roi d’Espagne, les jenízaros. Il en va de même pour les retours. Un mémoire de 1771 décrit d’ailleurs très bien les mécanismes du système. Il est établi, y explique-t-on, que quand un consignataire américain a vendu les marchandises qui lui ont été expédiées par un négociant français, les sommes dues à ce dernier sont remis « à des maisons espagnoles solides et bien famées établies à La Vera Cruz, à Lima et dans les autres colonies espagnoles », qui chargent ensuite cet argent sur des vaisseaux de registre « à la consignation des maisons espagnoles de Cadix qui leur [sont] prescrites par les dits négociants étrangers », ou alors à la consignation de leurs épouses ou de leurs enfants espagnols86. Pour ses premiers chargements, Guillaume Rey recourt aux services d’Isabel Fernandez Reynal, également testaferra de Louis Feyt, sous le nom de qui il charge pour la Vera Cruz, en décembre 1764, « 58 aunes ½ de tissus fond or et argent pour ornements d’églises » à bord de la Sainte-Anne puis, en février 1765, 318 pièces de rubans placés à bord du Matamoros, pour Joseph Antonio Bustamante de Lima87. Nous ne disposons que d’informations partielles sur la nature et le volume des marchandises de Lyon expédiées pour l’Amérique par Rey Brandenbourg et Kabatskoy. Un « compte de marchandises embarquées à Cadix pour le compte de MM. Rey Magneval » et divers papiers relatifs aux assurances passées à chaque chargement mentionnent, pour les années 1765 à 1767, des ballots de soieries de Lyon, taffetas, satin ou gros de Tours, des peluches d’Amiens, des pièces de lustrines or et argent, des bayettes et des ratines, des robes « garnies en satin, gros de Tours, florentine et taffetas », des cartons de rubans de soie et en or et argent, des dragonnes or et soie ou argent et soie, des galons, des garnitures de boutons, des bas de soie blancs pour femmes. Toutes ces marchandises sont chargées sous couvert de testaferros, Isabel Fernandez Reynal, déjà citée, mais aussi Juan et de Francisco Sabugo ou Vicente Pacello, et expédiées à la Vera Cruz, La Havane et Lima. Débité lors de chaque opération au prorata de leur participation, le compte de Rey Magneval est recrédité à chaque retour du produit des ventes qu’ont effectuées les correspondants de Guillaume Rey sur place, comme Juan Sabugo, Josef Antonio Bustamante, Nicolas de Roxas et Tiburcio Hualde à Lima, Antonio Saenz Nazareno et Francisco Antonio Basave à La Havane, ou encore Francisco Ciriaco Venel, Pablo Felipe Venel et Gregorio de Alsasua à la Vera Cruz88.

    32Comme beaucoup de ses confrères sur la place de Cadix, Guillaume Rey s’affranchit donc des interdits et les contourne pour mener à bien ses affaires. Il triche également sur les déclarations pour réduire le montant des droits à payer à la douane. En avril 1765, réceptionnant six caisses contenant diverses étoffes, des galons, des boutons et des bas de soie, il présente à la douane des « factures simulées » qui sous évaluent de 10 à 15 % les prix des marchandises expédiées ou trichent sur les aunages des pièces d’étoffe89. Phénomène chronique, la fraude est partout présente à Cadix où chacun essaye de grappiller quelque peu sur les droits de douane et les diverses taxes exigées par les autorités espagnoles. Le consul lui-même couvre ces pratiques et, à chaque fois que les autorités espagnoles tentent de juguler le phénomène, les députés de la Nation montent au créneau. Ainsi, en octobre 1769, une cédule royale contraint les négociants étrangers installés à Cadix à présenter leurs contrats de sociétés au Consulat des Indes et à déclarer le montant des fonds qu’ils ont engagés dans la « Carrière des Indes » sous couvert de prête-noms espagnols, sous peine de confiscation des marchandises et des fonds qui leur reviennent d’Amérique. Cette décision ne manque pas de susciter l’émoi des négociants français qui dénoncent une tentative des autorités espagnoles pour les éloigner de la Carrera de Indias. Mais la « consternation » est plus grande encore lorsqu’en 1772 la Cour de Madrid signifie son intention d’interdire tout commerce « sous des noms espagnols » et de « sévir avec toute rigueur contre les Espagnols qui prêteraient leur nom pour cet embarquement ou qui leur en faciliteraient les moyens par quelqu’autre voie90 ». Élu député de la Nation, Guillaume Rey a alors l’occasion de défendre les intérêts de ses compatriotes. À l’ambassadeur d’Ossun, qui demande de cesser immédiatement les chargements pour les Indes, il répond que sa décision risque de mettre en péril la santé de maisons dont le volume des affaires est estimé à 80 millions de livres, tout en offrant des opportunités sans précédent aux négociants flamands, allemands et autrichiens, leurs principaux concurrents sur le marché des toiles, et qu’elle aurait des répercussions inévitables sur les activités de leurs fournisseurs et de leurs correspondants en France91. Les démarches entreprises par les députés Rey et Desportes aboutissent lorsque, le 2 mars 1772, le Roi d’Espagne, revenant sur la cédule de 1769, accepte que les étrangers continuent à commercer avec les colonies, mais uniquement sous le nom de cargadores espagnols dûment « matriculés dans la Carrière des Indes, sans que leurs noms puissent jamais paraître92 ». Même si cette décision ne satisfait pas totalement une colonie marchande qui voudrait des garanties contre toute tentative d’ingérence des autorités espagnoles dans le secret de leurs pratiques, les affaires reprennent et, en avril, Rey peut se féliciter que les maisons françaises aient « contracté pour plusieurs millions d’affaires à l’occasion de la flotte et des autres navires en charge pour les différentes parties de l’Amérique93 ». Néanmoins le risque de voir resurgir la « funeste cédule » demeure et Rey en appelle à la protection de la couronne dans le mémoire qu’il adresse au ministre de la Marine au mois de juin suivant, mémoire dans lequel il évoque les conséquences que cela pourrait avoir pour l’économie du royaume :

