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    Plan détaillé Texte intégral Avant la Révolution, le récit génétique de la nation relève de la généalogie royaleLe modèle français d’une « nation-pays »Le modèle allemand d’une « nation-race »En conclusion : vers une approche nouvelle de la conception médiévale de la famille Notes de bas de page Auteur

    L’incorporation des ancêtres

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    Table des matières

    Recréer un récit génétique pour les nations françaises et allemandes aux xixe et xxe siècles

    Origines barbares et écriture de l’histoire

    Agnès Graceffa

    p. 55-76

    Texte intégral Avant la Révolution, le récit génétique de la nation relève de la généalogie royaleLe modèle français d’une « nation-pays »Le modèle allemand d’une « nation-race »En conclusion : vers une approche nouvelle de la conception médiévale de la famille Notes de bas de page Auteur

    Texte intégral

    1L’invention d’un récit génétique pour fonder ou structurer une identité commune constitue, dans l’histoire, une constante des cultures humaines. Ce modèle, diffusé en Occident par la tradition antique et biblique, est réinvesti au début du Moyen Âge par les nouvelles dynasties qui fondent les Royaumes barbares : du ve au viiie siècle, Francs, Goths ou Lombards mettent par écrit des Récits d’origine1. Ces textes énoncent leur ascendance divine, surhumaine ou héroïque, et démontrent, par l’énumération de leurs rois successifs et le récit de leurs aventures, la noblesse et l’excellence de leur lignée. Jusqu’à la Révolution, ces mythes génétiques servent, pour les monarchies européennes, à la fois de creuset identitaire et de légitimant politique.

    2La mutation démocratique de la fin du xviiie siècle disqualifie ce récit génétique barbare royal : l’histoire de France ne peut plus, désormais, se résumer à celle de ses rois, ou de sa noblesse, que, de Boulainvilliers à Mademoiselle de Lézardière, on dit descendre des Francs conquérants2. Elle devient celle de la nation toute entière, c’est-à-dire de l’ensemble de ses habitants. Aux historiens libéraux, dès lors, d’inventer un nouveau récit génétique, dominé par l’idée d’embryogénèse, à l’intérieur duquel le territoire national constitue le terreau propice au surgissement du moi-nation, dans lequel chaque apport migratoire successif se trouve miraculeusement intégré.

    3Dans l’espace allemand, du fait de l’absence d’unité territoriale et politique, une autre logique s’impose. Au modèle français – géographique – de la « nation-pays » est préféré celui – ethnique – de la « nation-race ». Dans les deux cas, néanmoins, l’histoire nationale se fige en un récit linéaire et orienté, la biographie d’une nation personnifiée. La jeune science historique, alors en constitution, trouve dans cette élaboration une occasion privilégiée de légitimation. Plébiscités par les politiques, vulgarisés par la littérature scolaire, amplifiés et travestis par les extrémistes, ces récits génétiques modernes connaissent une radicalisation progressive. Et ce n’est qu’après 1945 que la dénationalisation des discours historiographiques permet aux historiens d’initier leur déconstruction.

    4Cette prise de conscience entraîne, timidement d’abord, plus largement ensuite, une relecture novatrice du passé européen. Au-delà, elle engendre une double réflexion : elle incite l’historien à développer une approche réflexive de sa propre pratique, en posant la question de l’usage de l’histoire à travers les siècles3. Et concurremment, en attirant l’attention des médiévistes sur les thèmes de la memoria et de la genealogia, elle fait de la question de la parentalité d’une part, du rapport au passé et à la mémoire d’autre part, enfin dans leur articulation, un champ de recherche extrêmement novateur et fécond.

    Avant la Révolution, le récit génétique de la nation relève de la généalogie royale

    5Sous l’Ancien Régime, l’histoire de la nation française se résume à celle de ses rois. Celle-ci prend la forme d’une liste généalogique qui débute avec des personnages mythiques, à l’origine de la dynastie mérovingienne. Ce modèle connaît une mise en place progressive dont l’origine remonte au vie siècle : les Dix Livres d’histoire de Grégoire de Tours, et surtout la Chronique des temps mérovingiens attribuée Frédégaire, lequel énonce, au viiie siècle et pour la première fois, le mythe troyen-franc4. Chaque changement dynastique va dès lors s’inscrire à l’intérieur de ce récit linéaire, afin que la continuité de la lignée soit toujours réaffirmée. L’enrichissement des rituels d’intronisation (couronnement, sacre, touchers des écrouelles et autres miracles) consolide et renforce, génération après génération, ce récit génétique. Sa dimension sacrée bénéficie du plein investissement de l’Église, que confirme, en 1437, la création d’un office de chroniqueur ou historiographe royal, pour un moine de Saint-Denis5. Les siècles suivants connaissent ainsi un renforcement de cette histoire officielle : chez Mezeray (1610-1683), Bossuet (1627-1704) ou Velly (1709-1759) le passé français s’énonce avec la liste chronologique des portraits ou notices biographiques des rois de France qui se succèdent sur le trône depuis l’ancêtre fondateur Pharamond6. Le modèle lignager structure ce récit. L’ancienneté, la vaillance, l’honneur de la lignée légitime sa position prééminente, validée par le pouvoir divin. Cette noblesse de la famille royale rejaillit en retour sur toute son aristocratie, et par delà, sur l’ensemble du peuple français. Les généalogies royales incarnent la nation. Elles structurent un mythe d’un sang et d’une monarchie qui, à travers le corps sacré du Roi, ne meurt jamais.

    6Dans ce cadre, les tentatives de remise en cause du mythe troyen s’avèrent peu nombreuses et rapidement écartées : l’humaniste Étienne Pasquier (1529-1615) fut l’un des premiers à souligner, non sans humour, son caractère hautement légendaire, puisqu’à son sujet il déclare :

    Quant à moi, je n’ose ni bonnement contrevenir à cette opinion, ni semblablement y consentir librement. Toutefois il me semble que de disputer de la vieille origine des nations, c’est chose fort chatouilleuse, parce qu’elles ont été de leur premier advénement si petites, que les vieux auteurs n’étaient soucieux d’employer le temps à la déduction d’icelles : tellement que petit à petit la mémoire s’en est du tout évanouie, ou convertie en belles fables et frivoles7.

    7En 1714 encore, quand Nicolas Fréret (1688-1749) propose pour les Francs une origine germanique, et non troyenne, la dimension iconoclaste de son discours lui vaut d’être embastillé8. Les avancées de la science historique, la contextualisation et la confrontation des sources forcent néanmoins progressivement à l’abandon des légendes : du père Daniel (1649-1728) à Montesquieu (1689-1755) puis Voltaire (1694-1778)9, les éléments du récit officiel sont peu à peu questionnés, mis en doute, et fragilisent en retour une monarchie qui s’avère de moins en moins capable de s’opposer à ce délitement10.

    8L’espace allemand connaît une construction historiographie similaire à l’intérieur du cadre privilégié du Saint Empire Romain Germanique, dont le nom même exalte la double filiation. Celle-ci légitime les lignées successives germanique, franque, carolingienne, salienne, ottonienne et staufienne. À la fin du xve siècle, la redécouverte du texte de Tacite, La Germanie, par des humanistes italiens11, vient rehausser le prestige de l’héritage germanique. Le texte rapidement diffusé et traduit en langue vernaculaire, permet bientôt à l’alsacien Beatus Rhenanus (1485-1547) d’écrire, en 1531, une Histoire de l’Allemagne, et de proposer, en parallèle à l’édition des œuvres de Tacite celle de l’Histoire des Goths de Procope de Césarée12. La mise en scène de ce passé valorise et structure les archétypes d’un « type germain » qui allie description physique (haute taille, chevelure blonde…) et morale (honnêteté, courage, sens du sacrifice, esprit d’égalité et amour de la liberté). La noblesse allemande, désormais, peut se penser en dehors de l’extraction classique (c’est-à-dire grecque ou romaine). Philosophes et historiens, et en premier lieu Leibniz (1646-1716), tentent alors de prouver l’origine germanique – et non troyenne – des Francs13.

    9En France cette thèse attire les foudres des historiographes qui préfère, à tout prendre, défendre l’idée d’une parenté gallo-franque14. En Allemagne, par contre, elle ouvre la voie à la mise en place d’un récit génétique renouvelé autour des nations germaniques, dont il s’agit de retracer cousinage et histoire : ce n’est plus l’arbre généalogique d’une famille de rois qu’il s’agit de dessiner, mais celui d’une famille de peuples frères, globalement dénommés Germains ou mieux encore, Deutsche15. S’engage alors une démarche de description rationnelle de l’histoire des nations européennes, une large ethnographie comparée, fondée sur la philologie, qui aboutit à la définition de la famille linguistique indo-européenne16.

    10La déchéance définitive du modèle génétique royal, à la fin du xviiie siècle, en France et en Allemagne, résulte d’une rupture à la fois profonde et plurielle. Elle relève d’abord de ce que nous nommerons la mutation démocratique : la nation ne s’incarne plus dans le Roi, mais dans le peuple, et ce terme ne désigne plus uniquement l’élite, mais l’ensemble des habitants. La déconstruction du système inégalitaire des castes de l’Ancien Régime entraîne en outre l’invention de nouvelles catégorisations fondées sur l’origine, non plus sociale, mais ethnique. La remise en cause de l’histoire biblique fait quant à elle éclater le modèle de l’origine unique de l’humanité (ou souche adamique). Elle laisse le champ libre à l’émergence d’un polygénisme. Parallèlement la pensée idéaliste théorise la notion de stades de développement, qui ponctueraient le chemin de chaque peuple de la barbarie à la civilisation17. Enfin, autour du concept romantique de nation se forge l’idée que chaque peuple forme une unité culturelle singulière, constituée par l’histoire et véhiculée par la langue18 : cet esprit du peuple agissant sert finalement de terreau à un premier nationalisme libéral. Entre Révolution française et Congrès de Vienne, de part et d’autre du Rhin, deux modèles concurrents, héritiers des mythes antérieurs, se mettent alors en place.

    Le modèle français d’une « nation-pays »

    11En France, la vision des Francs bascule brusquement d’un référentiel hautement positif, médiéval et classique, à une approche absolument négative. Ce renversement coïncide très exactement avec la rupture révolutionnaire, et s’exprime dans les mots même de l’abbé Sieyès :

    En vérité, si l’on tient à vouloir distinguer naissance et naissance, ne pourrait-on pas révéler à nos pauvres concitoyens que celle qu’on tire des Gaulois et des Romains, vaut au moins autant que celle qui viendrait des Sicambres, des Welches, et autres Sauvages sortis des bois et des marais de l’ancienne Germanie19 ?

    12Les efforts de quelques conservateurs et les tentatives de Charles X de restaurer l’ancien mythe monarchique s’avèrent en regard inféconds20. La voie, pourtant peu progressiste, d’un Chateaubriand (1768-1848), confirme le succès de la peinture moderne des Francs, qui ne sont plus policés ni revêtus de la dignité monarchique, mais au contraire assimilés à de sauvages guerriers :

    Parés de la dépouille des ours, des veaux marins, des aurochs et des sangliers, de ce camp retranché avec des bateaux de cuir et des chariots attelés de grands bœufs, de cette armée rangée en triangle où l’on ne distinguait qu’une forêt de framées, de peaux de bêtes et de corps demi-nus21.

    13En 1820, les deux grands tenants de l’historiographie libérale française, Augustin Thierry (1795-1856) et François Guizot (1787-1874), à l’aube de leur carrière, prônent avec détermination la déconstruction du mythe franc, « pierre angulaire de la mystique Ultra22 ». Choisissant à dessein une graphie barbarisée pour mettre en scène les premiers rois mérovingiens, ils soulignent que le pays originel des Franks n’est pas la France mais la Belgique, et déclarent ceux-ci hors la civilisation et hors la nation23.

