Embrayeur de violence

Olivier Bosson

p. 150


Texte intégral

1Jeanne Favret-Saada qualifie d’« embrayeur de violence » dans son livre Désorceler un procédé utilisé par une sorcière, Madame Flora, pour délivrer une personne victime d’un sort. L’embrayeur de violence va permettre à cette personne d’avoir recours sans s’en rendre compte à une forme de violence à l’égard d’autrui. La délivrance consiste à faire le mal à son insu.

2Un procédé similaire est souvent mis en œuvre au début des conflits militaires : on montre l’ennemi pratiquant des actions immorales, voire inhumaines, ce qui légitime le droit d’engager le combat contre lui (comme dans l’Affaire des couveuses koweïtiennes ou le Protocole des sages de Sion). Moins on reconnaît l’humanité de quelqu’un·e, plus il devient moralement possible de se montrer violent·e à son égard.

3Par les deux éloignements qu’il institue – le lointain de la réduction numérique de l’être à des données et le lointain de la distance physique – le numérique ubiquitaire contribue à la baisse tendancielle de la valeur de la vie humaine et à la montée concomitante d’une violence exercée sans le savoir. En ce sens, le numérique en tant que tel est porteur d’un angle de mort. Merci de laisser votre humanité au vestiaire.

Bibliographie

Référence

Favret-Saada, J. (2009). Désorceler. L’Olivier.


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