En Languedoc au XIIIe siècle
|Béziers et les ambitions des princes
Mines et monnaies. Les sources du pouvoir dans le Languedoc occidental
Texte intégral
1La période qui va du milieu du Xe au milieu du XIVe siècle connaît, en Europe, un essor qui se marque dans la démographie, les échanges, le développement du phénomène urbain et par d’incontestables progrès dans les techniques tant agricoles qu’artisanales.
- 1 Bailly-Maître M.-Ch., 2002 ; Verna C., 1999, p. 31-39.
2Pour répondre aux besoins nouveaux, les minerais métalliques, comme le charbon sont activement recherchés et exploités1. L’argent occupe la première place car du VIIe siècle jusqu’à Philippe IV le Bel, le monnayage est essentiellement fondé sur des monnaies d’argent. Métal monétaire de référence, synonyme de richesse économique, les puissants se sont parfois violemment opposés pour s’assurer le contrôle des mines argentifères.
- 2 Debax H., 2003 ; Amado Cl., 2001
- 3 Guilbaut J.-E., Landes Ch., 1997, p. 75-81
- 4 Gourdiole R., 1983, p. 23-45.
- 5 Inventaire des mines antiques de l’Aveyron par Philippe Abraham.
- 6 Léchelon B., 1997, p. 167-183.
3Le Languedoc médiéval a connu une activité minière intense grâce à une géologie riche de gisements argentifères et des seigneuries importantes, solidement enracinées, qui exercent leurs regalia2. Les richesses minières du Languedoc sont exploitées très anciennement. Citons le gisement de cuivre des Barrencs à Fournes-Cabardes3, les exploitations de la Haute vallée de l’Orb4 ou encore les mines antiques de l’Aveyron5 comme Bouco Payrol6. Tous ces gisements sont à nouveau mis en chantier au Moyen Âge. Ceci s’explique par une volonté seigneuriale de s’attribuer les revenus des ressources minières pour le monnayage. Des familles apparaissent alors comme de véritables seigneurs miniers, comme les Trencavel ou encore les Anduze.
- 7 Debax H., 2003, p. 274-276
- 8 Debax H., Ibid, p. 278
4Un parallèle s’impose quant à la politique minière de ces deux familles, d’autant que si la vicomté de Nîmes appartient aux Trencavel du Xe à la fin du XIIe siècle, leur pouvoir se restreint à la ville, dont ils nomment l’évêque en alternance avec la famille d’Anduze7. Hors de la cité, la domination vicomtale est cantonnée par les terres des seigneurs d’Anduze et Sauve8. Or ces territoires sont aussi riches de gisements argentifères que ceux qui sont dans la main des Trencavel.
Les mines argentifères : un enjeu politique majeur pour les Trencavel
- 9 Debax H., Ibid., p. 296
5La particularité du territoire soumis aux vicomtes est d’être exceptionnellement riche en mines d’argent. Les grandes régions productrices sont l’Ambialet et le Ségala Rouergat, le revers sud-ouest de la Montagne Noire, où l’activité est attestée dans le Cabardès, à Carrus, à Cabaret, vers Aragon, l’extrême nord du diocèse de Béziers au contact de la viguerie de Camaret ; ce que l’on nomme le quadrilatère argentifère autour de Villemagne, Faugère et Boussagues, vers Cabrières, en Termenès autour de Palairac ; toutes régions où les Trancavel ont très tôt affirmé leur puissance, au titre du vicecomitatus, et où ils ont conservé le pouvoir tout au long du XIIe siècle, appuyé sur un réseau dense de châteaux. De ces régions minières sont aussi issus les grands lignages de l’aristocratie régionale comme les Cabaret, les Faugères, de Lunas, les Sauve-Anduze, les Termes9.
6Dans le Terménès, en pays de Razès, dans le quadrilatère argentifère autour de Villemagne, on extrait de l’argent ; en Ambialet du fer, mais on espère l’or, l’azur, l’argent et des pierres précieuses. À Jeannes, au sud d’Ambialet, le testament de Raimond Trencavel vers 1166, mentionne des mines d’argent. Les deux testaments de Roger II, en 1189 et 1194, donnent la liste des argentariis et mineriis d’où l’on pourra tirer des revenus pour effectuer les legs pieux institués : il s’agit de Boussagues, Villemagne, Brunaudo, Bruna, Buxo, Avène et Rhèdes.
- 10 Amado Cl., 2001, p. 117 et suivantes auxquelles est emprunté le paragraphe consacré aux textes de 1 (...)
- 11 Amado Cl., 1977, p. 125-144.
7Claudie Amado a bien montré les fondements des droits sur les mines argentifères, au titre des regalia, ainsi que leur imbrication avec ceux des barons, seigneurs du sol10. Au cours des XIIe et XIIIe siècles des actes, de natures différentes, jettent un éclairage ponctuel, partiel, sur l’attitude des Trencavel face à la richesse que constituent les mines argentifères. Plusieurs textes précisent les droits respectifs des maîtres du sol - les seigneurs châtelains - et du sous-sol - les vicomtes11. Contre les domini castrorum Raimond Trencavel, en 1164, et son fils Roger, en 1184 et 1191 réclament la seigneurie des mines. Dans les Corbières, pour le contrôle des profits tirés des mines, les vicomtes de Béziers, détenteurs des droits sur le sous-sol, s’opposent à leurs principaux vassaux, détenteurs des droits du sol, que sont les Niort, les Termes qui dominent le plus riche secteur minier du Razès, les Cabaret, les Clermont dans le comté de Béziers, etc. Ce sont ces barons qui les premiers d’ailleurs reprennent ou intensifient l’exploitation minière.
