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Entre deux rives

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Gilbert Buti
, 
Élisabeth Malamut
, 
Mohamed Ouerfelli
, 
et al.

La Méditerranée des Villes

D’une île-monastère à une île-ville

L’exemple de Patmos

Marie-Myriam Carytsiotis

Texte intégral

  • 1 Maria Nystazopoulou-Pélékidou, Βυζαντινὰ ἕγγραφα τῆς μονῆ Πάτμου, 2, Δημοσίων λειτουργῶν, Athènes, (...)

1L’île de Patmos est située dans le Sud-Est de la mer Égée, dans l’archipel actuel du Dodécanèse. Aride et rocheuse, cette île n’offre pas de conditions naturelles très propices à la vie ni à l’activité humaine. Ainsi, si l’île connaît depuis la période antique des expériences épisodiques de peuplement, les conditions d’accueil ont souvent fait fuir très rapidement ses habitants et, pendant plusieurs siècles, l’île n’a pas connu de peuplement durable. Il faut attendre le xie siècle et la création par le moine Christodoulos du monastère de Saint-Jean-le-Théologien pour que l’île connaisse une histoire continue et qu’un processus pérenne de peuplement et de sédentarisation se mette en place. Lorsque l’île est donnée aux moines en 1088 par un chrysobulle d’Alexis Ier Comnène, elle est totalement déserte. Le praktikon établi lors de cette donation par Nicolas Tzanzès décrit Patmos comme une terre dépourvue d’eau et désolée1. L’étude de cas de Patmos est donc intéressante pour la connaissance des villes en Méditerranée, puisqu’elle permet de suivre tout le processus de peuplement et d’urbanisation de l’île et de comprendre l’évolution qui s’y est opérée ainsi que la mutation, à l’époque moderne, de cette terre déserte de l’Empire byzantin en une « île-État » ou une sorte de « cité-État ».

  • 2 Henri Galinié, Ville, espace urbain et archéologie, Tours, Maison des Sciences de la Ville de l’Urb (...)

2Cette configuration nous permet de nous interroger sur la formation de l’espace urbain à Patmos et sur son mode de fonctionnement, mais aussi de comprendre comment s’articulent ces deux objets de recherche : « fonctionnement et fabrique » de la ville2.

  • 3 Thierry Dutour, La ville médiévale : origines et triomphe de l’Europe urbaine, Paris, O. Jacob, 200 (...)
  • 4 Bernard Lepetit, Denise Pumain, Temporalités urbaines, Paris, Anthropos, 1999, p. 304.

3Une telle étude nécessite la définition qu’on entend ici du terme de « ville », ainsi qu’une explicitation plus précise de notre objet d’étude et de ses délimitations spatiales, mais il n’est pas aisé de donner une définition que le particularisme de l’île de Patmos ne contredirait pas. Le cas de Patmos n’est d’ailleurs pas le seul qui mette à mal la possibilité d’une telle entreprise, au point que les débats historiographiques que suscite cette question acceptent que « les traditions culturelles [puissent] avoir et [aient] souvent leur propre définition du caractère urbain » et que « chaque civilisation donne une déclinaison particulière du phénomène3 ». La définition la plus minimaliste et la plus souvent retenue voit la ville comme « un groupement permanent d’une population relativement importante en un même lieu4 ». Pour notre cas, il est possible de définir ce lieu de deux manières : d’une part, en évoquant la ville de Chora en elle-même, construite au pied du monastère ; d’autre part, en considérant l’ensemble de l’île de Patmos comme une entité entière, dont la délimitation spatiale se fait par les contraintes naturelles de l’insularité. Toutefois, l’évolution constante du fonctionnement de l’île de Patmos, induite par les conditions initiales particulières de l’île, nous oblige à entrevoir une autre manière de considérer l’espace urbain de Patmos, que nous évoquerons une fois les éléments d’analyse mis en place. Pour observer la déclinaison que l’île de Patmos propose au phénomène de la ville au Moyen Âge, nous avons choisi d’en retenir et d’en étudier un seul aspect : le commerce.

4Notre étude nous permettra d’abord d’identifier les premières solutions et les premiers dispositifs choisis par les habitants pendant les premiers siècles qui ont suivi leur arrivée pour répondre aux difficultés inhérentes aux conditions initiales propres à Patmos. Puis, à l’époque moderne, lorsque la ville est désormais identifiable, il s’agira de décrire son mode de fonctionnement. Enfin, il sera important d’analyser comment s’articulent l’un avec l’autre ses deux objets d’étude afin de comprendre le processus qui aboutit à la formation de la ville.

Des conditions initiales particulières

  • 5 Pierre Garmy, Villes, réseaux et systèmes de villes : contribution de l’archéologie, Paris, Éd. Err (...)

5Certains historiens ont déjà mis l’accent sur la nécessité d’étudier les « conditions initiales » propres à chaque ville dans la mesure où elles permettent d’identifier « le poids de l’héritage historique sur le temps long qui influence la trajectoire de chaque ville, et la structure hiérarchique des systèmes de villes5 ». Il nous appartient ici de rendre compte des obstacles avec lesquels Patmos a dû composer, ainsi que des particularités avantageuses dont elle a bénéficié.

  • 6 Dimitris Dimitropoulos, « Les sociétés insulaires de la mer Égée au temps de la domination ottomane (...)

6L’insularité est une de ces caractéristiques importantes qui influent sur l’évolution de Patmos. En effet, « chaque île constitue une unité clairement délimitée par sa ligne côtière, qui est une frontière naturelle immuable6 », et cela même oblige celui qui chercherait à dépasser ses frontières naturelles à emprunter la voie maritime. Autres facteurs qui jouent un rôle déterminant dans l’implantation d’une société : les conditions naturelles, c’est-à-dire la possibilité qu’a le lieu d’offrir des conditions de vie propices à l’accueil d’une population, et notamment la capacité du rendement de l’agriculture à la nourrir. Or, comme nous l’avons déjà précisé, le sol de Patmos est aride, ce qui constitue de fait un frein à l’agriculture et oblige les habitants à se tourner vers l’extérieur de l’île pour satisfaire aux conditions de leur survie. À l’origine, l’obstacle est considérable, puisque l’insularité rend obligatoire d’élargir son domaine territorial, tout en l’enfermant dans une unité délimitée. Devient donc indispensable la création d’un réseau qui dépasserait les contraintes terrestres.