    « Nous serions contraints de renoncer à toute espèce d’affaires pour les Indes, ce qui ferait perdre à l’État les grands et puissants avantages qu’il retire de cette branche de commerce lucrative, et ce qui occasionnerait une diminution aussi nuisible que considérable dans la masse totale de ses espèces. Il en résulterait d’ailleurs un tort irréparable pour ses fabriques et ses manufactures, dont le dépérissement irait porter la langueur à tous les rameaux qui n dépendent [...]. Dès que le fabricant ou le négociant français n’aura plus la liberté d’en faire passer à l’Amérique, les envois des Espagnols seront plus bornés. Ils y feront de plus gros bénéfices, mais le débit de nos fabriques se réduira insensiblement. Elles seront plus exposées à la concurrence de celles d’Angleterre et de Silésie, aussitôt que nous ne pourrons plus la repousser et la contenir comme nous l’avons fait jusqu’à présent par nos propres envois [...]. Le bien de l’État, celui du commerce, la fortune des particuliers intéressés dans la flotte compromise, tous ces motifs sont trop graves t trop pressants pour que nos puissions douter que la Cour sensible à nos appréhensions et les partageant, ne se serve pas de toute son influence auprès de S. M. C. pour arrêter des desseins qui nous seraient aussi pernicieux [...] en nous faisant accorder la permission de négocier librement aux Indes, soit en marchandises ou en contrats à la grosse. Nous ne demandons pas de l’effectuer en notre nom, ni à celui des femmes espagnoles qui sont unies à des Français, ou à des enfants issus de ces liens [...]. Mais il faut qu’en nous servant du nom d’un Espagnol matriculé nous soyons assurés sous cette nouvelle égide de n’être exposés sous aucun prétexte à aucune espèce de confiscation ou de retard dans la délivraison de nos fonds ; que nous soyons à l’abri de toute sorte de recherche pour nous être servis de ce moyen ; que dans les cas de faillite ou de mort de nos prête-noms, ou de nous autres étrangers, où les tribunaux d’Espagne auraient l’occasion de prendre connaissance de ces affaires, qu’ils dissimulent comme ils l’ont pratiqué avant la cédule de 176994. »

    33Quant en septembre 1773 l’assemblée de la nation le remercie « du zèle distingué avec lequel il a rempli les fonctions de son ministère pendant sa députation » et le félicite pour « la prudence et parfaite intelligence avec lesquelles il l’a exercée95 », Guillaume Rey compte désormais parmi les négociants en vue au sein de la colonie française de Cadix. Installé rue des Flamencos borrachos, dans le quartier de Santa Cruz, il est à la tête d’une affaire dont le capital est évalué à plus de 20 000 piastres, ce qui lui vaut d’être recensé parmi les maisons de la quatrième classe de la nation96. Il a diversifié ses activités et, en plus des relations qu’il entretient avec les Indes espagnoles et les pays de la Baltique, il s’est tourné vers la Martinique où s’est installé un de ses frères. D’ailleurs, en juin 1773, il se porte acquéreur d’un navire « du port d’environ 200 tx, percé de 12 canons », le Feliz, acheté à Angelo et Dominigo Colombo. Rebaptisé le Petit Français, mais battant pavillon anglais, le bateau se trouve, au moment de son achat, « au Fort Royal de la Martinique » où il a transporté une cargaison de blé chargée aux Canaries. C’est pourquoi, quelques jours après en être devenu le propriétaire, Guillaume Rey signe devant le chancelier du Consulat une procuration en blanc pour entrer en possession du navire, « faire procéder à son réarmement s’il y a lieu » ou le vendre si l’opération s’avère impossible ou trop coûteuse97. On ne sait malheureusement pas si ce Petit Français est revenu à Cadix ni quel usage en a fait son nouveau propriétaire.

    34Près de trente ans après son arrivée à Cadix, en 1790-1791, Guillaume Rey est toujours recensé parmi les négociants français de la ville. À ce titre il contribue, comme 215 autres marchands, au don patriotique que les députés de la nation adressent à l’Assemblée nationale le 21 avril 1790 et pour lequel il verse 1200 l. t.98. L’année suivante, il contribue à hauteur de 275 réaux au remboursement des frais d’Antoine Hilaire Brochant, député de la nation99.

    35Si on peut envisager trois vagues successives d’installations de Lyonnais à Cadix, au lendemain de la guerre de Succession d’Espagne, au début des années 1750 avec Antoine Granjean, puis après la guerre de Sept ans avec Guillaume Rey, les négociants lyonnais qui s’implantent à Cadix au cours du XVIIIe siècle semblent appartenir à deux générations différentes. Ceux de la première préfèrent travailler en commission et traiter d’un côté avec des maisons françaises de plus grande envergure directement impliquées dans le système de la Carrera de Indias, et de l’autre avec des maisons lyonnaises dont ils sont souvent issus en tant que parent, fils de famille, ancien associé ou ancien commis. Antoine Granjean répond encore à ce profil quand il arrive à Cadix en 1752 mais symbolise, à travers son parcours, le changement de génération qui s’opère au cours des années 1750-1760. La deuxième génération, pleinement incarnée par Guillaume Rey, se révèle plus ambitieuse, s’implique davantage dans les chargements des flottes et des registros, s’entoure d’une clientèle espagnole où se mêlent prête-noms, cargadores et « marchands de Castille » comme on appelle alors ceux qui s’embarquent pour l’Amérique avec des marchandises acquises en contractant un prêt à la grosse aventure. À côté de la vente en commission, ils pratiquent beaucoup plus que leurs aînés la vente en participation, prennent des parts d’intérêts dans les cargaisons chargées pour les Indes, sous-intéressent en amont leurs fournisseurs lyonnais par le biais de comptes partagés, peuvent aussi prendre part au financement des armements pour les Amériques, et même élargir le champ de leurs activités vers de nouveaux horizons, comme le fait par exemple Guillaume Rey en intégrant la mer Baltique à son aire commerciale.