    Qu’on vienne me présenter pour histoire nationale la seule histoire des Germains-Sicambres, je me lève et je demande à mes aïeux : Qui vous a dit que j’étais fils de Franks, et non pas fils de Romains ou de Gaulois, fils de Goth, fils de Burgonde ? Il faut consacrer notre histoire à toutes nos origines diverses, également et sans préférence24.

    14La volonté affichée de l’historien est bien d’écrire, d’inventer une histoire nationale dont le premier héros soit la nation française :

    Tous les peuples dont le mélange a formé cette nation doivent y figurer tour à tour […] Que sous le titre d’annales de la patrie, on sache me présenter, à moi français et patriote, un corps formé des annales réunies de toutes les races d’hommes, soit barbares, soit romains, qui au vie siècle se rencontraient en Gaule. Là sont tous les pères de la nation, et tous leurs souvenirs m’intéressent25.

    15Dans ses écrits ultérieurs, c’est une vision plus apaisée que François Guizot, doctrinaire et ministre de Louis Philippe, privilégie : délaissant les polémiques passées, elle vise la restauration de la concorde par delà les divisions politiques passées. Un idéal de réconciliation semblable s’exprime chez Augustin Thierry ou Jules Michelet (1798-1874). Les apports successifs de l’un et l’autre permettent la mise en place du roman national, à travers deux idées centrales.

    16D’une part celle d’un creuset gaulois, que Thierry théorise en association avec son frère, Amédée, historien de la Gaule. La détestation des Francs leur permet en effet de valoriser, par comparaison, l’ancien substrat ethnique gaulois. Le temps de la Gaule chevelue devient le lieu de l’origine nationale, de la naissance de la nation. Le premier Moyen Âge correspond alors, et selon cette logique génétique, à un temps de l’enfance, de la maturation duquel surgit la nation. Cette théorisation, validée par les pouvoirs publics, devient rapidement le socle du savoir historique national :

    Sous les Carolingiens, et peut être à leur insu, une grande révolution s’accomplit. Du chaos romain, chrétien, barbare, sortirent la Nation française et la société féodale, définitivement et solidement constituées26.

    17D’autre part l’individuation de la France et la prédestination de son territoire qui caractérise l’approche michelétienne. « La France est une nation, l’Allemagne est une race », énonce l’historien27 : le peuple français résulte d’un mélange, celui des apports ethniques successifs gaulois, romains, germains, scandinaves et autres. L’union formée par cette diversité ne s’apparente pas à une régression, ou une dépravation, mais constitue au contraire un atout, et détermine sa qualité supérieure, celle de la nation en regard de la race. Le creuset géographique du pays forme la meilleure des matrices. Une véritable mystique du territoire introduit et structure ainsi toute la monumentale Histoire de France de Michelet, et conforte la construction du roman national. À l’intérieur de celui-ci émerge une série de nouvelles figures, à la fois épiques et tragiques, celles des héros nationaux : ils remplacent rois et saints antérieurs pour incarner les valeurs nationales et symboliser la permanence de la nation à travers les drames de l’histoire28. L’individu et son œuvre se mêlent à travers les siècles à la vie de la nation et portent le développement moral de la civilisation française. Comme le souligne très exactement Charles Nodier en 1843 :

    L’école des Guizot, des Sismondi, des Thierry, des Michelet, ne nous avait pas appris encore l’art de puiser dans ces sources natives et originales, non seulement la vie publique et anecdotique des hommes célèbres, mais en quelque sorte la biographie des races et des générations29.

    18Déjà dotée d’une grande popularité, cette conception de l’histoire nationale française devient, avec la défaite de 1871 et l’avènement de la Troisième République, discours officiel. Célébrés par l’éducation primaire obligatoire qui s’instaure alors, les ancêtres gaulois symbolisent cette origine primitive et commune, ce nouvel ancêtre fondateur de la nation française, qui, à travers les unions successives, conserve la domination du territoire et incarne l’esprit populaire. La volonté de Lavisse et de Duruy de mettre l’histoire et la géographie au service de la Nation – plus exactement de la construction du sentiment national chez tous les petits Français – renforce ce modèle. Il bénéficie de plus, dans ce dernier quart du xixe siècle, des apports de la jeune philologie romane qui se structure alors autour de Gaston Paris (1839-1903)30, puis de la mise en discipline de la science géographique31 : en 1875 s’ouvre la première chaire de géographie à Nancy, à laquelle est élu Vidal de la Blache (1845-1918).

    19La formalisation du nouveau récit génétique de la nation française s’effectue donc en opposition face au modèle allemand. L’ouvrage de Jean Baptiste Paquier (Histoire de l’unité politique et territoriale de la France, 1879), reprend et systématise le modèle de la matrice territoriale en lui ajoutant la thèse de frontières soit naturelles, soit historiques qui dessinent un territoire français idéalisé. Par sa maîtrise de la toponomastique et de la géographie historique, le médiéviste Auguste Longnon (1844-1910) achève de lui donner une légitimité scientifique : en effet cette « logique des frontières » s’explique par l’impact jamais effacé du pagus32. Cette circonscription gauloise est demeurée toujours prégnante au-delà des modifications politiques et administratives que subit la France, qui, donc s’étend et doit s’étendre du cours du Rhin au sommet des Alpes et des Pyrénées. Outre les fondements celtiques, les apports ethniques extérieurs furent réels mais limités, du fait d’une acculturation, une fusion rapide des populations avec le substrat originel, dont la culture, la race et la langue restèrent ainsi dominante. Le Traité de Verdun devient l’acte de naissance officiel de la Nation française et l’action de la monarchie capétienne s’en trouve réhabilitée à l’intérieur d’un récit génétique clarifié et apaisé.

    20Le succès de la logique du territoire, ou thèse des peupliers33, se trouve finalement validée par l’ensemble de l’historiographie française, comme en témoigne, en 1933, Charles Seignobos :

    L’évolution d’une nation dépend des conditions matérielles dans lesquelles elle a vécu […] Le pays où s’est formée la nation française a agi sur elle par la nature, qui a déterminé le genre de vie de ses habitants, et par sa position, qui a décidé les relations de son peuple avec les autres peuples du monde34.

    21De la nation individuée, les historiens républicains français du xixe et du premier xxe siècle ont donc tracé l’histoire officielle, la généalogie. Dans ce modèle génétique, au-delà des mélanges-mariages, domine le prisme du territoire, du pays, de la géographie, creuset et matrice de la France.

    Le modèle allemand d’une « nation-race »

    22Conséquence probable de l’engouement pour les anciens Germains de Tacite, les pays de langue allemande connaissent un développement précoce de la science historique à l’Université, dès le milieu du xviiie siècle. Le paradigme germanique s’élabore alors sur le modèle éminent de l’histoire antique, et en concurrence avec celui-ci35.

    23Mais l’épisode napoléonien, conclu par le Congrès de Vienne, laisse l’espace allemand affaibli et morcelé. Philologues, juristes et historiens s’allient alors pour mobiliser romantisme et historicisme et affirmer l’ancestralité et la vitalité d’une culture allemande incarnée par une langue, un droit et un peuple36. Leur objectif majeur consiste à s’opposer au thème d’une barbarie fondamentale des anciens Germains, topos que l’historiographie libérale française instrumentalise, on l’a vu, dans son combat contre la monarchie.

    24Les recherches ethnographiques allemandes connaissent dès lors un fort engouement et bénéficient d’une double influence : une tradition classique, d’une part, qui s’efforce, sur le modèle biblique puis médiéval, de classer rationnellement les peuples en situant géographiquement leur lieu d’origine ; de l’autre, une approche plus essentialiste, qui dote chaque peuple d’un nom, d’une langue, d’un droit et d’une culture spécifique. La métaphore arboricole apparaît systématiquement privilégiée, et les peuples ou tribus décrits sous les termes de souche, tronc, branche : le modèle généalogique des liens du sang se met ainsi en place.

    25La philologie comparée, initiée par les travaux de Franz Bopp, établit un lien direct entre langue et peuple : selon August Schleicher, Grundsprache (langue primitive) et Grundstamm (souche originelle ou tribu principale) forment les deux faces d’une seule réalité37. Il s’agit alors de justifier l’appartenance de chaque groupe barbare comme tribu – et non comme agrégation politique –, à cette entité germanique primitive. La perspective généalogique et génétique supplante toute autre dynamique. Parallèlement à l’approche historicisée de Leopold von Ranke (1795-1886), les historiens du droit Karl-Friedrich von Savigny (1779-1861) et Jacob Grimm (1785-1863) imposent une vision linéaire de l’histoire allemande. Leurs recherches confirment, à partir du matériel juridique le plus ancien, l’existence d’une culture germanique spécifique, commune à chacune des branches du tronc unique ‘germano-allemand’. Chaque Stamm (Francs, Goths, Burgondes, Saxons, Lombards…) n’est qu’une composante historique d’un peuple allemand originellement uni (Urvolk), et dont l’essence a été préservée grâce à la culture et à la langue. S’ébauche ainsi une véritable archéologie du sentiment et de l’identité nationale, dont témoigne la création du terme de Volkstum (formé à partir du radical Volk-le peuple). Cette nouvelle réalité – de fait construction idéelle – stimule la fierté germanique et permet la réintégration de l’expérience franque à l’intérieur de l’histoire allemande38.

    26Le philologue Kaspar Zeuss (1806-1856), professeur à Munich et fondateur de la celtologie allemande, propose ainsi dès 1837 une classification raisonnée des peuples allemands en quatre grandes divisions39. Ceux de l’Ouest (Deutschen Westvölker) premièrement, comprennent entre autres Alamans et Francs. Les peuples allemands de l’Est (Deutschen Ostvölker) deuxièmement, dont la souche principale est gothique, sont issus d’un territoire situé au-delà de l’Elbe, de la Mer du Nord jusqu’aux Carpates40. Les deux derniers groupes se composent des Germains scandinaves (skandinavische Germanen) et des populations voisines occidentales et orientales non-germaniques (nichtger-manischen Nachbarstämme in Ost und West). Le terme de Deutsche, pourtant anachronique (il n’apparaît qu’au Moyen Âge) est privilégié : cet usage crée une filiation entre peuples ancestraux et modernes, il donne l’illusion d’un état inchangé et d’une réalité ethnique intemporelle. Si le chercheur confirme bien la parenté de tous les peuples indo-européens41, il affirme aussi l’idée d’une primauté allemande, dont témoigne son destin exceptionnel42. La perspective typologique et ethnographique choisie renforce cette logique, puisque chaque dénomination renvoie à une unité ethnique clairement identifiée, localisée géographiquement et culturellement singulière. L’exemple des Francs apparaît, à ce titre, significative : la branche salienne, fondatrice de la monarchie mérovingienne, est une tribu d’outre-Rhin dotée de plusieurs noms (Sigambri, Salii, Franci Salii)43. Ils s’apparentent aux Niederfranken, alors que les Ripuaires sont des Oberfranken, éventuellement assimilables aux Chattes44. La réussite du royaume mérovingien n’est possible que parce que ces deux souches cousines s’associent sous la direction des Saliens45. Elle s’inscrit donc pleinement à l’intérieur du récit génétique germanico-allemand, et en forme un épisode illustre qui succède aux temps héroïques des migrations, inclut l’histoire glorieuse des Goths et des Burgondes ou Niebelungen, et précède la construction carolingienne.

    27Ferdinand Heinrich Müller (1805-1886) élargit ce travail ethnographique en mobilisant les recherches historiques récentes46. Elles lui permettent de déterminer le lieu d’origine des Germains, sur les bords de la Mer Baltique47, mais également d’enrichir la thèse de l’unité première ‘germanisch-deutsch’ par l’idée suivante : sa division ultérieure en Stämme constitue en fait une réponse à l’agression romaine48. Elle est donc postérieure à leur installation dans leur patrie originelle, l’« Heimatland des deutschen Volkes49 ». Il s’agit d’une évidence qui se fonde tant sur les caractéristiques naturelles du territoire que sur les liens historiques et ethnographiques qui s’y sont progressivement tissés. Cette interaction permet finalement à l’auteur de rappeler les archétypes physiques et moraux du Germain-Allemand que sont la beauté, le courage, la fierté, le sens de l’égalité guerrière, et l’amour de la liberté.