  • 7 Patricia Karlin-Hayter, « Notes sur les archives de Patmos comme source pour la démographie et l’éc (...)

7Une autre spécificité de l’île est que la première entité à s’y installer de manière durable est un monastère, ce qui signifie que les premiers habitants de l’île étaient des moines accompagnés de leurs parèques. D’après P. Karlin-Hayter, le noyau initial des laïcs était constitué de onze parèques et de leurs familles, ce qui représentait quarante-et-une personnes, enfants exceptés7. D’autre part, de nombreux actes mentionnent la règlementation des parèques et l’augmentation de leur nombre. Cependant, à ce jour, aucun document ne nous permet de savoir à partir de quel moment et de quelle manière des laïcs indépendants du monastère se sont installés sur l’île. Il découle également de cette situation que l’île est administrée par des moines qui, grâce à leur statut, bénéficient de privilèges.

  • 8 Era L. Vranoussi, Βυζαντινὰ ἕγγραφα τῆς μονῆ Πάτμου, 1, Αὐτοκρατορικά, Athènes, Ινστιτούτο Βυζαντιν (...)
  • 9 Metochion : a monastic establishment (usually small), subordinate to a larger independent monastery (...)

8Dès sa fondation, le monastère a su mettre en place une diplomatie efficace. Des chrysobulles ont fait bénéficier l’île d’une exemption fiscale et de dons d’argent et de blé qui lui ont permis de répondre aux besoins premiers de survie8. Pour faciliter le développement de l’île sur le long terme, les empereurs ont gratifié le monastère d’un réseau de métochia9, dont la mise en place a été accompagnée de la donation de bateaux et d’un système d’exemption fiscale maritime. Cette conjonction d’éléments a rendu plus aisés les déplacements maritimes et fait évoluer le simple réseau de métochia en tissant progressivement un véritable réseau commercial. Nous nous attarderons sur les actes concernant les métochia et la fiscalité maritime, puisqu’ils permettent de retrouver les lieux visités par les moines et ainsi de mieux appréhender le réseau d’échanges de l’île, mais peut-être aussi, dans une certaine mesure, son extension territoriale.

Construction des premiers réseaux

Les métochia

  • 10 Era L. Vranoussi, op. cit., 1980, n° 6.
  • 11 K. Smyrlis, 2006, p. 73, note 379.

9Lorsque Patmos est donnée à Christodoulos en 1088, le chrysobulle d’Alexis Ier Comnène stipule qu’il doit lui donner en retour des possessions dans l’île de Kos. Il peut en revanche conserver ses biens dans les îles de Léros et Leipsos, qu’il possède depuis 1087 au nom du monastère de la Théotokos à Kos10. À cette liste de biens on pourrait peut-être ajouter les îles d’Arkoï, Agathonèsion et Pharmakô11, avec lesquelles Christodoulos et le monastère de Kos entretiennent des liens privilégiés depuis 1087. Leur sort n’est pas mentionné dans l’acte de donation de 1088 ; il faut attendre le xiiie siècle pour voir réapparaître des mentions officielles concernant ces îles. Alexis Ier Comnène avait formellement interdit d’acquérir tout autre métochion, et cette interdiction est respectée, puisque ce premier noyau, constitué d’îles proches de Patmos, situées dans un rayon d’une quarantaine de kilomètres, ne connaît pas d’expansion jusqu’à la fin du xiie siècle.

  • 12 Era L. Vranoussi, op. cit., 1980, n° 21.
  • 13 K. Smyrlis, 2006, p. 77.
  • 14 Era L. Vranoussi, op. cit., 1980, n° 17.
  • 15 K. Smyrlis, 2006, p. 77 et Era L. Vranoussi, op. cit., 1980, n° 17.

10Mais les terres agricoles du monastère s’avèrent vite insuffisantes pour nourrir la population croissante de l’île. La première expansion en dehors du noyau initial a lieu à la toute fin du xiie siècle et au début du xiiie, avec l’acquisition des métochia de Psychron en 119612 et de Stylos, vers 1219, en Crète. Au xiiie siècle se multiplient les acquisitions en Asie Mineure, notamment dans la région du Phygéla, dont les premières mentions apparaissent entre 1201 et 121613 et qui est évoquée pour la dernière fois dans un acte impérial en 132914, et dans la région du Palatia aux mêmes époques15. Ce deuxième foyer de possessions se situe dans un rayon d’une centaine de kilomètres. C’est aussi au xiiie siècle que le monastère retrouve ses possessions à Kos.

  • 16 Era L. Vranoussi, op. cit., 1980, n° 16.
  • 17 Era L. Vranoussi, op. cit., 1980, n° 44.

11Au xvie siècle, la progression des Ottomans est telle que Patmos perd progressivement ses biens micrasiatiques. En revanche, elle réussit à garder ses métochia situés à Leipsos, Léros et en Crète vénitienne. C’est probablement pour pallier les pertes en Asie Mineure que les empereurs gratifient Patmos de nouvelles acquisitions. Il s’agit cette fois d’îles beaucoup plus éloignées : Lemnos, située à environ 310 km de Patmos, est acquise entre 1285 et 131916 et Chios, située à quelque 120 km, l’est entre 1329 et 134017.

12Les métochia représentent une part importante de la politique de Patmos, qui a toujours cherché à les conserver tout en en augmentant leur nombre. Cela n’a pas toujours été facile : beaucoup de ses territoires ont perdu momentanément leur statut de métochion avant de le retrouver, et ce à plusieurs reprises.