    Notes de bas de page

    1 Zylberberg M., op. cit., p. 80 ; d’après une source conservée aux Archives nationales espagnoles à Madrid, Archivo Histórico Nacional, Section Estado, Leg. 629 (1) et 629 (2), Junta de Comercio y Extranjeros.

    2 Le Gouic O., « Des négociants français aux portes des Indes : les Lyonnais à Cadix au XVIIIe siècle », Saupin G., Priotti J-P. (dir.), op. cit, p. 285-317.

    3 Zylberberg M., op. cit., p. 128-129.

    4 Ibid., p. 109-110.

    5 Bustos Rodriguez M., op. cit., p. 72.

    6 ADR, 8B 939-8, Granjean, papiers d’affaires.

    7 Archivo histórico municipal de Cádiz, sección padrones, padrón de 1713, no 1003; padrón de 1773, no 1006-1007; padrón general de extranjeros de 1791, no 4941.

    8 Bustos Rodriguez M., op. cit., p. 106-110.

    9 Garcia-Baquero Gonzalez A., Collado Villalta P., « Les Français à Cadix au XVIIIe siècle : la colonie marchande », p. 178.

    10 Bustos Rodriguez M., op. cit., p. 138-139.

    11 Ibid., p. 140.

    12 Ibid. ; Bartolomei A., « Le marchand étranger face à la crise : départ ou intégration ? Le cas de la colonie française de Cadix aux périodes révolutionnaire et impériale », Burkardt A. (dir.), Commerce, voyage et expérience religieuse, XVIe-XVIIIe siècle, Rennes, 2007, p. 478 et 480.

    13 A. Bartoloméi présente ce statut de domiciliado comme « un préalable à la naturalisation » dans la mesure où s’il retire à ceux qui le choisissent les avantages de la protection consulaire, il ne leur permet pas pour autant de bénéficier de la totalité des droits des sujets espagnols, notamment en matière de commerce colonial. Ibid., p. 483-484.

    14 Ibid., p. 480.

    15 De Mirasol est consul de France à Cadix de 1703 à 1715 et De Mongelas de janvier 1775 à mai 1778. Mézin A., Les consuls de France au siècle des Lumières (1715-1792), Paris, 1997. AN, AE, BI 221, CC, De Mirasol, « Liste des négociants français établis à Cadix », 2 janvier 1714, fo 18-19 ; BI 283, CC, Cadix, De Mongelas, 20 janvier 1777 : « Liste des négociants, boutiquiers, artisans, domestiques et autres sujets du Roy établis et résidents présentement à Cadiz sous la protection de Sa Majesté », 28 fo.

    16 ADR, 8B 1063-10, Raymond Moulins, Cadix, Jean Boschet, 17 juin 1714.

    17 AN, AE, BI 224, CC, Cadix, « Liste des négociants et marchands français qui composent le corps de la nation à Cadix », 23 avril 1718, fo 67-68.

    18 AN, AE, BI 226, CC, Cadix, Partyet, 12 septembre 1721, fo 205-206.

    19 AN, AE, BI 283, CC, Cadix, De Mongelas, fo 5-33, « Liste des négociants, boutiquiers, artisans, domestiques et autres sujets du Roy établis et résidents présentement à Cadiz sous la protection de Sa Majesté », 20 janvier 1777 ; Ozanam D., « La colonie française de Cadix au XVIIIe siècle d’après un document inédit, 1777 », Mélanges de la Casa de Velázquez, 1968, p. 259-348.

    20 Nous n’incluons pas dans notre corpus Joseph et Pierre Delabat, dont nous ignorons l’âge et le statut, et qui ne sont pas expressément désignés comme associés de leur père, pas plus que Philippe-Guillaume et de Jacques-Henry Goiran, recensés tous deux comme membres de la maison de leur oncle Barthélemy Goiran, natif de Saint-Hippolyte en Languedoc. De Mongelas ne précise pas en effet s’ils ont statut d’associés ou de commis ou s’ils séjournent simplement à Cadix pour parfaire leur formation. Les prendre en compte porterait donc le nombre de négociants lyonnais à 21, soit 16,6 % la communauté négociante française.

    21 Brizard A-F., Les Français en Espagne (1720-1725), d’après le fonds Madrid ambassade série A, mém. maîtrise, Nantes, 1995, p. 52.

    22 « Il n’y a à Cadix de boutiquiers que de Français » écrit un négociant français de la ville en 1777. AN, AE, BIII 323, « Mémoire sur le commerce d’Espagne » par un négociant français, 1777.

    23 En y ajoutant Philippe-Guillaume et Jacques-Henry Goiran, le nombre de Lyonnais passerait de 28 à 30, ce qui arrondirait à 8 % leur part au sein de la communauté marchande française.

    24 Eozenou I., Les négociants bretons à Cadix (1778-1808), mém. maîtrise, Brest, 1997.

    25 CADN, Consulat de Cadix, 2Mi 1856, reg. 258, registre des procès verbaux des délibérations des assemblées de la Nation (juin 1778-août 1791), fo 136 à 138, rôle pour le remboursement des dépenses du député Antoine Hilaire Brochant, 6 avril 1791.

    26 Ibid., fo 55 à 57, « Rôle de cotisation pour le remboursement, suivant l’ordre des facultés de chaque maison française établie à Cadix et formant le corps de la Nation, des avances dans lesquelles se trouvent M. Pierre Durand et M. Laurent Lecouteulx, députés en exercice », 3 septembre 1783.