    28Un parallèle implicite s’esquisse entre Völkerbündnis germanique et Deutsche Bund contemporain, entre agression romaine et napoléonienne : à chaque fois, l’unité allemande se rompt, mais ces divisions ne sont que passagères et ne remettent pas fondamentalement en question l’unicité éminente du peuple allemand. Cette thèse est renforcée par les travaux qu’Ernst Theodor Gaupp (1796-1859) consacrent aux structures sociales des sociétés germaniques anciennes50. Selon l’historien, celles-ci se définissent en effet à la fois comme aristocratiques et égalitaires : un peuple de seigneurs, qui n’a jamais subi de conquêtes, contrairement aux Gaulois ou aux Slaves. Les Germains-Allemands n’ont pas non plus connu de fortes migrations, donc de mélanges ethniques, contrairement à leurs voisins. En plus d’une unité linguistique et culturelle, ils semblent ainsi pouvoir se prévaloir d’une unité ethno-biologique préservée. Cette notion de pureté ethnique – dont on connait les dérives ultérieures –, explique la préservation de leurs caractères physiques et moraux ancestraux : beauté, force, courage, amour de la liberté, de la nature et de la guerre, sens de la communauté, et de la famille. La figure mythique de l’Allemand éternel se met ainsi définitivement en place, comme sous la plume d’Eduard Duller en 1840 :

    Gross, stark und schön waren die Deutschen in alter Zeit. Weiss und rein war die Farbe ihrer Haut, in üppiger Fülle floss das goldgelbe Haar, der Mähne des Löwen ähnlich, bei Männern und Frauen hernieder, und aus den grossen blauen Augen blickten Muth und edler Freiheitsstolz51.

    29Cette approche, toujours plus valorisante, des anciens Germains, est enfin confortée par les recherches de l’historien Georg Waitz (1813-1886), fondateur de la Verfassungsgeschichte allemande (histoire constitutionnelle). Ce dernier propose en effet de fonder l’histoire du peuple allemand sur la description raisonnée de l’organisation sociopolitique des peuples germaniques. Il réussit ainsi à extraire définitivement les Germains de leur supposée primitivité, et imposer un schéma narratif linéaire pour l’histoire nationale :

    L’histoire allemande commence quand les membres des tribus, que les anciens appelaient Germains, arrivèrent sur le rivage des mers septentrionales, la mer du Nord et la Baltique52.

    30Cette approche valide en outre un élément historiographique récurrent, à savoir les qualités guerrières des Germains53. Originellement, et selon l’historien du droit Moritz-August von Bethmann-Hollweg (1795-1877), les notions de peuple et d’armée sont en effet équivalents : « Bei einer so kriegerischen Nation wie die Germanen ist das Heer nicht anders als das Volk in Waffen54 ». Le héros guerrier cristallise le mythe national et permet la mise en avant de la structure de la royauté comme fondement de la gens (tribu ou famille élargie), que les historiens tendent dès lors à traduire par le terme de Rasse. Volonté de puissance et culte de la force deviennent des éléments clés de la culture germanique, une culture transmise générations après générations par le sang, en l’absence de toute acculturation ou mélanges ethniques (qui, on le rappelle, sont dits inexistants sur le sol allemand). Bethmann-Hollweg exalte tout au contraire l’idée d’une terre-patrie, un « heimlich Bode55 », sur lequel l’état social des Germains apparaît paisible et dominé par la double culture nomade et sédentaire de chasseurs-pécheurs et de cultivateurs56. La conscience de leur unité tribale (« Bewusstsein ihrer Stammeseinheit ») s’exprime dans le mythe de leur origine commune incarné par les figures légendaires de Tuisto et de son fils Mannus57, même si cette unité se trouve en pratique « séparée en une pluralité de tribus principales et de peuplades » (« in mehrere Hauptstämme und viele Völkerschaften gegliedert »). Ils ne forment pas une nation étatique, semblable à la conception romaine mais une société républicaine (« gemeinartig ») et démocratique (« Gemeindeherrschaft »), réservée aux membres de la Gemeinde (communauté) dotés d’une existence politique, c’est-à-dire aux hommes libres : « l’État germain en langue moderne, ce serait une aristocratie de la classe des libres58 » à laquelle serait soumis d’autres hommes, inférieurs de part leur origine ethnique. Pour de nombreux Allemands, cette description s’apparente à une sorte d’âge d’or, et, pourquoi pas, à un projet politique.

    31De nombreux historiens expriment clairement leur positionnement nationaliste. Selon Moritz Arndt (1769-1860), les Allemands sont le peuple élu, ils possèdent le courage brutal qui assure la domination. La conquête franque en est l’illustration59. Heinrich von Treitschke (1834-1896) énonce une théorie du militarisme allemand basée sur la conception de l’État comme puissance60. La force guerrière forme la base de toutes les vertus politiques, la guerre constitue une nécessité pratique, théorique et logique pour l’Allemagne car aucun idéalisme politique n’est possible sans traduction militaire. Les succès politiques, militaires, et territoriaux, remportés par la jeune nation en 1871 semblent le confirmer et valident en tous cas l’investissement nationaliste des intellectuels et des éducateurs. La prise de parole de l’historien nobélisé Theodor Mommsen (1817-1903), pour la défense d’une unité nationale fondée sur l’histoire, en 1871, en témoigne61. Cette intense mobilisation volontaire du monde savant dans un même projet politique sera bientôt qualifiée de pangermanisme par les observateurs français62.

    32La réalisation politique de l’unité allemande sert en effet de révélateur à une nouvelle tendance historiographique à vocation globalisante et encyclopédique. Dans son œuvre d’historien et de romancier, à l’instar des Professorenromanen63, Felix Dahn (1834-1912) exalte et amplifie la légende des Goths64. Ceux-ci, beaucoup plus que les Francs, symbolisent l’histoire et la conscience allemande, comme le confirme l’impact culturel des Chants des Nibelungen. Le mythe de la conquête, de la gloire, du déclin, et la disparition qui annonce une renaissance héroïque (Götterdämmerung et Erneuerung) font des Goths les Germains par excellence. Ils sont issus de la souche orientale (Ostgermanen)65 à l’intérieur du creuset culturel indo-européen commun (également nommé aryen ou caucasien)66. Convoquant une multiplicité de sources, dont les Sagas nordiques67, l’œuvre de Dahn véhicule l’image d’une civilisation germanique riche, complexe, organisée tant dans son fonctionnement institutionnel, politique et social, que dans sa spiritualité, et productrice d’art et de littérature. Le terme d’aryen, régulièrement employé, désigne ce peuple germanique ancestral formé de seigneurs et de héros, destinés à dominer le monde68. Les Récits d’origine, ou Stammsagen témoignent et de leur ascendance divine, et de cette unité, cette « communauté de sang » (Blutgemeinschaft), qui les distingue des autres populations69. Celle-ci est préservée par leur Kultur et leur conscience d’eux-mêmes et de leur valeur : « Das höchste Gut des Deutschen auf Erden ist : sein deutsches Volk selbst70 ».

    33Dans ce contexte ultra-nationaliste de la fin du xixe et du premier xxe siècle, certains chercheurs convoquent sans hésiter les théories raciales contemporaines71. Associant leurs recherches, philologues, historiens, préhistoriens, archéologues et anthropologues mobilisent alors l’ensemble des données qui sont à leur disposition, et associent caractères physiques, ethnologiques, linguistiques, culturels pour définir scientifiquement chaque souche de population. Cette méthode permet notamment à l’archéologue préhistorien Gustav Kossinna (1858-1931) de proposer une cartographie très fine des races européennes, associée à la description détaillée de chacune d’entres elles72. Ces apparents succès scientifiques entraînent d’ailleurs la naissance d’une spécialité originale à l’Université, la Siedlungsgeschichte. Les nouveaux territoires de l’Empire en deviennent les laboratoires privilégiés, et ces travaux démontrent, par l’histoire, la philologie, la dialectologie, l’anthropologie physique, l’archéologie funéraire, l’étude des habitats et des structures agraires, etc., l’appartenance historique de ces espaces à la nation allemande73.

    34Loin de mettre un terme à cette approche, la défaite de 1918 renforce, par un processus de repli sur soi traumatique, l’idéologie germaniste fondée sur le concept de race : durant la République de Weimar se développe ainsi un médiévalisme politique qui exalte l’ancienne société germanique et définit le peuple comme une communauté organique74. Le modèle français du mélange ethnique (Gaulois, Romains, Germains…) est dénoncé : il produirait une société dégénérée. Les prédispositions mentales conformes à l’idéologie national-socialiste75 sont clairement en place, et le récit génétique de la nation allemande s’inscrit totalement dans cette conception raciste76. De nombreux historiens choisissent alors de distinguer fusion culturelle et fusion ethnique (la première précédant la seconde), ainsi que le fait la raciologie : l’existence historique de races biologiques s’en trouve ainsi justifiée77. Dans cette mouvance, le rhénan Franz Petri (1903-1999) définit un « bloc européen germanique » qui correspond à une implantation démographique très large des anciens Germains, non seulement à l’Est, mais également à l’Ouest, et ce jusque la Loire : la conquête de tous ces territoires par le IIIe Reich apparaît donc légitime, puisque leurs populations appartiennent majoritairement à la souche germano-allemande78. L’historien autrichien Otto Brunner (1898-1982), quant à lui, développe l’idée d’un modèle de communauté germanique, nommé « l’ordre concret », qui ignore la distinction entre État et société et dont le fonctionnement repose sur les vertus du commandement (Führung) et le respect de valeurs essentielles (droit de vengeance, honneur, fidélité). La structure communautaire germanique ancestrale (Volksstaat) fait là ainsi office de racine pour le présent et de modèle pour l’avenir79. Alors que de rares voix s’élèvent contre ces dérives, qui ne concernent pas seulement l’histoire, mais l’ensemble des sciences sociales80, les écrits scientifiques (comme le Deutscher Einheit de l’autrichien Heinrich von Srbik publié en 193881) ou pseudo-scientifiques (à l’image de ceux d’Alfred Rosenberg ou de Walter Frank82) confortent totalement ce modèle généalogique fondé sur la race.

    En conclusion : vers une approche nouvelle de la conception médiévale de la famille

    35La déconstruction des concepts nationalistes, et avec eux, des récits génétiques nationaux, avait été timidement initiée par de rares historiens dès les années 192083. À partir de 1945, elle s’affirme progressivement, et de manière cette fois globale, soutenue par l’institution universitaire et par l’effort de construction européenne84. Cette prise de conscience s’accompagne, chez les historiens, d’une attention nouvelle portée aux usages du passé en général – et de la science historique en particulier – à la fois dans notre société actuelle et au Moyen Âge. Ce souci met en lumière la réalité passée et actuelle de l’instrumentalisation de la mémoire et de l’histoire dans un but de préservation ou de consolidation du pouvoir, et ceci à la fois au niveau politique (pouvoir monarchique ou aristocratique), religieux et social (notamment à travers l’élaboration de stratégies mémorielles familiales).

    36Parce que l’enjeu de dénationalisation est particulièrement urgent en Allemagne, la refondation de l’histoire médiévale en RFA après la seconde guerre mondiale montre une attention particulière aux questions des lignages et des familles aristocratiques. Il s’agit de comprendre différemment que par le passé la formation de la nation et du sentiment national allemand. De larges enquêtes prosopographiques sont ainsi initiées par plusieurs historiens, parmi lesquels Gerd Tellenbach, Karl Schmid85 et Karl Ferdinand Werner86. La question centrale est celle de la formation d’une noblesse de naissance ou de fonction, et à travers celle-ci, de l’exercice et/ou la captation de la potestas87.

