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Les campagnes du Lauragais à la fin du Moyen Âge

 | 
Marie-CLaude Marandet

Quatrième partie : Les hommes

Texte intégral

I. LES PROPRIÉTAIRES DU SOL TAILLABLE

  • 1 Ce sont les propriétaires qui déclarent les biens et non les locataires.
  • 2 Je ne préciserai donc pas, chaque fois, propriétaire utile.

1Sont considérés ici comme propriétaires tous les déclarants1 des registres d’estimes, que leurs biens soient des alleux ou des censives ; ils transmettent ces dernières à leurs héritiers, peuvent les vendre, les engager, peu importe qu’il y ait ou non un propriétaire éminent. Le droit de propriété et le droit d’exploitation ne sont pas forcément confondus, mais le propriétaire utile d’un bien s’en sent vraiment propriétaire2.

A. Les estimés : incertitudes

2Le Lauragais étant pays de taille réelle, tous les biens taillables figurent dans les registres et donc, en théorie, tous leurs propriétaires. En fait, plusieurs problèmes se posent, lacunes matérielles des registres, absence de contribuables potentiels. Les registres ne sont pas parvenus jusqu’à nous intacts. Ceux de Castelnaudary sont souvent incomplets : en 1496, il manque le cahier du port de la Place et celui du port Dedins ne recense pas tous les biens immobiliers des habitants ; le registre de 1535, le plus complet, a perdu 17 de ses folios. Il manque une partie du registre de « 1409 » de Montesquieu et deux pages du registre de 1485. Le registre 5 E 73, regroupant les estimes de Montgiscard, Ayguesvives et les Bastards présente des lacunes. Les autres livres d’estimes sont matériellement complets, sauf, parfois, pour les déclarations des forains. Cela signifie-t-il pour autant que tous les chefs de famille sont recensés dans ces registres réalisés dans un but fiscal ?

  • 3 Voir les deux fichiers « Les déclarants » dans la partie « Annexes ».

3Qui sont donc les déclarants3 ?

4Le corpus total pour le xve siècle est de 1487 déclarants (1 293 résidants et 194 forains). Les estimes de 1516 et 1535 de Castelnaudary ont été aussi utilisées parce qu’elles permettent de noter l’évolution démographique ; elles contiennent les déclarations de 1 121 chefs de famille (1 070 résidants et 52 forains). Les groupes de personnes, les « héritiers un tel » sont comptés pour un seul déclarant puisqu’un seul manifeste est réalisé.

1. Les « nichils »

5Les nichils habentes, ceux qui ne possèdent rien, les nichils solvabiles, ceux qui ont un très faible patrimoine, figurent-ils sur les registres, dans la mesure où ils sont susceptibles de payer la taille personnelle ?

  • 4 A.D.H.G., 5 E 67 f° 71 r°.
  • 5 A.D.A., 4 E 076/CC 10 f° 122 r°.
  • 6 Wolff (Ph.), Les estimes..., op. cit., pp. 51-52.
  • 7 On précise qu’ils n’ont ni bien meuble ni immeuble, mais qu’ils sont là car ils doivent payer le c (...)
  • 8 Biget (J.-L.), Les compoix d’Albi (xive-xve siècles), Les cadastres anciens..., op. cit., pp. 108- (...)
  • 9 Wolff (Ph.), Les estimes..., op. cit. p. 45.
  • 10 Comme c’est le cas, par exemple, en Vivarais, Valladier-Chante (R.), Le Bas-Vivarais au xve siècle (...)

6Les déclarants mentionnés sur les registres du Lauragais sont propriétaires de biens immobiliers et (ou) mobiliers ; des fermiers ou métayers, par exemple, ne sont allivrés que pour leur « cabal ». Parfois, dans le registre CC 9 de Castelnaudary, un bien n’est pas estimé, à Fendeille, des biens sont marqués nichil (signe qu’après considération de leur valeur vénale et des charges pesant sur eux, ils ne sont pas imposables), mais ce n’est jamais le cas pour un individu. A Montesquieu et Castelnaudary, quelques noms de chefs de famille ne sont toutefois pas suivis d’un état de leurs biens. Ils sont 12 à Montesquieu en 1409 (dont six noms rayés par la suite) et six en 1485 (cinq habitants de la viguerie, c’est-à-dire du plat-pays, probables fermiers ou métayers, et un seul habitant du village, Jean Jammes4). À Castelnaudary, ils sont une dizaine dans le registre de 1496, on précise souvent qu’ils sont « gasaillers » (c’est-à-dire fermiers ou métayers) de tel ou tel propriétaire, par exemple, de Denis Figayrolis, de B. et P. Capdebiou5. Ces quelques individus n’ont pas été comptabilisés parmi les déclarants. Philippe Wolff pense qu’à Toulouse ceux qui n’ont pas de cote en face de leur nom sont des privilégiés6. Je n’ai pas retrouvé les déclarants non allivrés dans les registres notariés, ils ne me semblent pas avoir exercé une fonction administrative. Contrairement à ce qui se passe à Saint-Flour7, à Albi8 et Toulouse9, ces individus ne peuvent correspondre aux nichils habentes, les non-propriétaires, car ceux-ci représentant au moins 30 à 50 % de la population, ils ne sont pas assez nombreux ; de plus, on a laissé, en dessous de leur nom, une petite place pour insérer leur manifeste. Ces personnes non allivrées ont dû quitter la ville ou le village depuis la dernière confection d’une estime, ce qui est souvent le cas des gasaillers qui changent périodiquement de ferme ; comme leur nom figurait sur le registre précédent, il a été recopié sur le nouveau. Peut-être s’agit-il, parfois, de personnes décédées dont la succession n’est pas encore réglée. Les non-propriétaires sont donc absents des registres10.

  • 11 Biget (J.-L.), Les compoix d’Albi (xive-xve siècles), Les cadastres anciens..., op. cit., p. 108.
  • 12 Wolff (Ph.), Les estimes..., op. cit., p. 27.
  • 13 Au xve siècle, à Albi, le seuil d’imposition était le même, mais la réduction des cotes était alor (...)
  • 14 Wolff (Ph.), Les estimes..., op. cit., p. 31.
  • 15 Ibid., p. 42. C’est ce que voit Michelle Éclache, pour le capitoulat de la Dalbade : ceux qui ont (...)
  • 16 Wolff (Ph.), Les estimes..., op. cit., p. 43.

7Avons-nous dans les estimes tous les propriétaires ou seulement ceux dont le patrimoine atteint un certain montant ? Existe-t-il un seuil d’allivrement ou les nichils solvabiles sont-ils estimés ? À Saint-Flour et Albi, ils figurent sur les compoix11. À Toulouse, la population est, d’après la comptabilité capitulaire de 1330-31, déjà divisée, dans les registres d’estimes, en deux catégories, les estimatz et les nichils ne possédant pas de patrimoine ou possédant un patrimoine inférieur à un montant non indiqué. Les travaux de Philippe Wolff montrent qu’en 1335, tous les estimés, sauf un, possèdent un patrimoine égal ou supérieur à 10 £ tr (valeur réelle), c’est donc là que se situe la limite nichils-estimés12. En 1391, sont classés nichils ceux dont le patrimoine n’atteint pas 6 £ tr, valeur d’allivrement13, soit un dixième de la valeur réelle en ville, un demi en campagne ou un tiers, un quart, selon la zone (gardiage, viguerie, sénéchaussée) ; ils contribueront seulement pour la taille personnelle14. En 1459, une nouvelle réorganisation des procédés d’estimation a lieu, la limite entre estimés et nichils solvabiles est fixée à nouveau à 10 £ de valeur réelle et non réduite15. La valeur réelle des biens est alors réduite à 1/50 pour les immeubles, métairies et terres, à 1/40 pour les oblies et les biens meubles16.

  • 17 A.D.A., 4 E 138/1 G 1 f° 99 v°, P. Gibert, une logada et une parcelle de terre.
  • 18 A.D.H.G., 5 E 66 f° 44 v°.
  • 19 A.D.H.G., 5 E 66 f° 45 r°.
  • 20 A.D.H.G., 5 E 67, f° 24 v°.
  • 21 A.D.H.G., 5 E 73 f° 75 v° ; autres faibles allivrements : f° 75 r°, 5 £ pour une vigne, f° 41 r°, (...)
  • 22 A.D.H.G., 5 E 73 f° 104 r°.
  • 23 Ce que j’ai tenté par ailleurs, Marandet (M.-C), La gestion de l’impôt direct en Lauragais, au xve(...)

8À Castelnaudary, au début du xve siècle, les estimes les plus faibles, dans le registre CC 9, sont de deux ou trois livres d’allivrement et non de réel, c’est là que doit se situer la limite entre allivrés et nichils solvabiles. En 1496, les plus petites estimes sont de 3 sous, si l’allivrement est, comme à Toulouse, de 1/50 du réel pour les biens immobiliers, le seuil d’allivrement serait donc là de 7,5 £ de réel. A Fendeille, en 1495, le plus petit allivrement pour les résidants est de 1,5 sous17. Si l’allivrement était, là aussi, de 1/50 du réel, cela correspondrait à un patrimoine de 3,75 livres. La réduction doit être plus forte que cela. En 1428, la plus petite estime est de 3 £ 9 sous 3 deniers, toujours pour les résidants. À Montesquieu, dans le registre dit de 1409, les deux plus petites estimes pour les résidants sont de 2 £ pour un déclarant qui possède trois parcelles18, de 4 £ pour le propriétaire d’un ostal19. En 1485, l’allivrement le plus faible est de 5 £ 10 sous pour un déclarant qui détient un jardin et une petite parcelle20. À Montgiscard, en 1489, il est de 4 £, pour une vigne21. À Ayguesvives, le plus petit allivrement des résidants est de 3 £ pour trois arpents de bosigas22. Partout existe donc un seuil d’allivrement qui peut être de quelques livres ou de quelques sous, le problème étant d’établir un rapport entre cet allivrement et la valeur réelle des biens23. Les nichils solvabiles, petits propriétaires, n’apparaissent donc pas dans les estimes, une petite fraction de la propriété nous échappe.

  • 24 A.D.A.. 4 E 138/1S1.
  • 25 A.D.A., 4 E 076/CC 7.
  • 26 A.D.A., 4 E 138/1G1.
  • 27 Biget (J.-L.), Les compoix d’Albi (xive-xve siècles), Les cadastres anciens..., op. cit., pp. 108- (...)

9Nous disposons de rôles de taille pour la localité de Fendeille, c’est-à-dire de listes de contribuables figurant sur les estimes avec, en face de leur nom, la somme à payer, calculée d’après l’allivrement, en fonction du taux retenu. Nous avons aussi deux manuels de taille, un pour Fendeille, datant de 148424, un pour Castel naudary, datant de 149225, qui recensent les paiements successifs des contribuables et une taille de 1495 pour Fendeille26. A Castelnaudary, si l’on compare le registre d’estimes de 1496 (CC 10) et le livre de taille de 1492 (CC 7), on obtient des chiffres comparables de contribuables. Les déclarants de 1496 sont 419 (il manque le port de la Place où l’on trouve 60 contribuables en 1492), le total des contribuables de 1492, pour la ville seule, est de 458. Les quatre années d’écart entre les deux registres rendent toutefois les comparaisons difficiles, des déclarants ne sont pas sur le livre de taille, des contribuables ne sont pas dans les estimes (mobilité, décès, héritages). A Fendeille, la comparaison est plus facile à faire, tous les allivrés de 1495 sont sur la liste des tailles de l’année. Les nichils habentes et solvabiles sont donc absents des deux types de registres, probablement avait-t-on des rôles de taille particuliers pour les nichils comme c’est le cas à Albi au xve siècle, rôles qui n’ont pas été conservés. À Albi, J.-L. Biget note que les immigrants temporaires manquent sur les allivrements et sur les comptes de taille27. Ce doit être aussi le cas dans les registres du Lauragais, mais cette population flottante ne possède pas de biens immobiliers, son absence n’est guère gênante, si ce n’est pour approcher le chiffre total de la population. L’absence des privilégiés, par contre, peut faire disparaître une partie des biens-fonds ruraux.

2. Les privilégiés

10Des privilégiés échappent-ils à la taille et donc à l’estimation de leurs biens ?

  • 28 Wolff (Ph.), Les estimes..., op. cit. p. 28.
  • 29 Wolff (Ph.), Registres d’impôts et vie économique à Toulouse sous Charles VI, Annales du Midi, 194 (...)
  • 30 Ib., p. 50.

11À Toulouse, l’article 9 d’une ordonnance des capitouls, placée en tête des estimes de 1391, précise que « chevaliers, bourgeois, marchands, membres des métiers et autres devront déclarer leur numéraire, bijoux, vaisselle précieuse, marchandises à vendre », l’article 14, qu’avec ses biens propres, « chaque contribuable devra déclarer ceux des membres de sa famille, des pupilles ou des facteurs ou serviteurs vivant chez lui ». Clercs et chapelains qui ont acquis des biens précédemment taillables doivent se soumettre à l’estimation pour ces biens. Les forains doivent déclarer les biens qu’ils possèdent à Toulouse, contribuer pour eux, mais sont exempts de la taille personnelle28. En théorie, tout le monde doit donc apparaître dans les registres, pour ses biens taillables. En fait, il existe plusieurs catégories d’individus qui sont exemptées de taille ou qui cherchent à l’être. Malgré le règlement de 1391, qui ne fait que reprendre certaines décisions royales, les forains, officiers royaux, nobles, sergents, monnayeurs, clercs et « personnes ecclésiastiques » telle l’Université de Toulouse, les collèges de boursiers, arguent de leur statut privilégié et ne veulent pas payer les tailles29. Les donats aux hôpitaux ou églises sont exemptés de taille, ce qui entraîne des abus, on se prétend donné pour bénéficier du privilège d’exemption30.

  • 31 A.M.T., II 47.
  • 32 A.M.T., II 86.
  • 33 A.M.T., FF 24 45 et Viala (A.), Le Parlement de Toulouse et l’administration royale laïque, 142 (...)
  • 34 Ib., p. 381 et suiv.
  • 35 En 1404, tous les officiers royaux doivent payer les aides, A.M.T., II 44, 1404 ; on retrouve la m (...)
  • 36 Cela est indiqué en tête du registre d’estimes de la Dalbade, Wolff (Ph.), Les estimes..., op. cit(...)
  • 37 Ibidem, p. 47-49.
  • 38 A.M.T, II 86.
  • 39 Gilles (H.), Les États de Languedoc au xve siècle, Privat, 1965, p. 189.
  • 40 Viala (A.), Le Parlement de Toulouse et l’administration royale laïque, op. cit., pp. 362-392.
  • 41 Wolff (Ph.), Registres d’impôts et vie économique à Toulouse..., op. cit., pp. 45-46.
  • 42 À Saint-Flour, des anoblis refusent de contribuer aux tailles, le roi les condamne à payer, leurs (...)

12À partir des documents conservés aux Archives municipales de Toulouse, on peut noter le désir permanent, que ce soit au xive ou au xve siècle, de faire contribuer tous ceux qui s’exemptaient, clercs et officiers royaux en particulier. En 1391, on prescrit de faire payer les tailles aux hommes mariés, même s’ils suivent les cours de droit ou de théologie (et disent qu’ils bénéficient des privilèges de l’Université)31 ; le pape n’est pas d’accord, il supprime toutefois le privilège d’exemption de taille dont bénéficiaient les donats (faux donats)32. L’Université obtient, en 1392, l’exemption de toutes les impositions établies dans le royaume pour la guerre ; les capitouls suscitent toute une série de procès au Parlement pour la faire payer, mais en vain : en 1405, la cour déclare l’Université de Toulouse imposable à une taille levée pour la guerre, elle ne paye pas33. Les monnayeurs, sergents royaux, autres officiers, parlementaires, tous les « fonctionnaires », d’une façon générale, excipent de privilèges et, malgré les procès, on n’arrive pas à les faire payer34. On multiplie les ordonnances pour contraindre officiers royaux, archevêque, clercs, à payer aides et tailles35. Malgré cela, beaucoup de clercs ne payent pas les tailles et ils ne figurent même pas dans les estimes de 1459. Ce n’est qu’en 1478 que les capitouls font estimer pour la première fois tous les chapelains et clercs de la ville pour les biens contribuables, sauf au titre de l’impôt personnel36. Ils sont imposés à un taux inférieur à celui des autres habitants. Les nobles résistent aussi, il existe une certaine tolérance à leur égard, Philippe Wolff cite le cas des Ysalguier qui ne figurent même pas dans les registres37. Même si, en 1466, le pape Paul II menace d’excommunication ceux qui ne déclarent pas leurs biens et leurs revenus38, même si les États de Languedoc affirment que tout habitant, exempt ou non, privilégié ou non, doit contribuer aux subsides royaux et n’accordent d’exception qu’aux « pauvres mendiants et misérables personnes » et, en 1464, aux veuves et aux orphelins dont les biens ont une valeur d’estime inférieure à 50£ tr39, d’une façon générale, trois groupes sont privilégiés : clercs, nobles, officiers royaux40. Les capitouls et trésoriers ne contribuent pas pendant qu’ils exercent leur charge41. L’impression qui domine, un peu partout, c’est qu’on a beaucoup de mal à faire payer ces catégories42. Les exemptés de taille ne sont pas, pour la plupart, recensés dans les estimes.

  • 43 Marandet (M.-C), La gestion de l’impôt..., op. cit.
  • 44 A.D.H.G., 5 E 73 f° 105 r°.

13On peut supposer que les règles en usage à Toulouse sont appliquées dans l’ensemble de la sénéchaussée et que les privilégiés ont essayé d’y résister. Quelques exemptés de taille, en raison de leurs fonctions, tels les consuls de l’année, les officiers royaux, peuvent être absents des registres d’estimes du Lauragais. Clercs et nobles figurent, conformément à l’ordonnance de 1391, pour leurs biens taillables, dans les estimes, mais en très petit nombre. Être allivré ne signifie pas forcément que l’on paiera les tailles43. On peut, aussi, faire porter la charge sur quelqu’un d’autre : on voit, dans le manifeste de Raymond de Pechbusque, à Ayguesvives, dans la marge de gauche, en face de chaque bien, figurer le nom de ceux qui payent la taille à sa place, c’est-à-dire ses fermiers ou métayers, puisque, normalement, le tenancier déclare lui-même ses tenures. Ainsi, pour six bordes et sept pati de bordes (au sens d’emplacement où se trouvait une borde) : « Jean Gendres paga 25 £ »44.

  • 45 Zemer (M.), Le cadastre..., op. cit., p. 77 et suiv.

14Il ne semble pas qu’il ait existé de livres séparés par catégories, par exemple, nobles, clercs, comme c’était le cas en Comtat Venaissin45, on a tendance, toutefois, à placer, dans les villages, les forains après les contribuables locaux. À Castelnaudary, étant donné le nombre important de gens d’Église (présence d’une collégiale, de deux couvents de Mendiants), ils sont regroupés en fin de registre (CC9, CC 10), le registre CC8 se résume à un cahier intitulé « las gens de la gleysa ».

  • 46 Cf. le tableau « Les déclarants » dans la partie « Annexes ».
  • 47 Elle est quand même supérieure à ce que R. Valadier-Chante note en Vivarais (72 clercs sur 3069 co (...)
  • 48 Marandet (M.-C), La gestion de l’impôt direct..., op. cit.

15Les gens d’Église sont présents, mais en faible quantité, sauf à Castelnaudary46. Dans les villages, on a parfois du mal à les repérer, j’ai considéré tous les déclarants qualifiés de « mossen » comme étant des prêtres (sauf pour l’un d’entre eux dont on précise qu’il est notaire, il peut, toutefois, être notaire apostolique), puisque c’est le titre honorifique qu’on leur donne encore au début du xxe siècle. Il s’agit du personnel local, sauf dans les bourgades qui sont situées à une demi-journée de marche de Toulouse, là, on trouve les chanoines et chapelains de Saint-Étienne et des prêtres habitant à Toulouse. Au xve siècle, les clercs représentent 7,19 % du corpus de déclarants (107 sur 1487). Presque tous résident à Castelnaudary où ils représentent 12,13 % des estimés (soit 88/725 pour les trois registres CC8, CC 9, CC 10) ; dans les autres localités, ils ne représentent que 2,36 % des déclarants (18 sur 762). Au xvie siècle, ils ne figurent que dans le registre CC 12 de Castelnaudary, ils constituent 1,87 % des déclarants (21 sur 1 122). Leur représentation dans les registres d’estimes semble réduite47, sont-ils si peu nombreux à être taillables en raison de leurs biens ou ont-ils particulièrement bien résisté aux pressions des consulats ? Ils déclarent leurs biens personnels ou les cha-pellenies qui assurent leur vie. Leurs allivrements sont réduits, leurs propriétés peu décrites (les superficies des fermes et même des parcelles isolées sont rarement indiquées), ils figurent dans les registres de taille, mais ils sont plus faiblement imposés que les autres contribuables48. Les propriétés monastiques sont absentes, si ce n’est une ferme de Castelnaudary, appartenant à l’abbé de Villelongue, estimée dans le registre de 1516. Très peu d’institutions apparaissent : quelques confréries, des obituaires, le chapitre Saint-Michel de Castelnaudary.

  • 49 A.D.H.G., 5 E 73 f° 105 r°, estimé 1284 £ et demie.
  • 50 A.D.A., 4 E 076/CC 10 f° 86 v°.
  • 51 A.D.A., 4 E 076/CC 10 f° 166 v°. Il ne déclare aucun bien taillable dans les registres de Fendeill (...)
  • 52 Auquel il faut probablement ajouter, en tant que co-seigneur, Jean Bourasyer dont le manifeste sui (...)
  • 53 A.D.A., 4 E 076/CC 10 f° 166 v°.
  • 54 A.D.H.G., 5 E 67 f° 146 v°, 5 E 73 f° 121 r°, f° 121 v°, f° 109 r°, f° 78 r°, f° 71 v°, f° 76 r° e (...)
  • 55 Les nobles ou réputés tels sont 41 sur 3069 contribuables, Valladier-Chante (R.), Le Bas-Vivarais (...)

16Les nobles sont très peu nombreux dans les registres d’estimes, ce qui est logique puisqu’ils possèdent peu de terres taillables (celles qu’ils ont données en te-nure sont, bien sûr, déclarées par les propriétaires utiles). À Ayguesvives, un seul, Ramon de Pechbusque, seigneur de Mauremont, figure dans le registre49 ; Ils sont quatre dans le registre de 1496 de Castelnaudary et encore l’un d’entre eux est-il un marchand à noblesse récente, due à l’acquisition d’un fief : « noble Jacques Le Roy, seigneur de La Rouquette »50. Les autres nobles sont les seigneurs des villages proches : le seigneur de Fendeille51, Anthony Bourasier, co-seigneur de Peyrens52, Hodet Ysalguier, seigneur de Clermont53, ils sont recensés dans les ports où ils possèdent une demeure. Ces nobles figurent dans le livre de taille de 1492 mais se sont abstenus de payer. On retrouve, propriétaires à Montesquieu et Montgiscard, les seigneurs des villages voisins : à Montesquieu, en 1485, figurent dans le livre d’estimes, le seigneur du village de Vieillevigne, à Montgiscard, les nobles Martin Planhola, seigneur de Gardouch, Jean de Gavarreto, seigneur de Saint-Léon (la famille de Gavarret est aussi implantée à Montgiscard), le noble Peyre del Baus, de Montesquieu. Les seigneurs locaux n’apparaissent qu’à Montgiscard : Gabriel de Gavarreto, Bertholy Azema, Estorguet Azema de Roqueville, P. et B. Cominhas54. Les nobles représentent 1 % des déclarants, un pourcentage de l’ordre de celui qu’on trouve en Vivarais55. Ils sont, en réalité, beaucoup plus nombreux, on les retrouve dans les registres notariaux et dans les aveux et dénombrements, ce qui nous permet de connaître, en partie, leurs possessions nobles.

3. Les forains

17Tous les propriétaires forains figurent-ils sur les registres d’estimes ?

  • 56 A.D.A., 4 E 076/CC 7, 30 habitants de Souilhanels, 15 de Villeneuve, huit de Fendeille (pour, le p (...)
  • 57 A.D.A., 4 E 076/CC 12 f° 62, P 63, P 166.
  • 58 A.D.A., 4 E 076/CC 12 f° 343 r°.
  • 59 A.D.A., 4 E 076/CC 12 f° 360 r°.

18Parfois, c’est l’état matériel des registres qui nous prive de leurs manifestes. En effet, les forains sont recensés, dans les villages, en général, à la suite des propriétaires résidants, les un ou deux folios qui suffisaient à les recenser n’ont pas toujours subsisté ou l’on n’a pas recopié les feuilles sur lesquelles étaient faites les déclarations primitives. Ainsi, à Fendeille, si les livres d’estimes de 1428 et 1466 mentionnent, à la suite des habitants du village « las foratas », on ne les aperçoit pas dans les registres de 1488 et 1495. À Castelnaudary, quelques forains apparaissent dans les registres, en très faible quantité, mêlés aux autres déclarants (quatre dans le registre CC 9 sur 236 déclarants, encore quatre dans le registre CC 10 sur 419 déclarants, 11 dans le registre d’estimes CC 11, de 1516 (les seigneurs de Peyrens et de Fendeille, six habitants de Villepinte, Issel, Peyrens et Villefranche-de-Lauragais, et trois Toulousains seulement, Antoine Ramon, Hodet Ysalguier et Jean Siguier), mais il existait, probablement, un cahier spécial pour les contribuables habitant les villages les plus proches. En effet, dans le livre de taille de 1492, alors que peu de forains sont mentionnés, mêlés aux contribuables locaux (les seigneurs des villages de Peyrens et Fendeille, l’abbé de Villelongue, sept personnes habitant en Lauragais, parfois à une vingtaine de kilomètres, et un Toulousain, Jean Siguier, originaire de Castelnaudary, probablement, puisque’au début du siècle, un autre Jean Siguier possédait une hôtellerie en ville), des rubriques, à la fin du registre, sont consacrées à trois villages limitrophes (Souilhanels, Villeneuve, Fendeille), absents de l’estime de 1496 et d’où proviennent 53 contribuables56. Ces 64 forains représentent 12,5 % des taillables (64/512). Dans le registre CC 12, de 1535, si seulement trois forains apparaissent dans le corps du registre (un habitant de Ricaud qui possède maison, moulin et une demi-borde, un de Villepinte qui déclare une maison au port Saint-Croix et un de Gourvieille57), sont recensés, à la fin, les gens de Souilhanels58 et de Fendeille59 possessionnés à Castelnaudary, ce qui est un indice supplémentaire de l’existence de ce cahier spécial. Ils sont 35 pour Souilhanels, inscrits par la même personne, plusieurs portent le même patronyme (26 patronymes différents apparaissent). Je n’ai pas comptabilisé 12 déclarants, rajoutés en fin de liste, d’une autre main, qui ne semblent pas d’origine. Trois déclarants habitent Fendeille. À Castelnaudary, les forains recensés au fil du registre doivent être ceux possédant une résidence « secondaire » dans la ville, qu’elle soit noble ou taillable et ceux du cahier spécial, les propriétaires de biens-fonds ruraux.

19Dans les bourgades où les forains sont très nombreux, comme à Montesquieu et Montgiscard, ils sont rangés par village de résidence. Des problèmes se posent pour Ayguesvives et Montgiscard. À Ayguesvives apparaît un seul forain, Ramon de Pechbusque, qui semble habiter Toulouse, cependant quelques-uns des forains que j’attribue à Montgiscard sont peut-être possessionnés sur Ayguesvives, cette communauté relevant alors du consulat de Montgiscard, on a pu regrouper les forains, quel que soit l’endroit où sont situées leurs terres. Le territoire d’Ayguesvives me semble toutefois, au Moyen Âge, beaucoup plus petit que celui de la commune actuelle, les juridictions de Montgiscard et Montesquieu sont contiguës, et toute la partie sud de la commune actuelle est alors située sur Les Bastards. À Montgiscard, les foratas se trouvent dans la partie comprise entre les folios 106 et 110 du registre, avec une estime forte, en livres et demi-livres et dans le dernier cahier du registre, du folio 118 (foliotage moderne) au folio 130, avec une estime réduite par rapport à celle des folios 106-110. Quelques estimés supplémentaires y figurent, 13 habitants de Montesquieu contre huit dans la première partie et 12 de Baziège contre neuf.

  • 60 Wolff (Ph.), Une famille du xiiie au xvie siècle, les Ysalguier de Toulouse, Regards sur le midi m (...)
  • 61 Wolff (Ph.), Les estimes..., op. cit., pp. 34-35.
  • 62 Le n° 448, Raymond Dominici, un jardinier, déclare, pour lui et son frère, divers biens à Toulouse (...)
  • 63 Wolff (Ph.), Les estimes..., op. cit., p. 36-37.
  • 64 Gilles (H.), Les États de Languedoc au xve siècle, Privat, 1965.

20Quand le registre est complet, il n’est pas sûr que tous les propriétaires forains soient allivrés. En théorie, ils devraient l’être, les forains cotisent là où ils possèdent des biens ; nous avons vu qu’en 1391, à Toulouse, ils devaient déclarer aux estimateurs les biens taillables qu’ils possédaient dans cette ville. On peut toutefois se poser la question pour les forains habitant à Toulouse, car ils ne sont pas très nombreux dans les registres, même dans les localités très proches de cette ville, un à Ayguesvives, trois ou quatre à Montesquieu, selon les registres, 20, toutefois, à Montgiscard. Il semble qu’ils détiennent des terres en Lauragais, au moins dans la partie occidentale, dès le xive siècle. D’après les estimes de 1335, fragmentaires, publiées par Ph. Wolff, 34 Toulousains déclarent des biens situés en Lauragais, 13 possèdent de une à trois parcelles dans un village, 21 ont sur leur manifeste la mention « tout ce qu’il a à tel endroit » ou « pour le fait de tel endroit », souvent le déclarant est originaire du lieu en question. L’estime de ces biens forains peut monter à 30 ou 50 livres, 1 000 livres même à Montesquieu pour dame Mancelina de Capdenier, sur une estime totale de 7 336 livres. La famille de Capdenier n’est plus possessionnée à Montesquieu au siècle suivant. Les riches familles, telle celle des Ysalguier, ont acheté des terres à Castelnaudary60. Les Toulousains contribuaient-ils dans les localités où ils étaient propriétaires ? D’après les travaux de Ph. Wolff, ce n’était pas tout à fait le cas : au début du xive siècle, les habitants payaient leurs tailles en ville à raison de tous les biens qu’ils possédaient dans la viguerie et la sénéchaussée, en excipant d’un arrêt rendu par la Cour du roi. Les consulats de la sénéchaussée réclamant le paiement des tailles là où les biens étaient situés, Philippe VI ordonna une enquête à ce sujet en 1329, une ordonnance qu’il prit, non conservée (mais confirmée par Charles VII en 1447), ordonne aux acquéreurs de biens taillables de payer les tailles dans les lieux où ces biens se trouvaient. Ph. Wolff note qu’il était possible de corrompre les officiers royaux, ainsi que le signale l’ordonnance de 144761 et que ce paiement ne se faisait guère. J’ai noté toutefois que, dans les estimes de 1335, quelques-uns des déclarants qui ont des biens situés dans des villages du Lauragais contribuent dans ces villages62, la majorité cependant paye à Toulouse. Très rapidement, dès 1341, 1342, les souverains prennent parti en faveur de Toulouse et de son privilège de récupérer les tailles de biens appartenant à des Toulousains et situés dans la viguerie et la sénéchaussée. Fin xive, les Toulousains ne payent pas dans les villages où ils sont possessionnés, les taxes leur étant bien plus favorables à Toulouse63. Dans la première moitié du xve siècle, les consulats villageois semblent reprendre le dessus sur la ville. Une ordonnance des États, datée de 1447, reprend l’ordonnance du roi et rappelle que tous les « possessoires d’ancienneté contribuables aux aides et aux tailles royaux doivent contribuer dans les lieux où ils sont situés même si leurs détenteurs demeurent autre part ». Cette ordonnance fut atténuée en 1450, une nouvelle ordonnance exigea le respect des accords passés entre les localités voisines64. Un capitulaire de 1459 indique que, seuls, les biens de la ville et du gardiage sont estimés, les communautés voisines récupèreraient donc la taille.

21La situation doit être différente pour les autres villes de la sénéchaussée qui n’ont pas la force de Toulouse, leurs habitants doivent contribuer là où ils sont possessionnés. Une annotation figurant sur le registre de Montesquieu de 1485 « le possessori que les de Montgiscard nos acupaban » suivie de onze noms dont certains sont déjà estimés en tant que résidants, un possédant un ostal dans le fort, me semble correspondre, toutefois, à des habitants de Montesquieu possédant des terres à Montgiscard et payant les tailles correspondantes à Montesquieu.

  • 65 A.D.A., 4 E 076/ CC 11. Il figure sur le registre de taille de 1492, avec une taille inférieure, A (...)
  • 66 A.D.H.G., 3 E 10161 f°245 r°, 28 janvier 1409 (n. st.).

22Même si les forains figurent sur les livres d’estimes, des accommodements semblent toujours possibles ; ainsi, des individus possédant des biens à Castelnaudary et à l’extérieur ne cotisent pas dans la ville. Dans le registre d’estimes de 1496, une annotation, d’une écriture moderne, mentionne : « 75 juin 1498 lettres ajournatoires pour Bernard Pujol cottisé à Issel et dans Castelnaudary » ; ce document n’a pas subsisté. Bernard Pujol figure dans le livre de taille de 1492 pour 10 sous 2 deniers qu’il n’a pas payés. En 1516, le Toulousain Jean Siguier, d’après une note suivant la description de ses biens, après entente avec la ville, ne payera qu’une livre et 5 sous, pour ses possessions chauriennes, que la taille soit grande ou petite, un abonnement lui est donc consenti65. Ces ententes existent aussi dans les bourgades, une convention est passée entre les consuls d’Ayguesvives et de Montgiscard, d’une part, et Etienne de Bosco et Pierre de Cossaco, laboureurs de Montesquieu, d’autre part : pour toutes les tailles qu’ils devront à l’avenir, ils promettent de donner pour leurs possessions 5 sous parisis par an à la Toussaint et pour arrérages de tailles du temps passé, un écu d’or66.

  • 67 Demaille (E.), La gestion de l’espace rural et urbain à Lodève..., op. cit., p. 57. Ils sont 28 po (...)
  • 68 Ils sont 56, Rigaudière (A.), L’assiette de l’impôt direct à la fin du xive siècle...,op. cit., p. (...)

23Au xve siècle, les forains constituent 13,05 % des déclarants (194 sur 1 487). Si l’on ne considère que les déclarants laïcs (1 380), le pourcentage est alors de 14,05 %. Ce pourcentage varie d’un consulat à l’autre, allant de 0,95 % à 48 %, mais les chiffres extrêmes sont douteux (à Castelnaudary et Montgiscard, j’ai déjà expliqué pourquoi, à Montgiscard, de plus, toutes les estimes des résidents n’ont pas été conservées), la norme est plutôt autour de 20 %, comme à Montesquieu et Fendeille. C’est beaucoup par rapport aux autres zones étudiées, ainsi à Lodève, ils ne constituent que 4,86 % des déclarants de 140167, à Saint-Flour, deux forains seulement apparaissent sur 819 déclarants mais ils sont plus nombreux dans les registres de taille68.

24Ces forains sont originaires, le plus souvent, de villages très proches ; ceux que l’on trouve à Montgiscard viennent de 12 villages, six villages sont limitrophes, les six autres sont situés entre 1,5 km et 5 km des limites du terroir de Montgiscard. Les biens détenus sont le plus souvent en bordure du finage du village de résidence du forain, à une heure de marche au maximum ; ces forains-là sont des paysans, le plus souvent, ils viennent en priorité pour ce qu’ils n’ont pas dans leur village, les prés inondables de la vallée de l’Hers. D’autres forains sont propriétaires car appartenant à une famille autrefois installée dans la bourgade où ils sont possessionnés, leur patronyme est aussi porté par des résidants. À Montesquieu, c’est le cas de 13 d’entre eux en « 1409 », 14 en 1485, à Montgiscard, de 5 d’entre eux, au moins.

  • 69 Ce qui est très différent de ce qui se passe au Puy-en-Velay où la profession de 36 % des chefs de (...)
  • 70 Marandet (M.-C), Le souci..., op. cit., p. 78.
  • 71 Ibidem, pp. 87-101.
  • 72 R. Maguer dit qu’en 1695 moins de 50 feux sur cent sont paysans à Castelnaudary, Fendeille est sit (...)

25Qui sont les déclarants ? Les registres d’estimes ne permettent guère de connaître leur activité, elle n’est précisée que pour les homonymes, les nobles et les gens d’Église. Par exemple, dans le registre CC 10 de Castelnaudary, le métier de 28 laïcs seulement sur 401 (soit 6,98 %) est indiqué. Il n’y a aucune indication de métier dans les registres de Fendeille, elles sont très rares dans les autres localités69. Lors des rédactions de testaments, le même phénomène se produit, ce sont les plus notables, généralement, qui se définissent. L’habitude locale joue aussi car le phénomène est très variable d’une zone de récolte de testaments à l’autre : dans les villages du Lauragais oriental, 14,3 % des disposants se définissent, à Castelnaudary, 39,4 %, dans les villages du Lauragais occidental, 39,7 %70. Les paysans sont les plus difficiles à repérer : dans les villages proches de Toulouse, ils constituent 74 % du corpus de ceux qui se définissent mais dans le Lauragais oriental ils sont fort rares, à Castelnaudary, par exemple, 5,4 % seulement des testateurs se définissant se disent brassiers ou laboureurs. Souvent, on ne repère un paysan que parce que son testament est réalisé dans un campmas71. Certains des estimés apparaissent toutefois dans les registres notariaux et dans les livres de reconnaissances, ce qui permet de connaître leur activité principale72.

3. Quelques catégories particulières de déclarants

26Si la majorité des estimés laïcs sont des hommes seuls, quelques manifestes émanent de femmes et d’associations. Au xve siècle, sur 1 380 déclarations faites par des laïcs, 55 sont faites par des femmes, 101 par des groupes de personnes, au début du xvie siècle, sur 1 101 déclarations faites par des laïcs, 39 le sont par des femmes, 118 par des groupes de personnes.

a. Les femmes

  • 73 26 de ces femmes sont veuves, 16 mariées et 13 célibataires (leur patronyme est mis au féminin). D (...)
  • 74 Zemer (M.), Recherche d’une méthode d’interprétation démographique des cadastres du Comtat Venaiss (...)
  • 75 107 manifestes de femmes « rarement associées à un époux ou à un frère », sur un corpus total de 3 (...)
  • 76 Rigaudière (A.), « L’assiette de l’impôt direct dans le compoix du Puy-en-Velay de 1408 », La fisc (...)
  • 77 Demaille (E.), La gestion de l’espace rural et urbain à Lodève, op. cit., p. 54.
  • 78 Rigaudière (A.), L’assiette de l’impôt direct à la fin du xive siècle..., op. cit., p.309.
  • 79 On trouve ainsi, au f° 13 v°, P. Theyseyre, le déclarant suivant, au f° 13 v°, est sa femme ; au f (...)
  • 80 La même chose existe à Lodève, Démaille (E. ). La gestion de l’espace rural, p. 56.
  • 81 Rigaudière (A.), L’assiette de l’impôt direct à la fin du xive siècle..., op. cit., p. 824
  • 82 A.D.A., 4 E 076/CC 9 f° 65 v°, J. Sacrotz ; P24 r°, R. Vaquier pour les biens de sa femme (qui a h (...)
  • 83 Hilaire (J.), Le régime des biens entre époux dans la région de Montpellier, Société d’histoire du (...)
  • 84 G. Frêche, Compoix, propriété foncière, fiscalité et démographie historique en pays de taille réel (...)

27Très peu de déclarations sont souscrites par des femmes : 5573 dans les registres du xve siècle, soit 3,98 % du corpus des manifestes laïcs. Au xvie siècle, à Castelnaudary, le pourcentage est toujours du même ordre, 3,06 % en 1516, 3,74 % en 1535. Courant xve siècle, les femmes constituent moins de 4 % du corpus des laïcs dans toutes les localités, sauf à Castelnaudary, dans le registre CC 9, et à Fendeille, dans tous les registres. Ce pourcentage est de l’ordre de ce que l’on trouve dans les villages des autres régions étudiées : en Comtat Venaissin, les femmes représentent à peu près 5 % des propriétaires74 ; en Vivarais, 3,48 %75. Castelnaudary, une ville importante, ne compte que peu de feux féminins imposables, par rapport aux autres villes étudiées où ils représentent de 10 à 16 % du corpus de déclarants, au xive et au début du xve siècle, toutefois (11,47 % du corpus à Pamiers en 1350, 16 % à Saint-Flour en 138076, 14 % à Lodève77 en 1401, 10,4 % au Puy-en-Velay en 140878). Dans le registre CC 9 qui est du début du xve siècle, les feux féminins sont plus proches de ces chiffres puisqu’ils représentent 8,47 % du corpus. Dans ce livre d’estimes où les femmes sont relativement nombreuses, en plus des veuves et des femmes célibataires, 11 femmes mariées font une déclaration, parfois juste après leur mari, signe qu’ils habitent ensemble79 ; certaines possèdent un ostal qui est probablement loué80. Dans le livre d’estimes de Saint-Flour, en 1380, figurent des femmes mariées, A. Rigaudière pense que le mari est absent ou empêché81 ; on n’a pas ce cas de figure en Lauragais puisque le mari fait sa déclaration avant son épouse. Sept hommes effectuent une déclaration, au nom de leur épouse, après leur propre déclaration ; c’est le cas, par exemple, de J. Sacrotz, R. Vaquier82 ; parfois ces biens de l’épouse, non détaillés, sont fortement allivrés. Le mari doit représenter sa femme, absente, il ne doit pas s’agir de biens dotaux, sinon on retrouverait cela dans tous les manifestes ou presque. Les biens de ces femmes mariées sont sûrement des paraphernaux, c’est-à-dire tous les biens déjà acquis à la femme lors de son contrat de mariage et qui n’ont pas été constitués en dot, plus les biens acquis pendant l’union ou obtenus par succession, donation, achat83. D’après la Coutume de Toulouse, la femme mariée garde la propriété et l’administration de tous ses biens paraphernaux, elle les déclare donc, je suppose, et le mari déclare la dot84. Ces femmes peuvent, aussi, avoir hérité d’un premier mari.

b. Les groupes de personnes

28Des déclarations sont faites par des « héritiers un tel » (62 cas au xve siècle), d’autres émanent de deux ou trois individus, qui sont nommés (39 cas au xve siècle). Ces contribuables sont, surtout, des paysans, propriétaires d’une ferme. Comment interpréter ces deux formes de groupement ?

  • 85 D’après les testaments, souvent, plusieurs enfants sont faits héritiers en parts égales (même si u (...)
  • 86 Le Roy Ladurie (E.), Paysans de Languedoc..., op. cit. pp. 166-167.
  • 87 Germain (R.), Les campagnes bourbonnaises à la fin du Moyen Âge (1370-1530), Publications de l’Ins (...)
  • 88 Tricard (J.), Comparsonniers et reconstruction rurale dans le sud du Limousin au xve siècle, Actes (...)
  • 89 Pour Marie-Thérèse Lorcin, le pariage paysan apparaît à la fin du Moyen Âge comme un fait régional (...)
  • 90 Poumarède (J.), Les successions dans le Sud-Ouest au Moyen Age, Publications de l’Université des S (...)

29L’appellation « héritiers un tel » correspond-elle à une succession non encore réglée, à une indivision car il y a des enfants mineurs85 ou est-elle utilisée pour qualifier une frérèche ? Depuis longtemps, on a noté que les crises des xive-xve ont favorisé le réveil de la famille élargie86. Les frérèches se développent surtout dans le monde rural, fournissant main-d’œuvre gratuite, évitant la pulvérisation de la propriété. Ces communautés peuvent être tacites (ou taisibles), se créant par simple cohabitation d’un an et un jour ou être fondées par un contrat notarié et ne peuvent alors se dissoudre que par-devant notaire. Fort peu d’actes de création ont survécu, les terriers seigneuriaux, les testaments, les contrats de mariage permettent toutefois d’en déceler l’existence. Dans le Bourbonnais, près de la moitié des feux taillables, essentiellement dans les campagnes, correspondent à des communautés tacites87. Ces communautés se retrouvent, sous divers noms, un peu partout : en Limousin, les « comparsonniers » sont les artisans de la renaissance agricole et perdurent au xvie siècle88, dans les Monts du Forez, le « pariage » paysan est très répandu89. Dans le Sud-Ouest, Jacques Poumarède, en se basant sur les coutumes, pense que l’expression « héritiers un tel » est utilisée pour des frères, ayant atteint l’âge adulte, qui continuent de vivre sous le même toit puis, après la disparition des parents, gardent l’héritage « en commun et par indivis ». Pour lui, cette société fraternelle n’est pas une simple indivision successorale ni une situation transitoire avant la liquidation de la succession. On y pratique communauté de charges et de dettes. Une masse commune est constituée par l’héritage familial et les acquêts faits par les membres du groupe. Dans certaines coutumes, la dot apportée par la femme d’un frère entre dans la masse commune90. En Lauragais, je pencherais pour cette explication ; si le mot d’affrèrement n’est pas employé, la communauté semble bien exister, les mêmes « héritiers un tel » se retrouvent, parfois, dans des registres séparés par 30 ou 40 ans.

  • 91 Lorcin (M.-Th.), Pariages et testaments en Forez au xve siècle, op. cit., pp. 358-360.
  • 92 A.D.A., 3 E 1483 P xx, 1417.

30En Forez, M.-Th. Lorcin repère des fondations de pariages dans les testaments, un testateur, par exemple, fait héritiers sa fille et son fils, ils devront rester communs en biens de telle sorte que l’un ne puisse faire sa propriété d’une valeur supérieure à 5 sous sans autorisation de l’autre. Des testateurs attribuent tout leur héritage à un seul enfant qui paiera dots et pensions aux autres ayant-droits, de façon à éviter la création d’exploitations non viables, d’autres désignent deux héritiers par indivis et prévoient une pénalisation pour celui qui voudrait le partage91. J’ai repris, pour voir si cela existait en Lauragais, les testaments que j’avais étudiés essentiellement sur le plan religieux. J’avais noté que, souvent, tous les enfants étaient héritiers en parts égales, sans que le testateur mentionne la moindre chose quant à la constitution d’une communauté. Un acte semble bien suggérer son existence. Raymond Boqueri, de Castelnaudary, qui teste dans son campmas, lègue à son épouse un lit garni. Elle doit avoir « victum in cibo potu vestitum calciatum », selon son état, tant qu’elle reste avec les héritiers ; si elle s’en sépare, si elle ne peut s’entendre avec eux, elle recevra 20 £, à payer en quatre ans. Dans ce cas, elle aura aussi logement dans un campmas du testateur, tant qu’elle est veuve et honnête. Si elle se remarie, elle peut prendre 20 £ sur les biens (probable augment ?). Les héritiers sont les cinq fils du testateur, en parts égales. Si l’un des héritiers mourrait ou qu’il y ait « rixam seu discordiam inter ipsos et volebat inter se dividere et separare », Raymond Boqueri prévoit que celui ou ceux qui veulent se séparer, n’auront rien de l’héritage avant que 10 ans ne se soient écoulés depuis son décès, cela parce que certains de ses héritiers sont des enfants92.

  • 93 Chomel (V.), Pareries et frérèches en Dauphiné d’après quelques textes inédits (1250-1346), Cahier (...)
  • 94 Landraud (M.), Les contrats de mariage dans le Valentinois et le Diois aux xive et xve siècles, Th (...)
  • 95 Dans le Forez, c’est la même chose au xive siècle, Gonon (M.-Th.), Les institutions et la société (...)
  • 96 A.D.A., 4 E 076/CC 10 f° 142 v°.

31Des pariages par mariages sont signalés en Dauphiné93, dans le Diois, le Valentinois94. Ce système existe, probablement, en Toulousain, quand il y a adrogation, le gendre venant habiter chez ses beaux-parents. Le terme n’est pas employé, mais les deux couples vont, disent les constitutions de dots, « boire le même vin, manger le même pain et travailler ensemble »95. Dans un registre d’estimes, un déclarant, Guiraud de Lestalhier, est allivré pour un ostal, une ferme puis son l’allivrement est modifié, il est diminué : « le reste est sur son gendre », la moitié de l’ostal est affecté, effectivement, à son gendre Anthony Marquai96. S’agit-il de la dot de l’épouse ? A-t-on eu adrogation et création d’une communauté ?

  • 97 Il est à noter que dans les livres d’estimes apparaissent peu de mention de « fils untel », signe (...)
  • 98 J. Poumarède, Les successions dans le Sud-Ouest au Moyen Âge..., op. cit. note, dans la 2e moitié (...)
  • 99 Voir la partie « Modes de faire-valoir ».

32Dans le corpus du xve siècle, ce qui se présente plus clairement comme une association (deux ou plusieurs individus faisant une déclaration commune) concerne, dans 38 cas sur 39, des parents. Les associés sont frères, beau-père et gendre, père et fils97, mère et fille (un cas), mari et femme ( un cas )98. Parfois, un déclarant est associé aux héritiers de son frère ou aux héritiers de X, cela semble une frérèche intégrant des éléments de la génération suivante. Peut-être ces associations correspondent-elles à des communautés familiales plus structurées que celles des « héritiers un tel », constituées par-devant notaire. On n’aperçoit cependant que de rares contrats de ce type dans les registres notariaux, ils concernent l’exploitation d’une ferme99.

  • 100 Dans les 5 % à Saint-Flour, Rigaudière (A.), L’assiette de l’impôt direct à la fin du xive siècle. (...)

33Si l’on ne considère que les laïcs, les deux groupes confondus représentent 7,31 % du corpus (101 manifestes sur 1 380), on retrouve des pourcentages de cet ordre à Saint-Flour et dans le Vivarais100. Les pourcentages sont très variables selon les localités et les périodes. A Ayguesvives et Fendeille, le phénomène est peu répandu, tournant autour de 3 ou 4 %, il est un peu plus fréquent à Montgiscard : 7,55 %. A Castelnaudary, ce pourcentage s’élève au cours du xve siècle, passant de 2,54 % à 8,72 %, il est plus élevé aussi dans le registre de 1485 de Montesquieu que dans le registre attribué à 1409, 12,4 % contre 7,64 %. La progression continue au xvie siècle, liée probablement à la reprise démographique, les associations représentent à Castelnaudary 10,73 % des manifestes des laïcs en 1516 et 10,83 % en 1535.

B. Approche de la population des localités témoins

  • 101 A.D.H.G., 1 Mi 276 f° 131 v°, 138, 138 v°, 139 v°, 140r°, 144 r°, Castelnaudary, f° 195 v°, Mas-Sa (...)
  • 102 Liber reddituum, A.D.H.G., 1 Mi 276 ff° 57-67.

34Les renseignements utilisables en matière démographique sont rares en Lauragais. Nous ne disposons que du nombre de bâtiments relevant du comte de Toulouse en 1272-73. Castelnaudary compte alors 394 maisons (domus) et six fermes isolées (bastida cum terris)101, Montgiscard, 217 maisons au minimum (puisque certains déclarants parlent d’hospicia)102. La communauté de Montesquieu est imparfaitement renseignée, 22 maisons seulement apparaissent. Pour le bas Moyen Âge, les résidants allivrables, seuls, figurent dans les estimes. Les registres, nous l’avons vu, sont complets pour Fendeille, Les Bastards, Montesquieu (en 1485), incomplets pour Castelnaudary, Montgiscard et Ayguesvives. On peut essayer d’évaluer, pour ces trois localités, le nombre de manifestes qui a disparu.

  • 103 A.D.A., 4 E 076/CC11.
  • 104 A.D.A., 4 E 076/CC12.

35Dans le livre d’estimes de Castelnaudary de 1496, 419 manifestes sont d’origine, il ne manque que ceux des habitants du port de La Place. On peut, pour approcher leur nombre, utiliser les registres postérieurs : ils sont 46 dans celui de 1516103 (quelques folios manquent), 54 dans celui de 1535104. Dans le registre de taille de 1492, le port compte 60 taillables. Une cinquantaine d’allivrés peut être rajoutée, ce qui ne semble pas excessif. Il n’est pas possible de procéder ainsi pour Montgiscard et Ayguesvives. On peut estimer, grossièrement, les lacunes des estimes de ces deux bourgades en utilisant la superficie moyenne des lots bâtis.

  • 105 A.D.H.G., 5 E 67 f° 14 v°, f° 7 r°, f° 12 r°.
  • 106 A.D.H.G., 5 E 67 f° 17 r°.
  • 107 Ces plans sont reproduits dans Cazals (L.), Une page d’histoire du Lauragais..., op. cit. Cf. la p (...)

36À Castelnaudary, 367 maisons (au moins) sont déclarées dans le registre de 1496. Le port de La Place n’est pas recensé et aucun ostal n’est signalé pour les habitants du port Dedins. En 1516, les 46 déclarants du port de la Place possèdent 53 ostals, en 1535, 63 ostals ou maysos, cinq parts d’ostal et deux hôtelleries. On peut donc tabler sur, au moins, une cinquantaine d’ostals dans ce quartier en 1496. Les habitants du port Dedins sont 96 à déclarer leurs biens en 1496, ils sont 105 en 1516 et déclarent 84 ostals, on peut supposer que 80, au moins, existaient en 1496. On arrive à 500 ostals taillables, à peu près, plus quelques ostals nobles. La superficie intra muros est de 8,5 ha environ, deux ha, au moins, sont occupés par le château, les diverses églises (la collégiale Saint-Michel, l’église Saints-Pierre-et-Paul, deux couvents de mendiants : Mineurs et Carmes), le lot bâti moyen ferait 130 m2. Le registre d’estimes de Fendeille de 1495 fournit les allivrements de 56 résidants qui déclarent 60 ostals et une hôtellerie. La superficie, à l’intérieur des murailles, est d’à peu près 0,7 ha (le château et l’église sont situés à l’extérieur), la superficie moyenne d’une parcelle bâtie serait de 114 m2. Les 166 résidants et 41 forains de Montesquieu allivrés en 1485 déclarent 142 ostals, situés dans le fort, trois, « dins la vila »105 et un, dans les « fossés batallers »106. Nous disposons de deux plans anciens de la ville, un de 1634, assez schématique, et un de 1783107. Deux lignes de fossés y figurent : les « vieux fossés » ou batalheries à l’extérieur (faisant deux ou trois mètres de large), les « fossés de la ville », à l’intérieur (faisant 10 mètres de large) ; ces derniers, au xve siècle, entouraient le fort. Celui-ci ne couvrait même pas deux hectares et comprenait église et château ; 142 ostals y étant situés, la parcelle bâtie moyenne devait faire moins de 140 m2.

  • 108 Cf. la partie « Annexes ».
  • 109 A.D.H.G., 1 G 805.
  • 110 A.D.H.G., 1 G 805 f°s 35 r°, 44 v°.

37Les 93 propriétaires résidants et les 86 forains estimés en 1489 à Montgiscard déclarent 93 ostals. Il manque les habitants de la rue Mage, c’est-à-dire la Grand Rue (un seul est allivré). Un plan conservé aux Archives municipales de Toulouse permet de reconstituer le carroyage médiéval108. La partie fortifiée couvre à peu près 1,8 ha, église paroissiale et château sont à l’extérieur du fort, la parcelle portant une maison ferait, en moyenne, 193 m2. Si l’on rajoute cinq pati, au sens d’emplacements anciennement bâtis, qui sont déclarés, le lot moyen descend à 183 m2. Ce résultat, supérieur d’un quart à peu près à ce que l’on obtient pour les autres localités, alors que les maisons ont dû s’entasser à l’intérieur des murailles, laisse supposer qu’un quart, peut-être, des maisons n’apparaît pas et, donc, des déclarants initialement estimés, ce qui porterait le total des allivrés à 115, 120. Ce pourcentage est confirmé par des registres de reconnaissances pratiquement contemporains des estimes. À Montesquieu, 91 tenanciers figurent sur les deux registres E 1125 et E 1116, datant de 1490 et 1492, 12 apparaissent sur les deux registres ; sur les 79 tenanciers mentionnés, 28 sont absents des estimes, soit 35, 44 %. A Montgiscard, 57 tenanciers locaux font leurs reconnaissances à l’archevêque en 1487109, 32 patronymes sont absents des estimes, soit plus de 56 %. Quelques tenanciers ont pu mourir entretemps et leurs héritiers portent un autre patronyme, mais non 32. Certains des non-allivrés possèdent, de plus, des biens assez importants, ils ne peuvent être considérés comme nichils : un tailleur, Pierre Roche, tient une borde, une parcelle de terre où se trouvent une borde et une aire, Michel de Labadia, quatre sétérées de terre110. Ces livres de reconnaissances montrent que beaucoup de gens ne sont pas allivrés, même s’ils sont propriétaires et qu’à Montgiscard, il manque probablement, dans les estimes, 20 % des propriétaires résidants allivrables, si l’on compare le pourcentage de déperdition entre les reconnaissances et les estimes à celui qui existe à Montesquieu.

  • 111 Une muraille en terre crue a été découverte dans les années 70, vestige de la fortification nord. (...)
  • 112 Amiel, Monographie d’Ayguesvives, 1885, A.D.H.G., BR 4°356, 4 Mi 15.

38Les estimes d’Ayguesvives contiennent les manifestes de 46 résidents et d’un forain qui déclarent 35 ostals situés, pour l’essentiel, dans le fort. Selon Jérôme Lourenco, cette fortification couvrait un espace de 75 mètres sur 60111. Dans ces 4 500 m2, on trouve 23 ostals et un demi pati d’ostal, ce qui donne une moyenne par lot de 187 m2 112. On peut supposer qu’une dizaine de maisons supplémentaires devaient exister dans ce fort et que, comme à Montgiscard, 20 % à peu près des estimés ont disparu du registre ; on devait avoir 55 à 60 allivrables.

  • 113 Cazals, Une page d’histoire du Lauragais..., op. cit., p. 275.

39Aux Bastards, 11 déclarants (dont un forain habitant Montesquieu) possèdent neuf domaines, trois bordes, un pati d’ostal, trois ostals, ces derniers semblent se trouver dans les exploitations. Un petit habitat groupé pouvait se trouver près du château, puisqu’il existait encore, en 1742, une église Saint-Pierre-des-Bastards, en mauvais état, sans cimetière113, succursale de Saint-Jacques de Montesquieu ; il n’apparaît pas dans les documents du xve siècle.

L’occupation à l’intérieur des murailles :

L’occupation à l’intérieur des murailles :
  • 114 Higounet-Nadal (A.), Périgueux..., op. cit., p. 193.
  • 115 Ibidem, p. 197.
  • 116 Biget (J.-L.), Formes et techniques de l’assiette et de la perception des impôts à Albi..., op. ci (...)
  • 117 Wolff (Ph.), Les estimes..., op. cit. pp.89-92.
  • 118 Soit 1743 chefs de famille, mais Ph. Wolff pense que ces petits chiffres sont dus à une négligence (...)

40Manquent aussi dans les registres d’estimes les nichils habentes, les nichils solvabiles et les privilégiés exemptés. Peut-on tout de même approcher la population totale des communautés et celle vivant dans les campagnes ? Partout, on considère que les exemptés (par privilège ou pauvreté) sont difficiles à évaluer, mais qu’ils semblent nombreux. À Périgueux, entre 1365 et 1490, leur pourcentage varie de 38 % à 71 % (en 1454-55) de la population réelle connue114, la moyenne est de 57,48 %115. À Albi, en 1343, nichils habentes et nichils solvabiles représentent 36,5 % de la population totale116. À Toulouse, Philippe Wolff arrive à un total de 2 749 estimés et 2 992 nichils en 1384. Pour le Bourg seul, en 1384, il recense 339 estimés, 511 nichils, en 1391, 286 estimés, 505 nichils, en 1405, 326 estimés, 442 nichils117. Un recensement des fortunes de 1430 enregistre 900 estimés et 843 nichils118. Les nichils représentent donc, aux xive et xve siècles, entre 50 et 60 % de la population. On peut considérer que, dans les registres du Lauragais, le pourcentage des exemptés est du même ordre que dans ces villes du Midi de la France et correspond à 35 à 50 % de la population totale (cf. supra les tenanciers de Montesquieu). Les allivrés représenteraient donc de 50 à 65 % des foyers réels. Si l’on tente une évaluation du nombre de feux réels en appliquant ces coefficients au total des allivrés, on obtient les résultats suivants :

  • 119 L’intendant de Basville donne, pour Castelnaudary, le chiffre de 1074 feux en 1693, après les cris (...)

Note 1095119

  • 120 En Gascogne, dans les bourgs, les maisons et bordes (au sens de grange) ont la même structure ; ut (...)
  • 121 A.D.A., 4 E 076/CC 10 f° 188 v°.
  • 122 A.D.A., 4 E 076/CC 10 f° 161 r°.
  • 123 Dans le Comtat Venaissin, certaines maisons ne sont pas estimées car elles n’ont pas de valeur loc (...)
  • 124 Cursente (В.), Des maisons..., op. cit., p. 354.
  • 125 A.D.A., 4 E 076/CC 10 f° 211 r°.
  • 126 A.D.H.G., 5 E 73 F 62 r°, Montgiscard.
  • 127 Il n’y a pas dans les estimes du Lauragais de mention de maisons louées alors que cela figure dans (...)
  • 128 A.D.H.G., 5 E 73 f° 43 v°.
  • 129 Marandet (M.-C.) L’équipement..., op. cit.
  • 130 En Gascogne, les habitants ont une résidence intra muros et une seconde maison ou borde au dehors, (...)
  • 131 Cf. la partie « Origines des domaines ».
  • 132 A.D.A., 3 E 9443 f° 63 r°, 1405.
  • 133 J’ai signalé supra l’achat d’une « camera » dans une maison de Castelnaudary, par un laboureur, A. (...)

41Les bâtiments sont-ils assez nombreux pour loger toutes ces familles ? Il faut rajouter aux ostals les habitats intercalaires (campmas, boria) ; des bâtiments d’habitation doivent aussi accompagner les moulins et les fours de tuiliers et de potiers. Quelques bordes sont habitées, certaines, situées en campagne, sont le siège d’une exploitation, d’autres, près des murailles, dans un jardin, sont parfois utilisées comme habitation par les plus pauvres120. J. Maurel déclare une borde servant de borde et d’ostal, qu’il doit probablement louer puisqu’il possède deux autres ostals et une ferme121, Jean Quinquiry déclare un « ostal ou borde » au port de la Baffe et une ferme122. Quelques maisons particulièrement misérables peuvent être absentes des registres, étant donné l’existence d’un seuil d’allivrement123. L’habitat précaire doit exister, B. Cursente, signale, en Gascogne, le cas des « botoyers », tenanciers pauvres emportant avec eux la charpente de leur maison en déguerpissant ; cette petite maison de bois est parfois désignée par le vocable « hostalet »124. Un seul ostalet est déclaré en Lauragais, à Ayguesvives. Inversement, certains bâtiments destinés au départ à servir d’habitation ont peut-être un autre usage, étant donné leur piteux état ou leur petite taille, puisqu’on hésite sur leur destination : ostal sive estable125, hostal sive stable an ung pati126. Quand un chef de famille possède plusieurs ostals, certains sont loués127, mais d’autres ne servent que de lieux de stockage : Jacmes Mauri possède un ostal rue des Mercadies, à Montgiscard, estimé 40 £ et un autre ostal où il met les « truelhs », estimé 20 £128 ; des ostals utilisés comme débarras apparaissent dans des inventaires après décès129. Certains individus, peu nombreux, possèdent, en plus d’une borde-exploitation de petite taille, ostal à l’intérieur des murailles du village, des fermiers ou métayers peuvent être installés dans la borde, mais celle-ci peut n’être qu’une sorte de grange ou bien constituer un habitat secondaire utilisé seulement pendant les travaux agricoles130 ? Un texte du xiiie siècle concernant Saint-Papoul irait dans ce sens131. Beaucoup de propriétaires de fermes n’ont, toutefois, pas d’ostal en ville. Certains campmas comportent probablement plusieurs maisons, chaque héritier bâtissant la sienne, ce qui donnera naissance aux « masatges », hameaux des xvie-xviie siècles. On voit, par exemple, Raymond Auquerii vendre à son frère une maison, avec son aire et son jardin, sise dans le campmas « dels Auquiers » dans lequel ils habitent tous les deux132. Plusieurs familles peuvent partager le même ostal ou le même bâtiment de ferme : dans le registre de 1496 de Castelnaudary, 21 propriétaires d’ostals sur 257, 13 propriétaires de campmas sur 72 n’en détiennent qu’une part. Parfois, un déclarant est propriétaire d’un tiers de maison, a-t-il droit à un étage, une pièce133, vit-il effectivement dans cette maison ou perçoit-il un tiers du loyer de celle-ci ?

42À Castelnaudary, 90 exploitations sont déclarées dans le registre de 1496, nous avons vu que le port de La Place n’est pas recensé mais, à partir des estimes de 1516 et de 1535, on peut tabler sur, au moins, une vingtaine d’habitats intercalaires aux mains des habitants de ce quartier. On arrive à un total de 610 bâtiments, urbains ou ruraux, pouvant être habités. 162 contribuables figurant dans le livre d’estimes ne sont pas propriétaires d’ostals, mais, parmi eux, trois sont propriétaires de bordes et peuvent y loger et 32 déclarent une ferme, 127 ne possèdent pas de bâtiment, soit presque un tiers des déclarants (30,31 %). Parmi les 257 propriétaires d’ostals, 61 en détiennent deux ou plus (14 pour le chapitre Saint-Michel). Si 35 % des familles échappent à l’allivrement, elles n’auraient aucun mal à se loger dans le parc immobilier allivré, un ostal ou une ferme sur six accueillerait deux foyers ; ce serait le cas d’un bâtiment sur trois si 50 % des familles ne sont pas allivrées, ceci sans tenir compte des bordes habitées et de l’habitat précaire possible.

43Les 56 résidants de Fendeille déclarent, en 1495, en plus des 60 ostals et de l’hôtellerie, six exploitations ; les forains n’apparaissent pas dans ce registre, ils déclaraient 13 ostals en 1428. Tous les propriétaires de fermes possèdent un ostal en ville. Neuf contribuables (soit 16,07 %) ne détiennent aucun bâtiment et peuvent loger dans les ostals déclarés. A Montesquieu, 75 exploitations et 146 ostals sont déclarés par les résidants et les forains. 43 résidants sur 166 ne possèdent pas d’ostal, mais 16 d’entre eux déclarent une ferme ; 27 (soit 16,26 %) n’ont pas de parcelle bâtie. Les 93 propriétaires résidants et les 86 forains estimés à Montgiscard déclarent 93 ostals et neuf exploitations. Quinze résidents n’ont pas d’ostal mais, parmi ceux-ci, deux ont une borde et quatre une ferme, neuf seulement (soit 9,67 %) ne possèdent pas de parcelle bâtie. Les 46 résidants et le forain allivrés à Ayguesvives déclarent 52 bâtiments d’habitation (34 ostals, 17 fermes et une tuilerie). Dix-sept résidents n’ont pas d’ostal, mais sept d’entre eux possèdent une ferme et quatre, une borde ; six allivrés (soit 13 %) ne déclarent pas le moindre bâtiment. Dans ces deux dernières localités, on peut supposer que les allivrements qui n’ont pas subsisté donnaient à peu près le même résultat, un ostal ou une ferme par déclarant. Dans toutes ces bourgades, les résidants non allivrés peuvent loger dans des bordes, dans un habitat précaire ou être locataires, un ostal sur deux (si les nichils correspondent à 50 % de la population), ou un sur trois (si les nichils correspondent à 35 % de la population) abritant deux familles.

  • 134 A.D.A., 11 M 67, listes nominatives de 1846.

44La population allivrée peut être évaluée, avec une assez forte marge d’erreur pour Montgiscard et Ayguesvives. On considère qu’en 1328, le feu rural était de 5 individus, le feu urbain de 3,5. Des chiffres proches sont encore attestés pour le xixe siècle, le ménage citadin, à Castelnaudary, compte 3,96 personnes, celui des écarts 5,2134. En utilisant, pour le xve siècle, une moyenne de 4,5 personnes par feu, ce qui est sûrement inférieur à la réalité (domesticité en ville, bouviers, bergers en campagne), la population allivrée serait, au minimum, de 2 092 personnes à Castelnaudary, de 747 à Montesquieu, 229 à Fendeille. Pour Montgiscard et Ayguesvives, si l’on rajoute, respectivement, 20 et 10 foyers allivrés pour pallier aux lacunes des registres, la population allivrée serait de plus de 500 personnes à Montgiscard et de plus de 250 à Ayguesvives. Aux Bastards, la population repéra-ble, d’après les estimes, est d’une cinquantaine de personnes. Si 50 % des feux échappent à l’allivrement, on aurait, au maximum, 4 000 habitants à Castelnaudary, 1 500 à Montesquieu, un millier à Montgiscard, 500 à Ayguesvives et Fendeille.

  • 135 Entre 1347 et 1360, seulement 7 % des maisons accensées étaient isolées, Guimbail (R.), Expansion. (...)
  • 136 Elle signale 116 maisons à l’intérieur des murailles et sept campmas, qui représentent donc près d (...)
  • 137 Conservé à la mairie de Castelnaudary, 4 E 076/ CC 24 à CC 33. Il est complet, comportant les six (...)
  • 138 D’après les statistiques de 1807, A.D.A., 13 M 264, 104 « maisons servent à l’exploitation rurale  (...)

45On peut évaluer un peu plus sûrement, la part représentée par l’habitat intercalaire. A Castelnaudary, d’après les estimes, les écarts constituent 18 % de l’habitat total taillable (si les bordes, bien sûr, ne sont pas habitées). On risque d’être un peu en dessous de la réalité : six campmas à toponymes différents de ceux qui apparaissent dans les estimes, sont signalés dans les autres sources de la fin du xve siècle. Le pourcentage représenté par l’habitat intercalaire est le triple de ce qui est noté pour la localité voisine de Pexiora par Rémi Guimbail, pour le xive siècle135, puis par Christiane Mimiague, pour le xve siècle136, mais à partir des terriers de la commanderie, des bâtiments pouvaient être construits sur des alleux. Les sites d’habitat intercalaire, dans le consulat de Castelnaudary, sont au xve siècle un petit peu plus nombreux qu’ils ne le seront par la suite : on trouve seulement 101 emplacements de fermes dans le compoix del700137, 111 emplacements sur la carte de Cassini, 104 et 109 au xixe siècle138. À Fendeille, les écarts correspondent à 9,09 % des lieux d’habitat (mais ils sont, pour l’essentiel situés à Laval-des-Rousses et dépendent de l’évêque de Saint-Papoul), à Montgiscard, à 8,82 % mais à 33,93 % à Montesquieu et 34,61 % à Ayguesvives. A Montgiscard, le faible pourcentage peut s’expliquer par l’absence, dans le registre d’estimes, des manifestes des habitants de la rue principale, parmi lesquels les plus riches contribuables, probables propriétaires de domaines et aussi par l’absence de tous les fiefs (comprenant des exploitations) situés dans le territoire de Roqueville.

