12. Une histoire des pratiques consultatives de l’État
p. 191-203
Texte intégral
1Historiens formés à l’IEP de Paris et à l’Université de Paris I, puis à l’EHESS, nous travaillons sur des sujets situés à la frontière de l’histoire institutionnelle, politique, économique et sociale (pendant nos thèses : le Conseil national économique (CNE) dans l’entre-deux-guerres1, la chambre de commerce de Paris au XIXe siècle2 ; depuis : les politiques économiques et sociales au XXe siècle, les régulations juridiques de l’économie au XIXe siècle). Cela pour dire non pas que nous prétendons être connaisseurs à la fois de l’histoire, de la science politique et de la sociologie, mais que nous avons pu rencontrer suffisamment de démarches diverses dans chacune de ces disciplines – et parfois en histoire des sciences, en économie ou en droit – pour éviter des positionnements caricaturaux. Nous ne nous prêterons donc pas au jeu qui consiste à imaginer ce qu’aurait fait de nos objets de recherche un historien ou un politiste « bornés ». Nous éviterons aussi l’accumulation de références : jamais exhaustive, elle ne rend pas non plus compte de ce qui est finalement plutôt une imprégnation que l’application des enseignements de quelques grands auteurs. Aussi, hors de nos propres travaux (largement munis de bibliographies), nous ne citerons en note que quelques publications ou recherches récentes. Laissant le lecteur juge de nos emprunts, nous préférons lui présenter les impératifs que nous nous fixons pour un projet de recherche sur l’histoire des pratiques consultatives de l’État, puis en illustrer les apports par quelques études de cas.
Quel (le) « politique » étudier ? Institutions, concepts, pratiques
2L’idée d’une certaine autonomie du/de la politique nous intéresse au sens où nous ne le/la rabattons pas sur un déterminisme purement social – ou autre. Notre idée est au premier chef de « prendre les institutions au sérieux », et notamment les « pratiques institutionnelles ». Cela implique de prendre en considération des évolutions endogènes au « politique » tout autant que des influences extérieures.
3Notre démarche relève au départ d’une réaction face à une histoire paresseuse des idées ou des mouvements politiques encore bien présente, celle qui se réduit à un catalogue de concepts, d’événements ou de « cultures » partisanes. Notre attention à un aspect « institutionnel », qui se veut ancrée dans une certaine matérialité (budgets, locaux, agendas…), consciente des contraintes juridiques ou encore des identités, intérêts et conflits d’institutions, ne signifie pas pour autant que nous n’étudions que des structures, en oubliant les préoccupations ou les langages des acteurs. L’histoire conceptuelle du politique ou encore les démarches traitant des jeux de langages sans les couper d’un contexte social font partie de nos références. Nous retenons aussi l’importance des controverses pour la construction de sources pertinentes, idée importée il y a déjà longtemps de l’histoire des sciences et maintenant appropriée par bien des historiens.
4Plus particulièrement, nous nous sommes intéressés à la légitimation et à la construction d’identité des institutions, à son évolution dans le temps et aux controverses sur ce point. Le terme d’« identité » d’une institution renvoie pour nous à quelque chose qui peut être précisément discuté, sur la base de l’étude de l’implication de ses membres (importante ou non, exclusive ou non) et du vocabulaire qu’ils utilisent tout autant que de l’image renvoyée par des documents extérieurs. Outre cette recherche d’éléments factuels donnant un sens à un concept parfois vague comme celui d’« identité », prendre en compte la façon dont une institution se façonne et se légitime implique aussi de se confronter à de grandes questions de la culture politique française, en particulier, pour nous, celle de la représentation et des corps intermédiaires. Sur ce point, il y a eu un fort renouvellement récent des travaux d’historiens, en partant souvent de questions sur les pratiques économiques et en revenant par là à des questions politiques3.
5Si, donc, les mots et les concepts nous importent aussi, que mettons-nous plus concrètement sous l’expression « prendre les institutions au sérieux » ? Nos questions prennent naissance dans un rapport aux sources – plus que dans un discours souvent vague et imprécis sur la manière dont « pensent » les institutions. Lorsqu’il existe un fonds constitué comme celui d’une institution consultative – mais on pourrait dire à peu près la même chose des fonds syndicaux ou partisans –, comprenant statuts, procédures de choix des membres, délibérations de commissions, sollicitations extérieures, documents de travail et rapports, il nous semble que certaines questions devraient se poser d’elles-mêmes. Vues de l’extérieur, elles peuvent paraître ressortir au droit public ou à la science administrative (voies de saisie, droit de correspondance, personnel de bureau…), à la sociologie (origines des membres, cumuls de fonctions…), à la science politique (influence des modes de scrutin, formes de la délibération…), voire à l’histoire des sciences (modes d’information, en particulier fabrication ou usage de statistiques). Pour nous, ces interrogations présentent une certaine unité et sont liées à un questionnement sur la genèse des sources (celle de chaque écrit particulier, mais aussi de l’agencement que constitue un fonds) : travailler sur des sources institutionnelles impose de réfléchir sur les techniques propres de l’institution et sur les pratiques des acteurs4.