- 12 Bonami C., 1977, p. 93-105.
8Le 1er texte, est une concordia passée en 1164 entre les familles vicomtales de Béziers et de Narbonne, de façon à préserver les droits mutuels de Raimond Trencavel et Ermengarde de Narbonne, sur le quadrilatère argentifère entourant l’abbaye de Villemagne. Les témoins de la concordia sont, en majorité, des hommes de la cour vicomtale, originaires du Carcassès. Les chefs de familles de Boussagues, Faugères et Mourcairol, possédant la seigneurie du sol de plusieurs de ces mines, sont écartés. L’abbé de Villemagne a, aussi, des droits sur les gisements d’argent et métaux moins précieux de cette haute vallée de l’Orb. Le texte de 1164 délimite une surface précise, d’environ 200 km2. Le vocable dominatio définit le droit des vicomtes, droits du sous-sol ; solum exprime le droit du seigneur du lieu sur un gisement dont ils se partagent le revenu, le redditus. Chaque mine située dans une seigneurie locale, au sein du périmètre décrit, relève de plusieurs seigneurs : en parage, du vicomte de Béziers et de la vicomtesse de Narbonne, lesquels pendant 15 ans percevront ensemble (simul), au titre de la dominatio, la moitié du revenu, et du seigneur du sol (solum) qui recevra l’autre moitié. Exception faite de l’abbé de Villemagne, les seigneurs du sol ne touchent rien des emptiones et des venditiones, qui sont des prélèvements sur le métal-argent, ni des forscapia qui sont les mutations sur les mines elles-mêmes. Ces droits publics restent une prérogative princière, et sont répartis en trois parts égales entre Raimond Trencavel, Ermengarde de Narbonne et l’abbé. On sait qu’aux XIIIe et XIVe siècles, pour les mines de Ceilhes-et-Rocozels, situées à 20 km de Villemagne, un droit d’entrée de 2 sous, à l’occasion de chaque nouvel acapte et d’une redevance principale du 1/17e des produits extraits étaient dus au seigneur local12. Quel sens donner au terme redditus, au XIIe siècle ? Est-ce le minerai extrait, destiné aux ateliers monétaires de Narbonne et Béziers, ou s’agit-il du profit tiré de la vente du métal ? L’acte de 1164 envisage l’exploitation d’anciens filons, et la recherche de nouveaux (de argentariis et mineriis quae modo sunt et antea fuerunt inventa).
- 13 Debax H., 2003, p. 295
9En 1201, dans une mise en gage, Raimond Roger reconnaît une dette de 6000 sous melgoliens envers Salomon de Faugères et de 7000 sous envers un chapelain ; ceux-ci seront remboursés sur le revenu des mines, à raison de 2000 sous par an jusqu’à extinction de la dette. C’est donc là le minimum du revenu annuel espéré des mines de Villemagne et Boussagues sur lesquelles est assis le gage13.
- 14 Gensanne (de), 1776
- 15 Cette étude a été réalisée par Michel Salvaire
- 16 Prospections réalisées par le GEMA (Groupe d’Etude des Mines Anciennes).
10L’ingénieur de Gensanne, en 1776, décrit au Pradal des travaux souterrains considérables, exécutés avec grande intelligence, et qui se poursuivent sous le niveau de l’eau. Les chantiers sont ouverts à la base de la montagne, côté Villemagne et côté La Malou14. Le site du Pradal a fait l’objet d’un relevé, et d’une étude archéologique15 et les vieux travaux de La Malou ont été localisés16.
- 17 Amado Cl., 1977, p. 133.
11En juin 1184, un accord militaire est passé entre le nouveau vicomte de Béziers Roger II et un châtelain du sud du Lodévois, Aimeric de Clermont qui possède un droit sur le territoire de Cabrières. Partageant les dépenses militaires, les deux hommes s’associent pour exiger, de Imbert de Cabrières, le paiement des droits sur les mines de cuivre et argent du territoire compris dans la seigneurie de Cabrières dont les confins, qui délimitent une surface d’environ 500 km2 sont précisés17.
- 18 La mine de Palairac a fait l’objet d’une étude archéologique par Gauthier Langlois : Bailly-Maître (...)
12Un arbitrage, en 1191, fait suite au conflit entre le vicomte Roger II Trencavel et les seigneurs de Terme, dominus castri dont le territoire minier recouvrait celui de leur domination (castrum de Termes). Les mines sont concentrées autour des villages de Davejean, Maisons et Palairac. Fort de l’accord de 1164, Roger II revendique la moitié des revenus et de la seigneurie des mines du Terménès (moitié coutumière du seniorivus mineriorum). Il n’en obtient que le quart, mais aussi le contrôle sur les routes conduisant aux mines, alors que la justice sur les populations minières reste aux seigneurs de Terme. Le contrôle des routes signifie le libre accès pour les agents vicomtaux chargés de la surveillance des opérations minières. Pour exploiter, les coseigneurs de Termes, regroupés en une fraternité, étaient associés à des participes, maîtres de deux castra secondaires du Terménès : Palairac18 et Durfort.
- 19 Langlois G., 1999, p. 92-107.
13La famille de Termes est, par ailleurs, très impliquée dans l’activité des mines argentifères. Un conflit latent, durant une bonne partie du XIIIe siècle avec l’abbaye de Lagrasse, en est la preuve. L’abbaye considère que ses droits sur les mines ont été usurpés. Un accord intervient, en 1258, entre l’abbé et Olivier de Terme, partageant en deux les droits sur la seigneurie des mines, la moitié accordée au seigneur de Termes revenant à l’abbaye à la mort d’Olivier de Termes. Après 1263, ce dernier cède finalement tous ses droits à l’abbaye. Au XIVe siècle, les mines disparaissent de la documentation19.
