Les pilae du port romain de Fossae Marianae
(Fos-sur-Mer, Bouches-du-Rhône). Un cas particulier
The pilae of the Roman port of Fossae Marianae: a special case
p. 229-244
Résumés
Découverte en 2014, la structure B, longue d’une centaine de mètres, émerge aujourd’hui du fond marin par 3 à 4 mètres de profondeur au centre de l’anse Saint-Gervais à Fos-sur-Mer. Elle s’inscrit dans un ensemble d’édifices appartenant au complexe monumental du port romain de Fossae Marianae situé à l’extrémité orientale du delta du Rhône et qui, en tant qu’avant-port maritime d’Arles, a constitué durant toute la période impériale l’une des principales portes d’accès aux provinces du nord-ouest de l’empire via l’axe rhodanien. La morphologie de la structure B, une succession de 12 piliers, et son positionnement - son extrémité méridionale s’avance vers la seule zone que nous savons être assurément en eau dans l’antiquité – permettent de l’assimiler aux structures portuaires romaines regroupées sous le terme de pilae. Elle se distingue néanmoins de la plupart d’entre elles par son mode de construction, en pierres de taille et non en opus caementicium.
Structure B, some 100 metres in length, was discovered in 2014 and currently emerges from the seabed at a depth of 3 to 4 metres in the centre of the Anse Saint-Gervais at Fos-sur-Mer. It is part of an ensemble of constructions belonging to the major Roman port complex of Fossae Marianae situated on the eastern edge of the Rhone Delta and which, as the forward seaport of Arles, represented one of the main entrances to the north-west provinces of the Empire via the Rhone throughout the entire Imperial Period. The morphology of Structure B – a succession of 12 piles – and its position – its southern extremity reaching into the only zone that we know with certainty was under water in antiquity – mean that it can be associated with a type of Roman port structure referred to by the term pilae. Nevertheless, it is different from the majority of them because of its construction method involving blocks of cut stone and not opus caementicium.
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Mots-clés : pilae, Fossae Marianae, archéologie portuaire, jetée sur arches, aménagements portuaires, port romain
Keywords : pilae, Fossae Marianae, port archaeology, arched jetty, port developments, Roman port
Texte intégral
1. Environnement archéologique : le port des Fossae Marianae (fig. 1)
Fig. 1 - Carte des vestiges du port de Fossae Marianae aujourd’hui recensés

SIG PCR Fossae Marianae.
1Mentionnés dès le XVIe siècle comme des ruines submergées dans le fond du golfe de Fos, les vestiges du port implanté au débouché du canal creusé par le consul C. Marius vers 102 av. J.-C. ont fait l’objet de recherches archéologiques sous-marines à partir des années 1950 mais nos connaissances sur la topographie, la chronologie et la configuration environnementale des structures, de leur construction à leur abandon et à leur submersion demeurent encore très lacunaires1.
2La reprise des recherches sur Fossae Marianae, incluant le système portuaire du golfe de Fos et le canal de Marius, mise en œuvre depuis 20142, a entre autres permis de dresser une carte des vestiges visibles sur le fond marin. Outre la compilation des relevés existants, la prospection acoustique conduite en 2014 et 20153 a révélé la présence d’un complexe monumental composé de plusieurs structures de grandes dimensions, conservées en place sur plusieurs hectares au centre de la baie (fig. 2 et 3). Ces découvertes ont réamorcé les problématiques géo-archéologiques posées par la submersion du complexe portuaire de Fos qui ne peut être imputable à la seule montée du niveau marin habituellement : observée à l’échelle régionale, elle n’excède pas 0,5 à 0,7 m et s’apparente plus nettement aux ordres de grandeur des submersions des vestiges romains des ports bordant les Champs Phlégréens (Pouzzoles, Baia, Portus Iulius, Misène). L’un des premiers objectifs de l’étude de ces structures est donc de déterminer s’il s’agit d’ouvrages bâtis en eau dès l’origine ou bâtis à terre et aujourd’hui submergés. Cette caractérisation archéologique, confrontée aux données géomorphologiques, est indispensable tant pour la détermination de la fonction des infrastructures que pour la compréhension de l’ensemble du site portuaire dont la configuration nous échappe encore.
Fig. 2 - Complexe monumental du centre de l’anse Saint-Gervais

Sonogramme avec mise en exergue des éléments architecturaux lisibles sur la cartographie acoustique.
Imagerie acoustique, D. Dégez, Drassm ; CAO, A. Domzalsky, AMU-MoMArch et S. Fontaine, Drassm.
Fig. 3 - Planimétrie par orthoimage de l’ensemble des 12 piliers conservés de la structure B

Acquisition L. Damelet, traitement L. Borel CNRS-CCJ.
3Le pourtour de l’anse actuelle, plage Saint-Gervais et plage du Cavaou, est bordé de structures que l’on sait être bâties à terre, pour certaines dans un milieu humide. Les structures de la plage du Cavaou, interprétées par les auteurs de la fouille des années 1980 comme des navalia font l’objet d’une reprise documentaire dans ce volume (ci-après Carre, Baika). À l’ouest de la baie, en pleine eau, un gisement de stèles et d’autels funéraires datables des IIe–IIIe s. apr. J.-C. a également fait l’objet d’une reprise récente, sans que l’on puisse clairement déterminer s’il s’agit d’une nécropole submergée (Marty, Courrier, Fontaine 2019). Au centre de l’anse, plusieurs ensembles, constitués d’amoncellements de pierres de taille dont l’organisation demeure assez floue, sont encore de lecture difficile (structures C, D et H) mais les deux structures les mieux conservées (structures A et B) ont fait l’objet de plusieurs courtes campagnes de documentation et de sondages. La structure A, encore en cours d’étude, se présente comme un vaste quadrilatère d’environ un hectare dont seuls les murs périmétraux sont aujourd’hui lisibles. Si son plan d’ensemble laisse penser à une structure homogène, le mode de construction du mur nord (succession de massifs de moellons liés au mortier) diffère radicalement des autres faces du quadrilatère bâties en grand appareil, avec des pierres de taille de très grandes dimensions, certains témoignant d’une façade animée (pilastres, encorbellement, etc.). Les récentes investigations sur le mur nord, aujourd’hui situé par 2 à 3 mètres de profondeur sous les eaux du golfe, montrent qu’il s’agit très vraisemblablement d’un édifice bâti à terre, dans un environnement humide, dans le courant du IIe s. apr. J.-C.
