1 Cette communication rend compte d’une partie de ma thèse. B. Havard Duclos, Entre philanthropie et syndicalisme. Militants et mal-logés de l’association Droit Au Logement, thèse pour le doctorat de sociologie, sous la direction d’O. Schwartz, Université de Saint-Quentin en Yvelines, décembre 2002.

2 Droit au logement, Le logement : un droit pour tous, Le cherche Midi, 1996, p. 125.

3 La trentaine de comités locaux mis en place progressivement à partir de 1995 sur l’ensemble du territoire repose pour la plupart sur une poignée de militants. Seuls font exception le comité de Paris (appelé aussi DAL fondateur), Lille et Marseille. Le maillage du territoire est donc encore très lâche et pour les petits comités, le départ d’un militant très impliqué peut signer l’arrêt, temporaire ou définitif, de l’activité. La plupart des actions à Paris concernent moins d’une centaine de personnes à chaque fois. Seuls quelques grands rassemblements réunissent entre 500 et 1 000 personnes lors de manifestations associant d’autres organisations.

4 Pour reprendre l’expression de C. Aguiton et D. Bensaïd, Le retour de la question sociale : le renouveau des mouvements sociaux en France, Lausanne, Page deux, 1997. Voir aussi J. -M. Salmon, Le désir de société. Des restaurants du cœur au mouvement des chômeurs, La découverte, 1998 ; B. Poulet, « À gauche de la gauche », Le Débat, n° 103, 1999, p. 39-59 ; D. Pingaud, La gauche de la gauche. Contre-enquête, Le Seuil, 2000 ; J. -C. Brochier et H. Delouche, Les nouveaux sans-culottes, enquête sur l’extrême gauche, Grasset, 2000.

5 Le Monde titre le 4 novembre 2000 pour les dix ans de l’association : « En une décennie, le DAL est devenu un pilier de la lutte contre les exclusions » : « S’ils sont un peu moins sous les projecteurs aujourd’hui, c’est aussi que nombre de leurs idées ont fini par s’inscrire à la fois dans les mentalités et la législation. »

6 L’expression est d’O.Fillieule : « Toute organisation, ou groupe d’organisations, mettant en œuvre des stratégies d’action composées de séries d’interactions avec des cibles et qui comporte de manière privilégiée, le recours à l’action protestataire » in Stratégies de la rue. Les manifestations en France, Presses de la FNSP, 1997, p. 37-39.

7 C. Péchu, « Quand les “exclus” passent à l’action. La mobilisation des mal-logés », Politix, n° 34, 1996, p. 114-133.

8 Notion mise à jour par M. Olson, La logique de l’action collective, PUF, 1978. L’incitation sélective est ce qui pousse individuellement chacun à participer à l’action collective, soit positivement (récompense pour ceux qui agissent dans l’intérêt du groupe), soit négativement (coercition et exclusion des avantages de ceux qui n’ont pas supporté les coûts de l’action).

9 C. Péchu, « Les générations militantes à Droit Au Logement », Revue Française de Sciences Politiques, vol. 51, n° 1-2, 2001, p. 73-103. Plus récemment et de manière particulièrement convaincante, C. Péchu, Droit Au Logement, genèse et sociologie d’une mobilisation, Dalloz, 2006

10 C’est également le travail mené par Axelle Brodiez sur le Secours Populaire, présenté lors de ces journées d’étude.

11 O. Schwartz qualifie l’approche ethnographique comme une insertion personnelle de longue durée du sociologue dans le groupe qu’il étudie in « L’empirisme irréductible », postface à N. Anderson, Le hobo. Sociologie du sans-abri, Nathan, 1993, p. 267. C’est cette définition large et souple de l’ethnographie qui ne préjuge pas du mode de recueil des données ou d’une méthodologie particulière (il faut au contraire faire feu de tout bois par la multiplication des situations d’observation et d’entretiens, de niveau et d’intensité d’ailleurs inégal) que retiennent également S. Beaud et F. Weber in Guide de l’enquête de terrain, La Découverte, 1997.

12 N. Elias, Engagement et distanciation, Fayard, 1993 (1^re éd., 1983).

13 Pour une analyse de la relation d’enquête, voir mon mémoire complémentaire de DEA. « La relation d’enquête révélatrice de la diversité des dispositions militantes. Quatre portraits de militants intervenant dans un comité local de l’association Droit Au Logement », sous la dir. de G. Mauger, EHESS, 1997.