14Lors de la croisade contre les Albigeois, Simon de Montfort, nouveau vicomte de Carcassonne, et Alain de Roucy, nouveau seigneur de Termes, reprennent à leur profit la politique minière de leurs prédécesseurs pour les mines du Razès, avant de restituer ses biens au seigneur de Termes, devenu un fidèle du roi de France.
- 20 Lechelon B., 1997, p. 167-183 ; DeVic (doM), Vaissette (DoM), 1847, t. IV, p. 518
- 21 Debax H., 2003, p. 295
15Le bilan peut être résumé de la façon suivante : le quart des profits de Villemagne en 1164 ; en 1166, Raimond Trencavel, à propos des mines de Paulin (Tarn) déclare : « Els meners d’el argent son toit nostre de Janes »20 ; la moitié des profits de Cabrières en 1184 ; le quart dans le Terménès (mines du Razès) en 1191 ; les trois quarts des revenus dans l’Ambialet et ¼ pour les alleutiers pour le fer après partage en 1193 ; et si des filons d’or ou d’argent étaient trouvés, le vicomte en possèderait la totalité21.
- 22 Léchelon B., 1998
16On retrouve les vicomtes engagés dans l’activité de la mine de Bouco Payrol. La mine est reprise au moins au milieu du XIIe siècle, au profit de l’abbaye de Sylvanès22. Le minerai est un cuivre gris sulfuré. Cinq textes du cartulaire de l’abbaye cistercienne de Sylvanès, échelonnés entre 1173 et 1311, font allusion aux mines. Le premier est un acte de cession, rédigé à Béziers, au nom de Roger II Trencavel, à l’adresse de Raimond, abbé de Sylvanès (Cart. de Sylvanès, acte n° 477). L’acte est rédigé à Béziers. L’abbaye se voit affranchie de tout droit, et placée sous la sauvegarde in perpetuum de Roger IITrencavel, vicomte de Béziers, pour divers biens, dont les bois, mines et carrières (…) petrarias sive lapidicirias, lauzarias, carrals et itinera, auri fodinas, argenti fodinas et quorumcumque metallorum mineralia (…). À la veille de la croisade contre les albigeois, l’abbaye a obtenu la libre disposition des richesses minérales de ses domaines, d’abord du vicomte, puis de Simon de Montfort. Le dernier acte, en 1311, est un contrat de paréage entre le roi de France, Philippe le Bel, et l’abbé de Sylvanès, qui établit la mise en commun des revenus des mines d’argent.
- 23 Bailly-Maître (M.-Ch., 2002, p. 150 et suiv.
17L’intervention du Capétien est révélatrice d’une politique menée de façon systématique par ce dernier, par le biais de ses baillis et sénéchaux pour grignoter les droits des seigneurs à son profit23. Trois exemples jettent un éclairage sur cette stratégie menée en Languedoc.
- 24 Bailly-Maître M.-Ch., 1996, p. 3-10 ; Bailly-Maître M.-Ch., 2010a
18Le premier concerne les mines de Largentière, en Vivarais. Deux chartes impériales, en 1146, et 1177, autorisent l’évêque de Viviers à battre monnaie. Les ambitions du comte de Toulouse sur le Vivarais sont anciennes, et les argentières constituent un point de friction central, tout au long du XIIe siècle24. Les archives conservent les actes d’un arbitrage, en 1193, puis du règlement d’un nouveau conflit en 1198, puis encore en 1210. La croisade change les bénéficiaires, mais pas la situation juridique des mines. Alors qu’en 1211, Raimond II Trencavel abandonne tous ses droits sur les mines de fer et argent à Simon de Montfort, au même moment, en 1215, Simon de Montfort reçoit, des mains de Bernon, évêque de Viviers, le château de Fanjau, et la moitié de tous les revenus de Largentière tombés en commise du fait du délit du Comte de Toulouse lors de la croisade. En 1218, Simon de Montfort restitue le château à l’évêque de Viviers, et à sa mort, le concile de Latran attribue à l’évêque l’intégralité du château de Fanjau et Largentière ainsi que les droits sur les mines, mais sous la souveraineté du roi de France.
- 25 Information Hélène Debax
- 26 Martin E., 1998
- 27 Martin E., ibid, acte 17, p. 22
- 28 Martin E., ibid, acte 30, p. 31
- 29 Martin E., ibid, acte n° 19, p. 24 in episcopatu vero Lodovensi argenti fodinas sive argentarias, u (...)
- 30 Martin E., ibid, acte 22, p. 26 minarias tocius episcopatus Lodovensis quecumque jam aperte vel pos (...)
- 31 Bonami Ch., 1997, p. 93-105
19Le cas du Lodévois est tout aussi significatif de la volonté royale d’intervenir dans cette activité lucrative, mais aussi stratégique25. Les Trencavel entourent le Lodévois vers le sud et vers l’ouest. Le “cartulaire de la ville de Lodève” montre que l’évêque contrôle les droits supérieurs sur toutes les mines d’argent, dès le XIIe siècle26. L’évêque bat monnaie, nomme un maître de la monnaie, en 112227 et un contrôleur de la monnaie, en 118928. En 115729, puis en 1160, élargi en 1162 à toutes les mines30, Louis VII concède à l’évêque de Lodève les droits régaliens, dont ceux qui concernent les mines31. Simple tentative du pouvoir royal d’intervenir, dans une région qu’il ne contrôle pas, mais qui montre l’intérêt porté aux mines d’argent.