4En l’état de nos connaissances, l’organisation de l’espace portuaire, la localisation des espaces en eau, la présence de bassins aménagés ne sont pas encore établies et la structure B, en raison de sa configuration particulière, est parmi les structures identifiées l’élément le plus clairement assimilable à un édifice portuaire.
2. Description de la structure B
5La structure B est une structure linéaire, orientée Nord-Sud, constituée de 12 piliers en grand appareil et conservée sur près de 100 mètres de long. Située 60 m à l’est de la structure A et à environ 380 m de la plage actuelle, la structure B est l’édifice le plus au large du complexe monumental de Saint-Gervais. Son extrémité nord, le pilier PL 12, se perd dans l’épandage de blocs et de moellons qui constituent le Secteur D, un probable édifice ou ensemble d’édifices effondrés dont le plan est illisible (fig. 1 et 2). À l’opposé, le dernier pilier visible qui marque l’extrémité sud de la structure B, vers le large, est environné de sable et se situe à moins d’une centaine de mètres du groupe d’épaves antiques SG 1 et SG 34.
6Sans doute en raison de la turbidité importante des eaux du golfe, les prospections menées dans les années 1980 par l’équipe de J.-M. Gassend n’avaient permis d’identifier qu’une portion de cette structure, soit deux à trois piliers, ceux où les blocs sont les plus nombreux et dont l’épandage ne forme presque qu’un seul amoncellement. L’amas de pierres de taille aujourd’hui identifié comme les piliers PL 7 et PL 8 avait été partiellement relevé5 et deux sondages stratigraphiques avaient été réalisés (cf. ci-après). Reconnue sur seulement une trentaine de mètres, la structure a été interprétée par J.-M. Gassend comme une digue continue6. Entre 2015 et 2018, quatre courtes campagnes de documentation et de sondages ont été menées par l’équipe du PCR Fossae Marianae sur cette structure désormais dénommée B7.
7De manière générale, les piliers se présentent sous la forme d’un amoncellement de blocs de dimensions variables mais principalement répartis selon deux ou trois modules. Les dimensions du plus grand module, parallélépipédique, sont de l’ordre de 1,80 m x 1 m. Les blocs, en calcaire dur, sont réguliers et de belle facture, ils témoignent d’un programme architectural de qualité (fig. 4).
Fig. 4 - Orthoimage par photogrammétrie rapprochée du pilier PL 3 avant sondage

Acquisition L. Damelet, traitement L. Borel CNRS-CCJ.
8Sur l’ensemble de l’emprise de la structure B aujourd’hui identifiée ne subsiste que la base des 12 piliers, réduite à une ou deux assises. Certaines des bases de piliers se limitent à trois ou quatre blocs principaux (PL 12, 11, 10 et 5), d’autres consistent en une accumulation d’une dizaine à une vingtaine de blocs (PL 8, 7, 6, 3, 2 et 1). Selon les piles, le ratio entre grands et petits modules varie considérablement : les piles du sud, vers le large, semblent constituées de blocs de plus petites dimensions.
9Aucune trace de mortier ou d’un quelconque liant entre les blocs n’a été observée. Sur l’ensemble des piliers, seuls quelques blocs portent des marques de mise en œuvre, trous de pince et trous de louve : deux blocs de la pile PL 5 et deux blocs de la pile PL 68. Bien que peu nombreuses, les marques de pinces induisent néanmoins une construction hors d’eau. Ces blocs appartiennent aux parties émergées de l’élévation aujourd’hui disparue ou témoignent d’une construction à sec des parties basses. Il semble peu probable qu’il s’agisse d’éléments de réemploi, l’ensemble des blocs composant la structure étant clairement homogène, dans la nature du matériau, la facture, la forme et les dimensions.
2.1 Configuration bathymétrique
10Bien que nous ne disposions pas encore d’un levé bathymétrique haute résolution permettant d’appréhender aisément les vestiges dans leur environnement bathymétrique, les levés topométriques (tableau 1) ne restituent aucune pente réellement marquée entre le nord et le sud de la structure. La profondeur du fond marin actuel (de - 3,8 m à - 4,2 m NGF) et celle des niveaux stratigraphiques observés dans les sondages sont quasiment identiques d’un bout à l’autre de la structure. On soulignera également que les épaves localisées à environ 60 mètres de l’extrémité de la structure B gisent elles aussi sur un fond marin aujourd’hui situé à 4 m de profondeur (Épaves Saint-Gervais 1 et 3 : Liou, Gassend, Roman 1990). Si l’on s’attend légitimement à ce qu’une structure partant de la terre et s’avançant en mer soit bâtie sur un sol marqué par une déclivité, on rappellera que la réalité topographique actuelle n’est pas nécessairement cohérente avec celle de l’Antiquité. L’enfoncement du sol observé au centre de la baie peut avoir induit une modification de l’inclinaison du sol aux abords de la structure B9. Il est donc difficile de raisonner sur la topographie du sol antique à partir du relief actuel du fond marin.