  • 139 Foriel-Destezet (Ch.), Vivarais et Languedoc..., op. cit., pp. 175-182.
  • 140 Boudartchouk (J.-L.), Le Carladez de l’Antiquité au xiiie siècle. Terroirs, hommes et pouvoirs, Th (...)

46Le Lauragais est à la fin du Moyen Âge une région d’habitat groupé avec un fort pourcentage d’habitat intercalaire. L’importance relative de ce dernier est rarement signalée, si ce n’est, à la même époque, pour le Haut-Vivarais, où, à partir des estimes de sept paroisses, Charles Foriel-Destezet signale que : « plus de la moitié des tenanciers vivent dans des mas isolés dont ils portent souvent le nom » ; mais ils possèdent aussi une maison dans le castrum ou au moins une chambre139, ce qui n’est guère le cas en Lauragais. Dans le bassin d’Aurillac, la Châtaigneraie orientale, autour de Carlat, mais au xiiie siècle, les exploitations rurales représentent plus de 90 % des sites habités140.

II. LES FORMES DE PROPRIÉTÉ

47Les registres d’estimes permettent de connaître les propriétaires, qu’il s’agisse de tenanciers ou d’alleutiers, de la terre taillable, l’étendue et la nature de leurs possessions. On obtient une image approchée de la réalité, diverses erreurs peuvent découler de l’équivalence effectuée entre les mesures médiévales et celles en usage à la Révolution, du fait que certaines superficies ne sont pas fournies (jardins, vergers, aires, parcelles bâties, quelques fermes et quelques parcelles), des fraudes possibles. Quelques manifestes ont disparu, on peut toutefois supposer qu’ils ne se distinguaient pas particulièrement de ceux qui sont parvenus jusqu’à nous.

A. La propriété moyenne

1. Superficies moyennes

48Si l’on calcule les superficies moyennes détenues par les déclarants, en distinguant propriétaires résidants et forains, sauf pour Castelnaudary où ces derniers sont très rares, on obtient les résultats suivants :

Superficie moyenne détenue par un déclarant, en hectares, fin xve siècle :

Superficie moyenne détenue par un déclarant, en hectares, fin xve siècle :
  • 141 La localité de Fendeille est exclue de tous les tableaux car les superficies des parcelles ne sont (...)

Note 1117141

  • 142 Avec un corpus réduit toutefois.
  • 143 Leroy (P.), La commanderie de Renneville..., op. cit., p. 112.

49Les résultats varient entre 5,21 ha et 8,12 ha pour les résidants, excepté dans le village des Bastards, où l’on atteint 16 ha142 et entre 2,32 ha et 3,9 ha pour les forains, hormis les cas d’un grand propriétaire, possessionné à Ayguesvives et d’un habitant de Montesquieu, le marchand Sicard Auzelayre, possessionné aux Bastards, qui ont, respectivement, 96,01 ha et 60 ha. À Renneville, dans le Terrefort, en 1469, la taille moyenne d’une exploitation (en tenure) est de 7,6 ha143, proche des résultats obtenus pour Montesquieu et Ayguesvives. A Castelnaudary, où la superficie moyenne est de 5,22 ha par déclarant, il est possible de calculer la superficie moyenne détenue par les laïcs et par les clercs. Le chapitre Saint-Michel, les chanoines et les chapelains déclarent 227,66 ha, ce qui est bien inférieur à la réalité, car la superficie de la plupart des fermes du chapitre n’est pas indiquée, la moyenne est de 12,65 ha par déclarant, et, si l’on enlève le chapitre (qui possède 84 ha, d’après ce registre), 8,43 ha. Les 401 laïcs déclarent 1961,85 ha, ce qui donne, en moyenne, 4,89 ha par déclarant.

  • 144 Charbonnier (P.), Une autre France..., op. cit., pp. 800-801.
  • 145 Zerner (M.), Le cadastre..., op. cit., p. 215 et annexes, pp. 628-629.

50En admettant que cette propriété moyenne reflète la composition du finage, avec un saltus, comme signalé précédemment, d’au moins 22,73 % des terres recensées à Montesquieu, en 1485, 26,94 % à Montgiscard, 48,8 % aux Bastards, 41,17 % à Ayguesvives, Vager serait, pour une propriété moyenne, de 8 ha aux Bastards, d’un peu moins de 6 ha à Montesquieu, d’un peu moins de 5 ha à Ayguesvives, d’un peu moins de 4 ha à Montgiscard et de 5 ha à Castelnaudary où le saltus est quasi-inexistant. Ces calculs permettent de comparer le Lauragais aux régions où n’apparaissent, dans les documents, le plus souvent, que les terres de Vager. En Auvergne, par exemple, les superficies moyennes, pour Vager, sont de deux à trois ha, avec les bois et les terres vaines, on arrive à des superficies beaucoup plus importantes, 6,5 ha, dans le village de Gioux, 14 ha, dans le village de Beaune144. Ces résultats étant obtenus à partir de censiers, les tenanciers peuvent avoir des terres relevant d’un autre seigneur ; les estimés du Lauragais, eux, peuvent posséder des terres nobles (sûrement rares), et des terres dans les villages voisins (héritages et, pour certains, investissements). En Comtat Venaissin, Monique Zerner obtient, après division de la superficie totale cultivée par le nombre de ménages résidant, un ager compris entre 2 et 6 ha145, selon les localités. Les estimés du Lauragais, possèdent, en moyenne, un peu plus de terres cultivées que ceux du Comtat ou de l’Auvergne mais apparemment, moins de friches et bois que ceux de l’Auvergne, dernier point qui n’est guère surprenant.

51Quelques estimés ne détiennent pas de parcelle à usage agricole ou, s’ils en possèdent une, n’indiquent pas sa superficie. C’est le cas de 64 d’entre eux, pour la fin du xve siècle, sur un total de 863. Parmi ceux-ci, 22 (17 résidents laïcs et cinq forains), soit 2,54 % du corpus, déclarent un jardin ou une ou des parcelles dont on ne connaît pas la superficie. Le pourcentage est du même ordre dans toutes les localités. Quarante-deux déclarants, soit 4,86 %, ne possèdent pas de parcelle à usage agricole (peut-être ont-ils, tout de même, un jardin ou un verger non déclaré, situé derrière leur ostal). Ces personnes, suffisamment riches pour être allivrées, et pourtant exclues de la possession de la terre (auxquelles il faudrait bien sûr rajouter les nichils et une partie des nichils solvabiles) sont plus ou moins nombreuses selon les localités.

Déclarants dépourvus de parcelles de terre agricole

Déclarants dépourvus de parcelles de terre agricole
  • 146 Cf. le chapitre « Les déclarants ».

52À Ayguesvives et aux Bastards, tous les déclarants, résidants ou forains, possèdent une ou plusieurs parcelles. Par contre, 3,01 % des déclarants résidants de Montesquieu, 5,38 % de ceux de Montgiscard, 5,24 % des laïcs et 38,89 % des clercs de Castelnaudary n’ont pas de terres. Beaucoup plus d’allivrés sont exclus, toutefois, de la possession d’un bâtiment (d’habitation ou de service). 30,31 % des propriétaires allivrés, à Castelnaudary, par exemple, n’ont pas d’ostal, de borde ou de ferme, 9,67 % de ceux de Montgiscard146. Les forains déclarent, pour la plupart, des parcelles non bâties, quand ils possèdent un ostal, il s’agit probablement d’un bien familial, ce qui doit être aussi le cas de beaucoup de parcelles de terre. Parmi eux figurent quelques investisseurs, nous y reviendrons, et des nobles, fortement possessionnés.

53Si l’on ne comptabilise que les propriétaires de biens-fonds ruraux (parcelles de terre, exploitations) dont la superficie est connue (avec toutefois une petite marge d’erreur parce que manquent parfois celles d’une ou deux parcelles ou même d’une ferme), la superficie moyenne détenue est supérieure d’à peu près cinquante ares à celle obtenue avec l’ensemble des déclarants. La seule différence importante concerne les clercs de Castelnaudary, la moyenne des superficies par déclarant est de 12,64 ha, par propriétaire de biens dont la superficie est connue, elle est de 20,69 ha.

Superficie moyenne détenue par un propriétaire de terre mesurée, en hectares, fin xve siècle :

Superficie moyenne détenue par un propriétaire de terre mesurée, en hectares, fin xve siècle :
  • 147 Si l’on regroupe pour Castelnaudary les laïcs et les clercs, la superficie moyenne par propriétair (...)

Note 1123147

54Si l’on considère les registres antérieurs, soit le registre CC 9 de Castelnaudary qui date du début du xve siècle et le registre de Montesquieu répertorié sous la cote 5 E 66 qui doit dater des années 1450-1460, on obtient les résultats suivants :

Superfìcie moyenne détenue par un déclarant en hectares, début et mi-xve siècle :

Superfìcie moyenne détenue par un déclarant en hectares, début et mi-xve siècle :

Déclarants dépourvus de parcelles de terre agricole, début et mi-xve siècle :

Déclarants dépourvus de parcelles de terre agricole, début et mi-xve siècle :

Superficie moyenne détenue par un propriétaire de terre mesurée, en hectares, début et mi-xve siècle :

Superficie moyenne détenue par un propriétaire de terre mesurée, en hectares, début et mi-xve siècle :

55Le registre CC 8 de Castelnaudary ne figure pas dans ces tableaux car il ne contient que les déclarations de clercs, de plus, peu de superficies sont indiquées, 57 ha pour 31 déclarants, soit 1,83 ha par déclarant. Les deux registres retenus, très incomplets, ne sont pas toujours très fiables. D’après le registre CC9 de Castelnaudary, la superficie moyenne détenue par un déclarant laïc n’est que de 2,4 ha, mais les estimes des quartiers les plus riches n’ont pas été conservées. Vingt déclarants laïcs ne possèdent pas de parcelle agricole, soit 8,47 % des déclarants, beaucoup plus qu’en 1496. La superficie détenue par 14 contribuables laïcs n’est pas indiquée, celle des biens propriétés de clercs ne l’est que très rarement, le total pour ceux-ci n’est que de 65 sétérées, soit 22,87 ha. La superficie moyenne par déclarant clerc est de 0,62 ha, trois d’entre eux ne possédant pas de terre, la moyenne est de 0,87 ha par propriétaire (le manifeste du chapitre Saint-Michel n’est pas renseigné, au contraire de ce qui se passe en 1496). Les résultats obtenus doivent être assez éloignés de la réalité et feraient croire à une augmentation des superficies moyennes au cours du xve siècle, ce qui est peu probable.

56Les problèmes posés par le registre de « 1409 » de Montesquieu sont moindres, il manque des manifestes, mais les superficies sont indiquées correctement, les plus gros propriétaires sont présents. On note une baisse de la superficie moyenne, faible toutefois, entre ce registre et celui de 1485, que ce soit pour les déclarants résidants (on passe de 8,79 ha à 7,5, 14,6 % à peu près de baisse) ou les forains (de 4,17 ha à 3,9, soit 6,5 % de baisse). On peut supposer une légère croissance démographique entraînant un partage des terres.

2. L’éventail des propriétés des résidants

  • 148 Fossier (R.) Dictionnaire du Moyen Âge..., op. cit., article paysannerie, pp. 1058-1060.
  • 149 Charbonnier (P.), Une autre France..., op. cit., pp. 385-386.
  • 150 Zerner (M.), Le cadastre..., op. cit., p. 253.

57Si l’on considère que trois à cinq ha de terres cultivées ou de prés sont nécessaires « pour vivre du sien », ce que disent, par exemple, Robert Fossier148, Pierre Charbonnier149 et Monique Zerner150, l’estimé moyen de la fin du xve siècle aurait une exploitation viable.

  • 151 Mimiague (C.), Le terroir..., op. cit.
  • 152 Charbonnier (P.), Une autre France..., op. cit., p. 799.

58Ces moyennes ne donnent en fait qu’une idée de la situation générale des individus taillables, car la fourchette des propriétés est très large, allant de quelques ares à quelques dizaines d’hectares. Si l’on considère seulement les résidants, toutes localités confondues, toujours pour la fin du xve siècle, ager et saltus comptabilisés, 69,6 % d’entre eux ont moins de 4 ha (des microfundia de dix ou 20 ares apparaissent, microfundia qui ne sont pas appelés jardins, il s’agit de lopins résultant probablement de divisions successives de la parcelle familiale), 10,5 % ont entre 4 et 8 ha, ce qu’on pourrait qualifier de propriété moyenne, 14,64 % ont plus de 12 ha. Ce sont des résultats de l’ordre de ceux que C. Mimiague trouve à Pexiora, au milieu du xve siècle, là, 60,82 % des exploitations font moins de 5 ha, 34,02 % entre 5 et 15 ha, 5,16 % plus de 15 ha151. On ne se trouve guère, par contre, dans le cas de figure évoqué par Pierre Charbonnier qui voit en Auvergne des sociétés peu différenciées où règne une certaine égalité paysanne, avec une faible différence de taille des exploitations152.

59Si l’on affine les résultats par localités, en utilisant des tranches de propriétés plus réduites, on obtient :

  • 153 Figure sur ce tableau la superficie possédée par un déclarant, hors parcelles bâties (d’un ostal, (...)

Les tranches de propriété des résidants153, fin xve :

Les tranches de propriété des résidants153, fin xve :
  • 154 Zerner (M.), Le cadastre..., op. cit., p. 255.
  • 155 Ib., pp. 649-650.
  • 156 Avec le problème, toutefois, des bosigues qui figurent parfois dans ces estimes.

60J’ai utilisé les tranches de propriété choisies par Monique Zerner pour le Comtat Venaissin (très petite propriété de moins de 2 ha, petite propriété de 2 à 4 ha, moyenne propriété de 4 à 8 ha, assez grande de 8 à 16 ha, grande propriété de plus de 16 ha). En Comtat, 56 % des exploitations font moins de 2 ha, 24 % de 2 à 4 ha, 14 % de 4 à 8 ha, 8,5 % de 8 à 16 ha, 1 % plus del6 ha154. On obtient quelque chose de très différent à Castelnaudary avec beaucoup plus de très petites propriétés, inférieures à 2 ha (67 %), moins de petites et moyennes propriétés (11,69 % et 4,54 %), un tout petit peu plus d’assez grande propriété (7,87 %), mais, surtout beaucoup plus de grandes propriétés (8,83 %), cela essentiellement dans un parcellaire regroupé, j’y reviendrai. En Comtat, pour un ensemble de 44 localités, seules 21 propriétés sont comprises entre 400 et 736 éminées (à 775 m2), soit entre 31 et 57 ha155. À la fin du xve siècle, pour seulement cinq localités lauragaises, apparaissent 42 domaines taillables de plus de 30 ha, le saltus est toutefois comptabilisé en Lauragais, sauf à Castelnaudary, ce qui augmente les superficies par rapport au Comtat Venaissin où friches et bois ne sont pas recensés dans les estimes156.

  • 157 Ce type de polyculture avec plantes oléagineuses et tinctoriales est, dans les Flandres, plutôt le (...)

61Robert Fossier note, à partir des livres fonciers seigneuriaux, que seulement 5 à 6 % des villageois disposeraient, vers 1300, des 3 à 5 ha qui permettent à une famille de vivre ; en Lauragais, à la fin du xve siècle, beaucoup plus d’individus sont dans ce cas mais ils déclarent les friches qu’ils possèdent et les estimes font apparaître la plus grande partie de leurs biens-fonds, à la différence des censiers où ne figurent que les biens relevant d’un seul seigneur. Si l’on considère la part moyenne du saltus dans les différentes communautés, au moins 22,73 % des terres recensées à Montesquieu en 1485, 26,94 % des terres recensées à Montgiscard, 48,8 % aux Bastards, 41,17 % à Ayguesvives, il faut détenir 5,5 ha à Montesquieu, 6 ha à Montgiscard, 7 ha à Ayguesvives, 8 aux Bastards pour retomber sur les moyennes de terres arables permettant de vivre du sien. Mais, même ainsi, 16 % des estimés de Montgiscard sont au-dessus de ce minimum, un tiers de ceux de Montesquieu, plus de la moitié de ceux d’Ayguesvives, 70 % de ceux des Bastards (avec un petit corpus, toutefois, dans ce village). Les estimes, bien sûr, ne font apparaître que la moitié ou les deux tiers des chefs de famille, mais, même en tenant compte de cela, dans les plus petites localités, au moins 8 à 15 % d’entre eux, beaucoup plus aux Bastards, auraient suffisamment de terre pour vivre. Il n’est pas, de plus, nécessaire d’avoir 3 à 5 ha pour survivre en Lauragais, la culture du pastel, d’un peu de lin ou de chanvre, le maraîchage, l’élevage de quelques volailles, permettent de dégager des surplus157.

62Les patrimoines ruraux sont très variables d’une localité à l’autre. À Castelnaudary, la micro-propriété (moins de 2 ha) est très fréquente, mais la possession de petites parcelles n’est qu’un gage d’approvisionnement sûr, un petit complément à d’autres revenus tirés d’un emploi salarié (artisanat textile) ou de la possession d’une boutique, d’un ouvroir. Ces petits propriétaires possèdent des clos de vignes qui leur permettent peut-être de vendre des surplus. À Montesquieu et Montgiscard, quatre ou cinq déclarants sur dix possèdent moins de 2 ha, on peut supposer que, dans ces deux bourgades, les activités artisanales et commerciales sont suffisamment développées pour que la possession de lopins de terre soit seulement un gage de sécurité alimentaire et non de survie. À Ayguesvives, les possibilités d’emploi dans l’artisanat ou le commerce sont plus limitées, la micro-propriété est moins répandue, on a, peut-être, un plus grand nombre de véritables paysans dans le corpus de déclarants. Les paysans micro-propriétaires sont assurés, comme les brassiers, de travailler une grande partie de l’année dans les grandes propriétés (domaines tailla-bles mais aussi domaines nobles) où l’on cultive blés et pastel, gros demandeurs de main d’œuvre ; les sarclages, la cueillette et la préparation du pastel, par exemple, s’étalent sur six mois. Le filage et le tissage à domicile amènent aussi un complément de ressources.

63Les petits propriétaires résidants qui ont moins de 4 ha, même s’ils constituent la majorité du corpus (sauf aux Bastards), détiennent une très faible partie du sol ; à Montesquieu, en 1485, ils possèdent 113,48 ha, soit 9,1 % de la terre taillable, à Ayguesvives 34,56 ha, soit 9,26 % de la terre, à Montgiscard 100,15 ha, soit 20,71 %, à Castelnaudary (CC 10) 324,07 ha, soit 14,8 %. Les propriétaires résidants détenant plus de dix hectares, que l’on peut appeler assez grands et grands propriétaires, sont 12 à Ayguesvives, soit 26,08 % des déclarants (quatre d’entre eux ont des terres dispersées dans le finage), ils détiennent 203 ha, soit 54,42 % des terres taillables. À Montgiscard, ils sont sept, soit 7,53 % des propriétaires (un seul d’entre eux possède des parcelles dispersées) et détiennent 433 ha, soit 89,46 % des terres estimées. À Montesquieu, en 1485, ils sont 34, soit 20,48 % des déclarants résidants et déclarent 843 ha, soit 67,71 % des terres estimées. À Castelnaudary, ils sont 63 (dont 5 ont des parcelles dispersées), soit 15,03 % des déclarants et déclarent 1690 ha, soit 77,2 % des terres. Aux Bastards, six déclarants sont dans ce cas et détiennent 195 ha, soit 85,9 % des terres taillables. Pour l’ensemble de ces cinq localités, 74,45 % du sol taillable est formé par des exploitations de plus de 10 ha et appartient à 122 personnes soit 16,59 % des résidants estimés. Une forte concentration des terres apparaît, un peu moins marquée à Ayguesvives, concentration que l’on retrouve exercée aussi par les forains, sauf à Montgiscard. En effet, la quasi-totalité des terres aux mains de forains appartient à quelques individus qui détiennent plus de 10 ha, en parcelles dispersées ou groupées. À Ayguesvives, un seul forain possède un peu plus de 93 ha, à Montesquieu, quatre forains déclarent 95 ha, soit 59,37 % des terres aux mains de forains (66 % d’entre eux ont moins de deux ha), à Montgiscard, un forain possède 48 ha, soit 24,12 % des terres aux mains de forains (70 % d’entre eux ont moins de deux ha).

  • 158 Zerner (M), Le cadastre..., op. cit., p. 257.
  • 159 Germain (R.), Les campagnes bourbonnaises..., op. cit., p. 315.
  • 160 Ces grandes exploitations n’appartenaient pas toujours à des paysans enrichis mais aussi à des bou (...)
  • 161 Le Roy Ladurie (E.), Les paysans..., op. cit., p. 283.
  • 162 Hélas (J.-C), Les anciennes mesures de l’Hérault, Les anciennes mesures locales du Midi méditerran (...)

64Cette grande propriété assez répandue constitue une originalité du Lauragais. En Comtat Venaissin, avec le même type de sources, il est rare que la grande propriété fasse plus du quart de la superficie cultivée, et dans certaines localités, elle n’existe même pas158. En Bourbonnais, les plus importantes propriétés, à la fin du xve siècle, (mais à partir des censiers) ne dépassent pas dix sétérées (environ 5 ha) et sont aux mains de 10 % des tenanciers, 50 % de ceux-ci ayant moins d’une sétérée159. En Bigorre, d’après le censier de 1429, 22 tenures seulement sur 1165, soit 1,88 %, excèdent 16 ha160. Le Lauragais se rapproche un peu du Languedoc évoqué par Emmanuel Le Roy Ladurie, où, en 1460, à Saint-Thibéry, par exemple, un tiers de l’effectif taillable, « une véritable classe moyenne », possède des domaines allant de 20 à 100 sétérées161, ce qui, avec une sétérée à 24,6 ares162, donne une fourchette allant de 4,92 ha à 24,6 ha.

65Si l’on effectue le même type de calcul pour le début du siècle à Castelnaudary et vers 1450-60 à Montesquieu, on obtient les résultats suivants :

Les tranches de propriété des résidants, début et mi-xve siècle :

Les tranches de propriété des résidants, début et mi-xve siècle :
  • 163 A.D.H.G., 5 E 66, registre dit de 1409.
  • 164 A.D.A. 4 E 076/CC CC 9.

Note 1139163
Note 1140164

  • 165 Le Roy Ladurie (E.), Les paysans..., op. cit., pp. 158-159. Il retrouve ce schéma dans d’autres vi (...)

66À Castelnaudary, il y avait, début xve siècle, davantage de micro-propriétaires et beaucoup moins de grands propriétaires qu’à la fin du siècle mais, cela reflète, encore une fois, le fait que n’ont subsisté que les estimes des quartiers les plus modestes, où n’habitent pas les propriétaires de domaines. Seize grands propriétaires (6,77 % du corpus) détenaient 282 ha sur 567 soit 49,73 % des terres estimées ; les petits propriétaires, de moins de 4 ha, possédaient 188 ha soit 33,15 % des terres recensées. À Montesquieu, 30 personnes soit 25 % de celles pour lesquelles nous avons un manifeste complet détenaient plus de 10 ha, au total, elles possédaient 825 ha sur 1054, soit 78,27 %, plus qu’en 1485 où elles ont, seulement, 67,71 % des terres. Soixante douze déclarants, soit 60 %, avaient moins de 4 ha, ils détenaient au total 72 ha soit 6,93 % des terres recensées, les petits propriétaires représentaient une part plus grande du corpus qu’en 1485 mais détenaient une part plus faible de la terre. On aurait donc entre les deux estimes, mais, malheureusement, celle dite de 1409 est incomplète, une érosion de la grande propriété, une baisse relative du nombre de petits propriétaires mais avec une augmentation des surfaces leur appartenant, une légère augmentation de la propriété moyenne. On aperçoit un tout petit peu ce qu’Emmanuel Le Roy Ladurie indique pour Saint-Guilhem-le-Désert, où de 1398 à 1442, s’effectue un remembrement des fortunes, avec « une tendance au regroupement en cotes moyennes » ... « Le regroupement ne s’est pas opéré au profit d’un ou deux caciques de village mais au profit de plusieurs dizaines de propriétaires moyens, survivants ou remplaçants des paysans plus nombreux de 1398 »165.

3. Les parcelles

a. Combien possède-t-on de parcelles166 ?

  • 166 La parcelle constituant l’unité technique de culture.

67Ne sont prises en compte que les parcelles à usage agricole telles que terres labourables, vignes, prés, jardins isolés, vergers isolés, bois, broussailles, mixtes, essarts. Les jardins et vergers qui accompagnent une maison ou une ferme sont exclus, ainsi que quelques aires à battre situées près des murailles. La parcelle portant les bâtiments réservés au logement et les bâtiments d’exploitation est considérée comme une seule parcelle (ce qui est très réducteur pour la zone Est car les bâtiments et toutes les terres afférentes apparaissent comme constituant une seule parcelle, alors que, pour des raisons pratiques, elles sont probablement menées en plusieurs lots).

Nombre moyen de parcelles par propriétaire, à la fin du xve siècle :

Nombre moyen de parcelles par propriétaire, à la fin du xve siècle :
  • 167 Leroy (P.), La commanderie de Renneville..., op. cit., p. 111.

68À la fin du xve siècle, le nombre moyen de parcelles s’établit, pour les résidants, entre 3,61 et 8,8, pour les forains, entre 2,15 et 31, selon la localité. Les deux forains d’Ayguesvives et des Bastards qui sont respectivement, Ramon de Pechbusque, seigneur de Mauremont, et Sicard Auzelayre, marchand de Montesquieu, propriétaires, pour le premier, de deux fermes, pour le second, d’une ferme et de deux importants blocs de terres, ont un grand nombre de parcelles. Tous les autres forains détiennent, en moyenne, moins de trois parcelles. À Castelnaudary, en 1496, si l’on sépare les clercs des laïcs, on note que les clercs, de même qu’ils possédaient plus de terres que les laïcs, ont plus de parcelles que ceux-ci (le chapitre Saint-Michel possède, à lui seul, 11 parcelles, dont six « blocs » constituant chacun une ferme, un clerc n’en détient que six, en moyenne). Ce n’était pas le cas au début du siècle, les clercs avaient alors moitié moins de parcelles que les laïcs mais le manifeste du chapitre n’était pas établi. Les résultats des bourgades témoins du Terrefort sont tout à fait comparables à ceux obtenus à Renneville, sur ce même Terrefort, là, le nombre moyen de parcelles par exploitation est de 9,76 en 1356, 7,6 en 1400, 10,2 en 1469, 7,7 en 1492, 6,7 en 1510167.

69On a deux fois plus de parcelles, en moyenne, par propriétaire, à Fendeille et Montesquieu qu’à Castelnaudary ou Montgiscard, la superficie moyenne par propriétaire à Montesquieu n’est toutefois pas le double de celle de Castelnaudary ou Montgiscard. Le nombre moyen de parcelles à Ayguesvives est élevé, mais reste inférieur à celui de Montesquieu alors que la superficie moyenne détenue est plus élevée. Les superficies moyennes des parcelles sont donc différentes dans toutes les localités, j’y reviendrai.

  • 168 A.D.H.G., 5 E 73 f° 82 r°.
  • 169 A.D.H.G., 5 E 73 f° 95 r°.
  • 170 A.D.H.G., 5 E 73 f° 65 r°.
  • 171 A.D.H.G., 5 E 66 f° 122 v°.
  • 172 A.D.H.G., 5 E 66 f° 13 v°.
  • 173 A.D.H.G., 5 E 67 f° 8 r°.
  • 174 A.D.A., 4 E 138 1 G 1 °f 54 v°
  • 175 A.D.A., 4 E 076/CC 10 f° 19 v°.

70Ces moyennes recouvrent des situations très différentes, certains ont beaucoup de parcelles, d’autres très peu, quelle que soit la période envisagée. A Ayguesvives, par exemple, Arnaud Ortiguie possède 22 parcelles pour une superficie totale de 18,84 ha168, Arnaud Aganos 16, pour un total de 9,95 ha169. Ces deux déclarants n’ont pas de ferme. A Montgiscard, Arnaud Guilhem mage (l’ancien) détient 17 parcelles pour un total de 9,39 ha170. À Montesquieu, dans le registre dit de 1409, Bernard Mersie possède 36 parcelles et une ferme, pour une superficie totale de 88,86 ha171, Pierre-Jean Advessen possède 73 parcelles et deux fermes, pour une superficie totale de 78,52 ha172. Dans ce registre, les contribuables qui n’ont que des parcelles dispersées en détiennent une quinzaine, au maximum. Dans le registre de 1485, Pierre-Jean Advessen détient la même superficie que dans le registre dit de 1409 mais ne déclare plus que 60 parcelles en plus de ses deux fermes, il a pu regrouper des parcelles, pratiquer des échanges pour faciliter l’exploitation des terres173. À Fendeille, en 1428, des déclarants ont une vingtaine de parcelles ou plus. En 1495, Jean Gaubert détient 47 parcelles et une ferme dont les terres ne sont pas détaillées174. A Castelnaudary, dans tous les registres, plusieurs déclarants possèdent plus de 20 parcelles. Dans le registre de 1496, Julian Villaroux déclare 28 parcelles et quatre fermes, pour un total de 90,52 ha. D’autres contribuables possèdent peu de terre mais une multitude de petites parcelles : les 31 parcelles de Ramon Espinace totalisent 15,3 ha175. La superficie moyenne des parcelles varie énormément d’un déclarant à l’autre.

Nombre moyen de parcelles par propriétaire, au début et à la mi-xve siècle :

Nombre moyen de parcelles par propriétaire, au début et à la mi-xve siècle :

71Si l’on compare les résultats de la fin du xve siècle à ceux qui apparaissent dans les registres du début ou de la mi-xve, le nombre moyen de parcelles détenues a diminué. A Fendeille, la diminution est de l’ordre d’un tiers (sur 60 ans), on passe de 12,53 parcelles à 9,23 ; à Montesquieu, elle est d’un neuvième, à peu près, sur 20 ou 30 ans. Pour les forains, l’évolution, dans cette localité, est aussi à la baisse, comme la superficie moyenne, mais négligeable, puisqu’on passe de 2,84 à 2,74 parcelles. Cela signifie-t-il qu’on a vendu des parcelles ? Que le fractionnement des héritages lié à l’arrivée à l’âge d’homme de générations plus nombreuses s’est traduit non par un découpage de chaque parcelle en faveur des différents héritiers mais par la constitution de lots de parcelles ? A Montesquieu, en 1485, P.-J. Advessen est le seul déclarant à posséder plus de 30 parcelles, alors qu’en « 1409 », ils étaient sept dans ce cas. Les propriétaires de fermes ont, en moyenne, trois parcelles de moins en 1485 que dans le registre précédent. A Fendeille, le nombre moyen de parcelles par déclarant a diminué, mais aussi le nombre total de parcelles des résidants, il est peu probable que les forains (absents du registre) se soient approprié toutes ces parcelles (en 1466, par exemple, quatre forains déclarent trois parcelles, un moulin et une « possecio » en campagne), on a dû regrouper des terres pour assurer une meilleure exploitation. A Castelnaudary, si le nombre moyen de parcelles a baissé pour les laïcs depuis le début du siècle, les superficies moyennes des exploitations ont augmenté, on doit supposer une réorganisation de celles-ci avec regroupement des terres ou au moins de deux parcelles voisines et donc augmentation de la superficie moyenne d’une parcelle. Le corpus de déclarants est toutefois plus important à la fin du xve siècle qu’au début.

  • 176 Dans ces tableaux figurent tous les propriétaires de parcelles de terre, que l’on connaisse la sup (...)

Type de parcelles détenues par un propriétaire moyen176

Type de parcelles détenues par un propriétaire moyen176

72À la fin du xve siècle, d’une localité à l’autre, on s’aperçoit que les types de parcelles sont très inégalement répartis entre propriétaires résidants. Si à Fendeille, presque tous disposent de terres labourables, le pourcentage descend à un peu plus de 70 % à Montesquieu, aux Bastards et à Ayguesvives, et tombe à 55 % à Mont-giscard. À Castelnaudary, dans le registre de 1496 où les déclarants sont nombreux, seulement 45 % d’entre eux détiennent une ou plusieurs parcelles labourables. Dans toutes les localités, sauf aux Bastards, pratiquement huit propriétaires sur 10 détiennent une vigne. On possède plus fréquemment une (ou plusieurs) vigne(s) qu’une terre labourable, c’est le cas à Montesquieu, Montgiscard, Ayguesvives, Castelnaudary (et, même, dans le registre CC 8 qui ne concerne que les clercs). Entre 40 et 50 % des propriétaires du Terrefort possèdent des prés ou des payssieux (prés clôturés, très peu nombreux). A Castelnaudary et à Fendeille, quelques déclarants (un sur 13 à Castelnaudary, un sur 10 à Fendeille) possèdent des ferragines qui ne figurent pas sur le tableau. Une personne sur deux possède un jardin, sauf à Castelnaudary où ce n’est plus qu’une sur trois, mais cela est lié, en partie, au fait que les fermes ne sont pas décrites et au non-allivrement des jardins du port Dedins. Très peu de vergers sont déclarés, certains doivent être appelés jardins pour en réduire l’allivrement, de plus, comme quelques arbres fruitiers se trouvent dans les parcelles de jardins, sur les limites de champs, il n’est pas nécessaire de posséder une parcelle spécialisée. Le verger d’agrément ou de rapport semble réservé aux clercs, pratiquement la moitié de ceux de Castelnaudary en possède un, au début du xve siècle. Dans cette ville toutefois, le pourcentage de détenteurs de vergers est plus élevé, même à la fin du xve siècle, que dans les autres localités, le verger semble constituer un signe extérieur de richesse. Quelques rares estimés déclarent plusieurs jardins ou vergers, à Castelnaudary, Ayguesvives, Montesquieu, Fendeille, on peut supposer qu’il s’agit d’ortolans.

73Les propriétaires de bois n’apparaissent que dans le Terrefort, sauf à Fendeille, à la fin du siècle, car on n’y recense plus ce type de parcelles. C’est à Montesquieu que l’on trouve le plus grand nombre de propriétaires de bois, presque un déclarant sur trois. Un propriétaire de bois n’en détient, le plus souvent, qu’une parcelle. Les friches ne sont allivrées que dans la partie ouest du Terrefort (si ce n’est quelques parcelles signalées à Castelnaudary). C’est un type de parcelle très présent aux Bastards, neuf déclarants sur onze en possèdent (trois déclarants n’ont d’ailleurs que cela), les deux autres ont des « terres mixtes » composées pour partie de broussailles. Deux à trois propriétaires sur dix en détiennent à Montesquieu et Ayguesvives. Les parcelles mixtes sont déclarées par trois à cinq personnes sur 10 dans le Terrefort, elles sont composées en général, dans ce secteur, de terres cultivées et de broussailles. À Castelnaudary, ces parcelles, formées de vignes et terres labourables, sont aux mains de moins d’une personne sur dix.

74Un même individu détient, souvent, plusieurs parcelles de même nature, près de cinq parcelles de terre labourable, en moyenne, à Montesquieu et à Fendeille, quatre à Ayguesvives et Castelnaudary, trois à Montgiscard. Un propriétaire de vignes détient, presque partout, deux parcelles ; la plupart des propriétaires de prés en ont, eux aussi, deux parcelles. Seuls, les habitants des Bastards ne suivent pas tout à fait ce schéma, si un propriétaire de terre labourable en possède, en moyenne, trois ou quatre parcelles, un propriétaire de vigne en possède quatre, un propriétaire de pré en possède trois ; le nombre de déclarants, très faible, relativise ces résultats. Un propriétaire de parcelle « mixte » n’en détient qu’une, en général, sauf à Montesquieu, Ayguesvives et aux Bastards où l’on arrive à trois. Il faut, bien sûr, voir la superficie moyenne de ces parcelles.

  • 177 M. Zerner note la même chose en Comtat, la vigne est plutôt présente dans les toutes petites propr (...)

75Quand on ne déclare qu’une parcelle, il s’agit généralement d’une vigne ; ce phénomène est particulièrement net à Montesquieu, où sept déclarants sur dix sont dans ce cas et, surtout, à Castelnaudary où sur 104 déclarants n’ayant qu’une parcelle, 73 ont une vigne177. Cette vigne assure l’approvisionnement familial et permet, peut-être, la commercialisation d’un petit excédent. On peut aussi cultiver des légumes ou des céréales entre les rangées de ceps. Le fait qu’on détienne, souvent, deux ou trois vignes, indique un début de spécialisation.

  • 178 Guimbail (R.), Expansion..., op. cit., pp. 122-123. De plus en plus de paysans ne prennent qu’un b (...)

76Les seules demi-parcelles ou même tiers de parcelles déclarés concernent des jardins, alors qu’à la fin du xiiie siècle, à Pexiora, des moitiés de parcelles étaient données en tenures178. La baisse démographique a allégé la pression exercée sur la terre, mais le type de document peut aussi jouer, le propriétaire utile d’un bien ne s’intéresse pas à son origine, ne sait pas forcément que sa parcelle résulte d’une subdivision. On rencontre des demi-parcelles, de natures diverses, dans les registres notariaux ; lors des ventes ou locations de jardins, on s’aperçoit des partitions, même si l’acte ne les signale pas, grâce aux mentions de droits de passage ou de puisage de l’eau.

77Si l’on compare les résultats obtenus à partir des estimes du début et de la mi-xve avec ceux de la fin du siècle, on aperçoit, toujours pour les propriétaires résidants, un changement dans le type de parcelles possédées, changement qui corrobore les modifications notées quant à la composition du finage. À Castelnaudary et Fendeille, à la fin du siècle, les propriétaires qui détiennent des parcelles labourables représentent un plus faible pourcentage qu’au début du siècle, on est passé, à Castelnaudary, de 73,15 % des propriétaires à 45,53 %, à Fendeille, de 100 % des propriétaires à 87,5 %. À Castelnaudary et Montesquieu beaucoup plus de propriétaires détiennent alors une vigne, huit sur dix contre sept sur dix à Castelnaudary, huit sur dix contre cinq sur dix à Montesquieu. À Fendeille, par contre, le pourcentage de propriétaires de vignes a un peu diminué, passant de 90 % à 80 %. Les personnes déclarant des prés représentent une plus forte part des propriétaires à Castelnaudary, on passe de moins de 7 % à près de 20 %, on note aussi une très légère augmentation à Montesquieu, 20 ou 30 ans seulement séparant les deux registres. A Castelnaudary et Fendeille, les ferragines sont plus fréquentes à la fin du siècle qu’au début. On peut interpréter cela comme une orientation vers des activités qui rapportent davantage, on abandonne les cultures vivrières pour la culture de la vigne et un peu d’élevage. On aurait, d’après les estimes, moins de propriétaires de jardins et même, pour Fendeille, moins de jardins en 1495 qu’en 1428. Cela tient, probablement, à une nouvelle façon d’allivrer, les jardins vivriers ne doivent plus être estimés mais seulement ceux dégageant des surplus commercialisés. À Montesquieu, par contre, on a de plus en plus de propriétaires de jardins, signe d’un probable développement du maraîchage. Dans cette localité, le pourcentage de détenteurs de broussailles a diminué de moitié d’un registre à l’autre, ces broussailles, en cours de défrichement, sont passées dans la catégorie « terres mixtes ».

78La moitié des forains possessionnés à Montesquieu, en 1485, détiennent des terres labourables, un sur trois, des prés. À Montgiscard, un forain sur deux possède un ou des prés, un sur trois possède une (ou des) terre(s) labourable(s) ou une (ou des) vigne(s). À Fendeille, au début du xve siècle, 90 % des forains possèdent des vignes. Quand les forains n’ont qu’une parcelle, à Montgiscard et Montesquieu, c’est un pré, à Fendeille, une vigne. Cela doit être lié en partie au terroir offert : les collines de Fendeille, selon leur exposition, la nature du terrain se prêtent à la culture de la vigne, l’Hers et les nombreux ruisseaux, à Montgiscard et Montesquieu, permettent l’arrosage des prés. Ces forains ont peut-être hérité des terres, mais peuvent, aussi, les avoir achetées pour disposer de ce qu’ils ne trouvaient pas facilement dans leur localité d’origine, cela semble le cas pour les prés à Montgiscard, beaucoup plus de forains (en %) que de résidants en possèdent.

b. Superficies moyennes des parcelles, selon leur nature

79Si l’on rapporte, pour l’ensemble des livres d’estimes, le nombre de parcelles à la superficie taillable, une parcelle ferait en moyenne 1,16 ha. Si l’on calcule les superficies moyennes des parcelles selon leur nature, pour chaque localité, on obtient les résultats suivants :

  • 179 Les estimes ne fournissant pratiquement jamais les superficies des jardins et vergers, ceux-ci son (...)

Note 1155179

80À la fin du xve siècle, les parcelles appartenant aux résidants ont des superficies moyennes très différentes, selon leur nature, mais aussi, à l’intérieur d’une même catégorie, d’une localité à l’autre.

  • 180 Roupnel (G.), Histoire de la campagne française..., op. cit., p. 144 note 21, d’après Foville (A. (...)
  • 181 Ib., p. 139, note 16.

81Les terres labourables ont des superficies moyennes comparables à Montesquieu, Montgiscard et Ayguesvives, de l’ordre de 1,1 et 1,3 ha. A Castelnaudary, la superficie moyenne dépasse 2,7 ha, ceci, nous le verrons, est lié, surtout, à l’existence d’une grande propriété. Gaston Roupnel disait que le champ correspondait à une journée de travail ; en 1882, une statistique portant sur la France entière, donnait une étendue moyenne de la parcelle de 39 ares180. Walter de Henley estimait qu’on pouvait labourer 35 ares par jour. En Lauragais, il faudrait trois jours de travail pour labourer une parcelle type. Si cette parcelle était travaillée à la bêche, cela représenterait au moins 25 jours de travail pour une personne. Un petit propriétaire peut, toutefois, louer des bœufs ou des chevaux à la journée, leur location est prévue dans les coutumes de Castelnaudary et de Toulouse. Les parcelles de vignes sont, partout, de faible superficie, comprises entre 34 et 54 ares, ce qui permet le travail à la bêche. Toujours selon Gaston Roupnel, une ouvrée de 4 ares 28 correspond à la tâche du vigneron avec une pioche dans une journée181, une vigne moyenne en Lauragais pourrait être bêchée par une seule personne en 8 à 13 jours. Les prés sont assez petits dans le Terrefort, compris entre 40 et 55 ares ; à Castelnaudary, par contre, la parcelle moyenne fait plus d’un hectare. Dans cette ville, le type d’appropriation est différent, ce sont les grands propriétaires qui détiennent les prés. Les bois, présents seulement dans le Terrefort, ont des superficies moyennes très différentes d’une localité à l’autre : 30 ares aux Bastards et à Ayguesvives, plus de 66 ares à Montesquieu, plus d’un ha à Montgiscard. Les parcelles de broussailles sont très grandes, supérieures en moyenne à 1 ha aux Bastards et à Montesquieu, atteignant près de 4 ha à Ayguesvives et 5,5 ha à Montgiscard. Les parcelles « mixtes » sont elles aussi, de très grande taille, surtout dans le Terrefort, de deux ha à deux ha et demi à Montesquieu, Ayguesvives et Montgiscard, de plus de 8 ha aux Bastards. A Castelnaudary, elles sont un peu plus petites, un ha et demi, mais il s’agit de parcelles cultivées (terres labourables et vignes) alors que dans l’Ouest, ce sont surtout des parcelles en partie cultivées, en partie incultes. Les villageois des Bastards déclarant ces grandes parcelles mélangeant ager et saltus sont en train de défricher leur finage.

82Les parcelles détenues par les forains ne peuvent être étudiées qu’à Montesquieu et Montgiscard. A Montgiscard, elles sont comparables à celles des résidants, sauf dans le cas des prés qui sont pratiquement trois fois plus grands et des parcelles de broussailles qui sont, en moyenne, le tiers de celles des résidents. À Montesquieu, la superficie des parcelles détenues par les forains est plus grande que celle des parcelles des résidants, sauf pour les bois et les broussailles. Cela semble logique, si l’on a des terres à l’extérieur de son village, ce sont des terres rentables, celles peut-être qui ne sont plus disponibles sur son propre terroir.

  • 182 Leroy (P.), La commanderie de Renneville..., op. cit., pp. 111-112.
  • 183 Mimiague (C), Le terroir..., op. cit., p. 119.
  • 184 Les autres maîtrises consacrées au Lauragais ne fournissent pas de superficie moyenne. R. Guimbail (...)

83À Renneville, en 1469, la parcelle de terre labourable fait en moyenne 1,05 ha, celle de vigne 0,45 ha, celle de pré 0,64 ha, celle de bois 1,91 ha182, ce qui ressemble beaucoup aux résultats obtenus pour Montesquieu. À Pexiora, avec un finage du type de celui de Castelnaudary, la superficie moyenne des terres labourables au xve siècle se situerait entre 0,75 et 1 ha, celle des prés et vignes vers 0,5 ha183 ; les parcelles sont donc, sauf pour les vignes, plus petites qu’à Castelnaudary184.

  • 185 Coulet(N.), Aix-en-Provence..., op. cit., p. 152.
  • 186 Charbonnier (P.), Une autre France..., op. cit., p. 386.
  • 187 Zemer (M.), Le cadastre..., op. cit., p. 228, p. 232 et annexe n° 12, pp. 636-637.
  • 188 Germain (R.), Les campagnes bourbonnaises..., op. cit.,, pp. 331-332.

84Dans les autres régions étudiées, les parcelles sont de très faible superficie, beaucoup plus petites qu’en Lauragais. Dans les campagnes aixoises, les deux tiers font moins de 10 éminées (un ha à peu près), 43 % des vignes font moins d’une quarterée ou une quarterée, 65 % n’atteignent pas deux quarterées, soit un demi-hectare185. En Auvergne, la superficie d’un champ n’atteint même pas 33 ares186. En Comtat Venaissin, pour l’ensemble des terres, les superficies des parcelles sont comprises entre 14 et 90 ares, selon les communautés ; les prés, à Malaucène, font quatre éminées, soit 31 ares, les jardins, une demi-éminée ou une éminée (soit 775 à 1 550 m2)187. En Bourbonnais, les parcelles sont toutes petites, spécialement près des villages : à Bessay, par exemple, 32 % des terres font entre 10 ares et 12,50 ares, 65 % font moins de 10 ares188. Seules, les superficies des jardins du Lauragais ressemblent à celles des autres régions, 900, 1 400 m2 (cf. supra). On pourrait conclure de ces superficies moyennes lauragaises, plus élevées qu’ailleurs, que la pression exercée sur la terre n’est pas encore très forte, on n’a pas encore subdivisé les parcelles. On peut cependant se demander si ces superficies ne sont pas le résultat d’un seuil d’allivrement, les propriétaires non allivrables ne déclarant pas les petits lopins qu’ils possèdent.

85On peut calculer la superficie moyenne des parcelles au début du xve siècle, à Castelnaudary, vers 1450-1460, à Montesquieu.

  • 189 Cazes (J.-P.) La bailie..., op. cit.. pp. 38-40.

86Si l’on compare ces chiffres à ceux de la fin du siècle, on s’aperçoit qu’à Montesquieu, les superficies moyennes des parcelles de terres labourables, de prés et de bois, ont diminué au cours du siècle, celles des vignes, des broussailles, des terres « mixtes » ont augmenté. On peut songer à un regroupement de parcelles ou bien à une attaque des parties boisées (baisse du nombre de ces parcelles, diminution aussi en part relative du finage), mais, encore une fois, le registre dit de 1409 est incomplet. A Castelnaudary, les superficies moyennes des parcelles de terres labourables, de terres « mixtes » (qui sont cultivées) et des vignes auraient augmenté au long du xve siècle, celle des prés aurait diminué. On peut supposer que l’absence, dans les estimes du début du xve siècle, des plus riches estimés explique une partie de ces modifications. L’augmentation, d’une quinzaine d’ares, de la taille moyenne des vignes, doit être lié à la transformation de parcelles de terre labourable, plus grandes, en vignes. Les renseignements apportés par le Liber reddituum de la fin du xiiie siècle sont beaucoup plus intéressants pour cette ville. En considérant censives et encours d’hérésie, une parcelle de terre faisait en moyenne 1,21 sétérée soit 42,7 ares, une parcelle de vigne 0,81 sétérée soit 28,75 ares. Les prés, dans l’ensemble de la baylie, avaient une superficie moyenne de 0,61 sétérée soit 21,41 ares189. Le corpus est, toutefois, plus réduit que celui du xve siècle. La taille des parcelles, surtout celle des terres labourables a très fortement augmenté depuis la fin du xiiie siècle. Ceci est à mettre en relation avec la baisse démographique, elle a permis un regroupement des terres vacantes et la constitution d’une propriété moyenne.

c. La forme des parcelles

  • 190 Higounet (Ch.), Un plan figuré de 1490 de la plaine sous-pyrénéenne de l’Hers et de l’Ariège, Revu (...)
  • 191 A.D.H.G., C 1549, cf. la partie « Annexes ».

87Nous ne disposons, pour le Lauragais, que d’un seul plan figuré, réalisé en 1490-1491 à l’occasion d’une enquête concernant des territoires situés à Calmont que se disputent le commandeur de Caignac et Saint-Jean del Tor, et le prieur de Saint-Sernin de Toulouse190, plan sur lequel figurent des parcelles aux formes régulières. A part cet exemple, les plans les plus anciens remontent au début du xviiie. Dans ceux qui accompagnent le compoix de 1700 de Castelnaudary, on voit souvent de grosses parcelles trapues et à formes peu régulières, à plus de quatre côtés, entourant les fermes, les autres parcelles ont des formes un peu plus régulières, rectangulaires ou trapézoïdales. On retrouve le même type de parcelles sur le compoix d’Ayguesvives réalisé à peu près à la même époque191. Est-on toujours basé sur le parcellaire de la fin du xve siècle ?

  • 192 R. Germain note la même chose, en Bourbonnais, pour le milieu du xve siècle, Germain (R.), Les cam (...)
  • 193 A.D.A., 36 C 6, cf. la partie « Annexes ».

88On peut supposer une certaine permanence, au moins pour les domaines. En effet, dans la plaine de Castelnaudary, d’après les estimes, un bloc de terres entoure les bâtiments des fermes ; les actes notariés montrent des regroupements de terres réalisés par achats ou échanges192. Les fermes du xviiie siècle étant la continuation de celles du xve siècle, et souvent aux mains des mêmes familles, il est peu probable que leur organisation ait changé. Les parcelles ne relevant pas d’un domaine, aux formes régulières, souvent à quatre côtés, peuvent correspondre aux parcelles médiévales ; quand la totalité des parcelles confronts est fournie dans les estimes, on en mentionne souvent quatre, signe d’une certaine régularité. Parfois, tout de même, on a jusqu’à six ou sept confronts, signe d’un partage de parcelle ou bien de formes plus irrégulières. Les plans d’adaptation de Castelnaudary, réalisés courant xviiie siècle, montrent, près de la ville, des parcelles rectangulaires pour lesquelles sont mentionnées des reconnaissances effectuées fin xive siècle ou au xve siècle193, signe de faibles modifications du parcellaire. On n’aperçoit pas de champs enclavés les uns dans les autres, les ventes de « passada », droits de passage sur les terres des autres, sont rares au xve siècle, et seules, les coutumes de Bram y font allusion.

  • 194 Les arbres auriers qui abritent des vents dominants et qui marquent aussi les limites des finages (...)

89Un certain nombre de parcelles doivent être encloses : haies vives d’épineux, rideaux d’arbres194 ou fossés.

4. Deux types de propriété : en parcellaire dispersé, en parcellaire regroupé

  • 195 Thébault (V.), Les bourgeois de la terre. Stratégies foncières et mobilités sociales dans le Midi (...)
  • 196 Germain (R.), Les campagnes bourbonnaises..., op. cit.,, pp. 313-319. Coulet (N.), Aix-en-Provence (...)
  • 197 Tricard (J.), Les campagnes limousines du xive au xvie siècle, originalité et limites d’une recons (...)

90Les livres d’estimes font apparaître une grande inégalité dans l’appropriation du sol, avec une majorité de petits propriétaires, une forte minorité de grands propriétaires, mais, surtout, deux formes d’appropriation. Des individus détiennent des parcelles dispersées à travers le finage et habitent dans l’agglomération ; d’autres ont des exploitations d’un seul tenant ou presque, centrées sur des bâtiments dans lesquels eux-mêmes ou leurs fermiers ou métayers habitent, et qu’on peut appeler domaines, bien qu’il n’y ait pas toujours plusieurs bâtiments sur les terres et une très grande superficie. Au xixe siècle, en Toulousain, on parle en effet de domaines pour qualifier des propriétés dont la superficie peut être assez réduite, ce n’est pas tellement la taille qui joue mais la structure interne de la propriété. Elle doit être d’un seul tenant ; elle constitue, dit Vincent Thébault, « une espèce d’enclave privée », celle où le propriétaire a « tout pouvoir ». C’est pour cette raison que le domaine possède une sorte de frontière constituée par des haies vies, des murs, des clôtures195. Les domaines sont répartis sur l’ensemble du finage des diverses localités et pas seulement à la périphérie. Les propriétaires de parcelles dispersées, plutôt possessionnés près des agglomérations, peuvent détenir des parcelles éloignées, particulièrement dans le Terrefort (des friches sur les collines), ces parcelles s’intercalent entre les domaines. Ces deux types de propriété se retrouvent en Bourbonnais et dans les campagnes aixoises196. En Limousin, Jean Tricard signale deux types de tenures, la tenure-bloc et la tenure parcellaire, qui peuvent coexister197. En Lauragais, des domaines correspondent à des tenures, d’autres à des alleux, on ne peut donc employer pour les qualifier les termes de tenures-blocs ou parcellaires (on aperçoit, bien sûr, dans les registres de reconnaissances, ces deux types de tenures).

91Si l’on répartit, par localité, en ne considérant que les résidants, les propriétaires selon leur type de propriété, on obtient :

92On s’aperçoit que, selon les localités, le système d’appropriation par domaines est plus ou moins fréquent. Il est très répandu à Montesquieu où il concerne 40 % des propriétaires résidants de la fin du xve siècle (38 % dans le registre le plus ancien), aux Bastards et à Ayguesvives, avec près d’un propriétaire sur trois. Ce pourcentage est plus faible à Castelnaudary (près de 20 %), ce qui est facilement explicable puisqu’il s’agit d’une ville fortement peuplée, où beaucoup de contribuables ne vivent pas de l’agriculture. À Fendeille et Montgiscard qui ne sont pas tout à fait dans ce cas, respectivement, 11 % des propriétaires, à la fin du xve siècle (contre 13,95 % en 1428) et 6,66 % possèdent des fermes. Aux Bastards, la situation est un peu différente, les résidants déclarent quatre fermes (bâtiments plus terres), mais aussi huit lots importants de terres (de 10 à 20 ha) ; une même personne peut détenir une ferme et plusieurs blocs de terre. Des propriétaires de lots de terres ne déclarent pas le moindre bâtiment, ils sont probablement en train de défricher et n’ont, pour l’instant, édifié qu’un habitat précaire, non allivrable. Un propriétaire de domaine peut en détenir un seul ou plusieurs. Les forains sont rarement propriétaires de domaines, quand c’est le cas, ils appartiennent aux catégories les plus riches de la population, celles qui investissent dans la terre, y compris hors de leur lieu de résidence.

B. La propriété en parcellaire dispersé

1. Les superficies

93Ne sont pris en compte pour établir les moyennes que les manifestes indiquant la superficie de toutes les parcelles.

  • 198 Les tenures parcellaires du Limousin sont, en moyenne, un peu plus importantes, 3 ha, Ib., pp. 193 (...)

94La superficie moyenne, pour ce type de propriété est, à la fin du xve siècle, pour les résidants, de l’ordre de deux à trois hectares : 1,64 ha à Castelnaudary, 2,57 ha à Montesquieu, 2,82 à Montgiscard ; pour les forains, elle est de 2,16 ha à Montesquieu et Montgiscard198. Deux anomalies apparaissent, à Ayguesvives et aux Bastards. A Ayguesvives, la superficie moyenne est de 6,03 ha, ce chiffre élevé s’explique par la présence de quelques grosses exploitations (de 10 à 20 ha) composées de parcelles dispersées, leurs propriétaires ne déclarent pas de campmas ou bories et habitent dans le fort ou le barri ou tout près de celui-ci. Aux Bastards, si l’on excepte trois individus (dont deux qui portent les mêmes patronymes et prénoms que des déclarants de Montesquieu), qui ne déclarent que 70 ou 80 ares, tous les autres, qu’ils possèdent ce qui est appelé « campmas » ou plusieurs parcelles dont une partie forme un bloc cohérent mais sans bâtiment d’habitation signalé, détiennent de 9 à 59 ha, dont une grande partie est en friche. La superficie moyenne, pour ceux qui n’ont pas de véritables « fermes », est de 14,12 ha. Les deux registres les plus anciens de Castelnaudary et de Montesquieu ne permettent pas de noter un changement significatif au long du xve siècle. A Montesquieu, on passe d’une superficie moyenne de 2,59 ha à 2,57 ha, à Castelnaudary, on note une petite augmentation de superficie moyenne entre le début et la fin du siècle : on passe de 1,37 ha à 1,64 ha.

95Ces moyennes recouvrent des écarts considérables, de quelques ares à plus d’une dizaine d’hectares ; les propriétaires résidants détiennent jusqu’à 10 ha à Montesquieu, 12 ha à Montgiscard, 17 ha à Castelnaudary, 19 ha à Ayguesvives. Les médians s’établissent à 0,7 ha à Castelnaudary, 1,7 ha à Montgiscard, 1,18 ha à Montesquieu, 3,76 ha à Ayguesvives (ils sont de 1,02 ha dans le registre le plus ancien de Montesquieu et de 0,7 ha dans le registre CC 9 de Castelnaudary). Ils sont situés très loin du chiffre moyen, ce qui traduit une forte inégalité. Le même phénomène existe pour les forains : le médian est de 1,48 ha à Montgiscard, 0,85 ha à Montesquieu (0,88 ha dans le registre antérieur).

96Si l’on établit un classement par tranches de propriété, on obtient, pour la fin du XVe siècle :

  • 199 Germain (R.), Les campagnes bourbonnaises.... op. cit., p. 314.
  • 200 Berthe (M.), Le comté de Bigorre, un milieu rural au bas Moyen Âge, op. cit., pp. 75-76.

97Les résidants qui possèdent plus de 4 ha (taillables) en parcelles dispersées et qui peuvent donc en vivre, ne sont pas toujours très nombreux. S’ils représentent 14 % des déclarants à la fin du xve siècle, toutes localités confondues (15,7 % de ceux dont on connaît la superficie des parcelles), ils ne correspondent qu’à 7,76 % des déclarants de Castelnaudary (clercs et laïcs confondus), à 20 % de ceux de Montgiscard, à 23,9 % de ceux de Montesquieu, mais à 48,38 % de ceux d’Ayguesvives, à 72,12 % de ceux des Bastards. La micro-propriété (moins de deux ha), dans ce type d’appropriation, est le fait de près de 65 % de ce corpus d’estimés, du même ordre, apparemment, de ce qu’on trouve en Bourbonnais, à la même époque ; là, 75 % des tenanciers ont moins de 5 sétérées soit 2,5 ha199. Elle est beaucoup plus répandue qu’en Bigorre où, en 1429, dans les villages, la superficie des tenures descend rarement en dessous d’un hectare, et où, dans les bourgs, 26,5 % seulement ont moins d’un hectare200. La fréquence des minuscules tenures apparaît à Maurice Berthe comme critère de délimitation entre le village et la bourgade. Si l’on applique ce système au corpus des estimés, pour les propriétés de moins de un ha, il fonctionne. À Castelnaudary, la « capitale » locale, 93 % des propriétaires de terres dispersées ont moins d’un ha, seulement les trois quarts à Montesquieu et Montgiscard, un petit peu plus de la moitié à Ayguesvives. Aux Bastards où l’on peut se demander s’il existe effectivement un hameau auprès du château, tous les déclarants, sauf deux, détiennent plus de 10 ha de terre.

  • 201 A.D.A., 4 E076/CC10 f° 50 r°. Cf. la partie « Annexes ».
  • 202 A.D.H.G., 5 E 67 f° 70 r°.
  • 203 Gérard Béaur, Stratigraphier le monde rural. Les catégories sociales en question, pp. 17-20.
  • 204 A.D.H.G., 3 E 22913 f° 52 v°, Cintegabelle, 1421 ; A.D.H.G., 3 E 4471 f° 169 v°, Toulouse, hôtelie (...)
  • 205 A.D.H.G., 3 E 34062 f° 6 v°.

98Quelques laboureurs possèdent des exploitations en parcelles dispersées, de superficies très variables. A Castelnaudary, Pierre Jean, par exemple, ne déclare qu’une parcelle d’un demi hectare201. À Montesquieu, Jean de Fayagalteri déclare un ostal et quatre parcelles atteignant 7,4 ha ; Arnaud Beneyt déclare un ostal, un emplacement de borde et 11 parcelles pour un total de 8,6 ha (il est coté 30,5 £). Son fils Louis, lui aussi laboureur, qui doit habiter avec lui, n’est coté que pour son cabal, pour 20 £ tr202. De nombreux laboureurs exercent plusieurs activités ; cela a déjà été noté, il n’y a pas de frontière entre la paysannerie et le reste de la société203. On aperçoit, au fil des testaments, des « paysan et charretier »204, « tisserand et laboureur », Vitalis Faye senior est forgeron et laboureur205.

99Si l’on effectue le même genre de classement pour les registres les plus anciens, on s’aperçoit que les propriétés moyennes (entre 3 et 12 ha) étaient alors moins fréquentes qu’à la fin du siècle (12 % contre 20 %), les petites propriétés plus nombreuses.

2. Le finage des exploitations

100À partir des différents fichiers Excel constitués, on peut calculer, pour chaque localité, la superficie des terres labourables, vignes, prés, friches, parcelles mixtes détenus par chaque déclarant, il est donc facile de calculer les superficies consacrées aux terres labourables, vignes et autres dans les propriétés à parcellaire émietté et de voir quel est le finage type, s’il se différencie du finage général des localités, de celui des fermes et quelles sont les orientations des exploitations en matière de productions.

Le finage de l’ensemble des exploitations composées de parcelles dispersées, à la fin du xve siècle :

Le finage de l’ensemble des exploitations composées de parcelles dispersées, à la fin du xve siècle :

Le finage de l’ensemble des exploitations composées de parcelles dispersées, début et mi-xve siècle :

Le finage de l’ensemble des exploitations composées de parcelles dispersées, début et mi-xve siècle :
  • 206 Si l’on considère des rations journalières de blé comprises entre 876 et 1 315 grammes, pour Louis (...)

101À la fin du xve siècle, entre 35 et 45 % des superficies totales détenues par les résidants, sous forme de parcelles dispersées, sont occupées par les terres labourables, sauf aux Bastards. Toutes les terres mixtes de la plaine et de l’est du Terrefort étant cultivées (en vignes et en terres arables) et près de la moitié de celles de l’ouest du Terrefort, on peut conclure que près de la moitié des terres sont, en fait, consacrées aux labours. Étant donné la superficie moyenne de ces exploitations, les terres arables vont de 1 ha à 1,5 ha ; si l’on pratique une rotation biennale, cela signifie qu’on n’emblave même pas un ha, soit une production de 15 setiers de Castelnaudary, 10 setiers de Toulouse (près de 9 ou 10 hl), en année normale. Une fois réservée la semence et payées les oblies, si nécessaire, et la dîme, il doit rester 6 ou 7 hl à peu près, ce qui ne permet pas de nourrir une famille206. Il est plus que probable qu’on ne cultive pas de céréales sur ces micro-propriétés, mais plutôt du pastel, du lin, des légumes de plein champ.

102Les autres catégories de terre sont plus ou moins répandues, d’une localité à l’autre. La part des vignes est très importante à Castelnaudary, atteignant 40 % des surfaces, au moins, puisqu’on en trouve dans les terres « mixtes », et, dans une moindre mesure, à Montgiscard. Seulement 4 à 10 % des terres sont consacrées aux prés et, curieusement, c’est dans la plaine qu’on trouve le plus fort pourcentage. Les bois représentent, dans ce type d’exploitation, plus de 8 % des terres à Montesquieu (un petit peu plus car il y a des bois dans les terres « mixtes »), moins de 2 % dans les autres villages (est-ce parce que les registres sont faits différemment ?). Les friches sont assez négligeables (sauf aux Bastards), de l’ordre de 2 ou 3 % des terres, un peu plus nombreuses à Montgiscard ; elles sont en réalité plus étendues que cela puisque la moitié des terres mixtes, à peu près, doit être inculte. Les « terres mixtes » représentent entre le cinquième et la moitié du finage de ces exploitations en parcelles dispersées.

103Si l’on compare, pour la fin du xve siècle, le finage des propriétés en parcelles dispersées au finage global des localités, on note de nombreuses différences, les priorités ne sont pas les mêmes. A Montesquieu, un plus grand pourcentage des terres de ces exploitations détenues par les résidants, est consacré aux vignes et aux parcelles « mixtes », un moindre pourcentage aux labours ; à Montgiscard, les vignes sont aussi plus importantes, et, dans une moindre mesure, les prés. À Aygues-vives, les terres « mixtes » sont plus importantes que dans le finage général. Ces terres « mixtes » constituent un terrain de pacage pour le bétail et une réserve de futures terres labourables ; on défriche très progressivement des terres peu onéreuses, achetées, peut-être, depuis peu. Dans le Terrefort, les propriétaires de parcelles dispersées pratiquent l’élevage. Même en se basant sur des superficies moyennes comprises, à Montesquieu et Montgiscard, entre deux et trois ha, si l’on additionne la jachère et les incultes contenus dans les terres « mixtes », un à deux ha seraient disponibles pour le bétail ; on pourrait y nourrir d’une vingtaine à une quarantaine d’ovins, deux ou trois bovins. A Ayguesvives, avec une propriété de six ha en moyenne, comprenant beaucoup d’incultes, ce seraient au moins 60 ou 80 ovins, six bovins. Ceci, sans compter les possibilités offertes par les bords de chemins, les communaux, la vaine pâture. A Castelnaudary, où l’on ne trouve pas de friches, avec seulement 10 ares de pré en moyenne par propriété et les parcelles en jachère, cela apparaît plus difficile. Certains déclarants doivent être plus spécialisés que d’autres dans l’élevage et posséder plusieurs prés. Dans cette ville, les petits propriétaires consacrent une bonne partie de leur finage à la vigne (trois fois plus que dans le finage général), beaucoup moins de place aux terres mixtes, mais nous avons vu que le pourcentage élevé de celles-ci tenait à la présence de quelques fermes considérées comme terres mixtes car on ne détaille pas la composition de leur finage. On peut noter, entre le début et la fin du siècle, une très forte augmentation de la part des vignes (augmentation que l’on décèle aussi, mais faible, à Montesquieu d’un registre à l’autre) et des prés, au détriment des terres labourables.

104On observe, bien sûr, des différences dans la composition du finage des exploitations des résidants et des forains. Les propriétés de ces derniers, à Montesquieu et, surtout, à Montgiscard, sont davantage consacrées aux prés et moins aux vignes que celles des résidants. Ces forains ont déjà des terres dans leur village d’origine, ils ont dû acheter ces parcelles de prés pour pouvoir développer les activités d’élevage ; ils ont, à Montesquieu, beaucoup de parcelles de « terre mixte », peut-être ont-ils, pour pouvoir augmenter leur production, acheté récemment des friches dans une localité où elles ne sont pas chères.

3. Les parcelles

105Le nombre moyen de parcelles détenues par ce type de propriétaires, est, bien sûr, beaucoup plus faible que celui obtenu en prenant en compte tous les déclarants : il est compris, pour les résidants, entre 3,37 et 9,51. C’est à Fendeille que le nombre de parcelles est le plus élevé, on peut supposer qu’elles sont beaucoup plus exiguës qu’ailleurs, éparpillées sur l’ensemble du finage, ce qui peut être lié aux fortes pentes, à la pauvreté des sols.

Nombre moyen de parcelles dans une propriété dispersée :

Nombre moyen de parcelles dans une propriété dispersée :
  • 207 Zerner (M.), Le cadastre..., op. cit., p. 255.

106Les variations sont très grandes d’un propriétaire à l’autre, ce dont on pouvait se douter à partir du tableau « type de parcelles détenues ». Certains déclarants possèdent sept ou huit parcelles correspondant à toutes les catégories du finage, trois ou quatre parcelles de terre labourable, deux ou trois vignes, une friche, par exemple. D’autres n’ont qu’une ou deux parcelles. Même si, étant donné leur superficie, les vignes ne représentent qu’une faible partie du finage de ces exploitations (sauf à Castelnaudary), on en trouve dans la quasi-totalité d’entre elles. Quand on ne détient qu’une seule parcelle, c’est, prioritairement, une vigne, à Montgiscard, Montesquieu et Castelnaudary. Monique Zerner avait déjà noté que moins les propriétés sont étendues, plus la surface des vignes s’accroît207. Quand on détient deux parcelles, en Lauragais, ce sont une vigne et une terre labourable ou une vigne et un jardin. Deux personnes sur trois à Fendeille, une personne sur deux à Montesquieu, une sur trois à Castelnaudary et Montgiscard, dans ce type d’appropriation, possèdent un jardin. Si l’on n’allivre que les jardins dont les produits sont, en tout ou partie, destinés à la vente, on voit que ces exploitations, même de petite taille, sont entrées dans un système monétarisé, on cultive des fruits et légumes pour le marché, peut-être du lin et du chanvre, on peut vendre aussi ses surplus de vin.

  • 208 Cf. infra « La présence seigneuriale ».

107Ce type de parcellaire éclaté qui traduit probablement la constitution d’un patrimoine au fil du temps (alleu ou tenure puisqu’en général, lors d’une inféodation, on paye un droit d’entrée qui correspond presque à la valeur vénale du bien208), permet aussi de multiplier les terroirs, de façon à pouvoir profiter des aptitudes différentes des sols, des diverses expositions des versants.

108La superficie moyenne d’une parcelle est variable, d’une part, selon la nature des cultures ou de la végétation naturelle, d’autre part, selon la probable charge démographique de la localité.

Superficie moyenne des divers types de parcelles, en propriété dispersée, fin xve esiècle

Superficie moyenne des divers types de parcelles, en propriété dispersée, fin xve esiècle

Superficie moyenne des divers types de parcelles, en propriété dispersée, début et mi- xve siècle

Superficie moyenne des divers types de parcelles, en propriété dispersée, début et mi- xve siècle

109Les superficies moyennes sont, en général, plus réduites que celles obtenues pour l’ensemble des parcelles. Celle d’une parcelle de terre labourable, pour les résidants, est inférieure à 80 ares (8 000 m2), sauf aux Bastards où elle atteint 1,2 hectare, ceci est lié, probablement, à une mise en valeur en cours de réalisation, on n’a pas encore subdivisé la parcelle à l’occasion des héritages. Dans ce village, où le corpus est très faible, les parcelles mixtes sont très vastes car elles correspondent chacune à un bloc de terres en cours de défrichement sur lequel on n’a pas encore construit de bâtiment allivrable. La superficie moyenne d’une parcelle de vigne fluctue presque du simple au double, de 30 ares, à Montesquieu, à 52, à Montgiscard. Celle de pré varie, elle aussi, presque du simple au double, de 37 ares à Montgiscard à près de 68 ares à Castelnaudary. Les parcelles détenues par les forains sont généralement plus grandes que celles des résidants, peut-être car l’achat de beaucoup d’entre elles s’est effectué récemment et qu’elles n’ont pas encore été affectées par les divisions successorales.