    27 CADN, Consulat de Cadix, 2 Mi 1873, reg. 243, registre des actes de chancellerie (avril 1791-mai 1793), fo 244, 256, 261-262, 282, 300, 327-328.

    28 CADN, Consulat de Cadix, 2 Mi 1856, recueils des procès-verbaux des délibérations des assemblées de la Nation, reg. 257 (sept. 1728-juin 1778), reg. 258 (juin 1778-août 1791).

    29 CADN, Consulat de Cadix, répertoire numérique détaillé des registres, registres des actes de chancellerie, 1703-1793.

    30 CADN, Consulat de Cadix, 2 Mi 1856, reg. 257, recueil des procès verbaux des assemblées de la Nation (1728-1778), fo 115-117, 16 mars 1748 ; fo 244-246, 17 juillet 1771.

    31 CADN, Consulat de Cadix, 2 Mi 1856, reg. 260, registre de la correspondance au départ des députés de la Nation aux autorités françaises et à des particuliers, février 1767-octobre 1788, lettre à l’ambassadeur de France à Madrid, 16 avril 1771.

    32 CADN, Consulat de Cadix, 2 Mi 1856, reg. 257, recueil des procès verbaux des délibérations des assemblées de la Nation (sept. 1728-juin 1778), fo 26 à 28, « levée d’une cotisation de 7 253 piastres décidée le 17 novembre 1729. Fondée au début de l’année 1729 par le Nîmois Massip et le Lyonnais Cusset, cette société à laquelle Gilly est d’abord « intéressé en commandite », est finalement dissoute en décembre 1731. Cusset et Gilly créent alors une nouvelle société le 1er janvier 1732 sous la raison de Gilly Cusset et Cie, à laquelle ils associent Gilly fils, de Paris. Cette nouvelle maison fonctionne jusqu’au départ de Cusset qui se retire en France en septembre 1739. CCIM-P, L9-856, Roux, Cadix, Massip Cusset et Cie, 22 février 1729 ; L9-855, Roux, Cadix, Gilly Cusset et Cie, 13 novembre 1731 et 15 décembre 1739.

    33 Ozanam D., « La colonie française de Cadix... », op. cit., p. 309.

    34 CDAN, Consulat de Cadix, 2 Mi 1856, reg. 257, recueil des procès-verbaux des délibérations des assemblées de la Nation (1728-1778) ; reg. 258 (1778-1791).

    35 Lario de Oñate M. C., La colonia mercantil británica e irlandesa en Cádiz a finales del siglo xviii, Cadix, 2000, p. 68.

    36 Le Roux L., La colonie française de Cadix (1773-1819), 2005, p. 30-31.

    37 Lario de Oñate M. C., op. cit., p. 85.

    38 Le Roux L., op. cit., p. 30-31.

    39 Bustos Rodríguez M., « Urbanisme et négoce à Cadix aux XVIIe et XVIIIe siècles », Bulletin du Centre des espaces Atlantiques, 1988, p. 163-183.

    40 Bustos Rodríguez M., Cádiz y el sistema atlántico..., op. cit., p. 93.

    41 CCIM-P, L9-856, Roux, Cadix, Massip Terrasson et Cie, 10 septembre 1737. En 1755, chargée de la liquidation des maisons frères Muret et Cie et Veuve Muret Prades et Cie, Marianne Terrasson charge son fils Vital Muret de « se transporter en Espagne dans toutes les villes qu’il appartiendra, et particulièrement à Cadix, y faire rendre compte au sieur Massip de l’intérêt que le dit défunt sieur Étienne Muret avait dans le commerce ci devant exercé sous la raison sociale de Massip Terrasson et Cie ». ADR, Actes notariés, 3E 3213a, Cabaret, procuration de Marianne Terrasson à Vital Muret, 5 avril 1755.

    42 ADR, Actes notariés, 3E 6911, Patrin, fo 167, procuration de Jacques Delachenal à Sobia Vande et Cie, 27 août 1745.

    43 ADR, Actes notariés, 3E 7024, Perrin, procuration de Louis Dubois à Frédéric Dubois, 4 mai 1752.

    44 ADR, 8B 876-10, Fiard, Cadix, J. B. Chillet, 30 mars et 18 mai 1764.

    45 ADR, Actes notariés, 3E 3865a, Étienne Dalier, procuration d’Étienne Girardon à Justinien Girardon, 12 octobre 1750.

    46 AML, FF 103, greffe de la conservation (1660-1721), registre d’enregistrement et de dissolution des sociétés, acte de dissolution, 3 avril 1717.

    47 ADR, 8B 1173-7, Rey Magneval, Cadix, Benoist, 17 novembre 1750.

    48 AN, AE, BI 278, CC, Cadix, De Puyabry, 19 mars 1765.

    49 AN, AE, BI 227, CC, Cadix, Partyet, 23 mars 1722, fo 129.

    50 Lespagnol A., « Modèles éducatifs et stratégies familiales dans le milieu négociant malouin aux XVIIe et XVIIIe siècles : les ambiguïtés d’une mutation », 1995, p. 257-274.

    51 Butel P., « Espace européens et antillais du négociant. L’apprentissage par les voyages : le cas bordelais », 1995, p. 349-361.