Des échelles : durées et unités d’analyse
6Ayant commencé nos recherches dans une atmosphère où la microhistoire était une référence dominante, nous accordons une importance particulière à cette question des échelles. En prenant, dans un premier temps, des institutions précises pour terrain d’étude, nous avons privilégié une échelle « méso » qui permet d’étudier la construction d’un collectif de travail, la répartition des tâches, les conflits internes. Néanmoins, nous portons la plus grande attention aux liens avec l’échelle des individus (leurs parcours, leurs préoccupations issues d’autres lieux ; ou encore le poids sur l’institution d’une personne ou d’un groupe de fondateurs, ce qui renvoie à la notion de path dependency) et avec une échelle macro, celle des concepts politiques dominants d’un moment (à l’échelle nationale voire internationale) ou de l’organisation de l’État. Le fait d’étudier des institutions « consultatives » ou « intermédiaires » nous donne un point d’entrée qui permet – qui impose – de regarder à la fois du côté des attentes de la « société civile » (concept que nous n’utilisons qu’avec précautions5, mais qui vise à souligner notre intérêt pour les syndicats et associations autant que pour les préoccupations d’acteurs économiques individuels) et de « l’État » (la question étant de définir quelles instances sont impliquées : ministres ou ministères, hauts fonctionnaires, parlementaires, collectivités locales…). En nous situant dans cet entre-deux, nous ambitionnons donc à la fois d’étudier des pratiques consultatives qui l’ont rarement été et de jeter un éclairage décalé sur des questions plus micro ou plus macro, sur des acteurs aussi bien publics que privés, collectifs qu’individuels.
7Cette ambition nous amène, du point de vue des méthodes d’analyse, à piocher dans différents courants des sciences sociales les outils qui nous paraissent utiles pour réfléchir sur des fonctionnements collectifs, sans négliger les stratégies individuelles ni les contraintes matérielles. Nous revendiquons l’étude d’un espace des possibles, d’un jeu autour de la contrainte, de négociations et d’adaptations, sachant que tout n’est pas pour autant possible à chaque instant. Dire cela, qui nous vient plutôt de la microhistoire, n’est pas forcément original et peut renvoyer à d’autres courants ; c’est une prise de position sur la question du déterminisme, mais c’est aussi ce qui nous permet un bricolage théorique assumé. Ainsi, nous utilisons parfois un outillage quantitatif renouvelé (analyse de réseaux sociaux, de trajectoires6…) ou classique (car quelques pesées globales, volumes budgétaires ou de correspondances par exemple, permettent seules de statuer sur certaines contraintes et de différencier ce qui est « typique » de ce qui est « exceptionnel » parmi les épisodes relatés), mais au statut bien délimité : on fait appel à la quantification pour résoudre un certain type de question qui ne peut être traité autrement, et non pour recourir à un argument d’autorité.
8Enfin, les historiens que nous restons n’échappent pas à la question du temps. Elle implique un intérêt particulier pour les changements de sens des mots : l’idée que le vocabulaire des textes étudiés comme leurs problématisations sont a priori éloignés de nous est évidemment centrale. Mais surtout, faire de l’histoire implique de s’interroger sur le changement, ses conditions de possibilité et son rythme. Nos deux thèses portaient ainsi sur une moyenne durée fortement agitée par des changements de régime politique et/ou par l’instabilité gouvernementale : l’une des questions était celle de l’autonomie des rythmes des phénomènes et des institutions étudiés par rapport à ces rythmes politiques généraux. Dire que les historiens travaillent sur le changement et la continuité n’est pas forcément une tarte à la crème si l’on veut bien préciser de quel type de continuité il peut s’agir et s’interroger sur les raisons d’accélérations éventuelles, sans se contenter de les décrire. Travailler sur des périodes de changement permet aussi d’éviter la téléologie : nous avons pu en particulier comparer des institutions qui s’installaient, au moins un certain temps, comme productives et légitimes, à d’autres qui avaient échoué. Cela permet de donner un sens un peu concret à la notion de contrainte ou d’espace des possibles. C’est peut-être un des points où nous nous sentons le plus historiens, par rapport à certains usages de l’histoire en sciences sociales : pour nous, l’essentiel ne sera jamais dans les généalogies ascendantes, celles qui cherchent des ancêtres ou des points de comparaison à un phénomène contemporain, mais bien dans celles, descendantes, qui prennent la peine de reconstituer les possibles, les configurations d’un moment donné, sans occulter les projets « voués à l’échec » ni les filiations paradoxales7.
9Ce sont donc deux aspects centraux que nous allons maintenant évoquer dans de courtes études de cas : les créations institutionnelles, réussies ou non, comprises dans leurs chronologies propres, et les réalités concrètes du travail consultatif.