Tableau 1 : Dimensions des piliers conservés

2.2 Configuration stratigraphique
11Deux sondages ont été réalisés sur la structure B en 2016 et 2018. Ils visaient à observer l’élévation conservée sous le sable et à déterminer le mode de fondation et la présence éventuelle d’un enrochement sous et entre les piliers. Pour vérifier l’éventualité de modes de construction distincts entre la partie nord potentiellement rattachée à la terre et la partie sud a priori en eau, les sondages ont été menés aux deux extrémités, sur le pilier PL 12 (sondage S-B2 au nord) et le pilier PL 3 (sondage S-B1 au sud) (fig. 3).
12Les séquences stratigraphiques (fig. 5) sont cohérentes d’un sondage à l’autre, quelques variantes sont toutefois observées.
Fig. 5 - Planimétrie des piliers PL 3 et PL 12 et relevés des coupes stratigraphiques des sondages S-B1 (PL 3) et S-B2 (PL 12)

M. El Amouri, Ipso Facto.
13La séquence est la suivante :
Un niveau de surface composé de sable fluide, jaune, mobile (uniquement en PL 3).
Un niveau de sable jaune assez grossier, fluide, comprenant de la céramique et des coquillages.
Un important niveau de sédiments argilo-limoneux gris, dense et compact, mêlés de lits horizontaux de feuilles broyées de posidonies. Le sommet et la base de cette US sont tous deux constitués d’une couche de posidonies d’environ 3 cm d’épaisseur. Ce niveau est vierge d’éléments anthropiques. Plus important en PL 3 (130 cm) qu’en PL 12 (60 cm), il est traversé en PL 3 par un très fin niveau, parfaitement horizontal, de petits coquillages à - 5,7 m NGF.
Un niveau, peu épais, d’argile grise très compacte (uniquement en PL 3).
Un niveau de petits galets, compact et comprenant peu de sédiments.
14Le niveau de surface est, au sud, composé de sable mobile observé dans toute la baie mais peu présent en PL 12 qui est environné d’un épandage de blocs et de moellons. Au pied du pilier PL 3, situé vers le large, la séquence comprend par ailleurs deux US de plus qu’en PL 12 : un très fin lit de petits coquillages marins à environ - 5,5 m NGF et un niveau d’argile grise très compacte à environ - 5,7 m NGF. Au-delà de ces distinctions, la configuration d’ensemble est identique. Aucune élévation n’est conservée sous les niveaux de surface. Les niveaux sédimentaires superficiels, chargés de mobilier archéologique, ne peuvent correspondre à des niveaux d’occupation ou de construction et sont plutôt interprétés comme une stratigraphie d’accumulation assez perturbée. Les niveaux archéologiquement stériles apparaissent très tôt sous les blocs qui sont posés soit sur un possible niveau de galets10 soit directement sur le niveau de sable. Aucune tranchée de fondation et aucun aménagement de préparation de type radier ou enrochement n’a été observé, aucun pieu n’a été mis au jour.
15Les sondages réalisés par l’équipe de J.-M. Gassend en 1987 avaient été implantés sur les faces est et ouest de la pile PL 7. La séquence stratigraphique restituée est sensiblement la même que celles des sondages récents11 (Gassend 1988, 4). On notera que la fine couche d’argile compacte, comparable à celle du sondage de la pile PL 3, située à environ – 5 m NGF, est donnée par J.-M. Gassend comme identique à celle qu’il a pu observer sous la quille de l’épave Saint-Gervais 3, gisant à 70 m plus au large ; il la considère comme le « niveau naturel du fond marin ».
2.3 Mobilier et datation
16Le mobilier céramique relativement abondant découvert à la surface du sol autour des piliers et dans les niveaux de surface des sondages n’apporte que peu d’informations sur la période de construction ou de fonctionnement de la structure dans la mesure où l’essentiel correspond plus vraisemblablement à des objets déplacés par les mouvements de mer et piégés au pied des blocs. Cet assemblage s’inscrit dans le faciès portuaire, datable entre le milieu du Ier s. av. J.-C. et le début du IIIe s. apr. J.-C. d’après l’essentiel des ensembles mobiliers du secteur aujourd’hui submergé de l’anse Saint-Gervais12. Un aureus, frappé en 80-81 apr. J.-C. (Suspène et al. 2017), trouvé juste au-dessus du premier niveau stérile du sondage S-B2 (US 3), pourrait témoigner d’une période de fonctionnement de l’ouvrage (fig. 6).
Fig. 6 - Droit et revers de l’aureus à l’effigie de Domitien issu du sondage PL 3

Cliché F. Marty, AMPM.
3. Approche taphonomique, hypothèses de restitution et d’intégration dans le paysage portuaire
17La structure est très arasée et les piliers sont, au mieux, conservés sur une ou deux assises. Les couches anthropisées sont considérablement réduites et la construction, dont l’élévation n’est que très peu conservée sous le sédiment, repose directement sur un niveau naturel de sable compact avec inclusion de posidonies. Aucun niveau lié à une occupation ou à une circulation n’a pu être observé. Aucun changement de mode constructif témoignant d’un système de fondation n’est clairement lisible et il semble falloir en conclure que les seules parties conservées constituent elles-mêmes les fondations, simplement posées sur un sol naturel, en terrain humide ou sous-marin. Comme aux abords de l’autre structure du complexe monumental, la structure A, les strates supérieures de la séquence stratigraphique semblent lessivées, comme si les mouvements de mer avaient emporté non seulement les niveaux d’occupation mais également ceux de préparation et les sédiments potentiellement creusés ou aménagés pour la mise en œuvre des fondations. Le peu de différence observée entre les séquences stratigraphiques des deux sondages ne permet pas non plus de distinguer une éventuelle zone terrestre d’une zone en eau. La présence de sédiments chargés de posidonies ne peut être considérée comme seul indicateur d’une construction immergée dans la mesure où ces niveaux sont présents dans l’ensemble du secteur, y compris sous les structures que nous savons être bâties à terre, en contexte probablement humide mais terrestre (structure A, mur nord dans l’anse mais aussi structure T sur la plage et Estagnon sur la presqu’île : Fontaine et al. 2019, 25-26 et 32-37). Pour éclairer la question du raccordement à la terre de la structure, le sondage S-B2 a été positionné sur le dernier pilier identifié comme tel mais peut-être faut-il envisager que la structure B se poursuive dans l’amas de blocs du secteur D et que la jonction avec la partie terrestre soit située plus au nord. Cette zone du secteur D n’a pas encore fait l’objet d’un examen détaillé mais, sur la cartographie acoustique comme sur le terrain, d’autres amas de pierres de taille ont été repérés au sein ou à la périphérie de l’épandage de moellons taillés. Une investigation plus poussée sur ce secteur permettra peut-être d’identifier le prolongement de la structure sur piliers. Si une structure sur piliers et arches dénuée de connexion à ses extrémités peut se concevoir dans un environnement en eau (cf. ci-après), l’hypothèse est moins convaincante dans un environnement terrestre.