    52 Julia D., « L’éducation des négociants français au 18e siècle », 1995, p. 215-256.

    53 ADR, 8B 1173-8, Rey Magneval, Cadix, Louis Feyt, 3 janvier 1764.

    54 ADR, 8B 939-2, Granjean, Lyon, Linossier et Cie, 24 novembre 1762.

    55 ADR, 8B 738-6, Chalut Lamure, Cadix, Rolland et Chambon, 23 avril 1713.

    56 ADR, 8B 1173-7, Rey Magneval, Cadix, Charles Benoist, 28 juillet et 2 novembre 1751.

    57 Ibid., 5 juin 1753.

    58 Ibid., 4 septembre 1753.

    59 AN, AE, BI 283, CC, Cadix, De Mongelas, fo 5, 20 janvier 1777.

    60 CADN, 2 Mi 1856, reg. 257, recueil des procès verbaux des assemblées de la Nation (1728-1778), fo 144-147, 7 février 1755, fo 244-246, 17 juillet 1771 ; reg. 258 (1778-1791), fo 55-57, 3 septembre 1783.

    61 Vial P., op. cit. ; Dornic F, « Le commerce des Français à Cadix d’après les papiers d’Antoine Granjean (1752-1774) », Annales ESC, 1954.

    62 ADR, 8B 939-2, Granjean, Lyon, Linossier et Cie, 14 septembre 1753.

    63 Ibid., 6 octobre 1753.

    64 Ibid., 7 septembre 1754.

    65 Ibid., 13 mars 1756.

    66 ADR, 8B 939-10, Granjean, reg. copies de lettres, Linossier et Cie, 9 septembre 1755.

    67 ADR, 8B 939-11, Granjean, reg. factures (1753-1763).

    68 Citons par exemple ses beaux frères et neveux Linossier et Cibial, Vauberet qui a épousé une de ses nièces Linossier et ses propres frères Benoît et Christophle Granjean.

    69 CADN, 2 Mi 1856, Cadix, reg. 257, recueil des procès verbaux des assemblées de la Nation (1728-1778), fo 244-246.

    70 ADR, 8B 939-2, Granjean, Lyon, Linossier et Cie, 11 août 1762.

    71 « Cette maison quoique moins riche que d’autres est bien solide par sa probité et sa grande exactitude et intelligence dans ses affaires », écrit-il à propos de Louis Cavalier, alors que Merlat fils et Cie apparaissent à ses yeux comme de mauvais payeurs dépensiers et irréguliers dans leurs affaires. ADR, 8B 939-10, Granjean, reg. copies de lettres, Linossier père et fils, 22 mars 1763 ; Linossier fils aîné et François, 26 avril 1774.

    72 Ibid., André Linossier, 14 juillet 1772.

    73 Ibid., Linossier et Cie, 17 février 1756.

    74 Il s’agit aux yeux de Granjean des maisons Charles et Antoine Masson, Casaubon Behic et Cie, Cayla Solier frères Cabanes et Cie, Verduc Vincent et Cie, Gilly frères et Cie, Sobia Vande et Cie, Magon et Le Fer frères, Requier père et fils et Cie, Garnier Mollet et Dumas, Jean Alonse et Louis Jolif, Henri Pottier et Cie, Mercier et Lacasas, Darrot frères et Cie ; « Voilà ci devant à peu près toutes les maisons avec qui vous pouvez faire des affaires, mais je crois que vous ne puissiez pas vous lier avec elles à moins que vous ne preniez intérêt dans celles qu’elles vous proposent, car les négociants ne s’attachent ici qu’à avoir des commissions et à ne rien faire pour leur seul compte ». Ibid., 13 janvier 1756.

    75 Ibid., 6 janvier 1756.

    76 Ibid., Dupré frères et Poncelet, 20 juin 1759.

    77 Ibid., 1er août 1759.

    78 Ibid., 3 février 1761.

    79 Ibid., Linossier fils aîné, 16 juillet 1773.

    80 Ibid., Linossier père et fils, 7 juin 1763.

    81 ADR, 8B 939-8, Granjean, papiers d’affaires, janvier 1772.

    82 Le Gouic O., « Le commerce des Français à Cadix... », op. cit.

    83 ADR, 8B 939-10, Granjean, reg. copies de lettres, André Linossier, 14 juillet 1772.

    84 Ibid., Linossier fils aîné, 16 juillet 1773.

    85 ADR, 8B 1173-25, Rey Magneval, reg. copies de lettres, Guillaume Rey, 5 janvier 1765 ; 8B 1173-7, Rey Magneval, Cadix, Guillaume Rey, 25 janvier 1765.

    86 AN, AE, BIII 343, mémoire, 28 novembre 1771.

    87 ADR, 8B 1173-20, Rey Magneval, papiers relatifs à l’histoire de la société, chargement des vaisseaux et assurances.

    88 Ibid.

    89 ADR, 8B 1173-7, Rey Magneval, Cadix, Louis Feyt, 17 décembre 1762.

    90 AN, AE, BI 280, CC, Cadix, De Puyabry, 7 janvier 1772.

    91 AN, AE, BI 280, CC Cadix, mémoire des députés de la nation, 7 janvier 1772.

    92 Ibid., De Puyabry, 13 mars 1772.

    93 Ibid., Mémoire des députés de la nation, avril 1772.

    94 Ibid., 2 juin 1772.

    95 Ibid., De Puyabry, 10 septembre 1773.

    96 CADN, 2 Mi 1856, reg. 257, fo 244-246, État des classes de la Nation, 17 juillet 1771 ; 2 Mi 1856, reg. 258, fo 5-7, rôle de cotisation 17 juin 1778 ; fo 55-57, rôle de cotisation, 3 septembre 1783.

    97 CADN, 2 Mi 1853, reg. 237, registre des actes de chancellerie (1771-1776), fo 233 et 235, acte de vente et procuration, 7 et 16 juin 1773.

    98 CADN, 2 Mi 1856, reg. 258, procès verbaux des assemblées de la Nation (1778-1791), fo 118-126, 21 avril 1790.

    99 Ibid., fo 136-138, 6 avril 1791.

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    1 Zylberberg M., op. cit., p. 80 ; d’après une source conservée aux Archives nationales espagnoles à Madrid, Archivo Histórico Nacional, Section Estado, Leg. 629 (1) et 629 (2), Junta de Comercio y Extranjeros.