Faire l’histoire d’une (re)création institutionnelle avortée : les débats sur le rétablissement des corporations, 1804-1821
10Lorsqu’il est question, dans des débats qui deviennent de véritables controverses en 1804-1811, puis en 1817-1821, de rétablir en France une structure corporative d’ensemble, un grand nombre d’organes consultatifs eux-mêmes rétablis ou créés depuis le Consulat – chambres de commerce, conseils généraux des manufactures et du commerce, bureau consultatif des arts et manufactures, Conseil d’État – prennent position, et ce d’autant plus qu’il s’agit de (re)créer des institutions en partie concurrentes. Ces débats dont l’historiographie n’est toujours pas stabilisée8 constituent donc un bon point d’entrée dans l’histoire des pratiques consultatives, autant qu’un exemple des apports de l’étude des controverses.
11Si l’historiographie des corporations du XVIIIe siècle a été renouvelée depuis vingt ans, gommant le mythe de l’atelier familial idyllique comme celui du carcan passéiste, les controverses du XIXe siècle ont été plus longtemps encore rabattues sur des oppositions simples entre archaïsme et modernité. Il n’était dès lors pas difficile d’identifier les parties en présence aux légitimistes, aux banquiers, aux petits commerçants, voire à « la bourgeoisie », et de faire du débat un incident de la vie politique ou de la marche du progrès économique. Sortir de ces schémas pour y voir une controverse éclairant l’histoire des pratiques consultatives imposait en particulier de définir un corpus aussi exhaustif que possible, mais aussi structuré par la réalité des dialogues (beaucoup de textes se répondent, tandis que d’autres restent en marge) et par la chronologie de la construction d’une norme, certes interrompue : pamphlets, consultations, projets de loi. On ne peut analyser le sens d’un projet validé par le Conseil d’État (mais que l’Empereur, finalement, ne signe pas) comme celui d’un pamphlet isolé. On a aussi choisi de voir dans les textes ainsi rassemblés non pas seulement un recueil d’idées sur le corporatisme, mais bien le travail en cours d’acteurs qui pensaient(re)créer une institution bien réelle, avec un budget, un périmètre, des attributions, des localisations. Ces questions pratiques ne sont pas les seules à les préoccuper, mais on ne peut éluder leurs effets sur l’issue du débat.
12À cette construction d’un corpus, s’éloignant d’une historiographie qui a souvent considéré tous les textes parlant de « corporations » sur le même plan, s’ajoutait la volonté de prendre en compte différentes temporalités, liée au choix plus global d’étudier le premier XIXe siècle sans faire commencer l’Histoire en 1789, tout en profitant des nombreux changements de régime pour tester les effets de configurations politiques variées. D’ailleurs, si l’on n’y est pas aveugle, les textes eux-mêmes renvoient à ces échelles temporelles : on y cite longuement Turgot et Smith en même temps qu’on s’y réclame de 1791 ou de la Charte.
13Ce choix et ce traitement des sources permettent de comprendre que, si le débat tend, en particulier dans les pamphlets, à rejouer à l’infini celui de 1776, en citant et recitant les mêmes textes, on ne peut pour autant voir dans les projets du XIXe siècle une réelle volonté de rétablissement à l’identique des corporations de l’Ancien régime – pas plus qu’une préfiguration des projets néocoporatistes du XXe siècle. Il faut certes étudier pour elle-même cette rhétorique de la continuité, que son rapport fort lointain aux pratiques rend justement intéressante. Mais il est tout aussi important de se demander à quels besoins du moment étaient supposés répondre les projets de réincorporation (besoins qui ne sont pas les mêmes en 1804-1811 et en 1817-1821), comment ils étaient supposés s’insérer dans le nouveau système d’administration locale et de consultation économique, et dans quelle mesure leur échec est lié, autant qu’à des préventions idéologiques, à un ensemble de problèmes pratiques. La question est en effet celle de la possibilité de « recréer » quelque chose qui n’existe plus depuis vingt ou trente ans, et de « recréer » isolément une institution qui s’insérait intimement dans le système politique et social plus global de l’Ancien Régime. Ceux qui voudraient des « corporations » pour lutter contre la fraude, mieux connaître l’état de l’industrie ou restaurer l’apprentissage achoppent en partie sur la question de leur financement (volontaire ? étatique ?) ou encore sur celle de la classification des professions et du choix d’une échelle locale : si les découpages du XVIIIe siècle étaient régulièrement contestés et modifiés, cette référence même a disparu.
14Dans le même temps, de nouvelles institutions, chambre de commerce de Paris ou conseils généraux du commerce et des manufactures, ont réussi, vers 1820, à se poser comme des interlocuteurs légitimes pour l’information et la consultation, voire pour la représentation économique : elles pèsent sur la controverse, refusant de voir émerger, avec les corporations, des rivales. Et si elles pèsent, c’est aussi qu’elles maîtrisent la rhétorique légitime du moment, qu’elles savent par exemple arguer habilement de la Charte – cela pour dire qu’on ne souhaite pas privilégier une explication purement « matérielle » ni purement « idéologique » de l’issue de la controverse, mais bien en comprendre la dynamique propre et ce qu’elle nous révèle de l’histoire des institutions consultatives. Pour faire cette histoire, il est essentiel de restituer, à chaque instant, la diversité des solutions pensables (idéologiquement) et possibles (en pratique), solutions qui ne correspondent pas toujours aux généalogies ascendantes que nous aurions imaginées. Ainsi, en 1806-1809, pendant l’élaboration de la grande loi sur les conseils de prud’hommes, il a été question de faire de ces conseils de véritables corporations : il est important de prendre en compte à la fois l’existence de cette proposition et les raisons de son abandon.