18À l’échelle de l’ensemble de la structure, aucune accumulation massive de blocs ou de matériaux employés à l’édification des élévations n’est visible, ni en surface ni sous les sédiments sondés. Si cette configuration a permis d’identifier clairement la succession de piliers et cette morphologie si particulière assimilable à celle de pilae, elle complique grandement la restitution et l’interprétation de l’ouvrage. Deux hypothèses, potentiellement combinées, peuvent être émises pour tenter d’expliquer ces absences de niveaux d’effondrement et de matériaux de construction et, de facto, cette absence d’éléments architecturaux caractéristiques d’une structure sur arches (claveaux, éléments du tablier, etc.). La première consiste à envisager que seules les fondations ou la base des piles aient été bâties en pierre et que les élévations, notamment le tablier, aient été bâties en matériaux périssables. Cette hypothèse n’explique pas à elle seule que les piles du nord soient aujourd’hui réduites à trois blocs. La seconde hypothèse consiste à considérer l’épierrement et la récupération des matériaux post-abandon comme systématiques. Cette remarque s’étend à l’ensemble des structures du secteur Saint-Gervais, tant pour les édifices du centre de la baie que pour ceux avoisinant la plage, comme la structure T dont ne subsistent que les fondations sur pieux alors que l’ampleur de ces dernières implique nécessairement une élévation « pondéreuse », vraisemblablement en pierre. Si l’on considère que tout ce qui était accessible a fait l’objet d’une récupération, il est toutefois difficile, sur les pilae, d’envisager qu’aucun élément architectural propre à l’élévation, aux arches ou au tablier n’ait été retrouvé au même niveau que les groupes de blocs constituant la base des piles. Sauf à considérer que les niveaux sédimentaires entourant la base des piles au moment de l’effondrement aient été plus élevés qu’aujourd’hui et que ne subsiste désormais que ce qui était inaccessible parce qu’enfoui. Cette éventualité fait écho à la lecture stratigraphique de la séquence sédimentaire des sondages S-B1 et S-B2, mais aussi de ceux conduits sur la structure A, où les niveaux supérieurs semblent érodés et remplacés par des niveaux sédimentaires postérieurs au fonctionnement des structures. Bien évidemment cette interprétation prend un sens différent selon que l’on considère que la structure est bâtie en eau ou à terre. Elle est en ce sens intimement liée aux problématiques relatives à l’évolution environnementale du secteur, notamment en termes de mobilité verticale et horizontale du niveau de la mer. Certaines hypothèses géomorphologiques proposent, à l’échelle de l’anse Saint-Gervais, une avancée progressive de la ligne de rivage vers le large au cours de la période impériale (Vella, Leveau, Provansal 1999 ; Vella et al. 2000 ; Vella 2002), causée par un fort alluvionnement du delta du Rhône. Ce phénomène de progradation ensevelissant les espaces lotis serait antérieur aux événements ayant causé la submersion de l’anse. Les édifices, même leur partie originellement sous-marine, auraient pu ainsi être enfouis sous les sédiments avant d’être submergés. La reprise en cours du dossier géomorphologique et l’étude des carottes sédimentaires effectuées dans le cadre du PCR Fossae Marianae éclaireront peut-être d’un jour nouveau ces questions complexes.
19Quels qu’aient pu être le mode constructif et la hauteur de l’élévation, la morphologie des vestiges conservés laisse peu, voire pas, d’ambiguïté sur la restitution d’une structure linéaire sur piliers supportant probablement un espace de circulation sur arches. Si l’on considère que cette structure constituait pour partie au moins une avancée dans la mer, il semble évident de la rapprocher des quelques représentations antiques de jetées sur arches, notamment de celles figurées sur la fresque de Stabies (fig. 7), et des vestiges de pilae, en particulier de ceux de la baie de Pouzzoles.
Fig. 7 - Fresque de la Villa San Marco à Stabies, découverte au XVIIIe siècle et dite peinture du Gragnano (MAN, inv. 9514)

© Prisma Archivo/ Alamy.