- 32 Dossat Y., 1975, p. 81-93.
- 33 Correspondance administrative d’Alphonse de Poitiers, Documents inédits sur l’Histoire de France, é (...)
20La situation du minier d’Orzals (Aveyron) est particulièrement significative32. De 1262 à 1264, des tractations ont lieu entre Alphonse de Poitiers, le frère du roi et le sénéchal du Rouergue pour s’approprier des parts du minier d’Orzals, détenu par des bourgeois de Millau et de Saint-Affrique, mais aussi par le comte de Rodez qui s’estime lésé car le minerai alimentait son atelier monétaire. Une fois l’affaire faite, le nouveau propriétaire insiste, auprès des sénéchaux de Rodez, pour qu’ils tirent tout l’argent escompté de ces mines. Orzals est un des rares exemples de l’investissement direct du prince ; Alphonse de Poitiers, qui a hâte de voir construire des moulins pour broyer le minerai, écrit : "... en achetez enquores un ou deus pour noz deniers, au meilleur marché que vous pourroiz "33.
Les Anduze et les mines : l’exemple du district d’Hierle (XIe-XVe siècles)
21La puissante famille d’Anduze se pose, en face des Trencavel, dont elle gêne les ambitions. Là aussi, l’intérêt pour les minerais argentifères est patent.
- 34 P. GROLIER, 1955, p. 361
22Par mariage, la maison d’Anduze domine peu à peu une grande partie des Cévennes. Au début du XIIe siècle, ils ont la Terre d’Hierle, Sommières, Sauve, Anduze, les châteaux de Barre et Meyrueis, la moitié de la seigneurie d’Alès, celle de Portes, de la vallée Française, et des domaines importants en Vivarais34. Sur l’ensemble de ces terres, des mines d’argent sont exploitées. Lors d’un important partage, entre deux branches de la famille, en 1212, on observe que le découpage est fait de façon à attribuer à égalité des terroirs argentifères aux deux bénéficiaires, Pierre Bermond et Bernard VIII : mines de Portes, Alais, Anduze, Palmesalade, Sommières, ...
- 35 Programme du ministère de la Culture : " Le plomb ancien du Mont Lozère ", dirigé par A. Ploquin M. (...)
23On retrouve les Anduze en Gévaudan. Les premiers seigneurs de la baronnie de Florac sont issus de cette famille, remplacée, en 1268, par les Montlaur, par mariage d’Isabelle d’Anduze avec Pons de Montlaur. Or, c’est une période d’intense activité minière et métallurgique pour l’argent, comme l’atteste une recherche conduite sur le Mont Lozère35.
- 36 De Vic (Dom), Vaissette (Dom), 1847, T.V, p. 543
- 37 Mazon A., 1992, p. 1 -74
24En Ardèche, ils sont co-seigneurs des mines de Largentière, aux côtés de l’évêque de Viviers, d’Aymar de Poitiers, comte de Valentinois, et de seigneurs de moindre importance : Etienne de Tauriers, Hugues d’Ussel, Pons de Rochefort ou encore Guillaume de Balazuc. Face aux ambitions du comte de Toulouse sur les argentières, en 1198, ils négocient avec Raymond VI aux côtés de l’évêque et des autres co-seigneurs36. La transaction octroie la moitié des revenus au comte, l’autre moitié étant partagée en trois au profit d’Aymar de Poitiers, de l’évêque de Viviers et de Bermond d’Anduze. Ce dernier possède, également, des droits sur des mines qu’il a acquis auprès de Guillaume de Balazuc et de Hastefract, ainsi que sur d’autres mines, situées à Fumpa (lieu non identifié), qui n’entrent pas dans la transaction37. Après la croisade et restitution en 1218 à l’évêque de Viviers, du château de Fanjau et des droits sur les mines par Simon de Montfort, en 1229, Aymar de Poitiers-Valentinois cède tous ces doits sur les mines de Largentière à Bermond d’Anduze, son neveu, nouvel évêque de Viviers.
25Implantés dans les principales zones productrices de métal noble, les Sauve et Anduze ont, à n’en pas douter, accordé une attention particulière aux richesses qui se trouvaient dans leurs terres.
26Le district d’Hierle est exceptionnellement documenté, tant du point de vue historique - grâce à la « charte d’Hierle »- qu’archéologique - grâce à l’étude de plus de 70 sites conservés dans leur état d’abandon médiéval. Ce district minier permet d’aborder, à la fois les questions politiques et juridiques, et la pratique du métier de mineur.
- 38 Elzière J.-B.,1988, pp. 47-66.
27Au XIIIe siècle, la Terre d’Hierle est une seigneurie aux contours mal définis, qui correspondrait, approximativement, aux actuels cantons du Vigan, Alzon, Sumène, au contact des sénéchaussées de Beaucaire et Carcassonne et comprendrait 22 paroisses et 12 châteaux, d’après un recensement du milieu du XIVe siècle38. L’étude approfondie, menée sur le seul district minier sis autour du bourg de Saint-Laurent-le-Minier, montre l’importance de l’activité extractive qui s’y est déroulée. La famille de Sauve et Anduze est, semble-t-il, seule détentrice des mines du district d’Hierle. Pierre Bermont, accompagné de son frère, est l’unique interlocuteur des argentiers, lors de la signature de la charte de 1227.
La Charte et le code minier
- 39 Archives municipales de la ville de Nîmes versées aux Archives Départementales du Gard, côte SS17.
