L’essentiel des références utilisées ayant été cité au fur et à mesure, en note de bas de page, il n’a pas paru nécessaire d’alourdir le volume en en dressant la liste exhaustive, qui figure dans la version originale de ma thèse1. En revanche, il a semblé utile de présenter l’état général des fonds, de décrire en quelques mots les principales sources et de préciser, le cas échéant, la méthodologie utilisée.

SOURCES MANUSCRITES

Archives Nationales

Fouillées avec minutie par des générations d’historiens du XIX^e siècle, les Archives Nationales ne recèlent plus guère de surprises. Elles n’en contiennent pas moins d’importantes pépites dispersées dans les séries B^II, C, F⁷, F⁹, F¹³, BB¹⁸, BB³⁰ : dossiers de gendarmes parisiens de la Restauration, rapports politiques dressés après la Révolution de Juillet, notices sur le casernement des brigades, etc. La plupart de ces trouvailles concernent la première moitié du siècle, bien mieux documentée. Pour la période postérieure à 1860, on doit se contenter de glaner quelques pièces isolées au détour des récits de grèves ou des controverses judiciaires. Moins commode d’accès, le Centre des Archives Contemporaines de Fontainebleau contient quelques beaux dossiers personnels de gendarmes dont l’intérêt reste toutefois secondaire.

Il convient d’accorder une place à part aux rapports de gendarmerie conservés dans la série F⁷ et classés par départements. Ces lourds dossiers contiennent, en effet, la quasitotalité des bilans statistiques de la répression (arrestations menées à bien, récapitulation du service effectué) envoyés au ministre de l’Intérieur entre 1818 et 1859. S’il ne faut évidemment pas se leurrer sur la sincérité de tels documents, leur exploitation statistique par échantillonnage a permis d’évaluer la hiérarchie des missions et de mesurer les disparités régionales.

Service historique de la Défense – Dépôt de l’Armée de Terre (SHD-AT)

Rendez-vous imposé de tous les historiens du domaine militaire, le dépôt de Vincennes regroupe quatre grands types de fonds, d’intérêt inégal. Passons rapidement sur les archives spécifiquement consacrées à la gendarmerie : très riche pour la Révolution et pour l’Empire, la série X^f s’appauvrit considérablement avec l’avancée du siècle. On y trouve quelques beaux cartons consacrés aux corps spéciaux (vétérans, gendarmerie corse, parisienne) et des informations isolées mais importantes sur le fonctionnement des inspections, ainsi que sur les procédures de création et de déplacement des brigades. Décevant, l’ensemble peut cependant être complété par le fonds Préval (série 1M), belle collection de documents dispersés mais fondamentaux, parmi lesquels on trouve aussi bien des lettres d’officiers que des brouillons de rapports sur l’attitude politique de la gendarmerie.

La correspondance générale du ministère de la Guerre offre des pièces plus nombreuses dont la qualité reste toutefois très aléatoire. Classés par ordre chronologique, de la monarchie de Juillet (série E⁵) aux débuts de la Troisième République (G⁹), en passant par la Seconde République (F¹) et le Second Empire (G⁸), les courriers et rapports reçus par le ministre constituent une formidable masse documentaire dépourvue du moindre inventaire… Autant dire qu’il a fallu limiter l’enquête à quelques dates témoins (1845, 1851-52, 1854, 1863, 1872). La situation est plus compliquée pour la Troisième République : fleuron du SHD, la série N et ses suppléments bénéficient d’un classement thématique, mais n’accordent pratiquement aucune place à la gendarmerie. On se consolera avec les archives de la division militaire de Lille (sous-série 2I), une dizaine de cartons abordant de près ou de loin l’action des gendarmes.

Il est vrai qu’il y avait déjà de quoi faire du côté des quelques trois cents dossiers de pension consultés dans la série Y^f. Pour chaque gendarme prenant sa retraite, on dispose en effet d’un petit socle de documents (principaux actes d’état-civil, relevés de services) qui s’enrichit parfois des pièces les plus variées – rapport égaré, bilan d’enquête disciplinaire, lettres personnelles, certificats de blessures ou de maladie professionnelle, etc. Ainsi voit-on s’épanouir des éclats de vie qui donnent tout leur sel et tout leur sens aux heures monotones passées dans les dossiers poussiéreux… S’il fallait naturellement consulter quelques dossiers de « célébrités » de la gendarmerie, on a choisi de procéder à un dépouillement systématique pour tous ceux dont le patronyme débutait par « Da », « Ma » et « Fe ».