110On peut noter quelques variations des superficies moyennes des parcelles entre le début et la fin du xve siècle. À Castelnaudary, la superficie moyenne des parcelles labourables a augmenté d’un tiers, celle des vignes a doublé. Cela ne signifie pas forcément qu’il y ait eu regroupement de parcelles ou achats de terres limitrophes, courant xve, mais les manifestes sont beaucoup plus nombreux en 1496 qu’au début du siècle, y compris ceux des habitants des quartiers les plus riches. A Montesquieu, les superficies moyennes des parcelles de terre labourable et de pré ont diminué, par rapport au registre dit de « 1409 », celle des friches a fortement augmenté, ce qui s’explique par la présence de deux gros propriétaires, absents des estimes de « 1409 », qui en détiennent 60 ha.

C. Les domaines, propriétés à parcellaire regroupé

  • 209 Ce que pense B. Cursente pour la Gascogne, Des maisons..., op. cit.. p. 56.

111Quelques estimés déclarent un ou plusieurs domaines, comprenant des bâtiments d’habitation et d’exploitation, et tout autour, constituant un bloc, des terres cultivées et des terres incultes (terres labourables, prairies, vignes, bois et broussailles). Dans les registres notariés, certains de ces domaines sont vendus avec leurs « juribus » cela signifie peut-être qu’ils disposent de droits sur les terres vacantes, les bois, les eaux209. Les propriétaires détiennent parfois des parcelles dans des secteurs plus ou moins éloignés de leur domaine. Ils ont pu acheter, au fil du temps, des terres devenues disponibles, de façon à bénéficier de tous les terroirs possibles. L’habitat rural isolé, placé au milieu des terres constitue, bien sûr, la forme la plus rationnelle d’exploitation, permettant une meilleure surveillance des récoltes et évitant les pertes de temps en trajets d’une parcelle à l’autre, la fatigue des animaux. Le regroupement des terres limite les gaspillages d’espace en bout de champ, là où tourne l’attelage, en chemins pour accéder aux diverses parcelles.

112Les communautés étudiées ne possèdent que de petits territoires, il n’existe jamais de très grosses distances entre l’habitat intercalaire constitué par les fermes et l’habitat groupé. À Castelnaudary où le finage est le plus étendu, les fermes sont à une heure de marche, au maximum, de la ville, le relief est faible, les seules difficultés sont dues à la boue lors des pluies de printemps ou d’automne ; les apports de récoltes en ville sont faciles, que ce soit pour la vente au marché ou pour la livraison des loyers aux bailleurs.

1. Le vocabulaire

  • 210 A.D.A., 4 E 076/CC 10 f° 29 v°.
  • 211 Higounet (Ch.), Observations sur la seigneurie rurale et l’habitat en Rouergue du ixe au xive sièc (...)

113Dans les registres d’estimes, les vocables campmas et boria (sous diverses graphies : capmas, cammas, campmas, borio, boria, boaria) désignent l’exploitation centrée sur un habitat dispersé. Les estimateurs, à Castelnaudary, Fendeille et Montesquieu emploient plutôt le terme de campmas, à Montgiscard et Ayguesvives, plutôt celui de borie. Ces mots de campmas et boaria sont toutefois interchangeables, s’appliquant indifféremment, à l’intérieur d’un acte, à un même bien. Le terme de campmas peut aussi désigner seulement le(s) bâtiment(s) d’habitation et d’exploitation avec la parcelle de terre sur laquelle il(s) se trouve(nt). Une seule occurrence de ce genre apparaît en Lauragais oriental : un contribuable de Castelnaudary déclare la moitié d’un « capmas deruyt en una herma pese de tera », estimé seulement sept sous 210. Cette signification est beaucoup plus fréquente dans les villages de l’ouest du Terrefort, un campmas avec « sol, ort, capelas » est allivré et on énumère ensuite toutes les terres qui le jouxtent, allivrées indépendamment. Le terme de boaria, bouvée, définit le domaine selon une superficie, celle que deux boeufs peuvent labourer dans l’année, celui de campmas correspond plus à une réalité juridique. Ce mot est employé dès le ixe siècle en Rouergue, il y devient plus fréquent au xie siècle et correspond, comme le manse, à un terroir-tenure. Ch. Higounet pense qu’il indique peut-être, au moment où le manse se fractionne, la partie où se trouvait la maison primitive211.

  • 212 Ce qui apparaît pour le Moyen Âge central, A. Durand, Les paysages médiévaux..., op. cit., p. 259 (...)
  • 213 A.D.A., 4 E 076/CC 10 f° 117 r°.
  • 214 Billy (P.-H.), La « condamine » institution agro-seigneuriale. Étude onomastique, Max Niemeyer Ver (...)

114Le terme de condamina (condamine), au départ grande parcelle labourable de la réserve, située sur les meilleures terres 212, est employé à quatre reprises dans le registre d’estimes de Castelnaudary de 1496 avec le sens de domaine, Jean Siguier possède une condamine de terre de 33 sétérées à Saint-Sernin, dite campmas quelques lignes plus bas213, dont la valeur vénale est de 200 livres tournois, comparable à celle des campmas de même superficie ; les trois autres condamines sont celles de P. Joffroy, de P. Auriol, de J. Villeroux, celle-ci appelée aussi « le campmas de Gaubert ». P. H. Billy a montré que la condamine constitue, du viie siècle au début du xe siècle, « les grands labours indominicaux des domaines seigneuriaux » et que, dès le xe siècle, certaines d’entre elles sont amansées, d’un seul bloc, le plus souvent. Les condamines-domaines se rencontrent en Auvergne, en Rouergue et aussi dans la plaine de l’Hérault214. On peut supposer que les domaines du Lauragais qualifiés de condamines ont cette origine.

  • 215 En occitan, le terme de condamina signifie indifférement terre franche de redevance seigneuriale, (...)
  • 216 A.D.A., 3 E 15439, f° 94 v°.
  • 217 A.D.H.G., 3 E 10154 f° 45 v°.
  • 218 Le terme disparaît de la documentation à la fin du siècle, Puig (G), Les campagnes roussillonnaise (...)

115On trouve encore quelques mentions de condamines-campmas dans les estimes de 1516 et 1535 mais, dès 1535, le terme commence à changer de sens, certaines condamines ont l’air de simples pièces de terre, de trois ou quatre sétérées (105 à 140 ares). Dans le livre d’estimes de 1553, ce mot ne correspond plus qu’à une grande pièce de terre, les campmas appelés condamines dans les autres registres ne sont plus qualifiés ainsi215. On a alors, peut-être, un morcellement des réserves seigneuriales qui ne seraient plus concédées en lots mais en parcelles plus modestes. Des condamines simples pièces de terre sont mises en vente, ainsi les frères Borelli, de Souilhanels, achètent, dans la dernière décennie du xve siècle, une condamine de 20 sétérées (7 ha, à peu près) dans la juridiction de Castelnaudary, près du four de Souilhanels, à noble Jean Auriolli, seigneur de Montaigu, habitant de Castelnaudary, pour 16 écus. Cette condamine paie toutefois le « service accoutumé » au seigneur de Léran (qui l’est aussi de Souilhe et Souilhanels). Cette terre est allivrée dans les estimes de 1516216. Le phénomène de découpage de tenures sur les condamines de la réserve est beaucoup plus ancien puisque, dans un acte de la fin du xive siècle, une femme, avec approbation de son fils, vend une vigne, un verger et une terre situés dans la condamine royale217. Le morcellement des condamines apparaît aussi en Roussillon, dans la seconde moitié du xive siècle218.

116La présence de bordes qui peuvent être de petits bâtiments à usage agricole, granges, remises, abris pour les animaux, et même des lieux d’habitat a été signalée précédemment. Elles sont édifiées en majorité dans les barris, hors des murailles, aux environs des portes, souvent près de sources utilisables pour les jardins ; elles sont d’ailleurs parfois bâties dans un jardin, un verger. La superficie de la parcelle sur laquelle elles sont situées n’est pas fournie dans les estimes, elle l’est, parfois, dans les registres notariés : dans les villages proches de Castelnaudary, elle fait en moyenne trois sétérées et demie soit 1,2 ha, ce qui fait penser à une petite exploitation de maraîchage.

  • 219 Ceci déjà signalé dans Marandet (M.-C.), L’habitat intercalaire..., op. cit.,.
  • 220 A.D.A., 3 E 9474 f° 124 r°.
  • 221 14 occurrences alors que campmas ou bories sont mentionnés 16 fois.
  • 222 A.D.A., 3 E 4/28 f° 153 r°.
  • 223 Le dictionnaire occitan-français de Louis Alibert donne au mot borda les sens de chaumière, remise (...)
  • 224 A.D.A., 4 E 076 /СС 15 f° 98 v°, f° 99 r°, f° 99 v°, f° 100 r°.
  • 225 A.D.A., 3 E 4/28 f° 171 v°.
  • 226 Sicard (G.), Le métayage dans le Midi toulousain à la fin du Moyen Âge, op. cit., p. 22. Voir auss (...)
  • 227 Tout ceci est développé, Marandet (M.-C), Contrats..., op. cit., p. 88.

117Au xvie siècle, dans l’est du Lauragais, la signification du mot commence à changer219 ; les bordes petits édifices à usage agricole existent toujours mais le terme peut désigner autre chose ; ainsi, un acte notarié parle d’une borde de 30 sétérées de terre située à Tréville220 ; dans le registre d’estimes d’Issel réalisé en 1556, il est question à plusieurs reprises221 d’une borde dite « la boria une telle », de bordes de plus de cinquante sétérées (soit une douzaine d’ha, avec terres, prés, bartes, brogues ; « una borda am sertana quantitat de terras laboradissas ho bosc prat... »222. Le mot borde est, dans ce cas, synonyme de borie, de campmas223. Dans les estimes de Castelnaudary de 1553 apparaissent les premières mentions, pour cette ville, de bordes situées en campagne et entourées de plusieurs dizaines de sétérées de terre. Le vocabulaire fluctue d’un folio à l’autre, on parle, par exemple, de la borde, de la borie et du campmas den Suzas alors qu’il s’agit d’un même bien que se partagent plusieurs héritiers224. L’utilisation du mot borde dans le sens de campmas apparaît plus précocement à l’ouest du Lauragais ; dès le xve siècle, on trouve dans les estimes, sous l’appellation de borde, ce qu’on pourrait appeler campmas puisqu’il s’agit d’un bâtiment entouré d’un bloc de terres d’une dizaine d’ha, par exemple : une borde avec 23 arpents de terre à Ayguesvives (à peu près 13 ha), une paretz de borde avec 30 arpents de terre, toujours à Ayguesvives (à peu près 17 ha). L’évolution sémantique se ferait d’ouest en est. Ces « bordes-fermes » ont été comptabilisées comme domaines. Dans les registres du xvie siècle, la borde peut aussi correspondre, en Lauragais oriental, aux seuls bâtiments de la ferme ou à l’un de ceux-ci, les terres étant estimées séparément, nous trouvons ainsi, à Issel : « boria de Pech Caulet estimada la borda et ort X livres las terras laboradissas 3 livres 7 sous »225. À Castelnaudary, quelques déclarants individus possèdent une maison ou bien une borde dans une borie, s’agit-il dans ce dernier cas d’un petit bâtiment d’habitation ou d’une grange ? Commence-t-on à employer le mot borde pour qualifier l’exploitation donnée en métayage comme cela serait la règle, pour certains auteurs, au xviiie siècle ? Cela semble douteux, les métayers rencontrés dans les actes du xve siècle et du début du xvie siècles ne sont jamais appelés bordiers ; ils le sont dans la partie ouest du Lauragais d’après Germain Sicard226, ce que je n’ai pas vu dans les registres notariés que j’ai dépouillés227.

  • 228 A.D.H.G., 3 E 10159 f° 200 v°, 1391, location pour trois ans d’une borda sive boaria avec tous les (...)

118Les deux termes campmasius et boaria dominent aussi dans les actes notariés pour qualifier l’unité d’exploitation, bâtiments et terres. Dans les registres provenant des Archives départementales de la Haute-Garonne, 48 fermes sont appelées campmasium, 40 boria, cinq sont qualifiées de boria sive campmasium. On retrouve à 11 reprises le terme campmas et à neuf reprises, celui de boria, associés à un autre terme (hospicium sive campmas, hospicium sive boria, borda sive campmas, borda sive boria228). Dans les registres provenant des Archives départementales de l’Aude, les fermes sont qualifiées de campmas à 51 reprises, de bories à 22 reprises. Le terme de borde est aussi utilisé, à 11 reprises (deux fois à l’est du Lauragais, neuf fois à l’ouest), pour qualifier des exploitations groupées autour d’un habitat situé en rase campagne. Le terme de borie est plus usité sur le Terrefort de l’ouest du Lauragais que dans la plaine, tout en restant légèrement minoritaire. Les mots campmas et boaria sont, en tout cas, interchangeables, s’appliquant indifféremment, à l’intérieur d’un acte, à un même bien, ainsi que déjà signalé. Dans les registres de notaires de Castelnaudary, on retrouve sous l’appellation borie les fermes que leurs propriétaires dénomment campmas dans leur déclaration lors des estimations.

  • 229 A.D.H.G., 3 E 10159 f° 207 v°, 1391, gasaillc, à Clermont, d’un demi hospicium sive cammasio « del (...)
  • 230 A.D.H.G., 3 E 10164 f° 104 v°, 1425.

119D’autres termes, mais leurs occurrences sont minoritaires, apparaissent, surtout dans les registres notariaux de la Haute-Garonne. L’exploitation à parcellaire regroupé peut être appelée hospicium ou domus (on précise parfois « sive campmasium »)229, on vend cet hospicium cum terris cultis et incultis, avec la même formulation que pour les biens appelés campmas ; on vend aussi edificiis cum terris, hospicia cum terris (19 occurrences de ce type). Les termes d’hospicium, domus, comme parfois campmas, dans cette zone, qualifient la partie bâtie et non la totalité de l’exploitation. Pas pour tout le monde toutefois, puisqu’un laboureur achète une borie dans les dépendances de Montgiscard avec prés, vignes, bois, pâtures, droits, « tectis, tegulis » et autres dépendances230.

  • 231 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 11 r°.

120À six reprises dans les localités de l’ouest du Lauragais et une seule fois dans celles de l’est, on vend ou on loue un « territorium », le plus souvent, ou bien « toutes ses terres » à tel endroit, souvent quelques dizaines de sétérées, sans préciser s’il y existe des bâtiments. Les territorium sont souvent loués à court terme, l’un d’entre eux, par exemple, situé « als vidais », à Ayguesvives, est donné en fermage pour six ans231. Un « territorium » appartient à la famille noble des Gavarret, peut-être donne-t-on cette appellation à des éléments de la réserve qui sont récemment sortis de la régie directe.

  • 232 Cf. infra.
  • 233 Jean Tricard considère que le « mansus sive locus » de la fin du xve siècle où vivent la majorité (...)
  • 234 Où ce mot apparaît pour remplacer celui de villa, au sens de village, Charbonnier (P.), Une autre (...)

121Un locus, celui de Cumiès, est inféodé, avec toutes ses terres, à deux personnes. Ce n’est pas exactement un domaine au sens habituel, puisque l’acte envisage un repeuplement232. C’est un tout petit village où se trouve une tour qui reste dans les mains du concédant. Ce terme de locus avec le sens de hameau, de village, se retrouve dans certains secteurs du Massif Central, en Limousin233, en Auvergne234.

  • 235 Pour R. Brunet, Les campagnes toulousaines..., op. cit., le casai est aussi une unité de mesure, g (...)
  • 236 A.D.H.G., 1 G 801 f° 24 r°. À Lodève, au xve siècle, E. Demaille trouve, dans les estimes, des cas (...)
  • 237 A.D.H.G., 3 E 10166 f°P 40 v°.
  • 238 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 31 v°, 1405.
  • 239 A.D.H.G., 3 E 10162 f° 14 v°.
  • 240 A.D.H.G., 3 E 10159 f° 137 v°, 20 mars 1390.
  • 241 Cursente (B.), Des maisons et des hommes. La Gascogne médiévale..., op. cit., p. 55 et note 17. Cf (...)
  • 242 Guimbail (R.), Expansion..., op. cit., p. 67-68.
  • 243 Partak (J.), La seigneurie hospitalière..., op. cit., pp. 111-112.

122Cinq « casai » qui ne correspondent pas à des jardins (sens habituel du mot235) apparaissent dans les actes notariés. Si, dans une occurrence, ce terme semble synonyme d’enclos-maisonné : « unum casale sive logar in quo solebat esse domus »236, à quatte reprises, on ne sait pas exactement à quoi correspond ce casal. Un acte mentionne l’achat d’une maison, « ortus et cazale » hors des fortifications d’un village237. Pierre Ymberti de Stossia vend un demi-cazal de trois sétérées de terre (1,5 ha à peu près), près du campmas de Stossia, à Ayguesvives, pour 9 £ tr238. L’acheteur d’un campmas doit encore 80 £ 16 s 5 d tr petits sur les 130 écus que coûte le bien. Pour apurer sa dette, il vend à réméré, pour trois ans, une paire de bœufs, tout un casal qui se trouve dans les dépendances du campmas et un pré. Étant donné le montant de la dette, ce casal ne doit pas être un simple jardin239. Jeanne, veuve du chevalier Jordan de Falgario, vend « terram seu casalieram al mercadal », dans les dépendances de Venerque, pour 12 sous tolsans, à un acheteur qui est confront du bien, les oblies sont de 6 deniers tolsans240. Le prix est très faible, la casalière est-elle différente du casal ? En Gascogne, casalaria, dont l’emploi devient fréquent à partir du milieu du xiiie siècle, casalère, correspond à l’ensemble enclos-maison, ceci jusqu’à l’époque moderne241. Ce casal lauragais, situé en campagne, accompagné de terres, semble une survivance du casal au sens de manse, d’unité d’exploitation. Pourtant, ce sens a, déjà, pratiquement disparu au milieu du xiiie siècle ; à Pexiora, par exemple, si, dans certains textes, le casal semble être, encore, la maison paysanne avec ses dépendances et ses terres, le plus souvent, il ne désigne plus une unité d’exploitation, mais un des éléments de l’exploitation. L’unité de base, le casal, s’est émietté en une multitude de parcelles242. La même chose est notée pour Caignac. Si, dans la charte de fondation du xiie siècle, l’unité de base semble être le casal sur laquelle pèse une redevance unique, au xiiie le mot se raréfie et correspond le plus souvent à une parcelle de terre qui a conservé le nom de l’exploitation primitive ; la aussi, le casal s’est désagrégé, il ne constitue plus un tout sur lequel pèse un ensemble de redevances243.

  • 244 A.D.H.G., 1 G 799, admansium de furneriis, f° 34 v°, 35 r°, etc.
  • 245 Très rarement d’une exploitation, Hélas (J.-C), Le manse en Gévaudan, Cadres de vie et société dan (...)
  • 246 Un manse peut toutefois, là, être réduit à une seule exploitation et se rapproche alors des domain (...)
  • 247 Stouff (L.), Le mas arlésien, Cadres de vie et société dans le Midi de la France, Hommage à Charle (...)

123Le terme de mansus n’apparaît qu’une fois, dans le registre de reconnaissances de 1292 de l’évêque de Toulouse, où il qualifie ce qui est appelé dans tous les autres documents le campmas des Fourniers, situé à Montgiscard244. Le mot mansus est encore en usage au xve siècle dans d’autres régions, mais rarement avec le sens d’exploitation : en Gévaudan, il s’agit le plus souvent d’un territoire245. En Auvergne, si le mot désigne, au xiiie siècle, une exploitation familiale en tenure, au xive siècle, il désigne le plus souvent les hameaux et les villages246. L. Stouff trouve toutefois ce terme en Provence pour désigner, comme dans cet exemple lauragais, l’unité d’exploitation247.

2. Le bilan : combien de domaines taillables248 ?

  • 248 Pour tous les calculs de superficies moyennes, de nombre moyen de parcelles, ce qu’un propriétaire (...)

Bilan par localité, d’après les estimes, à la fin du xve siècle (propriétés des résidants et des forains) :

Bilan par localité, d’après les estimes, à la fin du xve siècle (propriétés des résidants et des forains) :

124Tout regroupement de terres autour d’un habitat intercalaire a été considéré comme domaine. Quelques blocs de terre, signalés comme tels, mais où ne figurent pas de bâtiments allivrés, constituent des embryons de domaines (des terres sont labourables, d’autres, majoritaires, en friche) ; on les trouve, pour l’essentiel, aux Bastards, certains appartiennent à des propriétaires de domaines. Ces lots de terres ne sont pas inclus dans le tableau. Les chiffres obtenus sont des chiffres a minima et ne concernent que les domaines taillables. Étant donné les lacunes du registre CC 10 de Castelnaudary, une vingtaine de fermes, au moins, nous échappent pour cette ville. Quelques domaines ont été partagés entre héritiers, leurs propriétaires déclarent la moitié ou le tiers d’un campmas ; à Castelnaudary, quatre fermes sont ainsi partagées, à Montesquieu, cinq, aux Bastards, une.

  • 249 A.D.H.G., 5 E 73 f° 58 r°.
  • 250 A.D.H.G., 5 E 73 f° 69 v°.
  • 251 A.D.H.G., 5 E 73 f° 100 v°.
  • 252 A.D.H.G., 5 E 73 f° 92 r°.
  • 253 A.D.H.G., 5 E 73 f° 103 v°.
  • 254 A.D.A., 4 E 076/CC10 f° 29 v° et f° 206 r°.

125À Castelnaudary et Fendeille, tous les domaines, sauf quatre, qualifiés de condamines, sont déclarés comme campmas. À Montesquieu, neuf domaines sont appelés borda, quatre boria, tous les autres sont appelés campmas. À Montgiscard, un estimé déclare un bâtiment en ruines, « paretz », accompagné de quatre arpents de terres labourables et friches et de 35 arpents de bosigas en un seul tenant, soit plus de 23 ha249, ce que je considère comme un domaine, les autres déclarants parlent de boria (dont une « paretz de boria » avec 12 arpents et demi de terres, vigne et friches250). Aux Bastards, on parle indifféremment de boria, borda ou campmas. À Ayguesvives, onze domaines sont qualifiés de borda. Une d’entre elles est en ruine (paretz de borde avec 30 arpents de « bosc brugas et bartas »)251. Quelques bordes sont bâties dans des zones broussailleuses en voie de défrichement, une se trouve sur une parcelle de quatre arpents de terra deserta dont un arpent est essarté et est entourée de 13 arpents de broussailles252. Un de ces bâtiments est appelé cabana, il est accompagné d’un jardin et contigu à un arpent de vigne, sept arpents de terre et huit arpents de broussailles253. Ces bordes doivent correspondre à un habitat léger, utilisé temporairement lors des travaux de défrichement. Les terres qui constituent ces exploitations ont à peu près la même étendue que celles des bories, une dizaine d’hectares. Un déclarant possède « unas paretz vielhas de colomie et teularia » avec deux arpents de terre et 18 arpents de bois et broussailles, cette exploitation artisanale n’a pas été comptabilisée parmi les fermes, mais il est probable que les 10 ha de friches nourrissent un troupeau, en plus de fournir du combustible pour le four. Les autres domaines d’Ayguesvives sont appelés boria. Quelques bâtiments ne sont pas en très bon état, on peut rajouter à ceux cités plus haut, des « tapias de campmas » et un « campmas deruyt » à Castelnaudary254, et deux mentions de logar (emplacement) de campmas à Montesquieu.

126Si l’on compare ces résultats à ce qui apparaît dans les registres plus anciens, on ne peut en tirer grand chose quant à la création de domaines. A Fendeille, en 1428, les résidents détenaient trois fermes (campmas) et trois blocs de terres, on peut supposer que ces lots de terres ont été bâtis mais quand on compare leur localisation et le nom de leur propriétaire avec ceux des fermes de 1495, rien ne coïncide. À Castelnaudary, le registre CC 8 ne recense que les biens des clercs, soit six fermes et un quart de ferme. Le registre CC 9, très incomplet, ne mentionne que 33 domaines aux mains de laïcs ou de clercs (quatre qualifiés de borda, les autres de campmas). Trois d’entre eux sont en ruine (une mention de « paredasses » et deux de « tapias »). À Montesquieu-Lauragais, le registre dit de 1409, incomplet, ne fournit que 50 domaines (essentiellement qualifiés de campmas).

  • 255 Marandet (M.-C), L’habitat isolé dans le diocèse de Saint-Papoul..., op. cit., pp. 142-143.

127Comme je l’ai déjà signalé dans un article antérieur, les registres d’estimes sont beaucoup plus intéressants que les registres notariés pour repérer les fermes. Sur le territoire du consulat de Castelnaudary, ces derniers ne mentionnaient (après élimination des doublons supposés) que 57 campmas ou bories, pour l’ensemble du xve siècle, alors qu’on en aperçoit 110, au moins, à partir des estimes, en combinant les registres CC 10 de 1496 et CC 11 de 1516, auxquels il faut ajouter les domaines nobles. J’avais noté la même chose pour quelques villages du diocèse de Saint-Papoul255. Le même phénomène se produit pour l’ouest du Lauragais, on repère moins de fermes dans les registres notariaux témoins que dans les estimes : cinq sur le territoire d’Ayguesvives, une fois enlevés les doublons (fermes rencontrées à plusieurs reprises), une sur celui de Montesquieu, une aux Bastards. Il est normal que peu de fermes apparaissent dans les registres notariés, celles aux mains d’un propriétaire exploitant n’ont aucune raison d’y figurer, l’idéal pour leur propriétaire étant de transmettre son bien à ses enfants ; celles que l’on aperçoit sont surtout des fermes propriétés d’un non-exploitant, elles sont données à bail à court terme ou, plus rarement, inféodées. A Montgiscard, les registres notariés fournissent les noms de 17 domaines, plus qu’il n’en figure dans les estimes, ceci s’explique par le fait qu’ils appartiennent aux plus riches, ceux qui habitent dans la rue Mage et dont les manifestes n’ont pas été conservés.

3. Superficies moyennes et finages

a. Superficies moyennes

128Quelques estimés n’indiquent pas la superficie totale de leurs propriétés ; en ne prenant en compte que les déclarations complètes, la superficie moyenne détenue est de 21,17 hectares par propriétaire, à la fin du xve siècle. Il s’agit de la superficie de la totalité des terres appropriées, elle est supérieure à celle d’un domaine, certains propriétaires en déclarant plusieurs et beaucoup possédant des terres éloignées du bloc constitué autour des bâtiments.

  • 256 Au début du siècle à Castelnaudary, pour les laïcs, la superficie moyenne des exploitations à parc (...)
  • 257 À Montesquieu, dans le registre dit de 1409, 11,12 ha, à Castelnaudary, dans le registre CC 9, 12, (...)

129La superficie moyenne varie fortement d’une localité à l’autre ; pour les propriétaires résidants, elle est de 12,4 ha à Ayguesvives, 15,5 ha à Montesquieu, 23,63 ha à Castelnaudary, 27,08 ha à Montgiscard et 45,47 ha aux Bastards256. La très forte superficie aux Bastards s’explique par le fait que la zone est en cours de mise en valeur, la terre est disponible. Celle de Montgiscard est due à la présence d’une exploitation de 125 ha qui tire un peu la moyenne vers le haut, le corpus étant assez réduit. Le chiffre médian des superficies détenues est de 11 ha à Ayguesvives, de 26,71 ha à Montgiscard, de 13,40 ha à Montesquieu, en 1485, de 18,56 ha à Castelnaudary257.

Répartition par tranches de superficie des propriétés centrées sur une ferme, à la fin du xve siècle :

Répartition par tranches de superficie des propriétés centrées sur une ferme, à la fin du xve siècle :

130Comme signalé plus haut pour l’ensemble des propriétés, la fourchette d’appropriation est très grande, mais les chiffres les plus extrêmes ne concernent que peu de cas. On trouve, rarement (moins de 10 occurrences), de toutes petites superficies, de l’ordre de trois ou quatre ha (souvent pour un demi-campmas). Parfois la superficie appropriée est encore plus faible mais c’est parce qu’on n’indique pas la superficie de l’entité « ferme » (8,8 % des propriétaires de fermes de Montesquieu et 5,5 % de ceux de Castelnaudary sont dans ce cas et fournissent, au maximum, la superficie de quelques parcelles annexes). Hormis ces quelques cas, les plus faibles appropriations sont de 7 ou 8 ha, sauf à Montgiscard où le plus petit propriétaire détient une quinzaine d’ha. Les chiffres les plus élevés sont de 78 ha à Montesquieu, de 90 ha à Castelnaudary, de 93,5 ha à Ayguesvives et de 125 ha à Montgiscard. La grande et parfois très grande propriété (20,98 % dépassent même les 30 ha) est très souvent aux mains de non paysans, ce qui explique le recours au faire-valoir indirect et au salariat. Les forains propriétaires de domaines sont, parfois, de très grands propriétaires : 60 ha pour Sicard Auzelaire, aux Bastards, 96 ha pour Ramon de Pechbusque à Ayguesvives. Les autres possèdent, en moyenne, un peu plus de 20 ha : 21,9 à Montgiscard, 22,5 ha à Montesquieu. Ils sont aussi possessionnés dans leur localité de résidence et, peut-être, dans d’autres localités.

  • 258 À Pexiora, dans la plaine, C. Mimiague indique la taille de quatre campmas du xve siècle et de tro (...)

131En Lauragais, jusqu’au début du xxe siècle, les fermes s’évaluaient en paires de labourage, chaque paire correspondant à 10 -12 ha, la superficie que pouvait travailler une famille avec une paire de bœufs ; les fermes les plus importantes faisaient deux ou trois paires de labourage. Au xve siècle, la moyenne des propriétés est d’une paire de labourage à Ayguesvives et à Montesquieu258, de deux paires à Castelnaudary, d’un peu plus de trois paires aux Bastards et à Montgiscard mais, dans ces villages, la friche est extrêmement importante et doit être destinée à l’élevage, l’exploitation ne réclame pas forcément trois trains de labour. Les plus grandes fermes, quand elles appartiennent à des exploitants, bénéficient sûrement de la force de travail de frérèches ; quand elles sont louées à court terme, les preneurs sont souvent deux hommes adultes (un père et son fils, deux frères ou deux associés).

  • 259 22,6 % des affars dont la superficie est indiquée font entre 20 et 30 ha et 19,86 % font plus de 1 (...)
  • 260 Germain (R.), Les campagnes ..., op. cit., p. 316 et suiv. Souvent, n’apparaît que la superficie d (...)
  • 261 Coulet (N.) Aix-en-Provence..., op. cit., p. 197.
  • 262 Tricard (J.), Les campagnes limousines..., op. cit., pp. 192-194.

132Les domaines du Lauragais semblent de taille modeste par rapport aux affars de la région d’Arles, qui peuvent atteindre 50 à 100 ha, voire plus, mais une partie d’entre eux doit se trouver dans la Crau, un terroir très pauvre, axé probablement sur l’élevage ; Louis Stouff ne fournit pas de superficies moyennes259. Ils sont comparables à ce qui apparaît en Bourbonnais, là, les propriétés à parcellaire regroupé vont de 10 ou 15 sétérées à plus de 100 (soit de 5 ha à 50 ha)260, encore plus proches des affars de la campagne aixoise, compris, pour la majorité, entre 100 et 300 éminées (soit 11 à 30 ha)261. La tenure-bloc du Limousin, « mansus sive locus », qui correspond à un hameau et à ses campagnes environnantes, souvent tenu par une communauté familiale, fait, elle aussi, entre 9 et 40 ha262.

133L’évolution des superficies des domaines peut être approchée, pour Montesquieu et Castelnaudary, avec toujours les mêmes réserves, les registres les plus anciens présentant des lacunes :

134On note, courant xve siècle, à Montesquieu, une tendance à la réduction des superficies des grandes exploitations de plus de 20 ha, elles ne représentent plus que 20 % du corpus en 1485 contre un peu plus de 40 % vers 1450-60 ; ceci s’effectue au profit des exploitations moyennes, comprises entre 8 et 20 ha qui, de 25 % du corpus, passent à 42 %. Les petites exploitations représentent toujours un tiers du corpus. À Castelnaudary, par contre, les grandes exploitations sont plus nombreuses, fin xve, qu’au début du siècle, elles passent de 19,23 % à 48,62 %. La part des exploitations de moins de 8 ha passe de 34,61 % à 13,89 %. S’agit-il d’un phénomène de concentration des terres ou d’un simple effet induit par l’état du registre du début du xve siècle, les quartiers les plus riches n’y figurant pas ?

  • 263 A.D.A., 4 E 076 CC 10 f° 26 v°.
  • 264 A.D.A., 4 E 076 CC 10 f° 104 r°.
  • 265 Cf. Marandet (M.-C.), Les campmas..., op. cit.
  • 266 Maguer (R.) De la cocagne au blé..., op. cit., pp. 68-69.

135On peut calculer, pour Castelnaudary, la superficie du bloc de terres enserrant les bâtiments. Dans les registres d’estimes du xve siècle et dans celui de 1516, la taille de l’exploitation est généralement mentionnée. La superficie totale des terres apparaît : « ung campmas de LVI sesteradas de tera quompres pratz, vignas, payssieus »263, ou celle de ses différents éléments, terres labourables, malhols, prés, payssieux, bois et broussailles, toutes ces pièces de terre confrontant les unes aux autres : « Johan Lobat ten et possedis ung campmas al bosc Ramonenx conten en sas terras laboradissos quaranto quatre sesteradas una carterada una punherada et miega daquillo deldit campmas una sesterada de malhol et quart de punherada item aqui metys cinq sesteradas et cart de punherada de prat item aqui metys de totas pars deldit campmas cinq sesteradas tres carteradas et una punherada de payssu item ung bosc a la ribiera de Fresqueilh conten quatre sesteradas tres carteradas dos punheradas »264. Parfois, des parcelles limitrophes sont déclarées les unes après les autres, peut-être car elles relèvent de seigneurs différents265. Les divers éléments de l’exploitation sont alors, sur le registre, reliés par une accolade et une seule valeur cadastrale est indiquée, signe que toutes ces terres sont jugées appartenir à un même ensemble. Ce système de notation permet de connaître exactement la superficie de chaque bloc de terres. Les plans du compoix de 1700 mentionnant les toponymes médiévaux, il est facile de voir si les parcelles sont confronts les unes des autres. Le lot de terre compact entourant les bâtiments a une superficie moyenne, dans le registre de 1496, de 19,57 ha, soit quatre ha de moins que la moyenne de propriété, les parcelles « erratiques » constituent, en gros, 17 % de la propriété. On avait déjà cette différence de quatre hectares dans le registre CC9 du début du siècle, la superficie moyenne d’un domaine était de 25,15 sétérées soit 8,85 ha contre 12,49 ha pour l’ensemble des terres appropriées. En 1516, la superficie moyenne d’une ferme est de 32 sétérées, soit 11,26 ha, mais il semble que, seules, les terres labourables soient indiquées, ce qui expliquerait la superficie moyenne de 11,13 ha des « circuits », lots de terre autour des bâtiments, notée par R. Maguer dans le compoix de 1553266.

  • 267 A.D.H.G., 5 E 73 f° 80 v°.
  • 268 A.D.H.G., 5 E 73 f° 79 r°, 5 E 73 f° 79 v°, 5 E 73 f° 87 v°, 5 E 73 f° 98 r°.

136Ce genre de calcul n’a pas été effectué pour les localités du Terrefort, à Montgiscard, le corpus est trop réduit pour être utilisé, à Montesquieu, la façon dont sont réalisées les estimes ne permet pas, toujours, de voir quelles sont les parcelles confronts les unes des autres. A Montgiscard, comme à Castelnaudary, l’estimateur allivre parfois globalement les diverses parcelles constituant la ferme : l’obit de Notre-Dame, par exemple, possède une borie « a mossen Peyret », ort et sol « que tot se te » et, à l’autan de la borie, une pièce de terre et un plantier, au cers et au nord de la borie, cinq arpents de terre, au midi de la borie, six arpents de terre ; il détient aussi quatre parcelles situées dans un autre lieu-dit mais qui doivent être confronts car tous ces biens sont estimés globalement 80 £267. Le plus souvent, les diverses parcelles constituant la ferme et confronts les unes des autres sont énumérées, chacune pourvue de son estimation, ainsi, les frères Vaquié possèdent une borie « a las faudas de montalbiou » avec ort, sol, huit arpents de terre « que tot se te » estimée 70 £, ils ont aussi cinq arpents de terre labourable tenant à la borie « a la plana de ves Storguet » (vers les possessions d’Estorguet Azéma, le seigneur) estimés 20 £, quatre arpents de terre « herma desus la boria » estimés 4 £ et diverses parcelles dites « près de la borie » ; si l’on regroupe toutes ces parcelles, la borie atteint 24 arpents et cinq pugnères. Les Vaquié possèdent aussi 10 arpents et demi et six pugnères qui ne sont pas confronts de la ferme. Les deux fermes de Guilhem Calvet sont, pour l’une, estimée en bloc : une borie et huit arpents de terre « que tot se te » ; pour l’autre, on détaille les parcelles : borie sol et ort et 12 arpents de terre, puis quatre arpents de vigne situés au même endroit, puis un arpent de bois, puis quatre arpents de terre confronts au nord, puis huit arpents de terre, chaque parcelle est estimée. On retrouve cette façon de procéder pour Ayguesvives, puisque les estimes sont réalisées par les mêmes estimateurs qu’à Montgiscard. Jean de Malagoda, par exemple, déclare un campmas avec six pugnères de terre, « ort et sol tot tenent », quatre parcelles au cers du campmas, pour un total de 5,75 arpents (près de 4 ha), chaque parcelle étant estimée ; il déclare aussi des parcelles qui ne sont peut-être pas confronts du campmas, pour 19,25 arpents (soit 11 ha). Arnaut de Noalhas possède une borie, ort, sol et deux arpents et demi de terre, vigne et pré, le tout estimé 55 £, il déclare ensuite, au même endroit, vigne, terres labourables, friches pour 16 arpents et demi, chaque parcelle est estimée ; suivent des terres dont on ne sait si elles sont confronts, pour un total de 10,75 arpents268.

  • 269 A.D.H.G., 5 E 67 f° 66 v°.
  • 270 Cf. « Origines des domaines ».

137À Montesquieu, dans les deux registres d’estimes, les déclarants indiquent, soit une ferme à tel endroit, « sol ort et capelas tot tenent », puis diverses parcelles estimées séparément mais confrontant la ferme, soit une ferme avec seulement la superficie du lot portant les bâtiments et ils ne disent pas si les autres parcelles détenues sont confronts, même si elles sont situées au même lieu-dit que la ferme. Anthony Mercie, en 1485, déclare « un campmas a belasera avec moulin pastelier borde sol ort et capelas tot tenen », estimé 70 £, puis, au cers, 11 sétérées de terre, estimées 30 £, au nord et à l’autan, 11 sétérées de terre labourable, estimées 36 £ et 40 sétérées de terres labourables estimées 60 £, pour les deux derniers items, on précise qu’il fait pour « toutes ces terres du campmas cinq setiers trois pugnères et un livralat de blé et six poules d’oblies ». Il possède aussi six pugnères de malhol, situées à l’autan de la borie, trois pugnères de malhol et trois pugnères de terre au cers de la borie, sept pugnères de pré à l’autan. Il déclare, de plus, une sétérée de pré en trois parcelles et 10 sétérées d’« herm, bosc, brogues, bartasses genebries ». Il possède en définitive une grande parcelle de 66,75 sétérées et quatre parcelles d’appenderia pour 11 sétérées, la superficie totale du domaine est de 77,75 sétérées, soit 46 ha. A. Mercie détient aussi toute une série de parcelles éloignées de la ferme, pour 33 sétérées, soit près de 20 ha269. Certaines de ces parcelles sont peut-être jointives, il faudrait dépouiller les plans d’adaptation pour le savoir. Le fait de mentionner presque systématiquement la superficie de la parcelle portant les bâtiments (d’un quart à une demi-sétérée très souvent) donne l’impression que, dans cette bourgade, la constitution des fermes ne s’est pas effectuée de la même façon qu’ailleurs. Il est possible que, comme à Saint-Papoul270, les tenanciers aient obtenu le droit de bâtir un campmas sur une de leurs tenures, tout en gardant un ostal dans l’agglomération.

138Si l’on regarde, pour Montesquieu et Castelnaudary, où le corpus de domaines est important, quelle est la superficie moyenne d’une parcelle (hors bloc portant les bâtiments), on s’aperçoit, sans surprise, qu’elle est généralement très supérieure à celle que l’on trouve dans l’appropriation dispersée ; les parcelles labourables, à Castelnaudary, sont même 13 fois plus grandes.

b. Le finage

  • 271 A.D.H.G., 4 E 076/CC 11 f° 120 r°.

139On note, encore une fois, des différences d’une localité à l’autre, mais qui ne reflètent pas la composition du finage des propriétés en parcellaire dispersé ni celui des réserves. Dans le Terrefort, les propriétaires de domaines laissent une plus grande part de leur finage en friche que ceux de parcelles dispersées, signe probable de fermes d’élevage (troupeaux des exploitants ou troupeaux confiés en gasaille), profitant d’un saltus abondant et nourricier (il faut rajouter à ces friches une part des terres mixtes). A Castelnaudary, des fermes d’élevage existent sûrement dans les confins du territoire, sur les pentes de la Montagne Noire, ce sont les seules fermes où l’on trouve mention de friches. Par exemple, Antoine Parra possède une ferme située en limite du consulat de Castelnaudary, près de celui d’Issel, dans un secteur où subsistent aujourd’hui des bois, elle compte 28 sétérées labourables, un malhol de presque une sétérée mais surtout un pré de quatre sétérées et demie, un payssieu de plus de deux sétérées et 15 sétérées et demi de brogues271.

140Étant donné la superficie moyenne de ces propriétés, cela signifie qu’à Montesquieu, on a, par « propriété type », ce qui recouvre, encore une fois, des écarts considérables, une dizaine d’ha labourables, à Montgiscard 15 ha, aux Bastards, en rajoutant une partie des terres « mixtes », 13 ou 14 ha, à Castelnaudary, 15 ha, à Ayguesvives, moins de quatre ha. Sauf dans le cas d’Ayguesvives, ces terres permettent la commercialisation de grandes quantités de céréales, de pastel. Les superficies consacrées à la vigne sont de l’ordre d’un ha, dans toutes les localités, sauf à Ayguesvives où elles n’atteindraient que 50 ares. On ne produirait, le plus souvent, que du vin destiné à une consommation familiale. Les superficies consacrées aux prés sont, en moyenne, d’un hectare, sauf à Castelnaudary où elles atteignent 1,5 ha et à Ayguesvives où elles ne sont que de 34 ares. Cette plus grande superficie consacrée aux prés à Castelnaudary est à mettre en liaison avec le fait que les fermes sont souvent situées en bordure de ruisseaux qui permettent l’irrigation. La part consacrée au saltus représente entre un ha et demi et trois ha à Montesquieu, cinq ha à peu près à Ayguesvives, une vingtaine d’ha à Montgiscard, sans compter qu’une partie des terres « mixtes » est aussi en friche. Aux Bastards, les friches semblent peu abondantes mais ce n’est pas le cas, elles sont placées dans la rubrique « terres mixtes », car de grandes quantités de terres sont dites « en terre labourable et bosigas, bartas », elles doivent compter en moyenne une trentaine d’ha. Étant donné la charge à l’ha signalée plus haut, on peut y nourrir plusieurs centaines d’ovins. Les estimes de Montesquieu de 1485 où figure, de façon incomplète, le cheptel de quelques déclarants, approprié et non tenu en gasaille, semblent le confirmer. À Fendeille, les superficies et la composition du finage des domaines sont inconnues, mais on peut supposer, étant donné le bétail déclaré dans les estimes, qu’on y pratique, la plupart du temps, l’élevage des ovins.

  • 272 A.D.H.G., 5 E 73 f° 111 r°.

141La valorisation des terres, surtout celles des domaines est différenciée en Lauragais, la plaine est tournée vers la production végétale (céréales, pastel, même si on ne l’aperçoit guère dans les estimes, et vigne), le Terrefort, tout en produisant céréales et vin, est axé davantage sur l’élevage, celui des bovins destinés à ravitailler Toulouse et celui des ovins dont la laine est utilisée par la draperie locale. Cet élevage profite de grandes étendues de friches qui sont, pour l’essentiel, aux mains des propriétaires de domaines. A Montgiscard, les frères Vaquié déclarent, sur un total de 20 ha, 10 ha et demi de terres abandonnées ou de broussailles. Aux Bastards, Sicard Auzelayre possède 35 arpents « de terres, prés et broussailles » non détaillés, plus de 55 arpents de terres labourables, vignes et prés et 20 arpents de bois et broussailles272. Ces friches qui sont établies sur les sols les plus pauvres sont peu à peu attaquées par des défricheurs : aux Bastards, Maro de Renhac déclare 20 arpents de terres labourables, vignes et prés, et 83 arpents de « tera laboradissa et herm », « bosc et brogas » dont cinq sont défrichés.

  • 273 Cf. Marandet (M.-C.), L’habitat isolé..., op. cit., pp. 142-143.
  • 274 Ce que notait déjà Georges Jorré, Le Terrefort..., op. cit., p. 52, il se basait sur la commune de (...)

142Les domaines se sont perpétués pendant des siècles, les bâtiments étant rénovés ou reconstruits sur le même emplacement, au sommet des coteaux ou des collines273. La transmission s’est effectuée longtemps, jusqu’au xviiie siècle, par exemple, à Castelnaudary, au sein des mêmes familles, avec, pratiquement, la même quantité de terres. Dans le compoix de 1700, Jean Gervais, bourgeois, possède deux maisons au Port Sainte-Croix, une grange au faubourg de la Bastide, une métairie appelée le Cammasou et à Librouch, qui étaient propriétés d’Estève Gervais en 1496 ; J. B. Le Roy détient toujours La Rouquette qui appartenait à Jacques Le Roy ; Etienne Villeroux, le château et les terres de Cucurou, secteur où son ancêtre Julyan avait acheté plusieurs campmas ; une autre branche de la famille possède les biens qu’il détenait à Combe Juliane. Cette permanence est très utile pour localiser les fermes du xve siècle dans le parcellaire. Ni le mode d’utilisation de la terre ni la structure agraire n’ont subi de changement appréciable pendant des centaines d’années, le paysage rural est resté à peu près figé274.

  • 275 Cazals, Monographie..., op. cit.
  • 276 Amiel, Monographie de la commune d’Ayguesvives, op. cit.
  • 277 Jorré (G), Le Terrefort..., op. cit., pp. 53-54 et p. 64.

143L’exploitation du finage a connu, elle, quelques modifications (en plus du remplacement du pastel par le maïs). On peut, en effet, comparer les finages du xve siècle à ceux des xviiie et xixe siècles. A Montesquieu, par exemple, en 1859, les terres labourables atteignent 1 875 ha, soit 77,35 % de la superficie agricole utile, les prés 14 ha (0,57 %), les vignes 185 ha (7,6 %), les bois 282 ha (11,63 %), une rubrique « autres » (sans plus de précisions) occupe 68 ha (2,8 %)275. La part des terres labourables et des bois a augmenté par rapport à 1485, celle des prés est beaucoup plus faible, celle des vignes est la même, les friches ont disparu. Mais, si l’on regarde les superficies de 1485, les résultats sont très différents : on a, alors, près de 100 ha de prés, soit huit fois plus qu’au xixe siècle, alors que toutes les terres n’apparaissent pas sur les estimes. De plus, 120 ha de broussailles, 150 ha de terres « mixtes » formées de friches et de bois, et une partie des terres « mixtes cultivées et incultes », permettaient la pratique d’un l’élevage sûrement beaucoup plus important qu’au xixe siècle. A Ayguesvives, en 1885, avec une superficie qui est alors de 1 311 ha, les céréales occupent 57,36 % des terres (752 ha), les prairies naturelles ou artificielles, 23,03 % (302 ha), les vignes, 9,15 % (120 ha), les bois 5,33 % (70 ha)276. Si l’on additionne seulement prés et friches du xve siècle, on obtient plus de 20 % de la superficie recensée, ce qui rejoint le pourcentage accordé aux prairies au xixe siècle, il faudrait aussi rajouter les terres « mixtes », en partie incultes, qui permettaient la pâture. À Montgiscard, à la fin du xviiie siècle, les terres labourables occupent 59,03 % de la superficie totale du village, les prés 8,11 %, les vignes 14,69 %, les bois 4,88 %, les terres hermes 1,47 %, les jardins et vergers, 0,69 %277. La part des terres labourables a légèrement augmenté par rapport à la fin du xve siècle, celle des vignes a pratiquement doublé. Partout sur le Terrefort, les friches et les terres « mixtes » qui comprenaient beaucoup de broussailles et de bois ont disparu. La mise en culture des terres (labours et vignes) a progressé depuis la fin du xve siècle, au détriment de l’élevage. À Castelnaudary, d’après les statistiques de 1807, les terres labourables constituent 86 % du finage, les prés naturels 2,71 %, les prés artificiels 1,07 %, les jardins 0,35 %, les vignes 9,47 %, les forêts 0,29 %. Par rapport au Moyen Âge, la part des terres labourables a augmenté mais faiblement puisque les terres mixtes du xve sont formées de « terre et vigne ». La part du finage consacrée aux vignes a un peu diminué, celle des prés a fortement diminué, au profit des terres labourables. Dans le registre incomplet de 1496, on trouvait 155 ha de prés contre 141 ha en 1807. Même en plaine, l’élevage est sûrement moins important qu’à la fin du xve siècle.

  • 278 Ainsi que le dit Jean-Marc Monceau, Terres mouvantes. Les campagnes françaises du féodalisme à la (...)

144Ces campagnes lauragaises ont vécu, comme bien d’autres, « Entre la stabilité apparente ... et l’impossible immobilité »278.

4. L’origine des domaines

145À quelle époque les domaines ont-ils été constitués ?

  • 279 Passe lac (M.), L ’occupation des sols..., op. cit., p. 57 et Aspects de l’habitat rural en Laurag (...)
  • 280 Daté de 1387, mais vraisemblablement copie d’un acte plus ancien, remontant peut-être au xiie sièc (...)
  • 281 Prospections au sol, M. Passelac.
  • 282 Cazes (J.-P.), Habitat..., op. cit., p. 436.
  • 283 A.D.A., 3 E 10814 f° 38 r°, f° 39 r°, f° 40 r°, f° 42 r°, 1450.

146L’habitat isolé est présent dans la région dès l’Antiquité, fermes indigènes et villae gallo-romaines (cf. supra). Quelques rares domaines du bas Moyen Âge sont établis à proximité d’un site antique, qu’ils semblent pérenniser. Tout près de la ferme actuelle de Bernardis, située, aujourd’hui, sur la commune du Mas-Saintes-Puelles, une villa gallo-romaine a été occupée jusqu’au ve siècle279. Une chapelle Saint-Pierre-de-Campanisas (signalée en tant que prieuré dans le livre du prévôt de Toulouse280) a été établie dans les dépendances de la villa, sans doute dès l’Antiquité tardive. Des vestiges des vie-viie siècles ont été retrouvés, par prospection au sol, près de la villa. Un campmas, situé « a sant Peyrot de Campanisas », est déclaré dans les estimes de 1496 de Castelnaudary par les héritiers de Maître Bernat Ramon Bernat, campmas qui correspond à la ferme de Bernardis. Aux environs de l’église Saint-Martin-de-la-Salle (de aula) de Besplas, se trouvent les vestiges d’une villa gallo-romaine et d’un habitat du vie siècle281. J.-P. Cazes pense que l’occupation humaine a été continue sur ce site tout au long du haut Moyen Âge et qu’une résidence aristocratique devait y être établie, ce qui justifie le vocable de l’église282. L’habitat s’est maintenu pendant plusieurs siècles : la prospection au sol fournit, tout près du lieu de culte, des tessons des xe et xie siècles ; dans la première moitié du xve siècle, une famille de paysans demande à être ensevelie dans le cimetière de cette église et non dans celui de l’église paroissiale283, il est probable que sa ferme se trouvait à proximité du site.

  • 284 Dans ceux qui subsistent, le mobilier n’est pas antérieur aux ixe-xie siècles, Cazes (J.-P.), Les (...)
  • 285 Ces églises ont subsisté jusqu’au xviiie siècle, parfois un peu plus tard, ce qui fait qu’il est t (...)
  • 286 Cazes (J.-P.), Habitat..., op. cit., p. 169.
  • 287 Marandet (M.-C.), L’habitat isolé dans le diocèse de Saint-Papoul..., op. cit., p. 152.
  • 288 Sur un plan du compoix de 1700 figure encore l’église, cf. « Annexes ».
  • 289 Cazes (J.-P.), Habitat..., op. cit., p. 164.
  • 290 Fermes actuelles de Cucurou, Co de Faure et Guimbaud.

147L’habitat dispersé du haut Moyen Âge, construit en matériaux périssables et dont les silos, seules structures visibles, ont été victimes des labours284, est très difficile à repérer, aussi l’archéologie ne peut-elle dire si les bâtiments du campmas lauragais font suite à ceux du manse carolingien. Elle permet, par contre, de mettre en relations fermes et sites ecclésiaux qui, sont, eux, facilement repérables. De nombreuses fermes du bas Moyen Âge sont situées près d’églises rurales, autrefois églises paroissiales285 de villages ecclésiaux vidés par l’incastellament. Quelques fermes constituent les vestiges des villages ecclésiaux, d’autres sont, peut-être, la continuation d’un habitat intercalaire qui existait, déjà, autour de ces petits habitats groupés. À Castelnaudary, la prospection au sol, sur l’emplacement de l’église rurale Saint-André-de-Lassens, fournit énormément de tessons des xe-xie siècles et, peut-être, antérieurs. J.-P. Cazes pense que s’y trouvait « une véritable agglomération ouverte ». Il signale des « habitats périphériques » et, à 250 m à l’est de ce site, ce qui est, peut-être, un petit habitat isolé, non datable précisément286. Trois campmas, dans les estimes de 1496, sont localisés « a sant Andrieu » ; un habitat a perduré, plus réduit qu’aux xe-xie siècles. Huit campmas sont situés « a Sant Miquel de Cogurone »287. Un cliché réalisé par Michel Passelac lors d’une prospection aérienne révèle l’organisation du site. Près d’un carrefour routier apparaissent, à l’est, une plate-forme sommitale circulaire, délimitée par un talus de quelques mètres, qui portait l’église, accompagnée d’un cimetière288, et, à l’ouest, une autre nécropole avec enceinte fossoyée. Des silos, des traces de petits habitats sont détectables autour de l’intersection des deux chemins. Le site de l’ouest date des environs de l’an Mil, la plate-forme correspondrait à un deuxième état du site, avec concentration de l’habitat à l’intérieur de l’enclos ecclésial289. Trois des fermes du xve siècle dites « a Cogurone » sont localisables à 250 mètres du carrefour de chemins290, les plus éloignées sont situées à 750 mètres. Existaient-elles déjà quand fonctionnait cet habitat groupé ? Localiser des fermes par le toponyme d’un site ecclésial situé à une assez grande distance n’est-il pas le signe que ces habitats en dépendaient, dès les xe-xie siècles, avant que ce site ne soit concurrencé par Castelnaudary et peu à peu vidé de ses habitants ?

  • 291 Aubrun (M.), Charbonnier (P.), Fournier (G.), Le Moyen Âge dans les paysages ruraux auvergnats, op (...)
  • 292 Hautefeuille (F.), Structures de l’habitat rural et territoires paroissiaux en Bas-Quercy et Haut- (...)
  • 293 Cursente (B.), Des maisons et des hommes..., op. cit.
  • 294 Durand (A.), Les paysages..., op. cit., p. 115-121.

148Des habitats intercalaires sont signalés, très tôt, dans d’autres secteurs, par exemple en en Auvergne, dès les xe-xie siècles291, dans le Bas-Quercy292 et en Gascogne293, au xie siècle. Ils apparaissent aussi en Languedoc, dès cette époque. Aline Durand pense que « l’immense majorité de ces manses ne sont pas les points d’aboutissement de la désertion d’une ancienne villa ou la survivance d’anciens écarts ayant pris un nouveau relief par rapport aux jeunes castra, ils sont d’authentiques créations médiévales ». Ces manses sont dans une position très excentrée par rapport au Image villageois, aux marges de l’ager294.

  • 295 Le Mené (M.),Les campagnes..., op. cit., p. 145 et suiv.
  • 296 Cf. infra.
  • 297 Abbé (J.-L.), L’aménagement de l’espace : le parcellaire rural de la bastide de Saint-Denis (Aude) (...)

149Beaucoup de campmas du Lauragais sont situés, eux aussi, aux marges des terroirs cultivés, faisant songer à un défrichement. Mais à quand remonte ce défrichement ? Date-t-il des xie, xiie, xiiie siècles ? Dans l’ouest de la France, aux xie-xiie siècles, naissent des hameaux puis des fermes isolées, des « gagneries » qui ressemblent beaucoup aux campmas lauragais, elles font de 15 à 20 ha et comprennent jardin, terres cultes et incultes, prés, bois, vignes, l’ensemble est délimité par des fossés et des haies. Ces fermes jalonnent les contours du finage seigneurial et sont concédées à des roturiers. Les seigneurs accensent aussi, à la fin du xiie siècle, une part de leurs réserves sous la forme de tenures « en hébergement », l’occupant s’engage à construire une maison dans un délai déterminé et à l’habiter, à défaut, l’hébergement peut être saisi295. Il est impossible de voir si cela s’est produit en Lauragais dès cette époque, on n’aperçoit qu’au xve siècle des concessions de grands lots de terre où l’on doit construire une ferme296. Sur les pentes de la Montagne Noire, en bordure du Lauragais, le défrichement aurait commencé avant le xiiie siècle, J.L. Abbé pense que les bastides de Saint-Denis et Fonters, l’une fondée en 1203, l’autre fin xiiie, le sont pour regrouper un habitat jusque-là dispersé dans des zones pionnières297.

  • 298 Partak (J.), La seigneurie..., op. cit., p. 84 et suiv., à part ces deux occurrences, le casai n’e (...)
  • 299 Guimbail (R.), Expansion..., op. cit., pp. 437 et 44-46. Il signale toutefois la présence de deux (...)

150Les documents lauragais évoquant les défrichements sont rares et ne remontent guère au-delà du xiiie siècle. La commanderie de Caignac, par exemple, accense alors sept cammas, deux casaux et un hameau. Joëlle Partak considère que les deux casaux correspondraient chacun à une exploitation (bâtiments et terres), les cammas seulement à des bâtiments d’habitation et d’exploitation. Un habitat dispersé, plus cossu et plus vaste que l’habitat paysan, apparaîtrait, désigné par le mot « habitatio ». La tendance à la dispersion, dans cette bourgade, s’accentue dans la 2e moitié du xiiie siècle298. L’habitat dispersé serait alors, par contre, rare sur les terres de la commanderie de Pexiora : un seul acte, au xiie siècle, parle de défrichement (à Saint-Martin-de-la-Salle), aucun acte pour le xiiie siècle. R. Guimbail pense qu’il n’existe pas d’exploitation isolée au début du xiiie siècle, mais seulement un ou deux petits noyaux de peuplement, un peu à l’écart du castrum ; la mise en place d’un peuplement intercalaire ne se ferait que dans la première moitié du xive siècle, ce mouvement serait stoppé par la crise299.

  • 300 A.D.A., G 233, pp. 631-632, cité par Ramière de Fortanier (J.), Recueil de documents..., op. cit., (...)
  • 301 L’habitat temporaire dans les mas est signalé en Camargue, mais au bas Moyen Âge, les exploitants (...)

151L’habitat isolé, installé sur les tenures, apparaît dans un acte de 1269 concernant Saint-Papoul. Il s’agit d’une transaction entre les habitants de Saint-Papoul et l’abbé du monastère, recopiée au xve siècle dans le registre de l’évêque Pierre Soybert. L’abbé autorise les tenanciers à construire un habitat dans leurs champs et à l’utiliser au moment des grands travaux, à condition qu’ils continuent de résider dans le village : « item, quod quilibet de habitatoribus dicte ville possit facere campmasium in tenencia sua in una eminata terre, in qua habeat introitum et exitum ad alias terras suas usque ad viam publicam, cum servicio XVIII denariorum tolosanorum solvendorum annuatim in festo Sancti Papuli, et hoc tamen dum ibi campmasium fuerit, quod esse debet pro voluntate habitantorum antedictorum, itatamen quod ibi possent animalia sua et suos nuncios triturari bladum suum et quod bladum postmodo reportetur ad villam, et quod domini principales campmasiorum cum uxoribus suis teneantur jacere et morari et ignem facere ad villam supradictam300. Ce campmas, maison des champs, peut être bâti sur une parcelle d’une éminée, soit, si la sétérée de Castelnaudary est en usage à Saint-Papoul, 17,59 ares. Cet habitat temporaire dans les champs pourrait devenir un habitat permanent, le siège d’une exploitation301. A Montesquieu, la parcelle portant les bâtiments de la ferme, parcelle parfois très petite, d’un quart ou une demi-sétérée, soit 14,81 ou 29,62 ares, est souvent allivrée séparément des parcelles de terre, ne peut-elle avoir la même origine qu’à Saint-Papoul ? Ce qui pourrait conforter cette hypothèse, c’est qu’à la fin du xve siècle, un quart seulement des propriétaires de fermes de Montesquieu (17/65) ne détient pas d’ostal en ville contre près de la moitié à Ayguesvives et Castelnaudary, 87,5 % à Montgiscard.

152Les habitants du Py obtiennent, eux aussi, mais en 1482, la liberté de construire sur les tenures « domos, bordas et alla hedificia pro libito in suis feudis et possessionibus propriis ». L’hôpital de Saint-Jean de Jérusalem essaie d’attirer des hommes pour remettre en valeur des terres abandonnées, dit-on, depuis cent ans. Les colons ont le droit de posséder dans les cammas deux sétérées de bois pour faire les bâtiments. On a pu procéder de la même façon, plus tôt, dans bien des secteurs.

  • 302 Cazes (J.-P.), La bailie..., op. cit., p. 53 note 21 et p. 45.
  • 303 A.D.H.G., 1 Mi 276 f° 144 r°, les autres bastides apparaissent f° 131 v°, 138 r°, 139 v°, 140 r°, (...)
  • 304 A.D.A., 4 E 076/CC9 f° 35 v°, les confronts ne sont pas indiqués.
  • 305 A.D.A., 4 E 076/CC 9 f° 46 v°, un Guilhem Guarret, son frère, est mentionné juste après, son manif (...)
  • 306 A.D.A., 4 E 076/CC 9 f° 71 r°.
  • 307 A.D.A., 4 E 076/CC 9 f° 28 v°.

153Le Liber reddituum, rédigé en 1272-73, ne signale, pour toute la baylie de Castelnaudary, que 18 habitats extérieurs aux agglomérations, 11 consistant en maisons situées tout près ; sept habitats intercalaires sont liés à une exploitation : « bas-tida cum terris », six à Castelnaudary, un au Mas-Saintes-Puelles302. Les fermes de pionniers sont peut-être des alleux ou des terres nobles et n’apparaissent pas dans ce registre recensant les droits du comte de Toulouse. Deux propriétaires de bastides, Gaillard Durandi et Bernard Garreti, sont des marchands ; le dernier est, de plus, suprabajulus. Les autres doivent être, eux aussi, des notables. La bastide appartenant à Bernard Garreti est située « près de la terre de Raymond Gauberti »303. Ces deux familles apparaissent encore dans le livre d’estimes CC 9, du début du xve siècle. Les Garreti détiennent plusieurs fermes : Bertrand Guaret déclare un campmas à Saint Bénazeth304, Bernard Guaret possède un campmas « a Fontanillas », de 40 sétérées de terre et 10 sétérées de pré305, un autre Bertrand Guaret, fils de feu Arnaud, possède un campmas à Puech Contrasty306. Une de ces fermes perpétue sûrement la bastide du xiiie siècle. Arnaud Gauberti déclare un campmas de 11 sétérées de terre et pré, situé à Tréboul, il possède aussi des terres à Rieutort, à Saint-Bénazeth et dans les environs, pour un peu plus de huit sétérées, ces lieux-dits sont proches du ruisseau du Tréboul, en limite du finage de Fendeille. Des Gaubert sont établis à Fendeille où ils figurent dans les registres d’estimes. Les propriétaires des biens confronts sont indiqués, il n’y a pas de Garreti parmi eux 307. Le campmas den Arnaud Gauberti apparaît à plusieurs reprises tout au long du xve siècle. Les autres bastides figurant dans le Liber Reddituum ne peuvent être repérées au xve siècle, les patronymes de leurs propriétaires ont disparu.

  • 308 Ce terme de bastide n’est plus employé en Lauragais aux xive-xve siècles alors qu’il l’est toujour (...)
  • 309 Durand (A.), Les paysages..., op. cit., p. 202 et pp. 207-208.

154Les bastides du Lauragais sont-elles semblables à celles qui existent en Provence, aux marges du terroir, dans le second quart du xiiie siècle ? Dans cette région, la bastide est, à l’origine, une fortification, les mots turris et bastida sont équivalents. « Rôle stratégique, fonction militaire, instrument de structuration du pouvoir, tout indique que la bastide est affirmation -ou tentative d’affirmation- d’un pouvoir »308. Aline Durand pense que les bastides languedociennes doivent comporter un élément symbolique de la seigneurie et que ce mot doit désigner autre chose qu’un simple habitat dispersé puisqu’on pouvait employer les termes de mansus, mansio. Elle les définit « comme des exploitations seigneuriales intercalaires destinées à coloniser spécifiquement les plateaux et les reliefs montagneux dans un but pastoral. Cet habitat dispersé est fondé à l’instigation des seigneurs aux marges des finages villageois durant le xie siècle »309. Si les campmas aux mains des Garret au xve siècle, dont l’un perpétue probablement une bastide sont, effectivement, situés en limite sud du consulat de Castelnaudary, au pied des collines de la Piège, leur propriétaire, au xiiie siècle, est tenancier du comte de Toulouse. La terre de Raymond Gauberti, située dans le même secteur, pouvait, elle, porter une exploitation noble, R. Gauberti ne déclarant pas de ferme relevant du comte dans le Liber reddituum. Fin xve siècle, on parle encore du campmas et même, parfois, de la condamine d’Arnaud Gauberti (probable descendant de Raymond), alors que ce bien a changé plusieurs fois de mains, signe de l’importance attribuée à l’ancien propriétaire. La famille Gauberti, seigneur du bien, a pu initier la colonisation.

  • 310 Henri Duffaut a retrouvé, dans un inventaire du xviie siècle, plusieurs de ces hommages dans le re (...)
  • 311 A.D.H.G., 1 G 799 f° 31 v°.
  • 312 A.D.H.G., 1 G 799 f° 32 r°.
  • 313 A.D.H.G., 1 G 799 f° 32 v°.
  • 314 A.D.H.G., 1 G 799 f° 35 v° « ultra feuda nobilia », une part moulin à eau sur l’Hers.
  • 315 A.D.H.G., 1 G 799 f° 39 v° « ultra feuda nobilia », deux terres.
  • 316 A.D.H.G., 1 G 799 f° 42 v°, il tient de l’archevêque « ultra feuda nobilia » une part de moulin à (...)

155Des habitats isolés nobles apparaissent dans les registres de reconnaissances de l’évêque de Toulouse, à la fin du xiiie siècle. Tout le secteur de Roqueville, à Montgiscard, est tenu en fief par l’évêque de Toulouse, des chevaliers sont ses vassaux, constituant la milice ou chevalerie de Roqueville. Henri Duffaut signale six fiefs, Maurento, borio de Carrollis, borio de Ponce ou de Bernard Etienne, borio de Gavarretz, borio de Sobiran ou de Buxi, borio des Fourniers ou d’Ademair ; l’ensemble de ces fiefs est chargé au profit de l’évêque d’une albergue d’un jour, pour lui et sa suite, quand il vient à Montgiscard ou Roqueville pour en recevoir l’hommage310. Ces fiefs se présentent comme des fermes puisque appelés borio. On peut se demander s’il s’agit bien de domaines nobles puisque les tenures roturières sont, dans le Toulousain, données en fief. En fait, dans le registre de reconnaissances de 1292, on voit apparaître les détenteurs de ces fiefs qui reconnaissent diverses tenures en faveur de l’évêque, mais disent qu’ils les tiennent en plus de leurs fiefs nobles : Arnaud de Gavarreto, damoiseau, tient de l’archevêque « ultra feuda nobilia de miliciis de Roquevilla », une part de moulin à eau sur l’Hers (cens de 2 s 6 d tr), des terres, etc.311 Guilhem Fornerii, fils de feu Guilhem, tient « ultra feuda predicta nobilia », une borie et une terre312. Arnaud et Raymond Sobirani, frères, fils de feu Bérenger damoiseau et de Selhane sa femme, reconnaissent des terres « ultra feuda nobilia » qu’ils tiennent de l’archevêque « de miliciis de Roquevilla »313. Isarn de Gavarreto, damoiseau314, Raymond de Rocovilla315 et Aymeric de Gavarret, damoiseau, fils de feu Guilhem, possèdent, eux aussi, des tenures et des fiefs nobles316. Ces fiefs vont ensuite se concentrer dans les mains de quelques familles.

  • 317 A.D.H.G., 1 G 799 f° 34 r°.
  • 318 A.D.H.G., 1 G 799 f° 34 v°.
  • 319 A.D.H.G., 1 G 801 f° 1 r°.
  • 320 A.D.H.G., 1 G 799 f° 35 r°.
  • 321 A.D.H.G., 1 G 799 f° 36 v°, f° 48 v°.
  • 322 A.D.H.G., 1 G 799 f° 30v°, 36 v°, 41 v°, 48 r°.
  • 323 A.D.H.G., 1 G 799 f° 36 v°, 38 v°, 42 r°, 46 v°.

156Des fermes roturières sont bâties à côté de certains de ces fiefs. C’est le cas aux Fourniers puisqu’on voit diverses reconnaissances effectuées en faveur de l’évêque pour un manse de ce nom. Pierre Furnerii « de capmasio furnerorium » tient hospicia et casalia dans le campmas et un autre casai, hospicia et casalia qui furent de Raymond Regis317. Vivent dans ce campmas, à la même époque, Pierre, Guilhem et Vitalis Furneri, tous les trois fils de Pierre318. Vitalis et Guilhem possèdent chacun un hospicium et une aire contiguë, Raymond, hospicium et jardin contigu. Deux autres Guilhem et Pierre Furnerii possèdent, eux aussi, hospicium et jardin contigu. On a, peut-être, plus de six maisons dans ce campmas. En 1447, le campmas des Fourniers figure encore dans un registre de reconnaissance de l’évêque, aux mains d’Olivier Galles, originaire de Britaniae, qui le reconnaît avec sa femme, fille et héritière de Pierre Forneri319. D’autres habitats isolés apparaissent dans le registre de 1292 : une borie ad rivum de nofredo, appartenant à Guilhem Fornerii fils de Guilhem, avec hospicium, borde et terres, le campmas de Vallebriera où réside Pierre Fogassa320. Quelques autres bâtiments sont dispersés sur le territoire relevant de l’archevêque : des bordes, un colombier321. Roqueville semble constituer un petit hameau puisque des bâtiments (quatre hospicii, une domus, trois bordes) y sont confronts de l’ « aula » de l’archevêque322. Des tenanciers reconnaissent des essarts, gagnés souvent sur les friches bordières de l’Hers323, mais il n’est pas question de fermes situées dans ces confins fréquemment inondés.