    2 Le Gouic O., « Des négociants français aux portes des Indes : les Lyonnais à Cadix au XVIIIe siècle », Saupin G., Priotti J-P. (dir.), op. cit, p. 285-317.

    3 Zylberberg M., op. cit., p. 128-129.

    4 Ibid., p. 109-110.

    5 Bustos Rodriguez M., op. cit., p. 72.

    6 ADR, 8B 939-8, Granjean, papiers d’affaires.

    7 Archivo histórico municipal de Cádiz, sección padrones, padrón de 1713, no 1003; padrón de 1773, no 1006-1007; padrón general de extranjeros de 1791, no 4941.

    8 Bustos Rodriguez M., op. cit., p. 106-110.

    9 Garcia-Baquero Gonzalez A., Collado Villalta P., « Les Français à Cadix au XVIIIe siècle : la colonie marchande », p. 178.

    10 Bustos Rodriguez M., op. cit., p. 138-139.

    11 Ibid., p. 140.

    12 Ibid. ; Bartolomei A., « Le marchand étranger face à la crise : départ ou intégration ? Le cas de la colonie française de Cadix aux périodes révolutionnaire et impériale », Burkardt A. (dir.), Commerce, voyage et expérience religieuse, XVIe-XVIIIe siècle, Rennes, 2007, p. 478 et 480.

    13 A. Bartoloméi présente ce statut de domiciliado comme « un préalable à la naturalisation » dans la mesure où s’il retire à ceux qui le choisissent les avantages de la protection consulaire, il ne leur permet pas pour autant de bénéficier de la totalité des droits des sujets espagnols, notamment en matière de commerce colonial. Ibid., p. 483-484.

    14 Ibid., p. 480.

    15 De Mirasol est consul de France à Cadix de 1703 à 1715 et De Mongelas de janvier 1775 à mai 1778. Mézin A., Les consuls de France au siècle des Lumières (1715-1792), Paris, 1997. AN, AE, BI 221, CC, De Mirasol, « Liste des négociants français établis à Cadix », 2 janvier 1714, fo 18-19 ; BI 283, CC, Cadix, De Mongelas, 20 janvier 1777 : « Liste des négociants, boutiquiers, artisans, domestiques et autres sujets du Roy établis et résidents présentement à Cadiz sous la protection de Sa Majesté », 28 fo.

    16 ADR, 8B 1063-10, Raymond Moulins, Cadix, Jean Boschet, 17 juin 1714.

    17 AN, AE, BI 224, CC, Cadix, « Liste des négociants et marchands français qui composent le corps de la nation à Cadix », 23 avril 1718, fo 67-68.

    18 AN, AE, BI 226, CC, Cadix, Partyet, 12 septembre 1721, fo 205-206.

    19 AN, AE, BI 283, CC, Cadix, De Mongelas, fo 5-33, « Liste des négociants, boutiquiers, artisans, domestiques et autres sujets du Roy établis et résidents présentement à Cadiz sous la protection de Sa Majesté », 20 janvier 1777 ; Ozanam D., « La colonie française de Cadix au XVIIIe siècle d’après un document inédit, 1777 », Mélanges de la Casa de Velázquez, 1968, p. 259-348.

    20 Nous n’incluons pas dans notre corpus Joseph et Pierre Delabat, dont nous ignorons l’âge et le statut, et qui ne sont pas expressément désignés comme associés de leur père, pas plus que Philippe-Guillaume et de Jacques-Henry Goiran, recensés tous deux comme membres de la maison de leur oncle Barthélemy Goiran, natif de Saint-Hippolyte en Languedoc. De Mongelas ne précise pas en effet s’ils ont statut d’associés ou de commis ou s’ils séjournent simplement à Cadix pour parfaire leur formation. Les prendre en compte porterait donc le nombre de négociants lyonnais à 21, soit 16,6 % la communauté négociante française.

    21 Brizard A-F., Les Français en Espagne (1720-1725), d’après le fonds Madrid ambassade série A, mém. maîtrise, Nantes, 1995, p. 52.

    22 « Il n’y a à Cadix de boutiquiers que de Français » écrit un négociant français de la ville en 1777. AN, AE, BIII 323, « Mémoire sur le commerce d’Espagne » par un négociant français, 1777.

    23 En y ajoutant Philippe-Guillaume et Jacques-Henry Goiran, le nombre de Lyonnais passerait de 28 à 30, ce qui arrondirait à 8 % leur part au sein de la communauté marchande française.

    24 Eozenou I., Les négociants bretons à Cadix (1778-1808), mém. maîtrise, Brest, 1997.

    25 CADN, Consulat de Cadix, 2Mi 1856, reg. 258, registre des procès verbaux des délibérations des assemblées de la Nation (juin 1778-août 1791), fo 136 à 138, rôle pour le remboursement des dépenses du député Antoine Hilaire Brochant, 6 avril 1791.

    26 Ibid., fo 55 à 57, « Rôle de cotisation pour le remboursement, suivant l’ordre des facultés de chaque maison française établie à Cadix et formant le corps de la Nation, des avances dans lesquelles se trouvent M. Pierre Durand et M. Laurent Lecouteulx, députés en exercice », 3 septembre 1783.

    27 CADN, Consulat de Cadix, 2 Mi 1873, reg. 243, registre des actes de chancellerie (avril 1791-mai 1793), fo 244, 256, 261-262, 282, 300, 327-328.

    28 CADN, Consulat de Cadix, 2 Mi 1856, recueils des procès-verbaux des délibérations des assemblées de la Nation, reg. 257 (sept. 1728-juin 1778), reg. 258 (juin 1778-août 1791).