Dernier massif documentaire, les registres matricules (42 Y^c) présentent l’avantage de recenser, à l’échelle de la compagnie, tous les gendarmes qui y sont affectés, quel que soit leur futur destin. Le défunt ou le démissionnaire, pour lesquels on ne retrouvera pas de dossier de pension, figurent dans ces gros volumes. À raison d’une quarantaine de renseignements par individu, il devenait facile de mener une étude prosopographique dont les résultats irriguent la démonstration. Le corpus a été construit sur un échantillon de sept départements : les Hautes-Alpes, la Gironde, l’Hérault, l’Ille-et-Vilaine, le Loir-et-Cher, la Marne et le Nord. À chaque fois, on a reconstitué l’effectif présent au 1^er janvier 1857 et au 1^er janvier 1890.

Service historique de la Défense – Dépôt de la gendarmerie nationale (SHD-GN)

Créé le 1^er avril 1995, le Service historique de la Gendarmerie nationale est désormais intégré au Service historique de la Défense. Il continue cependant à conserver et à communiquer les archives spécifiques de la gendarmerie, entreposées depuis 1972 au dépôt du Blanc, dans l’Indre. Longtemps inconnu des chercheurs, ce formidable gisement documentaire s’est véritablement ouvert durant les dix dernières années, avec l’ouverture d’une salle de lecture, d’abord à Maisons-Alfort, aujourd’hui à Vincennes, tandis que le recolement des collections cédait place à un inventaire général aussi précis que moderne. Il faut avoir vécu les premiers temps du service pour mesurer le chemin accompli – quitte à regretter l’âge héroïque et convivial des pionniers !

Victime des consignes de destruction des documents, le XIX^e siècle est très mal représenté dans les fonds du SHD-GN. Quelques épaves ont survécu aux incinérations : des cahiers d’instructions, un registre de procès-verbaux, des brouillons d’historiques. Ces pièces isolées apparaissent aussi, et en plus grand nombre, dans les collections du Musée de la Gendarmerie, hébergées et classées par le SHD-GN. On y découvre également des livrets individuels, des correspondances et toutes sortes de documents hétéroclites.

Mais le plus précieux se situe dans la série E (unités départementales). Il s’agit des registres de correspondance courante (couramment appelés R/2) et des plus rares et moins diserts registres de correspondance confidentielle (R/4). Chacun de ces documents se présente sous la forme d’un volume folioté riche de 200 à 500 pages remplies au jour le jour par les officiers ou par leurs secrétaires. Tous les courriers et rapports y sont enregistrés, qu’ils soient destinés aux préfets, aux chefs de légion ou, le plus souvent, aux subordonnés. La plupart des rédacteurs y consignent également des commentaires, en marge des « rapports journaliers ». S’ils restent parfois difficiles à déchiffrer, ces registres constituent une source incroyablement précise qui permet de comprendre la vie quotidienne du corps. Précisons qu’on y trouve aussi des informations parfois très détaillées sur les populations civiles – tout un matériau brut encore massivement inédit.

Archives départementales

L’essentiel des décisions concernant les missions et la vie quotidienne des unités de gendarmerie sont prises à l’échelle départementale, sous la responsabilité des préfets et des conseils généraux, et la maigreur des fonds conservés à Paris, pour la seconde moitié du XIX^e siècle, ajoutait à l’absolue nécessité d’explorer aussi précisément que possible les archives départementales. D’Amiens à Laon, en passant par Lille, Perpignan, Beauvais, Montpellier, Bordeaux, Angers, Châlons-en-Champagne, le tour de France des dépôts permettrait presque de dresser le palmarès des collections épargnées par les vicissitudes des guerres et des destructions accidentelles…

Si l’intérêt des fonds varie considérablement d’une ville à l’autre, les modes de classement sont à peu près uniformisés. Aussi faut-il commencer la recherche par la sous-série 5R, expressément attribuée à la gendarmerie. On y trouve généralement des circulaires, les travaux des commissions chargées de déterminer l’assiette des brigades, ainsi qu’un volume très inégal de commentaires et de renseignements individuels sur le personnel de la compagnie. On peut compléter ce premier panorama en fouillant la série N, où l’on trouve les délibérations des conseils généraux (1N) et les documents relatifs aux acquisitions et à l’entretien des casernes (4N).

