Implant
p. 238
Texte intégral
1L’insertion et l’implantation de capteurs/mouchards à l’intérieur du corps humain sont l’une des terres promises de la médecine numérique à venir (après la mise en visibilité de parties internes de notre corps par pénétration de rayons en IRM). On parle désormais d’Internet of bodies pour désigner les multiples façons dont des implants sous-cutanés seront mis directement en dialogue avec des plateformes chargées de la surveillance et du maintien de nos fonctions vitales, grâce à un suivi permanent en temps réel.
2Dans son intervention durant le colloque de Cerisy, en septembre 2020, Philippe Aubert a expliqué pourquoi il n’envisageait pas de recourir à des implants. Malgré les difficultés que lui cause son état d’invalide moteur cérébral athétosique – un état qui le force à passer par un appareillage numérique complexe pour exprimer ses pensées en épelant du regard chaque lettre des mots qu’il veut signifier – il ne souhaite pas « augmenter » son corps par des interventions sous-cutanées, car cela menacerait « la distance » qu’il juge indispensable à nous permettre de « penser par soi-même ».
3Cette prise de position fait surgir un angle mort dans la façon dont nous envisageons les rapports que nos corps entretiennent avec les machines dont nous nous servons – et dont nous serons invité·es à accueillir les invasions croissantes à l’ère de l’Internet of bodies. La distance revendiquée par Philipe Aubert trace une frontière ferme entre les augmentations numériques qui restent au service de notre pensée, et celles dont la pénétration risque d’empiéter sur celle-ci.
Bibliographie
Références
Aubert, P., Jacolin, S. (2018). Rage d’exister. Ateliers Henry Dougier.
Matwyshyn, A.M. (2019). « The Internet Of Bodies », William & Mary Law Review, 61 (077).
Auteur
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