Smartness
p. 344
Texte intégral
1Ce concept teinté de positivisme technologique est déjà en voie d’être passé de mode. Appliqué notamment à la ville, « smart city », et développé par IBM au mitan des années 1990, il postule qu’une ville n’est « intelligente » que si son mode de gouvernance est épaulé par des technologies numériques proposées par des acteurs de l’informatique et de l’équipement (IBM, Siemens, Cisco, General Electrics, etc.). À l’inverse, toute ville n’embrassant pas le futur numérisé qui s’offre à elle est donc sous-entendue comme dumb, « stupide ». Tandis que les villes s’auto-désignant comme smart se multiplient, celles se qualifiant de dumb restent beaucoup plus rare. Une opposition qui n’est pas sans rappeler la chanson de Serge Gainsbourg : « Qui est in, qui est out. » C’est dans ce tourniquet que se cachent les angles morts de la smartness.
2Dans un contexte de privatisation poussée du milieu universitaire, notamment britannique et nord-américain, on regrettera également l’immense succès du « concept » de smart city, allègrement financé par ces mêmes entreprises cherchant à vendre la smart city. C’est dans la critique de cet idéal « auto-réalisateur » qu’on trouve les travaux les plus intéressants, et dans la dissection des mythes technocratiques, de genre, postcoloniaux entre autres, qu’il incarne. (Voir Mandat de smartness)
Bibliographie
Références
Datta, A. (2019). « Postcolonial Urban Futures : Imagining and Governing India’s Smart Urban Age », Environment and Planning D : Society and Space, 37 (3).
Greenfield, A. (2013). Against the Smart City. Do projects.
Günel, G. (2019). Spaceship in the Desert. Energy, Climate Change, and Urban Design in Abu Dhabi. Duke University Press.
Mattern, S. (2021). A City Is Not a Computer : Other Urban Intelligences. Princeton University Press.
Picon, A. (2014). Smart cities : théorie et critique d’un idéal auto-réalisateur. B2.
Auteur
Sociologue, doctorant et enseignant à University College London. Journaliste, critique, éditeur, il écrit pour The Guardian, The Architectural Review et a créé Migrant Journal. Il a participé à la Biennale d’Architecture de Venise 2021 avec le projet « Welcome to Borderland ».
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