  • 324 Dossat (Y.), Une tentative de réforme administrative dans la sénéchaussée de Toulouse en 1271, Bul (...)

157Dans la dépression de Castelnaudary, des toponymes utilisés au xve siècle pour localiser des campmas tels « a plan capel, a las planas, ad planum maiorum » (ce qui est plan, plat, mais aussi ce qui a été défriché), « a bosc ramonenc » peuvent faire penser à du défrichement. Il est difficile de déterminer à quelle époque remonte cette mise en valeur. Jean-Paul Cazes pense qu’à la fin du xiiie siècle, la plaine de Castelnaudary est entièrement cultivée et que les défrichements sont seulement possibles dans la Piège et, surtout, dans la Montagne Noire. Yves Dossat fournit l’exemple de Bernard Garreti qui fait défricher à Issel, aux frais du roi, 12 sétérées, qu’il donne à son gendre, Guillaume Provençal324.

  • 325 Ib., p. 511 et A.N.J 1031, membre 1.

158Des domaines peuvent résulter de l’achat d’encours d’hérésie (possessions confisquées à des hérétiques condamnés par l’Inquisition) ; ces encours font partie de la réserve du comte de Toulouse, d’après le Liber reddituum, mais ils sont parfois vendus (accensés, probablement, contre une acapte). Bernard Garreti, le supra-bajulus, est accusé d’avoir vendu au-dessous de leur valeur des encours d’hérésie aux parents des condamnés325. La famille d’un des acheteurs, Jean de Baure, apparaît dans les registres de notaires du xve siècle, elle détient plusieurs fermes à Issel.

  • 326 A.D.A., 4 E 076/CC9 f° 19 r°.
  • 327 Voir Marandet (M.-C.) L’habitat isolé..., op. cit., pp. 149-150.

159On considère que la ferme de défrichement porte souvent le nom du pionnier qui l’a mise en valeur. Très peu de fermes sont ainsi qualifiées, dans la plaine, au xve siècle. A Castelnaudary, dans les registres notariés apparaît, en plus des campmas de B. Garreti et d’A. Gauberti, le capmas den Fizas : « capmas den Fizas vulgariter cammas naut del cami frances », « capmas den Pierre Fizas », tenu par un chapelain de Saint-Michel. Ce campmas a été probablement légué au chapitre Saint-Michel en échange d’une chapellenie, il lui appartient déjà au début du xve siècle. La famille Fizas a dû créer ce grand domaine, situé, comme ceux des Garreti et des Gauberti, en limite sud du consulat de Castelnaudary, au-delà du Tréboul, près du territoire de Fendeille. Un Jean Fizas figure dans les estimes du début du xve siècle, il déclare de nombreuses parcelles mais pas de ferme326. Neuf fermes de la bailie portent un anthroponyme, elles sont pratiquement toutes situées sur les premières pentes de la Montagne Noire (Peyrens, Issel, Saint-Papoul, Labécède327), zone de défrichement au xiiie siècle.

160Les autres domaines de la bailie ne portent pas, fin xve - début xvie siècle, le nom de leur propriétaire, ou, tout au moins, celui-ci, quand il fait sa déclaration devant les estimateurs, et le notaire quand le bien est vendu ou donné à bail, n’utilise pas un vocable peut-être employé par les voisins du bien. Ce qui le laisserait penser c’est que les noms de certains des propriétaires du bas Moyen Âge sont devenus à l’époque moderne les noms des campmas, ainsi Antoine Dernier possède en 1700 la métairie des Pelisses, celle de L. Pelisse ou Pelice, qui était dite à « Massali sive Pech de Gajac », noble J. Ducup, celle des Pascals à « Font de cenolha ». La transmission d’un domaine d’une génération à l’autre a pu faciliter les choses : la ferme d’Estève Gervais est, au xviiie siècle, aux mains d’un Jean Gervais, bourgeois, celle de Combe Juliane qui appartenait à J. Villeroux est toujours propriété de la famille. Le compoix de 1700 fournit, le plus souvent, le nom du quartier où se trouve la ferme, puis ajoute l’appellation dérivée du nom du propriétaire : ainsi, métairie appartenant « à monsieur de Brugelles a camp naut autrement de Brugels », suivant le même processus, cette ferme porte aujourd’hui le nom de Brugèlis.

  • 328 Ces fermes figurent sous ces noms dans le compoix de 1700 mais elles n’appartiennent plus aux fami (...)
  • 329 A.D.A., 3 E 9456 f° 176 r°. Alors qu’aucun seigneur n’est signalé, on mentionne la clause d’interd (...)

161À Castelnaudary, ceux qui, propriétaires de domaines au xve siècle, leur ont laissé leur nom ne sont pas, en majorité, les pionniers créateurs ; le défrichement, dans la plaine, étant terminé dès le xiiie siècle, on peut supposer que la constitution des domaines s’est, au plus tard, effectuée à ce moment-là. Ce n’est peut-être pas le cas, cependant, pour quelques campmas, situés aux limites nord du consulat, sur les premières pentes de la Montagne Noire, en bordure du territoire d’Issel. Ceux-ci peuvent résulter, étant donné les grandes quantités de broussailles qui y figurent, d’un défrichement en cours ou récent (peut-être une reconquête de terres retournées à la friche après la Peste Noire) effectué, de leur propre chef, par des paysans. Les fermes d’A. Parra « al cutera », des héritiers de Bernard Cros « a sanct Johan des Plas », des Pascals « a font de Cenolha », sont dans ce cas. Elles vont prendre le nom de leurs propriétaires, nom qu’elles portent encore (En Parro, Les Crozes, Les Pascals)328. Le campmas des Pascals a été acheté, en 1446, par Peytavine, veuve de Pierre Pascal, ses deux fils et un homme, peut-être apparenté à Peytavine, et le fils de celui-ci. Ce campmas est alors dit « campmas de Rosilhac » (rosilhon : lactaire), franc et libre de tout service »329 ; il est vendu un très petit prix, 5 £ tr, signe que le défrichement reste à faire ou refaire, on le vend toutefois « cum omnibus terris nemoribus bartis et pratis. Ce campmas est situé tout près de la borie de Rosilhac appartenant à l’évêque de Saint-Papoul, d’où son appellation de départ.

  • 330 A.D.H.G., 3 E 10136 f° 66 r°.
  • 331 A.D.H.G., 3 E 10162 f° 29 r°.
  • 332 A.D.H.G., 3 E 10166 f° 336 v°.
  • 333 A.D.H.G., 3 E 10162 f° °23 v°, 1407 (ferme probablement liée à l’élevage d’ovins).
  • 334 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 111 v°.
  • 335 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 248 r°, 1409.

162Dans les localités du Terrefort oriental, les fermes portant un anthroponyme aux xive et xve siècles sont très nombreuses et habitées, souvent, par la famille éponyme. Trente quatre fermes situées à Ayguesvives, Montlaur, Baziège, Saint-Léon, et Montgiscard, repérées dans les registres notariaux, sont dans cette situation, par exemple, le campmas « dels Lombars » qui fut de P. Lumbardi, laboureur330, le campmas des Rossandorum où habite un Rossandi331. À Montesquieu, dans les livres d’estimes, six fermes portent le nom d’un individu qui n’est pas le déclarant et 16, ceux des propriétaires déclarants. Le propriétaire (utile ou « intégral ») non exploitant peut descendre d’un défricheur éponyme ou bien avoir donné son nom à un domaine qu’il a acheté : on trouve à Montgiscard une borie de Lestenchis appartenant au sire de Lesenchis332. Une de ces fermes, au moins, est un alleu, celle des Ovelhierii333, seul exemple net pour la partie ouest du Lauragais. Le campmas des Carbonerii semble, lui aussi, un alleu donné en tenure à un fils, le seigneur du bien est Arnaud Carboneri, le tenancier Pons Carboneri334. On a probablement la même chose pour le campmas den scossa et son territoire, « exceptis feudis » tenus du prieur de Venerque, donnés par P. Y. Descossia moyennant 16 £ et 1/5 des blés et autres fruits335. Certaines de ces fermes ont pu servir, à l’origine, à l’exercice d’une activité dangereuse à effectuer dans le village, à cause des risques d’incendie. On trouve plusieurs fermes sous l’appellation des Fourniers, dont une où se trouve effectivement un four, on a aussi un campmas des Fabres (forgerons), un campmas des Carboneri (charbonniers).

  • 336 A.D.H.G., 3 E 10162 f° 64 v°, 26 mars 1409.
  • 337 A.D.H.G., 3 E 10166 f° 73 r°, 1434.
  • 338 A.D.H.G., 3 E 10162 f° 23 r°.
  • 339 A.D.H.G., 3 E 10162 f° 2 v°.
  • 340 A.D.H.G., 3 E 10166 f° 58 r°, 1436.

163Ces pionniers ne sont pas forcément alleutiers, en effet, au hasard des registres de notaires, on s’aperçoit que beaucoup de ces fermes sont des tenures, ainsi à Montlaur, des fermes qui portent le nom de leur exploitant, sont en fait accensées ou baillées à court terme par la famille de Mauriaco, seigneur du lieu. Une borie de six sétérées environ, lieu-dit au campmas des Andrés336 et le campmas als lumbars337 à Montlaur, sont donnés en location par P. de Mauriaco. Le campmas des Fabres et celui des Auriols, à Montlaur, sont accensés338. Le campmas des Rossandorum, où vit P. Rosandi, est dans la directe de P. de Mauriaco puisque P. Rosandi lui doit du froment en raison d’arrérages d’oblies et de gasaille. Le campmas des Persorum à Montlaur, est propriété, en 1407, de P. Persii, tisserand, dont on fait l’inventaire après décès339, mais il s’agit d’une tenure puisque le 6 juin 1424, Pierre de Mauriaco achète, pour 25 £, tous les biens de l’épouse de P. Persi, dont hospicia, borde et terres « a persos » à Montlaur, biens dont la reconnaissance a été faite le 26 février 1396 (n. st.). P. de Mauriaco a fait jouer la prélation car on signale dans l’acte que, si l’un des biens relevait d’un autre seigneur que lui-même, il doit le rendre. Les tuteurs des héritiers de P. de Mauriaco donnent en emphytéose, als sentolhs, à Montlaur, une borde qui fut, autrefois, de G. Sentol, avec ses terres, sous un service d’une demi pugnère de blé et deux poules, le droit d’entrée et de 10 écus, les preneurs doivent réparer la borde340. Ces fermes n’ont pu être situées précisément, sont-elles limitrophes ? Établies aux confins du consulat de Montlaur ? Les Mauriaco ont-ils concédé les parties de leur réserve les plus éloignées de leur château ? Ces paysans éponymes étaient-ils des pionniers auxquels on a distribué des lots incultes de la réserve ou ont-ils été installées sur des parties déjà exploitées, dont le seigneur abandonnait la mise en valeur par des salariés ou des corvéables ? Les appellations de condamine, en tant que synonyme de campmas, déjà signalées, semblent montrer que ce découpage a pu se produire.

  • 341 La Roncière (Ch.-M. de), Propriétaires et fermiers dans la plaine de Florence, Campagnes médiévale (...)

164Étant donné le nombre assez élevé de domaines dans le consulat de Castelnaudary au début du xve siècle, alors que les mentions en sont très rares à la fin du xiiie, quelques-uns ont dû être constitués, courant xive siècle, par les notables urbains (marchands et hommes de loi), par l’Église, comme cela s’est effectué à Florence, entre autres341. La période 1350-1400, en particulier, a pu permettre cette constitution par achats, prise à cens de parcelles, devenues vacantes après la peste, ou de lots découpés sur la réserve seigneuriale.

  • 342 Coulet (N.), Aix-en-Provence..., op. cit., p. 273 et suiv.
  • 343 Cf. infra.

165La constitution de domaines se poursuit courant xve siècle, dans certaines régions, à Aix, par exemple, au contact des limites territoriales, sur des terres marginales (garrigues, broussailles)342. Dans la plaine lauragaise, les mentions de nouvelles créations sont rares, un seul campmas, dans les estimes de 1496 de Castelnaudary, est dit « bastit de novel » ; il est situé sur le territoire de Castelnaudary, mais en limite de celui de Peyrens et déclaré par Jean Borrasserii, un des seigneurs du village. Dans le Terrefort, qu’il s’agisse de la Piège ou de l’Entre-deux-Hers, des seigneurs découpent des éléments de leur réserve en exploitations qu’ils donnent en emphytéose perpétuelle, les tenanciers doivent, parfois, édifier des bâtiments343.

166Dans de nombreux secteurs du Terrefort, le défrichement est encore en cours à la fin du xve siècle, des domaines sont en voie de constitution sur les marges du finage, nous l’avons vu pour l’orée de la forêt de Saint-Rome. Aux Bastards, c’est une grande partie du finage qui est en cours de défrichement. On y trouve, à la fois, de véritables domaines, centrés sur des bâtiments construits en matériaux durables puisque allivrés et, d’autre part, des terres dont l’exploitation commence, qui sont majoritairement en friches et où n’apparaissent pas de bâtiments (ce qui n’exclut pas la présence de simples cabanes).

  • 344 A.D.A., 3 E 10166 f° 58 r°.
  • 345 A.D.A. 3 E 9470 f° 73 v°,1489.
  • 346 A.D.A. 3 E 9470 f° 84 r°, 1490.
  • 347 A.D.A., 3 E 1501 f° °271 v°, 1502.
  • 348 A.D.A., 3 E 1501 f° 95 v°.

167Dans la partie orientale du Lauragais, si l’on ne crée plus beaucoup de nouveaux domaines, on essaie d’agrandir ceux que l’on possède en achetant les terres voisines (ce phénomène est moins net dans le Terrefort occidental). Les registres notariés montrent des rassembleurs de terre à l’œuvre. En 1496, le marchand Julyan Villaroux possède un campmas et plusieurs biens à Combe Juliane, à l’est de Castelnaudary, il détient aussi diverses parcelles et quatre campmas, à l’ouest de la ville, dans un secteur allant de Saint-Michel-de-Cogurone au village de Souilhanels, pour plus de 255 sétérées (90 ha). En 1516, ses héritiers ont vendu un campmas, proche de Souilhanels, qui n’était pas mitoyen des autres et ont acheté une ferme « a Cogurone », la superficie des biens mitoyens est passée de 60 à 78 sétérées. Un même souci de remembrement des terres se retrouve chez Jean Niseti qui échange son campmas situé à Saint-Jean-des-Plats (d’après le registre CC9, il atteint 100 sétérées et est estimé 35 £ tr) contre celui du couple Martini, faisant pièce à ses possessions du Tréboul (un moulin, des terres) ; les Martini donnent aux Niseti 30 moutons d’or car le campmas de Saint-Jean-des-Plats vaut plus que le leur. Des propriétaires plus modestes font la même chose : Raymond et Guilhem de Hugone, deux frères de Montlaur, prennent en tenure une borde avec ses terres, ils sont confronts au midi344. Jean Chanardi prend en tenure, auprès du roi, 24 sétérées à Notre-Dame de Quiries, au Mas-Saintes-Puelles345, il achète, à la même époque, 5 carterias de terre dans ce secteur346. Un peu plus tard, Sance Chanardi vend une borde avec 14 sétérées de terre à Quiries ainsi qu’une vigne ; un parent, Pierre Chanardi, est confront à l’autan347. Sance est probablement un des héritiers de Jean. Cette famille est encore possessionnée là au xviie siècle. Martin et Jean Sarraceni, de Castelnaudary, achètent une borde à La Pomarède, ils en sont confronts au cers, à l’autan et au midi348. Un laboureur achète des friches à Ayguesvives « a la serra », il en est confront.

  • 349 Une borie noble louée doit perdre son statut noble et devenir taillable, elle est déclarée par son (...)

168Des domaines taillables sont déclarés par quelques familles nobles, par Raymond de Pechbusque, par exemple, à Ayguesvives, par Estorguet Azéma de Roqueville et Bertholy Azéma à Montgiscard, ce qui n’a rien d’anormal puisque c’est la terre qui est noble349 ou roturière, son possesseur n’influe pas sur son statut. Que possèdent ces familles sur leurs réserves, un château, une maison-forte, des exploitations ? Trouve-t-on, en limite des finages cultivés, des domaines liés à un défrichement effectué par les gens du seigneur ?

  • 350 A.M.T., Ms. 634 30 v° ; ce dénombrement date probablement des années 1480-1510, moment où Foulq (...)
  • 351 A.D.H.G., Ms. 634 f° 38 v°, un château en 1389, un ostal fort en 1409.
  • 352 A.D.H.G., Ms. 635 p. 42 et A.D.H.G., Ms. 634 f° 15 r°.
  • 353 Caster (G.), Le commerce du pastel..., op. cit., pp. 151-152 et notes 129 à 138, RP 30, 106 r°.

169Des fermes nobles apparaissent en tant que confronts à Castelnaudary, celles de Barbontier, propriété du seigneur de Souilhe, de La Rouquette, propriété de Julyan Villaroux, de Canast appartenant aux Ysalguier, de Salesses appartenant au seigneur d’Issel. Elles sont situées à la périphérie du finage, ainsi que la ferme taillable de Pratfenares, bâtie vers 1496, aux mains de la famille des Borasseri, les seigneurs de Peyrens. Comment se présentent alors ces fermes ? Ont-elles une allure de maison-forte ? Les aveux et dénombrements du registre Ms. 634 indiquent des maisons et métairies nobles (aveux de 1389, 1407, etc.), mais les descriptions en sont fort rares. On aperçoit, dans l’aveu et dénombrement, sans date, de Foulques de Mauriaco, un château, probablement situé à Montlaur350 et, dans deux autres aveux, un château et un ostai fort, situés à Odars351. Un château, construit à Fendeille, est avoué en 1554 par Jean-Jacques de Fontaynes. En 1463, son ancêtre Guillaume n’avouait qu’une maison352. Les seuls documents précis sont des xvie et xviie siècles. Gilles Caster cite un texte de 1528 concernant la borde noble de Paleficat, au sud de Launaguet, qui appartient à Jean de Bernuy. Par acte notarial, cinq paredarii s’engagent à construire la longueur de pareriarium (clôture) nécessaire pour fermer unum plauterium (platea : terrain) à Paleficat, altitudinis tam fondamenti quam coperture et mejanserie (cloison) duodecim palmorum et dansitudinis fundamenti sive siete (assiette, base) quatuor palmorum et in sumitate duorum palmorum cum dimidio, unacum valatis unius canie (en profondeur et en largeur probablement) de bruque (bruc : bruyère). Le mur fera 2,7 mètres de haut, y compris les fondations, 90 cm à la base, 56 cm au sommet, il sera précédé d’un fossé large de 1,8 mètres et profond d’autant avec des parois abruptes maintenues par des clayonnages. Gilles Caster conclut que cette borde est « une grosse ferme fortifiée, face aux bandes de pillards et le symbole de la noblesse du maître »353. Cette description peut s’appliquer, peut-être, à un certain nombre de fermes nobles. Elle s’applique, en tout cas, à celle de Las Touzeilles, près de Labastide. En 1550-51, noble P. de Baure, seigneur des Touzeilhes, déclare une maison entourée de fossés, une métairie, un moulin et un pré nobles. Un peu plus tard, Louis d’Olmières, seigneur de « Las Touzeilles et de Montferrand et Labastide », avoue « un chasteau appellé las Touseilles sive Lencauderon » avec « écuries, fournial, grange, le tout dans l’enclos de la basse-cour, pigeonnier, garenne, jardin, verger, allée, terre labourable, prés et hermes, joignant ensemble une autre maison appelée Le Gallaguès, 31 sétérées deux carterias, place de moulin à vent » et plus de 43 sétérées de terres et bois, ainsi que des censives. Le Gallaguès doit loger les fermiers ou métayers de L. d’Olmières.

  • 354 A.D.A., 4 E 076/CC101.
  • 355 A.D.A. 4 E 076 II 2, f° 9 r°.

170Ces fermes nobles ne le sont parfois que de façon très récente : les comptes du consulat de Castelnaudary contiennent une copie moderne d’une transaction effectuée en 1358 entre la communauté et Bertrand de Palacio (du Pallais dans les aveux et dénombrements), seigneur d’Odars ; il paye une rente, à condition que sa borie de Canast soit noble354. Le chapitre Saint-Michel fera anoblir, au xvie siècle, plusieurs de ses métairies : le Campmas Haut, le Capitoul Haut, le Capitoul Bas, Saint Maurice355.

5. Les propriétaires des domaines taillables356

  • 356 Qu’ils aient uniquement la propriété utile ou soient pleinement propriétaires.
  • 357 Thébault, Les bourgeois de la terre. Stratégies foncières et mobilités sociales dans le Midi toulo (...)

171Les registres d’estimes ne permettent guère de connaître la condition sociale des propriétaires de domaines, la qualité des déclarants n’est précisée systématiquement que s’il s’agit de nobles, de clercs ou d’institutions (Église, hôpital, confrérie) ; elle l’est aussi en cas d’homonymie, concurremment avec le lieu d’habitation. Les registres notariés sont presque aussi discrets : un tiers des actes à peu près, mentionnent le métier des intervenants. Sur un total de 169 occurrences obtenues en notant les qualités des tenanciers, vendeurs, acheteurs, bailleurs de domaines, les laboureurs constituent 29,58 % des propriétaires de fermes, suivis à peu près également de l’Église et des siens (18,34 %), des commerçants (17,75 %) et des nobles (16,56 %). Les artisans représentent 7,69 % des propriétaires, les membres des services et des professions intellectuelles (essentiellement juristes et notaires), chacun 4,73 %. Un « bourgeois » toulousain possède aussi un domaine (0,59 % du total). La forte représentation de l’Église et des nobles est classique. Les marchands, eux, investissent dans la terre, dans un souci de profit mais aussi pour se rapprocher du genre de vie des nobles et obtenir du prestige. Le même comportement existe au xixe siècle, dans le Midi toulousain, « la terre est le support privilégié de la représentation sociale pour les classes possédantes, aristocratie et bourgeoisie » ; « le placement foncier est, en raison de sa symbolique, générateur de considération sociale pour l’ensemble des bourgeoisies »357.

  • 358 En 1496, à Castelnaudary, trente-deux déclarants laïcs possèdent un ou plusieurs campmas et n’ont (...)
  • 359 Cf. « Les modes de faire-valoir ».
  • 360 A.D.H.G., 5 E 67 f° 60 r°.
  • 361 A.D.H.G., 5 E 66 f° 112 r°.
  • 362 A.D.H.G., 5 E 67 f° 54 r°.
  • 363 A.D.H.G., 5 E 67 f° 53 r°.
  • 364 À payer, tout de même, en 10 ans, A.D.H.G., 3 E 10097 f° 49 r°.
  • 365 A.D.A., 4 E 076/CC 80 f° 22 r°.

172La nature des actes passés devant notaire (le plus souvent des ventes et des baux à court terme) ne permet pas de repérer tous les « laboureurs » propriétaires de campmas, la ferme restant toujours aux mains de la famille, sauf dans le cas d’une déroute financière. On pourrait supposer que les estimés ne détenant qu’un campmas et pas de maison en ville (ou tout au moins pas de maison taillable)358 sont exploitants, mais d’autres documents montrent que, parfois, des fermiers ou métayers tiennent ces campmas à bail, le propriétaire est résident mais exerce une autre activité. Certains sont effectivement des exploitants, ils sont qualifiés de laboureurs dans les registres de notaires. C’est le cas à Montesquieu, par exemple, de J. Forquada qui possède un ostal dans le fort, la moitié d’un campmas et 6,37 ha répartis en sept parcelles, de Michel de Montechio (Mengot de Monteg), un descendant probable d’un des fermiers de la grange de Boulbonne359, qui possède capmas, sol et ort, 20 ha et 18 vaches et veaux, et est coté 117 £ 10 sous360. Certains des membres de la famille Serny sont eux aussi laboureurs : Guilhem Serny « de Pech Fournié »361 qui déclare campmas, sol et ort et un peu plus de 10 sétérées dans le registre dit de 1409, son fils Jean, qui déclare campmas, sol et ort et un peu plus de 13 sétérées de terre dans le registre de 1485362. Un autre Serny, Pierre, possède la ferme de la Ribieyra, un ostal en ville, la moitié d’une tuilerie et une quinzaine d’hectares, il n’est pas uniquement laboureur363. Ces paysans sont aisés et ils investissent dans les villages voisins. En 1448, Etienne Servini (Serny en langue d’oc), de Pech Fournié, et Guilhem, son fils, reconnaissent devoir à Pierre Vinhas, laboureur de Montesquieu, 11 écus d’or et 12 gros en raison de l’achat d’un tiers du campmas qui était à Pierre Ayneri, macellier du lieu, campmas qui se trouve aux Bastards364. En 1489, les héritiers de Pierre Vinhas possèdent encore la moitié d’un campmas aux Bastards et deux Serny y déclarent des terres en friche. Les Lobat de Bosc Ramonenx à Castelnaudary sont, peut-être, des exploitants, on voit l’un d’entre eux, porter lui-même des épines pour combler les ornières de la route, à la demande du consulat365. La majorité des laboureurs n’ont, toutefois, au moins au tournant des xve-xvie siècles, pas de domaine d’un seul tenant, mais des parcelles dispersées sur l’ensemble du finage.

  • 366 A.D.H.G., 5 E 67 f° 12 r°.
  • 367 A.D.A., 4 E 076/CC9, cf. « Annexes ».

173Les artisans (surtout dans le milieu du textile, tels les tisserands, les teinturiers), sont souvent propriétaires d’assez grandes exploitations, que ce soit sous la forme de domaines ou de parcelles dispersées. Poncius Servini, un tondeur de draps, possède, en 1485, la moitié d’une ferme « am serena » avec 42 sétérées de terre (dont 30 de friches) et plus de 10 sétérées en parcelles dispersées366, il doit être apparenté aux Servini paysans cités plus haut. La production et la transformation du pastel favorise son enrichissement, puisqu’un rajout est effectué sur son manifeste : « creys per lo moli pastelie que ha fayt an serena, creys tan per lo bastimen de la boria e del moli et am capelas que ha faitas ». Le total de son estime atteint 66,5 £. Quelques savetiers de Castelnaudary sont propriétaires de fermes au début du xve siècle : B. Sarrasi, par exemple, déclare ostai, borde, campmas, table de savetier, perçoit des cens, possède plus de 13 ha de terres et est estimé 123,75 £, Jean Sacrotz, lui aussi savetier, déclare ostai, campmas, taula, plus de 20 ha et est estimé 160,75 £. D’autres savetiers sont beaucoup plus modestes, J. Ribiera ne possède que 0,61 ha et est coté 17 £367 ; trois savetiers figurent dans le registre de 1496, ils déclarent entre 0,35 et 0,74 ha.

  • 368 A.D.A., 3 E 9466 f° 32 v°.
  • 369 A.D.A., 4 E 076/CC 80, 1447, f° 3 r°.

174Des marchands sont souvent propriétaires de fermes, c’est le cas, à Castelnaudary, de Thomas Membrat, Jean Franchi, J. Villaroux, Gibert Jean, H. Pintonis, J. Bernard, G. de Rivo, Bertrand Coffolenti, les Cap de Biou. Ils possèdent souvent les plus grandes propriétés taillables, en 1496, Julyan Villaroux déclare quatre campmas et une condamine, le seigneur de la Rouquette, Jacques le Roy, deux fermes, il était qualifié de marchand quelques années plus tôt et venait alors de Béziers ; un Martin Le Roy, bourgeois, vivait à Castelnaudary en 1472, Jacques est peut-être son neveu368. Ces marchands sont souvent consuls, estimateurs, fermiers des biens communaux. Jean Cap de Biou prend ainsi à ferme le poids de la ville et les tables du mercadal369.

  • 370 Dossat (Y.), Saisimentum..., op. cit., pp. 194-196.

175Les patronymes de certains des propriétaires de domaines de Castelnaudary du xve siècle figurent dans le Liber reddituum, leurs familles exercent alors une activité commerciale ou artisanale puisqu’elles possèdent une ou plusieurs « tabula mercatalis ». C’est le cas des Lupati (il existe deux familles Lobat au xve siècle), Lorda, Barta, Gauberti, Sicardi, Sabateri, Cam, de Nabona, Ricardi, Barravi, Andusa, Magistri... D’autres patronymes sont alors portés par les « majores et meliores » qui prêtent serment dans le Saisimentum, Etienne Martini jurisconsulte, Arnaud de Calvairaco, Bernard Amelii, notaire, Pons Martini, marchand. Plusieurs Lupatii et des marchands, tels Guilhaume-Bernard Durandi, Pierre Ricardi, Bernard Ricardi, Arnaud de Andusia, prêtent, eux aussi, serment370. La plupart de ces familles doivent avoir le même type d’activités au xve siècle.

  • 371 A.D.A., 3 E 1501. Dans ce registre, plusieurs marchands achètent des terres ou des domaines : f° 7 (...)
  • 372 A.D.A., 3 E 9456 f° 63 v°, 1463.
  • 373 A.D.H.G., 3 E 10109, 3 E 10111 et 3 E 10112.
  • 374 A.D.H.G., 3 E 10109 f° 27 v°.

176Les marchands investissent alors, très nettement, dans les biens-fonds ruraux371. Les deux frères Baronate, marchands de Castelnaudary (mais certains membres de la famille vivent à Issel), prennent des fermes en usufruit, achètent des terres372. On voit, grâce aux registres du notaire Cassaing373qui semble se spécialiser dans cette clientèle, Sicard Auzelaire et Raymond de Bonafide, deux marchands de Montesquieu, être particulièrement actifs en campagne. R. de Bonafide donne des animaux en gasaille, achète des terres, prête des grains ou de l’argent. Les prêts sont consentis à des habitants de Montesquieu et des villages voisins, mais aussi à des gens de villages plus éloignés, comme Auragne374. Sicard Auzelaire a une plus grande envergure. Il achète de nombreuses terres, trois sétérées de terre et pré à Montesquieu, puis neuf parcelles (terres, vignes, prés) et une maison à Nailloux, pour 91 écus, et, en 1488, une ferme à Belbèze, pour 200 écus. Il produit et achète du pastel, qu’il transforme dans le moulin à pastel qu’il possède aux Bastards. Il tient la ferme des bancs de macelliers de Montesquieu puisque deux macelliers reconnaissent lui avoir loué les bancs du lieu, pour trois ans, pour 81 £ tr. Des laboureurs reconnaissent lui devoir de l’argent pour des achats de bœufs ou en raison de prêts amicaux. Il fait construire ou effectue des travaux dans une de ses possessions à Ayguesvives : Galhard et Antoine Tostante, tuiliers, habitant à Avignonet, promettent, le 31 octobre 1488, de lui fabriquer et de lui porter 3 000 tuiles tant « tegulorum » que « tegularum » (tuiles et briques) bonnes et marchandes et bien cuites.

  • 375 A.D.A., 3 E 1493 f° 65 r° et f° 64 v°.
  • 376 A.D.A., 3 E 1493 f° 131 r° et f° 153 v°, 4 mai 1420.
  • 377 A.D.H.G., Ms. 635 p. 36.
  • 378 Les Avessens deviennent des nobles importants. Durand d’Avessens, en 1565, achète les 3/12 de la j (...)

177Les marchands, en Lauragais, non seulement achètent des terres, mais se constituent une clientèle d’emprunteurs qui peuvent, dans un premier temps, constituer des rentes sur leurs terres pour apurer leurs dettes et, ensuite, céder leurs biens, sûrement à bas prix. On voit, par exemple, le 18 octobre 1418, par un acte intitulé « cessio » en faveur de P.-R. Ricardi, Jean et Jeanne Faioli reconnaître lui devoir 18 £ tournois en raison d’un prêt amical. En échange, ils lui cèdent un « arrendament » de 14 setiers de froment que Durand et Pierre Ricardi, de Saint-Papoul, leur font tous les ans, jusqu’à ce qu’ils lui aient rendu les 18 £. On s’aperçoit que la veille, le 17 octobre, P. R. Ricardi leur a vendu un jardin pour 3 £ tournois375. P.-R. Ricardi, nous l’avons vu, fait aussi le commerce des animaux. Il vend du pastel : Jean Augeri, de Baixas, dans le royaume d’Aragon, reconnaît lui devoir 50 florins d’or et demi pour achat de quatre sarcinées et deux quintaux de pastel376. Il n’existe pas en Lauragais de livres de raison du xve siècle, mais les registres notariaux permettent amplement de voir ces notables locaux à l’œuvre dans les campagnes. Certaines de ces familles de marchands intègrent la noblesse. Guilhem de Borderia, un marchand, fils ou petit-fils de Pierre, lui aussi marchand, propriétaire de la borie de Castelnou, devient seigneur de Montgiscard, en 1517. Martin Le Roy, avoue, en 1554377, « terre et seigneurie de La Rouquette, avec justice haute, moyenne et basse, maison, métairie, prés, bois, taillis et censive et un fief assis au lieu et terroir de Castelnaudary ». Son grand-père, Jacques, un marchand qui accède, parfois, au consulat, est dit « senhor de la Roqueta », dans les estimes de 1496. Il est possible, en Toulousain, d’acheter un fief moyennant le paiement au roi d’un droit de franc-fief, mais comme La Rouquette n’apparaît pas en tant que fief dans les aveux des xive et xve siècles, c’était, peut-être, une simple ferme que son propriétaire veut et réussit à transformer en fief. René Germain note ce phénomène en Bourbonnais, la bourgeoisie achète au xve siècle, des exploitations rurales et, peu à peu, va les tenir en fief. À la fin du xvie siècle, Durand d’Avessens, dont la famille s’est enrichie grâce au commerce du pastel (au xve siècle, ses ancêtres sont marchands et gros propriétaires fonciers), achète 1/12 de la justice du lieu à Jean de Garaud (qui l’avait lui-même acheté à Jean de la Tour)378.

178Les mieux pourvus en biens-fonds ruraux ont aussi des possessions dans les villages voisins, divers propriétaires de domaines situés à Montesquieu possèdent, par exemple, des biens à Montgiscard, entre autres, D. de Montech, P.-J. Advessen, Guilhem Serny. Sicard Auzelayre ne déclare que 3,21 ha sur Montesquieu en 1485 mais à peu près 60 ha sur Les Bastards, dont un domaine. Son estime est de 386 £ 15 sous (il possède un cabal allivré à 250 £, sans compter le pastel, dit le document) à Montesquieu et 318 £ aux Bastards. Encore une fois, la vision donnée par les estimes est imparfaite, les possessions d’un certain nombre de déclarants sont sous-estimées.

  • 379 A.D.A., 4 E 076/CC 10 f° 166 v°, H. Ysalguier, A.D.A., 4 E 076/CC11 f° 215 r°, J. Siguier.

179Quelques Toulousains commencent à investir dans les campagnes du Lauragais, ce qui va s’accentuer au siècle suivant. À Castelnaudary, ils sont deux, Hodet Ysalguier et Jean Siguier. H. Ysalguier détient, dès 1463 au moins, la métairie noble de Canast, au sud-est de la ville379. Si Hodet Ysalguier est un investisseur, Jean Siguier a probablement hérité de son campmas, une hostellerie de Na Siguiera figure dans les registres notariaux du début du xve et des estimés portent alors ce patronyme. A Montgiscard, deux Toulousains possèdent des domaines, ils sont trois à Montesquieu, en 1485. L’un d’eux, Mossen Bernard Dalby (un prêtre ?) habitait à Montesquieu lors des précédentes estimes, un autre, Ramon de Villela, porte le nom d’une famille qui prête serment dans le Saisimentum, parmi les nobles du lieu. On conserve, si l’on peut, les biens patrimoniaux après avoir quitté son lieu d’origine.

  • 380 A.D.H.G., 3 E 10154 f° 322 r°. Sa mère, dame Florena, et Arnaud Othonis, le second époux de celle- (...)
  • 381 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 80 v°.

180La femme, en Toulousain, n’est pas systématiquement exclue de l’héritage, elle peut recevoir une partie des biens-fonds, même s’il y a des garçons ; elle peut être propriétaire de domaines, on en trouve quelques exemples dans les registres de notaires. Ayceline, la fille de Pierre Furnerii, a hérité de celui-ci, en 1397, la borie des Fourniers à Montgiscard380. En 1407, un autre Pierre Furneri, foulon, et Lombarde, son épouse, donnent en métayage la borie de celle-ci à Durand de Rivo381.

  • 382 A.D.H.G., 5 E 67 f° 49 r°.
  • 383 A.D.A., 3 E 9450, non folioté.
  • 384 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 179 r°, 1408.
  • 385 A.D.H.G., 3 E 10097 f° 58 r°, cf. « Les modes de faire-valoir ».
  • 386 A.D.H.G., 3 E 10133, non folioté, 1481-1495.
  • 387 A.D.A., 3E 9444 f° 64 v°.
  • 388 A.D.A., 3 E 9444 f° 133 v°.
  • 389 A.D.H.G., 3 E 10097 f° 24 v°.

181Certains manifestes, dans les estimes, répertorient les biens d’associations (cf. supra), beaucoup d’entre elles possèdent des fermes. C’est le cas de trois associations dans le registre le plus ancien de Montesquieu, de huit dans celui de 1485, elles sont formées le plus souvent de deux ou trois frères, sinon d’« héritiers de X », par exemple, les héritiers de Pe (Pierre) Seran déclarent deux ostals, un campmas et une quinzaine d’hectares, ils sont cotés 155 £ 10 sous382. D’autres héritiers ont divisé l’héritage : Michel et Bernard Gauthié ont hérité chacun de la moitié de la ferme de leur père, les fils de Michel déclarent chacun un tiers de ferme « als auriols ». En 1496, à Castelnaudary, sur 61 manifestes provenant de propriétaires laïcs de fermes, 11 sont réalisés par des « héritiers un tel » et 13 frères se partagent six fermes, déclarant chacun la moitié ou le tiers de celle-ci. En 1516, sur 57 manifestes de propriétaires laïcs de fermes, 11 sont faits par des « héritiers un tel » et 11 frères se partagent cinq fermes. En 1535, sur 90 manifestes de laïcs propriétaires de fermes, on trouve toujours 11 manifestes faits par des « héritiers un tel », certains groupements étant déjà mentionnés en 1496, on peut supposer qu’on a affaire à des communautés taisibles. Communautés qui doivent exister aussi quand beau-père et gendre, père et fds prennent des fermes à court terme ou en tenure. Ces associations doivent correspondre à des familles de paysans et non d’investisseurs. On les voit apparaître au hasard des actes notariés : une communauté des héritiers de P. Malengranier possède des ostals et une ferme383 ; plusieurs frères et sœurs, héritiers de feu Jean Martini, achètent en commun une pugnère de terre inculte, à Montbrun, pour 25 s tournois384. Un homme et son neveu s’associent pour effectuer des travaux concernant du pastel « comme père et fils »385. Tous ces individus constituent bien des communautés même si le terme n’est pas employé. J’ai signalé plus haut le testament de Raymond Boqueri, un propriétaire de campmas qui prévoit une vie en communauté pour sa femme et ses enfants et, pour ceux-ci, l’impossibilité de récupérer une partie de l’héritage avant dix ans. Des adrogations apparaissent : la fille d’Arnaud Daganos, laboureur de Montgiscard, se marie avec Michel Marguesii, un sartre d’Ayguesvives. Elle reçoit en dot la moitié des biens de ses parents : « maisons, jardins, prés, pâtures, bois, vignes, malhols, vergers, champs et toutes les terres cultivées et incultes », une tunique de drap rouge d’Angleterre, un lit garni. Le mari doit apporter 20 écus (à 27 sous 6 d tr) et une cote de drap rosati violati d’Angleterre. Les jeunes époux doivent « facere unum domicilium unum panum comedendo unum vinum bibendo » avec les parents de la jeune femme386. Pierre Alacris donne un campmas à son gendre, A. Sermentis, en 1409387, ils le louent tous deux en 1410 à Bernard et à Juliane Destensa388. Quelques manifestes sont réalisés par un homme et son gendre. Des communautés s’établissent entre étrangers : Bertrand Raymond, de Vieillevigne, donne la moitié de ses biens à un laboureur, Bernard Deyme : ils doivent, ensemble, cultiver, labourer les terres et les vignes, payer les dettes et élever la fille du donateur ; ils doivent partager le fruit des terres. Le donateur aura la moitié des biens que le bénéficiaire amènera dans la maison. Si le donateur prend femme d’ici neuf ans, le bénéficiaire doit « respondere » de la moitié de la dot de la femme, c’est-à-dire fournir l’augment389.

6. La ferme lauragaise, lieu d’habitat et d’exploitation

182Les fermes roturières apparaissent dans la documentation plus fréquemment que les fermes nobles. Moins de 3 % d’entre elles (sur un corpus supérieur à 550) sont en mauvais état, qualifiées de « logar », « paretz » ou « tapias ».

a. Les bâtiments : leur nombre, leur affectation

  • 390 Marandet (M.-C), L’habitat isolé dans le diocèse de Saint-Papoul..., op. cit.
  • 391 Ce qui se produit aussi en Provence, d’après les baux de facherie, Stouff (L.), Le mas arlésien. C (...)
  • 392 A.D.H.G., 3 E 10162 f° 23 r°, 1407.
  • 393 A.D.H.G., 10162 f° 60 v°, 1409.
  • 394 A.D.H.G., 3 E 10164 f° 104 v°, 1425.

183J’ai montré dans un article antérieur390, la permanence de l’habitat rural sur un même site, ce qui ne permet pas les fouilles archéologiques, il est donc nécessaire de faire appel aux documents pour avoir une idée du bâti. Les sources médiévales ne sont malheureusement pas très riches sur ce point. Ainsi, les registres notariaux n’ont pas livré le moindre prix-fait de ferme, les actes de vente et les baux ne décrivent pas les exploitations, ils se contentent d’indiquer, parfois, qu’elles comportent plusieurs bâtiments : « boria curri bastimentiis, hospiciis », maisons d’habitation (à l’usage des multiples héritiers ou du propriétaire et des locataires) et bâtiments d’exploitation (étables, granges, porcheries, poulaillers). La borie de P. de Borderia, à Montgiscard, est baillée en métayage avec ses domibus. Le bail mentionne la présence d’un moulin à pastel, et, dans le même local, d’une « botiga pastelli ». La maison d’habitation comporte un étage, au moins, puisqu’un « stagia alta » est réservé au bailleur391, sauf un four (« orneo ») qui est au service du locataire. Le foin est stocké dans un fenil (« fenerio »), la paille dans un pailler (« in palheria »). Plusieurs maisons sont attestées dans quelques exploitations, ainsi Pierre Fabri, du campmas des Fabre, vend des murs et la parcelle sur laquelle ils sont construits « totas illos paretes sive locarium in quo sunt costruite e hedifficare in capmasio Fabrorum », à Montlaur ; le vendeur, l’acheteur (P. de Rustrello), Bernard Fabri et un autre individu sont confronts, on peut supposer qu’ils possèdent, eux aussi, des bâtiments392. Plusieurs ostals et bordes apparaissent dans la grange que l’abbaye de Boulbonne possède à Belbèze, dans le campmas de Pechbosone, à Montlaur393. Dans un acte concernant une borie de Montgiscard, il est fait mention de « tectis, tegulis » et autres dépendances394. Nous avons vu précédemment qu’il existe au moins six maisons dans le campmas des Fourniers, à Montgiscard, dès 1292.

  • 395 Le terme est employé dans le registre de Castelnaudary de 1553.
  • 396 Sur le cadastre napoléonien, ce hameau compte 16 bâtiments.
  • 397 F. Mistral donne au vocable passado les sens de sentier, droit de passage, allée d’une maison. D’a (...)
  • 398 A.D.H.G., 5 E 66 f° 108 r°, 108 v°, 109 v°.

184Avec la reprise démographique, les héritiers d’une ferme, plus nombreux, construisent chacun leur maison, le campmas devient peu à peu un hameau, un mazatge395, courant xvie siècle. Onze contribuables sont ainsi domiciliés aux Loubats, à Castelnaudary, en 1553, et détiennent, en tout ou partie, six maisons dont cinq en solier, une petite borde, une borde en pezeing, un moulin pastelier396. Parfois, on partage le bâtiment d’habitation ; dans le campmas den Suzas, à Castelnaudary, la maison est divisée entre quatre héritiers, d’autres ont une borde chacun. Les co-propriétaires de ces fermes possèdent une part de ce que les documents appellent un « comunal », souvent formé de broussailles ; dans le cas des Loubats, c’est une petite parcelle, d’au maximum 80 ares, qui semble proche des bâtiments, et doit servir regrouper cour, aire à dépiquer. On mentionne parfois l’existence de servitudes de passage : dans le registre d’estimes de Montesquieu dit de 1409, les trois frères (?) Domench, Estève et Miquel de Montech ont chacun un tiers d’un campmas et deux liuralats en « sol, ort et passada397 », soit 3,7 ares398.

185Les documents médiévaux ne fournissent aucun renseignement sur la disposition des maisons dans ces fermes à multiples feux. Si l’on se réfère à ce qui existe aujourd’hui pour la ferme des Loubats, continuation du campmas des Lobats, à Bosc Ramonenc, on avait, peut-être, des bâtiments parallèles entre eux, regroupant sous le même toit, logement de l’exploitant et bâtiments de service. Il n’existe pas en Lauragais, en 1700, d’après les plans parcellaires de Castelnaudary et d’Ayguesvives, où sont dessinées quelques fermes, de bâtiments ordonnés autour d’une cour (si ce n’est un ou deux cas) ; la majorité des fermes compte un seul bâtiment. On peut supposer qu’elles se présentaient ainsi à la fin du Moyen Âge. Les fermes devenues des hameaux sont généralement aux mains de propriétaires exploitants ; d’autres fermes appartiennent à des investisseurs urbains (marchands, juristes) qui les donnent en faire-valoir indirect. J’avais précédemment supposé, au vu de quelques fermes actuelles, qu’une « maison de maître » jouxtait le bâtiment réservé aux exploitants, je ne le pense plus aujourd’hui car, dans quelques baux de fermage ou de métayage du xve siècle, le propriétaire, qui détient un ou plusieurs « ostals » en ville, se réserve une chambre dans la ferme « au cas où il y aurait la peste » (cf. infra). Rien n’indique d’ailleurs qu’au Moyen Âge et même jusqu’au xviiie siècle, la mode était de séjourner l’été à la campagne. Le compoix de 1700 de Castelnaudary ne mentionne pas de maison de maître, même pour les fermes qui en comportent une au xxe siècle ; seules exceptions, deux ou trois « châteaux », terme un peu exagéré, sont signalés. Les propriétaires pouvaient toujours, comme au Moyen Âge, se réserver une pièce dans le logement de l’exploitant.

  • 399 Marandet (M.-C), L’équipement de la cuisine dans le Midi toulousain d’après les testaments et les (...)
  • 400 On traduit le plus souvent par chai, Gaffiot donne aussi le sens de garde-manger. Étant donné qu’o (...)
  • 401 Wolff (Ph.), Inventaires villageois du Toulousain, xive-xve siècles, Bulletin philologique et hist (...)

186J’ai étudié, il y a quelques années, des inventaires provenant de Castelnaudary et de quelques villages, bourgades et fermes du Lauragais399. Ils sont très avares de renseignements quant au nombre, au plan des bâtiments et à l’organisation des espaces non bâtis. Les notaires se contentent, le plus souvent, de donner les confronts de l’hospicium, puis signalent : « dans cet ostal nous avons trouvé les biens suivants ». Sur 28 maisons rurales inventoriées, sept comportent plusieurs pièces. La maison la plus courante comprend aula, salle commune, sorte de pièce à vivre qui regroupe les fonctions de préparation et cuisson des aliments, sert de résidence tout au long de la journée et parfois aussi de chambre, camera et penus400. La plus grande maison inventoriée est celle de Pierre Carbonnelli, de Labécède, qui est artisan ou marchand ; son hospicium principal comporte entrée, étable, aula, cuisine, grande chambre, petite chambre, pastanderia. Les inventaires villageois publiés par Ph. Wolff pour le Toulousain, par l’abbé Loubès pour la Gascogne ne sont guère plus précis quant à l’organisation des maisons villageoises et des fermes401. Parmi les inventaires publiés par Philippe Wolff, figurent ceux de quelques ostals situés hors des murailles des villages, l’un d’entre eux, à Labruyère-Dorsa est peut-être une ferme, son propriétaire possède cinq parcelles dont deux prés ; le notaire ne signale qu’une camera dans l’ostal. Un campmas de Clermont comprend aula et camera.

  • 402 A.D.H.G., 3 E 10137 f° 84 v°, 1459, le locale appartient à un docteur ès lois de Carcassonne.
  • 403 La maison du castrum de la bordure méridionale du Massif Central, sous la direction de M.-G. Colli (...)
  • 404 Marin-Rabier (A.C.), Montpellier à la fin du Moyen Age, d’après les compoix, 1380-1450, Thèse de l (...)
  • 405 Sournia (B.) et Vayssettes (J.-L.), Montpellier : la demeure médiévale, Imprimerie Nationale, 1991 (...)

187Un acte de location montre comment était constituée une maison villageoise : Pierre den Rua, satire de Montgiscard (dit laboureur dans des actes postérieurs) et Jeanne, son épouse, prennent en location un » locale » (emplacement) où se trouvent divers éléments constitutifs d’une maison, sans que le mot soit employé. Elle comporte, au rez-de-chaussée, une étable pour deux chevaux et un chai (penus) où se trouve un pressoir à raisin ; à l’étage, une grande salle et deux pièces (aula et camera), les deux pièces restant « ad tortissandum ». Au-dessus de cet étage, un troisième niveau comprend une petite camera et un granerium. La maison est, en fait, en cours de construction. Le couple doit terminer « ce qui est à construire entre l’étable et le chai », il doit aussi « tortissare » les deux chambres, c’est-à-dire garnir de terre les clayonnages des murs et même « facere quoddam paravet() in introytu et in capite gradarii dicti aule », le tout à ses frais402. La partie en rez-de-chaussée sert d’étable et de cave, la partie habitation est à l’étage, un escalier extérieur relie les deux niveaux. Un troisième niveau, plus réduit, permet de stocker les grains. On retrouve au moins deux niveaux lors des fouilles effectuées dans des castra de la Montagne Noire (Cabaret, Durfort). Les maisons se présentent sous la forme de maisons-blocs, d’une surface au sol, pour certaines, supérieures à 50 m2, pourvues généralement d’un étage ; le rez-de-chaussée assure des fonctions multiples, abri pour les animaux, stockage, cellier, la partie habitat étant plutôt à l’étage403. Aujourd’hui encore, dans la Montagne Noire, la partie basse des maisons sert de lieu de stockage, la partie haute à l’habitation. La même organisation existe en ville, ainsi, à Montpellier, d’après les compoix, « la maison la plus simple présente deux portes en rez-de-chaussée, la plus grande ouvre sur l’ouvroir, qui sert de boutique, d’atelier, d’écurie..., l’autre sur un couloir terminé par un escalier raide qui monte à l’étage où se trouvent les pièces d’habitation... peu nombreuses »404. Toujours à Montpellier, B. Sournia et J.-L. Vayssettes donnent des exemples de maisons élémentaires d’un corps à un ou deux étages, « son emprise est limitée à la portée moyenne des pannes usuelles, soit environ 3,5 à 5 mètres »405.

  • 406 Pariset (F.), Économie rurale, mœurs et usages du Lauragais..., op. cit., (Aude et Haute-Garonne), (...)
  • 407 Pariset (F.), Économie rurale, industrie, mœurs et usages de la Montagne noire..., op. cit., p. 17 (...)
  • 408 L’identification des fermes a été faite par Bayle (J.), La commanderie..., op. cit.

188On peut supposer que les fermes lauragaises devaient ressembler un peu à ces maisons, stockage des réserves alimentaires, des outils, voire hébergement des animaux au rez-de-chaussée, habitation à l’étage. Dans la deuxième moitié du xixe siècle, d’après les descriptions de François Pariset, dans la plaine, la ferme-type comportait ces deux niveaux : au rez-de-chaussée, étable (on entrait par celle-ci) et cuisine, à l’étage, les chambres406 ; en Montagne Noire, une pièce unique au-dessus de l’étable, pourvue de deux petites ouvertures nord et sud, servait pour le métayer ; des annexes étaient réservées au bétail407. Sur le plan figuré des environs de Calmont apparaissent un bâtiment de stockage et trois fermes ; l’une d’entre elles comporte un étage en encorbellement et des murs à pans de bois. Les toits sont couverts de tuiles408.

  • 409 A.D.A., 4 E 076/ CC 11. Le moulin à eau de Combejuliane réapparaît dans le compoix de 1700, A.M.C. (...)
  • 410 A.D.A., 4 E 076/CC 12 f° 23 v°.
  • 411 A.D.A., 4 E 076/CC 12 f° 63 v°.
  • 412 A.D.A., 4 E 076/CC 12 f° 163 r°.
  • 413 A.D.A., 4 E 076/ CC 14 1553 F° 297 v°.
  • 414 A.D.A., 4 E 076/ CC 14 et CC 15.
  • 415 A.D.A., CC 15 f° 56 v°.
  • 416 A.D.A., CC 15 f° 252 r°.
  • 417 L’aire de dépiquage est appelée sol (en langue d’oc) dans les estimes, area (en latin) dans les re (...)
  • 418 Dans les registres de Montgiscard de 1489, d’Aigues-Vives de 1489, de Montesquieu de 1485, et des (...)
  • 419 Au xviie siècle, en Lauragais, le dépiquage effectué par une manade de chevaux permet de traiter 1 (...)

189Les registres d’estimes du xve siècle n’apportent, eux aussi, que peu de renseignements, en particulier à Castelnaudary et Fendeille, les estimateurs se contentant, le plus souvent, de noter « un campmas à tel endroit, de telle superficie ». Les bâtiments servant à la transformation des produits de l’exploitation, moulins à blé ou à pastel n’apparaissent pas ou fort peu. On ne sait même pas si une aire, un jardin accompagnent les bâtiments. Le registre de 1516 est aussi discret, le moulin à eau de la ferme de Combe Juliane appartenant à Julyan Villeroux est seulement indiqué en confront409. Il faut attendre le registre de 1535 pour obtenir quelques précisions, on signale des moulins dans quatre fermes : moulin pastelier au campmas de Jean Guimbaud à Cogurone410, moulin à vent au campmas des héritiers de Guilhem Lyonis, toujours à Cogurone411, moulin pastelier au campmas de Guilhem Lobat jeune à Bosc Ramonenx412, moulin pastelier et moulin à vent au campmas des Cros. En 1553, une tuilerie et un moulin à vent sont déclarés par Jean Dauriol, avec château et borde en pezeing413. Plusieurs bâtiments apparaissent alors dans quelques fermes414 : P. Albouy mage détient une borie en solier (étage) et deux bordes en peseing à la Pousacque415, Jean Dreuilhe, une borie en solier et une borde en pezeng à Font Lauzo416. Les registres d’estimes du Lauragais occidental sont un peu plus détaillés ; même au xve siècle, les abords des fermes apparaissent avec moulins, jardins, aires à dépiquer417. On signale un jardin et une aire à dépiquer dans une ferme sur deux, un moulin pastelier dans une ferme sur sept ; les moulins à vent ou à eau sont très rares418. Les aires à dépiquer peuvent être communes à plusieurs fermes ; d’autres sont situées sur de petites parcelles, proches de la ville, elles sont parfois accompagnées d’une borde. Certaines appartiennent à des individus n’ayant que peu de terres, ils doivent les louer, moyennant le paiement d’un droit419.

  • 420 A.D.H.G., 3 E 18270 f° 35 r°.
  • 421 A.D.H.G., 1 G 801, 1292.
  • 422 Commune, Haute-Garonne.
  • 423 Partak (J.), La seigneurie hospitalière de Caignac, op. cit., p. 79.
  • 424 Ramière de Fortanier (J.), Recueil..., op. cit., p. 167.
  • 425 Ib., Villeneuve p. 721, Avignonet p. 185.
  • 426 A.D.H.G., 1 G 801.

190Les moulins bâtis dans les fermes apparaissent peu dans les registres notariés puisqu’ils ne font généralement pas l’objet de vente ou de location. Un moulin à eau est construit dans le campmas des Rigaldi, le seigneur du bien, qui lauzime la vente du domaine, prévoit les taxes à payer par l’acheteur s’il veut édifier un autre moulin420. Deux autres fours sont construits, un dans la borie de La Bordaria à Montgiscard, l’autre dans le campmas des Fourniers421. La rareté des mentions tient au fait que ces fours, le plus souvent, ne constituent pas un bâtiment annexe. À Caignac422, il existe des fours banaux mais le commandeur de l’Hôpital Saint-Jean de Jérusalem autorise, à partir de 1255, la construction de fours à pain dans sept campmas et un casai423 ; en échange, les paysans versent un cens fixe en froment (droit de fournage). A Auterive, les habitants des écarts peuvent avoir des fours à cuire le pain dans leurs maisons, pour leur propre usage, sans rien payer au seigneur424, à Villeneuve-la-Comptal et Avignonet, tous les habitants peuvent en construire librement425. Des activités artisanales sont exercées dans quelques fermes : une forge existe aux Montaners, borie située dans la juridiction de Montgiscard, on l’apprend par un registre de reconnaissances de 1447426. Cette ferme apparaît à plusieurs reprises dans les registres notariés sans qu’il soit fait mention de la forge.

191La cour de ferme avec sa mare, son tas de fumier, n’apparaît guère dans les documents.

  • 427 Ces puits situés à l’intérieur des maisons et, souvent, dans la cave, sont attestés dans d’autres (...)
  • 428 Parce que s’y trouvent deux seaux en fer, dont le poids est soigneusement indiqué par le notaire, (...)
  • 429 A.D.A., 4 E 076 CC 11 f° 226 r°. Cette mare, très importante, de deux carterias, soit 17,5 ares, e (...)
  • 430 A.D.H.G., 5 E 67 f° 131 v°.
  • 431 A. D. H. G., 3 E 10164 f° 37 v°.

192L’approvisionnement en eau doit s’effectuer, pour l’essentiel, par des puits, la nappe phréatique étant à faible profondeur (quatre ou cinq mètres). On en trouve encore, actuellement, dans la cour, le jardin, ou au ras du mur de façade de quelques fermes. Dans les villages, ils sont, fréquemment, creusés dans les caves des maisons (par exemple à Ricaud, Mas-Saintes-Puelles)427. Ceux situés en plein champ sont recouverts d’une voûte de pierre, une représentation de ce type de puits figure dans les plans du compoix de 1700 de Castelnaudary. Un seul inventaire du xve siècle, celui d’une hôtellerie de Castelnaudary, en mentionne un428. Pour abreuver les animaux, les ruisseaux doivent être utilisés, ainsi que les mares. Elles n’apparaissent dans les estimes (sous le terme pesquier, pesquié qui signifie à la fois mare et vivier), qu’en cas, probablement, de commercialisation du poisson qui y est élevé. Trois pesquiers sont, d’après les registres, situés dans une ferme : deux à Castelnaudary (dont un, dans une ferme appartenant à Julyan Villaroux, à Saint-Michel de Cogurone429), un à Montesquieu, qui se trouve dans un petit payssieu proche de la ferme de G. Baroquie 430. D’autres pesquiers, non situés dans une ferme, sont mentionnés dans les estimes ou dans les registres de notaires. L’un d’entre eux, à Ayguesvives, déclaré par Ramon de Pechbusque, se trouve sur une parcelle comportant borde, verger et four « davant la vila » ; ce terrain regroupe tout ce qui est utile à l’approvisionnement de l’ostal de Ramon de Pechbusque, situé dans le fort. Un autre, sur une parcelle proche de Montgiscard, appartient à un aubergiste du lieu : jardin avec petite borde « cum pissina sive pesquier »431.

  • 432 Leroy (P.), La commanderie..., op. cit., p. 140.
  • 433 A.D.A., 4 E 076/CC 10 f° 95 v°. Il possède aussi sur cette parcelle un des pesquiers signalés.
  • 434 A.D.H.G., 5 E 66, on passe du f° 133 r° au f° 35 r°.

193Certaines fermes comportent des cassieux, c’est-à-dire des garennes. Frédéric Mistral donne comme définition : enclos de broussailles entassées près d’une ferme pour attirer les lapins sauvages. En Lauragais, ces aménagements sont encore très fréquents. À Renneville, le commandeur possède une garenne : « cassino domini preceptoris », « garena dicti domini preceptoris »432. Les cassieux mentionnés au xve siècle dans les estimes sont aux mains de gros propriétaires non paysans, tels Julyan Villaroux, Pierre Amyel ; le cassieu de ce dernier est installé sur une condamine de 9 sétérées433. À Montesquieu, un déclarant (il manque le début de son manifeste car deux pages ont été arrachées, ce qui reste de son allivrement atteint 244 £) détient une galinière, un cassieu, un colombier, ostal et ort dans les vieux fossés434. Le semi-élevage de lapins existe donc, au moins pour certains. La liberté de la chasse figure, nous l’avons vu, dans beaucoup de coutumes (Labécède, Saint-Félix...), ainsi que la liberté de vendre du gibier sur les marchés (Montgeard, Revel, Villefranche...).

  • 435 Notées dans les estimes à partir de 1553, à Castelnaudary, A.D.A., 4 E 076/ CC 14 et CC 15.
  • 436 Frédéric Mistral dans son dictionnaire, Trésor doit Felibrige, le traduit par couverts.
  • 437 Sept apparaissent dans le registre « dit de 1409 ». Trois se trouvent dans des fermes, une sur une (...)
  • 438 A.D.H.G., 3 E 10164 f° 104 v°, 1425.
  • 439 Un arceau correspondait à une ferme d’un labourage, c’est-à-dire d’une paire de bœufs.
  • 440 Cf. la partie « Annexes ».

194Les dépendances nécessaires pour conserver les récoltes et pour abriter les animaux ne sont guère mentionnées dans les documents médiévaux, si ce n’est sous la vague appellation de « bastimentis », dans les registres de notaires. Les fonctions de stockage de récoltes (foin, paille), d’abri pour le matériel (araires, charrettes, outils à main) peuvent être assurées par les bordes que l’on trouve dans les campmas435 et aussi par ce que les registres du xve siècle appellent des capelas (littéralement chapelles436). Quelques-unes sont mentionnées, proches d’un campmas, d’une borde ou même d’un moulin, mais dans une seule localité, Montesquieu-Lauragais437. Une borie de Montgiscard possède « tectis, tegulis » et autres dépendances438, ces tectis sont, peut-être, des couverts, comme les capelas. Les fermes lauragaises datant du xixe siècle comportent des hangars servant à abriter le matériel agricole, constitués d’un toit sur charpente reposant sur des piliers de moellons calcaires ou de briques ; qu’on appelait, alors, des arceaux, car les piliers sont reliés par des séries d’arcades en plein cintre439 ; les capelas sont, peut-être, les ancêtres de ces hangars. Les dessins de fermes du xviiie siècle réalisés sur les plans parcellaires accompagnant les compoix d’Ayguesvives et Castelnaudary440 ne montrent pas ce type d’abri, mais des « couverts » sont mentionnés dans les manifestes de Castelnaudary.

  • 441 Les fouilles réalisées par Bernard Pousthomis au Castlar de Durfort (Tarn), ont permis de trouver (...)
  • 442 du Cange indique qu’apotheca signifie domuncula. Cette apotheca est probablement l’équivalent de l (...)
  • 443 A.D.A., 3 E 9462 f° 213 r°.

195La conservation des grains (en Lauragais, on dépique immédiatement après la moisson, le blé n’est pas stocké en gerbes dans une grange) peut s’effectuer dans des greniers (granerius). L’inventaire après décès d’un chanoine de Castelnaudary en mentionne, la maison que doit terminer Pierre den Rua à Montgiscard en comporte un au-dessus de l’étage d’habitation441. Les textes montrent que, parfois, le granerius n’est pas un grenier sous les combles, comme nous l’entendons aujourd’hui, mais un local où l’on entrepose les grains, local qui peut être au niveau du sol puisqu’on peut y trouver des silos, c’est ce que l’on voit dans la maison paternelle d’Arnaud Franchi de Souilhanels, sise dans le barri Sainte-Croix de Castelnaudary, décrite à l’occasion d’une vente entre parents. On y trouve une étable, un granerius où il y a cinq crozes, apotheca442 pastelli, aula, camera, corredors, etc.443.

  • 444 Ceux fouillés par Jean-Paul Cazes à Lasbordes (Aude), ont une profondeur de 1,60 m à 2 mètres et u (...)
  • 445 En Roussillon, les fouilles archéologiques ont mis à jour des silos domestiques (de deux mètres de (...)
  • 446 A.D.H.G., 3 E 10097 f° 5 r°.
  • 447 A.D.A., 3 E 1497 f° 57 v°.
  • 448 A.D.A., 4 E 076/ CC 54.
  • 449 Larenaudie (M.-J.), Les famines en Languedoc..., op. cit., p. 28.
  • 450 Wolff (Ph.), Commerces..., op. cit., pp. 183-185.
  • 451 Amouretti (M.-C), La transmission des connaissances agronomiques dans l’Antiquité : l’exemple des (...)
  • 452 Puig (C.), les campagnes roussillonnaises..., op. cit., p. 488 et Puig (C), Stockage et conservati (...)

196La majorité des blés doit être entreposée dans les silos (croses, crozes) qui permettent une assez bonne conservation sur plusieurs années et mettent le grain à l’abri des insectes ; le début de fermentation stoppe la germination, tant que les silos restent fermés. Ces blés, mis bien secs dans les silos, sont destinés à la consommation mais aussi aux semailles, ils peuvent se conserver sans perdre leurs qualités germinatives pendant quelques années. On peut stocker dans les silos des légumes : choux, raves, navets. Les actes notariés en mentionnent dans des maisons villageoises ; les archéologues en mettent fréquemment à jour, groupés en batteries. Ces silos sont presque toujours de faible volume, trois à quatre m3444, soit 30 à 40 hectolitres de blé, de quoi ensemencer 15 à 20 ha ou nourrir 5 à 7 personnes (avec une consommation annuelle de 600 litres par individu). L’usage des silos est suffisamment répandu pour avoir donné naissance à un métier : un crosier (creuseur de silos) est mentionné dans le registre de reconnaissances de Montgiscard de 1292. Les silos sont parfois construits dans la rue, devant la maison, on s’en aperçoit lors de fouilles445, un texte aussi le signale : un individu vend à un macellier trois corosos (appelés crozos quelques lignes plus bas) deux faits, un à faire (aliud est afar), un dans l’entrée de la maison, deux dans la rue, devant la maison, pour 5 écus d’or, c’est, de plus, une vente à réméré puisque le vendeur pourra récupérer les crosos en donnant les 5 écus446. On peut même louer des silos puisque quelqu’un achète l’usufruit d’une maison et de la moitié des silos (crosorum) qui s’y trouvent447. A Castelnaudary, des silos sont propriété de l’universitas, on fait amener du froment à la maison du juge, pour le poser « ad crosos », en septembre 1373, les consuls payent pour le transport du froment et « l’empalhament » des croses448. Il s’agit peut-être de stocks constitués en prévision d’une disette, la récolte de l’année est médiocre449, les années suivantes, 1374-75, sont les années de la grande cherté (« magna caristia »)450. L’usage de la paille dans les silos est signalé par Philon de Byzance (à la fin du iiie siècle après J.C.), « Pour conserver les orges et les froments, il faut les nettoyer le mieux possible, creuser des silos à ciel ouvert de la plus grande profondeur possible, enduire leur fond, sur quatre doigts d’épaisseur, d’argile bien pétrie et mélangée à de la paille hachée, et enduire leur pourtour d’amurque : que l’on mette dans l’argile deux tiers de poudre et un tiers de sable... Il existe aussi une autre façon de le conserver dans des constructions aériennes dont on a enduit d’amurque les murs et le plancher, et qui ont des fenêtres ainsi que de nombreux trous d’aération tournés vers le nord... »451. Les agronomes hispano-arabes prônent, pour éviter les insectes et rongeurs, d’appliquer sur les parois du silo un enduit composé d’argile, d’eau d’olive et de cendres. Selon eux, il faut aussi mettre de la paille au fond du silo et sur les grains, ce qui était aussi indiqué par Pline452.

  • 453 A.D.H.G., 3 E 10154 f° 250 r°, 22 janvier 1385 (n. st.).

197Les locaux destinés aux animaux sont peu signalés dans les documents, probablement parce qu’ils sont situés sous le toit du bâtiment principal. Une seule étable est mentionnée : une borie comporte aula, camera et un « hospicii sive selerii et stabuli où peut demeurer un animal »453. Pierre-Jean Advessen, à Montesquieu, possède deux campmas et, ailleurs, non situé, borde, stablaria, botiguas, tout le nécessaire pour son commerce de pastel. Des étables apparaissent dans des inventaires après décès réalisés en ville, on y dépose les outils à main (ce qui se fait encore au xixe siècle), on y trouve des mangeoires (rastelli), elles doivent servir indifféremment pour les bœufs et les chevaux. Certains estimés appellent des bâtiments, indifféremment, ostal sive stable (un prêtre de Montgiscard, un chanoine de Castelnaudary), un bâti modeste peut loger hommes ou animaux.

  • 454 Mane (P.) La maison à travers l’iconographie, Cent maisons médiévales..., op. cit., pp. 37-41, cec (...)

198Les bergeries ne sont jamais mentionnées, pourtant certaines fermes comptent une centaine d’ovins, les capelas peuvent, peut-être, leur servir d’abri ; dans le Nord de la France, des bergeries souvent réduites à un simple toit sur des poteaux cormiers, sont appelées « toit » dans les textes454. Les hivers n’étant généralement pas très rigoureux en Lauragais, beaucoup de bergeries consistent, peut-être, en simples cabanes de branchages. Deux porcheries (porqueteria) sont mentionnées dans les registres d’estimes, mais seulement en tant que confronts ; normalement les cabanes à cochons sont séparées des maisons, mais, étant donné leur faible valeur, elles ne doivent pas être allivrées.

  • 455 A.D.A., 3 E 8188 f° 42 v°.
  • 456 A.D.H.G., 3 E 10159 f° 214 v°, 1391.
  • 457 A.D.A., 3 E 9462 f° 175 v°, 1461.