Étudier les pratiques de travail d’une institution : collégialité et division des tâches
15Après ce questionnement sur les (re)créations et les concurrences institutionnelles, évoquons maintenant un aspect des pratiques internes aux institutions, fondé sur des sources bien différentes. La présence, à la chambre de commerce de Paris, d’archives à la fois plus volumineuses et moins riches que celles du CNE quant aux modes de préparation des rapports a conduit au choix d’une approche plus quantitative, en partie fondée sur une analyse en termes de réseaux. Que dire de commissions dont on ne connaît souvent que le nom des commissaires et un rapport final ? En réalité, il est possible d’aborder par là le problème de la division des tâches, dont les enjeux sont autant philosophiques (formes de délibération, rapport à l’intérêt particulier) que pratiques.
16La chambre de commerce, en 1803-1852, est composée de 15 membres élus, avec un turnover assez fort, qui rendent environ 1 000 rapports à différentes administrations. Rapidement, les réunions plénières bimensuelles apparaissent insuffisantes pour préparer ces rapports demandés en nombre croissant. Un travail en commissions préparatoires s’impose, dont on connaît les protagonistes de façon exhaustive, mais dont on ne peut guère cerner la réalité pratique. Pourtant, au moins trois éléments apparaissent à la fois mesurables et intéressants : le fait de faire préparer le rapport collectivement (en général par trois membres) ou bien par un unique rapporteur (pour 30 % des rapports) ; la pérennité des commissions (décrites comme permanentes ou comme provisoires, regroupant parfois de facto les mêmes personnes) ; la plus ou moins grande spécialisation des membres, par le biais de cette organisation du travail.
17Cette question du travail en commission s’inscrit dans le cadre d’une problématique plus générale. La chambre de commerce a en effet été étudiée en particulier pour ce que son histoire nous dit de la relégitimation progressive des notions de représentativité de secteurs économiques et d’expertise liée à ces spécialités sectorielles. Ce sont là des questions épineuses en un temps de refus affirmé des « intérêts partiels ». Or les indicateurs de division des tâches sont liés à cette question de l’intérêt général, ainsi qu’à celle de la production du consensus dans une institution collégiale. À la période étudiée, les procès-verbaux de la chambre de commerce de Paris, même s’ils retracent de vifs débats internes, ne nomment pas les membres impliqués : la délibération doit produire quelque chose sur quoi tous s’accordent. Par rapport à cette idée d’une institution impersonnelle et donc neutre, le choix d’un rapporteur unique, certes plus économique en temps, ce qui est important pour des membres bénévoles par ailleurs en pleine activité, peut poser problème. Choisi en vertu de sa compétence et/ou de son temps libre, il est évident qu’il oriente la position ultérieure de la chambre. Lorsqu’un marchand de vins doit préparer un rapport sur le commerce du vin, la frontière entre expertise et représentation d’un intérêt particulier est mince. Même lorsque ce sont des commissions qui sont nommées, un problème similaire peut se poser si elles deviennent permanentes, soit que leurs membres soient aussi impliqués dans le secteur concerné, soit qu’à force d’enquêter auprès des intéressés, ils créent des liens privilégiés avec eux.
18Or on observe que la part des rapports préparés par un seul membre connaît un net accroissement pendant les cinquante années étudiées. Parallèlement, alors qu’au départ, chaque commission ne préparait qu’un rapport, des commissions permanentes naissent, d’abord sur quelques questions bien circonscrites. À partir de 1847, la chambre est divisée en trois sections qui doivent normalement se répartir tous les problèmes : au lieu d’interactions souples et variées selon les questions, on a des membres qui travaillent toujours avec les mêmes collègues et sur la même spécialité. L’étude statistique des rapporteurs montre que cette évolution a été préfigurée de longue date pour certains secteurs d’activité (vins, navigation) qui ont été les « chevaux de Troie » des notions de représentativité et d’expertise. Toutefois, 1847 marque une vraie rupture : elle précède les bouleversements politiques de 1848, qui accentuent ensuite le virage de l’institution vers l’idée de représentativité plutôt que de neutralité. Son évolution n’est donc pas seulement exogène et liée aux grands événements politiques.