14 R. Castel, « De l’usage des grands hommes. Entretien avec Rémi Lenoir », Sociétés et représentations, novembre 1996, p. 33-39.

15 Cette méthode de construction de types idéaux en ayant recours à l’histoire sociale doit beaucoup à R. Castel. Il s’explique de son rapport à l’histoire et de sa dette envers M. Foucault, précurseur d’une pensée « généalogique », dans l’entretien précédemment cité, ainsi que dans l’introduction des Métamorphoses de la question sociale. Une chronique du salariat, Fayard, 1995. La référence à M. Weber et à la nécessité de penser « typologiquement » va ici aussi de soi. Cf. D. Schnapper, La compréhension sociologique, PUF, 1999.

16 R. Castel, op. cit., a montré l’intérêt d’un tel recours à la comparaison historique pour l’étude de la question sociale : les manières successives dont celle-ci a été posée et résolue dans l’histoire européenne éclairent le sens et la portée de la précarité sociale aujourd’hui.

17 Un mot sur l’utilisation de ces deux termes à forte charge symbolique et affective. Sans reprendre ces dimensions implicitement héroïques, j’ai employé ces termes qui ne font pas partie du langage « indigène » pour subsumer des situations fortement hétérogènes. Le terme de « réparateurs de malheur » rassemble des individus partageant une commune insatisfaction face à la société comme elle va et une volonté de la changer. Tous les acteurs ainsi désignés partagent l’objectif de « réparer le malheur », c’est-à-dire à la fois de contester et de dénoncer un malheur mais aussi de réparer des malheureux. Le terme de « malheur » renvoie à des situations de manque et de souffrance liées à des positions fortement dominées dans l’espace social. J’ai gardé l’item « porteurs de malheur » pour insister à la fois sur la symétrie entre les acteurs (comme on pourrait parler de « militants » et de « milités ») et donner à voir combien le malheur est construit socialement.

18 Et on voit bien ici en quoi elles n’épuisent pas l’histoire des réparateurs de malheur. Toute la mise en place de l’État social, soutenue par l’idéologie du solidarisme qui apparaît historiquement après, est précisément un moyen de dépasser les apories des deux premiers modes de résolution de la question sociale et n’est réductible à aucune de ces deux figures.

19 Tout comme D. Schnapper met au jour les « formes élémentaires de la relation à l’Autre » in La relation à l’autre. Au cœur de la pensée sociologique, Gallimard, 1998.

20 Il ne s’agit pas ici de tout amalgamer sans discernement, mais de prendre le risque d’un rapprochement entre des acteurs et des types de « réparation » politiquement très différentes, parce que ce rapprochement est fécond. Quand H. Becker parle d’« entrepreneurs de morale » ou de « croisés », il rapproche aussi des individus très différents aux positions politiques parfois opposées (abolitionnistes, prohibitionnistes etc.), mais qui ont en commun la même volonté d’imposer des normes à d’autres membres de la société. In Outsiders, Métaillé, 1985, p. 171-188.

21 Jeunesse de la grève, France 1871-1890, Paris, Seuil, 1984, notamment chap. 8.

22 Le fromage et les vers. L’univers d’un meunier du XVI^e siècle, Aubier, 1980, p. 16.

23 J’ai ainsi utilisé les travaux du GRMF : Les cahiers du Groupement pour la Recherche sur les Mouvements Familiaux, notamment le n° 7 « La bataille des squatters et l’invention du droit au logement 1945-1955 », Villeneuve d’Asq, 1992.

24 Cf. M. Perrot, « Les ouvriers, l’habitat et la ville au XIX^e siècle », in La question du logement et le mouvement ouvrier français, Paris, Éd. de la Villette, 1981, p. 19-39.

25 Des histoires plus précises et événementielles existaient déjà sur lesquelles je me suis appuyée. Par exemple J. -P. Flamand, Loger le peuple. Essai sur l’histoire du logement social, La découverte, 1989 ; C. Bachmann et N. Le Guennec, Violences urbaines. Ascension et chute des classes moyennes à travers cinquante ans de politique de la ville, A. Michel, 1996 ; R. Ballain, « Les associations agissantes », Informations sociales, n° 77, 1999, p. 126-133.