Le réseau commercial

13Pour faciliter le voyage des moines vers leurs métochia ainsi que l’exportation de leur production, a été mis en place un système d’exemption fiscale maritime. Nous verrons que cela a vite transformé le réseau des métochia en un véritable réseau commercial.

14Nous ne présentons que d’une façon très rapide et simplifiée les questions de fiscalité, l’intérêt pour notre propos étant que nous nous concentrions sur les lieux mentionnés dans ces actes et qu’ainsi nous définissions les lieux visités par les moines.

  • 18 Era L. Vranoussi, op. cit., 1980, n° 7.
  • 19 Era L. Vranoussi, op. cit., 1980, n° 11.
  • 20 Era L. Vranoussi, op. cit., 1980, n° 7, 8, 9, 11 et 22.
  • 21 Era L. Vranoussi, op. cit., 1980, n° 22.
  • 22 Era L. Vranoussi, op. cit., 1980, n° 11.
  • 23 Nous renvoyons pour la période antérieure à 1204 à l’ouvrage d’Élisabeth Malamut, Les îles de l’emp (...)

15L’évolution de la fiscalité maritime de Patmos peut se scinder en différentes périodes. La première période commence dès la fondation du monastère et va jusqu’en 1204. En 1088, les moines ne sont d’abord exemptés que d’impôts et de charges dites secondaires, et doivent toujours payer les impôts principaux (antinavlon, kommerkion18). Puis, progressivement, l’exemption se généralise et devient totale en 1186, avec la dernière exemption accordée par l’empereur Isaac II Ange19. Pendant cette période cinq actes ont été émis concernant la fiscalité maritime20. Cependant, trois de ces documents ne donnent pas d’informations sur les lieux visités par les moines : en effet, les limites de l’Empire n’étant pas encore remises en cause, les empereurs se contentent de préciser, dans les actes, que les moines ont l’autorisation de circuler dans toutes les régions et les îles de l’Est et de l’Ouest de l’Empire byzantin. Si ces informations ne nous renseignent guère sur les lieux fréquentés par les moines, néanmoins un document de 117621 donne des informations sur les exportations des moines depuis la Crète, et un autre document, de 119722, qui reconduit toutes les exemptions précédentes, ajoute que désormais les moines n’auront plus droit qu’à un seul voyage par an totalement défiscalisé, à destination de Constantinople. En effet, les moines avaient besoin de se rendre souvent à Constantinople pour des affaires commerciales et administratives, par exemple pour demander ou renouveler les actes concernant les faveurs dont ils bénéficiaient. Par ailleurs, ce document est aussi très important, car il mentionne pour la première fois l’autorisation accordée aux moines d’utiliser leurs navires pour commercer, même si, bien entendu, ils n’avaient pas attendu ce chrysobulle pour le faire23.

16À partir de 1204, l’Empire byzantin se morcelle. En effet, à la suite de la prise de Constantinople par les Latins au cours de la quatrième croisade, un traité, la Partitio Romaniae procède au partage de l’Empire. Ce qu’il faut souligner pour comprendre l’évolution de Patmos, c’est que les empereurs byzantins se trouvent désormais en Asie Mineure avec, comme nouvelle capitale, Nicée, et que la Romanie vénitienne – c’est-à-dire le domaine colonial vénitien – connaît une expansion de son territoire grâce à de nouvelles acquisitions telles que la Crète. Par conséquent, les différentes possessions de Patmos se retrouvent à partir de cette époque sous plusieurs dominations politiques et Patmos doit de fait négocier avec différents interlocuteurs pour pouvoir continuer à circuler librement.

  • 24 Era L. Vranoussi, op. cit., 1980, n° 23.
  • 25 Era L. Vranoussi, op. cit., 1980, n° 24.

17Dès lors, ce n’est plus à Constantinople que se rendent fréquemment les moines pour négocier de nouveaux droits, mais à Nicée. De façon générale, Patmos a dû, au xiiie siècle, développer de nombreux liens avec l’Asie Mineure. Dans la promulgation de leurs textes, les frontières de l’Empire byzantin ayant été redéfinies, les empereurs doivent maintenant désigner de façon plus précise les ports visités par les moines. Ainsi, dans une ordonnance de 121424, l’Empereur Théodore Ier Laskaris stipule que les moines peuvent faire usage des ports de la côte micrasiatique : « les ports d’Anaia, Phygéla, Linopéramata, Smyrne, Palatia, Ieron, Mélanoudion et d’autres ports de l’Empire », et cela, précise l’empereur, sans risquer d’être inquiétés par les ducs des thèmes de Thrace, de Mylasa et du Mélanoudion. En 1244, Jean III Doukas Vatatzès renouvelle l’acte25 de son prédécesseur et précise que les percepteurs d’Anaia, de Palatia, de Strobèlos, d’Éphèse, du Mélanoudion et de Samson ne pourront pas taxer les moines. Par rapport à l’ancienne liste, trois nouveaux lieux sont notifiés : Strobèlos, Éphèse et Samson. Toutefois, cela doit être assorti de la remarque qu’il ne s’agit pas d’une liste exhaustive, mais seulement de celle de ports où les moines avaient rencontré des difficultés à faire respecter leurs droits.

  • 26 Era L. Vranoussi, op. cit., 1980, n° 39.

18Après 1261, au moment de la reconquête de Constantinople, les empereurs renouent avec les anciennes formules génériques et ne donnent plus de précisions. Ainsi en est-il des documents édités en 1264, 1269, 1280 et 1283. Le seul acte plus précis date de 127126 : Michel VIII Paléologue mentionne différents lieux, à la suite d’une demande spécifique faite par les moines en vue d’être protégés des réclamations d’officiers de l’État dans les ports de Palatia, Traphos et, ailleurs, sur la côte d’Asie Mineure, notamment dans le Mandragourion et le long du Méandre. Cela prouve que, même après le retour des empereurs à Constantinople, les moines ont conservé des relations privilégiées avec la côte micrasiatique.