19Cette étude du travail en commission, utilisant des méthodes sociologiques sur un objet largement ignoré des sociologues, apparaît d’autant plus féconde que les mêmes questions se posent au Parlement9. Ainsi, dans les assemblées législatives, les commissions permanentes sont consacrées dans la Constitution de 1793, mais interdites dans celle de l’an III. C’est seulement en 1830 qu’est créée la commission du budget, tandis que la Constituante de 1848 est partagée en 15 comités permanents, supprimés dans l’Assemblée législative, à l’exception, toujours, du budget. Constituer ou non des commissions permanentes, en faire ou non des partitions de l’assemblée (chacun appartenant à une seule commission) implique donc de prendre position par rapport à ces références liées à des révolutions. Les membres de la chambre de commerce, souvent parlementaires, pensaient d’ailleurs probablement à ces enjeux. Une étude sérieuse liant les discours et les pratiques sur le travail collégial dans les assemblées consultatives – et, plus largement, délibérantes –, étude liant approches « micro » et sérielle, serait décidément utile pour explorer ces jeux entre références historiques, choix idéologiques et contraintes pratiques.
L’incarnation d’un problème : les échelles d’une création institutionnelle
20La représentation des intérêts professionnels est un problème récurrent de la politique française depuis la rupture révolutionnaire. Il a d’ailleurs intéressé depuis longtemps les juristes, tant sur le plan de la théorie constitutionnelle que sur celui de l’histoire des institutions. À la lecture de ces travaux, l’existence du Conseil national économique durant l’entre-deux-guerres semble s’inscrire dans une histoire longue, cohérente et orientée, qui, d’élaborations théoriques (les références ici abondent et sont parfois d’ailleurs difficilement conciliables…) en initiatives plus ou moins avortées, aboutirait à l’équilibre de la Ve République d’après le référendum de 1969 : l’existence d’une troisième chambre, le Conseil économique et social, reconnue par la Constitution mais au rôle strictement limité dans l’appareil d’État. Dans un tel cadre, l’expérience du CNE n’est évoquée qu’à travers une date de création officielle (1925) et une date de suppression (1940).
21Une telle perspective ne permet aucunement de comprendre une des originalités essentielles de cette institution durant ces quinze ans : sa progressive construction comme institution légitime. Pour tenter d’illustrer ce propos, on évoque ici la création du CNE en reliant ses deux aspects : d’une part les débats théoriques sur la souveraineté et l’intégration des intérêts professionnels à la politique, d’autre part les conflits et les luttes autour de la forme à donner à l’institution.
22S’intéresser à la création d’une telle institution oblige d’abord à inscrire cette action dans différentes temporalités : un temps long d’élaborations doctrinales et de mutations sociales (de Durkheim à Duguit et de La Tour du Pin à Paul-Boncour d’un côté, du développement du syndicalisme ouvrier à l’accroissement de la législation sociale de l’autre), un temps médium de problématisations plus précises et d’expériences (dans notre cas, la Première Guerre mondiale apparaît comme un véritable laboratoire administratif et social), un temps court qui considère le rôle des différents acteurs politiques et sociaux, leurs propres calendriers et leurs tactiques (ici, l’année 1924, avec l’arrivée du Cartel des gauches au pouvoir, la politique de la CGT et les choix patronaux, est déterminante). Voilà pour rouvrir l’espace des possibles en amont de la création. Explorer ces échelles temporelles diverses ne revient pas à dire que tous les projets sont équivalents, mais amène à hiérarchiser et articuler des causalités.
23La construction de l’institution se poursuit une fois le décret officiel signé. Le CNE se construit progressivement avec la création d’un secrétariat général, l’élaboration de méthodes de travail, l’obtention d’un lieu définitif pour son assemblée. La question est d’autant plus importante que le CNE est une institution nouvelle particulièrement attaquée : se mêlent en effet les réactions des stricts opposants au projet, de ceux qui défendent un projet plus ambitieux et de ceux qui se plaignent simplement de ne pas y être représentés. Ces attaques contre le Conseil influencent sa structure. En effet, l’institution n’est au départ régie que par un simple décret : la loi de finances de 1926 oblige au vote d’une loi pour sa création, mais celui-ci n’a lieu qu’en 1936. Pendant dix ans, le débat fait rage sur la manière de réorganiser définitivement l’institution ; cette controverse, qu’elle se déroule devant le Parlement, dans les congrès syndicaux, dans les revues intellectuelles, entre hauts fonctionnaires ou entre professeurs de droit, lie toujours préoccupations intellectuelles et soucis de défense d’intérêts.
24Cette précarité de l’institution est une donnée essentielle pour en comprendre la dynamique. Précarité matérielle d’abord : le CNE dispose d’un budget et d’un personnel très limités, et il est privé de locaux propres pendant les cinq premières années de son existence. Son installation au Palais-Royal est d’ailleurs déterminante pour le renforcement de ses liens avec le Conseil d’État. Précarité dans l’équilibre politique et institutionnel de l’époque aussi : créé par le gouvernement du Cartel des gauches, le CNE parvient à se maintenir lors du retour de Poincaré au pouvoir et à traverser par la suite les alternances politiques. De plus, il réussit à durer malgré les exigences de toutes les institutions qui pourraient prendre ombrage de sa création : le Parlement, les ministères et leurs conseils supérieurs spécialisés, ou encore les chambres de commerce.