20L’attribution au port de Pouzzoles de la vue portuaire de la fresque de Stabies fait débat et nous renvoyons à ce sujet à la contribution de Xavier Lafon dans ce volume pour une reprise de l’argumentation, pour la confrontation aux différentes sources et pour la réflexion d’ensemble sur la fragilité des attributions à un lieu donné, compte-tenu de l’emploi répété de motifs stylistiques devenus plus symboliques que figuratifs. Qu’elle représente ou non le port de Puteoli, elle offre une illustration des jetées sur arches ou pilae, composantes emblématiques du paysage portuaire de la baie de Pouzzoles, tant pour les Romains eux-mêmes13 que pour les archéologues contemporains. D’un point de vue archéologique, la baie de Pouzzoles, du Cap Misène à l’île de Nisida, regroupe à elle seule près de la moitié des vestiges d’opus pilarum aujourd’hui documentés dans l’espace méditerranéen14. La jetée figurée au premier plan de la fresque fait ainsi écho, directement ou indirectement, aux vestiges de la jetée sur arches édifiée au pied du Rione Terra à Pouzzoles et communément appelé Ponte di Caligola ou molo caligoliano. Aujourd’hui disparu parce qu’ennoyé dans la jetée contemporaine, ce môle est resté présent dans le paysage portuaire de Pouzzoles jusqu’au début du XXe siècle. Outre les représentations artistiques de la période moderne offrant une vue des vestiges conservés (fig. 8)15, relevés, descriptions et analyses architecturales ont été publiés depuis le XVIIIe siècle. (Paoli 1768, Tav. XIV ; De Fazio 1828, 217-226, ici fig. 916 ; Dubois 1907, 264-261).
Fig. 8 - Le molo Caligoliano, jetée romaine, au XVIIIe siècle

D’après Sir Hamilton 1776, dessin de Pietro Fabris.
Fig. 9 - Relevé en plan et en élévation de la jetée romaine de Pouzzoles par A. De Fazio

D’après De Fazio 1828, tav. V, fig.1.
21Constitué d’une succession de 15 piliers17, le môle est adossé à la côte rocheuse et s’avance perpendiculairement dans la mer sur une distance de 372 m18. Les piles quadrangulaires ont une largeur et une longueur maximales équivalentes, d’environ 15 m pour les mieux conservées. Elles sont en moyenne espacées les unes des autres de 10 m. Deux d’entre elles au moins avaient, au moment de leur destruction, conservé la base des arches qui les reliaient. Le rapport entre longueur (épaisseur axiale) des piles et la portée entre deux piles est de 0,5 à 0,9. À titre de comparaison, bien qu’il soit excessivement délicat de procéder à un calcul de ce type à partir des données très lacunaires sur la taille originelle des piles de la structure de Fos, le rapport entre longueur de piles et portée est vraisemblablement nettement plus important à Fos.
22Les piles de la jetée de Pouzzoles, comme l’essentiel des jetées sur arches à ce jour étudiées, sont construites en béton de pouzzolane, vraisemblablement selon le premier procédé décrit par Vitruve mettant en œuvre un caisson en eau19. Certaines des pilae de la région de Pouzzoles présentent, en outre, un parement en opus reticulatum ou vittatum sur certaines de leurs faces20. La structure sur piliers de Fos, en grand appareil, se distingue donc nettement des pilae à ce jour recensées et documentées comme telles. Cette distinction conditionne le mode de mise en œuvre mais sans doute aussi, par les dimensions plus réduites des piles, la résistance face aux assauts de la mer. En l’état des connaissances sur l’environnement accueillant la structure B (terrestre, humide, en eau peu profonde ou en pleine eau ?) et sur la hauteur de son élévation, il est bien difficile de se prononcer sur les modalités de sa mise en œuvre. Nous n’écartons pas pour autant l’hypothèse d’un ouvrage bâti ici en eau peu profonde21, probablement selon le troisième procédé décrit par Vitruve impliquant la mise en œuvre d’un caisson mis à sec par pompage le temps de la construction22.
23Le choix d’une construction en pierre, plus complexe à mettre en œuvre en contexte immergé qu’un ouvrage en béton hydraulique, peut se justifier par l’accessibilité des matériaux. Certes l’importation de pouzzolane est avérée en différents points du bassin méditerranéen très éloignés (côte levantine, mer Égée et Asie Mineure, etc.)23 mais son utilisation est peu attestée sur le littoral de la Gaule. Hormis à Fréjus et à Marseille24, les quelques exemples de jetées ou de digues connues sur les côtes gauloises utilisent les ressources locales, en l’occurrence la pierre. Il en est ainsi des digues d’entrée du port des Laurons25, dans le golfe de Fos, ou de la jetée d’Olbia-de-Provence (Borel, Sabastia 2020).
24Il n’est pas plus évident de se prononcer sur la fonction précise de cet ouvrage. Au regard de la disposition des piles et de leur emplacement, les opera pilarum, de Campanie et d’ailleurs, revêtent sans doute plusieurs fonctions : jetée-promenade, espace d’appontement, brise-lames. Selon les sources textuelles et iconographiques, une grande jetée comme celle de Pouzzoles pouvait être surmontée d’un espace de circulation doté d’éléments architecturaux d’apparat : arcs, colonnes et statues, balustrades. Ces éléments sont répétés sur la fresque de Stabies, le dessin de Bellori ou encore sur la bien connue série de vases gravés, objets-souvenirs dispersés dans l’ensemble des provinces aux IIIe et IV e s. apr. J.-C. et figurant les édifices emblématiques du port de Puteoli (ou de Baia), au nombre desquels les pilae (jetée) et la ripa (quai)26. La fonction première ne semble pas être ici d’offrir une surface d’accostage et de déchargement aux navires au port. Ceci étant dit, plusieurs indices archéologiques donnent corps à cette possibilité sur la grande jetée de Pouzzoles et sur d’autres pilae de la baie. De Fazio signale la présence de tronchi di pietra, enchâssés horizontalement dans la maçonnerie de certaines piles de la jetée de Pouzzoles et verticalement dans celle de Nisida : il en conclut que les pilae peuvent servir, même temporairement, de point d’amarrage (De Fazio 1828). Dubois réaffirme ces observations pour la jetée de Pouzzoles (Dubois 1907, 190 et suivantes). A Misène un anneau de pierre, cassé, est enchâssé dans la maçonnerie d’une pila près de l’accès au port et une bitte d’amarrage en pierre est encore présente sur la partie supérieure de l’une des piles de la jetée de Punta Terone (Gianfrotta 1998, fig. 3 ; Benini, Lanteri 2005, 110-112, fig. 4 et 7).