  • 27 C. A. Maltezou, « Τὰ λατινικὰ ἕγγραφα τοῦ Πατμιακοῦ ἀρχείου », Σύμμεικτα, n° 2, 1970, p. 350-351.

19Nous venons de voir ce qu’il en était des territoires de Patmos sous domination byzantine. Pour une partie de ses dépendances et de ses trajets, Patmos devait également en référer à Venise, puisque depuis le début du xiiie siècle la Crète est vénitienne. La République de Saint-Marc accorde à Patmos des privilèges beaucoup plus ciblés. Tous les actes édictés à l’égard de cette île durant cette période concernent les exports de blé depuis la Crète et le métochion de Stylos en Crète. Patmos est citée pour la première fois dans les archives vénitiennes en 1219, puis vient une série d’actes et de renouvellements d’actes – en 1271, 1307 et 1385 – qui concernent le droit d’exporter, sans frais, 1 000 mesures de blé depuis la Crète27. Et il ne faut pas oublier que toutes ces négociations ont lieu parallèlement à celles faites auprès des empereurs byzantins.

  • 28 Era L. Vranoussi, op. cit., 1980, n° 45.

20Autre temps fort dans la politique, qui aura des répercussions directes sur la diplomatie de Patmos : la chute de Constantinople en 1453. Le dernier acte qui émane d’un empereur byzantin est édicté en 144828. À partir de ce moment, Patmos doit désormais composer avec les Vénitiens et les Ottomans. Il leur arrive aussi, ponctuellement, de traiter avec d’autres puissances latines telles que les chevaliers de Rhodes, mais nous ne traiterons pas de ces cas dans cet article.

  • 29 C. A. Maltezou, « Τα πλοῖα τῆς Μονῆς Πάτμου (16ος-17ος αἰώνας », Διεθνὲς συμπόσιο πρακτικὰ, Ἱερα Μο (...)
  • 30 Id.
  • 31 Id.

21Pour ce qui est de ses rapports avec Venise, il s’agit toujours de ses possessions en Crète et des trajets effectués jusqu’à Venise. En 1574, Patmos obtient du doge de Venise que ses bateaux ne soient pas plus taxés que ceux de la République de Venise29. Puis, en 1577, on apprend que, sur les quatre bateaux que possédait le monastère, trois exécutaient un voyage par an à Venise et payaient un droit de douane de 35 ducats30. Ils parviennent en 1578 à obtenir le droit de ne plus payer désormais que la moitié de ce que payaient les autres bateaux étrangers31.

  • 32 Nicolas Vatin, « Les Patmiotes contribuables ottomans xve-xviie siècles », Turcica, 38, 2006, p. 12 (...)

22Et en ce qui concerne le reste de son territoire, Patmos a dû négocier avec l’Empire ottoman. Bien qu’il ne s’agisse pas, à proprement parler, de fiscalité maritime, Patmos a su garder un statut fiscal général d’exception, qu’a étudié Nicolas Vatin32. En 1453, Mehmet II demande à l’île de payer 40 florins – il faut savoir que Chios et Lesbos payaient respectivement 6 000 et 4 000 florins ; cependant, cela n’est pas considéré comme une taxe, mais comme un tribut que doit payer une minuscule puissance tributaire du sultan, et les moines se déplaçaient eux-mêmes pour payer leur tribut, en même temps que les autres puissances tributaires du sultan.

23Il s’opère donc une superposition du réseau des métochia et du réseau commercial, l’un complétant l’autre. D’ailleurs, lorsqu’un territoire perd le statut de métochion du monastère de Saint-Jean-le-Théologien, Patmos ne change pas ses habitudes et garde ses relations avec ses anciens territoires, mais dans une dynamique désormais commerciale. On a pu aussi observer que les échanges commerciaux précédaient parfois l’appartenance d’un territoire au monastère. Ces réseaux insèrent Patmos dans son environnement naturel qu’est le Sud-Est de la mer Égée, au point qu’on peut parler d’une aire d’influence de Patmos, puisque à ces échanges commerciaux se superposent aussi des échanges culturels et artistiques.

Bref aperçu de l’activité économique maritime de Patmos

  • 33 Franz Miklosich, Joseph Muller, Acta et diplomata graeca Medii Aevi sacra et profana. Acta et diplo (...)
  • 34 Franz Miklosich, Joseph Muller, op. cit., 1890, p. 229-233.

24L’existence de ces réseaux a permis le développement à Patmos d’activités économiques. Le but premier de ces dispositions fiscales avantageuses est de permettre le rapatriement des productions agricoles des métochia, essentiellement le blé, qui fonctionnent en quelque sorte comme l’arrière-pays de Patmos. Quand les besoins de l’île et de ses métochia sont satisfaits, le surplus est exporté en bateau pour être vendu ailleurs. À côté de ces produits agricoles, les moines en vendaient aussi d’autres, tels que des denrées alimentaires transformées et des objets issus de l’artisanat. Ainsi, dans un document daté entre 1088 et 1092, on apprend que les moines vendaient à Constantinople de la viande séchée et du fromage33. Dans le testament de l’higoumène Germanos de 1271, il est fait état de ventes par les moines de chaussures et de chaussettes34. Différents chrysobulles et différents actes de fonctionnaires mentionnent aussi la vente de vin de leurs vignobles.

  • 35 Era L. Vranoussi, op. cit., 1980, n° 11.
  • 36 Maria Nystazopoulou-Pélékidou, Les couvents de l’espace égéen et leur activité maritime xe-xiiie s.(...)
  • 37 Patricia Karlin-Hayter, Christodoulos : Rule, Testament and Codicil of Christodoulos for the Monast (...)
  • 38 Maria Nystazopoulou-Pélékidou, op. cit., 2008, p. 120.
  • 39 Guillaume Saint-Guillain, « L’Apocalypse et le sens des affaires, Les moines de Saint-Jean de Patmo (...)