25Cette situation oblige les acteurs du Conseil à donner assez vite une légitimité à l’institution. Ils le font essentiellement à travers deux dimensions : devenir le lieu symbolique de la reconnaissance des légitimités syndicales et associatives, et construire un discours original sur l’économie, qui soit apprécié par les autres institutions et corresponde à une ressource innovante. Faire partie des « organisations les plus représentatives », pour reprendre le terme juridique, est un symbole de pouvoir et de légitimité publique. On peut aussi, par ce prisme de la légitimité progressivement construite, comprendre l’importance des acteurs qui ont dirigé cette institution. Le secrétaire général, Georges Cahen-Salvador, un membre influent du Conseil d’État, montre dans ses pratiques que la maîtrise de l’appareil administratif (ses liens directs avec la classe politique et les directeurs d’administration centrale, sa capacité de rédaction de textes juridiques ou sa force de mobilisation de partenaires) est une des conditions d’affirmation institutionnelle dans une IIIe République pourtant réputée comme étant d’abord le lieu du parlementarisme triomphant. L’analyse de l’échec de l’expérience concurrente et soutenue par le patronat du Comité consultatif du commerce en 1924 fait ressortir nettement les éléments qui permettent de comprendre le maintien et l’affirmation du CNE.
26Cette expérience n’est donc pas la simple traduction automatique de la controverse constitutionnelle sur la représentation des intérêts. De plus, la contextualiser permet de saisir les vrais enjeux du débat, qui ne résident pas tant dans le choix des attributions que l’on confie à un tel Conseil (en dehors de voix isolées ou provocatrices, le CNE est toujours voulu comme un organe consultatif) que dans celui des cadres de la représentation que l’on veut donner de la société. Dans les débats et les conflits autour des projets successifs s’affrontent des visions très différentes : une assemblée avec des confédérations syndicales, des associations et des experts, une voie plus professionnelle avec des représentants de différents intérêts sectoriels, une structure strictement paritaire pour favoriser le dialogue social, une solution plus décentralisatrice avec des conseils régionaux. En plus de ces choix essentiels, la question de la composition au sens strict d’une telle assemblée pose en fait trois problèmes : celui de la division choisie pour l’assemblée, celui de l’équilibre des différentes catégories créées, enfin celui de la procédure de nomination des membres. Bref, inscrire une telle question théorique dans une expérience historique oblige à déplacer les cadres habituels de questionnement pour mettre en avant des oppositions politiques et sociales changeantes.
L’expertise négociée : entre paradoxe et évidence
27Le deuxième élément que l’on souhaite mettre en avant concerne une dimension spécifique de cette institution : celle de la gestion de l’expertise économique et des négociations sociales. Saisir ainsi l’objet permet de rappeler que l’histoire politique, comme la science politique, ne peut être séparée de l’histoire économique et de l’histoire sociale – on peut d’ailleurs regretter le faible nombre de travaux dans la science politique française sur l’économie politique.
28La régulation économique et les rapports entre l’État et la société dans la France de l’entre-deux-guerres nous semblent aujourd’hui bien lointains. Les formes que l’on rencontre dans les années 1920 et 1930 sont héritées des débats de la fin du XIXe siècle et commencent alors à peine à se transformer : débats sur l’arbitrage des conflits collectifs du travail, sur les ententes économiques, sur le droit social (autant de découvertes dues à l’immersion dans les sources imprimées et dans les archives du CNE), procédures d’enquêtes sociales et économiques. L’attention aux préoccupations des acteurs, loin de tout anachronisme, amène à s’intéresser sur un tel objet non pas à des données générales et théoriques sur des modèles néo-corporatistes, mais bien à la signification d’une expérience tout à la fois économique, politique et sociale.
29On retient seulement ici la question de l’expertise et de l’information économiques, en écho au thème des formes de l’État consultatif et à l’étude de cas développée par Claire Lemercier sur les formes de travail préparatoire à un rapport. Le sens originel de l’institution (intégrer les intérêts économiques à l’appareil d’État) comme les travaux qu’elle a produits (plus de 115 avis et rapports entre 1926 et 1939) permettent de donner un autre éclairage sur ce thème.
30La question de l’expertise se pose au Conseil suivant toute une série de dimensions. Les représentants au CNE sont porteurs tout à la fois d’intérêts (ouvriers, patronaux, agricoles, artisanaux…) et d’un savoir sur l’économie, et en particulier sur leurs branches d’activités. Ils sont aussi présents dans d’autres institutions (Parlement, organisations internationales, autres corps consultatifs) où ils peuvent capitaliser diverses expériences. Ils sont enfin dans la situation de pouvoir consacrer plus ou moins de temps à leurs fonctions au CNE – sur ce point, on se doit de souligner que ce ne sont pas des « doublures » qui sont envoyées au Conseil, mais qu’y sont actifs les principaux dirigeants syndicaux de l’époque.