    37L’apport de l’anthropologie sociale stimule l’attention des médiévistes sur le thème de la mémoire et montre que la société médiévale est caractérisée par un rapport spécifique entre l’individu et le groupe88. L’étude de la famille des Agigolfinger présente un prototype d’une famille de la haute aristocratie barbare89. À partir de l’idéaltype du noble-saint (Adelsheilige), les liens entre la lignée pippinide et les autres dynasties royales sont mis en évidence90. Leur puissance (Herrschaftsposition) relève à la fois d’un pouvoir temporel et spirituel, d’un positionnement régional et d’une mobilité européenne. L’influence de ces familles se mesure proportionnellement à leur proximité avec la lignée royale. Le nom apparaît comme un signe majeur de distinction sociale91. L’identification des parentèles ou clans aristocratiques limite implicitement les logiques ethniques ou tribales et annonce un nouveau champ de recherche, celui de l’appartenance familiale92, qui inspire, notamment en France, sous l’égide de quelques historiens menés par George Duby, une histoire de la famille93.

    38Les historiens altimédiévistes ont, depuis Reinhard Wenskus94, identifié le terme de gens/gentes, réalité complexe, comme une des clés pour comprendre le fonctionnement des sociétés de l’Antiquité tardive et des Royaumes barbares. Ils mettent en évidence l’essence fondamentalement non biologique de la conception médiévale de la parenté, et ceci malgré l’impact culturel significatif que représente en la matière la littérature antique d’une part (à l’image de l’Énéide) et de l’autre la littérature biblique. Parallèlement la notion de gens apparaît liée à la fonction institutionnelle et royale. Dans ce contexte, l’impact de la pensée d’Isidore de Séville explique le succès altimédiéval des récits d’origine comme forme privilégiée de généalogie royale95.

    39Les médiévistes s’attachent en outre à comprendre, par l’étude du matériel juridique et des pratiques mémorielles (nécrologes) l’apparition de généalogies non royales. Rompant avec l’ancienne approche intuitive, les chercheurs français et allemands proposent ainsi une nouvelle vision de la famille, profondément inspirée de modèles anthropologiques divers : elle leur permet d’envisager de manière renouvelée les questions de la transmission et du choix des noms, de l’évolution des lexiques liés à la parenté, des usages anthroponymiques et de leurs liens avec le patrimoine immobilier (autour, par exemple, de l’invention des « lignées » avec encrage territorial autour d’un château ou d’une seigneurie96). Ces recherches envisagent également les relations d’alliance et les structurations hiérarchiques des groupes aristocratiques, mais aussi les thèmes de la parenté spirituelle (amitié, formes d’associations diverses telles que congrégation). Il en ressort les conclusions suivantes : les systèmes de filiation ne s’avèrent pas unilinéaires, comme il avait été auparavant supposé97 ; les xi-xiie siècles constituent une sorte de tournant en matière de généalogie, puisque leur généralisation coïncide avec l’apparition du patronyme. Si ces dernières s’avèrent avant tout mues par une visée politique (il s’agit toujours de démontrer la magnificence de la lignée), la multiplication des recherches, notamment en matière de stratégies aristocratiques et patrimoniales98, montre une réalité plus complexe : il n’y a pas de prévalence entre lignée agnatique et cognatique99 ; la notion d’honneur apparaît davantage attachée à un individu, éventuellement à sa parentèle, plutôt qu’à sa famille au sens biologique100 ; enfin la diffusion du modèle généalogique n’est pas strictement descendant, car ce ne sont pas systématiquement d’abord les familles les plus illustres qui mettent par écrit leur généalogie101. Le modèle patrilinéaire, lignager, aristocratique et fondé sur une logique du sang102 n’est pas une réalité altimédiévale, il ne s’avère pas valide avant le xive ou le xve siècle103.

    40Cette rapide radiographie de l’historiographie contemporaine montre que le récit génétique, en tant qu’il est récit de soi, fait toujours office de miroir. Il apparaît fonction du modèle que son auteur – et la société dans laquelle il vit – vise à promouvoir. Sa dimension, ici successivement monarchiste, nobiliaire, démocratique, nationaliste, ultranationaliste, et enfin européenne, démontre combien l’écriture de l’histoire dépend d’une stratégie politique, d’un contexte historique et de présupposés idéologiques. Les périodes anciennes, moins bien documentées et plus perméables aux légendes et à la mythification, sont des lieux privilégiés d’invention et de réinvention perpétuelles, au rythme de l’évolution des enjeux et des manières de se définir comme communauté : par son roi, par sa frange supérieure, par l’ensemble de ses habitants, par son territoire, par sa race, par sa culture, ou finalement par son projet, selon la proposition d’Ernest Renan104. De ce choix découle chaque fois la mise en place d’une écriture singulière de l’histoire et pour la société, d’un récit génétique particulier. Et la conscience de cette réalité apparraît aujourd’hui indispensable face au nouveau paradigme de l’utilisation de données génétiques105.

    Notes de bas de page

    1 Magali Coumert, Origines des peuples (550-850), Paris, IEA, 2007.

    2 Agnès Graceffa, Les Historiens et la question franque, Turnhout, Brepols, 2009, p. 23-33 ; Mona Ozouf, « Nos ancêtres les Gaulois », Le Débat, 1980, p. 97 sq. ; André Burguière, « L’historiographie des origines de la France. Genèse de l’imaginaire national », Annales HSS, 2003, p. 41-62 ; Patrick Garcia, « Les régimes d’historicité : un outil pour les historiens », Revue d’histoire du xixe siècle, 2002/25, p. 43-56.

    3 On se réfèrera notamment aux travaux d’Anne-Marie Thiesse, Françoise Mélonio, Suzanne Citron, Claude Nicolet, François Hartog. Plus récemment, Bernard Cottret et Lauric Henneton, dir., Du bon usage des commémorations. Histoire, mémoire et identité, xvie-xxie siècle, Rennes, PUR, 2010.

    4 Coumert 2007, p. 282 ; sur cette « invention », les notes des éditeurs modernes : John Michael Wallace-Hadrill, The Fourth Book of the Chronicle of Fredegar with its Continuations, Connecticut, Greenwood press, 1960, p. XVI-XXI, et Olivier Devillers et Jean Meyers, Chronique des temps mérovingiens (Livre IV et continuations), Turnhout, Brepols, 2001, p. 6-21.

    5 Claude-Gilbert Dubois, La Conception de l’histoire en France au xvie siècle, Paris, Nizet, 1977 ; Marie Viallon-Schoneveld, dir., L’histoire et les historiens au xvie siècle, Saint-Étienne, Publications de l’Université de Saint-Étienne, 2001, notamment l’article d’Éliane Viennot, « Les historiens du xvie siècle, la loi salique et les reines de la dynastie mérovingienne », p. 143-156.

    6 Pour exemple, François de Mézeray, Abrégé chronologique de l’histoire de France, Paris, 1608 ; Jacques Benigne Bossuet, Discours sur l’Histoire universelle depuis le commencement du monde jusqu’à l’empire de Charlemagne, 1681, rééd. Paris, Brière, 1823, p. 122 sq.

    7 Étienne Pasquier, Recherches de la France, t. I, ch. VIII, Amsterdam, 1560, reprint Genève, Slatkine 1971, p. 47-48.

    8 Nicolas Fréret, De l’origine des Francs. Mémoire présenté à l’Académie des Inscriptions et Belles Lettres, Paris, 1714. Sur l’homme et son œuvre, Chantal Grell et Catherine Volpilhac-Auger éd., Nicolas Fréret, légende et vérité, Oxford, Voltaire Foundation, 1994.

    9 Gabriel Daniel R. P., Abrégé de l’Histoire de France depuis l’établissement de la monarchie française dans les Gaules, Paris, Mariette, 1724, préface historique ; Montesquieu, De l’Esprit des lois, Genève, Barillot, 1748, livre XVII, ch. 4. ; Voltaire, Essai sur les mœurs, Éd. Garnier, 1963, t. 1, p. 305 et 306 ; voir également l’article « Franc ou Francq » du Dictionnaire philosophique de Voltaire, Paris, 1765.

    10 Articles de Chantal Grell et Myriam Yardeni in Olivier Guyot-Jeannin, dir., Clovis chez les historiens, Paris : Bibliothèque de l’École des Chartes, 1996, notamment p. 192 ; Mouza Raskolnikoff, Histoire romaine et critique historique dans l’Europe des Lumières, Rome, École française de Rome, 1992 ; Chantal Grell, Le Dix-huitième siècle et l’Antiquité en France 1680-1789, Studies on Voltaire 330, Oxford, Voltaire Foundation, 1995 ; id. dir., Les historiographes en France de la fin du Moyen Âge à la Révolution, Paris, PUPS, 2006.

    11 Jacques Ridé, L’image du Germain dans la pensée et la littérature allemandes de la redécouverte de Tacite à la fin du xvie siècle, thèse Paris IV, Lille, ANRT, 1976, I, ch. 1.

    12 James Hirstein, Tacitus’ Germania and Beatus Rhenanus (1485-1547), Francfort, Peter Lang, 1995.

    13 Wilhelm Gottfried Leibniz, De origine Francorum in Opera Omnia, IV, 1715 ; édition et traduction française in Constant Leber éd., Collection des meilleures dissertations, notices et traités particuliers relatifs à l’histoire de France, composée en grande partie de pièces rares, ou qui n’ont jamais été publiées séparément, Paris, A. Dentu, 1828, I, p. 97-126.

    14 Un des premiers témoins de cette tendance est Guillaume Postel, notamment dans son opuscule, Loi salique. Livret de la première vérité, là où sont en bref les origines et autorités de la Loi Gallique nommée communément Salique, Paris, 1552. Sur sa réception postérieure, Catherine Volpilhac-Auger, Tacite en France de Montesquieu à Chateaubriand, Oxford, The Voltaire foundation, 1993.

    15 Ewald Graf von Hertzberg, Dissertation tendant à expliquer les cause de la supériorité des Germains sur les Romains et à prouver que le Nord de la Germanie ou Teutonie, entre le Rhin et la Vistule, et principalement la présente Monarchie prussienne, est la patrie originaire de ces Nations héroïques qui, dans la fameuse migrations des peuples, ont détruit l’Empire romain, et qui ont fondé et peuplé les principales Monarchies d’Europe, Berlin, 1770 ; Michail Ignaz Schmidt, Geschichte der Deutschen, I, Ulm, 1778, p. 102.

    16 Franz Bopp, Grammaire comparée des langues sanscrite, zend, grecque, latine, lithuanienne, slave, gothique, et allemande (1833-1849), trad. de Michel Bréal, Paris, 1866-1873.

    17 Graceffa, 2009, p. 33 ; Philippe Descola, Par delà nature et culture, Paris, Gallimard, 2005.

    18 Francis Claudon, André Encrevé et Laurence Richer, dir., L’Historiographie romantique, Paris, Éditions Bière, 2007.

    19 Emmanuel Sieyès (dit l’Abbé), Qu’est ce que le Tiers État ? (1788), Paris, Gallimard, 1982, c. II.

    20 Matthieu Brejon de Lavergnée et Olivier Tort, dir., L’union du Trône et de l’Autel ? Politique et religion sous la Restauration, Paris, PUPS, 2012.

    21 Vicomte de Chateaubriand, Les Martyrs, 1809, Paris, Calmann Levy, 1879, p. 148-149.

    22 Anne Denieul Cormier, Augustin Thierry. L’histoire autrement, Paris, Publisud, 1996, p. 173.

    23 Augustin Thierry, Lettres sur l’histoire de France (publiées dans Le Courrier français) et François Guizot, Du gouvernement de la France depuis la restauration et du ministère actuel (Ladvocat, 1820). Sur ces deux écrits, Olivier Tort, « La polémique royaliste suscitée par les écrits de Guizot pendant la Restauration », in Robert Chamboredon éd., François Guizot. Passé-présent, Paris, L’Harmattan, p. 69-82.

