Introduction
p. 5-7
Texte intégral
1L’idée d’organiser un colloque international sur les villes en Méditerranée au Moyen Âge et à l’Époque Moderne est née des réflexions menées au cours d’un séminaire de recherche organisé entre 2010 et 20121. Gilbert Buti et Paolo Odorico se sont joints à ce projet, auquel a participé un comité scientifique très actif2. Que ses membres trouvent ici toute notre gratitude pour la qualité de leur réflexion, l’aide précieuse qu’ils nous ont apportée et le choix des communications présentées.
2Le colloque international « Villes en Méditerranée au Moyen Âge et à l’Époque Moderne », tenu du 24 au 27 septembre 2014 à la Maison Méditerranéenne des Sciences de l’Homme (Aix-en-Provence) et au MuCEM (Marseille), a été organisé par les laboratoires de recherche de la MMSH : le LA3M et TELEMME, et l’EHESS. Il a été inauguré par Monsieur Yvon Berland, Président de l’Université d’Aix-Marseille, et introduit par Madame Brigitte Marin, directrice du LabexMed. Tous nos remerciements vont aux institutions3 qui nous ont aidés à financer l’organisation de cette manifestation, qui a tenu toutes ses promesses sur le plan scientifique, par la rencontre de nombreux spécialistes de l’histoire des villes dans le monde méditerranéen, une participation distinguée de jeunes chercheurs et de doctorants, et la fréquentation d’un public plus large. On retient de ce colloque un débat très riche et des réflexions qui nourrissent l’actualité de la recherche, à l’heure où le thème de la cité occupe une place remarquable.
3 L’histoire de la Méditerranée est souvent écrite par le biais de l’histoire des relations entre ses cités : Rome et Carthage, Venise et Gênes, Marseille et Alger. C’est dire combien le phénomène urbain occupe une place prépondérante dans la construction d’une Méditerranée comme espace historique et culturel.
4Une histoire de ces villes renvoie à une approche géographique, morphologique, topographique et climatique, ce qui invite à s’interroger sur la pluralité des modèles de villes et sur leur évolution sur une longue période, allant de la fin de l’Antiquité jusqu’au début du xixe siècle. À côté de cités ayant acquis dès l’Antiquité une place remarquable, dont on analysera la permanence et les évolutions aux époques médiévale et moderne, d’autres ont émergé au cours de cette période, qu’il s’agisse de créations nouvelles ou de petits centres ayant connu une nouvelle fortune. Les « îles-villes », une spécificité méditerranéenne, offrent également un observatoire intéressant et original d’analyse du phénomène urbain.
5Notre objectif était double : d’abord celui de décloisonner les champs de la recherche, à l’heure où la pluridisciplinarité est devenue une nécessité, en associant historiens, historiens de l’art, archéologues et architectes à cette démarche comparatiste. Ensuite, celui de dépasser les bornes chronologiques traditionnelles, en réunissant médiévistes et modernistes, et en proposant une analyse du phénomène urbain dans la Méditerranée sur le temps long. Se dessine ainsi progressivement à travers cette idée de la longue durée une vision synoptique, qui justifie les deux périodes concernées et constitue un apport nouveau dans le champ historiographique. Il semblait donc intéressant de partir des questions actuelles sur les articulations entre époques médiévale et moderne, pour réfléchir à l’évolution des réseaux urbains. Comment s’est peu à peu formée une mémoire des lieux dans l’espace urbain considéré sur le temps long ?