Considérablement plus touffues, les séries M (police générale) et, à un degré moindre, Z (sous-préfectures) fourmillent de procès-verbaux, de rapports et de notes en tout genre. Il faut cependant les compléter en explorant la série U (affaires judiciaires), qui permet de retracer l’activité de l’arme en aval du crime ou du délit, voire de la contravention. On doit particulièrement souligner l’intérêt des archives des justices de paix (4U), qui contiennent parfois d’abondantes collections de procès-verbaux et qui permettent de reconstituer l’activité d’une brigade.

SOURCES IMPRIMÉES

Textes officiels et réglementaires

Grâce à la publication du Mémorial de la Gendarmerie, collection rétrospective des principaux textes officiels concernant la gendarmerie, mise à jour chaque année dans la deuxième moitié du siècle, on dispose d’un solide point d’appui. On ne citera donc pas les centaines de plaquettes récapitulant les réformes de détail ou définissant les moindres aspects de l’uniforme. L’existence de ces textes n’en constitue pas moins un précieux indice des progrès de la réglementation du métier.

La parution du décret de 1854 marque sans doute une césure. Avant cette date, les manuels – au nombre d’une vingtaine – présentent une réelle originalité dans la mesure où ils s’appuient parfois plus sur l’expérience de leurs auteurs, simples gendarmes dans deux cas, que sur une réglementation volontiers malmenée. Après 1854, les manuels reprennent, en revanche, plus systématiquement les textes officiels. Presque exclusivement rédigés par des officiers, souvent hauts gradés et éloignés du terrain, ils perdent ces détails concrets qui font le miel du chercheur. Leur profusion – on compte au moins une quarantaine d’ouvrages pour la seconde moitié du siècle – prouve cependant qu’il existe une demande, alimentée par les développements de l’instruction professionnelle.

À raison d’une soixantaine de titres pour l’ensemble du XIX^e siècle, la gendarmerie fait couler beaucoup d’encre. Qu’il s’agisse de pamphlets, de plaidoyers ou de projets de réforme, ces textes de style et d’intérêt très inégal fleurissent en période de crise : autour de 1830, au milieu du XIX^e siècle, après la défaite de 1870, dans les premières années du XX^e siècle. Aussi constituent-ils un précieux observatoire des débats et des recompositions de la culture professionnelle, au même titre que la presse corporatiste, qui prend petit à petit leur place.

Comment ignorer la presse générale, miroir déformé de l’opinion publique, réceptacle de petites informations introuvables ailleurs ? Hormis de rares exceptions ponctuelles, on a choisi de délaisser la grande presse et l’ensemble des périodiques nationaux, qui ne proposent qu’un portrait citadin de la gendarmerie. En revanche, la presse régionale a été sondée, ainsi que les plus modestes journaux d’arrondissement.

Textes personnels

Contrairement à leurs collègues policiers, les gendarmes du XIX^e siècle ont peu raconté leur vie. Les témoignages du capitaine Bonnard, du lieutenant La Roche et du lieutenant Forestier constituent des exceptions notables mais isolées. Il est toutefois possible de repérer quelques textes moins aboutis – préfaces de manuels professionnels, proclamations diverses et variées, prologues à des souvenirs coloniaux, etc. En fouillant, par ailleurs, au hasard des autobiographies publiées, de Gérard de Nerval à Georges Sand, en passant par Martin Nadaud, on croise bon nombre de bicornes dans des situations pour le moins variées.

Fictions

BIBLIOGRAPHIE INDICATIVE

En plus du Guide de recherche en histoire de la gendarmerie, on consultera avec profit la bibliographie détaillée et régulièrement actualisée du portail sur l’histoire de la justice et des crimes (crimininocorpus-cnrs.fr) et la base de données PoliceEuroBiblio lancée et gérée dans le cadre du programme « Circulation et construction des savoirs policiers européens » de l’ANR (irhis.recherche.univ-lille3.fr/ANR-CIRSAP-PolEuroBibl.html).

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