Présentation

1Il y a quelque ironie à lire des travaux sur l’interdisciplinarité de la part de jeunes doctorants formés à la théorie analytique du droit tant cette dernière est – à tort bien évidemment – soupçonnée d’exclusive. Il n’est en effet pas rare qu’on lui reproche, gentiment, son refus de tout syncrétisme. Et pourtant, la théorie analytique du droit pratique volontiers l’interdisciplinarité si l’on veut bien admettre, par ce mot, une articulation de savoirs, visant au renouvellement des problématiques, dans laquelle chaque discipline tente de dialoguer avec les autres en conservant ses méthodes et son appareil critique. Ainsi, l’analyse conceptuelle, qui caractérise si bien la théorie analytique, est-elle un élément constitutif et nécessaire de cette articulation car nos mots ne sont bien souvent que des voiles qui nous dissimulent bien des choses. S’entendre sur les concepts des uns et des autres, ce n’est au fond rien d’autre que de savoir et décider la langue que l’on se mettra à parler.

2En l’espèce, le problème essentiel qui fut soulevé était celui – ô combien délicat – de l’usage de l’interdisciplinarité dans le discours juridique dont on sait qu’il peut être descriptif mais aussi normatif. Avoir attiré l’attention sur la variété des usages n’est pas le moindre des mérites de ces travaux car il fallait en effet s’attacher tant à la méthode et à la constitution de l’appareil conceptuel de la science juridique et des diverses façons de la concevoir, qu’à la pratique même de l’interdisciplinarité et aux ambiguïtés que cette pratique peut recéler, notamment lorsqu’elle est mise au service d’un discours juridique normatif qui, répétons-le au risque d’agacer les partisans d’un essentialisme même « soft », se nourrit de tout grain qu’il trouve à moudre.

3Un mot encore. Nul n’ignore combien la liberté et l’indépendance d’esprit constituent les deux éléments – aliments ? – nécessaires à tout chercheur. J’ose croire que les textes consacrés au thème de l’interdisciplinarité le démontrent pleinement. Ces journées furent organisées par le groupe de doctorants du CTAD et elles ont été pensées par eux. La part insigne que prit le directeur du laboratoire à ce projet, nul ne le sait. Et le résultat est à la mesure de leurs espérances. Un autre ouvrage est déjà en préparation, qui rendra compte d’autres travaux relatifs à la Tradition. C’est dire si cette jeune équipe a des idées et des initiatives et rien ne peut être plus réjouissant et satisfaisant pour ceux qui les accompagnent que de partager leurs projets et de les voir se réaliser.