199Les bâtiments destinés à la volaille ou aux pigeons sont un peu plus fréquents dans la documentation que ceux destinés au gros bétail. Neuf occurrences de poulaillers bâtis (galiniera) apparaissent dans les actes notariés, huit sont situés dans des jardins, près des villages, un seul dans un campmas loué à court terme, le bailleur s’en réserve l’usage455. Six poulaillers sont allivrés, quatre à Montesquieu dans le registre de la mi-xve, un dans le registre de 1485, un à Fendeille, en 1495, situés le plus souvent dans les anciens fossés, à proximité des jardins qu’ils vont permettre de fumer. Une galiniera est inféodée avec ostal, jardin et aire « apud fontem », à Gardouch, par Étienne de Meretino456. A. Galhardi achète à Fendeille un jardin « cum area et galineria als barris »457. La rareté des mentions est normale, les poules sont enfermées le soir dans la maison ou dans l’étable ; si un poulailler existe, il peut être inclus dans le bâtiment principal, et, dans ce cas, il n’est pas signalé dans les estimes ; les bordes situées dans les barris peuvent abriter les volailles.

  • 458 J. Lartigaut note la même chose pour le Quercy, Lartigaut, Les campagnes..., op. cit., pp. 128-129
  • 459 Ramière de Fortanier (J.), Recueil..., op. cit., p. 468.

200Les pigeonniers ne sont pas privilège seigneurial en Lauragais458, tout le monde peut en posséder. Au xviiie siècle, c’est sous réserve de pouvoir les nourrir, pour cela il faut posséder deux sétérées de terre. Au Moyen Âge, ce n’est même pas nécessaire. Les coutumes de Labécède, reprises dans les lettres d’amortissement de 1688, donnent liberté de « faire des pigeonniers, sur des pilliers et en la manière que les dits habitans veulent »459. D’autres coutumes mentionnent le droit de posséder garennes, viviers et pigeonniers, c’est le cas, entre autres, à Castelnaudary. À Bram, les coutumes rédigées en 1509 interdisent de « faire agranals dins las crantenes per aver coulouns » sous peine d’une amende d’une £ tr, très élevée donc. Les crantenes semblent être les fossés de la ville. L’agrainage des pigeons est-il interdit car utilisé pour voler ceux d’autrui ?

  • 460 A.D.A., 4 E 076/ CC 8 et CC 9. Un pigeonnier, bâti sur trois éminées de terre, estimé 5 sous tr, a (...)
  • 461 A.D.A., 4 E 076/CC 10 f° 95 v°, il appartient à P. Amyel et est situé, ainsi qu’un cayssieu, sur u (...)
  • 462 A.D.H.G, 3 E 10159 f° 55 v°, 1387.

201Les pigeonniers qui figurent dans les estimes de Castelnaudary, au début du xve siècle, ne sont pas bâtis dans les fermes, mais tout près des murailles de la ville, souvent dans un jardin, probablement parce que la colombine, extrêmement précieuse, est utilisée, en priorité, pour ce dernier et parce qu’il faut surveiller régulièrement les oiseaux et la nidification460. Leurs possesseurs sont gens aisés, parfois pourvus de fermes. Dans les registres suivants, que les agents du roi peuvent vérifier, les pigeonniers ne sont pratiquement plus notés. Un seul apparaît dans le registre de 1496461, un seul, situé dans une ferme, dans celui de 1516, trois, dans le registre de 1553. Dans les autres localités, deux pigeonniers seulement, sur un total de vingt, sont situés dans une ferme. Des pigeonniers isolés subsistent aujourd’hui, du xvie siècle pour les plus anciens, la plupart sont carrés, reposant sur quatre, six ou huit piliers ; il existe aussi de rares pigeonniers tours, cylindriques. Des pigeonniers sont représentés sur les plans du compoix de 1700 de Castelnaudary ; certains, isolés, bâtis sur piliers et à section carré, sont notés dans les manifestes correspondants ; d’autres, situés sur le toit de la ferme, comme ils forment un seul bloc avec celle-ci, ne sont pas signalés dans les manifestes. Ces pigeonniers sur toit existaient au Moyen Âge : un chanoine du collège Saint-Etienne de Toulouse loue toutes ses terres et ostals de Donneville, en métayage à un tiers, pour six ans, à quatre hommes qui doivent construire un pigeonnier dans sa maison, située dans le fort villageois462.

  • 463 A.D.H.G, 3 E 10161 f° 158 r°, 1407.
  • 464 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 205 r°, 1408.

202La présence d’un pigeonnier augmente fortement le prix d’une parcelle : un jardin non bâti se vend 11 £ en moyenne au début du xve siècle à Montgiscard ; un macellier vend la moitié d’un verger et d’un colombier tenus en indivis, situés hors les murs de Montgiscard, pour 20 £ tr463 ; un prêtre achète un verger, un colombier et quatre brassées de terre contiguë au verger, pour 47 £ tr464. Le prix des pigeonniers-bâtiments expliquent qu’ils soient aux mains de propriétaires aisés, le petit pigeonnier situé sous ou sur le toit de la ferme est, lui, à la portée de tout le monde.

  • 465 Conservé à la mairie de Castelnaudary, 4 E 076/ CC 24 à CC 33.
  • 466 On emploie les termes de fournial, couvert, et, une fois, de couvert ou cabanat.
  • 467 A.M.C., 4 E 076/ CC 31 170 r°.
  • 468 Ces fermes sont généralement propriétés de notables, telles les fermes de Saint-Bénazeth, aux main (...)
  • 469 A.M.C., 4 E 076/ CC 31 f° 170 r°, ferme de Carguesac.

203Les documents médiévaux, de même que ceux du xvie, étant quand même très allusifs quant à l’aspect des fermes, j’ai utilisé un compoix de Castelnaudary terminé en 1700465, mais décidé en 1675 et commencé alors. Il est beaucoup plus précis que les registres précédents et je pense qu’il peut éclairer, en partie, la situation antérieure. Ce registre est en français. Le plus souvent, les fermes sont composées d’une « meterie » accompagnée d’une ou deux « granges ou bordes basses », généralement accolées (« joignant ») à ce qui est appelé « meterie » ; s’il y en a deux, une est au cers (ouest), une à l’autan (est). Le mot borde a encore le sens qu’il avait habituellement au Moyen Âge. La ferme, orientée dans le sens des vents dominants, est donc flanquée, de part et d’autre, par les granges. Ces dernières sont parfois séparées du bâtiment principal. La ferme comporte toujours sol (qui semble alors la parcelle de terre portant les bâtiments, la cour, le tas de fumier, la mare, etc.), hiere (un occitanisme pour aire à dépiquer), jardin, ferratjal, pré, paissieu ou pastène, vignes et terres labourables, le tout « joignant et contigu ». Aujourd’hui, le mot sol est encore employé pour qualifier la parcelle portant le bâtiment, même si les parcelles voisines appartiennent au même propriétaire. Pour les services du cadastre, le sol d’une ferme fait, actuellement entre 40 et 60 ares, on retrouve la superficie de la parcelle portant la ferme, au xve siècle, à Montesquieu. La moitié des fermes, à peu près, possèdent gardepille (qui sert à stocker le blé non vanné et remplace donc les silos), les deux tiers, four sous un couvert466 (les capelas du Moyen Âge). Dans la ferme de Carguesac, un four se trouve dans un patu467. Pour un tiers des fermes, il est fait mention d’un pigeonnier ou d’une « tour » qui est, en réalité, un pigeonnier carré sur pieds, le plus souvent quatre468, un exemplaire à sept pieds est aussi signalé469.

204Dans les plans correspondants, l’habitat rural est figuré. Quelques fermes se limitent à un seul bâtiment, aussi large que haut, toujours à deux niveaux ; on peut noter une ou deux portes étroites en rez-de-chaussée, plusieurs ouvertures au second niveau, dont une fenière. Parfois, deux petits bâtiments encadrent le corps principal, qui est alors assez important (jusqu’à quatre ouvertures à l’étage, la ferme de Layrac en comporte même dix). De rares bâtiments comportent une porte cochère, avec parement de pierre. On trouve même deux fermes dont les bâtiments semblent reliés par des murs, créant ainsi une cour fermée, au moins en partie. Les murs de clôture et les portails ne sont pas indiqués dans les manifestes puisqu’ils n’ont aucune utilité pour l’allivrement du contribuable. Malheureusement, si quelques dessins de fermes correspondent à la description faite par les contribuables, comme Vidal Bonnet qui appartient au chapitre de la collégiale (exceptée une tour pigeonnier sur le toit qui n’est, bien sûr, pas mentionnée dans la déclaration), d’autres en sont assez éloignés. La ferme des Pelisses comprend un bâtiment à deux niveaux et, un peu plus loin, une tour pigeonnier flanquée de deux bâtiments bas, un bâtiment, au moins, indiqué dans le manifeste, manque dans le dessin. Les différences proviennent peut-être de réalisations non concomitantes des manifestes et des plans. Le fait qu’on retrouve aujourd’hui, sur l’ancien chemin de poste, de vieilles maisons semblables aux dessins du compoix (deux niveaux plus un galetas), peut toutefois faire penser que le dessinateur a été assez fidèle à ce qu’il voyait.

b. Les bâtiments : la superficie, les matériaux

  • 470 A.D.H.G., 3 E 10161 P 1 v°.
  • 471 La brassée correspond à peu près à la canne, la canne de Toulouse fait 1,796 mètre.
  • 472 Signalé par Leroy (P.), La commanderie de Renneville, op. cit., p. 167. Cet acte est mentionné dan (...)
  • 473 Un mas fouillé en Catalogne fait 45,5 m2 au sol pour la partie habitable, Bolos (J.), éd., Un mas (...)
  • 474 Coulet (N.) Aix-en-Provence..., op. cit., p. 263.
  • 475 A.D.A., 4 E 076/ CC 14 et CC 15.

205La première mention de superficie, dans les documents, date du début du xve siècle et concerne une borde inféodée au bayle du seigneur de Pompertuzat, borde dans laquelle demeure Pons Botas, son métayer. Cette borde est contiguë à l’hospicium seigneurial, de la longueur de celui-ci et large de trois brassées environ, l’inféodation va du patio de la borde « ad portale muri » qui est après la borde, côté cers, et, en droite ligne, du « portale » au mur470. On a une cour, un mur de clôture, un portail, mais cette ferme appartient au seigneur du lieu, elle jouxte sa maison, on ne peut en conclure que les autres fermes ont cette allure ; en 1700, comme déjà signalé, c’est le cas de très peu d’entre elles. Cette borde est large de trois brassées, soit 5,38 mètres471, on ne connaît pas sa longueur, on ne sait pas si elle compte plusieurs niveaux. A part ce maigre renseignement, les seules précisions dont on dispose datent du xvie siècle. À Renneville, dans un acte daté de 1545, le seigneur promet de faire édifier, pour un de ses tenanciers, en campagne, une maison de six cannes de long et trois de large472, soit de 10,77 sur 5,38 mètres473. Noël Coulet signale des dimensions comparables pour la Provence du xve siècle474. Les estimes des xve et xvie siècles n’indiquent pas la superficie des fermes ; celles de 1553 sont les premières à mentionner l’élévation (ce que ne font pas les registres de notaires), un tiers des fermes (campmas, bories) sont en solier (ou solie) c’est-à-dire pourvues d’un étage. Les maisons (maysos) mentionnées alors dans les exploitations sont parfois, elles aussi, en solier, ainsi que les bordes475.

  • 476 Voir les détails dans Marandet (M.-C), L’habitat rural en Lauragais... op. cit. p. 269.
  • 477 A.M.C., 4 E 076/CC 31 f° 14 r°.
  • 478 A.M.C., 4 E 076/ CC 31 f° 59 r°.
  • 479 A.M.C., 4 E 076 / CC 31 f° 14 r°, P 59 r°.
  • 480 A.M.C., 4 E 076 / CC 29 f° 70 r°.

206C’est seulement dans le compoix de 1700 que l’on trouve des précisions sur la superficie des bâtiments (celui de 1603-05 ne fournit pas ce genre de détail), parfois l’élévation et les matériaux de construction476. Les métairies ont, en moyenne, une superficie de 46 cannes (à 3,18 m2), soit 146 m2, sur un niveau, parfois deux, mais les écarts sont considérables, allant, pour celles à un seul niveau, de 25 cannes à 114 cannes, soit de 80 m2 à 360 m2. Les maisons signalées dans ces registres sont parfois de même superficie, ainsi « une maison en plancher » fait 42 cannes deux pans477 ; certaines sont beaucoup plus petites, une vingtaine de cannes, à peu près 60 m2, une toute petite maison, de huit cannes deux pans, sert même de décharge478. La superficie moyenne des granges ou bordes basses est de 111 m2 avec de gros écarts, là aussi, de 45 m2 à 250 m2, les gardepilles font de 50 à 60 m2, les pigeonniers deux ou trois cannes, soit six à neuf m2, les fournials ou couverts de trois à six cannes, soit une dizaine à une vingtaine de m2. Les « patu ou basse-cour »479 font quelques dizaines de mètres carrés, un dépasse les 57 cannes (plus de 180 m2). La métairie de Lacaze qui appartient aux Doctrinaires, semble exceptionnelle, comportant un tout petit logement et d’importants bâtiments à usage agricole : « meterie en plancher, grange ou borde basse, couvert joignant icelle, autres granges ou bordes basses détachées du dit bâtiment, sol, hiere »480. La superficie habitable est de 46,47 m2 au sol, 90 m2 en tout, les bâtiments de service joignants font 41 cannes soit 130,38 m2, les non joignants 98 cannes 6 pans, à peu près 315 m2. La seule ferme du xve siècle dont nous connaissions la superficie au sol est de l’ordre de celle de Lacaze, qu’en était-il des autres ?

207Les matériaux de construction ne sont que très rarement mentionnés dans les documents de la fin du Moyen Âge. Les ressources locales étant mises en œuvre en priorité, les sols étant, pour l’essentiel, argilo-calcaires ou argilo-siliceux, l’argile est le matériau dominant. Elle peut être utilisée crue, sous la forme de pisé, de bauge ou d’adobes. La terre crue est facile à mettre en œuvre et elle constitue un bon isolant, on ne l’emploie pas, seulement, pour une question de prix.

  • 481 Mirouse (F.), Le clergé paroissial.., op. cit., p. 207.
  • 482 Catel (Guillaume de), Mémoires de l’histoire du Languedoc, op. cit., p. 132.
  • 483 Commune, Haute-Garonne.
  • 484 Froissart, Chroniques, édition Kervin de Lettenhove, tome V, p. 346.
  • 485 Lhuisset (C), L’architecture rurale en Languedoc, en Roussillon, Les Provinciades, 1980.
  • 486 Ce mot dériverait directement du latin pinsare ou pisare, piler. Pour J.-M. Pesez, le mot pisé app (...)
  • 487 A.D.A., 4 E 076/ CC 14 et CC 15.

208Quelques cas de tapias de campmas ont été signalés plus haut, les murs des églises sont eux aussi, parfois, faits de « tapia »481. L. Alibert donne à ce mot le sens de « pisé, torchis, mur de terre mélangé de bruyère ». Frédéric Mistral donne aux mots tàpi, tàpio le sens de pisé, mur de terre, maison des champs bâtie en terre, torchis. Tourtissa signifie bâtir avec du torchis, enduire de terre. La tapie toulousaine est décrite par Guillaume de Catel au xviie siècle : « les murailles de la ville (de Toulouse) estoient de brique et celles du dit Bourg de paroit » [...] « où il est escrit que le comte de Montfort s’estant rendu maistre de Tolose il fist abbatre muros Civitatis, et parietes Burgi [...] Les murailles sont de brique ou de terre cuite, et les parroies sont faictes de terre battuë et formés entre deux aiz. Lesquelles parois nous appelions communement tapie. [...] Aujourd’huy les Espagnols appellent ces parois, tapias, comme nous faisons bien encore en Gascogne. Et ces parois de terre, ou tapies, quand elles sont bien battues et espaisses sont aussi fortes que les murailles »482. Des fortifications de terre, probablement construites selon cette technique, sont mentionnées pour le bas Moyen Âge, à Avignonet483, par exemple. Froissait en parle, à propos de la chevauchée du Prince Noir, en 1355 : « si ce logèrent ce second jour les Anglois et les Gascons assez prés de là sur une petite rivière, et le lendemain matin se délogèrent et approchèrent la forteresse qui n’étoit fermée, fors de murs de terres et de portes de terre couvertes d’estrain, car on ne recouvre ens ce pays, à grand dire, de pierre nequedent »484. La façon la plus simple de procéder, pour monter des murailles, devait être l’utilisation, au-dessus de fondations en pierre, de banchées de 20 à 30 centimètres de hauteur de terre humectée, foulée puis battue avec un pisoir. On ne bâtit que deux épaisseurs de coffrage l’une sur l’autre puis on laisse sécher485. Cette technique était utilisée en Espagne et l’est encore aujourd’hui au Maroc, par exemple. Le pisé préservé de la pluie par un enduit (un crépi de terre plus liquide) devient très dur et constitue un bon isolant thermique. Le mot de tapias ou tapial ne figure pas dans les documents du xvie siècle, il semble remplacé par le terme peseng que l’on trouve aussi sous la forme pezin ou peseing »486. La maison de Renneville de 1545 est une maison « en pezin de longueur de six canes dedans les paroits qui seront de tapie sive gaso et de trois canes de largeur dans la paroit », une allusion est faite à une autre petite maison en pezin ; à Castelnaudary, en 1553487, un peu plus du quart des fermes sont dites en « peseng ».

  • 488 A.D.H.G., 3 E 10164 f° 144 r°, achat d’un ort cum parietibus au barri daval de Montgiscard, etc.
  • 489 A.D.H.G., 5 E 73P 53 r°, devant l’église de Montgiscard.
  • 490 Ramière de Fortanier (J.), Recueil de documents..., op. cit., p. 622.

209Certains actes de vente mentionnent des jardins « cum parietibus »488, ces murailles peuvent être des ruines de bâtiments mais il peut s’agir, aussi, de clôtures permanentes, de murs entourant la parcelle (quand on trouve une ruine sur la parcelle, la formulation est différente : « unas paretz de borda et ort »)489, parfois réalisés en terre (cf. supra un prix-fait de mur de terre pour clôturer un verger). Les mots de paret ou tapias apparaissent à plusieurs reprises dans les coutumes. A Castelnaudary, dans les articles concernant les servitudes de voisinage, à propos des réparations, on parle de « mur o paret o tortis d’ostal » (articles 26, 27, 28, 30). A Bram, en 1509, lors de la rédaction des « anciennes coutumes », un article concernant les règles de mitoyenneté mentionne : « tout bastiment de paret de tere o de peire que se fara dins las crantenes ». Quelques coutumes autorisent les habitants à se servir de la terre des rues et des places pour bâtir. C’est ce que l’on voit à Saint-Félix, en 1463 : « item, quod quilibet habitator de Sancto Felice et ejus pertinentiis potest recipere impune de terra carreriarum publicarum et planorum, et ponere in campis suis, seu hortis vel vineis, et facere tortitia sive parietes... »490. À Auterive, c’est un champ communal qui sert à cela, vers 1410, d’après un texte énumérant les droits des co-seigneurs de la ville : « item, otra le pont de l’Arieya, les cossols et universitat an hun camp costa las hostalarias, que confronta am la carriera publica et am Guilhem Castanh, en Germa Thomas de Tholosa et Bernat de Mibilla, delqual camp la gent de la vila se previsis de terra per tortissar, o far muralha ho pasimentar. » Cette terre sert à garnir des clayonnages de bois, à construire des murs composés uniquement de terre crue (pisé, torchis, bauge) et à réaliser des sols de terre battue.

  • 491 Lartigaut (J.), Les campagnes du Quercy après la guerre de Cent ans..., op. cit., p. 122.
  • 492 Cayron (G), Le manuel..., op. cit., p. 368. Le massocanat, d’après F. Mistral est un colombage gar (...)
  • 493 Il s’agit de pisé, de bauge avec lits de brindilles de bruyères et d’adobes, Klein (A.) et Rivière (...)

210Les maisons de terre semblent alors fréquentes, les textes les mentionnent, en Bas-Quercy, par exemple, sous l’appellation de bouge491. Les murs de terre, au moins pour les parties hautes, étaient toujours d’usage au xviie siècle. En effet, parmi les modèles d’actes que propose F. Cayron, dans la première moitié du siècle, figure un prix-fait de maison, on y voit celle-ci bâtie « de mestier franc jusques au dessus du pavé de la salle basse et tout le dessus de mortier de terre rousse, ainsi qu’il est accoustumé » ; un peu plus loin, un bâtiment est « basti de briques jusques au premier estage et d’iceluy en haut de torchis ou de massocanat »492. Des murs de fermes en terre crue, réalisés entre le xvie et le début du xxe siècle, ont été recensés en Midi-Pyrénées493.

  • 494 Dans le Gers, cf. Cazes (J.-P.) et Veyssière (F.), Un exemple de bâti villageois en pisé aux xie-x (...)
  • 495 C’est un mélange de terre grasse et de paille, arrosé, trituré préalablement. Elle n’est pas banch (...)
  • 496 Baudreu (D), Observations sur les constructions en terre crue dans l’Aude (Moyen Âge et Époque mod (...)
  • 497 Baudreu (D.), Bellegarde-du-Razès (Aude). Le Pla de las Vignos, Archéologie médiévale, tome 22, 19 (...)
  • 498 Kotarba (J.), Pezin (A.), Elne (Pyrénées-Orientales), Archéologie médiévale, tome 21 (1991), p. 27 (...)
  • 499 Baudreu (D.), Habitats et fortifications en terre crue d’époque médiévale dans le Midi de la Franc (...)

211Les travaux des archéologues confirment que le pisé est utilisé à la fin du Moyen Âge, dans tout le Midi de la France, pour construire maisons et fortifications494. Dominique Baudreu conclut, à partir des mentions textuelles et des données archéologiques, à la présence de bauge495, utilisée pour la réalisation des murailles des villes et villages de l’ouest audois. Au xvie siècle, à Arzens, des travaux de réparation des murailles doivent être réalisés en « guaison de terre ». À Fanjeaux, dans un texte de 1599, les consuls commandent à des paredièrs de reconstruire la muraille « en tapie » de 4,4 m de haut et 2,20 mètres d’épaisseur à la base, 1,80 au sommet. Il est question de faire venir des aides le jour où seront posés les « gachouls ». Dominique Baudreu pense que ce mot correspond à guaison et qu’il doit s’agir de paquets de terre juxtaposés496 ; on peut aussi penser que les gachouls, la guaison correspondent à un lit de terre, une banchée, Dominique Baudreu donnant l’exemple de Lézat-sur-Lèze où une muraille doit être élevée « deux guasons plus hault » que la hauteur des vieilles murailles. La bauge apparaît en fouille sur un site de l’époque carolingienne à Bellegarde-du-Razès497, et aussi à Elne, dans les Pyrénées-Orientales498. Des murs porteurs, en Bas-Razès et Carcassès, remontant aux xviiie-xixe siècles, sont composés de lits de terre, empilés, épais de 10 à 20 cm, formés par assemblage de pains de terre, lits séparés par de fines couches d’éléments végétaux (bruyères ou même sarments de vigne)499. La « tapia sive gaso » de Renneville pourrait correspondre à de la bauge.

  • 500 Parodi (A.), Bellegarde (Gard), Boussan, Archéologie médiévale, tome 19, 1989, p. 257.
  • 501 Ginouvez (O.), Des maisons excavées à Narbonne autour de l’an Mil, Archéologie du Midi médiéval, t (...)
  • 502 Baudreu (D), Observations sur les constructions en terre crue dans l’Aude (Moyen Age et Époque mod (...)
  • 503 A.D.A., 4 E 076/AA 1.
  • 504 A.D.H.G., 3 E 10097 f° 47 r°.
  • 505 A.D.H.G., 3 E 6761 f° 56 v°, f° 65 v°, 3 E 7399 P 80 r°, etc., cités par Wolff, Commerces.... op. (...)
  • 506 Cayla (P.), Dictionnaire des institutions..., op. cit., p. 688.
  • 507 Lartigaut (J.), Les campagnes du Quercy..., op. cit., p. 122.

212La terre crue peut être utilisée sous la forme d’adobes, briques fabriquées dans des moules et séchées au soleil. Les adobes peuvent être employés seuls, on en a trouvé dans le Midi de la France, à Bellegarde (Gard)500, à Narbonne501, à Villarzel-du-Razès502. Ils peuvent, comme le pisé ou la bauge, servir à combler les vides entre les bois, dans le cas de maisons à pan-de-bois. Les ossatures de bois sont attestées en Lauragais au Moyen Âge : les coutumes de Castelnaudary mentionnent les chevilles à employer lors des constructions, chevilles dont le gabarit doit être vérifié par les officiers de la ville503 ; les baux à court terme de domaines répartissent entre preneur et bailleur les fournitures de bois d’œuvre ; un acte notarié mentionne le paiement fait à un « lignifabro » qui a construit un hospicium504. Le colombage (appelé localement corondage) était recouvert d’un crépi protecteur. Dans l’acte de location d’une maison villageoise déjà signalé, le couple preneur doit « tortissare » deux chambres situées près de l’aula. Philippe Wolff avait noté la présence du charpentier et du tortissator lors de baux à besogne d’immeubles505, pensant que cela traduisait la présence de torchis. Pour P. Cayla, le tortis est un mélange de terre plus ou moins argileuse et de balles de grains que l’on étalait sur les parois extérieures d’une construction à la façon d’un crépi, le tortisseur étant l’ouvrier spécialisé dans le crépissage506. Le couple den Rua qui doit tortissare les deux pièces du premier étage doit-il seulement crépir les murs ? Les coutumes employant le terme de tortis au sens de muraille et non de crépi, on peut supposer qu’ils doivent garnir de terre les intervalles entre les bois. En Quercy, où les maisons à pans-de-bois garnis de terre crue (adobe ou, le plus souvent, pisé) apparaissent (ostals « de terra e de fusta »), torcissare semble avoir ce sens : dans un prix-fait, un charpentier promet de bâtir l’ossature d’une maison (pour 130 sous et une paire de souliers), mais ne prend pas la charge de « bastire et torcissare », le paysan la garnira de terre lui-même507.

  • 508 Marandet (M.-C), Un exemple de ville policée..., op. cit., pp. 201-227.
  • 509 Dans une ferme de Peyrens portée sur la carte de Cassini et aujourd’hui en ruine, où le matériel c (...)

213Quand on utilisait le pisé ou les adobes, il est probable que des débords de toiture, des sortes d’auvents, protégeaient la façade de la pluie. Plusieurs articles des coutumes de Castelnaudary s’y intéressent ; si l’un d’entre eux semble interdire les encorbellements des poutres et poutrelles (« le sobregiet de las traus o travatels ») de plus de cinq ou six empans, selon la largeur de la rue, un autre interdit de faire sortir l’avant-toit (« forajet ») à plus d’un empan et demi de distance du milieu de la rue, un autre de construire des auvents (« postat o mantel ») qui soient situés à moins de 14 empans du sol 508. Sur les dessins de fermes accompagnant le compoix de 1700, sur toute la longueur du mur gouttereau, au niveau du premier plancher, on a figuré une petite surface, coloriée en rouge, qui peut s’interpréter comme la représentation d’auvents de tuiles ou briques509.

  • 510 Marandet (M.-C), Tuiliers et potiers..., op. cit., pp. 123-130. Depuis, le corpus de tuileries rep (...)
  • 511 A.D.H.G., 5 E 73 f° 103 r°.
  • 512 A.D.H.G., 5 E 73 f° 117 r°.
  • 513 A.D.H.G., 5 E 66 f° 36 v°.
  • 514 A.D.H.G., 5 E 66 f° 103 v°.
  • 515 Les tuiles ne se vendent pas très cher, en 1461, les frères de Gavaretto en achètent 4000 au prix (...)
  • 516 A.D.H.G., 5 E 67 f° 153 r°.
  • 517 A.D.H.G., 5 E 67 f° 65 r°.
  • 518 A.D.H.G., 5 E 67 f° 54 P.
  • 519 A.D.A., 4 E 076/CC 10 f° 7 r°. Dans les plans d’adaptation 36 C 6, de 1786, une tuilerie est menti (...)
  • 520 A.D.A., 4 E 076/CC 10 f° 70 v°.
  • 521 A.D.A., 4 E 076/DD 1, liasse 1 n° 30.

214L’argile peut être, aussi, utilisée cuite, sous la forme de tuiles et briques. Les tuileries sont présentes dans les sources médiévales510. Les registres d’estimes montrent qu’il existe, au moins, une tuilerie par village, elle fabrique tuiles (tegulos concavos) et briques (tegulas planas). À Ayguesvives, un déclarant possède « unas paretz vielhas de colomie e teularia » avec un arpent de terre d’un seul tenant « al colomie a tomba ausel sive a las faudas de Montalbuou », allivrées 2 £ et demie, et, au même endroit, un arpent de terre labourable allivré 6 £ et 18 arpents de bosc et brugas, allivrés 18 £511. Aux Bastards, D. de Montech et ses frères, dont l’estime totale atteint 92 £, déclarent 11 arpents de bosc et brugas « an cossac » où se trouve une tuilerie, estimée 15 £. Ils ont aussi 15,5 arpents de terre dans ce secteur512. À Montesquieu, dans le registre le plus ancien, Daniel Advessen, dont l’estime totale est de 253 £ 5 sous, déclare une tuilerie à « la comba angely », estimée 1 £, 16 sété-rées et demie et 2 liuralats de terre labourable et 10 liuralats de payssieu, confronts de la tuilerie, estimés 26 £. Il possède deux ostals et une ferme513. Dans le même registre, Germa Galoffi dont l’estime atteint 216 £ 15 sous, déclare la moitié d’une tuilerie « a la oulmeda », allivrée 10 sous514. Ces installations sont très peu allivrées, est-ce un choix des consuls ou rapportent-elles peu515 ? En 1485, les trois déclarants Advessen n’ont plus de tuilerie, Daniel a toujours des terres « a comba an geny (sic) sive a peyriola ». Deux tuileries apparaissent tout de même dans le registre, celle de « la oulmeda » déclarée par Peyre Servini de la Ribieyra (il possède un ostal, une ferme et, rajoutées sur son manifeste, une terre et la moitié de cette tuilerie)516. Jean et Raymond Primi, frères, et Gayssot Primi ont deux ostals, deux fermes et, au cers de la borie « de la sera de la monyera », trois sétérées de terre sur lesquelles se trouve une tuilerie, parcelle et tuilerie sont estimées 18 £. Ils possèdent aussi, dans les dépendances de la tuilerie, 6 sétérées ou plus d’« herm, bosc, brogues, genebries », estimées 1 £. Leur estime totale est de 289 £517. Une autre tuilerie, en activité ou pas, existe, un lieu-dit « a las bolbenas de la theularia den Auriol » est mentionné518. Dans le Ms. 634, une tuilerie est avouée par Jacques de Pallais, à Montesquieu, en 1462. Ces tuileries appartiennent souvent à des propriétaires de fermes, elles constituent une deuxième activité pour des paysans pendant une partie de l’année, un investissement pour un propriétaire non exploitant. Elles sont proches de leurs sources de combustible : les broussailles. A Castelnaudary, les tuileries ne sont pas déclarées dans les estimes, deux lieux-dits signalent leur existence : « a la teularia vielhe »519, « a la teularia alias la font del vayssel »520. Une, située à la porte Mauléon, est achetée peu à peu par l’universitas : la moitié, en 1424, pour 40 £, un quart, en 1528, vendu par Arnaud de Lyas, un marchand (le dernier quart appartenait, en 1526 du moins, à Me Caussidières, un notaire)521. À Saint-Papoul, dans une transaction de 1270 entre l’abbé et les habitants, apparaît une tuilerie commune, l’abbé a droit à 100 tuiles à chaque fournée et il peut obtenir 1 000 tuiles pour 5 sous tolsans.

  • 522 Tollon (B.), « Toulouse » La maison de ville à la Renaissance, Actes du colloque de Tours, juin 19 (...)
  • 523 Elle est peut-être plus courante dans le Lauragais occidental.
  • 524 Terminé, pour Castelnaudary, en 1824, conservé aux Archives municipales.
  • 525 Dans le village d’Issel, par exemple. Le grès utilisé provient souvent de la région de Carcassonne (...)
  • 526 Cayla (P.), Maisons et meubles de la fin du xvie siècle dans les pays d’Aude, Mémoires de la Socié (...)

215La brique cuite doit être achetée, il faut, de plus, faire appel à une main d’œuvre spécialisée pour la mettre en œuvre, il est peu probable qu’elle soit utilisée pour bâtir les fermes, au Moyen Âge. À Toulouse même, au xve siècle, seules quelques maisons de marchands sont construites avec ce matériau, elles seront plus nombreuses au siècle suivant522. En Lauragais oriental, la brique ne semble pas être très fréquente, même aux xviiie et xixe siècles523. De nombreux bâtiments ruraux, antérieurs à 1824, puisqu’ils figurent avec leur plan actuel, sur le cadastre napoléonien524, sont construits de moellons de calcaire ou de grès grossièrement équarris ; aux angles des murs, dans les embrasures des baies, sont utilisés des blocs de parement plus soignés, un mortier à sable et chaux assure la liaison525. P. Cayla, un érudit local, fait remonter ces murs aux reconstructions suivant les guerres de religion mais ne cite pas ses sources, il pense qu’au-dessus du premier plancher, on continuait d’utiliser pisé et pans de bois526. Aucun texte médiéval du Lauragais ne parle d’utilisation de la pierre pour la construction de la maison rurale.

  • 527 Par exemple, A.D.A., 3 E 9454 f° 16 r°.
  • 528 Commune, Haute-Garonne.
  • 529 A.D.H.G., 3 E 10166 f° 56 v°, 16 mai 1439.
  • 530 A.D.H.G., 3 E 10137 f° 176 r°.
  • 531 Les grandes font à peu près 50 cm de long, la largeur du grand côté est comprise entre 21 et 25 cm (...)

216Les toitures de tuiles apparaissent souvent dans les documents. Dans les baux à court terme et même dans les emphytéoses, on mentionne, parfois, que le preneur doit remettre en état et entretenir les bâtiments des fermes ; le propriétaire fournit tuiles (ce sont des tuiles « canal », tegulae cavatae, teguli concavi) et bois au preneur527. François de Mauriaco, seigneur de Montlaur528 donne en « novum feudum » à un laboureur du lieu et à son épouse, « totos illos parretes » lieu-dit « a la borda dels pezenx » à Montlaur ainsi que des terres ; ils doivent édifier, en deux ans, à compter de la Toussaint suivante, une « domum sive bordam » sur les parretes et la couvrir avec 2 000 tuiles. Ils doivent utiliser, pour la construction, le bois provenant des forêts de F. de Mauriaco ; ce bois peut servir pour la charpente mais aussi pour l’ossature d’une maison à pans-de-bois. Les parretes mentionnées sont-elles les fondations de pierre ou bien les « parois » au sens de murs de terre, signalées par Guillaume de Catel, ce qui exclurait les pans de bois ? S’agirait-il alors de terminer la construction de la maison ou de remettre ces murs de terre en état ? Dans le cadre de ce contrat de repeuplement, François de Mauriaco doit donner cinq écus d’or aux tenanciers pour acheter les tuiles, la moitié à la Toussaint prochaine, la moitié à la suivante529. Une borde est construite à Roqueville, en 1461, par les Gavarreto, seigneurs du lieu, ils achètent 4 000 tuiles à 3 écus 12 gros le millier de tuiles530. En admettant que le gabarit des tuiles soit le même au Moyen Âge qu’à l’époque moderne, où il existait deux modèles de tuile canal531, la borde de Montlaur ferait, selon le type de tuiles employé, de 56 m2 à 112 m2 au sol, celle de Roqueville de 112 m2 à 224 m2 (entre bâtiments d’habitation et de service probablement), la variabilité est du même ordre qu’à la période moderne.

  • 532 À Durfort, les tuiles « canal » sont utilisées pour la plupart des toitures, Collin (M.-G.), Damas (...)
  • 533 Marandet (M.-C.), Tuiliers et potiers de la région toulousaine..., op. cit., pp. 123-130.

217Les toits de tuiles sont présents en campagne, les textes sont confirmés par la prospection pédestre sur des emplacements de fermes, de la fin xiiie ou du début du xive siècle, et par l’archéologie, pour les maisons villageoises532. Les tuileries sont alors nombreuses en Lauragais, le produit n’est pas très cher, ce qui doit aider à sa diffusion533. On doit même recycler les tuiles cassées (tuileau pour la construction, par exemple), un « recuperator tegulorum » est tenancier de l’évêque de Toulouse, à Montgiscard, en 1292.

218Peut-on noter des permanences entre l’habitat rural médiéval et celui qui existait dans la période 1940-45 ?

219Les documents du xve siècle apportent peu de renseignements : présence de tuiles, utilisation de la terre crue, sous forme de pisé, de bauge, associée ou non à des pans-de-bois. Si quelques fermes comportent plusieurs bâtiments, les superficies de ceux-ci semblent assez réduites, les façades font cinq mètres de longueur, approximativement, pour les rares exemples fournis. On peut supposer qu’étant donné les conditions climatiques, les fermes sont tournées face au midi, présentant deux murs pignons aveugles aux vents dominants (est, ouest), ce qui est toujours le cas aujourd’hui.

  • 534 Module que l’on retrouve sur les maisons urbaines figurées sur le compoix et subsistant aujourd’hu (...)
  • 535 Rivais (G), Midi toulousain et pyrénéen..., op. cit., pp. 54-58.

220En 1700 ont perduré utilisation de la terre crue, tuiles pour la couverture, petit bâtiment-bloc, où cohabitent les hommes et les animaux, pour les exploitations les plus modestes, avec toujours un module de cinq mètres pour les murs goutte-reaux534, correspondant à la longueur des poutres que l’on pouvait mettre en œuvre (les bois de futaie sont assez rares dans la région). Les fermes plus importantes comportent des dépendances : granges pour entreposer araires et charrettes, gardepille pour les grains, bergeries pour les moutons, une porchère, un poulailler, un pigeonnier, isolé ou situé sous les combles du bâtiment d’habitation. Les moulins à vent ou à eau du Moyen Âge sont toujours là. La fin de l’utilisation du pastel, remplacé par l’indigo, explique la disparition des moulins à pastel. Les fermes, en 1700, sont souvent aux mains des mêmes familles qu’à la fin du xve siècle, ce qui peut être facteur de permanence. Elles sont toujours situées sur le même emplacement, les modifications du bâti ont dû être progressives et assez limitées, étant donné la conjoncture de crise (guerre, prélèvement fiscal) qui sévit entre 1550 et la fin du xviie siècle. Ces fermes ne sont pas celles qui figurent sur le cadastre napoléonien. Sur celui-ci, le plus souvent, un bâtiment unique, rectangulaire, avec quelques décrochements à l’arrière, regroupe habitat et dépendances. Ce bâtiment est généralement beaucoup plus vaste que celui décrit en 1700, souvent de quelques centaines de mètres carrés, par agrandissement, surtout, des zones de service. Si l’on compare les bâtiments de la mi-xxe siècle à ceux de ce cadastre, ce sont les mêmes, plan et superficie concordent. Les matériaux de construction ont changé, les moellons calcaires ont remplacé le pisé ou le pan-de-bois. Ces modifications se sont effectuées au cours du xviiie siècle ou bien au tout début du XIXe, pendant une période d’enrichissement (culture du maïs, utilisation du canal du Midi qui permet l’exportation des blés). La « longue borde céréalière »535, telle qu’elle subsistait dans les années 1940-1945, n’est donc pas une création très ancienne, même si l’on peut en déceler une préfiguration dans les métairies flanquées de bordes basses du compoix de 1700. Ce bâti n’était toutefois pas situé sous un seul toit comme aujourd’hui mais sous plusieurs, les bordes ne comportant qu’un niveau contre deux pour les métairies.

  • 536 Pesez (J.-M.), La référence ethnographique..., op. cit.

221Ainsi que le disait Jean-Marie Pesez : il existe « des similitudes et non identité entre la maison médiévale et l’habitation rustique », « même si on a pu parler d’histoire immobile, la culture matérielle des milieux ruraux a connu des évolutions presque insensibles mais réelles »536.

III. LA PRÉSENCE SEIGNEURIALE

  • 537 Ramière de Fortanier (J.), Recueil..., op. cit., p. 721, p. 167,p. 369,p.468, p. 185.
  • 538 Et même en Bourbonnais : la Coutume reconnaît la présence d’alleux ; ceux-ci peuvent naître de la (...)
  • 539 Gilles (H.), Les coutumes de Toulouse (1286) et leur premier commentaire (1296), Toulouse, 1969. P (...)
  • 540 viala (A.), Le Parlement de Toulouse et l’administration royale laïque (1420-1525 environ), 1953, (...)

222Les communautés du Lauragais jouissent, à la fin du Moyen Âge, de diverses libertés qu’elles ont généralement achetées ; ces libertés sont signalées dans les coutumes ou dans les transactions passées avec le seigneur, qui est souvent le roi : liberté des fours à Villeneuve-la-Comptal, à Avignonet, à Auterive ; droit de chasser, de pêcher, faire des garennes, pigeonniers, viviers et tours, « de tout temps et sans faire apparoir d’aucun titre, ni payer au roi », à Castelnaudary ; droit de chasser, pêcher, tenir des pigeonniers sur piliers, à Labécède. La liberté d’acquérir des fiefs nobles est mentionnée à Avignonet et à Caraman, entre autres537. Ce qui, ailleurs, est considéré comme privilège noble ne l’est pas en Toulousain. Selon la coutume de Toulouse, qui s’applique dans toute la sénéchaussée, et comme dans une grande partie du Midi de la France538, toute terre est réputée allodiale539. « Nul seigneur sans titre » : le seigneur doit prouver qu’une terre relève de sa mouvance ; s’il prétend à une redevance, il doit en apporter la preuve, par instrument de bail ou d’inféodation ou deux reconnaissances. Le franc alleu de Languedoc est nettement admis par un arrêt de 1495540.

  • 541 Richardot (H.), Le fief roturier à Toulouse, Revue historique de droit français et étranger, 1935, (...)
  • 542 La tenure paysanne est aussi appelée fief en Normandie, Bloch, La société féodale, 1983, p. 268. E (...)
  • 543 D’après H. Richardot, le premier fief roturier date d’environ 1098, l’évolution se fait progressiv (...)
  • 544 Débax (H.), La féodalité..., op. cit., pp. 179-182.

223La tenure présente, en Toulousain, quelques particularités notées, dès 1935, par H. Richardot541. Le fonds concédé en tenure est appelé fief : feudum, feodum, fevum, le tenancier est le feudotarius, feodotarius, l’acte de concession est un don à fief : donavit, dedit in ou ad feudum, le seigneur concédant se réserve le dominium (propriété éminente)542. Ce fief « roturier » est apparu au début du xiie siècle et s’est multiplié très rapidement543. Hélène Débax note que jusqu’en 1125, on distingue encore fief et tenure. Le terme d’honor est alors utilisé pour qualifier un patrimoine, un ensemble de droits, détenus en alleu ou en fief. Dans la deuxième moitié du xiie siècle apparaît le fief honorable qui peut entraîner un hommage, un serment de fidélité, une aide militaire, comme les donations en fief. H. Débax pense que le fief serait, alors, appelé honorable pour le distinguer des simples tenures. On continue toutefois à trouver jusqu’au début du xiiie des fiefs simples et des fiefs honorables, soumis tous deux aux mêmes obligations. L’honor connaît dans la deuxième moitié du xiie la même évolution que le fief, il en vient à désigner une tenure roturière et même servile544. Au bas Moyen Âge, le terme est encore utilisé dans quelques actes notariés pour qualifier une parcelle confront, avec le sens de « patrimoine d’un tel ».

  • 545 Richardot (H), Le fief..., op. cit., p. 345.

224Les redevances annuelles dues par le tenancier sont, en Toulousain, appelées, en cas de versement forfaitaire, service ou oblies (servicium, servizi, obliae), plus rarement cens (censum) et, quand il s’agit d’une fraction de la récolte, agrier (agrerium). Qu’il s’agisse d’inféodation ou de sous-inféodation, c’est-à-dire d’un tenancier inféodant sa tenure à un autre tenancier, le même terme est employé. Il est possible au feudataire de sous-inféoder le fonds si une clause spéciale du contrat ne l’interdit pas. Dans les actes étudiés par H. Richardot, elle figure souvent : feodatarius non debet predictum honorem dare a feudum (ad superfeudum), c’est-à-dire en arrière-fief, nec a se ullo modo alienare ut dominus possit inde perdere aliquid suarum dominationum »545. Une interdiction de sous-inféoder apparaît dans certains des registres de reconnaissances de l’archevêque de Toulouse (cf. infra).

  • 546 Cayron (G.), Le manuel du parfait..., op. cit., pp. 387-397.
  • 547 A.D.H.G., 3 E 10159 f° 105 v°, 20 mai 1391.
  • 548 A.D.H.G., 3 E 10162 f° 29 v°, 1408 (n. st.).
  • 549 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 111 v°, 1408 (n. st.).
  • 550 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 113 v°, 1407 (n. st.).

225On ne repère pas toujours les sous-inféodations car le concédant est mentionné comme dominus, le véritable seigneur censier n’apparaissant pas. Au xviie siècle, pour G. Cayron, un feudataire ne peut imposer « cens sur cens ny iceluy vendre ou donner en main morte, telles que sont les communautez, Églises, Hospitaux et collèges, pour priver le seigneur de ses droits de lots, captes, arrières captes »546. Ces sous- inféodations semblent pratiquées en Lauragais au xve siècle : un couple de Grépiac, Pierre et Francesia Basconis, vendent à perpétuité, à P.-M. Gilabert, pour 4 £ tr, deux pugnères de froment censuel que celui-ci leur faisait, chaque année, pour une pièce de terre à Labruyère-Dorsa. Cette vente est approuvée par noble P.-R. de Deyme, à condition que tous les ans, à la Toussaint, P.-M. Gilabert lui serve un denier tournois d’oblies et paie les dominations féodales s’il vend, etc. Les Basconis ont dû sous-inféoder leur tenure à P.-M. Gilabert, celui-ci a racheté le cens qu’il leur versait mais le seigneur premier du bien lui rappelle son existence547. Le fait que plusieurs seigneurs directs se partagent, quelquefois, un champ peut correspondre à des sous-inféodations successives ou à des constitutions de rentes de type féodal. Pierre Maurini, dont on ne connaît pas l’activité, est signalé comme seigneur, pour moitié, avec noble P.-R. de Pechbusque, d’un campmas situé à Baziège548. P. Maurini a-t-il acheté une rente, est-il le tenancier de départ qui aurait sous-inféodé ? Arnaud Carboneri, d’Ayguesvives, s’intitule seigneur direct de terres qu’il donne en nouvelle inféodation moyennant oblies, arrière-acapte et justice, à Pons Carboneri, un laboureur. Le campmas des Carboneri est confront des biens549. Arnaud donne-t-il en tenure à un fils ou un neveu, un alleu ou un bien dont il est tenancier ? On a la même chose, peut-être, pour Guilhem Regis, de Montgiscard, qui donne en nouvelle inféodation, à un laboureur, un arpent de malhol, dont il est confront, sous oblies, arrière-acapte et justice550.

  • 551 Berthe (M.), Le droit d’entrée dans le bail à fief et le bail à acapte du Midi de la France (xiie-(...)
  • 552 Tout ceci Ib., p. 265. Cf. infra « Signes de crise, signes de reconstruction ».

226En Provence, dans la plus grande partie du Languedoc et en Rouergue, l’acte d’accensement s’appelle bail à acapte, du nom du droit d’entrée que le tenancier verse, presque toujours, au concédant, pour entrer en possession de sa tenure. Acapte en Languedoc et Provence a donc deux sens : le mode de concession de la tenure « dare ad acaptum » et le droit d’entrée « acaptum » perçu au moment de la concession. De l’Ariège et de la Garonne à l’océan, le bail à acapte fait place au bail à fief. Maurice Berthe note que « ce bail à fief rassemblait tous les traits constitutifs du bail à acapte languedocien et provençal ». En effet, au début du xiie siècle, un droit d’entrée, prix d’acquisition de la tenure donnée en fief, apparaît, parfois, en Toulousain. Le prix d’entrée, aux xiie et xiiie siècles, est, toutefois, moins répandu qu’en Languedoc et Provence. Fin XIIe, on commence à donner « in emphiteosim perpetuant », en indiquant la synonymie entre emphytéose et acapte ; dans les actes, on accole mot traditionnel et mot savant « damus in accapitum sive emphiteosim ». Le droit d’entrée est appelé le plus souvent acapte (acaptum, acaptis), et entrée (intrata, intrate), son aire de diffusion couvre celle du bail à acapte et déborde sur les terres du bail à fief. En Lauragais, les scribes des commanderies de Caignac, de Pexiora emploient intrata seul ou associé à acapte551. « Le caractère occasionnel du recours aux droits d’entrée leur enlève, semble-t-il, toute signification juridique. Ainsi, les droits d’entrée que quelques textes languedociens identifient, à partir de la fin du xiie siècle, au prix d’acquisition -precium- avaient-ils un caractère purement économique. Ils représentaient le prix du « domaine utile ». A cause de cela, les acaptes sont sensibles à la conjoncture et deviennent la plus onéreuse des taxes de mutation, « de symbolique qu’il était dans la première moitié du xiie siècle, le droit d’entrée est devenu, après 1160, une sorte de prix d’achat du fonds concédé, proche de sa valeur marchande »552.

  • 553 En Quercy sont pratiqués les mêmes taux, Lartigaut (J.), Les campagnes..., op. cit., p. 171. Rien (...)
  • 554 Dans les reconnaissances passées auprès de l’archevêque de Toulouse, par exemple. Pour H. Débax, c (...)
  • 555 Richardot (H.), Le fief..., op. cit., p. 525 et p. 528.
  • 556 Ramière (J.), Les droits seigneuriaux dans la sénéchaussée..., op. cit., p. 46.
  • 557 ft., p. 45.
  • 558 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 241 r°, 1409.

227Les actes d’inféodation du bas Moyen Âge mentionnent, en Toulousain, le cas échéant, des acaptes ou entrées, des cens ou oblies ou servicium et « autres dominations », c’est-à-dire tous les droits s’exerçant en plus du service habituel du fief. Ces droits casuels comprennent les pax ou lods et ventes, encore appelés foris-capes, c’est-à-dire les droits de mutation perçus par le seigneur quand il y a vente ou engagement de la tenure ; en général, un denier par sou, en cas de vente, une obole par sou, en cas d’engagement553. D’autres droits de mutation sont parfois mentionnés : acapte à payer en cas de mort du seigneur554 et arrière-acapte, en cas de mort du tenancier. Le droit de justice (justicia) est une amende, sanction du non paiement du cens et de l’arrière-acapte, (X denarios justiciam si juste inculpatur feodotarius). Elle concerne tout fait du tenancier contraire au dominium, toutes les fautes qu’il peut commettre qui ont le fief pour support555. Elle s’exerce, par exemple, quand le tenancier oblige le seigneur à réclamer la censive en justice, elle est, le plus souvent, égale à l’acapte (au sens de droit de mutation)556. Le seigneur direct a, en cas de vente de la terre dépendant de sa directe, le droit d’option entre la ratification de la vente en prenant les lods ou l’acquisition du bien pour son compte personnel, en indemnisant l’acquéreur du prix principal et des dépenses accessoires qu’il a pu faire (prélation ou retrait censuel). Souvent, le seigneur peut exercer son droit en payant le bien un denier tolsan de moins que l’acquéreur ; il a 41 jours pour choisir entre le retrait et les lods557. Dans une vente de réduction de cens portant sur un demi-arpent de pré, le seigneur du bien, Arnaud de Montelauro, bourgeois de Toulouse, fait indiquer que, si le feudataire vend le bien, il peut le retenir au prix prévu, moins un denier tolsan558.

228D’après la coutume de Toulouse, quand il existe un différent à propos des oblies, le seigneur, s’il demande les arrérages des trois dernières années, est cru sur parole, sans preuve ni serment. Le vassal (c’est-à-dire le tenancier) doit faire serment, sur l’autel, d’avoir payé, si le montant atteint 2 sous tolsans ou plus, sur les Évangiles, si le total est plus faible (article 138). À défaut, il doit payer la justice des droits non payés. Si l’emphytéote ne veut pas jurer, le seigneur doit prêter serment que les oblies lui sont dues. Pour les années précédentes, l’accusateur doit apporter des preuves alors que le tenancier doit simplement prêter serment. La saisie temporaire n’est permise par la coutume (article 137) que pour non-paiement répété d’oblies et non-comparution à un procès. La commise est possible quand le tenancier refuse de passer une nouvelle reconnaissance au seigneur ou de payer les arrérages après y avoir été condamné en justice. Le seigneur ne peut réclamer que 29 ans d’arrérages. Quand l’inféodataire meurt intestat sans descendants, parents, affins, consanguins, le fief revient au seigneur, dettes du défunt payées.

  • 559 Guimbail (R.), Expansion..., op. cit., p. 73.
  • 560 Bourrin-Derruau (M), Villages..., op. cit.

229La part relative des alleux et des tenures n’a guère été étudiée en Toulousain. Les alleux, d’après des maîtrises utilisant les terriers de deux commanderies, ce qui n’est pas le meilleur endroit pour les apercevoir, seraient fort rares en Lauragais, aux xiiie et xive siècles. À Caignac, Joëlle Partak n’en trouve que trois mentions (deux appartiennent à des seigneurs, un à un paysan) ; pour elle, l’alleu paysan n’existe plus dans la deuxième moitié du xiiie siècle. À Pexiora, Rémi Guimbail signale de rares ventes d’alleux à l’Hôpital, au xiiie siècle, alleux qui sont repris en tenure ; il pense que l’alleu paysan décroît, absorbé par les grandes propriétés seigneuriales, il n’en aperçoit plus dans les documents du xive siècle559. En Biterrois aussi, l’alleu disparaît entre le xiie et le xiiie siècle560.

  • 561 Wolff (Ph.), Les estimes..., op. cit., p. 67.
  • 562 Ib., pp. 122-123. Michèle Eclache travaillant sur le capitoulat de La Dalbade, toujours en 1459, n (...)

230La situation semble différente à Toulouse, d’après les registres d’estimes étudiés par Ph. Wolff. Dans ceux de 1335, 73 % des vignes, 78 % des terres labourables et 92 % des prés sont francs561 ; dans ceux de 1391, fragmentaires, les deux tiers des immeubles sont francs, 87 % des vignes, 78 % des terres. En 1459, dans les capitoulats de la Daurade et de Saint-Pierre-Saint-Martin, la situation a changé : 23 % seulement des ostals sont francs, 29 % des vignes et 10 % des terres562. On passe d’immeubles presque tous francs en 1335, à un tiers des immeubles versant des redevances en 1391 puis à la quasi-totalité en 1459, Philippe Wolff pense que cela tient essentiellement à la crise économique : des personnes ont constitué des rentes sur leurs biens ou ont vendu leurs biens francs et les ont repris en tenure. C’est fin xive et début xve que s’effectue, à Toulouse, pense-t-il, une raréfaction de l’alleu.

231Qu’en est-il en Lauragais ? Quelle est la part relative des alleux et des tenu-res au xve siècle ? Les documents permettent-ils de repérer ces deux types de biens ? Quelles sont les charges pesant sur les parcelles ? des cens ? des rentes constituées ?

A. Alleux et tenures, rentes et cens d’après les registres notariés, problèmes de termes

1. Alleux et tenures

  • 563 A.D.A., 3 E 1493 f° 6 v°, deux sétérées de malhol vendues 24 £ tr, service de 5 deniers tr, au cas (...)

232Les lauzimes figurant dans les registres de notaires peuvent être utilisées, dans un premier temps, pour évaluer le pourcentage de biens-fonds ruraux en tenure. 15,37 % des actes de vente sont lauzimés par un seigneur (83 lauzimes pour 540 ventes) dans les 17 registres témoins provenant des Archives de l’Aude contre 38,19 % (220 lauzimes pour 576 ventes) dans les 12 registres témoins provenant des Archives de la Haute-Garonne. On pourrait conclure à une domination des alleux, plus forte dans la partie orientale du Lauragais. En fait, ces lauzimes ne correspondent pas à la réalité. Si l’on regarde les actes de ventes dressés par les notaires, on s’aperçoit qu’en Lauragais oriental surtout, le paiement de services (servici) ou le seigneur direct sont mentionnés de façon fréquente sans que, pour autant, ce dernier intervienne pour approuver la vente ; parfois, la lauzime est incorporée à l’acte de vente. Quelques actes signalent le montant d’un servicium à verser, au cas où l’on retrouverait son ou ses bénéficiaires563. Dans les registres du Terrefort occidental, on se contente, parfois, de signaler que le bien est vendu, excepté les dominations féodales. Les notaires de Castelnaudary précisent quelquefois que les biens vendus sont « francs, libres, immunes de toute prestation et service », ceux de Montgiscard les disent « francs et libres sans aucune servitude d’oblies ; ces mentions sont un peu moins nombreuses dans le Terrefort que dans la plaine. A titre d’exemple, dans le registre 3 E 1494 des Archives départementales de l’Aude, sur 29 ventes de parcelles, une seule est suivie d’une lauzime, mais on ne précise que pour cinq d’entre elles que le bien est « franc et immune de prestations » (un malhol, une terre, deux prés, un jardin). Pour 16 parcelles, on indique qui est le seigneur direct ou qu’il faut payer « les services accoutumés », dans un cas, le vendeur ne sait pas qui est le seigneur et ne connaît pas le montant des services. La condition de sept parcelles n’est pas indiquée. Dans ce registre, entre un quart et la moitié des biens-fonds ruraux seraient des alleux, bien moins que ne le laisse croire une estimation réalisée à partir des seules lauzimes. Celles-ci montrent, surtout, que les seigneurs sont plus actifs en matière de récupérations de droits de mutation dans le Terrefort haut-garonnais que dans la plaine.

233L’utilisation systématique des actes de vente fait apparaître que 48 % des biens ruraux du Terrefort occidental sont chargés de redevances et 80 % de ceux du Lauragais oriental. Ces redevances (obliae, servici), souvent très faibles (un denier tournois ou un denier tolsan), payées à des seigneurs doivent correspondre, le plus souvent, à des cens ou à des rentes constituées « féodales » qui ont, nous y reviendrons, tous les caractères de la censive. L’alleu a-t-il particulièrement résisté dans le Terrefort ou n’a-t-on pas oublié, profitant des troubles, l’existence de propriétaires éminents ? La qualité d’alleu ne serait-elle pas précisée systématiquement, pour rassurer l’acheteur, et parce que cela justifierait un prix plus élevé ?

  • 564 A.D.A., 3E 9444 f° 20 v°, un malhol franc de toute prestation de service, à Campgranier, à Casteln (...)
  • 565 A.D.A., 3 E 9456 f° 176 v°.
  • 566 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 23 v°, 30 octobre 1407.
  • 567 Pariset (F.), Économie rurale, industrie..., op. cit., p. 58 et suiv.
  • 568 A.D.A., 3 E 9465 non folioté et A.D.A., 3 E 9466 f° 160 r°.
  • 569 A.D.A., 3 E 8188 f° 42 v°, 1480.
  • 570 A.D.H.G., 3 E 10137 f° 125 v°.
  • 571 A.D.A., 3E 1493 f° 171 v°, 27 octobre 1420.

234Les parcelles dites « franches et libres » sont de toute nature, terres labourables, vignes, prés, jardins, parfois domaines ; elles sont souvent situées sur les confins des finages564. Le campmas de Rosilhac à Issel, vendu, en 1446, par Guilhem de Baure à Peytavine veuve de Pierre Pascal, à ses deux fils, à Jean Damilhac de La Pomarède et à son fils Bartholomé, est dit « franc et libre de tout service », il est très bon marché 5 £ tr, il comprend « terris nemoribus bartis et pra-tis », mais les friches doivent prédominer565. Le campmas des Hovelhiorum (ou des Ovelhii), à Baziège, « de franca lodio », est acheté 50 £ tr, en 1407566. Les redevances ne sont pas souvent évoquées dans les baux à court terme de domaines, mais cela ne prouve pas que le bien soit franc. Normalement, s’il est en tenure, le bailleur doit payer les oblies, de même que les tailles, sauf exception signalée dans le contrat ; au xixe siècle, le propriétaire payait les impôts et récupérait sur les preneurs un complément, sans que cela soit indiqué clairement dans le bail567. Il me semble, toutefois, que les paires de poules mentionnées dans les contrats de fermage ou de métayage constituent un substitut du cens. Le métayer, par exemple, qui prend le campmas de R. Sabatier, un licencié ès lois, doit donner deux poules568, le fermier d’une borie située à Souilhanels, appartenant à H. Pintonis, un marchand de Castelnaudary, doit fournir quatre poules à la Toussaint « bonnes et suffisantes »569. Quelques domaines sont dits francs, mais ils correspondent à des lots découpés sur les réserves seigneuriales et accensés : dans un acte intitulé « novum feudum », tout un « territorium francum et liberum ob omnium onere obliali » dans les dépendances de Baziège, lieu-dit « a sant marti dels camps », avec tous ses « juribus introytibus exitibus et pertinentis universis francum et liberum ab omnium dominatione feudali », est inféodé et le preneur doit, tous les ans, servir à Jean de Saxis « domino directo », pour oblies, quatre cartons de froment, un carton d’avoine et une paire de poules570. Une pièce de terre « pradatam » franche, située dans les dépendances de Montferrand, al prat Mauric, est vendue 10 £ tournois. Elle est achetée par « noble homme » Aymeric de Bonovillario, d’Auriac, pour lui et son épouse « noble Marguerite », les confronts sont « noble » Maurand de Mailhaco, à l’autan, le seigneur d’Airoux, au cers571. Ne s’agit-il pas, là aussi, d’une parcelle découpée sur une réserve ?

2. Les rentes

  • 572 On note la même chose en Quercy, Lartigaut (J.), Les campagnes..., op. cit., pp. 197-198.
  • 573 Les actes de constitution de rente sont toujours intitulés « emptio ».
  • 574 Une branche de la famille est seigneur de Saint-Léon (commune, Haute-Garonne).
  • 575 A.D.H.G., 3E 10161 f° 173 r°.
  • 576 A.D.H.G., 3E 10161 f° 173 v°.
  • 577 A.D.H.G., 3E 10161 f° 280 r°.
  • 578 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 249 v°, 15 février 1410 (n.st.).
  • 579 A.D.H.G., 3 E 10137 f° 129 v° et f° 130 r°, 1er juillet 1460.

235Les registres notariés fournissent quelques exemples de constitutions de rentes concernant des alleux. Il semble que l’on puisse parler de cens plutôt que de rentes, le vendeur s’engageant à payer tout ce qui est caractéristique de la censive (oblies, arrière-acapte, pax, justice, « dominations féodales »)572. Philippe Wolff avait noté ces constitutions de rentes de caractère seigneurial ; celles qu’il avait rencontrées étaient souvent suivis de pactes de rachat, ce qui n’apparaît pas, excepté une fois, dans les exemples du Lauragais. Plusieurs constitutions de cens sont réalisées dans les années 1408-1409-1410. Des famines sont attestées en Bordelais en 1406 et 1407, les délibérations des capitouls toulousains n’en parlent pas, mais de nombreux prêts de grains apparaissent, en 1407 et 1408, dans les registres notariés du Lauragais. Même si le prix du carton de froment, relevé par Ph. Wolff, ne traduit pas de problème particulier puisqu’il est de 3 £ en 1406 et de 2 £ seulement en 1407-10, les crises frumentaires ont dû toucher aussi le Toulousain. Les paysans les plus pauvres constituent alors des rentes, au sens féodal, sur leurs biens. Les acheteurs sont les nobles locaux mais aussi des notables, des marchands essentiellement. Le 18 janvier 1408, dans un acte intitulé « emptio »573, un laboureur de Mont-giscard, Bertrand Vasconis, vend à noble Arnaud-Guilhem de Guavarreto, seigneur de Toutens, mais habitant à Montgiscard574, un denier tournois d’oblies « sive redditus » annuel, « paquis et dominationibus feudalis », un denier tournois de justice et un denier tournois d’arrière-acapte, sur une séterée de terre « franche et libre et sans autre domination féodale », située à la condamine den Mauri, à Montgiscard, pour un écu d’or575, il lui vend aussi un denier tournois d’oblies, ainsi que justice, arrière-acapte et pax, assignées sur « une terre franche et libre », située au même endroit, pour cinq setiers de froment576. Le 31 août 1410, Sance de la Barta, tisserand de lin ou laboureur (selon les actes), de Montgiscard, vend, toujours à A.-G. de Guavarreto, un cens du même montant, accompagné de justice, arrière-acapte et autres dominations féodales, sur une pièce de terre franche à Montgiscard, le prix est encore de cinq setiers de froment577. Pétrone, épouse de P. Porquerii, marchand toulousain, achète à Pierre de Abbadia, laboureur de Montgiscard, et à Paula, son épouse, un denier tournois d’oblias seu redditus payé, tous les ans, à perpétuité, à la Toussaint, portant sur six mésalhées de malhol « franc et libre d’oblies, servitudes annuelles et autres dominations féodales », un denier tournois de justice, un denier d’arrière-acapte, foriscapes sive pax (pour un sou de vente, un denier tolsan, pour un sou d’engagement, une obole) et autres « dominationibus directis seu feudalibus », le tout pour 25 sous tournois petits578. Ces achats de cens coûtent entre 25 et 50 sous, le prix de deux à cinq setiers de blé, mesure de Toulouse, en année normale. Ils assurent à leur acheteur un denier tournois annuel, un cens recognitif, représentant entre 1/300 et 1/600 de son prix d’achat, le rapport de la rente perpétuelle est extrêmement faible, mais, bien sûr, l’essentiel du revenu est assuré par les droits de mutation. On peut se demander, toutefois, s’il ne s’agirait pas d’un prêt où la terre constituerait un gage, si ce genre de cens n’est pas destiné à être rapidement racheté, ce qui apparaît dans l’exemple suivant : les frères Jean et Jean-Bernard de Guavarreto, de Montgiscard, vendent à Pierre de Borderia et à Azémar Garrissonis, son socius, tous les deux bailes de l’hôpital Saint Jacques de Montgiscard, six setiers de blé censuel et de rente (annualia censualia et rendualia), assignés sur un moulin à vent, au prix de 30 écus ; suit une promesse de rétrocession, à la demande, au même prix579. Des nobles, momentanément gênés, constituent donc un cens, par une vente à réméré, sur un de leurs biens. Le rapport pour le preneur, dans ce cas, est proche de 8 %.

  • 580 A.D.A., 3 E 9474.
  • 581 On se rapproche du rapport signalé pour Toulouse ou pour la Castille. A Toulouse, le rapport est d (...)
  • 582 A.D.A., 3 E 9474 f° 12 v° et f° 13 r°.
  • 583 A.D.A., 3 E 9474 F 14 r° et F 15 v°.
  • 584 Gilomen (H.-J.), L’endettement paysan et la question du crédit dans les pays d’Empire, Endettement (...)
  • 585 Dans cette région, elles sont en numéraire et apparaissent comme des augmentations du cens. Les ba (...)

236Quelques vraies constitutions de rente, sans les dominations féodales, bien qu’on emploie le terme de cens, apparaissent. Dans un registre qui couvre les années 1498-1511580, sont rassemblés toute une série d’actes concernant la famille Amiel, « noble sire Guiraud Amellii, bourgeois de Toulouse, seigneur de Tréville et d’Airoux », puis son fils. Plusieurs habitants de Tréville et des villages voisins assignent une imposition sur leurs propres terres et la vendent à Guiraud, en 1498, après deux années de mauvaises récoltes. Le prix est toujours à peu près le même : une carteria de froment censualis est vendu un écu (à 27 s 6 d tournois) ; la carteria de blé (mesure de Castelnaudary) coûte alors en moyenne deux sous, le capital consacré à l’achat de la rente rapporte un peu moins de 8 %581. La superficie des parcelles est indiquée, on peut évaluer la part de récolte à livrer. Elle peut être très faible : Jean Barravi vend et assigne, en janvier 1498, une nouvelle imposition de trois carterias de blé sur une borie de 30 sétérées de terre, soit 0,5 % de la production annuelle possible ; le plus souvent, elle correspond à 5 % de la récolte annuelle : le même Jean Barravi assigne la même rente sur un champ de trois sétérées582. Des rentes sont constituées sur des vignes : une, par exemple, d’un setier et demi de blé pèsera sur une vigne de deux sétérées, une autre, de deux sarcinées « de vin rouge bon et pur », sur une vigne d’une sétérée et demie, cette rente est vendue 8 écus d’or583. Aucune clause de rachat n’est prévue dans ces actes. On n’aperçoit pas en Lauragais de constitutions nettes de rentes sur censives. Elles existent, par exemple, dans l’Empire584 et dans le Bassin parisien585. Ce phénomène de constitution de rente s’y produit, toutefois, plus tôt qu’en Toulousain, principalement au xiiie siècle. Peut-être néglige-t-on simplement de signaler, en Lauragais, quand il y a constitution de rente, que la parcelle est une tenure, on peut supposer que Pierre et Guiraud Amellii sont déjà seigneurs directs des terres sur lesquelles sont assignées les rentes qu’ils achètent.

  • 586 C’est aussi le cas en Auvergne ; Pierre Charbonnier note toutefois que des paysans vendent à leur (...)
  • 587 Castaing-Sicard (M.), Les contrats dans le très ancien..., op. cit.., p. 268.
  • 588 A.D.A., 3 E 1479 f° 84 r°, 1411.
  • 589 A.D.A., 3 E 14933 f° 27 v°, 1420.
  • 590 A.D.A., 3E 9444 f° 4 r°, 1er sept 1405. Une autre vente de 12 setiers et une quartière de blé cum (...)

237Les actes de constitutions de rentes ou de cens sont, toutefois, rares dans les registres notariés586, moins d’une trentaine pour plus de 3 000 actes recensés. Pourtant, à Toulouse, Mireille Castaing-Sicard notait que « la constitution de rente qui servait en pays coutumier à tourner la prohibition canonique ne connaîtrait un véritable succès qu’au xiiie, de même que les baux de bétail ou de semence (spéculation sur un capital en nature) »... « Ces pratiques ne se développent que fin xiiie et surtout aux siècles suivants car la lutte contre l’usure est tardive ici »587. Cela ne se produit, peut-être, que tout près de Toulouse, dans le gardiage, la viguerie, là où les Toulousains investissent en priorité ; à moins, ce qui est plus vraisemblable, que la plupart des constitutions de rentes ne se fassent oralement ou bien sous seing privé. En effet, des rentes sont constituées pour le service d’obits (messes anniversaires perpétuelles) ; d’après les testaments provenant de Castelnaudary, ces constitutions d’obits, demandées par deux testateurs sur trois, coûtent, chez les ordres Mendiants, comme à la collégiale, un setier de froment annuel ou huit livres tournois, somme probablement nécessaire à l’achat d’une telle rente (5,5 £ seulement pour les achats faits par G. Amelli, dans une période de crise). Le système pratiqué pour ces rentes obituaires est bien explicité dans certains testaments : Michèle, veuve de P. Barravi, lègue 8 £ tr « in augmento obitum » (pour une messe solennelle de requiem par an) à la collégiale Saint-Michel, pour acheter un setier de froment censuel588 ; G. Textor fait donation d’un setier de froment censuel, servi le 15 août, aux obits de Saint-Michel, ses héritiers peuvent payer, s’ils veulent, 8 £ tr589. Or, si l’on voit des legs de rentes dans les testaments, on ne trouve pas, dans les registres de notaires, les assignations correspondantes. Elles étaient, peut-être, consignées dans les registres des bénéficiaires et elles ont pu disparaître, dans ce cas, avec les archives ecclésiastiques, à moins que les héritiers n’aient systématiquement choisi de verser un capital plutôt que de servir une rente. On aperçoit ces rentes, toutefois, à l’occasion d’une vente de « cens » « bladorum censualium cum eorum directis dominationis », effectuée par l’église Saint-Michel de Castelnaudary à Guilhem Doladilha, prêtre et chanoine de la dite église, pour 94 £ 10s tr, avec des délais de paiement étalés sur plusieurs années590. Tous les détails sont fournis, indication du bien, du cens, du nom du tenancier, du prix. Vingt et une personnes donnent entre une quartière et deux setiers de froment « censuel », pour un total de 12 setiers une quartière. En fait, il s’agit de rentes constituées pour le service d’un obit, on le précise : une quartière de froment, par exemple, pour un jardin ou verger, que fait X aux obits, vendue deux francs d’or, deux quartières de froment que fait X aux obits, vendues 4 francs d’or. Ces rentes ont tous les caractères de la censive, ce que n’évoquent pas les testaments. Les superficies des biens ne sont pas indiquées ; pour 15 d’entre eux, souvent jardins ou vergers, la rente est faible, une ou deux quartières, soit 2 à 4 sous tr, étant donné le prix moyen du setier de Castelnaudary. Le rapport, pour l’acheteur, est de l’ordre de 5 % l’an, avec un setier de froment à huit sous, en année normale.