    24 A. Thierry, Lettres sur l’histoire de France, Paris, Ponthieu et Cie, 1827, 7e Lettre.

    25 Ibid.

    26 A. Thierry, in Cours Gauthier-Deschamps Collaboration d’instituteurs et d’historiens. Leçons complètes d’histoire, Paris, Hachette, 1926, p. 24

    27 Jules Michelet, Histoire de France, Paris, Hachette, I, 1833, p. 3.

    28 Maria Pia Casalena, « L’homme, la nation, le siècle. Stratégies narratives dans un dictionnaire biographique du xixe siècle », Cahiers de narratologie, 2008/2015.

    29 Charles Nodier, Biographie universelle ancienne et moderne, Paris, Michaud frères, 1843, I, p. VIII-IX.

    30 Ursula Bähler, Gaston Paris et la philologie romane, Genève, Droz, 2004.

    31 Vincent Berdoulay, La Formation de l’école française de géographie (1870-1914), Paris, CTHS, 1981 ; Isabelle Lefort, La Lettre et l’esprit : Géographie scolaire et géographie savante en France, 1870-1970, Paris, CNRS, 1992.

    32 Auguste Longnon, La Formation de l’unité française (leçons proférées au Collège de France, publiées par H. François Delaborde), Paris, A. Picard, 1922.

    33 Dénomination popularisée par la « querelle des peupliers » qui suivit la parution de l’ouvrage de Barrès, Les Déracinés, et la controverse entre Gide et Maurras qui en résultat (voir notamment Charles Maurras, « La Querelle des peupliers », La Gazette de France datée du 14 septembre 1903).

    34 Charles Seignobos, Histoire sincère de la nation française, Paris, Rieder, 1933, p. 30.

    35 Ulrich Wyss, Die wilde Philologie. Jacob Grimm und der Historismus, Munich, Beck, 1979, introduction.

    36 Johann Gottlieb Fichte, Discours à la nation allemande, (1807/1808), traduction Alain Renaut, Paris, imprimerie nationale, 1992.

    37 August Schleicher, Die Deutsche Sprache, Stuttgart, Cotta, 1860, p. 86.

    38 Graceffa 2009, p. 77 sq.

    39 Kaspar Zeuss, Die Deutschen und die Nachbarstämme, München, Vanhoeck and Ruprecht, 1837, p. 303-400.

    40 Ibid., p. 401 : les Goths représentent un des quatre « Hauptgruppen » avec les peuples du Sud-ouest (Vandales, Suèves, Burgondes), ceux de la Mer du Nord, et le groupe du Nord-ouest (Saxons, Angles, Jutes).

    41 Ibid., par exemple les Hongrois sont désignés comme les voisins doux et vite amis des Allemands (p. 758 : « die Ungern […] ruhige und bald befreundete Nachbarn der Deutschen »).

    42 Ibid., p. 1 : « als das thätigste und mächtigste Volk in diesen Umwälzungen handeln die Germanen » (les Germains incarnaient le peuple le plus habile et le plus puissant au sein de ces bouleversements).

    43 Ibid., p. 329 « Die Namen Sigambri, Salii, Franci Salii bezeichnen ein und dasselbe Volk ».

    44 Ibid., p. 344-346.

    45 Ibid., p. 349 : « Nach der Vereinigung aller Frankenvölker mit dem Reiche der salischen Franken wurde die Gesamtmasse unter zwei Hauptbenennungen unterschieden, als Ost und Westfranken, Austri, Neustri, Austrasii, Neustrasii, in der alten Sprache Austras, Niustras. »

    46 Notamment Johann-Christian Pfister, Geschichte der Teutschen, Hamburg, F. Perthes, 1829, I, p. 4-6.

    47 Ferdinand Heinrich Müller, Die deutschen Stämme und ihre Fürsten, oder historische Entwicklung der Territorial Verhältnisse Deutschland im Mittelalter comprend les volumes suivants : I, Vorgeschichte der deutschen Stämme bis zur Bildung des fränkischen Reiches der Merowingern, Berlin, Luderitz, 1840 ; II, Geschichte der deutschen Stämme in Verbindung mit dem fränkischen Reiche der Merowingern und Karolingern, 1841 ; III, Die deutschen Stämme in dem karolingischen Reiche und die Begründung des deutschen Reiches, 1842 ; IV, Historisch-geographische Darstellung von Deutschland im Mittelalter, vornehmlich während der Zeit des zehnten Jahrhunderts, 1 : Die Länder Hohenrätien, 1852.

    48 Müller 1840, I, p. 310-328.

    49 Ibid., p. 1-2 : « Das Heimatland des deutschen Volkes, auf dessen Boden sich aus den verschiedenen Stämmen desselben die Reihe von grössen und kleinern Staaten ausgebildet hat, welche jetzt von dem deutschen Bunde umfasst werden, gehört nach seinen natürlichen wie nach seinen historisch-ethnographischen Verhältnissen zu den wichtigsten Teilen von Europa » (La patrie des peuples allemands, sur le sol duquel une série de petits et grands États se sont construits, issus de tribus diverses, qui forme maintenant le Deutsche Bund, cette patrie compose, par ses liens naturels, historiques et ethnographiques, la partie la plus importante de l’Europe).

    50 Ernst-Theodor Gaupp, Recht und Verfassung der alten Sachsen, Breslau, Max u. C., 1837 ; Id., Lex Francorum Chamavorum oder das vermeintliche Xantener Gaurecht, Breslau : Max u. C., 1855.

    51 Les Allemands du temps passé étaient grands, forts et beaux. La couleur de leur peau était d’un blanc pur et leur chevelure dorée se répandait en ondulant, telle la crinière du lion, tant chez les hommes que chez les femmes, et de leur grands yeux bleus perçait un regard noble empli de courage et de fière liberté : E. Duller, Geschichte des deutschen Volkes I, Leipzig, 1840, p. 6.

    52 « Die Deutsche Geschichte beginnt, da die Angehörigen des Volksstammes, den die Alten als Germanen bezeichnen, an den Gestaden der nördlichen Meere, Nord- und Ostsee, auftreten » : Georg Waitz, Deutsche Verfassungsgeschichte, Kiel, Weidmann, 1844, I, p. 3.

    53 Heinrich Luden, Vier öffentliche Lesungen, Göttingen, 1810, présente les peuples allemands comme les « Herren der Welt », les maîtres du monde, expression dans laquelle la connotation guerrière est évidente ; Christoph Adelung, Aelteste Geschichte der Deutschen, Leipzig, 1806, emploie les deux termes ; Michael-Ignaz Schmidt parle pour le Volk de « Schimpfname », Schmidt, p. 13.

    54 « Chez une nation aussi guerrière que les Germains, l’armée équivaut au peuple en armes » : Moritz August von Bethmann-Hollweg, Ueber die Germanen von der Völkerwanderung, Bonn, Marcus, 1850, p. 30.

    55 « Sol de la patrie » : conformément à l’historiographie traditionnelle, l’Allemagne est la patrie et non le sol naturel des Germains ; c’est celui qu’ils se sont choisis après de nombreux mouvements migratoires semblables à ceux qui caractérisent l’ensemble des groupes humains : Moritz-August von Bethmann-Hollweg, 1850, p. 3.

    56 Ibid., p. 6.

    57 Ibid., p. 23, n. 3 et p. 24 « weit entfernt eine Nationalstaat zu bilden ».

    58 Ibid., p. 25 « Im modernen Sinn war der germanische Staat eine Aristokratie des Standes der Freier ».

    59 Moritz Arndt, Pro populo germanico, Berlin, Reimer, 1854, p. 2, et à la suite : « l’Allemand belliqueux, entreprenant et résolu, a été créé pour coopérer à la domination mondiale et avant tout pour établir chez lui une forte unité nationale ».

    60 Heinrich von Treitschke critique la doctrine du « désir de jouir aveuglément de la paix » en ces termes : « L’État n’est pas une Académie des Beaux-arts, l’État est une puissance ». Il est l’historien officiel d’une Allemagne dominée par la Prusse, et ses biographes soulignent chez lui le sacrifice de l’objectivité historique sur l’autel de l’unité nationale. U. Langer, Heinrich von Treitschke. Politische Biographie einer deutschen Nationalist, Dusseldorf, Droste, 1998. Son antisémitisme militant l’éloignera de son collègue Theodor Mommsen.

    61 Sur l’homme et sa pensée, Alexander Demandt éd., Theodor Mommsen. Wissenschaft und Politik im 19. Jht, Berlin, de Gruyter, 2005.

    62 Notamment Charles Andler, Les Origines du pangermanisme 1800-1880, Paris, Conard, 1915 ; Pierre Imbart de la Tour, Le Pangermanisme et la philosophie de l’histoire, Paris, Perrin, 1916.

    63 Nom donné par les critiques allemands à ces professeurs romanciers dont les œuvres furent de véritables bestsellers, parmi lesquels : Gustav Freytag, Bilder aus dem Mittelalter, Leipzig, Hirzel, 1859 et Die Ahnen, Leipzig, 1872-1880 ; Felix Dahn, Die Könige der Germanen, onze volumes, Leipzig, Fleischmann, 1861-1909.

    64 Le cas de Felix Dahn a fait l’objet, depuis le début du xxie siècle, d’un renouveau d’attention et a donné lieu à plusieurs études. Notamment Rainer Kipper, Der Germanenmythos im Deutschen Kaiserreich. Formen und Funktionen historischer Selbstthematisierung, Göttingen, Vandenhoeck und Ruprecht, 2002.

    65 Felix Dahn, Urgeschichte der germanischen und romanischen Völker, Berlin, Grote, 1881, première partie p. 137 à 594 « Die Ostgermanen : die Völker der gothischen Gruppe » : ils rassemblent ainsi les Ostrogoths et Wisigoths, ainsi qu’une partie des Suèves (ceux qui s’installeront en Espagne).

    66 Felix et Therese Dahn, Walhall : Germanische Götter und Heldensagen, Kreuznach, Voigtländer, 1885, introduction.

    67 Ibid. : le plan original de l’ouvrage présente d’abord le panthéon germanique (Odin, Thor, Freyr, Loki…) et sa correspondance avec ses équivalents grecs et romains, et ainsi de suite pour toute la culture germanique, dans le but de présenter un tableau équivalent en valeur aux autres civilisations antiques.

    68 Dahn, 1881, I, p. 3 : « Der Name Arier, welchen sich diese Völker beilegten, wird erklärt als : die Herren, die Edeln im Gegensatz zu den Nachbarn anderer Rassen / Le nom d’aryen, qui désigne ces peuples, s’entend ainsi : les seigneurs ou les nobles, en opposition aux autres races voisines ».

    69 Ibid., p. 16-17 : « Wie alle arischen Völker führten die Germanen ihre Abstammung auf die Götter zurück : und diese Abstammungssage enthält zugleich den stärksten Ausdruck dafür, dass ihnen ein Gefühl der Zusammengehörigkeit, der Blutgemeinschaft gegenüber fremden Völkern nicht völlig gebracht / comme tous les autres peuples aryens les Germains faisaient remonter leur origine aux Dieux : et cette légende d’origine participait en même temps à l’expression forte d’un sentiment d’appartenance, d’une communauté de sang vis-à-vis des autres peuples ».

    70 Dahn, 1885, p. 3 : « le bien le plus élevé des Allemands sur la terre, c’est le peuple allemand lui-même ».

    71 Agnès Graceffa, « La tentation de la pensée raciale dans les lectures historiographiques françaises et allemandes 1920-1930 du peuplement dit germanique de la Gaule », in Carole Reynaud-Paligot éd., Tous les hommes sont-ils égaux – Histoire comparée de la pensée raciale 1860-1930, Munich, Oldenbourg Verlag, p. 98-110.

    72 Gustav Kossinna, Ursprung und Verbreitung der Germanen in vor- und frühgeschichtlicher Zeit, Leipzig, Kabitzsch, 1926, mais également les articles de la revue Mannus et publications de la Mannus-Bibliothek.