- 40 Bailly-Maître M.-CH., 2002, p. 177 et suiv. ; Bailly-Maître M.-Ch., 2010b
28Une charte est rédigée à Ganges, en février 1227, à la demande des argentiers39. Elle est concédée par Pierre-Bermond, seigneur de Sauve et d’Anduze. Ce document est unique en France, par sa date et son contenu40. Il se compose de trois éléments : un préambule, dans lequel les argentiers apparaissent comme un véritable groupe de pression ; six articles en latin, énonçant les libertés demandées par ceux-ci en ce début du XIIIe siècle, suivis des signataires de la charte ; le rappel de onze articles, en languedocien, "anciennement conservés dans les registres de la cours".
29L’accès à l’activité, les privilèges accordés aux mineurs, les droits du seigneur, sont autant d’éléments que l’on retrouve dans la charte d’Hierle et son annexe qui réglemente, en outre, les pratiques minières. Le texte languedocien pourrait remonter au début du XIIe siècle. Si cette première rédaction est la mise par écrit d’une codification orale antérieure, on peut imaginer une exploitation au moins au XIe siècle, ce que confirme l’archéologie.
30Les entrepreneurs souhaitent obtenir des garanties, face au pouvoir public, et avoir les mains libres pour étendre leur activité. La stricte tutelle seigneuriale, appliquée par les bayles, détaillée dans les anciennes coutumes, a provoqué des dérives et la réaction des argentiers.
31Le préambule : Conformément à la plupart des chartes, le préambule rappelle la magnanimité du seigneur, et le souci qu’il a du bien de ses sujets, en particulier les argentiers qu’il semble vouloir ménager. Pierre-Bermond fait allusion aux exactions de ses bayles, qui ont motivé les requêtes des exploitants.
32La charte de 1227 : Les six articles rédigés en latin concernent principalement les garanties des argentiers face au seigneur. Les libertés accordées relèvent des domaines financier, juridique, et d’exploitation.
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Avantages financiers avec l’exemption de toute taille, emprunt forcé, quête pour ceux qui exploitent ou font exploiter une mine d’argent (art. 1).
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Avantages judiciaires importants avec la possibilité de régler les différends relatifs à la mine par les argentiers eux-mêmes ou des prud’hommes, sans faire appel aux officiers de la cour (art. 3) ; s’y ajoute une garantie des personnes qui ne peuvent plus être saisies par le bayle moyennant une caution, sauf si le délit ne doit pas donner lieu au versement d’une caution (art. 5)
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La liberté d’entreprise est affirmée puisque chacun peut faire ce qu’il vaudra du produit de son travail, réserve faite du droit du seigneur, à savoir la vingtième partie (art. 4). Liberté d’entreprise, encore, que celle de pouvoir faire appel à des étrangers à la région pour travailler aux mines d’argent (art. 6). Les nouveaux arrivants bénéficieront des mêmes avantages que les argentiers déjà établis.
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La garantie des biens est assurée puisque ces derniers sont transmissibles aux héritiers légitimes même en l’absence de testament. Cette clause révèle les saisies arbitraires des officiers de la cour et atteste la pleine propriété des argentiers sur les mines (art. 2).
33Les franchises accordées par Pierre Bermond sont garanties par le frère dudit seigneur, Bernard Trancafers et par le bayle, Pierre de Lèque qui s’engagent par serment, à les respecter.
Les anciennes coutumes
34Les implications des anciennes coutumes sont plus étendues puisqu’on y trouve à la fois les éléments juridiques qui régissent les rapports entre le seigneur et les exploitants, et une sorte de règlement intérieur à l’exploitation, ébauche de manuel pratique. Le poids de l’autorité seigneuriale est très important. Le bailli ou la cour interviennent dans chacun des onze articles. Les pouvoirs du bailli sont de nature à engendrer des abus puisqu’il peut intervenir dans des délais très courts, le plus souvent 14 jours. Il est tout puissant pour :
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Disposer des chantiers en cas de non-paiement des redevances (art. 1, 3), en cas d’abandon du chantier (art. 10), en cas de non-travail d’une partie de la concession (art. 8) ;
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Réprimer très sévèrement les fraudes par la saisie corps et biens du coupable (art. 4) ;
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Veiller à la bonne marche des exploitations évitant le délaissement des travaux par les exploitants (art. 2, 4, 8, 10) ;
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Fixer les droits de tout nouveau chantier, de façon encore très empirique (art. 5) ;
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Faire valoir la priorité du seigneur dans l’achat du minerai produit, ce qui limite la liberté des exploitants de disposer de leur part. La pression seigneuriale s’exerce également dans le déroulement pratique des chantiers :
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Les chantiers doivent être travaillés sans interruption sous peine d’être déclarés vacants à l’église au bout de 14 jours ou un mois pour les nouvelles exploitations (art. 2, 4, 8).
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Les associés ont une responsabilité collective devant le seigneur en cas de non-paiement des taxes par l’un des exploitants (art. 7). Ce même article établit cependant une certaine garantie à ceux qui travaillent la mine en leur laissant un répit avant saisie.
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La prospection est soumise à un contrôle strict. Le prospecteur a le droit d’ouvrir 3 puits et les exploiter en même temps jusqu’à ce que l’un d’eux soit rentable (art.8).
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L’article suivant prévoit les conflits qui peuvent naître de la rencontre de deux chantiers sous terre (art.9). Cet aspect de la réglementation est très important car cela devait se produire très souvent.