3. Les cens

  • 591 A.D.A., 3 E 1493 f° 10 r°.
  • 592 A.D.A., 3 E 1493 f° 105 r°.
  • 593 A.D.A., 3 E 1493 f° 16 v°.
  • 594 A. D. H. G., 3 E 18270 f° 35 r°.

238Les cens dont le montant est précisé dans les actes notariés (beaucoup sont dits « accoutumés ») sont, très souvent, faibles ; en Lauragais oriental, la moitié sont purement recognitifs, un denier tr ou tolsan, le seigneur de Peyrens perçoit un quart de poule pour une parcelle de terre591, le seigneur de Belflou et G. Olrici, une poule pour sept quartières de terre592, G. Ebrardi, 5 deniers tr pour un campmas et ses terres593, Raymond-Amiel de Penafort, époux de Marie de Pia, trois poules pour le campmas des Rigaldi au Puy-Saint-Pierre (bâtiments et deux sétérées de terre). Il reçoit toutefois un cens plus consistant pour un jardin (trois sous parisis) et espère obtenir des revenus plus importants puisqu’il autorise le nouvel acheteur du campmas à édifier un moulin, s’il le désire, contre le service d’un setier de froment, et un four à pain, pour cuire pour son usage personnel ou pour la vente, contre une carteria de froment et une d’avoine ; il lui concède aussi une pêcherie, en échange de cinq deniers tolsans594.

  • 595 A.D.A., 3 E 1493 f° 110v°.
  • 596 A.D.A., 3 E 1493 f° 6 v°.

239Les autres cens représentent, en Lauragais oriental, dans le cas des terres labourables, 5 à 6 % de la récolte que l’on peut tirer de la parcelle. Quelquefois, une rente a pu être constituée en faveur du seigneur direct, habituel prêteur, en surplus du cens, c’est peut-être le cas pour une terre grevée d’un service d’un setier de froment et un denier tolsan au profit du seigneur de Belflou (G. de Fontaynis)595. Une douzaine d’agriers sont signalés, ils concernent des biens situés à Pexiora ou Besplas et relevant de la commanderie de Pexiora ou des « seigneurs des agriers de Pexiora et Besplas ». Les domaines versent des cens généralement faibles, les deux tiers sont en argent, compris entre 5 d tr et 4 gros, soit 60 d tr. Parmi ceux payables en nature, le plus élevé est de quatre setiers de froment, il porte sur un campmas situé au Mas-Saintes-Puelles (sa superficie n’est pas indiquée) ; le setier de Toulouse étant en usage dans cette localité, la valeur moyenne du cens, en année normale, est de 2 £ tr. Pour les parcelles de vigne, si quelques-unes doivent livrer une part de la récolte, d’autres versent un très faible cens : 5 deniers tr pèsent sur deux sétérées et demi de malhol, le vendeur ne sait même pas qui doit le percevoir596, une émine de malhol sert une poule et un denier tr à G. de Roquefort. Quand une vigne est concédée à novum feudum, la redevance est une redevance partiaire, l’agrier semble une adaptation aux nouvelles cultures spéculatives ; le prélèvement est très élevé, souvent d’un quart, parfois d’un tiers, il ressemble plus à celui d’un métayage qu’à celui d’une tenure perpétuelle qui est, souvent, d’un sixième, un septième ou un neuvième.

  • 597 A.D.H.G., 3 E 10154 f° 37 v°, 29 janvier 1382 (n. st.)
  • 598 A.D.H.G., 3 E 10159 f° 214 v°.
  • 599 A.D.H.G., 3 E 10162 f° 74 r°.
  • 600 La situation des Andrés n’est pas très brillante. Ils achètent (ce qui est parfois dans ce secteur (...)
  • 601 Berthe (M.), Le droit d’entrée dans le bail à fief et le bail à acapte du Midi de la France..., op (...)

240Dans le Terrefort occidental, on retrouve à peu près les mêmes types de charges qu’en Lauragais oriental. Une partie des cens est recognitive, un denier tr ou un denier tolsan, une poule, pour une sétérée de terre. Pons de Rua, de Montgiscard, vend à Bernard de Baucio de Baziège, en 1382 (n.st.), 3 sous 3 deniers tolsans que lui font tous les ans des emphytéotes, ces cens portent sur deux arpents de bois, 13 arpents de pré, 15 parts de 9,5 arpents de terre (les 3/4 ?), 23,5 mésalhées de pré et cinq pugnères de terre ; le cens moyen est inférieur à trois deniers tournois l’arpent597. En 1391, Étienne de Meretino reçoit des reconnaissances portant sur des terres et des ostals situés à Gardouch. Les oblies versées sont, le plus souvent, d’un denier tournois ou d’un denier tolsan, qu’il s’agisse de terre, vigne ou ostal. Une cartonnade (quatre sétérées) de terre paie un denier tolsan, un ensemble de biens (ostal, jardin, aire et poulailler), dans les dépendances de Gardouch, aussi. Trois biens payent des oblies plus élevées : une vigne, 8 sous 4 deniers, un ostal avec jardin et aire dans les dépendances de Gardouch, quatre pugnères de froment, une borde avec jardin et aire dans les dépendances de Gardouch, « apud fontem », une émine de froment598. En 1410, Jean André et Pierre, son fils, reconnaissent tenir de Pierre de Mauriaco 23 parcelles et un ostal dans le fort599. Parmi ces biens figure le campmas des Andrés, campmas sive hospicio solo patu et viridario, pour lequel ils payent un « loyer » de 12 deniers tolsans annuel, ce qui ressemble beaucoup à des oblies. Pour une superficie totale de 23,87 arpents, ils versent 10 parts de fruits sur des vignes et des terres, un setier, trois pugnères et demi et cinq livralats de froment, et, en tolsans, tournois et pogès, l’équivalent de 9 sous 9 deniers une obole tournois. Certaines des oblies sont extrêmement faibles : un denier tr pour un arpent ou deux pugnères de terre ; les plus élevées, de deux sous tolsans, portent sur six pugnères de terre et malhol. Pour neuf arpents de terre, J. et P. André servent 3 sous 7 d tr d’oblies soit, en moyenne, 4 deniers une obole tr à l’arpent, la valeur à peu près d’un trentième de setier de blé, 0,66 % de la récolte normale (avec cinq grains récoltés pour un semé). On peut songer à un effort consenti par le seigneur, dans une conjoncture difficile, pour garder un tenancier600. Il est plus probable que ces cens faibles correspondent à des terres qui sont depuis très longtemps dans les mains des mêmes familles, les probables défricheurs ; les cens, immuables, sont restés ceux qu’ils étaient au xiiie siècle, ils n’ont pu être augmentés à l’occasion d’une vacance de tenanciers. Quelques reconnaissances faites un peu plus tard, en 1426, par Pierre Rosandi au même Pierre de Mauriaco, indiquent des oblies plus élevées : un demi-arpent de vigne est grevé de 10 deniers tolsans, six pugnères de terre, de 11 deniers tolsans, un arpent de bosigue, de 10 deniers tolsans, un demi-arpent de terre, de 10 deniers tolsans. La moyenne est de deux sous quatre deniers tournois l’arpent (tous types de parcelles confondues puisque qu’on voit dans cet exemple, que la nature de la terre ne change rien à l’oblie), la valeur d’un quart de setier, 5 % d’une récolte normale. Pour Maurice Berthe, ces cens modiques sont normaux si l’on a des entrages élevés : « la modicité des redevances annuelles découlait souvent de la lourdeur des prix d’entrée »601.

  • 602 Ramière de Fortanier (J.), Les droits seigneuriaux..., op. cit., pp.41-42.
  • 603 Dans la plaine, le cens moyen est de 15 sous à l’ha, mais le rendement est plus fort, P. Charbonni (...)

241Au xviiie siècle, en Lauragais, le taux des oblies est très bas : une pugnère de blé par sétérée (ce qui représente, à peu près, 2,5 % de la récolte) à Villeneuve, une fraction de coup de blé (1/32) et un ou plusieurs deniers par sétérée, à La Pomarède, pour une terre médiocre. Le monastère de Prouille prélève à Lacassaigne, sur 124 ha 64 ares, 58 setiers de blé, 14 setiers d’orge, une pugnère d’avoine, 27 gélines et 12 £ ; à Bram, sur 65 ha 60 ares, 38 setiers de blé, cinq setiers d’orge et 2 £602. Si l’on transforme ces ha en sétérées, on obtient des oblies supérieures à celles indiquées pour Villeneuve et La Pomarède, puisqu’on arrive, pour Lacassaigne, où la sétérée fait 58,47 ares, à un tiers de setier à la sétérée, à peu près, soit 6,6 % de la récolte et plus d’un sou tr, pour Bram, où la sétérée fait 35,59 ares, à 0,23 setier à la sétérée, soit 4,6 % de la récolte et 2 deniers une obole. On retombe sur les valeurs obtenues à partir des registres notariés du xve siècle. Les cens sont presque du même ordre en Auvergne : Pierre Charbonnier note, à partir des terriers, que le prélèvement moyen du cens à l’ha de terre labourable dans les Montagnes Occidentales est d’environ 5 sous pour un revenu brut (semence non déduite) de 60 à 75 sous, soit entre 6,6 % et 8,3 %603.

  • 604 Débax (H.), La féodalité..., op. cit., pp. 221-225.

242Les bénéficiaires des servicii, oblias ou dominationes mentionnés dans les actes de vente sont généralement le roi, l’Église (essentiellement le chapitre Saint-Michel de Castelnaudary et les Hospitaliers de Pexiora, plus rarement l’évêque de Saint-Papoul), quelques confréries et hôpitaux (hôpital Saint-Jacques de Castelnaudary, confrérie Notre-Dame de Fanjeaux), les nobles locaux, qualifiés de miles, domicellus, domina ou dominus de tel ou tel village. Quelques biens, même de faible importance, ont plusieurs seigneurs : R. de Fontaynis et B. d’Auberardo, seigneur de Lasbordes, sont co-seigneurs d’une borde et d’un campmas. P. de Fontaynis, B. d’Auberardo et un autre chevalier se partagent la directe d’une borde. La co-seigneurie provient du droit wisigothique ; le partage égalitaire était la règle jusqu’au xiie siècle, même si une melioratio était possible au profit d’un des enfants. H. Débax signale que l’aristocratie, pour éviter l’émiettement des fiefs, utilise à la fin du xiie siècle l’institution d’héritier, avec, bien souvent, intégralité de la succession dévolue à un fils604. Au xve siècle, pourtant, le système de l’héritage égalitaire est encore en vigueur, d’après ce qui apparaît dans les actes de la pratique.

  • 605 A.D.A. 3 E 1493 f° 63 r°.
  • 606 A.D.A., 3 E 9444 f° 137 v°.
  • 607 A.D.H.G., 3 E 10159 f° 57 v°.

243Des roturiers, marchands, hommes de loi, tels Arnaud Garreti, descendant du suprabajulus du xiiie siècle, A. Niseti, licencié ès lois, J. Moyneri, apothicaire605, ont aussi la seigneurie directe de quelques biens. Ils ont pu acheter des alleux repris en tenure par leurs anciens propriétaires ou acheter des cens à des nobles en difficulté. Certains ont commencé par prêter de l’argent à un alleutier en échange de la constitution d’une rente féodale, puis finissent par acheter la parcelle : J. Salnage, un marchand de Castelnaudary, achète pour 6 £ tr, un très petit prix, un malhol de trois sétérées et une pugnère sur lequel pèse un servicium de trois émines de froment, qu’il percevait lui-même606. D’autres constituent des cens sur des parcelles qu’ils mettent en vente (ils ne signalent pas s’il s’agit d’une sous-inféodation) : Pierre de Montmiech, de Montgiscard, qui est un des fermiers de la grange de Boulbonne située à Belbèze, vend un jardin ; l’acheteur doit lui servir un denier tolsan tous les ans607.

  • 608 A.D.A., 3 E 1495 f° 235 r°, 13 décembre 1464.
  • 609 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 148 v°, 1er sept 1407.
  • 610 La loi Julia permet au mari d’aliéner l’immeuble dotal de sa femme avec le consentement de celle-c (...)
  • 611 A.D.A., 3 E 9443 f° 50 r° et f° 58 r°, 28 mai 1404.
  • 612 A.D.A., 3E 9444 f° 93 v°.
  • 613 A.D.A., 3 E 1493 f° 76 r°, trois carterias d’un campmas de 12 sétérées, relèvent de b. r. de Fonta (...)
  • 614 Yves Dossat signale qu’il réclama, en 1267, le tiers de Villenouvette et son cousin Isarn le sixiè (...)

244Les « dominations féodales » sont l’objet d’un commerce actif, les acheteurs étant, surtout, intéressés par les lods et ventes et les droits d’entrée exigibles lors de nouveaux accensements. Une partie de la noblesse locale semble connaître des difficultés, au moins passagères, et vend ou loue pour quelques années ces droits féodaux, parfois à d’autres nobles, souvent à des hommes de loi. Noble Jean de Bac, seigneur de Saint-Michel de Lanès, cède à Arnaud de Gavarreto, bachelier ès décrets habitant Toulouse, la moitié de tous ses droits sur le priorat de Camon et la moitié des arrérages608. Noble Aymeric de Comminhano, co-seigneur de Saint-Michel-de-Lanès, et dame Austorina, son épouse, vendent à « vénérable homme sire » Bernard Dausti, licencié ès lois, de Toulouse, au prix de 172 £ tr, six cartons de blé censuel que les consuls de Saint-Michel-de-Lanès leur font tous les ans à perpétuité, pour albergue, à la Toussaint. Les paiements s’effectuent en trois fois, à raison de 49 £ tr, puis 60 £, puis 17 £. Le solde est versé à des créanciers du couple : Bernard Dausti doit donner 18 £ 15 s 6 d tr, en deux fois, à Arnaud del Fau, armurier de Toulouse, 10 écus d’or à sire G. Basteri, 12 £ tr au couvent des Carmes de Toulouse et 4 £ au notaire ordinaire de la cour du sénéchal de Toulouse609. Une famille connaît de grosses difficultés : en 1404, Gualhard Olrici, damoiseau, vend des droits féodaux, en présence de Juliana, sa mère, veuve de Guilhem Olrici, damoiseau, et de Cecilia, son épouse, celle-ci de licencia et consensu d’Aymeric de Collo, d’Issel, son père ; les deux femmes renoncent chacune à la loi « Julie de fundo dotale »610. Gualhard Olrici vend à Bernard-Raymond de Fontaynis, chevalier, seigneur de Belflou, « un sixième des dominationis, haute et basse justice, mixte, mère, impère de la juridiction et la moitié de tous les services, rentes, oblies et civadages, pailles, fromages, corvées, froment, avoine, poules, provenant des prés, bois, maisons, ripperiarum, vignes, terres cultes et incultes et toutes les choses qu’avaient l’habitude de tenir Pierre, Guilhem et Bertrand Olrici ou leurs héritiers, tant à Belflou et sa juridiction qu’à Barta, Salles, Saint-Michel-de-Lanès ou ailleurs, et tous les arrérages et dettes en raison de la dite sixième partie de la juridiction et de la moitié de tous les services », le tout, pour 100 £ tr611. Galhard et Cecilia Olrici louent (arrendament) aussi, en 1410, à Jean Niseti des « servicia bladi » que servent divers individus (un papier a été écrit de la main de Galhard : « ayso so los servizis menutz et usatum ? foriscapiis et pignorationibus... »), pour 10 ans, au prix de 8 £ tr612. On aperçoit, un peu plus tard, Jean Niseti co-seigneur de divers biens, en tant qu’héritier de G. Olrici613. Ces Olrici ont un ancêtre Bernard, damoiseau, consul de Castelnaudary en 1271, qui prête alors serment de fidélité au roi614.

245Peut-on repérer alleux et tenures dans les registres d’estimes ? Quelle est la nature des charges mentionnées dans ceux-ci ?

B. Alleux et tenures, rentes et cens d’après les estimes

  • 615 A.D.A., 4 E 076/CC 10 f° 186 v°.
  • 616 À Montgiscard, les cens et services sont mentionnés dans la partie du document contenant une estim (...)
  • 617 Les deux figurent dans les estimes du Comtat Venaissin, Zemer (M.), Le cadastre..., op. cit., pp. (...)

246Un premier problème tient au stade de réalisation des livres d’estimes. Les registres dont nous disposons peuvent constituer le dernier état de l’allivrement, les charges pesant sur les biens ont déjà été déduites et n’apparaissent pas, sauf si elles sont exceptionnelles. C’est ce qui se passe à Castelnaudary, on se contente de signaler quelques cas qui doivent correspondre à un rabais important, par exemple, un des campmas d’Anna Jacma Montelha, de 30 sétérées de terres labourables, est allivré 5 £, « parce qu’il fait au roi 1 £ 8 s 7 d de service »615. Il est impossible de voir si l’abattement effectué est vraiment très fort car l’autre campmas d’Anna Jacma, de 50 sétérées, situé près du Fresquel, est allivré seulement 6 £, peut-être les bâtiments sont-ils moins importants, les terres de moindre qualité. Dans les autres localités, les livres d’estimes mentionnent les charges pesant sur les biens616. Un deuxième problème concerne la nature de celles-ci. S’agit-il d’oblies ou de rentes constituées617 ? À Fendeille, ces charges sont exprimées sous la forme « fa de servici », à Montesquieu, Montgiscard et Ayguesvives, des parcelles, « font le quart au roi », d’autres « font » telle quantité de blé ou telle somme ; parfois, on trouve la mention, à Montesquieu, en particulier, « fa de oblias ». Dans les registres de reconnaissances, comme dans les actes notariés, le terme de servicium est employé pour cens, concurremment avec obliae, et très rarement, censum. Les rentes constituées ont souvent, nous l’avons vu, tous les caractères de la censive, elles peuvent se dissimuler sous ces mêmes appellations. Étant donné leur rareté dans les registres notariaux, on doit pouvoir considérer, toutefois, qu’une grande partie des services notés dans les estimes consiste en cens classiques, on peut essayer de l’évaluer.

1. Biens-fonds ruraux sur lesquels pèsent des redevances

  • 618 À moins que l’abbaye de Boulbonne ne se désintéresse de ses tenures. Elle a acheté Les Bastards au (...)

247Si les charges déclarées correspondent toutes à des cens, entre 1,78 % et 99,03 % des biens ruraux (parcelles de terre, jardins isolés, parcelles portant les bâtiments des fermes), selon les localités, seraient des tenures, à la fin du xve siècle. Les deux extrêmes apparaissent dans deux communautés voisines, Castelnaudary et Fendeille, mais le faible pourcentage de tenures à Castelnaudary tient, comme déjà dit, au mode de fabrication des registres, les charges déductibles n’apparaissant pas sur les livres conservés. A Fendeille, dans les estimes de 1495, les articles déclarés sont accompagnés de la mention « fa de servici », sans aucun montant. Si l’on considère l’ensemble des biens, y compris ostals, bordes, logars, aysinas, moulins, seuls 15 sur 583 (les forains sont absents du registre) échappent à cette mention et seraient donc des alleux, soit 2,57 %. Dans le registre d’estimes de 1428, sur un total de 710 biens, 71, soit 10 %, ne sont pas chargés de redevances et seraient des alleux, à moins que la redevance ne soit ignorée du contribuable ; en effet, pour quelques biens, la mention « fa » est portée sans aucun montant, l’expression « bien franc » n’est employée qu’à deux reprises. La diminution de la part relative des alleux peut être due à une reprise en main effectuée par les seigneurs fonciers ou à quelques constitutions de rentes. Dans les localités du Terrefort haut-garonnais, de 16 à 35 % des biens ruraux sont chargés de redevances, sauf aux Bastards, ce qui est, peut-être, à mettre en relation avec le fait que, dans ce village, le défrichement est en cours618.

248Si l’on calcule le pourcentage de biens grevés de charges, par catégorie, on obtient :

249À Castelnaudary et aux Bastards, le très petit corpus n’est guère exploitable, à Fendeille, la quasi-totalité des biens est grevée de charges, on ne peut guère noter de différences selon leur nature, ce que l’on aperçoit, par contre, dans les trois bourgades de Montesquieu, Montgiscard et Ayguesvives. Là, les redevances sont moins fréquentes pour les bâtiments urbains que pour les parcelles rurales et, pour ces dernières, on note des variations d’une localité à l’autre. À Montesquieu, on mentionne des redevances pour la moitié des fermes et des vignes, pour un tiers seulement des autres parcelles et même 10 % des jardins et des bois. À Montgiscard, les fermes et les vignes sont aussi les parcelles le plus souvent chargées de redevances, mais en plus faible pourcentage qu’à Montesquieu. Les jardins isolés ainsi que la quasi-totalité des prés en sont exempts. À Ayguesvives, les charges portent rarement sur les terres « mixtes » et les bois.

250Ce sont surtout les domaines et les vignes, des biens qui rapportent, qui sont grevés de taxes, peut-être parce que ce sont des biens que les seigneurs surveillent particulièrement (surtout pour les fermes découpées sur la réserve), peut-être parce qu’il est avantageux pour les contribuables de prétendre payer des charges qui viennent en déduction de l’allivrement. Les estimateurs doivent vérifier tout de même les allégations des déclarants et les jardins maraîchers de Montgiscard, par exemple, ne sont pas chargés de redevances alors qu’ils rapportent et sont situés tout près du village, le seigneur s’il y en avait un, n’en aurait pas oublié l’existence. Quelques rentes ont pu être constituées sur des vignes.

251Si l’on compare, pour Montesquieu, les pourcentages de biens soumis à des redevances, par catégorie, dans les deux registres 5 E 66 et 5 E 67,

  • 619 Un peu plus, en réalité, car, dans le registre dit de 1409 sont mentionnés trois rabais concernant (...)

Note 1595619

252On voit que les mentions de charges sont beaucoup plus nombreuses dans le registre de 1485 que dans celui réalisé quelque trente ans auparavant, souvent du double, sauf pour les fermes. Si l’on compare les deux manifestes successifs d’un même individu pour voir si apparaissent, chaque fois, les mêmes biens chargés de redevances, si des parcelles ne payant rien dans le registre le plus ancien sont grevées de charges en 1489, signe de constitutions de rentes, les résultats ne sont guère concluants. Les manifestes de cinq propriétaires, les Advessen (Daniel, Jordy et Pierre-Jean), maître Pierre Bobald et Bernard Dalby ont été utilisés, à titre de test. Les toponymes localisant les biens ne sont pas les mêmes d’un registre à l’autre, quand ils le sont, ce sont les superficies des parcelles qui ont changé. Certains déclarants détiennent le même nombre de parcelles sur lesquelles pèsent des charges, d’autres moins, d’autres plus. On ne peut, dans ce dernier cas, voir s’il s’agit de parcelles situées aux confins des finages, peut-être accensées récemment, ou de parcelles proches des agglomérations et sur lesquelles des rentes auraient été constituées.

253Pour évaluer si les charges mentionnées dans les estimes correspondent à des cens ou à des constitutions de rentes effectuées par des alleutiers appauvris, il faut s’intéresser à la nature de ces charges et à leur montant.

2. Nature des redevances

  • 620 Partak (J.), La seigneurie hospitalière de Caignac, op. cit.
  • 621 Teil (G.), La commanderie..., op. cit., Guimbail (R.), Expansion et crise..., op. cit.
  • 622 Cazes (J.-P.), La bailie..., op. cit.
  • 623 En Provence, en Bordelais..., Stouff (L.), Redevances..., op. cit., pp. 45-47 et pp. 51-52.
  • 624 F. Mimiague note que l’évolution s’est faite entre 1360 et 1438, les redevances à part de fruits s (...)
  • 625 Elles constituaient 34,8 % du total des redevances au milieu du xive siècle, Leroy (P.), La comman (...)

254Les redevances mentionnées dans les estimes sont généralement fixes, les parts de récoltes, très minoritaires, sont même absentes en Lauragais oriental. Les agriers sont caractéristiques des tenures, ils étaient très fréquents aux siècles précédents, consistant, en général, en un quart de la récolte (les concessions étaient dites quartanerium ou fevum quartanerium), parfois un cinquième, un sixième ; ils dominaient largement à Caignac, au xiiie siècle, constituant 62,16 % du total des redevances620, ils étaient encore nombreux à Pexiora aux xiiie-xive siècles, après y avoir dominé au xiie siècle621. En 1272-73, pour l’ensemble de la bailie de Castelnaudary, les biens relevant du comte de Toulouse étaient, en majorité, frappés de redevances fixes, toutefois, plus du quart (surtout des terres labourables et des vignes) livraient une part de récolte622. Ces redevances partiaires ont reculé ou ont disparu, comme partout, courant xive siècle, quand le tenancier devenu rare ou menaçant de déguerpir, on a dû lui proposer des conditions plus favorables ; elles ont été remplacées par des cens fixes, en nature ou en argent623. Au milieu du xve siècle, elles ne représentent plus que 5 % des concessions perpétuelles à Pexiora624 et, fin xve-début xvie, 2 % à Renneville625. La part des redevances partiaires dans les localités du Terrefort, à la fin du xve siècle, d’après les estimes, reste plus élevée que dans ces deux bourgades.

  • 626 En Catalogne, par exemple, ils constituent plus de 85 % des cens fixes, entre 1225 et 1300, Viader (...)
  • 627 Castaldo (A.), Le consulat médiéval d’Agde.... op. cit., p. 251. Prieur (M.-H.), Le quartier Saint (...)
  • 628 Contre 43,8 % en nature, 4,2 % mixtes, 0,25 % divers ou inconnus et 0,15 % en parts de fruit ou co (...)
  • 629 Cazes (J.-P.) La bailie..., op. cit., p. 63.
  • 630 Partak (J.), La seigneurie hospitalière de Caignac, 1250-1300..., op. cit.
  • 631 Ainsi que le dit Maurice Berthe, c’est parce que les seigneurs reçoivent l’argent des acaptes qu’i (...)
  • 632 Zerner (M.), Les cadastres anciens des villes et leur traitement par l’informatique, Rome, 1989, p (...)

255Si la concession à cens fixe est devenue la norme au bas Moyen Âge, ce sont les redevances en nature, d’après les estimes, qui prédominent en Lauragais, sauf à Fendeille. On ne suivrait pas le schéma existant partout dans le Midi où apparaissent, très tôt, des cens en argent qui se généralisent626 ; dans les estimes de Montpellier, Agde, Carpentras, Espalion, les redevances en nature sont rares627, dans celles de Lodève, les cens fixes dominent largement (99,85 %) et la majorité de ceux-ci est en numéraire (51,6 %)628. La part relative des redevances en argent, serait même, en Lauragais, d’après les estimes, inférieure à ce qu’elle était au xiiie siècle. En effet, dans le Liber reddituum, pour l’ensemble de la bailie de Castelnaudary, les cens fixes étaient pour les quatre cinquièmes des cens en argent, suivis des cens en nature (17,2 %, surtout des céréales), puis des cens mixtes (3,4 %)629 ; à Caignac, sur le Terrefort, à la même époque, 24,32 % du total des redevances était en argent630. On peut supposer que, si la quasi-totalité des redevances fixes en argent mentionnées dans les estimes du Lauragais correspondent à des cens, ce n’est probablement pas le cas de toutes les redevances fixes en nature. Si certaines sont, effectivement, des cens car tous les seigneurs n’ont pas éprouvé le besoin de convertir les cens en nature en cens en argent pour obtenir un plus grand rapport car ce qui est intéressant dans la tenure, ce n’est pas le cens, mais l’acapte et les droits casuels631, si d’autres sont, peut-être, liées à une fraude des contribuables, le cens en nature entraînant un allivrement plus faible de la parcelle632, d’autres doivent correspondre à des rentes constituées, féodales ou non, sur les biens, qu’ils soient des tenures ou des alleux.

  • 633 À Lodève, on a la même chose, le bâti urbain est surtout grevé de redevances en argent. Pour les p (...)

256Une étude plus précise des redevances mentionnées permet d’évaluer les parts respectives des cens et des rentes constituées. A Fendeille, en utilisant le registre d’estimes de 1428 puisque celui de 1495 ne détaille pas les « servici », 602 indications de charges sont utilisables (dans quelques cas, le service n’est pas indiqué ou bien porte sur deux biens), toutes sont fixes. Les redevances en argent dominent, plus largement pour les biens situés en ville (aysina, bordes, ostals, logars), pour lesquels elles constituent 71,43 % des occurrences633, contre 55,44 % pour les biens ruraux. Les redevances fixes en nature occupent la deuxième place.

Types de redevances mentionnées dans les estimes de 1428 à Fendeille

Types de redevances mentionnées dans les estimes de 1428 à Fendeille

257Il n’existe pas de redevance spécifique à un type de parcelle, toutes, même si elles portent des récoltes pérennes, peuvent fournir des céréales.

  • 634 Les mesures employées sont dites de Castelnaudary, de Fendeille, de Laurac ou non précisées. À Fen (...)
  • 635 Castaing-Sicard (M.), Les monnaies féodales et la circulation monétaire en Languedoc (xe-xiiie siè (...)
  • 636 Il est probable, tout de même, que la parcelle moyenne, à Fendeille, soit plus petite que dans le (...)
  • 637 Dix parcelles bâties, 17 terres labourables, cinq jardins, un verger, cinq malhols, une terre et m (...)
  • 638 Ramière de Fortanier (A.), Des confréries médiévales aux confréries de pénitents, Castelnaudary, h (...)

258Le total des redevances signalées à Fendeille est de 60 setiers634 de froment, six setiers d’avoine, presque deux setiers d’orge. Les 60 setiers de froment portent sur 169 parcelles, un tiers de setier, en moyenne, est fourni par une parcelle, si celle-ci fait à peu près la même superficie moyenne que dans le reste du Lauragais, trois sétérées, cela correspond à 2,2 % d’une récolte moyenne. Les redevances en argent, dont la moitié est exprimée en tolsans635, signe de leur ancienneté, atteignent 9 £ 11 s 2 d tr 1 obole tr. Ces redevances en argent pesant sur 355 biens, la moyenne, pour un bien, est de 6,45 deniers, 2,15 deniers à la sétérée en conservant la même superficie moyenne des parcelles. On se trouve là en présence de véritables cens, plus faibles même, si la superficie moyenne des terres est bien celle considérée636, que ceux mentionnés dans les registres notariés, dans les terriers des commanderies ou au xviiie siècle. La variété des redevances est assez grande : volailles, vin, céréales, cire, argent. Les volailles apparaissent à 42 reprises à propos de parcelles urbaines, bâties ou non, mais aussi de biens-fonds ruraux637. Elles accompagnent parfois un autre produit : pain, vin, cire, argent. Des parcelles ont été découpées : chaque tenancier doit des parts de volaille, jusqu’à un quatorzième de poule (« 1/7 d’une demi-poule »). Le total des volailles fournies n’est pas très élevé, 24 poules en additionnant poules entières et diverses portions. Un estimé déclare fournir trois oies pour un jardin, d’autres, des parts correspondant à six oies (entre autres, 1/7 et 1/8 d’oie). Le tenancier, dans ce cas, doit donner une oie entière tous les sept ou huit ans ou les voisins s’entendent pour livrer à tour de rôle une volaille. On trouve aussi quelques redevances en vin et pain. Ce genre de servicium, spécialement quand il est associé à du luminaire, est souvent à destination de l’Église (une lampesa d’huile est servie à l’église du village, par exemple, ce qui semble correspondre à un legs). Un malhol « fa ung lieyt a lospital », le lieyt étant un lit, cette redevance consiste-t-elle à pourvoir un lit de literie tous les ans (oreiller, draps, couverture) ? Les testaments fendeillois ne mentionnent pas d’hôpital, Arnaud Ramière de Fortanier en signale un, construit seulement en 1531638. Peut-être la confrérie locale, Saint-Martin, exerce-t-elle l’hospitalité ? A moins que cette rente ne s’adresse à l’hôpital de Castelnaudary. Les redevances de ce type sont plus rares dans les autres localités. À Montgiscard, une redevance en huile porte sur un payssieu et est destinée à la chapelle Notre-Dame de Roqueville, deux poules sont dues par un tenancier pour une parcelle de terre. À Ayguesvives, les propriétaires de huit biens (un ostal, deux fermes, deux jardins mais aussi deux friches et un pré) doivent verser, en tout, 15 poules (seules ou accompagnées de blé). A Montesquieu, une poule est fournie pour un pré et six poules, entre autres, pour une ferme.

259La quasi-totalité des biens est, à Fendeille, chargée de véritables cens, au profit, pour l’essentiel, probablement, de la famille de Fontaynis-Souquette, seigneur de Fendeille et d’autres villages de la Piège. Quatre exploitations situées à Laval-des-Rousses, village alors en voie de désertion, sont des tenures, disent les déclarants, de l’abbé de Saint-Papoul, signe de l’ancienneté de l’inféodation, l’abbaye de Saint-Papoul est devenue cathédrale en 1317.

260Si l’on établit, pour les localités du Terrefort haut-garonnais, le montant des redevances moyennes à la sétérée, on peut, par comparaison avec les cens moyens précédemment indiqués, différencier les cens des rentes constituées.

  • 639 En Catalogne, du xe au xve siècle, il est d’un onzième des récoltes, Bonnassie (P.), La Catalogne. (...)
  • 640 A.D.H.G., 5 E 67 f° 8r°.

261À Montesquieu, en 1485, trente deux redevances partiaires apparaissent, elles portent sur 31 sétérées consacrées, le plus souvent, aux vignes. Cinq sont qualifiées d’agrier, les autres sont, majoritairement, des redevances d’un quart, parfois d’un sixième ou d’un neuvième. Quel est le taux normal de l’agrier ? Pourquoi emploie-t-on ce terme au lieu d’indiquer la part précise de récolte livrée ? Un agrier, dans un acte notarié, nous l’avons vu, est d’un neuvième de la récolte, est-ce cela le taux normal en Lauragais639 ? Toutes les autres redevances sont fixes et en nature, 96 % sont livrées en blat, 2 % en avoine, les autres consistent en blé et poules ou blé et avoine, une s’effectue en vin. Les redevances en blé atteignent 221 setiers (plus six setiers d’avoine) et portent sur 565 sétérées, elles sont, en moyenne, de 0,39 setiers à la sétérée ou 0,65 setiers à 1’ha, quel que soit le type de culture. Quelques grandes parcelles sont en friche et 74 sétérées de terre ne fournissent que 12 setiers de blé de rente ; si on les enlève du corpus car atypiques, 491 sétérées rapportent 209 setiers, la moyenne monte à 0,42 setier la sétérée de 59,27 ares, soit 0,70 setier à l’ha, tous types de parcelles confondus. La redevance en nature correspond, en moyenne, à 8 % de la récolte en année normale, ce qui est proche du taux habituel des oblies. Quelques campmas livrent de très faibles redevances, deux ou trois liuralats ou pugnères de blé pour la parcelle portant la maison mais aussi, parfois, les deux ou trois parcelles entourant celle-ci ou, même, l’ensemble de l’exploitation. Ces redevances correspondent clairement à des cens ; on voit ainsi Pierre-Jean Advessen verser trois pugnères de blé et trois pugnères d’avoine pour une borie « a sant Rome » de 12 sétérées640. Si l’on considère, une à une, toutes les parcelles de terre labourable grevées de charges, puisque c’est sur elles que l’on constitue en priorité des rentes, quelques-unes livrent deux ou trois liuralats de blé à la sétérée, un cens purement récognitif, la majorité livrent de une à deux pugnères, soit de 5 à 10 % de la récolte moyenne, 30 parcelles sur 196 livrent une rente de l’ordre d’un setier à la sétérée, soit 20 % de la récolte moyenne, ce qui traduit l’existence d’une rente constituée.

262À Ayguesvives, en 1489, les redevances en nature, majoritaires, sont payées en blé, l’avoine n’apparaît qu’à trois reprises. Les cens en argent et mixtes (blé et argent) portent sur tous les types de parcelles. Vingt neuf parts de récolte sont mentionnées, six sont qualifiées d’agriers (pour l’un, on précise qu’il est au neuvième), les autres parts sont, le plus souvent, d’un sixième, ces redevances proportionnelles touchent, essentiellement, vignes et parcelles de terre. Sur les 183,87 arpents grevés de charges, 71,25 arpents donnent une part de récolte, 39,25 arpents donnent de l’argent, 75,37 arpents donnent du grain, soit 42 setiers de blé et trois setiers d’avoine (et aussi 15 poules). La moyenne est de 0,55 setier à l’arpent de 56,9 ares ou de 59,27 ares soit 0,96 setier à 1’ha ou 0,92 setier, 11 % de la récolte moyenne. Pour les terres labourables, la norme est de livrer une ou deux pugnères de blé à la sétérée, comme à Montesquieu, seules 11 parcelles (sur 41 livrant une rente en blé) fournissent une redevance de l’ordre d’un setier à la sétérée, correspondant au taux habituel des rentes constituées.

  • 641 Il doit être tenancier de l’archevêque de Toulouse.

263À Montgiscard, sur 70 rentes en nature mentionnées, 59 consistent en livraison de blé, neuf de blé et avoine ; deux sont plus originales : du blé et deux poules, de l’huile. Les redevances partiaires portent sur 17,75 arpents, surtout de vignes ; quatre sont appelées agriers, leur taux n’est pas indiqué. Les redevances en argent touchent tous les types de biens et portent sur 14,25 arpents. Les redevances fixes en nature portent sur 85 arpents et consistent en 48 setiers de blé et 3,75 setiers d’avoine, la moyenne est de 0,56 setier à l’arpent, soit 0,95 setiers à l’ha. Si l’on soustrait 35 arpents de friches qui ne donnent que trois setiers, 50 arpents fournissent 45 setiers, la moyenne est de 0,9 setier à l’arpent, soit 1,51 setier à l’ha, 18 % de la récolte normale. Quelques parcelles livrent une redevance faible, une pugnère pour une sétérée, une trentaine livrent une redevance de l’ordre d’un setier à l’arpent, traduisant la présence d’une rente constituée. Si l’on considère seulement les terres labourables, c’est le cas de 21 parcelles sur 34. Trois domaines sur les dix déclarés sont grevés de redevances ; une est importante : trois cartons de blé et 22 gros d’or (27,5 sous tr) pour une exploitation d’un peu plus de 13 arpents, appartenant à l’obit Notre-Dame de Montgiscard, soit presque un setier et 2 sous 1 denier à l’arpent ; une autre est assez élevée, étant donné l’état de l’exploitation : trois setiers de blé, un setier d’avoine et une paire de poules, versées à Ramon de Pechbusque, pour unas paretz où se trouvent quatre arpents de terre et bosiga et, au même endroit, en un seul tenant, 35 arpents de bosigas. Ces deux exemples doivent correspondre à des rentes constituées. Les autres charges mentionnées sont très faibles, ce sont des cens récognitifs : une borie déclarée par « noble » Pierre del Baus avec sol, ort et 11 arpents de terre verse deux pugnères de blé, par exemple, soit 0,9 % de la récolte moyenne641. Aux Bastards, où l’on ne signale que trois mentions de charges pour l’ensemble des item, une concerne le campmas détenu par Sicard Auzelaire, il verse deux pugnères de blé à l’abbé de Boulbonne pour la parcelle portant les bâtiments, le jardin et l’aire (en tout cinq pugnères de terre, soit 74 ares). Si la parcelle était ensemencée en blé, cela correspondrait à 8 % d’une récolte moyenne. Il s’agit bien d’un cens ; de plus, Sicard Auzelaire, un marchand et gros propriétaire foncier, n’a aucune raison de constituer une rente sur l’un de ses biens.

264À Montgiscard et Ayguesvives, les redevances fixes en argent, généralement faibles, peuvent être interprétées comme des cens. À Montgiscard (exprimées en monnaies très diverses, doubles, gros et des monnaies dont on ne précise pas à quel système elles appartiennent), elles se montent à 4 £ 10 s 10 d tr si les monnaies non précisées sont en tournois. On les tire de 14,25 arpents ce qui fait une moyenne de 76,49 deniers à l’arpent, soit la valeur d’un demi-setier, on se trouve dans le cadre d’un cens, un peu élevé toutefois, 10 % d’une récolte moyenne, qui doit s’expliquer par la présence de quelques rentes constituées en argent. A Ayguesvives, ces redevances (exprimées en monnaies tolsans, tournois, doubles, gros et francs) atteignent 3 £ 12 s 10 d tr pour 39,25 arpents soit 22,26 deniers à l’arpent, 3,71 % d’une récolte moyenne.

265Les charges mentionnées dans les estimes sont donc, à Fendeille, toutes des cens, parfois très faibles, recognitifs. À Montesquieu, Montgiscard et Ayguesvives, les redevances partiaires et monétaires correspondent, essentiellement, à des cens, les redevances fixes en nature comportent quelques rentes constituées (des surcroîts de cens n’apparaissent jamais dans les reconnaissances). Le montant moyen de ces charges à la sétérée, proche des cens signalés dans les registres notariés, permet de conclure que les rentes sont très rares à Montesquieu et aussi, dans une moindre mesure, à Ayguesvives. Elles ne concernent que 15 % des terres labourables versant une redevance à Montesquieu, 26,82 % à Ayguesvives. A Montgiscard, par contre, les fortes redevances, de l’ordre d’un setier de blé, pratiquement, à la sétérée, correspondent à une rente constituée pesant sur des tenures ou des alleux, plus de 61 % des parcelles labourables grevées de charges sont dans ce cas, ce qui ne représente, toutefois, que 15,55 % des parcelles labourables taillables. Si l’on reporte ces rentes constituées à l’ensemble des biens-fonds ruraux allivrés, elles pèsent sur 2,09 % de ceux-ci, à Montesquieu, 3,19 % à Ayguesvives et 5 % à Montgiscard, ce qui est très peu. Près de 95 % des redevances signalées à Montesquieu, 90 % à Ayguesvives, 80 % à Montgiscard correspondent à des cens. Ceci ne signifie pas que tous les biens pour lesquels aucune redevance n’est mentionnée sont francs, ils peuvent être chargés d’un simple cens recognitif qui, selon le choix fait par le déclarant (Sicard Auzelaire, par exemple, n’hésite pas à déclarer un tout petit cens), les estimateurs ou l’état de rédaction de l’estime, vient en déduction (à Fendeille) ou non de l’estimation du bien. Dans le Terrefort occidental, les parcelles chargées d’un agrier ou d’un cens fixe suffisamment lourd (en fait 8 à 10 % au maximum de la récolte) pour valoir à leur tenancier une réduction d’estime et donc de taille, serait d’à peu près un tiers à Montesquieu et Ayguesvives, d’à peu près 16 % à Montgiscard. Les domaines, à Montgiscard, sont plus souvent chargés de redevances que les parcelles, c’est le cas de 30 % d’entre eux (mais avec un petit corpus), un pourcentage de l’ordre de celui d’Ayguesvives, contre 45 % à Montesquieu. Les fermes qui semblent des alleux se répartissent un peu partout dans le finage, ainsi, à Montesquieu, certaines sont près du village, dans les collines, « al peyrega », d’autres sur les confins, pour certaines dans des secteurs de friches « am serena », « an gast », « an matharel » (le buisson), elles sont souvent entourées de barthes et brogas. Quelques seigneurs ont, peut-être, abandonné ou oublié leurs droits sur les terres vagues.

3. Les bénéficiaires des redevances

  • 642 Il est très rare que le propriétaire éminent soit noté dans les estimes ; dans le Midi de la Franc (...)

266Les registres d’estimes n’indiquent que très rarement (53 occurrences) à qui sont destinées les charges pesant sur les biens déclarés642. Les bénéficiaires signalés sont le roi (18 occurrences), une institution charitable (15 occurrences), des seigneurs laïcs locaux (11 occurrences) et l’Église (huit occurrences). Un dénommé Jean Brunet apparaît une fois en tant que seigneur direct, il peut s’agir d’un tenancier qui a sous-inféodé sa tenure (comme signalé plus haut pour un massonier) ou d’un individu qui a acheté une rente de type féodal. Dans le registre de Fendeille de 1428, on ne trouve que très peu d’indications (si ce n’est pour les biens situés à Laval-des-Rousses).

  • 643 Un contribuable forain de Montgiscard, deux de Montesquieu, dans le registre dit de 1409, trois da (...)
  • 644 A.D.A., 4 E 076/CC 9 f° 48 r°. Il est probablement marchand, cf. supra « Les plantes industrielles (...)
  • 645 A.D.A., 4 E 076/CC 9 f° 187 v°.
  • 646 A.D.A., 4 E 076/CC 9 f° 63 v°.

267Quelques contribuables non nobles, très peu nombreux, déclarent percevoir des cens ou des « renda »643, il s’agit de gens d’Église, de marchands, d’hommes de loi. Certains déclarent de tout petits cens, à un denier tournois ou tolsan, mais d’autres plusieurs setiers de froment, jusqu’à 18 setiers pour un déclarant de Montesquieu et 42,5 setiers pour un prêtre de Castelnaudary (dont 16 relevant d’une chapellenie), ce qui doit correspondre à des rentes constituées. À Castelnaudary, dans le registre CC 9 du début du xve siècle, toutes les déclarations parlent bien de cens (et, dans un cas, d’oblies menues), les estimés sont souvent propriétaires de fermes, l’un d’entre eux, Pierre Gotz, un marchand, ne déclare qu’un cens d’un denier tolsan, allivré 5 sous tr644, un autre propriétaire de ferme déclare un cens du même montant, portant sur trois éminées de terre, allivré lui aussi 5 sous tr. Jean Niseti, licencié ès lois, déclare, dans ce même registre d’estimes, plusieurs « rentes, cens ou oblies » pour un total de neuf setiers de froment et quatre d’avoine (d’une valeur marchande de l’ordre de 4 £ 8 s), estimés 14 £ tr (puis ce montant est biffé et remplacé par celui de 11 £ 10 s tr). Une partie de ces redevances est composée de rentes constituées, mais il déclare aussi de petits cens d’un denier tolsan ou tournois pesant sur des terres, des prés ou des immeubles en ville (ceux qu’il a achetés sûrement aux Olrici), pour un total de 4 s 7 d tolsans (soit 9 s 2 d tr), estimés 2 £ tr645. D’autres estimés détiennent des rentes, même si les manifestes parlent toujours de « froment censuel » : P. Brequeli perçoit, par exemple, deux setiers de froment portant sur trois sétérées de terre, un setier portant sur une émine, mais aussi un setier portant sur 15 sétérées de terre (toutes ces parcelles sont situées au même endroit)646. À Montgiscard, un Toulousain, Bernat de Lanas, déclare un setier de blé de « renda » sur une forge, rente allivrée 1 £ 13 sous 4 deniers (dans la version réduite des estimes). A Montesquieu, mossen Jean de Sant Lop déclare 18 setiers de blé « censuel », allivrés 180 £ dans les deux registres, les chanoines de Saint-Étienne déclarent 6 setiers et deux liuralats de blé censuel, allivrés dans le plus ancien registre 60 £, contre 30 dans le plus récent. Il s’agit probablement de rentes servies en échange du service d’une chapellenie. L’estimation de ces revenus varie énormément d’un registre à l’autre et d’un contribuable à l’autre, elle est souvent de 20 ou 30 fois leur rapport, mais seulement de trois fois pour Jean Niseti, un notable, périodiquement consul, qui bénéficie d’un régime de faveur.

C. Les tenures et redevances, d’après les sources seigneuriales

268Pour approcher les tenures et les charges qui pèsent sur elles, on peut utiliser aussi des sources d’origine seigneuriale : les aveux et dénombrements contenus dans le registre Ms. 634 et les livres de reconnaissances.

1. Les aveux

  • 647 Or, il possède la moitié de la ville d’Ayguesvives et de l’albergue qui s’y prend, évaluée à 10 so (...)
  • 648 Les deux derniers apparaissent dans le Ms. 635 pour des aveux et dénombrements faits dans les anné (...)

269Le registre Ms. 634 est très lacunaire, toutes les communautés et tous les seigneurs n’y figurent pas, en particulier les ecclésiastiques (archevêque de Toulouse647, évêque de Saint-Papoul, chapitre de Saint-Michel de Castelnaudary)648. Les redevances foncières y sont désignées par les mots oblies et rentes, la recension des aveux étant effectuée au xviie siècle, quels étaient les termes utilisés dans les documents médiévaux ? Les oblies traduisent-elles les cens recognitifs, ce qu’on appelle parfois les oblies menues, les rentes correspondent-elles à des croîts de cens effectués au fil du temps par les seigneurs directs, à des loyers liés à du fermage (on « arrendavit, locavit » une exploitation dans les baux) ou à des constitutions de rentes faites par les paysans au xive ou au xve siècle ? S’agit-il des agriers comme l’aveu de Jeanne de Cambelle semble le dire (cf. infra) ?

  • 649 Dans des régions proches la rente a diminué. En Catalogne, Mercé Aventin note une baisse de la ren (...)

270N’ont été considérées ici que les localités pour lesquelles on dispose de registres d’estimes et d’aveux et dénombrements, ce qui exclut Ayguesvives. La graphie des patronymes utilisée est celle du registre. Le problème de la crise seigneuriale, de l’effondrement ou non des revenus n’est pas abordé, le registre ne le permettant pas649. On peut toutefois apercevoir le rapport d’une seigneurie à un moment précis.

  • 650 A.M.T., Ms. 634 f° 31 v°.
  • 651 A.M.T., Ms. 634 f° 35 v°.
  • 652 A.M.T., Ms. 634 f° 35v°.
  • 653 A.M.T., Ms. 634 f° 33r°.
  • 654 Les seigneurs du Ms. 634 déclarent 7/12e de la justice, le roi en a les 3/12e et la communauté l/1 (...)

271De nombreux aveux concernant Montesquieu-Lauragais sont effectués en 1389. Jean Villèle dénombre 90 setiers de blé, tant de « service que de rente annuelle », quatre pipes de vin parsonnier, six gélines, 3 £ tr de petites oblies650. Jeanne de Cambelle perçoit trois cartons et quatre pugnères de blé de censive, 16 sous 6 deniers d’oblies menues (le système utilisé n’est pas indiqué), un setier de blé de rente provenant de neuf sétérées de terre agrière651. Aton-Arnaud de Chatteauverdun détient 1/12 de la justice haute et basse du lieu, perçoit 8 sous tr et deux setiers de blé d’oblies et de rentes652, Etienne de Meritin avoue 30 setiers de froment de censive653. Says de Montesquieu, pour lui et Géraude de Fenouillet, sa femme, avoue « un quart de la justice haute et basse, mixte, mère et impère du lieu, quatre setiers de blé d’oblies menues, 20 sous tolsans, quatre gélines de rente, trois ou quatre pipes de vin parsonnier par an, un tiers du four valant tous les ans 3 ou 4 £ tr, un moulin à eau sur l’Hers valant 10 setiers de blé de rente ». Enfin, Comtesse de Chatteauneuf déclare un quart de la justice haute, moyenne et basse, valant pour sa portion 6 £ par an, 24 cartons de blé, deux cartons d’avoine, 19 poules de rente annuelle, et, tous les ans, 8 £ d’oblies menues, six tonneaux de vin ou environ de parson, huit charges de foin de parson, 6 £ tr pour un tiers du four, 12 £ tr d’albergue, une paire de gants blancs. Le total, pour cinq seigneurs (il manque les services dus au roi, à un inconnu qui détient 1/12 de la justice654 et, peut-être, à un certain nombre de seigneurs fonciers), atteint, uniquement pour les oblies et rentes, sans compter les parts de récolte, 245 setiers de blé, huit setiers d’avoine, 14 £ 4 sous 6 deniers tr au minimum et 29 poules.

  • 655 A.D.H.G., E 1137.

272Que penser de ces aveux et dénombrements ? On peut voir qu’un tiers du four rapporte, selon les déclarants, 3 £, 4 £ ou 6 £. La sous-estimation est la règle dans ce genre de document, comme signalé supra avec les exemples fournis par René Germain et Pierre Charbonnier et, pour le Lauragais du xviie siècle, par Jean Ramière de Fortanier. Le dénombrement de Says de Montesquieu peut être comparé à l’un de ses registres de reconnaissances, datant des années 1372-1386. Il perçoit, en 1372, à Montesquieu, 16 sous 9 deniers un quart en système tournois, une poule et demie, et est seigneur d’une ferme pour laquelle les oblies ne sont pas notées655. Ses revenus sont très inférieurs à ceux avoués en 1389, ce qui manque peut toutefois relever de son épouse.

  • 656 A.M.T., Ms. 634 f° 36 r°.
  • 657 A.M.T., Ms. 634 f° 36 r°.
  • 658 A.M.T., Ms. 634 f° 35 r°.

273Les aveux du xve siècle sont peu nombreux. Pour la première moitié du siècle, on ne dispose que de ceux de Rique de Roqueville et de Jean de Cambelle, son fils656, datant de 1420. Ils déclarent trois pipes de vin parsonnier, six cartonnades (24 sétérées) et une sétérée de terre agrière, un peu plus de 12 sous d’oblies et six cartonnades, un setier, deux pugnères et trois livralats de blé de rente qui doivent correspondre à la terre agrière dénombrée. Cinq aveux ont subsisté pour la deuxième moitié du siècle. Pierre de Pallais, comme procurateur de son frère Jacques, dénombre, en 1462, un quart de la juridiction haute et basse du lieu, un quart du four, des terres et biens nobles, 16 cartons de blé de rente et 5 £. En 1464, Hugues de la Tour de la Roche dénombre 1/7 de la juridiction haute et basse, 1 £ tr d’oblies annuelles, 20 setiers de blé de cens annuel. En 1465, deux frères, Séverin et Jean de Latour de la Roche dénombrent 1/6 de la juridiction haute et basse, 1 £ tr d’oblies, six setiers de blé de cens et de rente657. En 1470, Martin Plaigniolle déclare 2 £ d’oblies et un setier de blé658. Une vingtaine d’années avant la réalisation du registre d’estimes 5 E 67, sont avoués 91 setiers de blé et 9 £ tr de rentes (pour des seigneurs qui totalisent 23,5/42 de la justice, soit pratiquement les 7/12), il manque toujours les rentes perçues par le roi, la communauté et, au moins, un seigneur justicier. Il existe, bien sûr, des co-seigneurs qui ne sont que seigneurs fonciers, c’est le cas de noble Antoine de Montesquieu qui, en 1492, n’avoue que des oblies pour un peu plus d’une £ et 10 sous tr, un setier de froment et sept poules. Si l’on rajoute son dénombrement aux autres, on arrive à 10 £ 10 sous tr et 92 setiers de blé entre rentes, cens et oblies. On est très loin, à la fin du xve siècle, de ce que disaient les aveux et dénombrements de la fin du xive siècle. Comment expliquer cela ? Les tenanciers ont-ils racheté les cens depuis 1389 ? Manque-t-il beaucoup d’aveux de seigneurs non justiciers ? Les seigneurs ont-ils enfin réalisé qu’il fallait paraître pauvre aux yeux du roi ?

  • 659 A.M.T., II 97.

274On note une très forte différence entre les revenus provenant des censives avoués à la fin du xve siècle et les charges signalées par les estimés de 1485 (221 setiers de blé, plus de six setiers d’avoine et aucune redevance en argent). L’absence dans les estimes de charges en argent peut provenir du fait que les déclarants sont autorisés à transformer toutes les charges en leur équivalent en blé. La très forte différence quant aux livraisons de blé peut être due à l’absence des rentes servies au roi et à d’autres seigneurs fonciers dont l’aveu n’a pas été conservé. Ces charges sont toutefois, très proches de celles indiquées dans les aveux de la fin du xive siècle, il semblerait que ce soient les seigneurs qui aient tendance à frauder plutôt que les estimés. On voit cela dans un dénombrement effectué en 1504 par Pierre de la Tour (héritier peut-être d’Hugues), seigneur de Castanet, des biens et droits qu’il détient à Castanet, Auzeville, Montesquieu, Vieillevigne et Puginier659. Il avoue, pour Montesquieu, 1/6 de la seigneurie, haute, moyenne et basse qui lui rapporte chaque année 5 sous tr, 20 setiers de blé « de rente assise » valant 7 £ et 10 sous tr, 20 sous tournois de cens ou minimes oblies, 1/6 du four banal qui est loué pour 2 £ tr. Pierre de Turre évalue ses 20 setiers de blé à 7 £ 10 sous, or, le setier de blé à Toulouse, au xve siècle, en année normale, coûte 10 sous le setier, ou les cours ont baissé très nettement ou il sous-estime classiquement le rapport de ses tenures. De même pour la justice, alors qu’un sixième rapportait 6 £ en 1389, ce n’est plus que 5 s tr (la justice royale a-t-elle particulièrement progressé au cours du xve siècle ?).

  • 660 A.M.T., Ms. 634 f° 32 r°.
  • 661 A.M.T., Ms. 634 f° 30 v°.

275Les aveux concernant Montgiscard ne sont pas très nombreux. En 1389, noble Jean André dénombre 12 £ et 16 setiers de froment de rente annuelle et trois pipes de vin « sive agrier » ; Bernard de Vaux dénombre 3 tolsans de censive annuelle. Pour la deuxième moitié du xve siècle ne subsiste que l’aveu de Martin Plaigniolle, daté de 1470, 8 £ d’oblies et 16 setiers de blé660. Foulques de Mauriaco, dans un acte non daté, mais probablement de l’extrême fin du xve siècle ou du tout début du xvie siècle, dit avoir à Montlaur, Montgiscard et Fourquevaux, des rentes (non précisées), seigneurie directe, seigneurie féodale, 50 arpents de terre agrière et parsonnière, amendes de 60 sous tolsans pour ceux qui entrent avec du bétail, sans permission, dans son bois en devès ou dans ses pâturages en devès, six arpents de vigne parsonnière, « corvée d’une journée d’homme et de bête pour tout labourant dudit lieu ». Il prend aussi sur « chaque labourant un demi-carton de froment et un demi carton d’avoine avec une journée par an, ce que les habitants du lieu ne veulent point payer »661. Dans les estimes de 1489, les contribuables déclarent 48 setiers de blé, 3,75 setiers d’avoine, deux poules, 4 £ 10 sous 10 deniers tr de services, la confrontation entre les deux sources est impossible.

  • 662 A.M.T., Ms. 634, f° 15 r°.

276À Fendeille, en 1383, Raymond et Bernard Saqueti, frères, déclarent le « lieu » (au sens d’espace fortifié) de Fendeille et juridiction haute et basse, cinq setiers et deux pugnères de froment, à la mesure du lieu ou de Laurac, cinq émines et une pugnère d’avoine, 13 gélines et demie de rente et 3 francs d’or d’oblies menues ; en 1389, Bernard-Raymond des Fontaines, déclare 10 setiers de blé, orge ou avoine, 10 gélines et 5 sous tolsans662. En 1463, les deux familles se sont alliées et ont réuni leurs possessions fendeilloises, noble Guillaume de Fontaynes, déclare, pour lui et pour Jeanne Souquette, sa femme, 14 setiers de blé ou orge de rente annuelle, à la mesure du lieu ou de Laurac, six gélines, 2 £ et demi d’oblies menues de rente, une charge de vin, « le lieu de Fendeille et juridiction haute et basse, où il y a maisons, vignes, terres cultes et incultes, prés, bladages, gélines de rente », avec oblies de 12 £ et deux paires de poules chaque année, à la mutation des consuls. Quelques cens (4 £) sont avoués aussi par Odet Ysalguier. Les aveux du xve siècle signalent des redevances bien inférieures à ce qui apparaît dans les estimes de 1428 (60 setiers de froment, six setiers d’avoine, presque deux setiers d’orge et une dizaine de livres).

  • 663 A.M.T., Ms. 634 f° 8 r°, f° 8 v°, 9 r°, f° 12 r°, f° 12 v°.

277Quelques aveux de 1389 concernent Castelnaudary, le montant des redevances est négligeable. Bernard Barthe, déclare 2 sous d’oblies menues, une émine de blé de parson, une géline de rente ; Franc de Saint-Germain déclare une paire de gants, 2 florins d’or, sept gélines et cinq setiers de froment de rente, deux livres de cire ; Bernard-Raymond de Fontaynes, 5 sous tolsans d’oblies, des censives (non précisées) ; Roger de Barthe, trois censives de blé de rente, 2 sous tolsans d’oblies menues et un setier de blé parson annuel ; Sicard de Salesses, six setiers froment de rente, 15 setiers de blé parsonnier, 26 sous tolsans d’oblies menues, plus « lods et ventes valant 20 sous tolsans années communes » et, enfin, Gaillard et Paul Olries (les Olrici des registres notariés), cousins germains, 15 setiers de froment de rente, un franc d’or d’oblies menues, 19 £ annuelles, plus la cinquième partie de la leude menue du lieu. Dans la deuxième moitié du xve siècle, trois nobles seulement, d’après les sources conservées au xviie siècle, sont seigneurs de quelques biens situés à Castelnaudary. Le seigneur de Fendeille, Guillaume de Fontaynes, déclare en 1463, pour lui et son épouse, 25 setiers de froment ou avoine, 9 £ d’oblies menues et cinq gélines. Odet Ysalguier dénombre, en 1464, 2 £ de cens annuel, 30 setiers de blé et trois setiers d’avoine de rente, 15 gélines, des « droits de mêmes besoignies qui se prennent au marché du lieu comme de fruitz et de bois » qui s’arrentent 1 £ tr par an, 4 £ de cens annuel à Mireval et Fendeille. Martin Plaigniolle, en 1470, dénombre 10 sous d’oblies663.

  • 664 A.M.T., Ms. 634 f° 1 v°.
  • 665 A.D.H.G, 1 A 2 tome 1.
  • 666 A.D.H.G., 3E 10154 f° 141 r°,18 mai 1383.
  • 667 A.D.H.G., 1 A 2 tome 1 f° 271.

278De rares corvées (courroc) apparaissent dans les aveux. Bertrand de Fontaynis, par exemple, en 1389, détient justice haute et basse à Montmaur, rapportant 20 sous tolsans, et « les habitants qui labourent avec deux bœufs lui font un setier d’avoine et une journée des dits animaux, ceux qui labourent avec d’autres animaux lui font une mesure d’avoine et une journée des dits animaux »664. À Labécède, la co-seigneuresse, en 1389, bénéficie de quatre jours de corvée dus par les animaux de labour. À Ferrais, chaque habitant fait à noble Antoine de Lautrec, en 1464, une quartière de blé pour le fournage et une corvée d’un jour avec un bœuf665. Ces corvées apparaissent, parfois, dans les actes d’inféodation : les consuls de Pouze accensent un pré, le service est d’un setier d’avoine et il est fait mention d’une « corruga consueta »666. Les seigneurs ont aussi quelques privilèges honorifiques, tels ceux de Montesquieu, qui les ont obtenus difficilement, semble-t-il. En 1434, on mentionne exécution d’arrêts datant de 1433 : « les co-seigneurs de Montesquieu auront leurs bancs au chœur de l’église du lieu et précèderont les consuls et ouvriers, lesquels auront les leurs hors du chœur, et on portera la paix aux dits co-seigneurs, lesquels pourront mettre leurs armes aux lieux publics et auront des prisons au dit lieu »667.

  • 668 Tout cela sera développé ultérieurement dans une autre publication.

279Si l’on s’en tient aux aveux, les cens et rentes (la question demeure : baux à court terme, constitutions de rentes sur leurs terres par les paysans, agriers) constituent l’essentiel des revenus des seigneurs668. Si l’on prend l’exemple de Comtesse de Chatteauneuf, ses possessions foncières lui rapportent plus de 50 £ de « rentes et oblies menues », des parts de récolte, des poules, sans compter les droits de mutation, les lods et ventes ; les droits de justice, le four banal et l’albergue ne lui rapportent que 24 £.

  • 669 A.D.H.G., 1 A 8 tome 2, f° 274 et suiv. et 1 A 6, ff° 151-173.

280Les droits du roi apparaissent dans les documents de la série A, mais on n’y trouve pas ce qui concerne les censives, si ce n’est, pour Castelnaudary, l’existence d’un terroir de 285 arpents (100 ha) sous « diverses censives au profit de sa majesté »669.

2. Les registres de reconnaissances

  • 670 A.D.H.G., 10161 f° 220 v°, 1408.
  • 671 A.D.H.G., 10161 f° 153 v°, 1407.
  • 672 A.D.H.G., 1 A 2 tome 1, P 247, même chose en 1 A 2 tome 4 P 164 r° : on signale un registre de rec (...)
  • 673 A.D.A., 36 C 6.

281Les registres de reconnaissances étaient probablement nombreux à la fin du Moyen Âge, en Lauragais, étant donné la multitude de seigneurs fonciers ; très peu ont subsisté jusqu’à nos jours. Ont été perdus, par exemple, les livres de Bernard de Durfort, seigneur de Bonac et Deyme ; la lauzime d’un échange indique, en effet, que justice et arrière-acapte sont semblables à celles figurant dans le livre du « territorio » de ce seigneur670. C’est aussi le cas des « libras rationum » des seigneurs de Pompertuzat, héritiers de G. Carreri, mentionnés dans un acte notarié671. Des registres concernant les censives du roi existaient encore au xviie siècle, ils sont signalés dans la série A des Archives départementales de la Haute-Garonne : un, par exemple, de 176 feuillets, contenant le sommaire des reconnaissances de Castelnaudary, Villenouvelle, Avignonet, Montgiscard, Baziège et Revel de l’année 1393, un autre de 351 feuillets, de 1394, concernant Les Bastards, Montgiscard, Baziège, Villefranche, Villenouvette, Ayguesvives672. Certains subsistaient encore au xviiie siècle, des plans d’adaptation de Castelnaudary de 1786, mentionnent des reconnaissances faites au roi, à l’hôpital de la ville et au collège Saint-Martial de Toulouse en 1396, 1398, 1415673 ; tous ces registres ont aujourd’hui disparu. Des livres de reconnaissances ont été toutefois conservés pour Montesquieu et Montgiscard ; certains concernent des vassaux ayant fait leur aveu et dénombrement.

  • 674 Charbonnier (P.), Une autre France..., op. cit., p. 17.
  • 675 En Auvergne, toutefois, la liève du xve siècle est construite comme le terrier, tout ce qui concer (...)

282Ces livres sont, sauf le 1 G 799, appelés dans les inventaires « reconnaissances féodales ». Le 1 G 799 est qualifié de « liève des oblies ». En fait, ce registre est un terrier ou livre de reconnaissance et non une liève, au sens, du moins, que l’on donne en Auvergne à ce mot. En effet, là, au xive siècle, la « leva », liève établie par le receveur seigneurial, indique d’abord tous les versements en argent, puis ceux en nature, froment, etc. Un tenancier revient autant de fois qu’il paie des redevances de nature différente674. Les levas sont donc dressées en fonction des natures des redevances, ce qui n’est pas le cas dans ce registre675. La seule véritable liève est un fragment du registre E 618 de Montesquieu contenant des reconnaissances faites à dame Anglaise de Roqueville.

  • 676 Fournier (G), Les origines..., op. cit., p. 12.
  • 677 Marandet (M.-C), Le souci de l’au-delà..., op. cit., p. 100.

283Ces registres de reconnaissances sont rédigés et signés par un notaire, les tenanciers viennent devant lui reconnaître qu’ils tiennent tel et tel bien de X : « tenere in feudum et in emphiteosim perpetuam », « sub oblias censibus serviciis et aliis dominationibus feudalibus », arrière-acapte et droits de justice sont parfois indiqués. La superficie, la nature des parcelles (vigne, pré, etc.) et les confronts des biens sont mentionnés. Quelques différences existent d’un registre à l’autre, la superficie des parcelles, par exemple, est indiquée ou non. Ce terrier donne une image de la seigneurie à un certain moment, seul le notaire peut le corriger. Gabriel Fournier estime, à propos du terrier auvergnat, que la rédaction en est coûteuse et donc peu fréquente676. Les frais de notaire ne sont pas très élevés si celui-ci se contente d’enregistrer les dépositions des tenanciers, les tarifs de rédaction des testaments, par exemple, ou des reconnaissances de dettes, qui apparaissent dans les registres notariaux vont de 15 à 30 deniers tournois677. Par contre, si le dernier terrier a été réalisé il y a longtemps, si le notaire doit retrouver les familles de déclarants et les parcelles y figurant, le travail doit être assez long et onéreux.

a. Les registres de reconnaissances concernant Montgiscard

  • 678 A.D.H.G., 1 G 800, 1427. 1G 801, 1447, reconnaissances féodales de Montgiscard, Donneville (celles (...)

284Montgiscard est situé dans la baronnie de Montbrun, composante de la Temporalité de l’archevêque de Toulouse. Seize terriers678 ont été conservés pour cette baronnie qui comprend aussi les localités de Montbrun, Corronsac, Castanet, Roqueville, Pechabou, Donneville, d’après le registre 1 G 799, de la fin du xiiie siècle. Des registres plus tardifs mentionnent aussi Escalquens, Fourquevaux, Montlaur, Pompertuzat, Belbéraud.

  • 679 Ce registre a été restauré courant 2004 et est aujourd’hui non communicable, si ce n’est sous form (...)
  • 680 Des mélanges de folios ont été effectués, apparemment, à la période moderne. Du f° 1 au folio 12 v (...)
  • 681 Dans la Catalogne voisine, les capbreus qui sont l’équivalent des terriers semblent très lents à r (...)
  • 682 Une est effectuée, par exemple, en 1343, par le notaire Guilhem Guisanis, A.D.H.G., 1G 799 f° 30 r (...)
  • 683 11 femmes mariées, quatre veuves dont une remariée, quatre femmes seules, dites filles de X ; une (...)
  • 684 Trois de Toulouse, deux de Donneville, cinq de Baziège, un de Labastide de Pierre-Juif (Labastide- (...)