    73 Entre autres, pour les territoires de l’Alsace-Moselle, l’ouvrage d’Adolf Schiber, Die fränkischen und alemannischen Siedlungen in Gallien, besonders in Elsass und Lothringen, Strasbourg, Karl Trübner ed., 1894.

    74 Graceffa 2009, p. 220 et s.

    75 Otto-Gerhard Oexle, in Jean-Claude Schmitt, et Otto Gerhard Oexle, dir., Les tendances actuelles de l’histoire du Moyen Âge en France et en Allemagne, Paris, PUPS, 2002.

    76 La mainmise progressive du régime nazi s’effectue sur l’ensemble des instances scientifiques, des MGH à l’Historische Zeitschrift. Sur ce dernier exemple, Ursula Wiggershaus-Müller, Nationalsozialismus und Geschichtswissenschaft. Die Geschichte der Historischen Zeitschrift und des Historischen Jahrbuchs 1933-1945, Hambourg, Kovac, 1998 ; Étienne François, « Allemagne », in Dictionnaire des sciences historiques, Paris, 1986, p. 17 ; Ernst Schulin, Deutsche Geschichtswissenschaft nach dem Zweiten Weltkrieg (1945-1965), Munich, Oldenbourg, 1989 ; Édouard Husson, Les historiens de la RFA (1949-1998), leurs travaux sur l’Allemagne depuis Bismarck et la question de l’identité politique allemande, thèse de doctorat, Paris IV, 1998 ; Anne Christine Nagel, Im Schatten des Dritten Reichs. Mittetlalterforschung in der Bundesrepublik Deutschland 1945-1970, Göttingen, 2005.

    77 C’est l’idée selon laquelle des populations ethniquement différentes peuvent cohabiter de longs siècles ensemble et former société sans pour autant se mélanger biologiquement : chacune demeure racialement pure, même s’elles partagent une culture commune. Graceffa, 2009, « La tentation… ».

    78 Franz Petri, Germanisches Volkserbe in Wallonien und Nordfrankreich, Bonn, Ludwig Röhrscheid Verlag, 1937.

    79 Otto Brunner, Land und Herrschaft, Vienne, Rohrer, 1939, p. 105-106.

    80 Heinrich Bausinger, Volkskunde ou l’ethnologie allemande, Paris, Maison des sciences de l’homme, 1993.

    81 Hans Haussherr, « Verfassungstypen deutscher Volksgruppen im Auslande », Historische Zeitschrift, 1939/160, p. 35-78.

    82 Alfred Rosenberg, Der Mythus des 20. Jahrhunderts, Munich, Hoheneichen, 1930 ; Walter Franck, « Zunft und Nation. Rede zur Eröffnung des Reichsinstituts für Geschichte des neuen Deutschland », Historische Zeitschrift, 1936/153, p. 12-29. Dans ce discours totalement en phase avec l’idéologie nazie, il faut souligner la présence récurrente des deux termes de sang et de révolution (p. 14 : « Wir sind Blut vom Blut und Fleisch vom Fleisch eurer Revolution und eures Reiches » : nous sommes le sang du sang et la chair de la chair de notre révolution et de notre Empire). Sur ce thème, Uwe Puschner, Die völkische Bewegung im wilhelminischen Kaiserreich, Darmstadt, WBG, 2001, p. 10-11.

    83 Graceffa 2009, p. 205 sq.

    84 Id., « L’Europe de Clovis comme référence discrète de l’idée européenne », in Hélène Yèche éd., 1957 : histoire et images des origines, Paris, Publibook, 2009, p. 41-58.

    85 Karl Schmid, J. Wollasch, « Societas et Fraternitas. Begründung eines Quellenwerkes zur Erforschung der Personen und Personengruppen des Mittelalter », Frühmittelalterlichen Studien, IX, 1975, p. 1-48.

    86 Karl-Ferdinand Werner, « Problematik und erste Ergebnisse des Forschungsvorhabens PROL. Zur Geschichte der west- und mitteleuropäischen Oberschichten bis zum 12. Jht », in Quellen und Forschungen aus italienischen Archiven und Bibliotheken, 1977/57, p. 69-87. Cette entreprise a une longue histoire : la Prosopographia Imperii Romani avait été initiée par Theodor Mommsen en 1874. En 1950 étaient nés deux projets, la Prosopographie chrétienne du Bas-Empire pour le personnel religieux et la Prosopography of the later Roman Empire (PLRE) pour les membres de l’administration : Henri Chantraine, « Ein neues Hilfsmittel zur Erfoschung der Spätantike : Die Prosopographie chrétienne du Bas-Empire », Francia, 1983/11, p. 697-712.

    87 Hans-Werner Goetz, « Die Wahrnehmung von Staat und Herrschaft im frühen Mittelalter », in Stuart Airlie, Walter Pohl, Helmut Reimitz éd., Staat im frühen Mittelalter, Wien, OEAW, 2006, p. 39-58.

    88 Karl Schmid, « Über das Verhältnis von Person und Gemeinschaft im früheren Mittelalter », Frühmittelalterlichen Studien, 1967/1, p. 225-249 ; Karl-Ferdinand Werner, « Liens de parenté et noms de personnes. Un problème historique et méthodologique », in Georges Duby, Jacques Le Goff éd., Famille et parenté dans l’Occident médiéval, Rome, EFR, 1977, p. 13-34. L’historien reprend la problématique initiée par Hans-Walter Klewitz, « Namengebung und Sippenbewusstsein in den deutschen Königsfamilien des 10. bis 12. Jht. », Archiv für Urkundenforschung, 1944/18, p. 23-27.

    89 Jörg Jarnut, Agilolfingerstudien. Untersuchungen zur Geschichte einer adlingen Familie im 6. und 7. Jht., Stuttgart, Hiersemann, 1986.

    90 Karl Bosl, « Der Adelsheilige. Idealtypus und Wirklichkeit, Gesellschaft und Kultur im merowingischen Bayern des 7. und 8. Jhts », Speculum Historiale. Fs J. Spörl, 1965, p. 167-187.

    91 Jörg Jarnut, « Nobilis non vilis, cuius et nomen et gens scitur », in Dieter Geuenich, Wolfgang Haubrichs, Jörg Jarnut éd., Nomen et gens : zur historischen Aussagekraft frühmittelalterlicher Personennamen, New York – Berlin, De Gruyter, 1997, p. 116-126.

    92 Id., « Avant l’An Mil », in L’anthroponymie : document de l’histoire sociale des mondes méditerranéens médiévaux, Rome, EFR, 1996, p. 7-18.

    93 Georges Duby éd., Histoire de la famille, Paris, Armand Colin, 1986 ; Michel Rouche, « Des mariages païens au mariage chrétien, sacré et sacrement », in Segni e riti nella chiesa altomedievale occidentale, Spoleto, 1987 (Settimane di studio del Centro del Centro italiano di studi sull’alto medioevo, XXXIII), p. 835-880.

    94 Wenskus, Stammesbildung und Verfassung. Das Werden der frühmittelalterlichen gentes, Cologne, Böhlau, 1961.

    95 Céline Martin, « La notion de gens dans la péninsule ibérique », in Véronique Gazeau, Pierre Bauduin, Yves Modéran, dir., Identité et ethnicité. Concepts, débats historiographiques, exemples (iiie-xiie siècles), Caen, Centre de Recherches Archéologiques et Historiques Médiévales, 2008, p. 75-89.

    96 Anne Lefebvre-Teillard, Le Nom. Droit et histoire, Paris, PUF, 1990 : contrôle du nom premier stade du contrôle administratif des individus par l’état ; Guy Brunet, Pierre Darlu, Gianna Zei, dir., Le Patronyme. Histoire, anthropologie, société, Paris, CNRS éditions, 2002 : l’article de Patrick Beck, Monique Bourin et Pascal Chareille, « Nommer au Moyen Âge : du surnom au patronyme », p. 13-38, revient sur l’évolution des surnoms de la fin du xe siècle au xiie en soulignant l’importance des divergences régionales. Parallèlement Nicole Lapierre, « L’emprise du national sur le nominal », Ibid., p. 115-131, rappelle les processus autoritaires étatiques de changement de nom.

    97 Anita Guerreau-Jalabert, Régine Le Jan, Joseph Morsel, « De l’histoire de la famille à l’anthropologie de la parenté », in Schmitt et Oexle, 2002, p. 433-446.

    98 Didier Lett, Famille et parenté dans l’Occident Médiéval ve-xve siècle, Paris, Hachette, 2000 ; Régine Le Jan, Famille et pouvoir dans le monde franc (viiie-xe siècle). Essai d’anthropologie sociale, Paris, Publications de la Sorbonne, 2003 ; Id. et François Bougard, Laurent Feller éd., Dots et douaires dans le monde franc, Rome, EFR, 2002 ; ead., Male ordine tenent. Transferts patrimoniaux et conflits dans le monde franc, Rome, EFR, 2006.

    99 Laurence Leleu, Autour de Thietmar de Mersebourg et de sa Chronique. Représentations de la famille aristocratique en Germanie vers l’an mil, Thèse soutenue le 12 juin 2010 sous la direction de Régine Le Jan, Université de Paris I- Panthéon Sorbonne, publication en cours ; Hans Werner Goetz, « Verwandtschaft im früheren Mittelalter (I) : Terminologie und Funktionen », in Gerhard Krieger éd., Verwandschaft, Freundschaft, Bruderschaft. Soziale Lebsens- und Kommunikationsformen im Mittelalter, Berlin, Akademie Verlag, 2009, p. 15-35.

    100 Nous renvoyons ici en priorité aux travaux de Claude Gauvard.

    101 « Pendant toute cette longue période, les clercs adaptent progressivement les anciens modèles culturels romains et bibliques de la lignée agnatique, dont ils sont les dépositaires, aux tendances dans la société des généalogies germaniques, nordiques ou celtiques, qui donnent autant d’importance aux familles alliées qu’aux ancêtres directs. La réapparition de la généalogie savante se fait donc par le biais de généalogies religieuses, dans le domaine hagiographique » : les généalogies de saints, par exemple en 1075 la Vita Servatii, et innovation au xiie avec l’arbre de Jessé, métaphore végétale de l’arbre pour imager la filiation biblique, Codex aureus de Lorbach et verrières de Saint-Denis programmées par Suger. Sur ce sujet, Emmanuel de Bos, La généalogie. Familles, je vous aime, Paris, Gallimard, 1998, p. 42-43. L’ouvrage de référence sur l’émergence, le développement, l’iconographie de ces arbor consanguinitatis ou affinitatis : Christiane Klapisch-Zuber, L’ombre des ancêtres. Essai sur l’imaginaire médiéval de la parenté, Paris, Fayard, 2000.

    102 Tel qu’il apparaît en général quand on pense généalogie : par exemple Tifaine Barthélémy et Marie-Claude Pingaud dir., La généalogie entre science et passion, Pairs, éditions du CTHS, 1997.

    103 Joseph Morsel, L’aristocratie médiévale – La domination sociale en Occident (ve-xve siècle), Paris, Armand Colin, 2004.

    104 Ernest Renan, Qu’est ce qu’une Nation ?, Paris, Calmann Levy, 1882, p. 16.

    105 La question est désormais débattue (colloque de Berlin 2015 « Genetic History : A challenge to Historical and Archeological Studies », Session de l’Institute for Medieval Studies de Leeds de 2015 « Methods to Reconstruct Migration », colloque « Genetics and the hongobard Migration » porté par le groupe ERC « Social cohesion, identity and religion in Europe 400-1200 ».

    Auteur

    • Agnès Graceffa

      SOCIAM, ULB

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    1 Magali Coumert, Origines des peuples (550-850), Paris, IEA, 2007.

    2 Agnès Graceffa, Les Historiens et la question franque, Turnhout, Brepols, 2009, p. 23-33 ; Mona Ozouf, « Nos ancêtres les Gaulois », Le Débat, 1980, p. 97 sq. ; André Burguière, « L’historiographie des origines de la France. Genèse de l’imaginaire national », Annales HSS, 2003, p. 41-62 ; Patrick Garcia, « Les régimes d’historicité : un outil pour les historiens », Revue d’histoire du xixe siècle, 2002/25, p. 43-56.