    29 CADN, Consulat de Cadix, répertoire numérique détaillé des registres, registres des actes de chancellerie, 1703-1793.

    30 CADN, Consulat de Cadix, 2 Mi 1856, reg. 257, recueil des procès verbaux des assemblées de la Nation (1728-1778), fo 115-117, 16 mars 1748 ; fo 244-246, 17 juillet 1771.

    31 CADN, Consulat de Cadix, 2 Mi 1856, reg. 260, registre de la correspondance au départ des députés de la Nation aux autorités françaises et à des particuliers, février 1767-octobre 1788, lettre à l’ambassadeur de France à Madrid, 16 avril 1771.

    32 CADN, Consulat de Cadix, 2 Mi 1856, reg. 257, recueil des procès verbaux des délibérations des assemblées de la Nation (sept. 1728-juin 1778), fo 26 à 28, « levée d’une cotisation de 7 253 piastres décidée le 17 novembre 1729. Fondée au début de l’année 1729 par le Nîmois Massip et le Lyonnais Cusset, cette société à laquelle Gilly est d’abord « intéressé en commandite », est finalement dissoute en décembre 1731. Cusset et Gilly créent alors une nouvelle société le 1er janvier 1732 sous la raison de Gilly Cusset et Cie, à laquelle ils associent Gilly fils, de Paris. Cette nouvelle maison fonctionne jusqu’au départ de Cusset qui se retire en France en septembre 1739. CCIM-P, L9-856, Roux, Cadix, Massip Cusset et Cie, 22 février 1729 ; L9-855, Roux, Cadix, Gilly Cusset et Cie, 13 novembre 1731 et 15 décembre 1739.

    33 Ozanam D., « La colonie française de Cadix... », op. cit., p. 309.

    34 CDAN, Consulat de Cadix, 2 Mi 1856, reg. 257, recueil des procès-verbaux des délibérations des assemblées de la Nation (1728-1778) ; reg. 258 (1778-1791).

    35 Lario de Oñate M. C., La colonia mercantil británica e irlandesa en Cádiz a finales del siglo xviii, Cadix, 2000, p. 68.

    36 Le Roux L., La colonie française de Cadix (1773-1819), 2005, p. 30-31.

    37 Lario de Oñate M. C., op. cit., p. 85.

    38 Le Roux L., op. cit., p. 30-31.

    39 Bustos Rodríguez M., « Urbanisme et négoce à Cadix aux XVIIe et XVIIIe siècles », Bulletin du Centre des espaces Atlantiques, 1988, p. 163-183.

    40 Bustos Rodríguez M., Cádiz y el sistema atlántico..., op. cit., p. 93.

    41 CCIM-P, L9-856, Roux, Cadix, Massip Terrasson et Cie, 10 septembre 1737. En 1755, chargée de la liquidation des maisons frères Muret et Cie et Veuve Muret Prades et Cie, Marianne Terrasson charge son fils Vital Muret de « se transporter en Espagne dans toutes les villes qu’il appartiendra, et particulièrement à Cadix, y faire rendre compte au sieur Massip de l’intérêt que le dit défunt sieur Étienne Muret avait dans le commerce ci devant exercé sous la raison sociale de Massip Terrasson et Cie ». ADR, Actes notariés, 3E 3213a, Cabaret, procuration de Marianne Terrasson à Vital Muret, 5 avril 1755.

    42 ADR, Actes notariés, 3E 6911, Patrin, fo 167, procuration de Jacques Delachenal à Sobia Vande et Cie, 27 août 1745.

    43 ADR, Actes notariés, 3E 7024, Perrin, procuration de Louis Dubois à Frédéric Dubois, 4 mai 1752.

    44 ADR, 8B 876-10, Fiard, Cadix, J. B. Chillet, 30 mars et 18 mai 1764.

    45 ADR, Actes notariés, 3E 3865a, Étienne Dalier, procuration d’Étienne Girardon à Justinien Girardon, 12 octobre 1750.

    46 AML, FF 103, greffe de la conservation (1660-1721), registre d’enregistrement et de dissolution des sociétés, acte de dissolution, 3 avril 1717.

    47 ADR, 8B 1173-7, Rey Magneval, Cadix, Benoist, 17 novembre 1750.

    48 AN, AE, BI 278, CC, Cadix, De Puyabry, 19 mars 1765.

    49 AN, AE, BI 227, CC, Cadix, Partyet, 23 mars 1722, fo 129.

    50 Lespagnol A., « Modèles éducatifs et stratégies familiales dans le milieu négociant malouin aux XVIIe et XVIIIe siècles : les ambiguïtés d’une mutation », 1995, p. 257-274.

    51 Butel P., « Espace européens et antillais du négociant. L’apprentissage par les voyages : le cas bordelais », 1995, p. 349-361.

    52 Julia D., « L’éducation des négociants français au 18e siècle », 1995, p. 215-256.

    53 ADR, 8B 1173-8, Rey Magneval, Cadix, Louis Feyt, 3 janvier 1764.

    54 ADR, 8B 939-2, Granjean, Lyon, Linossier et Cie, 24 novembre 1762.

    55 ADR, 8B 738-6, Chalut Lamure, Cadix, Rolland et Chambon, 23 avril 1713.

    56 ADR, 8B 1173-7, Rey Magneval, Cadix, Charles Benoist, 28 juillet et 2 novembre 1751.

    57 Ibid., 5 juin 1753.

    58 Ibid., 4 septembre 1753.

    59 AN, AE, BI 283, CC, Cadix, De Mongelas, fo 5, 20 janvier 1777.

    60 CADN, 2 Mi 1856, reg. 257, recueil des procès verbaux des assemblées de la Nation (1728-1778), fo 144-147, 7 février 1755, fo 244-246, 17 juillet 1771 ; reg. 258 (1778-1791), fo 55-57, 3 septembre 1783.