35Les témoins de la charte sont au nombre de seize, l’un d’eux s’appelle "Ferrière" et deux autres ont un patronyme lié à un nom de lieu "Bausge" et "Bausger" où se trouvent les riches mines de Fontbouilhens. Un quatrième, enfin, porte le nom de "R. de Four", témoignant d’une activité métallurgique certaine.
36On ignore quelle quantité d’argent et de cuivre a été produite par ce district, il est donc difficile d’établir son importance localement et dans l’économie générale du pays.
Le district minier du point de vue de l’histoire des techniques
- 41 Braunstein Ph., 1993, p. 277-301.
37Des sites, a priori modestes, ont été exploités sur plusieurs siècles et ont bénéficié d’une réelle organisation, à l’instar des districts de la Renaissance, ainsi que d’une réglementation comparable à celle des grands centres médiévaux européens : Trento et Massa Marittima en Italie, Iglau (Jilhava en Rep. Tchèque), Falset/Priorat en Catalogne, etc41.
- 42 Estimation a minima, il s’agit uniquement des portions de réseaux reconnues et topographiées.
38Près de 70 sites, conservés dans leur état d’abandon médiéval, représentant une dizaine de kilomètres de galeries et chantiers d’abattage, ont été étudiés42. Les datations obtenues par 14C sur des boisages en place et par le mobilier archéologique situent l’exploitation entre le XIe et le début du XVe siècle, avec une plus forte concentration sur les XIIe-XIVe siècles. Le bourg de Saint-Laurent-le-Minier, sanctus laurentius de meneria en 1320, est le cœur de l’entreprise. Tous les sites se trouvent à moins de 1 km du centre du bourg.
39La géologie de ce secteur des Cévennes le rendait particulièrement attractif car on y trouve deux types de minéralisations très recherchées à cette époque : un cuivre gris riche en argent, et la calamine, un silicate hydraté naturel de zinc.
- 43 Thomas N., Les ateliers urbains de travail du cuivre et de ses alliages au Moyen Âge. Archéologie e (...)
- 44 A.D.Gard, série E1288, seigneurie de Montdardier, titres (Ginestoux).
40Les sites médiévaux livrent en masse des objets en alliages à base cuivre comme le laiton ou le « bronze »43. Leur fabrication nécessite des quantités importantes de calamine. La place des gisements cévenols, pour ce marché immense, a probablement été sous-estimée. Le « minier de Bonaventure », signalé dans les textes en 1345 et 1495, concentre un ensemble exceptionnel de travaux sur un gisement de calamine dont l’étude vient de débuter44. Quant au cuivre gris, sa richesse en argent le rend précieux, et le district d’Hierle montre que les métallurgistes savaient, dès les XIIIe-XIVe siècles, traiter ce minerai.
- 45 L’étude de la gîtologie a été réalisée par Bruno Ancel, archéologue de collectivité à L’Argentière- (...)
41L’étude archéologique des chantiers miniers atteste qu’ils ont été travaillés par des professionnels de la mine. Le grand nombre de galeries de recherche témoigne d’une recherche systématique des indices minéralisés car les filons n’affleurent pas et la gîtologie est complexe45.
- 46 Bailly-Maître M.-Ch., 1999, p. 225-233.
- 47 L’identification des céramiques a été faite par Marie Leenhardt et Lucie Vallauri du LAMM. Voir Lee (...)
42Le minerai était abattu par percussion dans les roches friables comme le schiste et par le feu dans les roches dures, comme les grès ; les formes arrondies des chantiers attestent de ce mode opératoire. Les chantiers étaient desservis par des galeries de circulation ou travers-bancs perpendiculaires aux axes filoniens et par des puits équipés de treuils46. Les puits compartimentés, possédaient un espace avec échelle pour les hommes, et une partie cuvelée, pour les cuveaux chargés de minerai. Une manivelle en fer a été retrouvée sur une margelle, ainsi que deux cruches d’Uzès (début du XIIIe siècle)47. Les puits servaient également à l’aération des chantiers et ils participaient à la prospection, en testant la présence ou la puissance d’un filon (art.5 du code minier). L’exhaure des eaux souterraines était une priorité. Les exploitants ont creusé des rigoles dans les travers-bancs et le long des parois des puits. Le transport des stériles était coûteux en main d‘œuvre, aussi la plus grande partie était soigneusement stockée sous terre. Seule une petite partie était ressortie et formait les haldes, nom donné aux tas de stériles. Des lampes à suif, simples coupelles en fer posées dans des niches, assuraient l’éclairage.
- 48 Bailly-Maître M.-Ch., 2003, p. 97-112.
- 49 Bailly-Maître M.-Ch., 2000, p. 131-143.
43Trois carreaux miniers ont été fouillés, au débouché des principaux axes de communication avec la surface, dont deux conservaient des aménagements remarquables. Le premier possédait une petite forge d’appoint pour les outils ; le second était un très beau bâtiment, abritant un atelier d’essai du cuivre argentifère par « emplombage »48. La pratique de l’essai était déjà courante au Moyen Âge49.
Argentières et monnayage
- 50 Baron, S., Traçabilité et évolution d’une pollution métallurgique médiévale de plomb argentifère su (...)
- 51 Les monnaies produites par l’atelier monétaire de Melle (Deux-Sèvres) utilisaient exclusivement le (...)