25Très vite, le commerce s’étend à des marchandises qui ne sont pas produites par les habitants de Patmos. Dans un chrysobulle de 119735, il est fait mention d’une nouvelle restriction concernant celles qui étaient prohibées, par exemple la soie, les métaux précieux, et les tissus teints en pourpre. Cette nouvelle interdiction peut laisser entendre qu’un tel commerce était pratiqué par certains armateurs de Patmos36. Plus que de favoriser une démarche visant à générer les gains suffisants pour importer des produits non disponibles sur l’île, ce dispositif fiscal a permis très tôt d’engendrer de réels bénéfices. D’ailleurs, certains bateaux du monastère firent l’objet d’un usage purement lucratif. Dans son testament, en 1093, Christodoulos mentionne que le monastère possède quatre bateaux, dont deux pistikévomena : autrement dit, ils sont confiés à des laïcs pour une exploitation strictement commerciale. Il mentionne un bateau de grande capacité et deux cents chiata nomismata, confiés à un certain Jean Pankas, et un bateau de plus petite capacité, ainsi que quarante-deux hyperpera nomismata, confiés à Basile Euripiotès37. Maria Nystazopoulou-Pélékidou pense que ces sommes d’argent étaient prêtées pour permettre aux armateurs de les faire fructifier en menant à bien des affaires commerciales38. Dans d’autres cas, les bateaux du monastère ont simplement servi de moyen de transport : ainsi pouvait-on voir un moine du monastère de Saint-Jean-le-Théologien et son personnel naviguant patmiote, transporter d’un lieu à l’autre pour le compte d’un autre, contre compensation financière39, une marchandise qu’ils n’avaient pas achetée eux-mêmes.

Évolution du peuplement de l’île

26Après avoir évoqué l’élaboration du réseau extérieur de Patmos, il convient de s’intéresser au développement de l’île, à proprement parler. La documentation concernant les lieux d’habitation des laïcs étant très pauvre pour la période byzantine, il est extrêmement difficile de retracer l’histoire du premier foyer d’habitation pendant cette période.

  • 40 Patricia Karlin-Hayter, op. cit., 2000, p. 584.
  • 41 Élisabeth Malamut, « Patmos, Christodule et l’avenir de l’île au xiie siècle », in Y. Codou et M. L (...)
  • 42 Franz Miklosich, Joseph Muller, op. cit., 1890, p. 144-149.
  • 43 Patricia Karlin-Hayter, op. cit., 1977, p. 208.
  • 44 Franz Miklosich, Joseph Muller, op. cit., 1977, p. 229-233.

27Les premiers habitants laïcs de l’île sont les parèques du monastère. Pour encourager la venue de travailleurs à Patmos, le monastère revient vite sur l’idée d’interdire l’accès de l’île aux femmes et donne l’autorisation à ses parèques de venir s’installer avec leurs familles. Leur implantation est très bien circonscrite pour que soit évité tout contact entre elles et les moines : elles ont le droit de s’installer dans la partie nord de l’île, depuis le cap Baïos jusqu’à Saint-Nicolas d’Eudèlos et jusqu’à Sainte-Marina40. Les hommes, quant à eux, doivent rester et travailler au monastère cinq jours par semaine et peuvent retourner auprès de leur famille les deux autres jours41. Mais ce premier lieu d’habitation est très exposé à la menace des raids de pirates, ce qui oblige très vite ses habitants à le quitter. Un document du xie siècle autorise déjà les laïcs de l’île à s’installer temporairement dans l’enceinte du monastère pour se protéger, en cas de besoin, contre ces raids42. P. Karlin-Hayter souligne que, dans ce même document, les travailleurs pouvaient désormais rentrer chez eux chaque soir, et non plus attendre pour cela la fin de la semaine, ce qui implique une diminution de la distance entre le monastère et le foyer d’habitation43. Cette dynamique génère la formation, au pied du monastère, de ce qui fut jusqu’au xixe siècle l’unique foyer d’habitation de l’île, et qui devint la ville de Chora, dont la première mention figure, en 1272, dans le testament de l’higoumène Germanos44.

  • 45 L’analyse de ces documents a donné lieu à la thèse de doctorat d’Evdokia Olymbitou, Η oργάνωση του (...)
  • 46 Dimitris Dimitropoulos, op. cit., 2004, p. 118.

28Malheureusement, nous ne disposons pas d’autre information concernant la ville à l’époque byzantine et il faut attendre la période ottomane pour avoir des éléments concrets45. La commune de Chora à Patmos ne fait pas exception, car on observe dans les autres petites îles de la mer Égée un développement comparable. Le nom de Chora lui-même n’est pas unique, puisque dans toutes les petites îles de l’espace égéen, la « capitale » de l’île avait pour nom Chora. La configuration de ces espaces obligeait souvent les populations locales à se regrouper en un même lieu et à y concentrer toutes leurs activités. Ainsi, comme le souligne Dimitris Dimitropoulos, cette concentration de fonctions et d’activités en un même point de l’île, indépendamment de la taille et de la forme de l’agglomération formée, prenait inévitablement un caractère urbain46.

  • 47 Evdokia Olymbitou, op. cit., 1997, p. 140.
  • 48 Evdokia Olymbitou, « Η συγκρότηση ενός νησιωτικού οικισμού : Η Χώρα της Πάτμου κατά την περίοδο της (...)
  • 49 Evdokia Olymbitou, op. cit., 1997, p. 140.
  • 50 Id., p. 140, 144.