25Ces éléments font écho à la rangée de bittes d’amarrage bordant la partie supérieure de la jetée sur arches de la mosaïque du Palais des Conservateurs27 (fig. 10) et de celle figurée sur un fragment de mosaïque découvert en 2001 dans la Villa delle Grottacce à Nettuno près de Rome (Chioffi 2020, fig. 3 ; Attema, De Hass, Nijboer 2003, 131, fig. 26).
Fig. 10 - Mosaïque dite du Palais des Conservateurs (Musées du Capitole, inv. AC 32360)

© 2013 Museo Galileo - Istituto e Museo di Storia della Scienza.
26La jetée de la mosaïque du Palais des Conservateurs, comme d’autres représentations de jetées sur arches attribuées notamment au port d’Alexandrie28, conduit à un phare. S’il est bien évident que le port de Fossae Marianae, installé à la lisière du delta du Rhône et caractérisé par un paysage excessivement plat, a dû comporter un phare ou tout au moins un ou plusieurs édifices de signalisation maritime, aucun des vestiges à ce jour identifiés ne permet d’en proposer une restitution, ni même une localisation. La dernière pile de la structure B ne se distingue pas clairement des autres piles et aucune plateforme pouvant supporter une tour ou un monument particulier n’est lisible.
27Vitruve, et à sa suite les ingénieurs de la période moderne29 et les archéologues contemporains, attribuent aux jetées sur piliers l’avantage de laisser circuler l’eau et les sédiments, limitant ainsi l’envasement et la sédimentation des espaces portuaires. Pour compenser leur moindre efficacité en tant que brise-lame au regard d’un môle continu, les pilae sont parfois disposées en deux ou plusieurs rangées. C’est sans doute à cette fonction première qu’il faut rattacher certains groupes de piles encore préservées dans la baie de Pouzzoles. En effet, au-delà des successions de piliers linéaires formant de grandes jetées perpendiculaires à la côte (molo caligoliano, jetées de Nisida et de Misène30) ou prolongeant des môles continus (chenal d’accès de Portus Iulius) (fig. 12), des groupes de piles, disposés irrégulièrement, ont été bâtis parfois sur de grandes superficies. Celles de Pouzzoles, à l’est de la grande jetée disparue, entourent le rivage du Rione Terra sur plusieurs centaines de mètres (fig. 11)31. Dubois propose d’y voir un système de protection des bassins portuaires installés à l’est du Rione Terra (Dubois 1907, 261-265, fig. 20-21). La même fonction est sans doute à attribuer aux importants groupes de pilae encore observables dans les eaux de Baia, en avant de la Villa dei Pisoni ou plus au large sur le site de Secca Fumosa (fig. 12)32.
Fig. 11 - Plan des vestiges conservés, à terre ou sous la mer, de Pouzzoles et Portus Iulius

D’après Camodeca 1994.
Fig. 12 - Plan des structures submergées des ports de Baia et Portus Iulius

D’après Scognamiglio 2002, tav. 1.
28Si la structure B de Fos se rapproche plus clairement, par sa morphologie linéaire, des longues jetées partant de la côte ou d’un édifice et s’avançant dans la mer, on notera toutefois que l’exemple des pilae de Bacoli (Gianfrotta 2019), dont l’alignement bien que linéaire est disposé parallèlement au rivage, illustre une autre configuration.
29Par ailleurs, bien que rien ne permette à ce jour d’affirmer une analogie formelle, la disposition des pilae du Rione Terra n’est pas sans évoquer les groupes de pierres de taille observés à l’est de la structure B dans le secteur appelé H (fig. 1). Situés à équidistance entre la structure B et la pointe rocheuse de la presqu’île de Saint-Gervais, cinq amoncellements de blocs sont préservés par 2 à 2,5 m de fond. Ils bordent, en formant un arc de cercle, le vaste épandage de blocs et de moellons du secteur H qui constitue probablement les restes d’un aménagement ou d’un édifice dont la lecture est aujourd’hui peu aisée. Ces cinq groupes de blocs, qui apparaissent nettement sur la cartographie acoustique, n’ont pour l’instant fait l’objet que d’une prospection de surface en 2017. Ils sont composés de 10 à 30 pierres de taille de belle facture et de moellons épars, certains parfois enfouis très largement dans le sable. Comme pour les piles de la structure B, aucune élévation en place n’est lisible et nos connaissances sont encore trop superficielles pour proposer une restitution.
Conclusion
30L’état lacunaire de nos connaissances sur la structure B et sur la configuration de l’espace portuaire dans lequel elle s’inscrit ne nous autorise pas à proposer de manière définitive une restitution de son élévation, de son mode de construction ni même de sa fonction. Cela étant dit, sa morphologie linéaire, constituée de 12 piles de pierres de taille, régulièrement espacées sur près de 100 m de long, ainsi que son environnement maritime, l’identifient à une jetée sur arche. En ce sens, elle se rapproche des jetées portuaires figurées sur différents supports de la période romaine et des vestiges de pilae construites en nombre dans les ports campaniens. Elle se distingue de ces dernières par une construction en grand appareil et non en opus caementicium. Si le terme pilae, dans son acception retenue par la majorité des archéologues contemporains, induit une construction sur piles de béton pouzzolanique et n’inclut a priori pas les jetées sur piles de pierre, nous retiendrons le sens littéral du terme : un ouvrage bâti sur piles, quel que soit le matériau employé à sa construction.