- 52 Baron S., Mahé-Le-Carlier C., Ploquin A., 2010
44La relation entre mines argentifères et monnayage est difficile à établir de façon rigoureuse, mais le chercheur a à sa disposition un certain nombre d’outils qui lui permettent de cerner au plus près la question. L’archéométrie apporte sa contribution : l’argent étant le plus souvent associé au plomb, la composition isotopique du plomb constitue une signature caractéristique des gisements d’origine qui suit le minerai tout au long de la chaîne opératoire jusqu’à la séparation de l’argent du plomb, séparation qui n’est jamais totale. On peut retrouver, en théorie, la filiation entre minerai et objet fabriqué50. Il faut, cependant, rester prudent. Les monnaies sont le résultat de refontes fréquentes, mélangeant les métaux à de multiples reprises. Il faudrait, par ailleurs, connaître la composition isotopique de tous les gisements potentiels, ce qui est tout à fait impossible. Pour autant, cette approche peut donner d’excellents résultats dans certaines conditions51. Les analyses isotopiques réalisées sur les scories des fours de réduction du plomb argentifère XIe-XIIe siècles du Mont Lozère ont permis de sérier les zones d’approvisionnement en minerai et de montrer que les gisements les plus proches des aires de métallurgie n’étaient pas ceux qui avaient été choisis par les métallurgistes52.
- 53 Voir les ouvrage de Claudie Amado et Hélène Debax.
- 54 Dhénin M., 1976, p. 189-199 ; Dhénin M., 1982, p. 47-48
45Que nous apprennent les textes53. Les Trencavel ont frappé monnaie, mais leur monnayage n’eut qu’une place secondaire dans la circulation des monnaies dites féodales face au denier melgorien. Les vicomtes contrôlèrent cependant, en totalité ou en partie, trois ateliers à Albi, Béziers et Carcassonne. Si les deniers albigeois et biterrois semblent s’être cantonnés à une circulation locale, il en va autrement des monnaies de Carcassonne. Les vicomtes Trencavel frappèrent des deniers à Carcassonne, de Bernard Aton IV à la Croisade. H. Debax écrit : « Même si aucune monnaie Trencavel n’atteignit jamais la réussite des deniers melgoriens, leurs émissions irriguèrent les échanges intra-régionaux. Ils pouvaient ainsi convertir immédiatement la production des mines d’argent dont ils détenaient une part non négligeable dans plusieurs de leurs vicomtés. Ce contrôle d’un des regalia les plus symboliques leur permit certainement aussi de s’affirmer parmi les grands princes du Languedoc, avant que la Croisade ne vienne bouleverser les équilibres. ». L’archéologie apporte peu d’informations sur ce monnayage. Cependant, trois trésors monétaires ont été découverts anciennement. Ils ont fait l’objet de deux articles54 et comme le montre l’étude numismatique des 9 deniers et oboles trouvés en 1923 dans la cour du château de Carcassonne, ces monnaies sont attribuables à Raimond-Roger Trencavel (1194-1209), le dernier vicomte à frapper monnaie.
- 55 Gallia christiana, t. 6, p. 144.
46Un atelier monétaire aurait fonctionné à Villemagne. La Gallia christiana mentionne des monnaies des comtes de Rodez frappées en partie avec l’argent de Villemagne, d’où les protestations de ce dernier contre l’intrusion d’Alphonse de Poitiers55. J. Fournier, dans des notes manuscrites, indique que l’on commence à battre monnaie à Villemagne pour le compte des seigneurs de Narbonne et Béziers, en 1180 et 1200. Une charte, de 1197, citée par J. Renouvier, dans son Histoire de Villemagne, mentionnerait la monétairerie de Villemagne, mais cela reste à vérifiée.
- 56 Bailly-Maître M.-Ch., 2002, p. 145 et suiv.
- 57 De vicq (Dom), Vaissette (Dom), 1847
47Rien ne permet d’estimer les quantités de minerais ou métaux produites. Quelques données, éparses, rassemblées et interprétées, jettent un éclairage ponctuel56. La production du minier d’Orzals semble importante. On la saisit à travers les livraisons effectuées au Temple, à Paris, au cours des années 1267 et 1268. De la Chandeleur 1267 inclue à la Chandeleur 1268 exclue, les livraisons se montent à 1184 marcs soit, à 244,75 g le marc de Troyes, environ 290 kg. On peut penser qu’il s’agit là de la part d’Alphonse de Poitiers. Or ce dernier possède le tiers de la mine, en vertu des transactions passées en 1265 avec le comte de Rodez et en 1266 avec Bertrand Ferrier, bourgeois de Millau. Le minier d’Orzals aurait produit, en une année, 870 kg d’argent. Si l’on compare avec les mines nouvellement mises en chantier en Gévaudan, dans la juridiction d’Ispagnac, les comptes de la sénéchaussée de Beaucaire mentionnent, pour 1394, qu’on en aurait tiré, du 22 septembre 1390 au 15 juillet de 1394, 5 à 600 quintaux d’argent non affiné et 9 marcs 1 once d’argent pur ou affiné57.
- 58 Combes J., 1977, p. 145-155
48Les Anduze frappèrent monnaie à Sommières - les bernardines - jusqu’à ce que Louis IX les remplacent par le tournois, au milieu du XIIIe siècle. Quelle a été l’importance de la production du district d’Hierle dans ce monnayage ? D’autres sources, plus tardives, traitent de la Monnaie de Montpellier58. En 1447, Jacques Cœur, Grand Argentier, en vertu d’une convention particulière avec le roi a en charge la monnaie de Montpellier et son approvisionnement en matière première. C’est le minier d’Aumessas qui semble jouer le rôle principal, or ce minier se trouve à quelques kilomètres du district d’Hierle.