    3 On se réfèrera notamment aux travaux d’Anne-Marie Thiesse, Françoise Mélonio, Suzanne Citron, Claude Nicolet, François Hartog. Plus récemment, Bernard Cottret et Lauric Henneton, dir., Du bon usage des commémorations. Histoire, mémoire et identité, xvie-xxie siècle, Rennes, PUR, 2010.

    4 Coumert 2007, p. 282 ; sur cette « invention », les notes des éditeurs modernes : John Michael Wallace-Hadrill, The Fourth Book of the Chronicle of Fredegar with its Continuations, Connecticut, Greenwood press, 1960, p. XVI-XXI, et Olivier Devillers et Jean Meyers, Chronique des temps mérovingiens (Livre IV et continuations), Turnhout, Brepols, 2001, p. 6-21.

    5 Claude-Gilbert Dubois, La Conception de l’histoire en France au xvie siècle, Paris, Nizet, 1977 ; Marie Viallon-Schoneveld, dir., L’histoire et les historiens au xvie siècle, Saint-Étienne, Publications de l’Université de Saint-Étienne, 2001, notamment l’article d’Éliane Viennot, « Les historiens du xvie siècle, la loi salique et les reines de la dynastie mérovingienne », p. 143-156.

    6 Pour exemple, François de Mézeray, Abrégé chronologique de l’histoire de France, Paris, 1608 ; Jacques Benigne Bossuet, Discours sur l’Histoire universelle depuis le commencement du monde jusqu’à l’empire de Charlemagne, 1681, rééd. Paris, Brière, 1823, p. 122 sq.

    7 Étienne Pasquier, Recherches de la France, t. I, ch. VIII, Amsterdam, 1560, reprint Genève, Slatkine 1971, p. 47-48.

    8 Nicolas Fréret, De l’origine des Francs. Mémoire présenté à l’Académie des Inscriptions et Belles Lettres, Paris, 1714. Sur l’homme et son œuvre, Chantal Grell et Catherine Volpilhac-Auger éd., Nicolas Fréret, légende et vérité, Oxford, Voltaire Foundation, 1994.

    9 Gabriel Daniel R. P., Abrégé de l’Histoire de France depuis l’établissement de la monarchie française dans les Gaules, Paris, Mariette, 1724, préface historique ; Montesquieu, De l’Esprit des lois, Genève, Barillot, 1748, livre XVII, ch. 4. ; Voltaire, Essai sur les mœurs, Éd. Garnier, 1963, t. 1, p. 305 et 306 ; voir également l’article « Franc ou Francq » du Dictionnaire philosophique de Voltaire, Paris, 1765.

    10 Articles de Chantal Grell et Myriam Yardeni in Olivier Guyot-Jeannin, dir., Clovis chez les historiens, Paris : Bibliothèque de l’École des Chartes, 1996, notamment p. 192 ; Mouza Raskolnikoff, Histoire romaine et critique historique dans l’Europe des Lumières, Rome, École française de Rome, 1992 ; Chantal Grell, Le Dix-huitième siècle et l’Antiquité en France 1680-1789, Studies on Voltaire 330, Oxford, Voltaire Foundation, 1995 ; id. dir., Les historiographes en France de la fin du Moyen Âge à la Révolution, Paris, PUPS, 2006.

    11 Jacques Ridé, L’image du Germain dans la pensée et la littérature allemandes de la redécouverte de Tacite à la fin du xvie siècle, thèse Paris IV, Lille, ANRT, 1976, I, ch. 1.

    12 James Hirstein, Tacitus’ Germania and Beatus Rhenanus (1485-1547), Francfort, Peter Lang, 1995.

    13 Wilhelm Gottfried Leibniz, De origine Francorum in Opera Omnia, IV, 1715 ; édition et traduction française in Constant Leber éd., Collection des meilleures dissertations, notices et traités particuliers relatifs à l’histoire de France, composée en grande partie de pièces rares, ou qui n’ont jamais été publiées séparément, Paris, A. Dentu, 1828, I, p. 97-126.

    14 Un des premiers témoins de cette tendance est Guillaume Postel, notamment dans son opuscule, Loi salique. Livret de la première vérité, là où sont en bref les origines et autorités de la Loi Gallique nommée communément Salique, Paris, 1552. Sur sa réception postérieure, Catherine Volpilhac-Auger, Tacite en France de Montesquieu à Chateaubriand, Oxford, The Voltaire foundation, 1993.

    15 Ewald Graf von Hertzberg, Dissertation tendant à expliquer les cause de la supériorité des Germains sur les Romains et à prouver que le Nord de la Germanie ou Teutonie, entre le Rhin et la Vistule, et principalement la présente Monarchie prussienne, est la patrie originaire de ces Nations héroïques qui, dans la fameuse migrations des peuples, ont détruit l’Empire romain, et qui ont fondé et peuplé les principales Monarchies d’Europe, Berlin, 1770 ; Michail Ignaz Schmidt, Geschichte der Deutschen, I, Ulm, 1778, p. 102.

    16 Franz Bopp, Grammaire comparée des langues sanscrite, zend, grecque, latine, lithuanienne, slave, gothique, et allemande (1833-1849), trad. de Michel Bréal, Paris, 1866-1873.

    17 Graceffa, 2009, p. 33 ; Philippe Descola, Par delà nature et culture, Paris, Gallimard, 2005.

    18 Francis Claudon, André Encrevé et Laurence Richer, dir., L’Historiographie romantique, Paris, Éditions Bière, 2007.

    19 Emmanuel Sieyès (dit l’Abbé), Qu’est ce que le Tiers État ? (1788), Paris, Gallimard, 1982, c. II.

    20 Matthieu Brejon de Lavergnée et Olivier Tort, dir., L’union du Trône et de l’Autel ? Politique et religion sous la Restauration, Paris, PUPS, 2012.

    21 Vicomte de Chateaubriand, Les Martyrs, 1809, Paris, Calmann Levy, 1879, p. 148-149.

    22 Anne Denieul Cormier, Augustin Thierry. L’histoire autrement, Paris, Publisud, 1996, p. 173.

    23 Augustin Thierry, Lettres sur l’histoire de France (publiées dans Le Courrier français) et François Guizot, Du gouvernement de la France depuis la restauration et du ministère actuel (Ladvocat, 1820). Sur ces deux écrits, Olivier Tort, « La polémique royaliste suscitée par les écrits de Guizot pendant la Restauration », in Robert Chamboredon éd., François Guizot. Passé-présent, Paris, L’Harmattan, p. 69-82.

    24 A. Thierry, Lettres sur l’histoire de France, Paris, Ponthieu et Cie, 1827, 7e Lettre.

    25 Ibid.

    26 A. Thierry, in Cours Gauthier-Deschamps Collaboration d’instituteurs et d’historiens. Leçons complètes d’histoire, Paris, Hachette, 1926, p. 24

    27 Jules Michelet, Histoire de France, Paris, Hachette, I, 1833, p. 3.

    28 Maria Pia Casalena, « L’homme, la nation, le siècle. Stratégies narratives dans un dictionnaire biographique du xixe siècle », Cahiers de narratologie, 2008/2015.

    29 Charles Nodier, Biographie universelle ancienne et moderne, Paris, Michaud frères, 1843, I, p. VIII-IX.

    30 Ursula Bähler, Gaston Paris et la philologie romane, Genève, Droz, 2004.

    31 Vincent Berdoulay, La Formation de l’école française de géographie (1870-1914), Paris, CTHS, 1981 ; Isabelle Lefort, La Lettre et l’esprit : Géographie scolaire et géographie savante en France, 1870-1970, Paris, CNRS, 1992.

    32 Auguste Longnon, La Formation de l’unité française (leçons proférées au Collège de France, publiées par H. François Delaborde), Paris, A. Picard, 1922.

    33 Dénomination popularisée par la « querelle des peupliers » qui suivit la parution de l’ouvrage de Barrès, Les Déracinés, et la controverse entre Gide et Maurras qui en résultat (voir notamment Charles Maurras, « La Querelle des peupliers », La Gazette de France datée du 14 septembre 1903).

    34 Charles Seignobos, Histoire sincère de la nation française, Paris, Rieder, 1933, p. 30.

    35 Ulrich Wyss, Die wilde Philologie. Jacob Grimm und der Historismus, Munich, Beck, 1979, introduction.

    36 Johann Gottlieb Fichte, Discours à la nation allemande, (1807/1808), traduction Alain Renaut, Paris, imprimerie nationale, 1992.

    37 August Schleicher, Die Deutsche Sprache, Stuttgart, Cotta, 1860, p. 86.

    38 Graceffa 2009, p. 77 sq.

    39 Kaspar Zeuss, Die Deutschen und die Nachbarstämme, München, Vanhoeck and Ruprecht, 1837, p. 303-400.

    40 Ibid., p. 401 : les Goths représentent un des quatre « Hauptgruppen » avec les peuples du Sud-ouest (Vandales, Suèves, Burgondes), ceux de la Mer du Nord, et le groupe du Nord-ouest (Saxons, Angles, Jutes).

    41 Ibid., par exemple les Hongrois sont désignés comme les voisins doux et vite amis des Allemands (p. 758 : « die Ungern […] ruhige und bald befreundete Nachbarn der Deutschen »).

    42 Ibid., p. 1 : « als das thätigste und mächtigste Volk in diesen Umwälzungen handeln die Germanen » (les Germains incarnaient le peuple le plus habile et le plus puissant au sein de ces bouleversements).

    43 Ibid., p. 329 « Die Namen Sigambri, Salii, Franci Salii bezeichnen ein und dasselbe Volk ».

    44 Ibid., p. 344-346.

    45 Ibid., p. 349 : « Nach der Vereinigung aller Frankenvölker mit dem Reiche der salischen Franken wurde die Gesamtmasse unter zwei Hauptbenennungen unterschieden, als Ost und Westfranken, Austri, Neustri, Austrasii, Neustrasii, in der alten Sprache Austras, Niustras. »

    46 Notamment Johann-Christian Pfister, Geschichte der Teutschen, Hamburg, F. Perthes, 1829, I, p. 4-6.

    47 Ferdinand Heinrich Müller, Die deutschen Stämme und ihre Fürsten, oder historische Entwicklung der Territorial Verhältnisse Deutschland im Mittelalter comprend les volumes suivants : I, Vorgeschichte der deutschen Stämme bis zur Bildung des fränkischen Reiches der Merowingern, Berlin, Luderitz, 1840 ; II, Geschichte der deutschen Stämme in Verbindung mit dem fränkischen Reiche der Merowingern und Karolingern, 1841 ; III, Die deutschen Stämme in dem karolingischen Reiche und die Begründung des deutschen Reiches, 1842 ; IV, Historisch-geographische Darstellung von Deutschland im Mittelalter, vornehmlich während der Zeit des zehnten Jahrhunderts, 1 : Die Länder Hohenrätien, 1852.

    48 Müller 1840, I, p. 310-328.

    49 Ibid., p. 1-2 : « Das Heimatland des deutschen Volkes, auf dessen Boden sich aus den verschiedenen Stämmen desselben die Reihe von grössen und kleinern Staaten ausgebildet hat, welche jetzt von dem deutschen Bunde umfasst werden, gehört nach seinen natürlichen wie nach seinen historisch-ethnographischen Verhältnissen zu den wichtigsten Teilen von Europa » (La patrie des peuples allemands, sur le sol duquel une série de petits et grands États se sont construits, issus de tribus diverses, qui forme maintenant le Deutsche Bund, cette patrie compose, par ses liens naturels, historiques et ethnographiques, la partie la plus importante de l’Europe).

    50 Ernst-Theodor Gaupp, Recht und Verfassung der alten Sachsen, Breslau, Max u. C., 1837 ; Id., Lex Francorum Chamavorum oder das vermeintliche Xantener Gaurecht, Breslau : Max u. C., 1855.