285Trois registres ont été dépouillés, pour tout ce qui concerne Montgiscard et Roqueville. Le plus ancien registre conservé est le 1 G 799, intitulé « liève des oblies des lieux de la baronnie de Montbrun, Corronsac, Castanet, Roqueville, Montgiscard, Pechabou, Donneville », daté de 1292. Il est en très mauvais état, composé de divers fragments rassemblés, peut-être, au xviie siècle, des éléments sont pratiquement effacés, des rajouts ont été effectués679. Toutes les reconnaissances ne datent pas de 1292, certaines sont plus anciennes, d’autres plus récentes, la majorité est, néanmoins, de la fin du xiiie siècle. N’a été pris en compte que ce qui semblait d’origine et concernait Roqueville (Rocovilla), c’est-à-dire la partie de Montgiscard tenue en fief par l’évêque680. Les oblies de Roqueville commencent au folio 30 r°, la première reconnaissance est passée par Raymond Othonis le 10 octobre 1286, elle est reçue par un notaire de Montgiscard, Etienne Martini. Chaque tenancier dont le prénom, le nom, le métier et le village d’habitation sont indiqués, « tenet » tel bien, situé à tel endroit, confront avec l’honor de X, X, X (les confronts ne sont pas orientés, la superficie n’est pas indiquée681), « pro quo facit quolibet anno » à telle date, tant d’« oblias, retroacapite, iusticia ». Les montants des oblies, de l’arrière-acapte et des droits de justice figurent aussi dans la marge de droite. Dans la marge de gauche apparaissent les mutations de tenanciers. Les lauzimes, si nécessaire, suivent l’acte de reconnaissance ; elles datent, pour la plupart, des années 1340-43682. 109 tenanciers reconnaissent 165 biens, soit 1,51 bien, en moyenne, par tenancier. Quelques-uns (11 %) sont en indivision, des frères ou sœurs, des « héritiers un tel », reconnaissent un ou plusieurs biens, signe d’un entassement sur les tenures. Les femmes constituent 17,43 % des déclarants683, les forains, 10,09 %684. On trouve mention des six chevaliers de la milice ou chevalerie de Roqueville, vassaux de l’évêque. Les oblies sont très faibles, de quelques deniers tolsans ou tournois.

  • 685 Ce registre, plus riche que ne l’annonce l’inventaire, regroupe des reconnaissances faites à l’arc (...)
  • 686 A.D.H.G., 1 G 801 f° 62 r°.
  • 687 Richardot (H.), Le fief roturier..., op. cit., p. 338 et note 3.

286Le registre 1 G 801 a été aussi utilisé, c’est un extensoire du notaire Pierre More, de Montgiscard685 ; un acte est de 1447, date indiquée dans les inventaires, les autres sont de mars et avril 1445. Le schéma des actes est le suivant : In nomine Domini. Amen. Noverint universi... devant moi, notaire, X, de Montgiscard, prêtant serment sur les Évangiles, de la main droite, reconnaît « se habere et tenere in feudum et in perpetuam amphiteosim (sic) » de l’archevêque de Toulouse les biens désignés ci-dessous « sub oblias censibus serviciis et aliis dominationibus feudalibus ». Les biens sont énumérés, lieu-dit et confronts sont indiqués, parfois les superficies. Les oblies « pro obliis et nomine obliarum censuum sive reddituum dicti feudi », les droits de justice, l’arrière-acapte (payée lors de la mort de l’archevêque ou du tenancier) sont signalés. Le tenancier et ses successeurs peuvent, dit-on, être légitimement taxés pro justiciis s’ils ne paient pas les oblies ; le montant des droits de justice est d’un ou deux deniers tolsans. Quelques actes signalent seulement que les redevances sont semblables à celles des livres anciens (« prout instrumentis antiquiis et libro obliali dicti feudi continetur »)686. Les biens ne peuvent être donnés en « superfeudum », donc sous-inféodés, en tout ou partie, ni être vendus ou engagés à chevalier, clerc, bourgeois, monastère, juif, maisons religieuses ou lépreux « nec aliis locis aut personis privilegiatis aut a jure prohibitis », de façon à ce que l’archevêque ne perde pas ses pax, oblies et autres dominations féodales. Cela peut être fait, toutefois, de licencia et concensu de celui-ci, dans ce cas, les lods et ventes sont d’un denier tolsan pour un sou, en cas de vente et d’une obole pour un sou en cas d’engagement. Ce registre reprend des textes plus anciens puisque les juifs ont été expulsés définitivement du royaume en 1394. H. Richardot signale les mêmes interdictions dans les actes des xiie-xiiie siècles ; on n’interdit pas alors les ventes aux serfs ; les bourgeois ont été rajoutés sur la liste après 1295687. D’après les coutumes de Toulouse, si des gens de mainmorte détiennent une tenure, ils « doivent s’obliger de payer droits de lods et ventes de 30 ans en trente ans au seigneur ».

  • 688 Bruni, Fabri, Beneyci, Durand, Siuraguello, Adhémar, Ayneri, de Miralhiis, Forneri et Gavarret, ce (...)
  • 689 Un habitant de Montbrun, autrefois habitant de Montgiscard, un de Donneville, deux de Belbèze, un (...)
  • 690 A.D.H.G., 1 G 801 P 1 r°.
  • 691 A.D.H.G., 1 G 801 f 26 v°. Ces hommages sont signalés en Catalogne au xiiie siècle pour des mas do (...)
  • 692 Richardot (H.), Le fief roturier..., op. cit., p. 530.
  • 693 A.D.H.G., 3 E 10133,19 février 1492 (n.st.).

287Le nom de Montgiscard l’emporte, alors, sur celui de Roqueville. Apparaissent toujours 165 articles, mais aux mains de 69 personnes, la moyenne est de 2,39 biens par individu, une concentration de propriété s’est effectuée après les pertes démographiques du xive siècle. Quelques tenanciers portent des patronymes présents dans le registre de 1292688. Les femmes chefs de famille constituent 5,79 % des tenanciers, les associations, 8,69 %, les forains, 8,69 %689. Le campmas des Fourniers (cf. supra) est toujours aux mains de plusieurs personnes. Pierre-Arnaud de Campis y détient des parcelles, un « campmasium » avec borde et jardin et un four dont on ne précise pas la nature (four à pain, à tuiles ?) ; pour chaque fournée, il donne 3 deniers tolsans. Olivier Gales, un sartre, et Jacoba, son épouse, fille et héritière de Pierre Furnerii, possèdent eux aussi hospicium sive campmasium aux Fourniers et sont confronts d’Arnaud de Campis690. Pierre Arnaud de Campis « promisit homenagium » pour ce campmas des Fourniers et ses dépendances691. A Toulouse, seuls les vassaux nobles et les tenanciers serfs devaient prêter foi et hommage pour leurs tenures mais non les feudataires roturiers692. Pierre Arnaud de Campis n’est pas dit noble. Le servage a été aboli en Toulousain en 1299, tout serf de la sénéchaussée est alors affranchi moyennant le paiement d’un sou tr par sétérée de terre. Au xve siècle, le servage a complètement disparu de la région, P.-A. de Campis essaie-t-il de se faire passer pour noble et voit-il dans la prestation d’hommage un moyen d’y parvenir ? La notion de tenure-fief perdure, pour certains, au xve siècle : une reconnaissance féodale est faite à Foulques de Mauriaco, seigneur de Montlaur, par Bonhomme de la Roye, son « vassal » ; celui-ci est, en réalité, un laboureur de Montlaur qui tient des terres en emphytéose693. Il effectue une reconnaissance classique avec serment, la main droite sur les Évangiles.

  • 694 Les reconnaissances des habitants de Montgiscard, de Montbrun, à partir du f° 161 r°, de Donnevill (...)
  • 695 Quatre femmes mariées (pour une, son époux administre ses biens), six veuves non remariées dont de (...)
  • 696 12 forains habitent Toulouse, cinq, Ayguesvives, un, Cintegabelle, un, Baziège, un, Montbrun, un B (...)

288Le registre 1 G 805 a été aussi dépouillé, les reconnaissances sont effectuées en avril-mai 1487, par les habitants de quatre villages694. Le tenancier, dont le métier et le lieu d’habitation sont indiqués, de sa spontanée volonté, jurant sur les Évangiles, confesse tenir « in feudum et en emphiteosim perpetuam » de l’archevêque de Toulouse telle et telle chose ; les lieux-dits, les confronts orientés, les superficies sont indiquées. Oblies, arrière-acapte (toujours en cas de mort de l’archevêque ou du tenancier) sont signalées ainsi que sous-inféodation, vente et engagement, dans les mêmes termes que dans le registre 1 G 801. Pour Mont-giscard, des feudataires apparaissent à deux reprises, une fois pour des terres, une fois pour des maisons, 78 tenanciers différents déclarent 174 articles, la moyenne est de 2,23 articles par individu. 57 feudataires habitent Montgiscard, 21 sont des forains. Sept biens situés sur Montbrun sont tenus par des habitants de Montgiscard. Quatre nouvelles inféodations, datées de 1489, succèdent aux reconnaissances, deux concernent des biens situés sur Montbrun, inféodés à des habitants d’Ayguesvives et de Montbrun. Parmi les 78 tenanciers, on trouve dix femmes695, soit 12,82 % du corpus et 21 forains (surtout originaires de Toulouse)696, soit 26,92 %, deux associations (héritiers un tel), soit 2,56 %.

  • 697 A.D.H.G., 1 G 805 f° 144 v°.

289La quasi-totalité des redevances (159) consiste en cens fixes, payés en argent. Le total atteint 5 £ 15 s 5,5 deniers tournois. Cinq redevances sont en nature (quelques poules et chapons, une pugnère de froment, un agrier au neuvième, un droit de fournage pour les maisons), une redevance est mixte (12 d tolsans et deux poules pour six sétérées de terre). Les plus grosses redevances sont de 7 sous 7 deniers tolsans 1 denier tournois, elles portent sur deux moulins à eau dont l’un est en indivis entre l’archevêque et la veuve de Jean de Gavarret ; un cens de 2 sous tolsans pèse sur trois arpents de pré et pesquiès. On trouve toujours de tout petits cens, semblables à ceux de 1292, par exemple, le tenancier d’un campmas, d’une borde et de terres doit verser 10 deniers tolsans. Les redevances portant sur les biens-fonds ruraux atteignent 1 021,5 deniers tournois pour 253,25 arpents (dans quelques cas, manquent les redevances ou les superficies), la moyenne des oblies est de 4 deniers tr l’arpent, c’est, avec un setier à 10 sous, l’équivalent de 0,66 % d’une récolte normale, ce que l’on trouve aussi dans quelques actes notariés provenant du même secteur ou dans les estimes de Fendeille. On est assez loin des 76,49 deniers l’arpent (avec un très faible corpus, toutefois), trouvés à partir des estimes. Le plus souvent, les cens versés à l’archevêque sont symboliques, 46 sont égaux ou inférieurs à un denier tolsan et 17 inférieurs ou égaux à un denier tournois, ils n’ont pas varié depuis 1292. Cette permanence se traduit par le fait que l’essentiel des oblies (y compris celles des moulins) est exprimé en monnaie tolsan (129 redevances sur 159 sont en tolsans, celles en tournois totalisent seulement 81,5 deniers sur un total équivalent à 1 304 deniers tournois). Le nombre de tenures, 165, est pratiquement le même qu’en 1292, plus élevé que le nombre de biens grevés de charges figurant dans les estimes, pourtant incomplètes. Ces cens faibles datent du début du xiiie siècle ou sont peut-être même plus anciens, ils n’ont pu être modifiés si les biens n’ont jamais vaqué. Même dans le cas des quatre biens donnés à nouvelle inféodation, mais le plus souvent composés de friches et entourés, parfois, de vacants appartenant à l’archevêque, ils restent faibles, par exemple, un denier tolsan l’arpent pour 30 arpents de terre bosigue, barthe et brugue à Roqueville, le nouveau tenancier doit défricher et travailler sous peine de perdre le bien697. Les possessions foncières sont d’un faible rapport pour l’Église mais le développement de l’économie du salut (les messes pour les âmes du Purgatoire) doit compenser amplement cela. Ce registre de reconnaissances confirme la présence, dans les estimes de Montgiscard, de rentes constituées livrées sous forme de blé et aussi le fait que les cens recognitifs n’y sont généralement pas déclarés.

b. Les registres de reconnaissances de Montesquieu

290Les registres dépouillés concernent des seigneurs laïcs.

  • 698 Diverses écritures pour 130 actes, essentiellement des lauzimes de vente. Certaines années, on a u (...)
  • 699 Même chose en Auvergne, Foumier (G), Les origines..., op. cit., p. 11 et document 9.

291Le registre E 1137, intitulé dans le répertoire des archives « reconnaissances 1371-1425 » renferme dans un premier cahier, jusqu’au folio 5 v°, toute une série de reconnaissances faites au seigneur de Montesquieu noble « Saxio », il s’agit de Says de Montesquieu, qui fait aveu et dénombrement pour lui et son épouse, Géraude de Fenouillet, en 1389. Un tenancier tient tel bien situé à tel endroit, pour lequel il fait telle somme (les mots de service, oblies, cens ne sont pas employés). Les confronts des biens sont fournis, orientés, les superficies des parcelles ne sont pas indiquées. Pour le premier déclarant, l’arrière-acapte est mentionnée, elle ne l’est pas par la suite. Aucune modification de cens n’apparaît dans la marge. Les reconnaissances ne sont pas datées précisément. Elles portent sur 74 articles, essentiellement des terres labourables. Le cahier suivant est commencé en 1386, par le notaire Guilhem Dominici, de Montesquieu, il renferme des lauzimes et des accensements (« novum feudum ») allant jusqu’en 1425698, 131 articles apparaissent. Dans les lauzimes sont mentionnés les montants des oblies, de la justice, de l’arrière-acapte, sauf dans les plus récentes où l’on se contente de signaler « retrocapite et justicia ut consuetum in libro feudali ». Le notaire consigne les actes relatifs aux mutations au fur et à mesure699. Les lauzimes et novum feudum sont faits par Says puis par son fils Raymond puis par « noble écuyer » (nobilis scutifer) Says, probable fils de Raymond.

  • 700 A.D.H.G., E 1137 f° 3 v° et 4 r°.

292Dans ce registre de la fin du xive siècle, on ne mentionne pas de friches ou de bois, est-ce parce que leurs détenteurs ont oublié qu’ils ont un seigneur ? Cela semble douteux, la famille donne l’impression de suivre ses possessions de près. L’habitat ressemble à celui qui apparaît dans les estimes de la deuxième moitié du xve siècle. On parle du castrum et de la villa de Montesquieu, les hospicia sont situés « intus castrum », mais on trouve des bordes près des fossés vieux, des jardins dans ces fossés, des jardins et moulins près du fossé bataillé (vallum batalharum). Un barri est mentionné avec bordes et jardins. Il existe aussi des hospicia en dehors des murailles, à Fontem capieria, par exemple, celui de deux frères, Guilhem-Bernard et Pierre Auriolli, accompagné de terres ; un autre hospicium, situé au même endroit, avec une terre, appartient à Arnaud Auriolli, on se trouve en présence d’une exploitation comportant plusieurs bâtiments d’habitation. Pierre Galoffi possède, lui aussi, une domus avec aire et verger contigus, situés en campagne700. D’après ce registre, Says de Montesquieu perçoit moins que ce qu’il déclare dans son aveu de 1389, réalisé toutefois pour lui-même et son épouse.

  • 701 A.D.H.G., E 1125, répertorié : « reconnaissances de 1490 de Montesquieu ».
  • 702 A.D.H.G., E 1116. 111 pour Montesquieu, 12 pour Villenouvette.

293Un registre de reconnaissances concerne Pierre de Turre et de Rojac, seigneur de Castanet et co-seigneur de Montesquieu ; elles ont été reçues en 1490 par Pierre Bobald, notaire de Montesquieu, et collationnées en 1538701. Les oblies sont mentionnées avec la date de paiement, les droits de justice et d’arrière acapte. Les 49 tenanciers reconnaissent 92 biens, soit, en moyenne, 1,7 bien par individu. Quatre lauzimes figurent dans le registre. Pierre de Turre, d’après ces reconnaissances, est seigneur direct d’au moins neuf ostals, deux localia, une borde et un jardin, situés dans les murs du village, de trois jardins situés à l’extérieur des murailles, une part de moulin et plusieurs parcelles, pour près de 60 sétérées (35 ha) ; il a accensé aussi diverses « terres cultivées et incultes » dont la superficie n’est pas précisée. Quarante sept oblies sont libellées en argent, une est mixte, 44 sont en nature, elles lui rapportent un peu plus de 11 setiers de blé et 17 sous 8 deniers tr. Dans son aveu de 1504, il déclare, pour Montesquieu, 20 setiers de blé « de rente assise », 20 sous tournois de cens ou minimes oblies, il a probablement acheté, depuis 1490, des rentes constituées, peut-être de caractère féodal ; dans un registre de reconnaissances de 1514702, ses tenanciers reconnaissent 111 biens contre 92 en 1490.

  • 703 Jusqu’au f° 50 v°. On trouve, ensuite, les reconnaissances concernant P. de Turre.
  • 704 Il est seigneur, dans la ville, de plus de 10 ostals, quatre emplacements et deux bordes.

294Le registre E 1116 contient des reconnaissances datées du 13 septembre 1492, faites en faveur de « noble Antoine de Montesquieu, seigneur de Coustaussa », retenues toujours par Maître Pierre Bobald703. Cinquante deux déclarations (faites, à cinq reprises, par deux personnes) mentionnent 102 articles, pratiquement deux articles par tenancier. Les lieux-dits, les superficies des parcelles, les confronts sont indiqués, ainsi que les oblies, les droits de justice et d’arrière-acapte, ces derniers sont généralement du même montant que les oblies. Le total des oblies est de 1 £ 5 s 4 d tr, un peu plus de deux setiers de froment et sept poules. La discordance n’est pas très forte entre ces reconnaissances et l’aveu de 1492 puisque Antoine de Montesquieu y indique des oblies d’une livre 10 sous tr, un setier de froment et sept poules. La superficie déclarée par les tenanciers atteint 110 sétérées soit 65,2 ha704 ; en moyenne, les oblies sont de 2,76 deniers tournois à la sétérée, toutes parcelles confondues. La superficie de la parcelle ne joue guère sur ces oblies recognitives, cinq liuralats de terre, une émine ou sept sétérées payent un denier tolsan. Huit vignes sont à part de fruits (pour une, se rajoute une redevance en argent), les autres redevances sont fixes : 11 sont en nature (froment ou poules), une est mixte, les autres sont en argent. Les plus grosses redevances, de 10 et 12 deniers tolsans, portent sur des ostals et sur une borde construite sur cinq sétérées de terre. Antoine de Montesquieu est un probable héritier de Says de Montesquieu, les oblies sont toujours les mêmes depuis un siècle et, sûrement, depuis beaucoup plus longtemps, celles payables en argent sont d’ailleurs, en majorité, exprimées en deniers tolsans et même en pogès, monnaies qui n’ont plus cours depuis le xiiie siècle.

  • 705 A.D.H.G., E 1116 f° 35 r°.
  • 706 A.D.H.G., 3 E 1125 f° 22 r°.
  • 707 A.D.H.G., 5 E 67 f° 15 r°
  • 708 A.D.H.G., E 1116 f° 49. r°.
  • 709 A.D.H.G., 5 E 67 f° 47 v°.
  • 710 A.D.H.G., E 1116 f° 44 r°.
  • 711 A.D.H.G, 5 E 67 f° 45 r°.
  • 712 A.D.H.G., E 1116 f° 6 v°.
  • 713 A.D.H.G., 5 E 67 f° 19 v°.
  • 714 A.D.H.G., E 1125 f° 6 v°.
  • 715 A.D.H.G., 5 E 67 f° 22 v°.
  • 716 A.D.H.G., E 1116 f° 11 v°.
  • 717 A.D.H.G., 5 E 67 f° 35 v°.

295J’ai essayé de voir si les tenanciers de Pierre de Turre et d’Antoine de Montesquieu déclaraient effectivement, dans les estimes de 1485, les oblies pesant sur leurs tenures ; le sondage a porté sur quelques familles seulement, les résultats sont assez décevants. Quand les estimés déclarent des terres situées dans le même lieu-dit où ils reconnaissent des tenures, les superficies et les charges ne sont pas souvent les mêmes. Ainsi, Aliotus Baconis (« locale Bacco »), forgeron, reconnaît deux pugnères de terre « a la condamina », sous oblies de 3 d tr, en faveur d’Antoine de Montesquieu705. Il reconnaît un jardin dans les fossés vieux, sur lequel pèse une oblie d’un denier tolsan, une demi-carteria de terre au même endroit, sous oblie de 3 deniers tolsans706, en faveur de Pierre de Turre. Dans son estime de 1485 (sous le nom, en langue d’oc, d’Alyot Baco), il déclare trois pugnères « a la condamina », sous la charge d’un setier de blé ; il déclare deux autres parcelles, une de deux pugnères et une de trois au même endroit, mais ne signale pas de charges. Il possède un jardin et une carteria de terre dans les fossés vieux, mais ne mentionne pas de redevances707. Jacques Olerii et Arnaud Boeri sont tenanciers d’Antoine de Montesquieu pour trois sétérées de terre « a bigot », sous oblies d’un denier tournois, et de deux pugnères de terre « a plora fana », sous les mêmes oblies708 ; Jammes Holie déclare, dans les estimes, une demi-cartonnade à « plora fana », une cartonnade à Bigot et ne signale pas d’oblies709. Pierre Bernissi est tenancier d’Antoine de Montesquieu pour trois pugnères de terre « a la pradela sive a la punta », sous oblies de 3 deniers tr, et de 3 pugnères de terre et pré, au même endroit, sous oblies de 3 deniers tolsans710 ; il déclare, dans son manifeste, six pugnères de pré et terre « a pradela » et ne signale pas d’oblies711. Ces quelques exemples laisseraient penser que les oblies modestes ne figurent pas sur les estimes, mais elles sont indiquées pour d’autres biens. Jordy Advessen reconnaît tenir d’Antoine de Montesquieu six livralats de malhol à un quart du fruit, avec des oblies d’un denier tolsan712, cette vigne et ces redevances (y compris le denier tolsan) figurent bien dans son estime de 1485713. Par contre, il tient 10 livralats de malhol, « al buguet », de Pierre de Turre, pour 2 deniers tolsans, une sétérée de pré « a la mayre vieille alias a malpas »pour un denier tr ; dans son manifeste, il déclare 3 pugnères de malhol al buguet, sept pugnères de pré a malpas et ne signale pas de charges. Jean Fulhosa tient cinq pugnères et demie de vigne et terre inculte « al puech de Sieurac », de Pierre de Turre, pour six livralats de froment714 ; dans son manifeste, il déclare trois pugnères de malhol et deux pugnères d’anols « a sieurax », chargées de sept livralats de blé715. Jean de la Sala, lui, reconnaît deux brassées de jardin dans les fossés vieux, sous oblie d’un denier tournois en faveur d’Antoine de Montesquieu716 ; il déclare dans les estimes un jardin dans les fossés bataillers qui fait une pugnère de blé717, ce qui correspond à 2 sous 6 deniers tr, en année normale.

296Plusieurs interprétations sont possibles : pour les superficies qui ne correspondent pas d’un registre à l’autre, il est probable que des remembrements de parcelles voisines ont été effectués, de façon à les travailler en un seul bloc, même si les seigneurs en sont différents ; les contribuables déclarent alors cette parcelle unique aux estimateurs. Les quelques exemples de lourdes redevances signalés (Alyot Baco, Jean de la Sala) correspondent à des constitutions de rente. Peut-être quelques estimés ont-ils tendance à frauder, transformant de menues oblies en lourdes redevances pour bénéficier d’abattements. Les petites oblies recognitives ne sont mentionnées que par quelques contribuables, ceux, peut-être, particulièrement au fait des dégrèvements possibles.

297Au terme de l’étude des trois types de sources, estimes, registres notariés et registres de reconnaissances, on arrive tout de même à quelques certitudes : les cens les plus anciens, établis courant xiiie et peut-être même avant, que l’on aperçoit dans les registres de reconnaissances de l’archevêque de Toulouse et de quelques seigneurs de Montesquieu sont de l’ordre, en moyenne, de 3 ou 4 deniers tournois à la sétérée ; montant que l’on retrouve dans quelques actes d’inféodation datant de la période 1380-1410, ce qui correspond à la valeur d’un livralat de blé (l/32e d’un setier) soit 0,66 % d’une récolte normale. La majorité des cens mentionnés dans les inféodations du xve siècle est toutefois plus élevée, correspondant, pour les terres labourables, à 5 à 6 % d’une récolte normale, les seigneurs ont pu profiter d’une raréfaction de la terre disponible pour les augmenter ; ils sont restés faibles, recognitifs, dans les secteurs où la reprise ne s’est pas effectuée (un denier tournois à la séterée au Mas-Saintes-Puelles, dans la Piège). Les vignes fournissent, elles, des redevances partiaires, souvent d’un quart de la récolte. Les cens ont dû être modifiés si le tenancier a demandé la permission de transformer une parcelle de terre labourable en malhol.

298On peut déterminer, dans les livres d’estimes du Terrefort la part des cens et des rentes constituées. Les registres d’estimes Fendeille signalent de véritables cens ou oblies ; ceux de Montesquieu, Montgiscard et Ayguesvives, majoritairement, des cens. La charge moyenne pesant sur les terres, en cas de redevance fixe, est un peu supérieure à celle d’un cens, 8 et 11 % à Montesquieu et Ayguesvives, 18 % à Montgiscard, à cause de la présence de quelques rentes constituées, beaucoup plus forte à Montgiscard. Ces rentes, toutefois, ne concernent qu’une très faible partie des parcelles taillables, de 2 à 5 %. Le pourcentage exact de tenures et d’alleux reste, par contre, difficile à établir à partir des estimes, toutes les oblies recognitives (sauf à Fendeille) n’y étant pas mentionnées. Les estimes de Castelnaudary sont, elles, inutilisables sur ce point.

299Si l’on se tourne vers les registres notariés, seulement 15 % des ventes de biens-fonds ruraux en Lauragais oriental, 38 % en Lauragais occidental ont généré une lauzime, mais, en réalité, ce sont respectivement 80 % et 48 % de ces biens-fonds qui sont chargés de redevances (obliae, servici), souvent perçues par les seigneurs locaux. L’essentiel de celles-ci, de faible montant, peut être interprété comme des cens ; quelques-unes sont toutefois des rentes constituées, pour le service d’un obit, ou bien en raison de difficultés économiques, pour apurer une dette. Le système féodal est assez prégnant en Lauragais, ce que montre la présence de rentes ayant tous les caractères de la censive ; les seigneurs locaux sont, de plus, parmi les premiers acheteurs de rentes, ils jouent le rôle de prêteurs traditionnels dans les campagnes. L’alleu reste toutefois une réalité en Lauragais, même si sa part s’est réduite depuis le xive siècle.

Notes

1 Ce sont les propriétaires qui déclarent les biens et non les locataires.

2 Je ne préciserai donc pas, chaque fois, propriétaire utile.

3 Voir les deux fichiers « Les déclarants » dans la partie « Annexes ».

4 A.D.H.G., 5 E 67 f° 71 r°.

5 A.D.A., 4 E 076/CC 10 f° 122 r°.

6 Wolff (Ph.), Les estimes..., op. cit., pp. 51-52.

7 On précise qu’ils n’ont ni bien meuble ni immeuble, mais qu’ils sont là car ils doivent payer le capage, Rigaudière (A.), Saint-Flour ville d’Auvergne au bas Moyen Age, Etude d’histoire administrative et financière, Presses Universitaires de France, 1982, p. 823.

8 Biget (J.-L.), Les compoix d’Albi (xive-xve siècles), Les cadastres anciens..., op. cit., pp. 108-109, au xive siècle, par contre, ils figuraient sur les cadastres.

9 Wolff (Ph.), Les estimes..., op. cit. p. 45.

10 Comme c’est le cas, par exemple, en Vivarais, Valladier-Chante (R.), Le Bas-Vivarais au xve siècle..., op. cit., p. 321.

11 Biget (J.-L.), Les compoix d’Albi (xive-xve siècles), Les cadastres anciens..., op. cit., p. 108.

12 Wolff (Ph.), Les estimes..., op. cit., p. 27.

13 Au xve siècle, à Albi, le seuil d’imposition était le même, mais la réduction des cotes était alors très forte, cf. Biget (J.-L.), Les compoix d’Albi (xive-xve siècles), Les cadastres anciens..., op. cit., p. 108.

14 Wolff (Ph.), Les estimes..., op. cit., p. 31.

15 Ibid., p. 42. C’est ce que voit Michelle Éclache, pour le capitoulat de la Dalbade : ceux qui ont au maximum 10 £ de fortune réelle ne paient pas la taille, si ce n’est personnelle ; ils sont très peu nombreux, Éclache (M.), Les estimes de la Dalbade en 1459, Annales du Midi, t. LXXXIX, 1977, pp. 167-190.

16 Wolff (Ph.), Les estimes..., op. cit., p. 43.

17 A.D.A., 4 E 138/1 G 1 f° 99 v°, P. Gibert, une logada et une parcelle de terre.

18 A.D.H.G., 5 E 66 f° 44 v°.

19 A.D.H.G., 5 E 66 f° 45 r°.

20 A.D.H.G., 5 E 67, f° 24 v°.

21 A.D.H.G., 5 E 73 f° 75 v° ; autres faibles allivrements : f° 75 r°, 5 £ pour une vigne, f° 41 r°, 8 £ pour un ostal.

22 A.D.H.G., 5 E 73 f° 104 r°.

23 Ce que j’ai tenté par ailleurs, Marandet (M.-C), La gestion de l’impôt direct en Lauragais, au xve siècle... op. cit.

24 A.D.A.. 4 E 138/1S1.

25 A.D.A., 4 E 076/CC 7.

26 A.D.A., 4 E 138/1G1.

27 Biget (J.-L.), Les compoix d’Albi (xive-xve siècles), Les cadastres anciens..., op. cit., pp. 108-109.

28 Wolff (Ph.), Les estimes..., op. cit. p. 28.

29 Wolff (Ph.), Registres d’impôts et vie économique à Toulouse sous Charles VI, Annales du Midi, 1944-48, p. 38. Pour toutes les exemptions, voir cet article, pp. 45-54.

30 Ib., p. 50.

31 A.M.T., II 47.

32 A.M.T., II 86.

33 A.M.T., FF 24 45 et Viala (A.), Le Parlement de Toulouse et l’administration royale laïque, 1420-1525 environ, 1953, tome II, p. 379.

34 Ib., p. 381 et suiv.

35 En 1404, tous les officiers royaux doivent payer les aides, A.M.T., II 44, 1404 ; on retrouve la même chose en 1417, A.M.T., II 70. En 1408, un mandement royal ordonne de contraindre tous les habitants de la ville, y compris les officiers royaux, docteurs régents, monnayeurs, clercs, à contribuer à l’aide pour la délivrance du château de Lourdes, A.M.T., II 61.

36 Cela est indiqué en tête du registre d’estimes de la Dalbade, Wolff (Ph.), Les estimes..., op. cit., note 6 p. 376.

37 Ibidem, p. 47-49.

38 A.M.T, II 86.

39 Gilles (H.), Les États de Languedoc au xve siècle, Privat, 1965, p. 189.

40 Viala (A.), Le Parlement de Toulouse et l’administration royale laïque, op. cit., pp. 362-392.

41 Wolff (Ph.), Registres d’impôts et vie économique à Toulouse..., op. cit., pp. 45-46.

42 À Saint-Flour, des anoblis refusent de contribuer aux tailles, le roi les condamne à payer, leurs biens sont recensés mais rarement allivrés. Les clercs, normalement, doivent payer l’impôt quand il a un caractère communal et est affecté pour l’intérêt général, mais on voit que l’estime du chapitre est commencée puis abandonnée, pour les clercs eux-mêmes leurs biens sont estimés mais pas allivrés. Quelques officiers royaux déclarent leurs biens, mais ne sont pas allivrés très souvent, Rigaudière (A.), Saint-Flour ville d’Auvergne..., op. cit. pp. 825-827. A Pamiers, les clercs ne figurent pas dans le registre de 1350, Pujol (L.), La paroisse du Mercadal à Pamiers, au lendemain de la Peste Noire, d’après le livre d’estimes de 1350, Mémoire de maîtrise, Université de Toulouse-Le Mirail, 1996, p. 24.

43 Marandet (M.-C), La gestion de l’impôt..., op. cit.

44 A.D.H.G., 5 E 73 f° 105 r°.

45 Zemer (M.), Le cadastre..., op. cit., p. 77 et suiv.

46 Cf. le tableau « Les déclarants » dans la partie « Annexes ».

47 Elle est quand même supérieure à ce que R. Valadier-Chante note en Vivarais (72 clercs sur 3069 contribuables, soit 2,34 %), Valladier-Chante (R.), Le Bas-Vivarais au xve siècle..., op. cit., p. 269.

48 Marandet (M.-C), La gestion de l’impôt direct..., op. cit.

49 A.D.H.G., 5 E 73 f° 105 r°, estimé 1284 £ et demie.

50 A.D.A., 4 E 076/CC 10 f° 86 v°.

51 A.D.A., 4 E 076/CC 10 f° 166 v°. Il ne déclare aucun bien taillable dans les registres de Fendeille.

52 Auquel il faut probablement ajouter, en tant que co-seigneur, Jean Bourasyer dont le manifeste suit, A.D.A., 4 E 076/CC 10 f° 49 v°.

53 A.D.A., 4 E 076/CC 10 f° 166 v°.

54 A.D.H.G., 5 E 67 f° 146 v°, 5 E 73 f° 121 r°, f° 121 v°, f° 109 r°, f° 78 r°, f° 71 v°, f° 76 r° et f° 66 v°.

55 Les nobles ou réputés tels sont 41 sur 3069 contribuables, Valladier-Chante (R.), Le Bas-Vivarais au xve siècle..., op. cit., pp. 266-267.

56 A.D.A., 4 E 076/CC 7, 30 habitants de Souilhanels, 15 de Villeneuve, huit de Fendeille (pour, le plus souvent, de petites sommes).

57 A.D.A., 4 E 076/CC 12 f° 62, P 63, P 166.

58 A.D.A., 4 E 076/CC 12 f° 343 r°.

59 A.D.A., 4 E 076/CC 12 f° 360 r°.

60 Wolff (Ph.), Une famille du xiiie au xvie siècle, les Ysalguier de Toulouse, Regards sur le midi médiéval, Privat, 1978, pp. 233-245. Il signale la possession de la métairie de Canast. Voir aussi Wolff (Ph.), La fortune foncière d’un seigneur toulousain au milieu du xve siècle : Jacques Ysalguier, Annales du Midi, Toulouse, Privat, tome 70, n° 41, janv. 1958, pp. 89-99.

61 Wolff (Ph.), Les estimes..., op. cit., pp. 34-35.

62 Le n° 448, Raymond Dominici, un jardinier, déclare, pour lui et son frère, divers biens à Toulouse et « tout ce qu’il a à Renneville ’et contribuit in dicte loco 25 £’ ». Le n° 345, Dominus J. de Turre « tout ce qu’il a à Corronsac ’et contribuit ibidem 250 £’ ».

63 Wolff (Ph.), Les estimes..., op. cit., p. 36-37.

64 Gilles (H.), Les États de Languedoc au xve siècle, Privat, 1965.

65 A.D.A., 4 E 076/ CC 11. Il figure sur le registre de taille de 1492, avec une taille inférieure, A.D.A., 4 E 076/CC 7 f° 13 r°.

66 A.D.H.G., 3 E 10161 f°245 r°, 28 janvier 1409 (n. st.).

67 Demaille (E.), La gestion de l’espace rural et urbain à Lodève..., op. cit., p. 57. Ils sont 28 pour un total de 575 déclarants.

68 Ils sont 56, Rigaudière (A.), L’assiette de l’impôt direct à la fin du xive siècle...,op. cit., p. 54.

69 Ce qui est très différent de ce qui se passe au Puy-en-Velay où la profession de 36 % des chefs de feu est indiquée, Rigaudière (A.), « L’assiette de l’impôt direct dans le compoix du Puy-en-Velay de 1408 », La fiscalité des villes..., op. cit., p. 306.

70 Marandet (M.-C), Le souci..., op. cit., p. 78.

71 Ibidem, pp. 87-101.

72 R. Maguer dit qu’en 1695 moins de 50 feux sur cent sont paysans à Castelnaudary, Fendeille est situé dans un groupe où entre 51 et 70 % des feux sont paysans, De la cocagne au blé..., op. cit., pp. 23-25.

73 26 de ces femmes sont veuves, 16 mariées et 13 célibataires (leur patronyme est mis au féminin). Deux femmes sont associées, l’une à sa mère, l’autre à son mari, (CC 10 f° 46 r°, Arnaud Galhart et Marie son épouse), ce qui porte le total des femmes à 57.

74 Zemer (M.), Recherche d’une méthode d’interprétation démographique des cadastres du Comtat Venaissin (141) : le cas de Ménerbes, Provence historique, tome XXIII, 1973, p. 258.

75 107 manifestes de femmes « rarement associées à un époux ou à un frère », sur un corpus total de 3069 contribuables, Valladier-Chante (R.), Le Bas-Vivarais au xve siècle, op. cit., p. 266.

76 Rigaudière (A.), « L’assiette de l’impôt direct dans le compoix du Puy-en-Velay de 1408 », La fiscalité des villes..., op. cit., p. 44 et suiv.

77 Demaille (E.), La gestion de l’espace rural et urbain à Lodève, op. cit., p. 54.

78 Rigaudière (A.), L’assiette de l’impôt direct à la fin du xive siècle..., op. cit., p.309.

79 On trouve ainsi, au f° 13 v°, P. Theyseyre, le déclarant suivant, au f° 13 v°, est sa femme ; au f° 59 r°, le manifeste d’A. Pueg, puis le manifeste de sa femme, qui fut épouse de X ; au f° 61 r°, celui de Jean Alibert, au folio 61 v°, celui d’Esclarmonde, sa femme, etc.

80 La même chose existe à Lodève, Démaille (E. ). La gestion de l’espace rural, p. 56.

81 Rigaudière (A.), L’assiette de l’impôt direct à la fin du xive siècle..., op. cit., p. 824

82 A.D.A., 4 E 076/CC 9 f° 65 v°, J. Sacrotz ; P24 r°, R. Vaquier pour les biens de sa femme (qui a hérité de deux hommes), 33 £ 10 sous ; f° 47 r°, J. Faure pour l’ostal de sa femme, etc.

83 Hilaire (J.), Le régime des biens entre époux dans la région de Montpellier, Société d’histoire du droit et des institutions des anciens pays de droit écrit, Université de Montpellier, 1955, pp. 103-104 et Demaille (E.), La gestion..., op. cit., p. 56.

84 G. Frêche, Compoix, propriété foncière, fiscalité et démographie historique en pays de taille réelle (xvie-xviiie siècles), Revue d’histoire moderne et contemporaine, tome XVIII, juillet-septembre 1971, Paris, pp. 321-353, signale que le mari paye les tailles pour les biens dotaux de sa femme, elle paye pour les paraphernaux.

85 D’après les testaments, souvent, plusieurs enfants sont faits héritiers en parts égales (même si une donation précédente a pu avantager l’un d’entre eux), ils peuvent donc choisir de vivre ensemble et de ne pas partager les biens. Quelques testateurs demandent le maintien de l’indivision, cf. Marandet (M.-C), Le souci de l’au-delà : la pratique testamentaire dans la région toulousaine (1300-1450), Presses universitaires de Perpignan, 1998, pp. 64-75.

86 Le Roy Ladurie (E.), Paysans de Languedoc..., op. cit. pp. 166-167.

87 Germain (R.), Les campagnes bourbonnaises à la fin du Moyen Âge (1370-1530), Publications de l’Institut d’Études du Massif Central, Fascicule XXXI, 1987, pp. 139-150. La coutume du Bourbonnais consacre 14 articles à la communauté. Dans cette communauté tacite, les biens sont mis en commun, si l’un des membres s’en va, ses biens restent dans la communauté.

88 Tricard (J.), Comparsonniers et reconstruction rurale dans le sud du Limousin au xve siècle, Actes du 104e Congrès national des sociétés savantes, Bordeaux, 1981, Paris, 1981, pp. 51-62.

89 Pour Marie-Thérèse Lorcin, le pariage paysan apparaît à la fin du Moyen Âge comme un fait régional plus que conjoncturel, il n’est pas adopté partout : dans le Lyonnais, la plaine du Forez, la plaine de Roanne, très ravagés, le pariage est exceptionnel, Lorcin (M.-Th.), Partages et testaments en Forez au xve siècle, Campagnes médiévales..., op. cit., pp. 355-362, cf. Gonon (M.-Th.), Les institutions et la société en Forez au xive siècle d’après les testaments, Mâcon, 1960, p. 194. Des familles élargies, des frérèches existent aussi en Gévaudan, Maurice (Ph.), La famille en Gévaudan au xve siècle (1380-1483), Publications de la Sorbonne, 1998.

90 Poumarède (J.), Les successions dans le Sud-Ouest au Moyen Age, Publications de l’Université des Sciences Sociales de Toulouse, 1972, pp. 120-123.

91 Lorcin (M.-Th.), Pariages et testaments en Forez au xve siècle, op. cit., pp. 358-360.

92 A.D.A., 3 E 1483 P xx, 1417.

93 Chomel (V.), Pareries et frérèches en Dauphiné d’après quelques textes inédits (1250-1346), Cahiers d’histoire, XI, 1966, pp. 309-319.

94 Landraud (M.), Les contrats de mariage dans le Valentinois et le Diois aux xive et xve siècles, Thèse de doctorat en droit, Lyon III, 1974, p. 103 et suiv. Il y a participation du mari dans les contrats seulement quand le domicile conjugal est fixé dans la maison de sa femme ou de ses beaux-parents. Le constituant a alors la possibilité d’obliger le mari à effectuer un apport dans la société conjugale ou familiale dont il va alors faire partie. Les biens apportés sont ceux qu’il a acquis par son travail, sa succession ou les donations qui lui ont été consenties à l’occasion de son mariage (propter nuptias) par ses parents. L’apport effectué par le gendre n’est pas forcément égal à la dot de la fille. C’est le beau-père qui va administrer les biens, l’argent remis, c’est lui qui entretient la famille. Ces donations sont du même genre qu’à Toulouse, cela tient lieu de part dans les biens paternels et maternels.

95 Dans le Forez, c’est la même chose au xive siècle, Gonon (M.-Th.), Les institutions et la société en Forez..., op. cit.

96 A.D.A., 4 E 076/CC 10 f° 142 v°.

97 Il est à noter que dans les livres d’estimes apparaissent peu de mention de « fils untel », signe que les donations faites à cause de noces, par exemple, sont insuffisantes pour placer le jeune marié dans la catégorie des imposables en fonction du patrimoine.

98 J. Poumarède, Les successions dans le Sud-Ouest au Moyen Âge..., op. cit. note, dans la 2e moitié du xve siècle, des affrèrements entre époux. Ce système peut exister en Lauragais et expliquerait les baux de fermes concédés à des couples.

99 Voir la partie « Modes de faire-valoir ».

100 Dans les 5 % à Saint-Flour, Rigaudière (A.), L’assiette de l’impôt direct à la fin du xive siècle..., op. cit., pp. 49-53 ; 9,4 % en Vivarais, Valladier-Chante (R.), Le Bas-Vivarais au xve siècle, op. cit., p. 265-266. Dans cette région, plus de 80 % concernent les zones rurales. En Navarre, les familles complexes sont, en milieu rural, beaucoup plus fréquentes, elles représentent 23 % de l’effectif d’un dénombrement de 1427-28 concernant 8 620 foyers, elles peuvent être des familles élargies (le couple et la mère veuve, le couple des parents et celui d’un des enfants, mais aussi des familles multifraternelles ou frérèches (des familles à 3 ou 4 ménages) Berthe (M.), Famines et épidémies dans les campagnes navarraises à la fin du Moyen Age, SFIED, 1984, p. 468 et suiv.

101 A.D.H.G., 1 Mi 276 f° 131 v°, 138, 138 v°, 139 v°, 140r°, 144 r°, Castelnaudary, f° 195 v°, Mas-Saintes-Puelles.

102 Liber reddituum, A.D.H.G., 1 Mi 276 ff° 57-67.

103 A.D.A., 4 E 076/CC11.

104 A.D.A., 4 E 076/CC12.

105 A.D.H.G., 5 E 67 f° 14 v°, f° 7 r°, f° 12 r°.

106 A.D.H.G., 5 E 67 f° 17 r°.

107 Ces plans sont reproduits dans Cazals (L.), Une page d’histoire du Lauragais..., op. cit. Cf. la partie « Annexes ».

108 Cf. la partie « Annexes ».

109 A.D.H.G., 1 G 805.

110 A.D.H.G., 1 G 805 f°s 35 r°, 44 v°.

111 Une muraille en terre crue a été découverte dans les années 70, vestige de la fortification nord. Les fondations sont en blocs de grès et le mur lui-même est formé de lits de terre superposés d’une quinzaine de centimètres d’épaisseur ; il atteignait quatre à cinq mètres de haut et faisait deux mètres d’épaisseur à la base, Lourenco (J.), Inventaire..., op. cit., p. 38.

112 Amiel, Monographie d’Ayguesvives, 1885, A.D.H.G., BR 4°356, 4 Mi 15.

113 Cazals, Une page d’histoire du Lauragais..., op. cit., p. 275.

114 Higounet-Nadal (A.), Périgueux..., op. cit., p. 193.

115 Ibidem, p. 197.

116 Biget (J.-L.), Formes et techniques de l’assiette et de la perception des impôts à Albi..., op. cit., p. 117.

117 Wolff (Ph.), Les estimes..., op. cit. pp.89-92.

118 Soit 1743 chefs de famille, mais Ph. Wolff pense que ces petits chiffres sont dus à une négligence de la municipalité dans la tenue des registres d’estimes, Ib., p. 41 et A.D.H.G., BB 6, P 44 r° et v°.

119 L’intendant de Basville donne, pour Castelnaudary, le chiffre de 1074 feux en 1693, après les crises liées aux guerres de religion, les estimations de la fin du xve siècle semblent raisonnables. Dans le Terrefort occidental, on ne dispose pas de chiffres pour la période moderne ; en 1789, d’après la liste des députés des communautés pour les États-Généraux, établie par le juge-mage, Montesquieu comptait 260 feux, Montgiscard 242 et Ayguesvives 120 (renseignement communiqué par Marie-Rose Viala). D’après Carrié, Monographie de Montgiscard, 1885, il y aurait eu 1791 habitants à Montgiscard en 1793.

120 En Gascogne, dans les bourgs, les maisons et bordes (au sens de grange) ont la même structure ; utilisée comme grange, la borde reste une maison potentielle, on assiste même à des tentatives de fraude fiscale, on fait passer des maisons pour des bordes, ce qui est peut-être aussi le cas en Lauragais, Cursente (В.), Des maisons et des hommes. La Gascogne médiévale (xie-xve siècles), Presses universitaires du Mirail, 1998, pp. 446-447.

121 A.D.A., 4 E 076/CC 10 f° 188 v°.

122 A.D.A., 4 E 076/CC 10 f° 161 r°.

123 Dans le Comtat Venaissin, certaines maisons ne sont pas estimées car elles n’ont pas de valeur locative, Zerner (M.), Recherche d’une méthode d’interprétation démographique des cadastres du Comtat Venaissin : le cas de Ménerbes, Provence historique, tome XXIII, 1973, pp. 243-260.

124 Cursente (В.), Des maisons..., op. cit., p. 354.

125 A.D.A., 4 E 076/CC 10 f° 211 r°.

126 A.D.H.G., 5 E 73 F 62 r°, Montgiscard.

127 Il n’y a pas dans les estimes du Lauragais de mention de maisons louées alors que cela figure dans les cadastres du Comtat, Zerner (M), Le cadastre..., op. cit., pp. 101-102 ; Zerner (M.), Recherche d’une méthode d’interprétation démographique des cadastres du Comtat Venaissin (141) : le cas de Ménerbes, Provence historique, tome XXIII, 1973, pp. 243-260.

128 A.D.H.G., 5 E 73 f° 43 v°.

129 Marandet (M.-C.) L’équipement..., op. cit.

130 En Gascogne, les habitants ont une résidence intra muros et une seconde maison ou borde au dehors, on prévoit parfois lors de la fondation d’une bastide une parcelle pour faire une borde. Malgré les périls de la guerre, l’habitat de terroir est le point d’ancrage principal des paysans propriétaires, l’hospicium en ville est une annexe secondaire, Cursente (В.), Des maisons..., op. cit., p. 441 et suiv.

131 Cf. la partie « Origines des domaines ».

132 A.D.A., 3 E 9443 f° 63 r°, 1405.

133 J’ai signalé supra l’achat d’une « camera » dans une maison de Castelnaudary, par un laboureur, A.D.A., 3 E 1501 f° 105 r°.

134 A.D.A., 11 M 67, listes nominatives de 1846.

135 Entre 1347 et 1360, seulement 7 % des maisons accensées étaient isolées, Guimbail (R.), Expansion..., op. cit., p. 46.

136 Elle signale 116 maisons à l’intérieur des murailles et sept campmas, qui représentent donc près de 6 % des lieux d’habitation, Mimiague (G), Le terroir..., op. cit., p. 69.

137 Conservé à la mairie de Castelnaudary, 4 E 076/ CC 24 à CC 33. Il est complet, comportant les six ports et les faubourgs. Les plans correspondant, malheureusement inachevés, sont conservés aux A.D.A., sous la cote 1 Fi 928 et dans des archives privées.

138 D’après les statistiques de 1807, A.D.A., 13 M 264, 104 « maisons servent à l’exploitation rurale », on a aussi trois « maisons d’agrément à la campagne », deux moulins à eau, 20 moulins à vent, trois maisonnettes « éparses dans les vignes ». L’habitat intercalaire, en comptant les hameaux, écarts, fermes et maisons d’agrément représente 10,03 % des bâtiments d’habitation (hors moulins). D’après ces statistiques, Castelnaudary compte alors 9068 habitants, si l’on reporte ce nombre à celui des maisons, 1445, on aurait en moyenne 6,27 personnes par maison. Dans les listes nominatives de 1846, si le total des maisons des deux cantons de Castelnaudary a beaucoup augmenté, passant à 1809, le nombre d’écarts est resté stable, 109 métairies, 7 châteaux (généralement accompagnés d’une métairie portée sur la liste de celles-ci) et sept hameaux (Les Loubats, Les Crozes, Villeroux, Toto (Troto) Crabo, Montmer et Dreuilhe, Saint-Barthélémi ; tous, sauf Troto Crabo, sont des fermes au xve siècle).

139 Foriel-Destezet (Ch.), Vivarais et Languedoc..., op. cit., pp. 175-182.

140 Boudartchouk (J.-L.), Le Carladez de l’Antiquité au xiiie siècle. Terroirs, hommes et pouvoirs, Thèse de doctorat nouveau régime, Toulouse-Le Mirail, 1998, p. 613.

141 La localité de Fendeille est exclue de tous les tableaux car les superficies des parcelles ne sont pas fournies.

142 Avec un corpus réduit toutefois.

143 Leroy (P.), La commanderie de Renneville..., op. cit., p. 112.

144 Charbonnier (P.), Une autre France..., op. cit., pp. 800-801.

145 Zerner (M.), Le cadastre..., op. cit., p. 215 et annexes, pp. 628-629.

146 Cf. le chapitre « Les déclarants ».

147 Si l’on regroupe pour Castelnaudary les laïcs et les clercs, la superficie moyenne par propriétaire est de 5,74 ha.

148 Fossier (R.) Dictionnaire du Moyen Âge..., op. cit., article paysannerie, pp. 1058-1060.

149 Charbonnier (P.), Une autre France..., op. cit., pp. 385-386.

150 Zerner (M.), Le cadastre..., op. cit., p. 253.

151 Mimiague (C.), Le terroir..., op. cit.

152 Charbonnier (P.), Une autre France..., op. cit., p. 799.

153 Figure sur ce tableau la superficie possédée par un déclarant, hors parcelles bâties (d’un ostal, d’une borde ou d’un moulin) et hors jardins et vergers. Les superficies de quelques fermes et parcelles ne sont pas fournies. À Castelnaudary (registre CC 10), les clercs figurent dans le tableau, confondus avec les laïcs. Le corpus des Bastards est très réduit. Les déclarants peuvent détenir de la terre noble et des possessions dans d’autres localités.

154 Zerner (M.), Le cadastre..., op. cit., p. 255.

155 Ib., pp. 649-650.

156 Avec le problème, toutefois, des bosigues qui figurent parfois dans ces estimes.

157 Ce type de polyculture avec plantes oléagineuses et tinctoriales est, dans les Flandres, plutôt le fait de la petite propriété que des grands domaines, Derville (A.), L’agriculture flamande..., op. cit., p. 51.

158 Zerner (M), Le cadastre..., op. cit., p. 257.

159 Germain (R.), Les campagnes bourbonnaises..., op. cit., p. 315.

160 Ces grandes exploitations n’appartenaient pas toujours à des paysans enrichis mais aussi à des bourgeois, Berthe (M.), Le comté de Bigorre..., op. cit., p. 84.

161 Le Roy Ladurie (E.), Les paysans..., op. cit., p. 283.

162 Hélas (J.-C), Les anciennes mesures de l’Hérault, Les anciennes mesures locales du Midi méditerranéen..., op. cit., pp. 189-222.

163 A.D.H.G., 5 E 66, registre dit de 1409.

164 A.D.A. 4 E 076/CC CC 9.

165 Le Roy Ladurie (E.), Les paysans..., op. cit., pp. 158-159. Il retrouve ce schéma dans d’autres villages.

166 La parcelle constituant l’unité technique de culture.

167 Leroy (P.), La commanderie de Renneville..., op. cit., p. 111.

168 A.D.H.G., 5 E 73 f° 82 r°.

169 A.D.H.G., 5 E 73 f° 95 r°.

170 A.D.H.G., 5 E 73 f° 65 r°.

171 A.D.H.G., 5 E 66 f° 122 v°.

172 A.D.H.G., 5 E 66 f° 13 v°.

173 A.D.H.G., 5 E 67 f° 8 r°.

174 A.D.A., 4 E 138 1 G 1 °f 54 v°

175 A.D.A., 4 E 076/CC 10 f° 19 v°.

176 Dans ces tableaux figurent tous les propriétaires de parcelles de terre, que l’on connaisse la superficie de celles-ci ou non. Ont été comptabilisés, par localité, le nombre de terres labourables, vignes, prés, jardins, vergers, terres « mixtes », broussailles, bois et le nombre d’individus en possédant, ce qui permet d’avoir le pourcentage de propriétaires de telle et telle catégorie de parcelles. La parcelle portant la ferme n’est pas prise en compte. Tous les jardins et vergers, même accompagnant un ostal, sont inclus dans le fichier. Quelques sous-estimations se produisent pour Castelnaudary et Fendeille car on ne dispose pas toujours des détails du parcellaire des fermes (prés, vignes, jardins).

177 M. Zerner note la même chose en Comtat, la vigne est plutôt présente dans les toutes petites propriétés, Zemer (M.), Le cadastre..., op. cit., p. 540. À Lodève, 83,5 % des déclarants ont au moins une vigne, Demaille (E.), La gestion..., op. cit., p. 116.

178 Guimbail (R.), Expansion..., op. cit., pp. 122-123. De plus en plus de paysans ne prennent qu’un bien à cens avec le commandeur, cela révèle peut-être une diminution relative de la taille des exploitations.

179 Les estimes ne fournissant pratiquement jamais les superficies des jardins et vergers, ceux-ci sont exclus du tableau. Les ferragines et essarts sont trop rares pour être intéressants statistiquement et sont eux-aussi exclus. Quelques exemples de superficies d’essarts sont fournis par ailleurs (cf. « Les cultures »). Ce type de calcul permet de comparer le Lauragais avec d’autres régions où l’on n’a pas traité séparément les diverses formes de propriété (domaines et parcellaire dispersé).

180 Roupnel (G.), Histoire de la campagne française..., op. cit., p. 144 note 21, d’après Foville (A. de), Le morcellement. Études économiques et statistiques sur la propriété foncière, Paris, 1885.

181 Ib., p. 139, note 16.

182 Leroy (P.), La commanderie de Renneville..., op. cit., pp. 111-112.

183 Mimiague (C), Le terroir..., op. cit., p. 119.

184 Les autres maîtrises consacrées au Lauragais ne fournissent pas de superficie moyenne. R. Guimbail signale des parcelles de 14 ou 29 ares et de très grandes parcelles, de quatre ou huit ha, 95 pièces de terre sur 131 font moins d’un ha. Les terres destinées à la céréaliculture sont généralement plus grandes que les vignes et les prés, Expansion..., op. cit. p. 69. A Fanjeaux, P. Portet, vers 1315-1317, sur 400 superficies de parcelles, signale que la moitié font d’une demi-sétérée à une sétérée, un quart font moins d’une demi-sétérée, un quart plus d’une sétérée, Portet (P.), Annales du Midi, pp. 487-488.

185 Coulet(N.), Aix-en-Provence..., op. cit., p. 152.

186 Charbonnier (P.), Une autre France..., op. cit., p. 386.

187 Zemer (M.), Le cadastre..., op. cit., p. 228, p. 232 et annexe n° 12, pp. 636-637.

188 Germain (R.), Les campagnes bourbonnaises..., op. cit.,, pp. 331-332.

189 Cazes (J.-P.) La bailie..., op. cit.. pp. 38-40.

190 Higounet (Ch.), Un plan figuré de 1490 de la plaine sous-pyrénéenne de l’Hers et de l’Ariège, Revue géographique des Pyrénées et du Sud-Ouest, tomes XVI-XVII, 1945-46, (1949), pp. 321-323, repris dans Paysages et villages neufs du Moyen Âge, Fédération historique du Sud-Ouest, 1975, pp. 193-195. Voir surtout Bayle (J.), La commanderie de Saint-Jean del Tor à la fin du xve siècle. A propos d’un plan figuré de 1490, Bulletin de la société ariégeoise Sciences Lettres et Arts, 1989, pp. 19-36. Le plan se trouve en A.D.H.G., H Malte, I, 48, n° 3.

191 A.D.H.G., C 1549, cf. la partie « Annexes ».

192 R. Germain note la même chose, en Bourbonnais, pour le milieu du xve siècle, Germain (R.), Les campagnes bourbonnaises..., op. cit.,, p. 330.

193 A.D.A., 36 C 6, cf. la partie « Annexes ».

194 Les arbres auriers qui abritent des vents dominants et qui marquent aussi les limites des finages des fermes étaient déjà présents au Moyen Âge. Quelques baux à court terme demandent aux preneurs d’en planter. Les estimes ne les mentionnent pas, seuls les fossés de drainage ou les routes bordant les parcelles sont signalés.

195 Thébault (V.), Les bourgeois de la terre. Stratégies foncières et mobilités sociales dans le Midi toulousain, xixe et xxe siècles, Thèse de doctorat de géographie, 1995, p. 72.

196 Germain (R.), Les campagnes bourbonnaises..., op. cit.,, pp. 313-319. Coulet (N.), Aix-en-Provence..., op. cit., p. 181 et suiv.

197 Tricard (J.), Les campagnes limousines du xive au xvie siècle, originalité et limites d’une reconstruction rurale, Publications de la Sorbonne, 1996, pp. 192-194.

198 Les tenures parcellaires du Limousin sont, en moyenne, un peu plus importantes, 3 ha, Ib., pp. 193-194, celles de Bigorre le sont nettement plus : 4,9 ha, Berthe (M.), Le comté de Bigorre..., op. cit., pp. 75-83.

199 Germain (R.), Les campagnes bourbonnaises.... op. cit., p. 314.

200 Berthe (M.), Le comté de Bigorre, un milieu rural au bas Moyen Âge, op. cit., pp. 75-76.

201 A.D.A., 4 E076/CC10 f° 50 r°. Cf. la partie « Annexes ».

202 A.D.H.G., 5 E 67 f° 70 r°.

203 Gérard Béaur, Stratigraphier le monde rural. Les catégories sociales en question, pp. 17-20.

204 A.D.H.G., 3 E 22913 f° 52 v°, Cintegabelle, 1421 ; A.D.H.G., 3 E 4471 f° 169 v°, Toulouse, hôtelier et laboureur.

205 A.D.H.G., 3 E 34062 f° 6 v°.

206 Si l’on considère des rations journalières de blé comprises entre 876 et 1 315 grammes, pour Louis Stouff, d’après les rations du studium de Trets, Stouff (L.), Ravitaillement et alimentation en Provence aux xive et xve siècles. Mouton, 1970. Le receveur municipal de Murcie attribue à chaque prisonnier maure 1460 grammes de céréales par jour, ce qui conforte l’hypothèse haute de Louis Stouff, Menjot (D.), Murcie (1243-milieu xve siècle). Une ville méditerranéenne périphérique dans la Castille du bas Moyen Age, Madrid, Casa de Velâsquez, 2002, pp. 552-553.

207 Zerner (M.), Le cadastre..., op. cit., p. 255.

208 Cf. infra « La présence seigneuriale ».

209 Ce que pense B. Cursente pour la Gascogne, Des maisons..., op. cit.. p. 56.

210 A.D.A., 4 E 076/CC 10 f° 29 v°.

211 Higounet (Ch.), Observations sur la seigneurie rurale et l’habitat en Rouergue du ixe au xive siècle, Annales du Midi, 1950, pp. 121-134.

212 Ce qui apparaît pour le Moyen Âge central, A. Durand, Les paysages médiévaux..., op. cit., p. 259 et suiv. les voit, dans les cartulaires, situées en plaine, presque toutes près d’un ruisseau, ce sont surtout de grandes parcelles destinées à la culture intensive des céréales. Leur superficie moyenne est de 33 ha, vers 1030-1060.

213 A.D.A., 4 E 076/CC 10 f° 117 r°.

214 Billy (P.-H.), La « condamine » institution agro-seigneuriale. Étude onomastique, Max Niemeyer Verlag,, Tubingen, 1997, p. 144, pp. 149-150, pp. 153-154.

215 En occitan, le terme de condamina signifie indifférement terre franche de redevance seigneuriale, champ du domaine seigneurial, champ de très bonne terre, Alibert (L.), Dictionnaire occitan-français d’après les parlers languedociens, Institut d’Etudes Occitanes, Toulouse, 1966.

216 A.D.A., 3 E 15439, f° 94 v°.

217 A.D.H.G., 3 E 10154 f° 45 v°.

218 Le terme disparaît de la documentation à la fin du siècle, Puig (G), Les campagnes roussillonnaises..., op. cit., pp. 80-102.

219 Ceci déjà signalé dans Marandet (M.-C.), L’habitat intercalaire..., op. cit.,.

220 A.D.A., 3 E 9474 f° 124 r°.

221 14 occurrences alors que campmas ou bories sont mentionnés 16 fois.

222 A.D.A., 3 E 4/28 f° 153 r°.

223 Le dictionnaire occitan-français de Louis Alibert donne au mot borda les sens de chaumière, remise agricole, ferme, métairie, domaine agricole et fournit d’ailleurs comme synonymes boria, mas, capmas.

224 A.D.A., 4 E 076 /СС 15 f° 98 v°, f° 99 r°, f° 99 v°, f° 100 r°.

225 A.D.A., 3 E 4/28 f° 171 v°.

226 Sicard (G.), Le métayage dans le Midi toulousain à la fin du Moyen Âge, op. cit., p. 22. Voir aussi Sicard (G. et M.), Redevances à part de fruits et métayage dans le Sud-Ouest de la France au Moyen-Âge, Les revenus de la terre, complant, champart, métayage en Europe occidentale (ixe-xviiie siècles), 7es journées internationales de Flaran, 1985, Auch, 1987, pp. 61-73.

227 Tout ceci est développé, Marandet (M.-C), Contrats..., op. cit., p. 88.

228 A.D.H.G., 3 E 10159 f° 200 v°, 1391, location pour trois ans d’une borda sive boaria avec tous les prés de la borde qui est située en campagne, juridiction de Montgiscard, le preneur doit travailler, chaque année, cinq sétérées.

229 A.D.H.G., 3 E 10159 f° 207 v°, 1391, gasaillc, à Clermont, d’un demi hospicium sive cammasio « dels bosons » avec ses terres cultivées et incultes, les bailleurs gardent la moitié de l’hospicium, etc.

230 A.D.H.G., 3 E 10164 f° 104 v°, 1425.

231 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 11 r°.

232 Cf. infra.

233 Jean Tricard considère que le « mansus sive locus » de la fin du xve siècle où vivent la majorité des ruraux serait plutôt un lieu-dit composé de quelques maisons, « quelques descriptions évoquent un habitat en ordre lâche », Tricard (J.), Renaissance d’un pauvre pays..., op. cit., pp. 145-146.

234 Où ce mot apparaît pour remplacer celui de villa, au sens de village, Charbonnier (P.), Une autre France..., op. cit.

235 Pour R. Brunet, Les campagnes toulousaines..., op. cit., le casai est aussi une unité de mesure, généralement 28,7 ares, synonyme de journal, superficie qu’on peut labourer en une journée.

236 A.D.H.G., 1 G 801 f° 24 r°. À Lodève, au xve siècle, E. Demaille trouve, dans les estimes, des casaux qui semblent correspondre, soit à des maisons en ruine, soit à des cabanes servant de remises pour les outils ou de local pour la basse-cour. Demaille (E.), La gestion..., op. cit., p. 40.

237 A.D.H.G., 3 E 10166 f°P 40 v°.

238 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 31 v°, 1405.

239 A.D.H.G., 3 E 10162 f° 14 v°.

240 A.D.H.G., 3 E 10159 f° 137 v°, 20 mars 1390.

241 Cursente (B.), Des maisons et des hommes. La Gascogne médiévale..., op. cit., p. 55 et note 17. Cf. cet ouvrage pour tout ce qui concerne le casai.

242 Guimbail (R.), Expansion..., op. cit., p. 67-68.

243 Partak (J.), La seigneurie hospitalière..., op. cit., pp. 111-112.

244 A.D.H.G., 1 G 799, admansium de furneriis, f° 34 v°, 35 r°, etc.

245 Très rarement d’une exploitation, Hélas (J.-C), Le manse en Gévaudan, Cadres de vie et société dans le Midi médiéval. Hommage à Charles Higounet, Annales du Midi, 1990, pp. 173-178.

246 Un manse peut toutefois, là, être réduit à une seule exploitation et se rapproche alors des domaines pour lesquels on emploie d’ordinaire les termes domus, grangia, boria ou bordaria, Charbonnier (P.), Une autre France..., op. cit., p. 99, p. 107.

247 Stouff (L.), Le mas arlésien, Cadres de vie et société dans le Midi de la France, Hommage à Charles Higounet, Annales du Midi, 1990, p. 166.

248 Pour tous les calculs de superficies moyennes, de nombre moyen de parcelles, ce qu’un propriétaire déclare comme demi-campmas est compté effectivement comme une demi-exploitation. Il y en a peu, toutefois.

249 A.D.H.G., 5 E 73 f° 58 r°.

250 A.D.H.G., 5 E 73 f° 69 v°.

251 A.D.H.G., 5 E 73 f° 100 v°.

252 A.D.H.G., 5 E 73 f° 92 r°.

253 A.D.H.G., 5 E 73 f° 103 v°.

254 A.D.A., 4 E 076/CC10 f° 29 v° et f° 206 r°.

255 Marandet (M.-C), L’habitat isolé dans le diocèse de Saint-Papoul..., op. cit., pp. 142-143.

256 Au début du siècle à Castelnaudary, pour les laïcs, la superficie moyenne des exploitations à parcellaire groupé était de 12,49 ha (encore une fois, manquent dans ce registre les quartiers les plus riches), à Montesquieu, dans le registre dit de 1409, elle était de 20,43 ha.

257 À Montesquieu, dans le registre dit de 1409, 11,12 ha, à Castelnaudary, dans le registre CC 9, 12,05 ha.

258 À Pexiora, dans la plaine, C. Mimiague indique la taille de quatre campmas du xve siècle et de trois du xvie. Si l’on calcule la superficie moyenne, elle est de 21,57 sétérées (de 59 ares 28), ce qui correspond à 11 ha et demi. Dans le village d’Issel, alors que les conditions pédologiques sont moins favorables, la taille moyenne des fermes, dans le registre d’estimes de 1536, est de 22 sétérées labourables (la sétérée est celle de Castelnaudary) auxquelles s’ajoutent une dizaine de sétérées de brogues et bois.

259 22,6 % des affars dont la superficie est indiquée font entre 20 et 30 ha et 19,86 % font plus de 100 ha, Stouff (L.), Les livres terriers d’Arles du xve siècle, Les cadastres..., op. cit., tableau p. 339.

260 Germain (R.), Les campagnes ..., op. cit., p. 316 et suiv. Souvent, n’apparaît que la superficie des terres labourables, les terres vagues peuvent parfois doubler l’espace occupé.

261 Coulet (N.) Aix-en-Provence..., op. cit., p. 197.

262 Tricard (J.), Les campagnes limousines..., op. cit., pp. 192-194.

263 A.D.A., 4 E 076 CC 10 f° 26 v°.

264 A.D.A., 4 E 076 CC 10 f° 104 r°.

265 Cf. Marandet (M.-C.), Les campmas..., op. cit.

266 Maguer (R.) De la cocagne au blé..., op. cit., pp. 68-69.

267 A.D.H.G., 5 E 73 f° 80 v°.

268 A.D.H.G., 5 E 73 f° 79 r°, 5 E 73 f° 79 v°, 5 E 73 f° 87 v°, 5 E 73 f° 98 r°.

269 A.D.H.G., 5 E 67 f° 66 v°.

270 Cf. « Origines des domaines ».

271 A.D.H.G., 4 E 076/CC 11 f° 120 r°.

272 A.D.H.G., 5 E 73 f° 111 r°.

273 Cf. Marandet (M.-C.), L’habitat isolé..., op. cit., pp. 142-143.

274 Ce que notait déjà Georges Jorré, Le Terrefort..., op. cit., p. 52, il se basait sur la commune de Lanta, pour laquelle il avait utilisé une reconnaissance de 1445, un cadastre de 1492, un compoix de 1651-1766.

275 Cazals, Monographie..., op. cit.

276 Amiel, Monographie de la commune d’Ayguesvives, op. cit.

277 Jorré (G), Le Terrefort..., op. cit., pp. 53-54 et p. 64.

278 Ainsi que le dit Jean-Marc Monceau, Terres mouvantes. Les campagnes françaises du féodalisme à la mondialisation (xiie-xixe siècle), Fayard, 2003.

279 Passe lac (M.), L ’occupation des sols..., op. cit., p. 57 et Aspects de l’habitat rural en Lauragais..., op. cit. pp. 16-17.

280 Daté de 1387, mais vraisemblablement copie d’un acte plus ancien, remontant peut-être au xiie siècle.

281 Prospections au sol, M. Passelac.

282 Cazes (J.-P.), Habitat..., op. cit., p. 436.

283 A.D.A., 3 E 10814 f° 38 r°, f° 39 r°, f° 40 r°, f° 42 r°, 1450.

284 Dans ceux qui subsistent, le mobilier n’est pas antérieur aux ixe-xie siècles, Cazes (J.-P.), Les silos et leur signification dans le haut Moyen Âge, l’exemple du Lauragais, Hommage à Pierre Bonnassie, op. cit., p. 47.