31Autant que l’on puisse en juger à partir des données disponibles et en l’absence de bassins portuaires localisés, la structure B, composante du complexe monumental du port de Fos, semble devoir être assimilée à une jetée sur arches, tout au moins à un ouvrage sur piliers, traversant une zone en eau peu profonde et permettant de relier la terre ferme à un espace en eau suffisamment profond pour la circulation et l’éventuel appontement de gros navires de charge. On soulignera que la potentielle configuration lagunaire de l’espace portuaire de Fos (Fontaine et al. 2019, 49-52) rend plus aisément envisageable la construction d’une telle structure, bien moins massive que les pilae en béton bâties en pleine mer.
Bibliographie
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Notes de bas de page
1 Pour un état des connaissances et un historique des recherches sur le système portuaire romain du golfe de Fos et le canal de Marius, voir Fontaine et al. 2019.
2 Ce programme de recherches a donné lieu à un PCR entre 2016 et 2019 ainsi qu’au Projet FOSPHORA (2019-2022, Programme Investissements d’Avenir, Initiative d’Excellence d’Aix-Marseille Université - A*MIDEX, AMX-18-MED- 018) et les campagnes de terrain en contexte sous-marin ont fait l’objet du chantier-école du Master of Maritime and Coastal Archaeology (MoMarch) d’Aix-Marseille Université. L’ensemble des travaux du programme a bénéficié d’une aide du gouvernement français au titre du Programme Investissements d’Avenir, Initiative d’Excellence d’Aix-Marseille Université - A*MIDEX. Ces recherches sont également soutenues financièrement par le Ministère de la Culture (Drassm) et le crédit Impôt-Recherche (Ipso facto).
3 La cartographie acoustique a été réalisée par Denis Dégez (Drassm) à partir d’un sonar à balayage latéral tracté. L’épatement de la structure B vers le sud (fig. 2) est un effet de déformation acoustique et n’a pas de réalité de terrain.
4 Pour une synthèse des connaissances sur ces épaves et pour la bibliographie qui y est associée nous renvoyons à Fontaine et al. 2019, 37-43 et à Marlier 2018. Pour l’épave Saint-Gervais 3 voir Liou, Gassend, Roman 1990.
5 Il est possible que l’ensablement ait été plus fort dans les années 1980 et que certains des blocs constituant les trois piliers repérés aient été alors enfouis.
6 Ces travaux demeurent inédits et sont présentés uniquement dans le rapport de la campagne 1987 conduite par l’équipe de J.-M. Gassend (IRAA, Aix-en-Provence) : Gassend 1988. Nous remercions ici J.-M. Gassend pour la transmission de ses archives et pour son partage des connaissances.
7 Dans les travaux de J.-M. Gassend, la jonchée de blocs est identifiée comme « Écho » du nom de la balise utilisée pour marquer la découverte lors de la prospection.
8 Sans prétendre à l’exhaustivité, puisque les piliers n’ont pas fait l’objet d’un démontage et donc d’une observation de toutes les faces de tous les blocs conservés. L’ensemble des faces visibles des blocs constituant les 12 piliers a fait l’objet d’un nettoyage méticuleux visant notamment à l’observation des éventuelles marques d’assemblage ou de mise en place.
9 On rappellera que l’enfoncement du sol au niveau de la structure A est estimé à environ 2,50 m alors qu’à moins de 500 m à l’est, sur la plage et la presqu’île Saint-Gervais (site de l’Estagnon), le sol n’a pas subi d’enfoncement particulier (Fontaine et al. 2019 ; Marty, Guibal, Hesnard 2016).
10 Il est difficile d’affirmer que les galets, observés uniquement sous le bloc BL 04 du pilier PL 3, constituent bien un niveau, ils pourraient également avoir comblé a posteriori un affouillement naturel au pied du bloc.
11 Nous considérons avec réserve la mention d’un niveau de blocs grossièrement équarris, d’environ 30 de cm, situé entre un niveau de galets et le niveau de vase compacte, observé uniquement dans le sondage Ouest et dont la restitution stratigraphique nous paraît délicate.
12 Pour l’étude du mobilier collecté aux abords de la structure B et dans les sondages de la pile PL3 voir Rodriguez 2016. Pour le faciès céramique des contextes immergés du port de Fos voir en premier lieu Liou, Sciallano 1989 ; voir aussi Marty 2002, 2004 et 2006.
13 On trouve le terme d’opus pilarum pour qualifier la jetée de Pouzzoles dans deux inscriptions (CIL, X, 1640 et 1641) et Sénèque la désigne par pilae (Sénèque, Epist. IX, 77 : omnis in pilis Puteolorum turba consistit, tous les habitants de Pouzzoles se pressent en désordre sur les pilae).
14 Les vestiges de pilae font l’objet d’une littérature archéologique abondante et les travaux les concernant sont intimement liés à ceux consacrés à l’emploi du béton de pouzzolane. Pour une recension des exemples de pilae connues à Pouzzoles et ailleurs, voir Brandon et al. 2014 et le catalogue proposé par A. Degraaw sur le site : www.ancientportsantiques.com. Voir aussi Gianfrotta 2009.
15 Voir aussi la gravure de Paoli de 1768, présentée dans ce volume par X. Lafon en fig. 15.
16 Le plan de De Fazio, quoique précis et détaillé, est sensiblement schématique, celui reproduit par Ch. Dubois (Dubois 1907, 254, fig.16) fait en revanche apparaître une légère courbe.
17 Nous ne retiendrons pas l’hypothèse établie d’après la lecture hypothétique d’une des deux inscriptions mentionnant la jetée de Pouzzoles (CIL, X, 1641), déjà réfutée par Ch. Dubois en 1907 (p. 251, note 4), qui porterait le nombre de piles à 20 ou 25.