31Les premiers rapports sur des questions économiques sont présentés par des membres du Conseil spécialistes de leurs domaines, débattus par la commission permanente ou par des commissions spécialisées, puis adoptés en assemblée générale. Mais certaines enquêtes traînent en longueur et certains rapports n’aboutissent pas. De plus, les syndicalistes patronaux, qui ont à leur disposition un personnel assez important, sont dans une position favorable pour contrôler certaines procédures d’enquête. Le Conseil décide donc en 1930 de faire appel à des rapporteurs « neutres » (à différencier des « experts » du CNE qu’étaient les hauts fonctionnaires représentants des différentes administrations ministérielles, ne rédigeant jamais de rapports). Le choix fait par le secrétaire général Georges Cahen-Salvador, en accord avec les principaux dirigeants syndicaux, consiste à faire appel à des membres des grands corps (et au premier titre du sien : le Conseil d’État) et des corps techniques, afin d’améliorer le rythme de production des rapports. Le Conseil national économique peut ainsi mener à bien une série d’enquêtes sur la situation des différentes branches de l’économie nationale entre 1930 et 1936. Le rôle de ces rapporteurs supposés « neutres » est essentiel, car ils tiennent la plume des compromis et permettent ainsi de saisir ce qui fait toute l’originalité des travaux du Conseil : une expertise négociée. Le rapport du jeune haut fonctionnaire n’est en effet jamais adopté sans retouche et les sujets les plus polémiques provoquent parfois de graves affrontements. Le rapporteur est chargé de compiler l’information économique qu’il a recueillie et de présenter un éventail de solutions rationnelles. Les instances représentatives du Conseil en débattent et statuent sur les conclusions à adopter. Même si la situation sociale s’envenime avec les mesures économiques et sociales du Front populaire, le fait qu’une large part des rapports soit adoptée de manière quasi unanime est important. Cette part de négociation, voulue et portée par les convictions de réforme sociale des principaux animateurs de l’institution, lui donne sans doute une des dimensions les plus fortes de son identité. Les conclusions de l’étude sur ce thème rejoignent le renouvellement présent des travaux sur l’expertise dans la science politique française10.
32Outre l’aspect négocié de ces rapports, leur écho auprès de la presse et des autres institutions de l’époque tient aussi et surtout à la pénurie d’informations économiques précises. Dans la France en crise des années 1930, le CNE, à la recherche d’une identité, a fini par se faire reconnaître comme un des lieux privilégiés (et surtout alternatif au seul discours patronal relayé par la Société d’étude et d’information économique) du discours sur l’économie et les questions sociales. Cette position est reconnue même dans les moments de tension, ainsi après 1936 sur les questions de temps de travail.
33À partir de nos options de recherche (théoriques et pratiques) et des applications présentées brièvement ici, on a cherché à montrer que l’histoire contemporaine du politique, pour diverse qu’elle soit, ne renonce pas à traiter, hors de la « vie politique » au sens étroit, de l’État, de la « société civile » ou des débats économiques. Nous ne sommes pas seuls à nous engager sur de tels terrains, et nous savons ce que nous devons au dialogue permanent avec nos collègues sociologues, politistes, historiens des sciences, mais aussi économistes, juristes et historiens d’autres périodes historiques. Les études de certains médiévistes et de nombreux modernistes11 nous ont aidés à produire une vision plus complexe du politique, soucieuse aussi bien des forces sociales que des constructions juridiques, des questions conceptuelles que des luttes d’intérêts.
34Pour conclure, nous aimerions poser frontalement la question d’une étude de l’État à travers ses pratiques : en effet, si nos terrains respectifs ont été centrés sur des institutions intermédiaires françaises, c’est bien le besoin d’information et de conseils de l’État que nous avons, aussi, évoqué à travers elles. Ce détour permettant d’éviter une histoire parfois poussiéreuse de tel ou tel département ministériel ne nous empêche pas de considérer l’histoire des politiques publiques comme un domaine de recherche prioritaire – en incluant sa dimension nécessairement comparative12.
35Faire cette histoire impose de réfléchir sur la complexité des formes étatiques. Si, par commodité de langage, on parle de « l’État », il convient souvent de préciser par des adjectifs qualificatifs de quel État il s’agit, et donc de s’interroger sur ses différents corps, lieux et fonctions. Décrire la complexité des formes ne suffit pas à saisir les pratiques de l’État : il faut l’envisager dans son fonctionnement, tant durant des « temps ordinaires » que durant des phases de crises. L’influence des guerres, des crises politiques et sociales, les apports des sciences de gouvernement, l’ordre colonial sont autant d’entrées qui méritent d’être prises en compte. Les interventions de l’État dans les domaines économiques et sociaux constituent à n’en pas douter un morceau de choix pour nos préoccupations. Réfléchir au service public et à l’intérêt général, aux modalités de la mise en place d’une équité sociale ou de politiques assurantielles, saisir les variations de doctrines, d’institutions et de politiques en ces domaines permet d’incarner l’État. Encore faut-il le faire de façon non anachronique. Ainsi, au XIXe siècle, « l’intérêt général » est omniprésent dans les discours, mais la notion de « service public » émerge à peine et les formes de concession, de gestion d’équipements ou de passations de marchés n’ont guère à voir avec ce que l’on connaît aujourd’hui : elles gagnent plutôt à être comparées à celles de l’Ancien Régime.