29Dans cette optique, nous mettrons l’accent sur la répartition des activités économiques de l’île, qui diffère des modèles observables dans les autres petites îles. Ces aspects ont déjà été étudiés par Evdokia Olymbitou : nous n’en ferons donc ici qu’une présentation succincte. Dans les archives du xviie siècle, on peut lire que Chora regroupe surtout les ateliers (εργαστήρια47), terme par lequel on désigne le lieu de travail des artisans. Ces lieux peuvent aussi servir parfois à la vente de biens et de nourriture48. Jusqu’au xviie siècle, les ateliers étaient situés à la périphérie de la ville de Chora, vers Lotza, près de Saint-Georges et dans le quartier d’Alloteinon49. Cette situation perdure jusqu’au xviiiesiècle, époque à laquelle les ateliers s’installent dans la rue centrale. L’autre lieu qui se développe est le port de Skala, qui restera inhabité jusqu’au xixe siècle. Skala est souvent décrite, dans les récits de voyageurs, comme le lieu de concentration des magasins (μαγαζιά), c’est-à-dire des infrastructures de stockage50. La fonction principale de ces bâtiments est de stocker les marchandises avant qu’elles ne soient réexpédiées ailleurs, avec d’autres produits locaux. Souvent, en effet, Patmos n’est pas la destination finale de l’expédition, mais une étape entre l’Anatolie et l’Occident, et inversement. Cela dit, rien n’empêche que parallèlement à cette activité de stockage, les marchands-intermédiaires, et parfois même certains particuliers, aillent acheter directement dans ces magasins des marchandises en grosse quantité, pour les revendre ensuite à Chora.

  • 51 Evdokia Olymbitou, op. cit., 2003, p. 135.
  • 52 Dimitris Dimitropoulos, op. cit., 2004, p. 118.
  • 53 Evdokia Olymbitou, op. cit., 1997, p. 150.

30Le reste de l’île demeure inhabité jusqu’au xixe siècle51. Comme dans les autres îles de l’espace égéen, la population a longtemps été regroupée en un seul endroit et dans le reste de l’île une partie des terres était dévolue à l’agriculture. Comme ces terres étaient difficiles d’accès depuis Chora, les familles disposaient souvent d’un logis au confort rudimentaire, situé près des terres cultivées, et dans lequel elles ne séjournaient que le temps des travaux agricoles52. Si dans la plupart des îles le secteur de l’agriculture représentait une part majoritaire de l’économie, tel n’était pas le cas à Patmos. Une partie de sa population était certes engagée dans ce secteur, mais du fait, d’une part, du faible rendement de la terre et des besoins d’importation et, d’autre part, des facilités que les réseaux commerciaux des moines donnaient aux habitants, une très grande partie d’entre eux était engagée dans le commerce maritime53.

Les spécificités de l’île-ville de Patmos

  • 54 H. Galinié, op. cit., 2000, p. 51.
  • 55 H. Galinié, op. cit., 2000, p. 51.

31Il convient à présent de revenir sur le processus qui a permis d’aboutir à la situation que nous avons décrite précédemment. Cela demande donc de nous interroger sur l’influence du mode de développement propre à Patmos, induit par des conditions initiales d’implantation spécifiques, puisque, comme le soulignait Henri Galiné54, chaque configuration urbaine est le résultat d’un processus singulier. Précisons encore qu’une telle étude, tout en tenant compte de l’« infinie complexité » du processus, doit nécessairement opérer une sélection des éléments à analyser, ne serait-ce qu’en raison de la disponibilité et du contenu des sources55. Nous avons donc choisi d’étudier ce processus par le biais de l’étude des activités commerciales, et de voir ainsi comment elles se lisent dans l’aménagement spatial de Patmos.

  • 56 Evdokia Olymbitou, op. cit., 1997, p. 139.

32Dans la ville de Chora, les échanges commerciaux occupent peu d’espaces particuliers : on ne trouve de marché ni ouvert ni couvert, ni plus qu’une seule rue commerciale identifiée par une concentration de magasins, et ce jusqu’au xixe siècle56. Les lieux qui font office de magasins ne sont pas uniquement consacrés à la vente, mais recouvrent également des ateliers. De surcroît, ils sont situés en dehors du cœur de la ville jusqu’au xviiie siècle. En revanche, le port de Patmos est d’une relative importance, dans la mesure où il est l’un des plus importants du Sud-Est du bassin égéen. Il regroupe plusieurs structures de stockage très importantes, dont l’activité de vente n’est que secondaire, ce qui illustre encore le fait que l’activité de Patmos est surtout tournée vers l’extérieur. Cette activité commerciale, qui a su profiter du réseau monastique, s’est développée autour de l’import-export. Par ailleurs, Patmos n’a pas été qu’une destination finale, elle a aussi assuré le rôle de plateforme de transit.

33On constate donc que l’activité commerciale marque le territoire de Patmos et génère l’installation des infrastructures nécessaires, toutefois essentiellement tournées vers l’extérieur. Mais on ne retrouve pas à Chora, pendant longtemps, les structures commerciales traditionnelles que l’on peut observer dans d’autres villes de la Méditerranée qui ont connu une activité commerciale aussi dynamique.

34L’importance d’un port tourné principalement vers l’extérieur de l’île doit attirer notre attention sur la signification qu’a pour Patmos le réseau commercial. Il en ressort donc la nécessité de dépasser l’espace défini par la notion de ville pour considérer Patmos dans le cadre d’une échelle régionale.

  • 57 Thierry Dutour, op. cit., 2003, p. 24 et 134.