18 Les mesures et dimensions mentionnées ici sont celles retenues par Ch. Dubois (1907).
19 De Architectura, V, 12. La restitution, illustrée par des schémas, des procédés de construction pour les structures en eau décrits par Vitruve a fait l’objet de nombreux travaux. Nous renvoyons en premier lieu à Dubois 1902 ; Brandon 2014 ; Felici 1998 et 2001.
20 Voir notamment les pilae de Misène (Benini, Lanteri 2005), de Nisida (Stefanile et al. 2018) ou de Secca Fumosa (Scogliamiglio 2002, fig. 6 à 10).
21 Nous avons réfuté cette hypothèse pour la construction du mur nord de la structure A (Fontaine et al. 2019, 26-27), bâtie avec un parement de petits moellons et aujourd’hui submergée par 3 mètres d’eau, parce qu’elle nous semblait peu appropriée à la configuration de la structure. Nous ne pouvons toutefois définitivement écarter l’emploi d’un caisson mis à sec mais il est certain que dans ce cas la hauteur d’eau demeurait nécessairement très peu importante et ne pouvait atteindre les trois mètres actuels.
22 On notera que le mode opératoire décrit par Vitruve pour ce troisième procédé, préconisé en l’absence de pouzzolane, implique tout de même la construction d’un niveau de fondation constitué de moellons liés au mortier (De architectura, V, 12), ce qui ne semble pas être le cas pour la structure B.
23 Voir notamment Gianfrotta 2009 ; Brandon et al. 1994 et bibliographie associée ; Excoffon 2012.
24 Pour Fréjus, où l’emploi de pouzzolane importée de Campanie est avéré pour la construction de plusieurs ouvrages de Fréjus, liés ou non au contexte portuaire voir Excoffon 2012 ; Excoffon, Bonnet 2016, 347-349. À Marseille, sur le site de la place Jules-Verne, ce qui a été interprété comme une jetée mais qui pourrait également être un quai, est un ouvrage linéaire continu, reconnu sur 130 m de long, bâti en petit appareil sur une fondation en béton hydraulique (Hesnard 1994, p. 207-208 ; Hesnard 2004, p.189-194).
25 Une synthèse des données et l’abondante bibliographie sur les structures du port des Laurons est présentée dans Fontaine et al. 2019, 45-49.
26 Voir dans ce volume l’article de X. Lafon, voir également Gianfrotta 2011 pour une recension commentée de ces scènes gravées sur verre.
27 Découverte sur la colline du Quirinal à Rome en 1878 et conservée aux Musées du Capitole (inv. AC 32360), elle a été identifiée par certains au port d’Alexandrie, par d’autres au port d’Ostie : voir le catalogue en ligne de l’exposition Archimede, Arte e scienza dell’invenzione du Musée du Capitole (juin 2013-janvier 2014) :
https://mostre.museogalileo.it/archimede/oggetto/MosaicoParietaleScenaPorto.html. Voir aussi Reddé 1979 (866, fig. 7), Hesnard 1999 (fig. 3) ou Felici 1998 (288, fig. 16).
28 Pour exemple le décor de la lampe à huile dite de Mariemont (Picard 1959, planche X) et les autres exemples réunis par Reddé 1979.
29 Voir notamment De Fazio 1828, 23 et suivantes.
30 Pour Nisida voir Stefanile et al. 2018 ; Mattei et al. 2018. Pour Misène voir Benini, Lanteri 2005.
31 Voir aussi Gianfrotta 1996.
32 Pour une vue bathymétrique multifaisceaux de ces structures voir Miniero 2010 ou Gianfrotta 2012, fig. 2. Voir aussi Brandon et al. 2008.
Auteurs
-
Souen Fontaine
Institut National de Recherches Archéologiques Préventives
CNRS, Aix Marseille Univ, Inrap, Centre Camille Jullian, Aix-en-Provence, France
souen.fontaine[at]inrap.fr -
Mourad El Amouri
Ipso Facto
Chercheur associé sous convention Aix Marseille Univ, CNRS, CCJ, Aix-en-Provence, France
mourad.el-amouri[at]ipsofacto.coop -
Laurent Borel
CNRS, Aix Marseille Univ, CCJ, Aix-en-Provence, France
laurent.borel[at]univ-amu.fr -
Frédéric Marty
Métropole Aix-Marseille Provence/Territoire Istres Ouest Provence/Direction du Patrimoine Culturel
Chercheur associé sous convention Aix Marseille Univ, CNRS, CCJ, Aix-en-Provence, France
frederic.marty[at]ampmetropole.fr
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Peupler et habiter l’Italie et le monde romain
Stéphane Bourdin, Julien Dubouloz et Emmanuelle Rosso (dir.)
2014
Archéologie au présent
Les découvertes de l’archéologie préventive dans les médias
Catherine Dureuil-Bourachau
2015
Sarta Tecta
De l’entretien à la conservation des édifices. Antiquité, Moyen Âge, début de la période moderne
Charles Davoine, Maxime L’Héritier et Ambre Péron d’Harcourt (dir.)
2019
Gérer l’eau en Méditerranée au premier millénaire avant J.-C.
Sophie Bouffier, Oscar Belvedere et Stefano Vassalo (dir.)
2019
Le village de la Capelière en Camargue
Du début du ve siècle avant notre ère à l’Antiquité tardive
Corinne Landuré, Patrice Arcelin et Gilles Arnaud-Fasseta (dir.)
2019
Les métaux précieux en Méditerranée médiévale
Exploitations, transformations, circulations
Nicolas Minvielle Larousse, Marie-Christine Bailly-Maitre et Giovanna Bianchi (dir.)
2019
L’Homme et l’Animal au Maghreb, de la Préhistoire au Moyen Âge
Explorations d’une relation complexe
Véronique Blanc-Bijon, Jean-Pierre Bracco, Marie-Brigitte Carre et al. (dir.)
2021