36Parler de l’État en histoire sociale ne peut d’autre part se faire au prix d’un oubli de la société. Dans le cas français, le discours de l’État jacobin est, nous sommes quelques-uns à le penser, pour une part un mythe – qui, comme tous les mythes, a aussi son efficacité dans l’ordre des représentations, censurant ou favorisant certains discours, maintenant certaines institutions dans une extrême discrétion. Les lieux de contact, conflictuel ou institutionnalisé, entre l’État et les acteurs sociaux constituent ainsi des terrains sans doute prioritaires à étudier13. Enfin, les régulations juridiques, longtemps ignorées par les historiens car jugées trop techniques, sont des objets tout aussi cruciaux pour mettre au jour d’autres « figures de l’État ». Le renouveau récent des études sur les normes économiques montre ainsi que, loin d’une opposition entre Codes rigides et liberté des acteurs, on peut retrouver tout un continuum passant par les « usages » ou la jurisprudence de tribunaux spécialisés. C’est l’étude de cet espace intermédiaire dans toute sa diversité qui peut seule permettre de réellement comprendre les politiques publiques, dans leurs dynamiques historiques, dans leur mise en œuvre réelle et donc toujours en partie négociée.
Notes de bas de page
1 A. Chatriot, La démocratie sociale à la française. L’expérience du Conseil national économique 1924-1940, Paris, La Découverte, 2002 (version remaniée et abrégée de la thèse).
2 C. Lemercier, Un si discret pouvoir. Aux origines de la chambre de commerce de Paris 1803-1853, Paris, La Découverte, 2003 (version remaniée et abrégée de la thèse).
3 Voir la convergence, malgré les différences de méthodes, entre S. Kaplan et Ph. Minard (éd.), La France, malade du corporatisme ? XVIIIe-XXe siècles, Paris, Belin, 2004 et P. Rosanvallon, Le modèle politique français. La société civile contre le jacobinisme de 1789 à nos jours, Paris, Le Seuil, 2004.
4 Voir « Les pratiques administratives en Union soviétique 1920-1960 », dossier sous la direction de S. Dullin et C. Gousseff, Les Cahiers du monde russe, 44, 2-3, 2003.
5 Voir la synthèse de M. Offerlé (éd.), La société civile en question, Paris, La Documentation française, 2003.
6 C. Lemercier, « Les carrières des membres des institutions consulaires parisiennes au XIXe siècle », Histoire & Mesure, XX-1/2, 2005, p. 59-95 et C. Lemercier, « Analyse de réseaux et histoire », Revue d’histoire moderne et contemporaine, 52-2, avril-juin 2005, p. 88-112.
7 À cet égard, l’étude de P.-A. Rosental, L’intelligence démographique. Sciences et politiques des populations en France (1930-1960), Paris, Odile Jacob, 2003, aux frontières de l’histoire des sciences et des institutions, représente pour nous un modèle.
8 Malgré les travaux précités de P. Rosanvallon et Ph. Minard, qui marquent un net progrès par rapport à l’historiographie antérieure, il reste beaucoup à dire sur cette question.
9 La thèse en cours d’Hélène Lemesle (Université de Paris X) sur les marchés publics au début de la IIIe République, appuyée en particulier sur des « archives privées » très riches issues d’une commission parlementaire, devrait nous en dire plus sur ce sujet. Pour une approche formelle très féconde, cf. J. Padgett, « Mobility as Control : Congressmen through Committees », in R. Breiger (ed.), Social Mobility and Social Structure, Cambridge, Cambridge University Press, 1990, p. 27-58.
10 L. Dumoulin, S. La branche, C. Robert et Ph. Warin (éd.), Le recours aux experts. Raisons et usages politiques, Grenoble, Presses universitaires de Grenoble, 2005 et P. Lascoumes (éd.), Expertise et action publique, Paris, La Documentation française, 2005. C. Rabier (éd.), Fields of Expertise : A Comparative History of Expert Procedures in Paris and London, 1600 to Present, Cambridge, Cambridge Scholars Publishing, 2007.
11 Voir par exemple F. Cosandey (éd.), Dire et vivre l’ordre social en France sous l’Ancien Régime, Paris, Éditions de l’EHESS, 2005.
12 A. Chatriot, M.-E. Chessel et M. Hilton (éd.), Au nom du consommateur, consommation et politique en Europe et aux États-Unis au XXe siècle, Paris, La Découverte, 2004 ; A. Chatriot et D. Gosewinkel (éd.), Figures de l’État. L’Allemagne et la France, 1870 à 1945. Figurationen des Staates, Deutschland und Frankreich, 1870 bis 1945, Munich, Oldenbourg, Pariser Historische Studien des Deutschen Historischen Institut Paris, 2005.
13 Comme l’a montré la riche analyse de J. Horne, Le Musée social. Aux origines de l’État providence, Paris, Belin, 2004.
Auteurs
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