35Les premiers nœuds du réseau se sont constitués avec les réseaux des métochia, c’est-à-dire autour de la question de la nourriture nécessaire pour assurer la survie des habitants de l’île. En cela, on peut constater une certaine similitude avec le fonctionnement d’autres villes qui, comme le rappelle Thierry Dutour, ne se nourrissent pas de leurs propres ressources et, par conséquent, sont obligées de tisser des liens importants avec la campagne et génèrent ainsi beaucoup d’allers et retours entre la ville et la campagne57. Peut-on dès lors considérer les métochia comme la « campagne » de Patmos ? Pour pouvoir répondre à cette question, il est nécessaire de considérer séparément chaque métochion. Car si certains restent de simples territoires agricoles jouxtant un monastère secondaire, d’autres se développent au point de soulever cette autre question : ne seraient-ils pas des pôles secondaires de Patmos ? Il suffit alors de penser au métochion de Stylos qui a assumé dans une certaine mesure un rôle politique, puisqu’il s’est occupé de toutes les tractations avec Venise.

36Cela nous amène donc à concevoir Patmos comme le pôle principal et central d’un réseau, qui constituerait « la ville ». Les métochia formeraient alors, pour une minorité d’entre eux, un ensemble de pôles secondaires qui assurerait des activités économiques, voire politiques, alors que d’autres ne seraient que les domaines agricoles du monastère. On aboutirait alors au schéma de fonctionnement caractéristique d’une « île-ville » dont les limites naturelles imposées par son insularité sont insuffisantes pour lui permettre d’assurer sa survie.

37Précisons encore que, longtemps, le monastère a assuré l’administration de l’île, et qu’il a également mené les négociations diplomatiques nécessaires à garantir sa pérennité, mais aussi à construire son réseau dans le Sud-Est de la mer Égée. Durant cette période, l’île de Patmos a bénéficié d’une certaine autonomie à l’égard de l’Empire byzantin puis ottoman, ce qui ajoute à son statut d’« île-ville » commerciale une dimension politique qui peut laisser penser que Patmos fut presque une « île-État », pour ne pas dire une certaine forme de « cité-État », présentant de nombreuses particularités propres à la singularité de son histoire.

38Tout le développement de l’île de Patmos peut sembler un peu paradoxal, si on se réfère à la volonté première des moines. En effet, ces derniers s’étaient installés sur l’île afin de pouvoir limiter tout contact avec le monde extérieur. Or, très rapidement et pendant plusieurs siècles, on voit se déployer en contrebas du monastère toute une ville. De surcroît, le monastère se trouve lui-même à la tête d’un véritable réseau commercial et diplomatique.

39Le cas de Patmos semble conforter l’absence de consensus sur ce que serait la définition d’une ville au Moyen Âge, et plaide plutôt en faveur de l’idée qu’il existerait de nombreuses déclinaisons du concept. Si Patmos s’apparente à une ville de type insulaire dont l’entité politique est un monastère, de nombreuses particularités de son développement et de son fonctionnement en font bien souvent un cas particulier.

40L’« île-ville » a dû en effet s’étendre en dehors des limites imposées par son insularité afin de pouvoir garantir sa survie, ce qui favorisa son développement et, de fait, elle a élaboré son propre réseau dans le Sud-Est égéen, dont elle constitue le nœud principal. Ce développement a généré l’évolution singulière de la ville de Chora, au pied du monastère, et a induit un fonctionnement particulier à partir de métochia. Mais l’importance de la diplomatie dans l’élaboration de ce système n’est pas non plus à négliger, puisqu’elle illustre toute l’autonomie dont bénéficiait l’île, qui peut suggérer que Patmos s’apparenterait presque autant à une « cité-État » qu’à une « île-ville ».

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Notes

1 Maria Nystazopoulou-Pélékidou, Βυζαντινὰ ἕγγραφα τῆς μονῆ Πάτμου, 2, Δημοσίων λειτουργῶν, Athènes, Ινστιτούτο Βυζαντινών Ερευνών, Εθνικό Ίδρυμα Ερευνών, 1980, n° 51.

2 Henri Galinié, Ville, espace urbain et archéologie, Tours, Maison des Sciences de la Ville de l’Urbanisme et des Paysages, 2000, p. 118.

3 Thierry Dutour, La ville médiévale : origines et triomphe de l’Europe urbaine, Paris, O. Jacob, 2003, p. 23.

4 Bernard Lepetit, Denise Pumain, Temporalités urbaines, Paris, Anthropos, 1999, p. 304.

5 Pierre Garmy, Villes, réseaux et systèmes de villes : contribution de l’archéologie, Paris, Éd. Errance, 2012, p. 185.

6 Dimitris Dimitropoulos, « Les sociétés insulaires de la mer Égée au temps de la domination ottomane : routes communes et trajectoires séparées », The Historical Review/Revue historique, n° 1, 2004, p. 115.

7 Patricia Karlin-Hayter, « Notes sur les archives de Patmos comme source pour la démographie et l’économie de l’île », in F. Thiriet, dir., Les îles de l’empire byzantin, Amsterdam, Verlag Adolf M. Hakkert, Byzantinische Forschungen, n° 5, 1977, p. 192.

8 Era L. Vranoussi, Βυζαντινὰ ἕγγραφα τῆς μονῆ Πάτμου, 1, Αὐτοκρατορικά, Athènes, Ινστιτούτο Βυζαντινών Ερευνών, Εθνικό Ίδρυμα Ερευνών, 1980.

9 Metochion : a monastic establishment (usually small), subordinate to a larger independent monastery. […] Metochia were frequently founded in the countryside near monastic properties located at some distance from the monastery, to facilitate the supervision of the estates. They were also established in cities as an urban base of operations for the monastery and as a residence for monks visiting the city for business or other purposes. As few as one or two monks might live in a metochion on a permanent basis ; they were under the jurisdiction of the hegoumenos of the controlling monastery and followed its rule […], A. P. Kazhdan, The Oxford dictionary of Byzantium, New York, Oxford University Press, 2005, p. 1356.