6La perspective pluridisciplinaire a permis de dégager trois axes de réflexions, qui sont en même temps complémentaires. Le thème de « La Méditerranée des villes » a constitué une première approche. Des contributions ont porté sur des villes, aussi bien de petite que de grande taille, qui ont joué le rôle de plaque tournante et de point de convergence de réseaux terrestres et maritimes. Ces réseaux parfois étendus et complexes ont enrichi ces centres urbains et y ont attiré de nouvelles populations, qui ont contribué à leur développement et à leur dynamisme. La question du degré de participation des pouvoirs politiques à cette évolution est examinée à travers plusieurs exemples, qu’il s’agisse de cités érigées en capitales ou de villes portuaires, dont ces pouvoirs tirent des revenus substantiels des taxes imposées aux transactions commerciales et aux marchandises de transit. Une attention particulière est portée à l’évolution des villes sur le temps long et les différentes étapes qui ont laissé des traces visibles dans le paysage urbain, tout en façonnant une mémoire urbaine sans cesse bouleversée et réécrite.
7 Une deuxième thématique est consacrée aux « Villes de la Méditerranée ». S’appuyant sur l’étude d’une cité en particulier (Gênes, Marseille, Rome, Candie), ou sur un ensemble de centres urbains comportant des caractéristiques communes (Italie centrale, Castille), les communications mettent en relief l’inscription du pouvoir dans l’espace urbain, aussi bien du point de vue de l’urbanisme, en particulier par la construction de palais ou d’édifices publics, que de l’organisation politique et de la mise en place d’institutions de gouvernement visant à la fois à asseoir leur autorité sur la ville et à assurer l’ordre public et la paix sociale. Ce même pouvoir politique encourage, accompagne et en même temps cherche à maîtriser l’extension du territoire urbain et l’augmentation de la population.
8Enfin, c’est aux populations des villes méditerranéennes que la troisième et dernière thématique s’intéresse. Les communications portent sur l’impact des mobilités sur les villes, sur le brassage de populations des villes-frontières, mais également sur les phénomènes d’intégration et d’exclusion dans les cités méditerranéennes et leurs conséquences à la fois sur le tissu urbain et l’organisation sociale. Lieu de vie et de travail, la ville est aussi pour ses habitants un espace d’agrément et de sociabilité. Quant aux questions d’hygiène et de sécurité, l’espace urbain a connu des améliorations constantes, visant à assainir les rues, améliorer la qualité des eaux, assurer l’évacuation des eaux usées en construisant des égouts, lutter contre les risques d’incendies ou d’épidémies. Ces aménagements ont laissé des marques durables dans le tissu urbain, objets aujourd’hui d’études historiques et archéologiques.
9Les actes que nous publions aujourd’hui, s’ils n’ont pas la prétention d’apporter des réponses à toutes les questions concernant la ville dans ses multiples facettes, offrent néanmoins un panorama varié d’exemples de villes méditerranéennes et analysent dans une démarche pluridisciplinaire les dimensions politique, économique, sociale et culturelle du phénomène urbain dans la Méditerranée médiévale et moderne.
Notes de bas de page
1 Séminaire du Laboratoire d’Archéologie Médiévale et Moderne en Méditerranée (LA3M- UMR 7298), La ville méditerranéenne au Moyen Âge, 2010-2012 sous la responsabilité d’Élisabeth Malamut et Mohamed Ouerfelli, dont les actes sont publiés : Villes méditerranéennes au Moyen Âge, dir. d’Élisabeth Malamut et Mohamed Ouerfelli, Aix-en-Provence, Presses universitaires de Provence, 2014 (coll. « Le temps de l’Histoire »), 344 p.
2 Thierry Allain, Anne Brogini, Gilbert Buti, Noël Coulet, Stéphane Durand, Antoine-Marie Graziani, Philippe Jansen, Wolgang Kaiser, Élisabeth Malamut, Brigitte Marin, Paolo Odorico, Mohamed Ouerfelli, Christophe Picard et Olivier Raveux.
3 AMU, le LabexMed, la ville de Marseille, le Conseil Général des Bouches-du-Rhône et l’Agence Universitaire de la Francophonie. Nous n’oublions pas d’adresser nos plus vifs remerciements à Laurent Maggiori (LA3M-UMR 7298) pour son entière disponibilité et pour le temps qu’il a consacré à l’organisation de ce colloque.
Auteur
Aix Marseille Univ, CNRS, LA3M, Aix-en-Provence, France
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