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Notes
1 Bailly-Maître M.-Ch., 2002 ; Verna C., 1999, p. 31-39.
2 Debax H., 2003 ; Amado Cl., 2001
3 Guilbaut J.-E., Landes Ch., 1997, p. 75-81
4 Gourdiole R., 1983, p. 23-45.
5 Inventaire des mines antiques de l’Aveyron par Philippe Abraham.
6 Léchelon B., 1997, p. 167-183.
7 Debax H., 2003, p. 274-276
8 Debax H., Ibid, p. 278
9 Debax H., Ibid., p. 296
10 Amado Cl., 2001, p. 117 et suivantes auxquelles est emprunté le paragraphe consacré aux textes de 1164, 1184 et 1191
11 Amado Cl., 1977, p. 125-144.
12 Bonami C., 1977, p. 93-105.
13 Debax H., 2003, p. 295
14 Gensanne (de), 1776
15 Cette étude a été réalisée par Michel Salvaire
16 Prospections réalisées par le GEMA (Groupe d’Etude des Mines Anciennes).
17 Amado Cl., 1977, p. 133.
18 La mine de Palairac a fait l’objet d’une étude archéologique par Gauthier Langlois : Bailly-Maître M.-Ch., Gardel M.-E., (dir), 2007, p. 60 et suiv.
19 Langlois G., 1999, p. 92-107.
20 Lechelon B., 1997, p. 167-183 ; DeVic (doM), Vaissette (DoM), 1847, t. IV, p. 518
21 Debax H., 2003, p. 295
22 Léchelon B., 1998
23 Bailly-Maître (M.-Ch., 2002, p. 150 et suiv.
24 Bailly-Maître M.-Ch., 1996, p. 3-10 ; Bailly-Maître M.-Ch., 2010a
25 Information Hélène Debax
26 Martin E., 1998
27 Martin E., ibid, acte 17, p. 22
28 Martin E., ibid, acte 30, p. 31
29 Martin E., ibid, acte n° 19, p. 24 in episcopatu vero Lodovensi argenti fodinas sive argentarias, ubicumque aperiantur et in Lodova, Payguerolis, Salasc plenarium districtum
30 Martin E., ibid, acte 22, p. 26 minarias tocius episcopatus Lodovensis quecumque jam aperte vel postmodum aperiende sunt que regii muneris esse dignoscuntur
31 Bonami Ch., 1997, p. 93-105
32 Dossat Y., 1975, p. 81-93.
33 Correspondance administrative d’Alphonse de Poitiers, Documents inédits sur l’Histoire de France, éd. Paris, t. 1, 1894, t. 2, 1900 ; Enquêtes administratives d’Alphonse de Poitiers. Arrêts de son parlement tenu à Toulouse et textes annexes (1249-1271), Documents inédits sur l’Histoire de France, Paris, 1959.
34 P. GROLIER, 1955, p. 361
35 Programme du ministère de la Culture : " Le plomb ancien du Mont Lozère ", dirigé par A. Ploquin M.-Ch. Bailly-Maître et Ph. Allée. Ploquin A., Bailly-Maître M.- Ch., Allée Ph., 2010
36 De Vic (Dom), Vaissette (Dom), 1847, T.V, p. 543
37 Mazon A., 1992, p. 1 -74
38 Elzière J.-B.,1988, pp. 47-66.
39 Archives municipales de la ville de Nîmes versées aux Archives Départementales du Gard, côte SS17.
40 Bailly-Maître M.-CH., 2002, p. 177 et suiv. ; Bailly-Maître M.-Ch., 2010b
41 Braunstein Ph., 1993, p. 277-301.
42 Estimation a minima, il s’agit uniquement des portions de réseaux reconnues et topographiées.
43 Thomas N., Les ateliers urbains de travail du cuivre et de ses alliages au Moyen Âge. Archéologie et histoire d’un site parisien du XIVe siècle, dans la Villeneuve du Temple (1325- 1350), Paris 1, Thèse soutenue en octobre 2009.
44 A.D.Gard, série E1288, seigneurie de Montdardier, titres (Ginestoux).
45 L’étude de la gîtologie a été réalisée par Bruno Ancel, archéologue de collectivité à L’Argentière-La Bessée (Htes-Alpes) à partir du réseau Petra Alba 4, long de 3,5 km.
46 Bailly-Maître M.-Ch., 1999, p. 225-233.
47 L’identification des céramiques a été faite par Marie Leenhardt et Lucie Vallauri du LAMM. Voir Leenhardt M., 1995, p. 32.
48 Bailly-Maître M.-Ch., 2003, p. 97-112.
49 Bailly-Maître M.-Ch., 2000, p. 131-143.
50 Baron, S., Traçabilité et évolution d’une pollution métallurgique médiévale de plomb argentifère sur le Mont Lozère, Thèse de Doctorat, Université de Montpellier II, 2005, 232 p.
51 Les monnaies produites par l’atelier monétaire de Melle (Deux-Sèvres) utilisaient exclusivement le minerai des mines de Melle, aux IXe et Xe siècles. Il s’agissait d’un atelier impérial, implanté sur les mines, dont les monnaies ont peu évolué et peu circulé ; voir Hoelzl S., Asberg G., Hedges R., Horn P., Hull B., Rummel S., Tereygéol Fl., 2007, p. 264-277.
52 Baron S., Mahé-Le-Carlier C., Ploquin A., 2010
53 Voir les ouvrage de Claudie Amado et Hélène Debax.
54 Dhénin M., 1976, p. 189-199 ; Dhénin M., 1982, p. 47-48
55 Gallia christiana, t. 6, p. 144.
56 Bailly-Maître M.-Ch., 2002, p. 145 et suiv.
57 De vicq (Dom), Vaissette (Dom), 1847
58 Combes J., 1977, p. 145-155
© Presses universitaires de Perpignan, 2010