10 Era L. Vranoussi, op. cit., 1980, n° 6.

11 K. Smyrlis, 2006, p. 73, note 379.

12 Era L. Vranoussi, op. cit., 1980, n° 21.

13 K. Smyrlis, 2006, p. 77.

14 Era L. Vranoussi, op. cit., 1980, n° 17.

15 K. Smyrlis, 2006, p. 77 et Era L. Vranoussi, op. cit., 1980, n° 17.

16 Era L. Vranoussi, op. cit., 1980, n° 16.

17 Era L. Vranoussi, op. cit., 1980, n° 44.

18 Era L. Vranoussi, op. cit., 1980, n° 7.

19 Era L. Vranoussi, op. cit., 1980, n° 11.

20 Era L. Vranoussi, op. cit., 1980, n° 7, 8, 9, 11 et 22.

21 Era L. Vranoussi, op. cit., 1980, n° 22.

22 Era L. Vranoussi, op. cit., 1980, n° 11.

23 Nous renvoyons pour la période antérieure à 1204 à l’ouvrage d’Élisabeth Malamut, Les îles de l’empire byzantin, Paris, Publications de la Sorbonne, 1988, II, p. 446-453.

24 Era L. Vranoussi, op. cit., 1980, n° 23.

25 Era L. Vranoussi, op. cit., 1980, n° 24.

26 Era L. Vranoussi, op. cit., 1980, n° 39.

27 C. A. Maltezou, « Τὰ λατινικὰ ἕγγραφα τοῦ Πατμιακοῦ ἀρχείου », Σύμμεικτα, n° 2, 1970, p. 350-351.

28 Era L. Vranoussi, op. cit., 1980, n° 45.

29 C. A. Maltezou, « Τα πλοῖα τῆς Μονῆς Πάτμου (16ος-17ος αἰώνας », Διεθνὲς συμπόσιο πρακτικὰ, Ἱερα Μονὴ ἁγίου Ἱωάννου τοῦ Θεολόγου, 900 χρόνια ίστορικῆς μαρτυρίας 1088-1988, Athènes, Ἑταιρεία Βυζαντινῶν καί μεταβυζαντινῶν μελετῶν, 1989, p. 118.

30 Id.

31 Id.

32 Nicolas Vatin, « Les Patmiotes contribuables ottomans xve-xviie siècles », Turcica, 38, 2006, p. 123-153.

33 Franz Miklosich, Joseph Muller, Acta et diplomata graeca Medii Aevi sacra et profana. Acta et diplomata monasteriorum et ecclesiarum Orientis : Diplomata et acta Monasterii Sancti Joannis Theologi in Patmo insula, 6, Vienne, C. Gerold, 1890, p. 146.

34 Franz Miklosich, Joseph Muller, op. cit., 1890, p. 229-233.

35 Era L. Vranoussi, op. cit., 1980, n° 11.

36 Maria Nystazopoulou-Pélékidou, Les couvents de l’espace égéen et leur activité maritime xe-xiiie s., Byzantina Symmeikta, 2008, vol. 15, p. 123.

37 Patricia Karlin-Hayter, Christodoulos : Rule, Testament and Codicil of Christodoulos for the Monastery of St. John the Theologian on Patmos, J. Thomas, A. Constantinides Hero, éd., Byzantine Monastic Foundation Documents, Washington, Dumbarton Oaks, 2000, p. 595 et Maria Nystazopoulou-Pélékidou, op. cit., 2008, p. 120.

38 Maria Nystazopoulou-Pélékidou, op. cit., 2008, p. 120.

39 Guillaume Saint-Guillain, « L’Apocalypse et le sens des affaires, Les moines de Saint-Jean de Patmos, leurs activités économiques et leurs relations avec les Latins (xiiie et xive siècles) », in D. Coulon, C. Otten-Froux, P. Pagès, D. Valérian, éd., Chemins d’outre-mer. Études sur la Méditerranée médiévale offertes à Michel Balard, Paris, Byzantina Sorbonensia, 2004, II, p. 777-778.

40 Patricia Karlin-Hayter, op. cit., 2000, p. 584.

41 Élisabeth Malamut, « Patmos, Christodule et l’avenir de l’île au xiie siècle », in Y. Codou et M. Lauwers, éd., Lérins, une île sainte de l’Antiquité au Moyen Âge, Collection d’Études Médiévales de Nice, 9, Turnhout, Brepols, 2005, p. 354-356.

42 Franz Miklosich, Joseph Muller, op. cit., 1890, p. 144-149.

43 Patricia Karlin-Hayter, op. cit., 1977, p. 208.

44 Franz Miklosich, Joseph Muller, op. cit., 1977, p. 229-233.

45 L’analyse de ces documents a donné lieu à la thèse de doctorat d’Evdokia Olymbitou, Η oργάνωση του χώρου στο νησί της Πάτμου, thèse de doctorat à l’Université d’Athènes, 1997.

46 Dimitris Dimitropoulos, op. cit., 2004, p. 118.

47 Evdokia Olymbitou, op. cit., 1997, p. 140.

48 Evdokia Olymbitou, « Η συγκρότηση ενός νησιωτικού οικισμού : Η Χώρα της Πάτμου κατά την περίοδο της οθωμανικής κατάκτησης », in Πληθυσμοί και οικισμοί του ελληνικού χώρου, Ιστορικά μελετήματα, Athènes, ΙΝΕ/ΕΙΕ, Τετράδια Εργασίας, n° 18, 2003, p. 156-157.

49 Evdokia Olymbitou, op. cit., 1997, p. 140.

50 Id., p. 140, 144.

51 Evdokia Olymbitou, op. cit., 2003, p. 135.

52 Dimitris Dimitropoulos, op. cit., 2004, p. 118.

53 Evdokia Olymbitou, op. cit., 1997, p. 150.

54 H. Galinié, op. cit., 2000, p. 51.

55 H. Galinié, op. cit., 2000, p. 51.

56 Evdokia Olymbitou, op. cit., 1997, p. 139.

57 Thierry Dutour, op. cit., 2003, p. 24 et 134.

Auteur

Aix Marseille Univ, CNRS, LA3M, Aix-en-Provence, France

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