285 Ces églises ont subsisté jusqu’au xviiie siècle, parfois un peu plus tard, ce qui fait qu’il est très facile de les situer dans le parcellaire. Marandet (M.-C), Les lieux de culte..., op. cit.

286 Cazes (J.-P.), Habitat..., op. cit., p. 169.

287 Marandet (M.-C.), L’habitat isolé dans le diocèse de Saint-Papoul..., op. cit., p. 152.

288 Sur un plan du compoix de 1700 figure encore l’église, cf. « Annexes ».

289 Cazes (J.-P.), Habitat..., op. cit., p. 164.

290 Fermes actuelles de Cucurou, Co de Faure et Guimbaud.

291 Aubrun (M.), Charbonnier (P.), Fournier (G.), Le Moyen Âge dans les paysages ruraux auvergnats, op. cit., pp. 221-231.

292 Hautefeuille (F.), Structures de l’habitat rural et territoires paroissiaux en Bas-Quercy et Haut-Toulousain du viie au xive siècle, Thèse de doctorat nouveau régime, p. 428.

293 Cursente (B.), Des maisons et des hommes..., op. cit.

294 Durand (A.), Les paysages..., op. cit., p. 115-121.

295 Le Mené (M.),Les campagnes..., op. cit., p. 145 et suiv.

296 Cf. infra.

297 Abbé (J.-L.), L’aménagement de l’espace : le parcellaire rural de la bastide de Saint-Denis (Aude), Campagnes médiévales..., op. cit., pp. 103-119.

298 Partak (J.), La seigneurie..., op. cit., p. 84 et suiv., à part ces deux occurrences, le casai n’est plus, à la fin du xiiie siècle, qu’une simple parcelle aliénable.

299 Guimbail (R.), Expansion..., op. cit., pp. 437 et 44-46. Il signale toutefois la présence de deux ou trois casaux au sens de ferme ou maison avec leur enclos et un lot de terres peu éloignées, mais ces casaux, dit-il, ne sont jamais isolés, ils sont toujours proches l’un de l’autre, constituant de tout petits hameaux.

300 A.D.A., G 233, pp. 631-632, cité par Ramière de Fortanier (J.), Recueil de documents..., op. cit., p. 671.

301 L’habitat temporaire dans les mas est signalé en Camargue, mais au bas Moyen Âge, les exploitants n’y vivent que pendant les grands travaux, en raison de l’insécurité, Stouff (L.), Le mas artésien..., op. cit., p. 169. Noël Coulet signale lui aussi des occupations temporaires de bastides aixoises par les exploitants, Coulet (N.), Aix-en-Provence..., op. cit., pp. 193-194.

302 Cazes (J.-P.), La bailie..., op. cit., p. 53 note 21 et p. 45.

303 A.D.H.G., 1 Mi 276 f° 144 r°, les autres bastides apparaissent f° 131 v°, 138 r°, 139 v°, 140 r°, 144 r°.

304 A.D.A., 4 E 076/CC9 f° 35 v°, les confronts ne sont pas indiqués.

305 A.D.A., 4 E 076/CC 9 f° 46 v°, un Guilhem Guarret, son frère, est mentionné juste après, son manifeste n’est pas rédigé.

306 A.D.A., 4 E 076/CC 9 f° 71 r°.

307 A.D.A., 4 E 076/CC 9 f° 28 v°.

308 Ce terme de bastide n’est plus employé en Lauragais aux xive-xve siècles alors qu’il l’est toujours en Provence où « étant chargé du prestige qui s’attachait aux première tours-bastides, il a été capturé et détourné dans le langage courant au profit des domaines ruraux et des bâtisses implantées en campagne par l’oligarchie urbaine ». Le terme est devenu ensuite synonyme de maison rurale, de cabane, de grange, Coulet (N.), La naissance de la bastide provençale, Géographie historique du village et de la maison rurale, Ch. Higounet dir., Actes du colloque de Bazas, octobre 1978, C. N. R. S., 1979, pp. 145-159.

309 Durand (A.), Les paysages..., op. cit., p. 202 et pp. 207-208.

310 Henri Duffaut a retrouvé, dans un inventaire du xviie siècle, plusieurs de ces hommages dans le registre ADHG, G 314 au F 234, Duffaud, Roqueville, Monographie du fief et de la chapelle de ce nom, Toulouse, Privat, 1903. Je n’ai pas retrouvé trace de ces hommages dans le registre.

311 A.D.H.G., 1 G 799 f° 31 v°.

312 A.D.H.G., 1 G 799 f° 32 r°.

313 A.D.H.G., 1 G 799 f° 32 v°.

314 A.D.H.G., 1 G 799 f° 35 v° « ultra feuda nobilia », une part moulin à eau sur l’Hers.

315 A.D.H.G., 1 G 799 f° 39 v° « ultra feuda nobilia », deux terres.

316 A.D.H.G., 1 G 799 f° 42 v°, il tient de l’archevêque « ultra feuda nobilia » une part de moulin à eau sur l’Hers et des biens divers dont un hospicium et une terre ad rivellum dont son « honor in feudo nobile » qu’il tient de ladite milice est confront. Il tient au même endroit deux terres et une borde.

317 A.D.H.G., 1 G 799 f° 34 r°.

318 A.D.H.G., 1 G 799 f° 34 v°.

319 A.D.H.G., 1 G 801 f° 1 r°.

320 A.D.H.G., 1 G 799 f° 35 r°.

321 A.D.H.G., 1 G 799 f° 36 v°, f° 48 v°.

322 A.D.H.G., 1 G 799 f° 30v°, 36 v°, 41 v°, 48 r°.

323 A.D.H.G., 1 G 799 f° 36 v°, 38 v°, 42 r°, 46 v°.

324 Dossat (Y.), Une tentative de réforme administrative dans la sénéchaussée de Toulouse en 1271, Bulletin philologique et historique, année 1964, 1967, Paris, pp. 511-512.

325 Ib., p. 511 et A.N.J 1031, membre 1.

326 A.D.A., 4 E 076/CC9 f° 19 r°.

327 Voir Marandet (M.-C.) L’habitat isolé..., op. cit., pp. 149-150.

328 Ces fermes figurent sous ces noms dans le compoix de 1700 mais elles n’appartiennent plus aux familles éponymes.

329 A.D.A., 3 E 9456 f° 176 r°. Alors qu’aucun seigneur n’est signalé, on mentionne la clause d’interdiction de vente et d’engagement à des saints (Églises, monastères), clercs, chevaliers et autres personnes « a jure prohibitis ».

330 A.D.H.G., 3 E 10136 f° 66 r°.

331 A.D.H.G., 3 E 10162 f° 29 r°.

332 A.D.H.G., 3 E 10166 f° 336 v°.

333 A.D.H.G., 3 E 10162 f° °23 v°, 1407 (ferme probablement liée à l’élevage d’ovins).

334 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 111 v°.

335 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 248 r°, 1409.

336 A.D.H.G., 3 E 10162 f° 64 v°, 26 mars 1409.

337 A.D.H.G., 3 E 10166 f° 73 r°, 1434.

338 A.D.H.G., 3 E 10162 f° 23 r°.

339 A.D.H.G., 3 E 10162 f° 2 v°.

340 A.D.H.G., 3 E 10166 f° 58 r°, 1436.

341 La Roncière (Ch.-M. de), Propriétaires et fermiers dans la plaine de Florence, Campagnes médiévales..., op. cit.,pp. 681-696.

342 Coulet (N.), Aix-en-Provence..., op. cit., p. 273 et suiv.

343 Cf. infra.

344 A.D.A., 3 E 10166 f° 58 r°.

345 A.D.A. 3 E 9470 f° 73 v°,1489.

346 A.D.A. 3 E 9470 f° 84 r°, 1490.

347 A.D.A., 3 E 1501 f° °271 v°, 1502.

348 A.D.A., 3 E 1501 f° 95 v°.

349 Une borie noble louée doit perdre son statut noble et devenir taillable, elle est déclarée par son propriétaire et non par le locataire. Jean Borasserie, seigneur de Peyrens, loue sa ferme de Pratfeneres, par bail reconductible de 29 ans en 29 ans, elle figure dans les estimes. Raymond de Pechbusque, seigneur de Mauremont, déclare, dans les estimes d’Ayguesvives, deux bories, sol et ort et 104 arpents. Il a donné une de ces bories en fermage en 1460, à P. de Bosco, un fabre, pour six récoltes, A.D.H.G., 3 E 10137 f 146 r°. Il a dû louer aussi sa deuxième ferme.

350 A.M.T., Ms. 634 30 v° ; ce dénombrement date probablement des années 1480-1510, moment où Foulques de Mauriaco est présent dans les registres de notaires.

351 A.D.H.G., Ms. 634 f° 38 v°, un château en 1389, un ostal fort en 1409.

352 A.D.H.G., Ms. 635 p. 42 et A.D.H.G., Ms. 634 f° 15 r°.

353 Caster (G.), Le commerce du pastel..., op. cit., pp. 151-152 et notes 129 à 138, RP 30, 106 r°.

354 A.D.A., 4 E 076/CC101.

355 A.D.A. 4 E 076 II 2, f° 9 r°.

356 Qu’ils aient uniquement la propriété utile ou soient pleinement propriétaires.

357 Thébault, Les bourgeois de la terre. Stratégies foncières et mobilités sociales dans le Midi toulousain. xixe et xxe siècles, Thèse de doctorat, géographie et aménagement, 1995, p. 64.

358 En 1496, à Castelnaudary, trente-deux déclarants laïcs possèdent un ou plusieurs campmas et n’ont pas d’ostal en ville, soit 44,44 % des propriétaires de domaines, ils ne sont plus que 8 en 1516, soit 14 % (certains habitent leur ferme : J. Coffolenty, J. Barbin, A. Parra, les héritiers Cros, les deux frères Pujol ; les autres sont domiciliés à Toulouse ou dans un village). Ils sont 15 en 1535, soit 14,85 % (dont les anciennes familles et des propriétaires qui avaient des biens en ville et les ont laissés à certains héritiers, les Loubat par exemple). A Montgiscard, ils sont quatre, à Ayguesvives sept, à Montesquieu, en 1485, 16, il n’y en a pas à Fendeille, en 1495.

359 Cf. « Les modes de faire-valoir ».

360 A.D.H.G., 5 E 67 f° 60 r°.

361 A.D.H.G., 5 E 66 f° 112 r°.

362 A.D.H.G., 5 E 67 f° 54 r°.

363 A.D.H.G., 5 E 67 f° 53 r°.

364 À payer, tout de même, en 10 ans, A.D.H.G., 3 E 10097 f° 49 r°.

365 A.D.A., 4 E 076/CC 80 f° 22 r°.

366 A.D.H.G., 5 E 67 f° 12 r°.

367 A.D.A., 4 E 076/CC9, cf. « Annexes ».

368 A.D.A., 3 E 9466 f° 32 v°.

369 A.D.A., 4 E 076/CC 80, 1447, f° 3 r°.

370 Dossat (Y.), Saisimentum..., op. cit., pp. 194-196.

371 A.D.A., 3 E 1501. Dans ce registre, plusieurs marchands achètent des terres ou des domaines : f° 7 v°, un marchand achète une borie à Bassenx, en 1505 ; f° 169 v°, un marchand, en 1509, vend une borie située à Souilhanels à un autre marchand, etc.

372 A.D.A., 3 E 9456 f° 63 v°, 1463.

373 A.D.H.G., 3 E 10109, 3 E 10111 et 3 E 10112.

374 A.D.H.G., 3 E 10109 f° 27 v°.

375 A.D.A., 3 E 1493 f° 65 r° et f° 64 v°.

376 A.D.A., 3 E 1493 f° 131 r° et f° 153 v°, 4 mai 1420.

377 A.D.H.G., Ms. 635 p. 36.

378 Les Avessens deviennent des nobles importants. Durand d’Avessens, en 1565, achète les 3/12 de la justice à Jean de Bonnefoy, en 1585 la moitié des 3/12 détenus par la famille de Vignes. En 1607, son petit-fils épouse Françoise de Vignes qui apporte le reste. En 1624, les d’Avessens ont les 7/12e de la justice, Ramière (J.), Droits féodaux..., op. cit., p. 257.

379 A.D.A., 4 E 076/CC 10 f° 166 v°, H. Ysalguier, A.D.A., 4 E 076/CC11 f° 215 r°, J. Siguier.

380 A.D.H.G., 3 E 10154 f° 322 r°. Sa mère, dame Florena, et Arnaud Othonis, le second époux de celle-ci, doivent la tenir en état, la réparer et A. Othonis en récupère les fruits.

381 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 80 v°.

382 A.D.H.G., 5 E 67 f° 49 r°.

383 A.D.A., 3 E 9450, non folioté.

384 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 179 r°, 1408.

385 A.D.H.G., 3 E 10097 f° 58 r°, cf. « Les modes de faire-valoir ».

386 A.D.H.G., 3 E 10133, non folioté, 1481-1495.

387 A.D.A., 3E 9444 f° 64 v°.

388 A.D.A., 3 E 9444 f° 133 v°.

389 A.D.H.G., 3 E 10097 f° 24 v°.

390 Marandet (M.-C), L’habitat isolé dans le diocèse de Saint-Papoul..., op. cit.

391 Ce qui se produit aussi en Provence, d’après les baux de facherie, Stouff (L.), Le mas arlésien. Cadres de vie et société dans le Midi de la France, op. cit., p. 169.

392 A.D.H.G., 3 E 10162 f° 23 r°, 1407.

393 A.D.H.G., 10162 f° 60 v°, 1409.

394 A.D.H.G., 3 E 10164 f° 104 v°, 1425.

395 Le terme est employé dans le registre de Castelnaudary de 1553.

396 Sur le cadastre napoléonien, ce hameau compte 16 bâtiments.

397 F. Mistral donne au vocable passado les sens de sentier, droit de passage, allée d’une maison. D’après la codification des usages ruraux, les servitudes de passage sont ouvertes de la Toussaint à la Sainte-Catherine ou une fois les récoltes enlevées, pour effectuer les semailles. On peut encore les utiliser jusqu’au 25 mars pour les labours, fumures, et semailles. Elles doivent faire un mètre de large pour celles prévoyant un simple passage à pied, deux mètres pour un tombereau attelé, 3,11 m pour un char et une voiture, le tout libre et franc de fossé. Un « transitum sive passada » dans un pré, large de six empans (soit 1,32 m), est vendu un setier de froment, A.D.H.G., 3 E 10164 f 126 v°. La passada comprend apparemment le sentier, matérialisé sûrement et le passage à pied avec le bétail. Ces tout petits lopins qui permettent le passage se vendent assez cher : une « petiam passatu » située à Fendeille, d’une éminée, avec cens à payer, coûte 3 écus, en 1506, A.D.A.3 E 1501 f° 128 v.

398 A.D.H.G., 5 E 66 f° 108 r°, 108 v°, 109 v°.

399 Marandet (M.-C), L’équipement de la cuisine dans le Midi toulousain d’après les testaments et les inventaires après décès, Usages et goûts..., op. cit., pp. 269-286.

400 On traduit le plus souvent par chai, Gaffiot donne aussi le sens de garde-manger. Étant donné qu’on y trouve provisions diverses et meubles, le terme de chai n’est pas tout à fait adapté. Autrefois, on parlait, pour qualifier ce local, d’arrière-cuisine.

401 Wolff (Ph.), Inventaires villageois du Toulousain, xive-xve siècles, Bulletin philologique et historique, année 1966, p. 481-544, Paris, 1968. Loubès (Abbé G.), Inventaires de mobilier et d’outillage gascons au xve siècle, Bulletin philologique et historique, année 1969, volume II, pp. 583-617, Paris, 1972.

402 A.D.H.G., 3 E 10137 f° 84 v°, 1459, le locale appartient à un docteur ès lois de Carcassonne.

403 La maison du castrum de la bordure méridionale du Massif Central, sous la direction de M.-G. Collin, I. Darnas, N. Pousthomis, L. Schneider, Archéologie du Midi médiéval, supplément n° 1, 1996.

404 Marin-Rabier (A.C.), Montpellier à la fin du Moyen Age, d’après les compoix, 1380-1450, Thèse de l’École des Chartes, 1980, un article en a été tiré, Bulletin historique de la ville de Montpellier, 1990, pp. 5-20.

405 Sournia (B.) et Vayssettes (J.-L.), Montpellier : la demeure médiévale, Imprimerie Nationale, 1991, p. 50.

406 Pariset (F.), Économie rurale, mœurs et usages du Lauragais..., op. cit., (Aude et Haute-Garonne), p. 93. Jusque vers 1965, on entrait dans les fermes lauragaises par l’étable et, de là, dans la salle commune. Il est probable que la ferme médiévale la plus modeste se présentait de la même façon.

407 Pariset (F.), Économie rurale, industrie, mœurs et usages de la Montagne noire..., op. cit., p. 178 et suiv. Rien à voir avec les fermes à cour fermée et leurs huit bâtiments décrites par Charles Estienne et Jean Liébaut dans « L’agriculture et Maison rustique », livre 1, chapitre V, pp. 11-16.

408 L’identification des fermes a été faite par Bayle (J.), La commanderie..., op. cit.

409 A.D.A., 4 E 076/ CC 11. Le moulin à eau de Combejuliane réapparaît dans le compoix de 1700, A.M.C., 4 E 076/ CC 30 f° 4 v°, il compte deux meules, ses bâtiments ont une superficie de 23 cannes 4 pans ; un deuxième moulin, à vent, est signalé.

410 A.D.A., 4 E 076/CC 12 f° 23 v°.

411 A.D.A., 4 E 076/CC 12 f° 63 v°.

412 A.D.A., 4 E 076/CC 12 f° 163 r°.

413 A.D.A., 4 E 076/ CC 14 1553 F° 297 v°.

414 A.D.A., 4 E 076/ CC 14 et CC 15.

415 A.D.A., CC 15 f° 56 v°.

416 A.D.A., CC 15 f° 252 r°.

417 L’aire de dépiquage est appelée sol (en langue d’oc) dans les estimes, area (en latin) dans les registres notariés.

418 Dans les registres de Montgiscard de 1489, d’Aigues-Vives de 1489, de Montesquieu de 1485, et des Bastards, pour les 109 exploitations isolées repérées, sont mentionnés 64 jardins, trois vergers, 65 sols, deux capelas, 15 moulins pasteliers, un moulin à vent, un four, une tuilerie.

419 Au xviie siècle, en Lauragais, le dépiquage effectué par une manade de chevaux permet de traiter 100 setiers par jour, Young (A.), Voyages en France en 1787, 1788 et 1789, tome III, p. 1214.

420 A.D.H.G., 3 E 18270 f° 35 r°.

421 A.D.H.G., 1 G 801, 1292.

422 Commune, Haute-Garonne.

423 Partak (J.), La seigneurie hospitalière de Caignac, op. cit., p. 79.

424 Ramière de Fortanier (J.), Recueil..., op. cit., p. 167.

425 Ib., Villeneuve p. 721, Avignonet p. 185.

426 A.D.H.G., 1 G 801.

427 Ces puits situés à l’intérieur des maisons et, souvent, dans la cave, sont attestés dans d’autres régions, dès le xive siècle, Alexandre-Bidon (D.), L’eau et l’hygiène, Cent maisons médiévales en France, sous la direction d’Y. Esquieu et J.-M. Pesez, C.N.R.S. éd., 1998, pp. 115-125.

428 Parce que s’y trouvent deux seaux en fer, dont le poids est soigneusement indiqué par le notaire, A.D.A., 3 E 9460 f° 13 r°, 1459.

429 A.D.A., 4 E 076 CC 11 f° 226 r°. Cette mare, très importante, de deux carterias, soit 17,5 ares, existe toujours.

430 A.D.H.G., 5 E 67 f° 131 v°.

431 A. D. H. G., 3 E 10164 f° 37 v°.

432 Leroy (P.), La commanderie..., op. cit., p. 140.

433 A.D.A., 4 E 076/CC 10 f° 95 v°. Il possède aussi sur cette parcelle un des pesquiers signalés.

434 A.D.H.G., 5 E 66, on passe du f° 133 r° au f° 35 r°.

435 Notées dans les estimes à partir de 1553, à Castelnaudary, A.D.A., 4 E 076/ CC 14 et CC 15.

436 Frédéric Mistral dans son dictionnaire, Trésor doit Felibrige, le traduit par couverts.

437 Sept apparaissent dans le registre « dit de 1409 ». Trois se trouvent dans des fermes, une sur une parcelle comportant borde et aire, située dans les fossés vieux, d’autres sont situées dans le fort villageois. « Un pati am capelas », par exemple, appartient à Jean-François de Godetz, A.D.H.G., 5 E 66 P 137 v°, il est estimé 6 £.

438 A.D.H.G., 3 E 10164 f° 104 v°, 1425.

439 Un arceau correspondait à une ferme d’un labourage, c’est-à-dire d’une paire de bœufs.

440 Cf. la partie « Annexes ».

441 Les fouilles réalisées par Bernard Pousthomis au Castlar de Durfort (Tarn), ont permis de trouver un grenier, probablement collectif, de six mètres sur cinq, incendié au xive siècle, les grains étaient disposés dans des sacs ou des vanneries ou laissés en vrac, Pousthomis (B.), Le castrum de Durfort, Archéologie et vie quotidienne aux xiiie-xve siècles en Midi-Pyrénées, Catalogue de l’exposition du musée des Augustins, Toulouse, 1990, pp. 119-124 ; Pousthomis (B.) et Ruas (M.-P.), Le grenier de Durfort, ibidem, pp. 247-250 ; Ruas (M.-P.), Productions..., op. cit.

442 du Cange indique qu’apotheca signifie domuncula. Cette apotheca est probablement l’équivalent de la botiga, l’endroit où l’on stocke et prépare le pastel.

443 A.D.A., 3 E 9462 f° 213 r°.

444 Ceux fouillés par Jean-Paul Cazes à Lasbordes (Aude), ont une profondeur de 1,60 m à 2 mètres et un diamètre maximal variant autour de 1,65 m, dimensions habituelles au bas Moyen Âge dans la région, Cazes (J.-P.), Un village castrai de la plaine lauragaise : Lasbordes, Archéologie du Midi médiéval, tome 8-9, 1990-91, p. 9. Voir aussi Lassure (J.-M.), La conservation des grains en silos, Archéologie et vie quotidienne aux xiiie-xve siècles en Midi-Pyrénées, op. cit., pp. 246-247.

445 En Roussillon, les fouilles archéologiques ont mis à jour des silos domestiques (de deux mètres de profondeur avec un diamètre moyen de 1,2 à 1,5 mètres), situés à l’intérieur et à l’extérieur des maisons, dans la rue, Puig (C), Les campagnes roussillonnaises..., op. cit., pp. 474-491.

446 A.D.H.G., 3 E 10097 f° 5 r°.

447 A.D.A., 3 E 1497 f° 57 v°.

448 A.D.A., 4 E 076/ CC 54.

449 Larenaudie (M.-J.), Les famines en Languedoc..., op. cit., p. 28.

450 Wolff (Ph.), Commerces..., op. cit., pp. 183-185.

451 Amouretti (M.-C), La transmission des connaissances agronomiques dans l’Antiquité : l’exemple des écrits techniques militaires, Traditions agronomiques..., op. cit., pp. 17-26.

452 Puig (C.), les campagnes roussillonnaises..., op. cit., p. 488 et Puig (C), Stockage et conservation du grain et du vin en Roussillon au Moyen Âge (xie-xive siècles), 3emes rencontres d’Elne, Hommage à Roger Grau.

453 A.D.H.G., 3 E 10154 f° 250 r°, 22 janvier 1385 (n. st.).

454 Mane (P.) La maison à travers l’iconographie, Cent maisons médiévales..., op. cit., pp. 37-41, ceci au xve siècle.

455 A.D.A., 3 E 8188 f° 42 v°.

456 A.D.H.G., 3 E 10159 f° 214 v°, 1391.

457 A.D.A., 3 E 9462 f° 175 v°, 1461.

458 J. Lartigaut note la même chose pour le Quercy, Lartigaut, Les campagnes..., op. cit., pp. 128-129.

459 Ramière de Fortanier (J.), Recueil..., op. cit., p. 468.

460 A.D.A., 4 E 076/ CC 8 et CC 9. Un pigeonnier, bâti sur trois éminées de terre, estimé 5 sous tr, appartient à G. Lobat qui possède des paredasses de campmas, un autre, situé dans une vigne de quatre sétérées appartient à un marchand. Des prêtres en déclarent aussi, souvent installés dans leur verger.

461 A.D.A., 4 E 076/CC 10 f° 95 v°, il appartient à P. Amyel et est situé, ainsi qu’un cayssieu, sur une condamine de 9 sétérées. Dans le Liber reddituum, un pigeonnier est mentionné à Saint-Martin-Lalande et un autre à Issel., Cazes, (J.-P.), La bailie..., op. cit., p. 47.

462 A.D.H.G, 3 E 10159 f° 55 v°, 1387.

463 A.D.H.G, 3 E 10161 f° 158 r°, 1407.

464 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 205 r°, 1408.

465 Conservé à la mairie de Castelnaudary, 4 E 076/ CC 24 à CC 33.

466 On emploie les termes de fournial, couvert, et, une fois, de couvert ou cabanat.

467 A.M.C., 4 E 076/ CC 31 170 r°.

468 Ces fermes sont généralement propriétés de notables, telles les fermes de Saint-Bénazeth, aux mains de Jean Bar, un marchand de Saint-Jean-de-Bordes, propriété de Jean-François de Ferran, un magistrat...

469 A.M.C., 4 E 076/ CC 31 f° 170 r°, ferme de Carguesac.

470 A.D.H.G., 3 E 10161 P 1 v°.

471 La brassée correspond à peu près à la canne, la canne de Toulouse fait 1,796 mètre.

472 Signalé par Leroy (P.), La commanderie de Renneville, op. cit., p. 167. Cet acte est mentionné dans un inventaire du début du xviiie siècle, établi à la demande de Joseph-Rolland de Réauville, commandeur de Renneville, A.D.H.G., H 113, LUI, 79.

473 Un mas fouillé en Catalogne fait 45,5 m2 au sol pour la partie habitable, Bolos (J.), éd., Un mas pirinenc medieval : Vilosiu В (Cercs, Berguedà), Lleida, 1996.

474 Coulet (N.) Aix-en-Provence..., op. cit., p. 263.

475 A.D.A., 4 E 076/ CC 14 et CC 15.

476 Voir les détails dans Marandet (M.-C), L’habitat rural en Lauragais... op. cit. p. 269.

477 A.M.C., 4 E 076/CC 31 f° 14 r°.

478 A.M.C., 4 E 076/ CC 31 f° 59 r°.

479 A.M.C., 4 E 076 / CC 31 f° 14 r°, P 59 r°.

480 A.M.C., 4 E 076 / CC 29 f° 70 r°.

481 Mirouse (F.), Le clergé paroissial.., op. cit., p. 207.

482 Catel (Guillaume de), Mémoires de l’histoire du Languedoc, op. cit., p. 132.

483 Commune, Haute-Garonne.

484 Froissart, Chroniques, édition Kervin de Lettenhove, tome V, p. 346.

485 Lhuisset (C), L’architecture rurale en Languedoc, en Roussillon, Les Provinciades, 1980.

486 Ce mot dériverait directement du latin pinsare ou pisare, piler. Pour J.-M. Pesez, le mot pisé apparaît à Lyon en 1562, le terme semble plus ancien en milieu occitan puisqu’il est déjà utilisé en Toulousain en 1545, Pesez (J.-M.), La référence ethnographique, Cent maisons médiévales en France, op. cit., pp. 67 et suiv. Dominique Baudreu pense que l’emploi de peseng signifierait que le bâtiment ne comporte qu’un seul niveau (article à paraître). P. Cayla donne pour le mot pesenh le sens général de pisé, mais signale que des bâtisses de faible élévation et de modestes dimensions sont ainsi désignées, Cayla (P.), Dictionnaire des institutions, des coutumes et de la langue en usage dans quelques pays de Languedoc de 1535 à 1648, Montpellier, 1964, p. 557.

487 A.D.A., 4 E 076/ CC 14 et CC 15.

488 A.D.H.G., 3 E 10164 f° 144 r°, achat d’un ort cum parietibus au barri daval de Montgiscard, etc.

489 A.D.H.G., 5 E 73P 53 r°, devant l’église de Montgiscard.

490 Ramière de Fortanier (J.), Recueil de documents..., op. cit., p. 622.

491 Lartigaut (J.), Les campagnes du Quercy après la guerre de Cent ans..., op. cit., p. 122.

492 Cayron (G), Le manuel..., op. cit., p. 368. Le massocanat, d’après F. Mistral est un colombage garni de pierres. Les pierres sont toutefois rares en Toulousain, la terre doit les remplacer.

493 Il s’agit de pisé, de bauge avec lits de brindilles de bruyères et d’adobes, Klein (A.) et Rivière (P.), Étude de l’architecture rurale en terre crue de Midi-Pyrénées, Dossiers internes du Service du patrimoine, 1991-2001 et Klein (A.), La construction en terre crue de Midi-Pyrénées (xvie-xxe siècles), contribution à l’identification des techniques, Echanges transdisciplinaires sur les constructions en terre crue, 1) Terre modelée, découpée ou coffrée. Matériaux et modes de mise en œuvre, sous la direction de C. A de Chazelles et A. Klein, Actes de la table-ronde de Montpellier 17-18 novembre 2001, Montpellier, Éd. de l’Espérou, 2003, pp. 417-437.

494 Dans le Gers, cf. Cazes (J.-P.) et Veyssière (F.), Un exemple de bâti villageois en pisé aux xie-xiie siècles : les maisons et le rempart du site de la Gravette à l’Isle-Jourdain (Gers), Échanges transdisciplinaires..., op. cit., pp. 377-383. A Marseille, cf. Themot (R.) et Vecchione (M.), Les murs en terre banchée de l’habitat de Marseille au Moyen Âge (fin xiie siècle-début xiiie siècle), Échanges transdisciplinaires sur les constructions en terre crue, op. cit., pp. 439-450 ; il s’agit de maisons de négociants, de changeurs ; les élévations en terre banchée s’associent aux maçonneries de pierre. Voir aussi l’article de Baudreu (D.), Habitats et fortifications en terre crue d’époque médiévale dans le Midi de la France, Échanges transdisciplinaires sur les constructions en terre crue, op. cit., pp. 359-375.

495 C’est un mélange de terre grasse et de paille, arrosé, trituré préalablement. Elle n’est pas banchée, on la dispose en lits épais, en jetant des paquets de terre, on laisse sécher, puis on élève un lit supplémentaire. Elle est surtout signalée dans le nord de la France (Beauvaisis, Picardie), pour les petits bâtiments et les murs de clôture.

496 Baudreu (D), Observations sur les constructions en terre crue dans l’Aude (Moyen Âge et Époque moderne, Bulletin de la Société d Études Scientifiques de l’Aude, tome CII, 2002, pp. 60-61.

497 Baudreu (D.), Bellegarde-du-Razès (Aude). Le Pla de las Vignos, Archéologie médiévale, tome 22, 1992, pp. 400-401, tome 23, 1993, p. 313.

498 Kotarba (J.), Pezin (A.), Elne (Pyrénées-Orientales), Archéologie médiévale, tome 21 (1991), p. 277.

499 Baudreu (D.), Habitats et fortifications en terre crue d’époque médiévale dans le Midi de la France, Échanges transdisciplinaires sur les constructions en terre crue, op. cit. Dans l’article Observations..., op. cit., il cite la fermeture de deux portes de la ville d’Arzens, au début du xviie siècle, à « terre et brugue ».

500 Parodi (A.), Bellegarde (Gard), Boussan, Archéologie médiévale, tome 19, 1989, p. 257.

501 Ginouvez (O.), Des maisons excavées à Narbonne autour de l’an Mil, Archéologie du Midi médiéval, tome 11, 1993, pp. 53-68. Dominique Baudreu pensait en avoir à Bellegarde-du-Razès, Baufreu (D.) Bellegarde-du-Razès (Aude), Archéologie médiévale, 22, 1992, pp. 400-401, 23, 1993, p. 313. Actuellement, il interprète ces vestiges comme un assemblage de pains de terre, voir Habitats..., op. cit.

502 Baudreu (D), Observations sur les constructions en terre crue dans l’Aude (Moyen Age et Époque moderne), op. cit., p. 62.

503 A.D.A., 4 E 076/AA 1.

504 A.D.H.G., 3 E 10097 f° 47 r°.

505 A.D.H.G., 3 E 6761 f° 56 v°, f° 65 v°, 3 E 7399 P 80 r°, etc., cités par Wolff, Commerces.... op. cit., p. 89.

506 Cayla (P.), Dictionnaire des institutions..., op. cit., p. 688.

507 Lartigaut (J.), Les campagnes du Quercy..., op. cit., p. 122.

508 Marandet (M.-C), Un exemple de ville policée..., op. cit., pp. 201-227.

509 Dans une ferme de Peyrens portée sur la carte de Cassini et aujourd’hui en ruine, où le matériel céramique trouvé par simple prospection au sol est du xviiie siècle, on voit, protégeant une ouverture de la pluie, ce qui pourrait correspondre à la ligne d’auvents de ces dessins de 1700, ce sont des tomettes de terre cuite, alignées et intégrées dans le mur, d’où elles dépassent d’une dizaine de centimètres.

510 Marandet (M.-C), Tuiliers et potiers..., op. cit., pp. 123-130. Depuis, le corpus de tuileries repérées a fortement augmenté (Soupex, Mas-Saintes-Puelles, Baziège...).

511 A.D.H.G., 5 E 73 f° 103 r°.

512 A.D.H.G., 5 E 73 f° 117 r°.

513 A.D.H.G., 5 E 66 f° 36 v°.

514 A.D.H.G., 5 E 66 f° 103 v°.

515 Les tuiles ne se vendent pas très cher, en 1461, les frères de Gavaretto en achètent 4000 au prix de 3 écus 12 gros le millier, A.D.H.G., 3 E 10137 f° 176 r°.

516 A.D.H.G., 5 E 67 f° 153 r°.

517 A.D.H.G., 5 E 67 f° 65 r°.

518 A.D.H.G., 5 E 67 f° 54 P.

519 A.D.A., 4 E 076/CC 10 f° 7 r°. Dans les plans d’adaptation 36 C 6, de 1786, une tuilerie est mentionnée à l’entrée ouest de la ville, elle apparaît dans des reconnaissances au roi en 1396 et 1415, on l’appelle la tuilerie de Cucurou. Des reconnaissances indiquent aussi, dans ce secteur, des « tuileries vieilles » où Jean Bourrassier détient un moulin à vent en 1390 et 1415. La vieille tuilerie de 1496 est peut-être la même. Une tuilerie était encore en activité jusque vers 1960 dans ce secteur.

520 A.D.A., 4 E 076/CC 10 f° 70 v°.

521 A.D.A., 4 E 076/DD 1, liasse 1 n° 30.

522 Tollon (B.), « Toulouse » La maison de ville à la Renaissance, Actes du colloque de Tours, juin 1977, Paris 1983, pp. 51-58. La brique cuite fait alors 35 à 42ans de long, 25 à 28 de large.

523 Elle est peut-être plus courante dans le Lauragais occidental.

524 Terminé, pour Castelnaudary, en 1824, conservé aux Archives municipales.

525 Dans le village d’Issel, par exemple. Le grès utilisé provient souvent de la région de Carcassonne, celui des lignes de cuestas dominant la dépression lauragaise n’étant pas très résistant.

526 Cayla (P.), Maisons et meubles de la fin du xvie siècle dans les pays d’Aude, Mémoires de la Société des Arts et Sciences de Carcassonne, 3e série, Tome VIII, 1947-48, pp. 237-257.

527 Par exemple, A.D.A., 3 E 9454 f° 16 r°.

528 Commune, Haute-Garonne.

529 A.D.H.G., 3 E 10166 f° 56 v°, 16 mai 1439.

530 A.D.H.G., 3 E 10137 f° 176 r°.

531 Les grandes font à peu près 50 cm de long, la largeur du grand côté est comprise entre 21 et 25 cm, celle du petit entre 16 à 18 cm ; les petites font de 29 à 32 cm de long, la largeur du grand côté est de 15 à 20 cm, celle du petit de 11 à 15 cm, Lhuisset (G), L’architecture rurale en Languedoc-Roussillon, op. cit.

532 À Durfort, les tuiles « canal » sont utilisées pour la plupart des toitures, Collin (M.-G.), Damas (I.), Pousthomis (N.), Schneider (L.), La maison du castrum..., op. cit. Stouff (L.), Le mas arlésien, Cadres de vie et société dans le Midi de la France, op. cit., fournit le dessin d’un mas, réalisé vers 1400, ce mas, d’un étage, est couvert de tuiles et peut-être bâti en pierre. Quand il y a destruction d’un mas, les propriétaires vendent pierres, tuiles et bois.

533 Marandet (M.-C.), Tuiliers et potiers de la région toulousaine..., op. cit., pp. 123-130.

534 Module que l’on retrouve sur les maisons urbaines figurées sur le compoix et subsistant aujourd’hui.

535 Rivais (G), Midi toulousain et pyrénéen..., op. cit., pp. 54-58.

536 Pesez (J.-M.), La référence ethnographique..., op. cit.

537 Ramière de Fortanier (J.), Recueil..., op. cit., p. 721, p. 167,p. 369,p.468, p. 185.

538 Et même en Bourbonnais : la Coutume reconnaît la présence d’alleux ; ceux-ci peuvent naître de la prescription du droit seigneurial, on peut aussi racheter la rente chargée des droits de seigneurie directe, Germain (R.), Les campagnes..., op. cit., pp. 308-311.

539 Gilles (H.), Les coutumes de Toulouse (1286) et leur premier commentaire (1296), Toulouse, 1969. Pour la Guyenne, par contre, nulle terre sans seigneur, il faut montrer un acte d’affranchissement pour que l’alleu soit reconnu.

540 viala (A.), Le Parlement de Toulouse et l’administration royale laïque (1420-1525 environ), 1953, tome 2, p. 197.

541 Richardot (H.), Le fief roturier à Toulouse, Revue historique de droit français et étranger, 1935, pp. 307-569 et pp. 495-569. Un chapitre de la coutume de Toulouse de 1286 est consacré au bail à fief, de feudis, Gilles (H.), La coutume de Toulouse..., op. cit.

542 La tenure paysanne est aussi appelée fief en Normandie, Bloch, La société féodale, 1983, p. 268. En Bourbonnais, R. Germain signale un acte disant que la censive peut être transformée en fief, un autre où un individu cède cens et rentes à un seigneur qui en contrepartie l’accepte comme son vassal et transforme en fief les autres biens de cet homme, Germain (R.), Les campagnes..., op. cit., pp. 235-237. Ne s’agit-il pas en fait d’une constitution de rentes féodales sur des alleux et d’une tenure fief telle celle du Toulousain ?

543 D’après H. Richardot, le premier fief roturier date d’environ 1098, l’évolution se fait progressivement, en 1125 on distingue encore fief et tenure, Richardot, Le fief..., op. cit., pp. 311-312.

544 Débax (H.), La féodalité..., op. cit., pp. 179-182.

545 Richardot (H), Le fief..., op. cit., p. 345.

546 Cayron (G.), Le manuel du parfait..., op. cit., pp. 387-397.

547 A.D.H.G., 3 E 10159 f° 105 v°, 20 mai 1391.

548 A.D.H.G., 3 E 10162 f° 29 v°, 1408 (n. st.).

549 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 111 v°, 1408 (n. st.).

550 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 113 v°, 1407 (n. st.).

551 Berthe (M.), Le droit d’entrée dans le bail à fief et le bail à acapte du Midi de la France (xiie-xve siècle), Fiefs et féodalité dans l’Europe méridionale (Italie, France du Midi, Péninsule ibérique) du xe au xiiie siècle, P. Bonnassie éditeur, C.N.R.S., Université de Toulouse-Le Mirail, 2002, pp. 237-278.

552 Tout ceci Ib., p. 265. Cf. infra « Signes de crise, signes de reconstruction ».

553 En Quercy sont pratiqués les mêmes taux, Lartigaut (J.), Les campagnes..., op. cit., p. 171. Rien à voir avec le Bourbonnais ou le Bas-Languedoc où les lods et ventes représentent parfois un tiers ou un quart du prix d’achat, Germain (R.), Les campagnes..., op. cit., pp. 294-295, Bourin-Derruau (M.), Les villages..., op. cit., tome 2, pp. 37-40.

554 Dans les reconnaissances passées auprès de l’archevêque de Toulouse, par exemple. Pour H. Débax, cela peut-être droit d’entrée ou droit de mutation, sur des tenures roturières ou des fiefs nobles. Pour elle, l’acapte se situe à la limite entre le droit d’entrée et le droit de succession et peut être appliquée à des fiefs nobles. Les foriscapes paraissent être plus spécifiques aux tenures « roturières ». Débax (H.), La féodalité..., op. cit., pp. 174-175.

555 Richardot (H.), Le fief..., op. cit., p. 525 et p. 528.

556 Ramière (J.), Les droits seigneuriaux dans la sénéchaussée..., op. cit., p. 46.

557 ft., p. 45.

558 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 241 r°, 1409.

559 Guimbail (R.), Expansion..., op. cit., p. 73.

560 Bourrin-Derruau (M), Villages..., op. cit.

561 Wolff (Ph.), Les estimes..., op. cit., p. 67.

562 Ib., pp. 122-123. Michèle Eclache travaillant sur le capitoulat de La Dalbade, toujours en 1459, note à peu près la même chose : 21 % des ostals sont francs, 28,5 % des vignes, 21 % des terres, 3,5 % de prés (2,5 à 4,5 % de l’ensemble des occurrences sont douteuses), Les estimes..., op. cit..

563 A.D.A., 3 E 1493 f° 6 v°, deux sétérées de malhol vendues 24 £ tr, service de 5 deniers tr, au cas où l’on retrouverait de qui elles sont tenues. A.D.A., 3 E 1493 f 66 v°, une terre de quatre sétérées vendue 36 £ et 10 sous tr, service un denier tolsan, au cas où l’on retrouverait de qui elle est tenue.

564 A.D.A., 3E 9444 f° 20 v°, un malhol franc de toute prestation de service, à Campgranier, à Castelnaudary, prix 7 £ 12 sous. A.D.A., 3E 1493 f° 3 r°, une terre malleolata à Prat Landric à Castelnaudary, prix 33 £ 5 sous tournois. A.D.A., 3 E 9449 f° 124 r°, un campmas, sauf trois sétérées ou à peu près, situé à Rieutort, à Castelnaudary. A.D.A., 3E 1493 f° 11 v°, une borde et son aysina franche libre immune de toute prestation et service, al pla del saly, dans les dépendances de Villeneuve, prix 20 £ tr. A.D.A., 3 E 1494 f 1 r°, un jardin « franc et libre et immune de toute prestation » à Issel, prix 60 £ tr, etc.

565 A.D.A., 3 E 9456 f° 176 v°.

566 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 23 v°, 30 octobre 1407.

567 Pariset (F.), Économie rurale, industrie..., op. cit., p. 58 et suiv.

568 A.D.A., 3 E 9465 non folioté et A.D.A., 3 E 9466 f° 160 r°.

569 A.D.A., 3 E 8188 f° 42 v°, 1480.

570 A.D.H.G., 3 E 10137 f° 125 v°.

571 A.D.A., 3E 1493 f° 171 v°, 27 octobre 1420.

572 On note la même chose en Quercy, Lartigaut (J.), Les campagnes..., op. cit., pp. 197-198.

573 Les actes de constitution de rente sont toujours intitulés « emptio ».

574 Une branche de la famille est seigneur de Saint-Léon (commune, Haute-Garonne).

575 A.D.H.G., 3E 10161 f° 173 r°.

576 A.D.H.G., 3E 10161 f° 173 v°.

577 A.D.H.G., 3E 10161 f° 280 r°.

578 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 249 v°, 15 février 1410 (n.st.).

579 A.D.H.G., 3 E 10137 f° 129 v° et f° 130 r°, 1er juillet 1460.

580 A.D.A., 3 E 9474.

581 On se rapproche du rapport signalé pour Toulouse ou pour la Castille. A Toulouse, le rapport est de 10 %, Wolff (Ph.), Commerces..., op. cit., p. 358. En Castille, il est de 14 % pour les rentes viagères, 8,33 % pour les rentes perpétuelles, Furio (A.), Endettement paysan et crédit dans la péninsule ibérique au bas Moyen Âge, Endettement paysan et crédit.., op. cit., p. 163.

582 A.D.A., 3 E 9474 f° 12 v° et f° 13 r°.

583 A.D.A., 3 E 9474 F 14 r° et F 15 v°.

584 Gilomen (H.-J.), L’endettement paysan et la question du crédit dans les pays d’Empire, Endettement paysan et crédit, op. cit., pp. 99-137. Leur rapport est de l’ordre de 5 %.

585 Dans cette région, elles sont en numéraire et apparaissent comme des augmentations du cens. Les baux d’accensement à de nouveaux tenanciers sont baillés « a crois de cens ou rente annuelle et perpetuelle ». Fourquin (G.), Les campagnes..., op. cit., pp. 185-186

586 C’est aussi le cas en Auvergne ; Pierre Charbonnier note toutefois que des paysans vendent à leur seigneur des suppléments de cens quand celui-ci perçoit des cens en argent qui se sont dévalués par rapport à la vente de la production, Charbonnier (P.), Une autre France : la seigneurie rurale en Basse Auvergne du xive au xvie siècle, Clermont-Ferrand, 1980, p. 344.

587 Castaing-Sicard (M.), Les contrats dans le très ancien..., op. cit.., p. 268.

588 A.D.A., 3 E 1479 f° 84 r°, 1411.

589 A.D.A., 3 E 14933 f° 27 v°, 1420.

590 A.D.A., 3E 9444 f° 4 r°, 1er sept 1405. Une autre vente de 12 setiers et une quartière de blé cum eorum directis dominationis laudi et foriscapiis est effectuée, pour 73 £ 10 sous tr, en faveur du chanoine B. Durandi, A.D.A., 3E 9444 f° 4 v°.

591 A.D.A., 3 E 1493 f° 10 r°.

592 A.D.A., 3 E 1493 f° 105 r°.

593 A.D.A., 3 E 1493 f° 16 v°.

594 A. D. H. G., 3 E 18270 f° 35 r°.

595 A.D.A., 3 E 1493 f° 110v°.

596 A.D.A., 3 E 1493 f° 6 v°.

597 A.D.H.G., 3 E 10154 f° 37 v°, 29 janvier 1382 (n. st.)

598 A.D.H.G., 3 E 10159 f° 214 v°.

599 A.D.H.G., 3 E 10162 f° 74 r°.

600 La situation des Andrés n’est pas très brillante. Ils achètent (ce qui est parfois dans ce secteur, une façon de présenter une nouvelle inféodation,) une terre quartanière d’un arpent pour 10 sous tolsans, un prix très faible, terre dont P. de Mauriaco est seigneur, A.D.H.G., 3 E 10162 f 76 r°. Ils vendent à celui-ci, au folio 77 r°, trois arpents quartaniers et reconnaissent lui devoir, pour arrérages parsonniers, 20 £ tr.

601 Berthe (M.), Le droit d’entrée dans le bail à fief et le bail à acapte du Midi de la France..., op. cit., p. 274.

602 Ramière de Fortanier (J.), Les droits seigneuriaux..., op. cit., pp.41-42.

603 Dans la plaine, le cens moyen est de 15 sous à l’ha, mais le rendement est plus fort, P. Charbonnier, La seigneurie auvergnate..., op. cit., p. 168. En Languedoc, E. Le Roy Ladurie signale qu’un ha de terre paye, vers 1480, en moyenne, 6 sous de droits seigneuriaux soit, en équivalent froment, 25 litres à l’ha, 5 % de la récolte brute, Les paysans..., op. cit., p. 291. Cela voudrait dire que la récolte, à l’ha, est de 500 litres, ce ne peut être le cas, avec presque 2 hl semés à l’ha, on récolte, en année normale 10 hl, ces 25 litres ne feraient que 2,5 % de la récolte brute annuelle.

604 Débax (H.), La féodalité..., op. cit., pp. 221-225.

605 A.D.A. 3 E 1493 f° 63 r°.

606 A.D.A., 3 E 9444 f° 137 v°.

607 A.D.H.G., 3 E 10159 f° 57 v°.

608 A.D.A., 3 E 1495 f° 235 r°, 13 décembre 1464.

609 A.D.H.G., 3 E 10161 f° 148 v°, 1er sept 1407.

610 La loi Julia permet au mari d’aliéner l’immeuble dotal de sa femme avec le consentement de celle-ci.

611 A.D.A., 3 E 9443 f° 50 r° et f° 58 r°, 28 mai 1404.

612 A.D.A., 3E 9444 f° 93 v°.

613 A.D.A., 3 E 1493 f° 76 r°, trois carterias d’un campmas de 12 sétérées, relèvent de b. r. de Fontaynis (cens d’une carteria de froment), le reste est en indivis entre b. r. de Fontaynis et j. Niseti, héritier de G. Olrici (cens de 5 d tr).

614 Yves Dossat signale qu’il réclama, en 1267, le tiers de Villenouvette et son cousin Isarn le sixième, en vain, Dossat (Y.), Saisimentum..., op. cit., note 7 p. 194 et note 2 p. 199.

615 A.D.A., 4 E 076/CC 10 f° 186 v°.

616 À Montgiscard, les cens et services sont mentionnés dans la partie du document contenant une estime réduite, quel que soit leur montant, les réductions sont uniformes, A.D.H.G., 5 E 73 folios 1-15.

617 Les deux figurent dans les estimes du Comtat Venaissin, Zemer (M.), Le cadastre..., op. cit., pp. 246-247.

618 À moins que l’abbaye de Boulbonne ne se désintéresse de ses tenures. Elle a acheté Les Bastards aux frères de Villèle, le 20 mai 1306, pour 20 000 sous tr. Les Bastards appartenaient au roi, comme héritier du comte de Toulouse. Un document de 1304 confirme une transaction, passée entre le 17 janvier 1291 et mars 1292, entre le représentant de Philippe le Bel et Bernard et Normand de Villèle. Le roi apporte le lieu des Bastards, excepté l’albergue et un caselage, et les deux frères, membres d’une des plus importantes familles seigneuriales du Toulousain, donnent leurs droits et possessions sur Nailloux.

619 Un peu plus, en réalité, car, dans le registre dit de 1409 sont mentionnés trois rabais concernant un ensemble de biens.

620 Partak (J.), La seigneurie hospitalière de Caignac, op. cit.

621 Teil (G.), La commanderie..., op. cit., Guimbail (R.), Expansion et crise..., op. cit.

622 Cazes (J.-P.), La bailie..., op. cit.

623 En Provence, en Bordelais..., Stouff (L.), Redevances..., op. cit., pp. 45-47 et pp. 51-52.

624 F. Mimiague note que l’évolution s’est faite entre 1360 et 1438, les redevances à part de fruits sont très peu nombreuses dans le registre de 1438, signe qu’elles ont été éliminées, Mimiague (F.), Le terroir..., op. cit., p. 65 et p. 84.

625 Elles constituaient 34,8 % du total des redevances au milieu du xive siècle, Leroy (P.), La commanderie de Renneville..., op. cit.

626 En Catalogne, par exemple, ils constituent plus de 85 % des cens fixes, entre 1225 et 1300, Viader (R.), Les contrats agraires des archives capitulaires de Barcelone (xie-xiiie siècles), Mémoire de maîtrise, Université de Toulouse-Le Mirail, 1993, p. 60. Dans le Bas-Languedoc, Monique Bourrin-Derruau, note, elle aussi, dès le xiiie siècle, une tendance à la conversion des cens en nature en cens en numéraire, Les villages..., op. cit..

627 Castaldo (A.), Le consulat médiéval d’Agde.... op. cit., p. 251. Prieur (M.-H.), Le quartier Sainte-Anne à Montpellier au xve siècle à travers les compoix, Mémoire de maîtrise, Université de Montpellier III, 1983, dactylographié, p. 111 ; Zemer (M.), Le cadastre..., op. cit., p. 539 ; Bertrand (F.), Espalion en 1403..., op. cit., p. 235.

628 Contre 43,8 % en nature, 4,2 % mixtes, 0,25 % divers ou inconnus et 0,15 % en parts de fruit ou corvées, Demaille (E), La gestion..., op. cit., p. 146 et p. 152.

629 Cazes (J.-P.) La bailie..., op. cit., p. 63.

630 Partak (J.), La seigneurie hospitalière de Caignac, 1250-1300..., op. cit.

631 Ainsi que le dit Maurice Berthe, c’est parce que les seigneurs reçoivent l’argent des acaptes qu’ils n’ont pas converti les redevances en denrées agricoles en rentes en argent, comme on l’a fait ailleurs, les acaptes leur amenaient les liquidités, Berthe (M.), Le droit d’entrée dans le bail à fief et le bail à acapte du Midi de la France (xiie-xve siècle), Fiefs et féodalité dans l’Europe méridionale (Italie, France du Midi, Péninsule ibérique) du xe au xiiie siècle, P. Bonnassie éditeur, C.N.R.S., Université de Toulouse-Le Mirail, 2002, p. 274.

632 Zerner (M.), Les cadastres anciens des villes et leur traitement par l’informatique, Rome, 1989, p. 155.

633 À Lodève, on a la même chose, le bâti urbain est surtout grevé de redevances en argent. Pour les parcelles agricoles, seuls vergers, jardins enclos et carrés de plantes tinctoriales payent à plus de 90 % des cens en argent, les autres biens payent surtout des redevances en nature ou mixtes, Demaille (E.), La gestion..., op. cit. p. 152.

634 Les mesures employées sont dites de Castelnaudary, de Fendeille, de Laurac ou non précisées. À Fendeille, d’après Jean Ramière de Fortanier, Chartes..., op. cit., p. 101, la sétérée est de 58,47 ares ; à Laurac, d’après la table de concordance de l’an VII, elle est de 46,79 ares. Les terres sont moins bonnes qu’à Castelnaudary, on sème plus léger pour une même superficie, la sétérée est donc plus grande.

635 Castaing-Sicard (M.), Les monnaies féodales et la circulation monétaire en Languedoc (xe-xiiie siècles), Association Marc Bloch, 1961, pp. 82-83. J. Lartigaut signale que les monnaies féodales continuent d’être utilisées au xve siècle comme monnaies de compte, Les campagnes..., op. cit., p. 157.

636 Il est probable, tout de même, que la parcelle moyenne, à Fendeille, soit plus petite que dans le reste du Lauragais, cf. supra « Le nombre de parcelles ».

637 Dix parcelles bâties, 17 terres labourables, cinq jardins, un verger, cinq malhols, une terre et malhol, un bois, deux aysina.

638 Ramière de Fortanier (A.), Des confréries médiévales aux confréries de pénitents, Castelnaudary, histoire et archéologie..., op. cit., p. 191. Pour lui, les consuls construisent, seuls, cet hôpital car ils en ont été chargés par testament daté de 1531.

639 En Catalogne, du xe au xve siècle, il est d’un onzième des récoltes, Bonnassie (P.), La Catalogne..., op. cit., pp. 253-254.

640 A.D.H.G., 5 E 67 f° 8r°.

641 Il doit être tenancier de l’archevêque de Toulouse.

642 Il est très rare que le propriétaire éminent soit noté dans les estimes ; dans le Midi de la France, c’est seulement le cas à Montpellier, Prieur (M.-H.), Le quartier Sainte-Anne à Montpellier..., op. cit., p. 111.

643 Un contribuable forain de Montgiscard, deux de Montesquieu, dans le registre dit de 1409, trois dans le registre de 1485, cinq de Castelnaudary, dans le registre CC 8, 14 dans le registre CC 9 (plus trois parmi les clercs) et un dans le registre CC 10.

644 A.D.A., 4 E 076/CC 9 f° 48 r°. Il est probablement marchand, cf. supra « Les plantes industrielles ».

645 A.D.A., 4 E 076/CC 9 f° 187 v°.

646 A.D.A., 4 E 076/CC 9 f° 63 v°.

647 Or, il possède la moitié de la ville d’Ayguesvives et de l’albergue qui s’y prend, évaluée à 10 sous tolsans, la directe et la juridiction haute et basse sur les lieux et villages de Corronsac, Péchabou et Donneville, les confiscations pour hérésie, le droit de connaître des contraventions et amendes pour port d’armes dans ces terres. Il possède aussi la terre et le fief de Roqueville, Corraze (R.), La seigneurie épisco-pale..., op. cit. et Duffaud (H.), Roqueville, monographie du fief..., op. cit., p. 57.

648 Les deux derniers apparaissent dans le Ms. 635 pour des aveux et dénombrements faits dans les années 1540-1554.

649 Dans des régions proches la rente a diminué. En Catalogne, Mercé Aventin note une baisse de la rente qui commence au xive siècle et continue jusqu’à la deuxième moitié du xve siècle, Aventin (M.), La societat rural a Catalunya en temps feudals, Vallès oriental, segles xiii-xvi, Columna Assaig, 1996, pp. 151-159. En Bigorre, Maurice Berthe conclut à une baisse des revenus comtaux entre 1313 et 1429 et pense qu’il en est de même pour tous les autres seigneurs, Berthe (M.), Le comté de Bigorre..., op. cit., p. 159 et suiv.

650 A.M.T., Ms. 634 f° 31 v°.

651 A.M.T., Ms. 634 f° 35 v°.

652 A.M.T., Ms. 634 f° 35v°.

653 A.M.T., Ms. 634 f° 33r°.

654 Les seigneurs du Ms. 634 déclarent 7/12e de la justice, le roi en a les 3/12e et la communauté l/12e (depuis 1349).

655 A.D.H.G., E 1137.

656 A.M.T., Ms. 634 f° 36 r°.

657 A.M.T., Ms. 634 f° 36 r°.

658 A.M.T., Ms. 634 f° 35 r°.

659 A.M.T., II 97.

660 A.M.T., Ms. 634 f° 32 r°.

661 A.M.T., Ms. 634 f° 30 v°.

662 A.M.T., Ms. 634, f° 15 r°.

663 A.M.T., Ms. 634 f° 8 r°, f° 8 v°, 9 r°, f° 12 r°, f° 12 v°.

664 A.M.T., Ms. 634 f° 1 v°.

665 A.D.H.G, 1 A 2 tome 1.

666 A.D.H.G., 3E 10154 f° 141 r°,18 mai 1383.

667 A.D.H.G., 1 A 2 tome 1 f° 271.

668 Tout cela sera développé ultérieurement dans une autre publication.

669 A.D.H.G., 1 A 8 tome 2, f° 274 et suiv. et 1 A 6, ff° 151-173.

670 A.D.H.G., 10161 f° 220 v°, 1408.

671 A.D.H.G., 10161 f° 153 v°, 1407.

672 A.D.H.G., 1 A 2 tome 1, P 247, même chose en 1 A 2 tome 4 P 164 r° : on signale un registre de reconnaissances de Castelnaudary, de 1396, ainsi que des registres concernant plusieurs villages, par exemple, Montgiscard, f°s 168 v° à 169 v°, Montesquieu, f° 170 r° et v°, Laurac, Mireval, Pexiora, Laurabuc, Besplas, Mézerville, La Cassaigne, Gaja, Fendeille et La Force, P 255.

673 A.D.A., 36 C 6.

674 Charbonnier (P.), Une autre France..., op. cit., p. 17.

675 En Auvergne, toutefois, la liève du xve siècle est construite comme le terrier, tout ce qui concerne un même tenancier est présenté globalement. C’est une copie abrégée du terrier, avec nom du tenancier, description du bien, redevance. Pierre Charbonnier se demande si cette évolution est à mettre en relation avec la généralisation des terriers ou avec un changement de mentalité qui deviendrait plus attentive à l’aspect foncier, en liaison avec la remise en valeur du xve siècle, Charbonnier (P.), Une autre France..., op. cit., p. 18, et La seigneurie auvergnate au miroir des terriers..., op. cit., p. 169.

676 Fournier (G), Les origines..., op. cit., p. 12.

677 Marandet (M.-C), Le souci de l’au-delà..., op. cit., p. 100.

678 A.D.H.G., 1 G 800, 1427. 1G 801, 1447, reconnaissances féodales de Montgiscard, Donneville (celles de Montbrun furent détachées du registre en 177. et remises à monsieur de Senaux, acquéreur de la seigneurie du lieu). 1 G 802, 1462-1611. 1 G 803, 1487-1494. 1 G 804, 1487. 1 G 805, 1487. 1 G 806, 1487. 1 G 807, 1524 et années suivantes. 1 G 808, 1542 et suiv. reconnaissances de Montbrun et autres registres postérieurs à 1500. 1 G 814 à 817, 1487. 1 G 823, 1406-1498. 1 G 837, 1456-1516.

679 Ce registre a été restauré courant 2004 et est aujourd’hui non communicable, si ce n’est sous forme de microfilm.

680 Des mélanges de folios ont été effectués, apparemment, à la période moderne. Du f° 1 au folio 12 v°, on trouve des tenanciers de Corronsac puis, au folio 13 r°, de Montbrun, au folio 16 r°, de Castanet, au folio 30 r°, de Roqueville, puis, à nouveau de Montbrun, à compter du f° 52 r°, puis de Donneville, au f° 77 r°, de Péchabou, au f° 106 r°, et à nouveau de Corronsac, au f° 128 r°.

681 Dans la Catalogne voisine, les capbreus qui sont l’équivalent des terriers semblent très lents à réaliser, la réception des reconnaissances s’effectue sur des mois, des années même. Fin XVe seulement, on commence à indiquer confronts, superficies « vel circa », Larguier (G.), Capbreus de Catalogne du Nord (province du Roussillon) aux xve-xviiie siècles, op. cit., pp 65-78.

682 Une est effectuée, par exemple, en 1343, par le notaire Guilhem Guisanis, A.D.H.G., 1G 799 f° 30 r°.

683 11 femmes mariées, quatre veuves dont une remariée, quatre femmes seules, dites filles de X ; une de ces femmes vit à Toulouse.

684 Trois de Toulouse, deux de Donneville, cinq de Baziège, un de Labastide de Pierre-Juif (Labastide-Beauvoir, commune, Haute-Garonne).

685 Ce registre, plus riche que ne l’annonce l’inventaire, regroupe des reconnaissances faites à l’archevêque dans plusieurs villages : Montgiscard (du folio 1 au 94 v°), Péchabou, Donneville, Montbrun, Castanet.

686 A.D.H.G., 1 G 801 f° 62 r°.

687 Richardot (H.), Le fief roturier..., op. cit., p. 338 et note 3.

688 Bruni, Fabri, Beneyci, Durand, Siuraguello, Adhémar, Ayneri, de Miralhiis, Forneri et Gavarret, ces deux dernières familles membres de la milice de Roqueville.

689 Un habitant de Montbrun, autrefois habitant de Montgiscard, un de Donneville, deux de Belbèze, un de Baziège, villages proches de Montgiscard et un de Villelongue (dans l’actuel département de l’Aude).

690 A.D.H.G., 1 G 801 P 1 r°.

691 A.D.H.G., 1 G 801 f 26 v°. Ces hommages sont signalés en Catalogne au xiiie siècle pour des mas donnés en emphytéose. Les preneurs font hommage manuel à Dieu, au Saint-Père et aux seigneurs auxquels ils promettent fidélité, ils mettent leurs mains dans celles des seigneurs, Aventin (M.), La societat rural a Catalunya en temps feudals..., op. cit., p. 142.

692 Richardot (H.), Le fief roturier..., op. cit., p. 530.

693 A.D.H.G., 3 E 10133,19 février 1492 (n.st.).

694 Les reconnaissances des habitants de Montgiscard, de Montbrun, à partir du f° 161 r°, de Donneville à partir du f° 371 r°, de Corronsac, à partir du folio 290 r°.

695 Quatre femmes mariées (pour une, son époux administre ses biens), six veuves non remariées dont deux de Toulouse.

696 12 forains habitent Toulouse, cinq, Ayguesvives, un, Cintegabelle, un, Baziège, un, Montbrun, un Bélbéraud. Les Toulousains sont de plus en plus nombreux, signe de départs de jeunes hommes de Montgiscard vers Toulouse ou d’investissements faits par les Toulousains ?

697 A.D.H.G., 1 G 805 f° 144 v°.

698 Diverses écritures pour 130 actes, essentiellement des lauzimes de vente. Certaines années, on a une dizaine d’actes puis plus rien pendant deux ou trois ans. Le premier notaire est Germain de Aurifolio, de Montesquieu.

699 Même chose en Auvergne, Foumier (G), Les origines..., op. cit., p. 11 et document 9.

700 A.D.H.G., E 1137 f° 3 v° et 4 r°.

701 A.D.H.G., E 1125, répertorié : « reconnaissances de 1490 de Montesquieu ».

702 A.D.H.G., E 1116. 111 pour Montesquieu, 12 pour Villenouvette.

703 Jusqu’au f° 50 v°. On trouve, ensuite, les reconnaissances concernant P. de Turre.

704 Il est seigneur, dans la ville, de plus de 10 ostals, quatre emplacements et deux bordes.

705 A.D.H.G., E 1116 f° 35 r°.

706 A.D.H.G., 3 E 1125 f° 22 r°.

707 A.D.H.G., 5 E 67 f° 15 r°

708 A.D.H.G., E 1116 f° 49. r°.

709 A.D.H.G., 5 E 67 f° 47 v°.

710 A.D.H.G., E 1116 f° 44 r°.

711 A.D.H.G, 5 E 67 f° 45 r°.

712 A.D.H.G., E 1116 f° 6 v°.

713 A.D.H.G., 5 E 67 f° 19 v°.

714 A.D.H.G., E 1125 f° 6 v°.

715 A.D.H.G., 5 E 67 f° 22 v°.

716 A.D.H.G., E 1116 f° 11 v°.

717 A.D.H.G., 5 E 67 f° 35 v°.

Table des illustrations

Titre L’occupation à l’intérieur des murailles :
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Fichier image/jpeg, 266k
Légende Note 1095119
URL http://books.openedition.org/pupvd/docannexe/image/2041/img-2.jpg
Fichier image/jpeg, 350k
Titre Superficie moyenne détenue par un déclarant, en hectares, fin xve siècle :
Légende Note 1117141
URL http://books.openedition.org/pupvd/docannexe/image/2041/img-3.jpg
Fichier image/jpeg, 178k
Titre Déclarants dépourvus de parcelles de terre agricole
URL http://books.openedition.org/pupvd/docannexe/image/2041/img-4.jpg
Fichier image/jpeg, 394k
Titre Superficie moyenne détenue par un propriétaire de terre mesurée, en hectares, fin xve siècle :
Légende Note 1123147
URL http://books.openedition.org/pupvd/docannexe/image/2041/img-5.jpg
Fichier image/jpeg, 178k
Titre Superfìcie moyenne détenue par un déclarant en hectares, début et mi-xve siècle :
URL http://books.openedition.org/pupvd/docannexe/image/2041/img-6.jpg
Fichier image/jpeg, 111k
Titre Déclarants dépourvus de parcelles de terre agricole, début et mi-xve siècle :
URL http://books.openedition.org/pupvd/docannexe/image/2041/img-7.jpg
Fichier image/jpeg, 270k
Titre Superficie moyenne détenue par un propriétaire de terre mesurée, en hectares, début et mi-xve siècle :
URL http://books.openedition.org/pupvd/docannexe/image/2041/img-8.jpg
Fichier image/jpeg, 109k
Titre Les tranches de propriété des résidants153, fin xve :
URL http://books.openedition.org/pupvd/docannexe/image/2041/img-9.jpg
Fichier image/jpeg, 386k
Titre Les tranches de propriété des résidants, début et mi-xve siècle :
Légende Note 1139163Note 1140164
URL http://books.openedition.org/pupvd/docannexe/image/2041/img-10.jpg
Fichier image/jpeg, 308k
Titre Nombre moyen de parcelles par propriétaire, à la fin du xve siècle :
URL http://books.openedition.org/pupvd/docannexe/image/2041/img-11.jpg
Fichier image/jpeg, 381k
Titre Nombre moyen de parcelles par propriétaire, au début et à la mi-xve siècle :
URL http://books.openedition.org/pupvd/docannexe/image/2041/img-12.jpg
Fichier image/jpeg, 246k
Titre Type de parcelles détenues par un propriétaire moyen176
URL http://books.openedition.org/pupvd/docannexe/image/2041/img-13.jpg
Fichier image/jpeg, 382k
URL http://books.openedition.org/pupvd/docannexe/image/2041/img-14.jpg
Fichier image/jpeg, 1,2M
Légende Note 1155179
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URL http://books.openedition.org/pupvd/docannexe/image/2041/img-16.jpg
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URL http://books.openedition.org/pupvd/docannexe/image/2041/img-17.jpg
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Fichier image/jpeg, 197k
URL http://books.openedition.org/pupvd/docannexe/image/2041/img-19.jpg
Fichier image/jpeg, 546k
URL http://books.openedition.org/pupvd/docannexe/image/2041/img-20.jpg
Fichier image/jpeg, 606k
Titre Le finage de l’ensemble des exploitations composées de parcelles dispersées, à la fin du xve siècle :
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Fichier image/jpeg, 501k
Titre Le finage de l’ensemble des exploitations composées de parcelles dispersées, début et mi-xve siècle :
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Fichier image/jpeg, 240k
Titre Nombre moyen de parcelles dans une propriété dispersée :
URL http://books.openedition.org/pupvd/docannexe/image/2041/img-23.jpg
Fichier image/jpeg, 284k
Titre Superficie moyenne des divers types de parcelles, en propriété dispersée, fin xve esiècle
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Fichier image/jpeg, 270k
Titre Superficie moyenne des divers types de parcelles, en propriété dispersée, début et mi- xve siècle
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Fichier image/jpeg, 622k
Titre Bilan par localité, d’après les estimes, à la fin du xve siècle (propriétés des résidants et des forains) :
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Fichier image/jpeg, 258k
Titre Répartition par tranches de superficie des propriétés centrées sur une ferme, à la fin du xve siècle :
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Fichier image/jpeg, 199k
URL http://books.openedition.org/pupvd/docannexe/image/2041/img-28.jpg
Fichier image/jpeg, 474k
URL http://books.openedition.org/pupvd/docannexe/image/2041/img-29.jpg
Fichier image/jpeg, 344k
URL http://books.openedition.org/pupvd/docannexe/image/2041/img-30.jpg
Fichier image/jpeg, 265k
URL http://books.openedition.org/pupvd/docannexe/image/2041/img-31.jpg
Fichier image/jpeg, 505k
URL http://books.openedition.org/pupvd/docannexe/image/2041/img-32.jpg
Fichier image/jpeg, 508k
Légende Note 1595619
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Fichier image/jpeg, 519k
URL http://books.openedition.org/pupvd/docannexe/image/2041/img-34.jpg
Fichier image/jpeg, 787k
Titre Types de redevances mentionnées dans les estimes de 1428 à Fendeille
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Fichier image/jpeg, 286k

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