    61 Vial P., op. cit. ; Dornic F, « Le commerce des Français à Cadix d’après les papiers d’Antoine Granjean (1752-1774) », Annales ESC, 1954.

    62 ADR, 8B 939-2, Granjean, Lyon, Linossier et Cie, 14 septembre 1753.

    63 Ibid., 6 octobre 1753.

    64 Ibid., 7 septembre 1754.

    65 Ibid., 13 mars 1756.

    66 ADR, 8B 939-10, Granjean, reg. copies de lettres, Linossier et Cie, 9 septembre 1755.

    67 ADR, 8B 939-11, Granjean, reg. factures (1753-1763).

    68 Citons par exemple ses beaux frères et neveux Linossier et Cibial, Vauberet qui a épousé une de ses nièces Linossier et ses propres frères Benoît et Christophle Granjean.

    69 CADN, 2 Mi 1856, Cadix, reg. 257, recueil des procès verbaux des assemblées de la Nation (1728-1778), fo 244-246.

    70 ADR, 8B 939-2, Granjean, Lyon, Linossier et Cie, 11 août 1762.

    71 « Cette maison quoique moins riche que d’autres est bien solide par sa probité et sa grande exactitude et intelligence dans ses affaires », écrit-il à propos de Louis Cavalier, alors que Merlat fils et Cie apparaissent à ses yeux comme de mauvais payeurs dépensiers et irréguliers dans leurs affaires. ADR, 8B 939-10, Granjean, reg. copies de lettres, Linossier père et fils, 22 mars 1763 ; Linossier fils aîné et François, 26 avril 1774.

    72 Ibid., André Linossier, 14 juillet 1772.

    73 Ibid., Linossier et Cie, 17 février 1756.

    74 Il s’agit aux yeux de Granjean des maisons Charles et Antoine Masson, Casaubon Behic et Cie, Cayla Solier frères Cabanes et Cie, Verduc Vincent et Cie, Gilly frères et Cie, Sobia Vande et Cie, Magon et Le Fer frères, Requier père et fils et Cie, Garnier Mollet et Dumas, Jean Alonse et Louis Jolif, Henri Pottier et Cie, Mercier et Lacasas, Darrot frères et Cie ; « Voilà ci devant à peu près toutes les maisons avec qui vous pouvez faire des affaires, mais je crois que vous ne puissiez pas vous lier avec elles à moins que vous ne preniez intérêt dans celles qu’elles vous proposent, car les négociants ne s’attachent ici qu’à avoir des commissions et à ne rien faire pour leur seul compte ». Ibid., 13 janvier 1756.

    75 Ibid., 6 janvier 1756.

    76 Ibid., Dupré frères et Poncelet, 20 juin 1759.

    77 Ibid., 1er août 1759.

    78 Ibid., 3 février 1761.

    79 Ibid., Linossier fils aîné, 16 juillet 1773.

    80 Ibid., Linossier père et fils, 7 juin 1763.

    81 ADR, 8B 939-8, Granjean, papiers d’affaires, janvier 1772.

    82 Le Gouic O., « Le commerce des Français à Cadix... », op. cit.

    83 ADR, 8B 939-10, Granjean, reg. copies de lettres, André Linossier, 14 juillet 1772.

    84 Ibid., Linossier fils aîné, 16 juillet 1773.

    85 ADR, 8B 1173-25, Rey Magneval, reg. copies de lettres, Guillaume Rey, 5 janvier 1765 ; 8B 1173-7, Rey Magneval, Cadix, Guillaume Rey, 25 janvier 1765.

    86 AN, AE, BIII 343, mémoire, 28 novembre 1771.

    87 ADR, 8B 1173-20, Rey Magneval, papiers relatifs à l’histoire de la société, chargement des vaisseaux et assurances.

    88 Ibid.

    89 ADR, 8B 1173-7, Rey Magneval, Cadix, Louis Feyt, 17 décembre 1762.

    90 AN, AE, BI 280, CC, Cadix, De Puyabry, 7 janvier 1772.

    91 AN, AE, BI 280, CC Cadix, mémoire des députés de la nation, 7 janvier 1772.

    92 Ibid., De Puyabry, 13 mars 1772.

    93 Ibid., Mémoire des députés de la nation, avril 1772.

    94 Ibid., 2 juin 1772.

    95 Ibid., De Puyabry, 10 septembre 1773.

    96 CADN, 2 Mi 1856, reg. 257, fo 244-246, État des classes de la Nation, 17 juillet 1771 ; 2 Mi 1856, reg. 258, fo 5-7, rôle de cotisation 17 juin 1778 ; fo 55-57, rôle de cotisation, 3 septembre 1783.

    97 CADN, 2 Mi 1853, reg. 237, registre des actes de chancellerie (1771-1776), fo 233 et 235, acte de vente et procuration, 7 et 16 juin 1773.

    98 CADN, 2 Mi 1856, reg. 258, procès verbaux des assemblées de la Nation (1778-1791), fo 118-126, 21 avril 1790.

    99 Ibid., fo 136-138, 6 avril 1791.

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    • Kimizuka, Hiroyasu. (2015) Bordeaux et la Bretagne au XVIIIe siècle. DOI: 10.4000/books.pur.88143
    • Miller, Lesley Ellis. (2014) Selling Textiles in the Long Eighteenth Century. DOI: 10.1057/9781137295217_6
    • (2021) Le monde atlantique. DOI: 10.3917/arco.schna.2021.01.0349
    • Becchia, Alain. (2012) Modernités de l’Ancien Régime. DOI: 10.4000/books.pur.116490
    • Zeller, Olivier. (2018) Aux origines du covoiturage. Le partage des voyages d’après les journaux d’annonces lyonnais de la seconde moitié du xviiie siècle. Flux, N° 113. DOI: 10.3917/flux1.113.0003

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