    51 Les Allemands du temps passé étaient grands, forts et beaux. La couleur de leur peau était d’un blanc pur et leur chevelure dorée se répandait en ondulant, telle la crinière du lion, tant chez les hommes que chez les femmes, et de leur grands yeux bleus perçait un regard noble empli de courage et de fière liberté : E. Duller, Geschichte des deutschen Volkes I, Leipzig, 1840, p. 6.

    52 « Die Deutsche Geschichte beginnt, da die Angehörigen des Volksstammes, den die Alten als Germanen bezeichnen, an den Gestaden der nördlichen Meere, Nord- und Ostsee, auftreten » : Georg Waitz, Deutsche Verfassungsgeschichte, Kiel, Weidmann, 1844, I, p. 3.

    53 Heinrich Luden, Vier öffentliche Lesungen, Göttingen, 1810, présente les peuples allemands comme les « Herren der Welt », les maîtres du monde, expression dans laquelle la connotation guerrière est évidente ; Christoph Adelung, Aelteste Geschichte der Deutschen, Leipzig, 1806, emploie les deux termes ; Michael-Ignaz Schmidt parle pour le Volk de « Schimpfname », Schmidt, p. 13.

    54 « Chez une nation aussi guerrière que les Germains, l’armée équivaut au peuple en armes » : Moritz August von Bethmann-Hollweg, Ueber die Germanen von der Völkerwanderung, Bonn, Marcus, 1850, p. 30.

    55 « Sol de la patrie » : conformément à l’historiographie traditionnelle, l’Allemagne est la patrie et non le sol naturel des Germains ; c’est celui qu’ils se sont choisis après de nombreux mouvements migratoires semblables à ceux qui caractérisent l’ensemble des groupes humains : Moritz-August von Bethmann-Hollweg, 1850, p. 3.

    56 Ibid., p. 6.

    57 Ibid., p. 23, n. 3 et p. 24 « weit entfernt eine Nationalstaat zu bilden ».

    58 Ibid., p. 25 « Im modernen Sinn war der germanische Staat eine Aristokratie des Standes der Freier ».

    59 Moritz Arndt, Pro populo germanico, Berlin, Reimer, 1854, p. 2, et à la suite : « l’Allemand belliqueux, entreprenant et résolu, a été créé pour coopérer à la domination mondiale et avant tout pour établir chez lui une forte unité nationale ».

    60 Heinrich von Treitschke critique la doctrine du « désir de jouir aveuglément de la paix » en ces termes : « L’État n’est pas une Académie des Beaux-arts, l’État est une puissance ». Il est l’historien officiel d’une Allemagne dominée par la Prusse, et ses biographes soulignent chez lui le sacrifice de l’objectivité historique sur l’autel de l’unité nationale. U. Langer, Heinrich von Treitschke. Politische Biographie einer deutschen Nationalist, Dusseldorf, Droste, 1998. Son antisémitisme militant l’éloignera de son collègue Theodor Mommsen.

    61 Sur l’homme et sa pensée, Alexander Demandt éd., Theodor Mommsen. Wissenschaft und Politik im 19. Jht, Berlin, de Gruyter, 2005.

    62 Notamment Charles Andler, Les Origines du pangermanisme 1800-1880, Paris, Conard, 1915 ; Pierre Imbart de la Tour, Le Pangermanisme et la philosophie de l’histoire, Paris, Perrin, 1916.

    63 Nom donné par les critiques allemands à ces professeurs romanciers dont les œuvres furent de véritables bestsellers, parmi lesquels : Gustav Freytag, Bilder aus dem Mittelalter, Leipzig, Hirzel, 1859 et Die Ahnen, Leipzig, 1872-1880 ; Felix Dahn, Die Könige der Germanen, onze volumes, Leipzig, Fleischmann, 1861-1909.

    64 Le cas de Felix Dahn a fait l’objet, depuis le début du xxie siècle, d’un renouveau d’attention et a donné lieu à plusieurs études. Notamment Rainer Kipper, Der Germanenmythos im Deutschen Kaiserreich. Formen und Funktionen historischer Selbstthematisierung, Göttingen, Vandenhoeck und Ruprecht, 2002.

    65 Felix Dahn, Urgeschichte der germanischen und romanischen Völker, Berlin, Grote, 1881, première partie p. 137 à 594 « Die Ostgermanen : die Völker der gothischen Gruppe » : ils rassemblent ainsi les Ostrogoths et Wisigoths, ainsi qu’une partie des Suèves (ceux qui s’installeront en Espagne).

    66 Felix et Therese Dahn, Walhall : Germanische Götter und Heldensagen, Kreuznach, Voigtländer, 1885, introduction.

    67 Ibid. : le plan original de l’ouvrage présente d’abord le panthéon germanique (Odin, Thor, Freyr, Loki…) et sa correspondance avec ses équivalents grecs et romains, et ainsi de suite pour toute la culture germanique, dans le but de présenter un tableau équivalent en valeur aux autres civilisations antiques.

    68 Dahn, 1881, I, p. 3 : « Der Name Arier, welchen sich diese Völker beilegten, wird erklärt als : die Herren, die Edeln im Gegensatz zu den Nachbarn anderer Rassen / Le nom d’aryen, qui désigne ces peuples, s’entend ainsi : les seigneurs ou les nobles, en opposition aux autres races voisines ».

    69 Ibid., p. 16-17 : « Wie alle arischen Völker führten die Germanen ihre Abstammung auf die Götter zurück : und diese Abstammungssage enthält zugleich den stärksten Ausdruck dafür, dass ihnen ein Gefühl der Zusammengehörigkeit, der Blutgemeinschaft gegenüber fremden Völkern nicht völlig gebracht / comme tous les autres peuples aryens les Germains faisaient remonter leur origine aux Dieux : et cette légende d’origine participait en même temps à l’expression forte d’un sentiment d’appartenance, d’une communauté de sang vis-à-vis des autres peuples ».

    70 Dahn, 1885, p. 3 : « le bien le plus élevé des Allemands sur la terre, c’est le peuple allemand lui-même ».

    71 Agnès Graceffa, « La tentation de la pensée raciale dans les lectures historiographiques françaises et allemandes 1920-1930 du peuplement dit germanique de la Gaule », in Carole Reynaud-Paligot éd., Tous les hommes sont-ils égaux – Histoire comparée de la pensée raciale 1860-1930, Munich, Oldenbourg Verlag, p. 98-110.

    72 Gustav Kossinna, Ursprung und Verbreitung der Germanen in vor- und frühgeschichtlicher Zeit, Leipzig, Kabitzsch, 1926, mais également les articles de la revue Mannus et publications de la Mannus-Bibliothek.

    73 Entre autres, pour les territoires de l’Alsace-Moselle, l’ouvrage d’Adolf Schiber, Die fränkischen und alemannischen Siedlungen in Gallien, besonders in Elsass und Lothringen, Strasbourg, Karl Trübner ed., 1894.

    74 Graceffa 2009, p. 220 et s.

    75 Otto-Gerhard Oexle, in Jean-Claude Schmitt, et Otto Gerhard Oexle, dir., Les tendances actuelles de l’histoire du Moyen Âge en France et en Allemagne, Paris, PUPS, 2002.

    76 La mainmise progressive du régime nazi s’effectue sur l’ensemble des instances scientifiques, des MGH à l’Historische Zeitschrift. Sur ce dernier exemple, Ursula Wiggershaus-Müller, Nationalsozialismus und Geschichtswissenschaft. Die Geschichte der Historischen Zeitschrift und des Historischen Jahrbuchs 1933-1945, Hambourg, Kovac, 1998 ; Étienne François, « Allemagne », in Dictionnaire des sciences historiques, Paris, 1986, p. 17 ; Ernst Schulin, Deutsche Geschichtswissenschaft nach dem Zweiten Weltkrieg (1945-1965), Munich, Oldenbourg, 1989 ; Édouard Husson, Les historiens de la RFA (1949-1998), leurs travaux sur l’Allemagne depuis Bismarck et la question de l’identité politique allemande, thèse de doctorat, Paris IV, 1998 ; Anne Christine Nagel, Im Schatten des Dritten Reichs. Mittetlalterforschung in der Bundesrepublik Deutschland 1945-1970, Göttingen, 2005.

    77 C’est l’idée selon laquelle des populations ethniquement différentes peuvent cohabiter de longs siècles ensemble et former société sans pour autant se mélanger biologiquement : chacune demeure racialement pure, même s’elles partagent une culture commune. Graceffa, 2009, « La tentation… ».

    78 Franz Petri, Germanisches Volkserbe in Wallonien und Nordfrankreich, Bonn, Ludwig Röhrscheid Verlag, 1937.

    79 Otto Brunner, Land und Herrschaft, Vienne, Rohrer, 1939, p. 105-106.

    80 Heinrich Bausinger, Volkskunde ou l’ethnologie allemande, Paris, Maison des sciences de l’homme, 1993.

    81 Hans Haussherr, « Verfassungstypen deutscher Volksgruppen im Auslande », Historische Zeitschrift, 1939/160, p. 35-78.

    82 Alfred Rosenberg, Der Mythus des 20. Jahrhunderts, Munich, Hoheneichen, 1930 ; Walter Franck, « Zunft und Nation. Rede zur Eröffnung des Reichsinstituts für Geschichte des neuen Deutschland », Historische Zeitschrift, 1936/153, p. 12-29. Dans ce discours totalement en phase avec l’idéologie nazie, il faut souligner la présence récurrente des deux termes de sang et de révolution (p. 14 : « Wir sind Blut vom Blut und Fleisch vom Fleisch eurer Revolution und eures Reiches » : nous sommes le sang du sang et la chair de la chair de notre révolution et de notre Empire). Sur ce thème, Uwe Puschner, Die völkische Bewegung im wilhelminischen Kaiserreich, Darmstadt, WBG, 2001, p. 10-11.

    83 Graceffa 2009, p. 205 sq.

    84 Id., « L’Europe de Clovis comme référence discrète de l’idée européenne », in Hélène Yèche éd., 1957 : histoire et images des origines, Paris, Publibook, 2009, p. 41-58.

    85 Karl Schmid, J. Wollasch, « Societas et Fraternitas. Begründung eines Quellenwerkes zur Erforschung der Personen und Personengruppen des Mittelalter », Frühmittelalterlichen Studien, IX, 1975, p. 1-48.

    86 Karl-Ferdinand Werner, « Problematik und erste Ergebnisse des Forschungsvorhabens PROL. Zur Geschichte der west- und mitteleuropäischen Oberschichten bis zum 12. Jht », in Quellen und Forschungen aus italienischen Archiven und Bibliotheken, 1977/57, p. 69-87. Cette entreprise a une longue histoire : la Prosopographia Imperii Romani avait été initiée par Theodor Mommsen en 1874. En 1950 étaient nés deux projets, la Prosopographie chrétienne du Bas-Empire pour le personnel religieux et la Prosopography of the later Roman Empire (PLRE) pour les membres de l’administration : Henri Chantraine, « Ein neues Hilfsmittel zur Erfoschung der Spätantike : Die Prosopographie chrétienne du Bas-Empire », Francia, 1983/11, p. 697-712.

    87 Hans-Werner Goetz, « Die Wahrnehmung von Staat und Herrschaft im frühen Mittelalter », in Stuart Airlie, Walter Pohl, Helmut Reimitz éd., Staat im frühen Mittelalter, Wien, OEAW, 2006, p. 39-58.

    88 Karl Schmid, « Über das Verhältnis von Person und Gemeinschaft im früheren Mittelalter », Frühmittelalterlichen Studien, 1967/1, p. 225-249 ; Karl-Ferdinand Werner, « Liens de parenté et noms de personnes. Un problème historique et méthodologique », in Georges Duby, Jacques Le Goff éd., Famille et parenté dans l’Occident médiéval, Rome, EFR, 1977, p. 13-34. L’historien reprend la problématique initiée par Hans-Walter Klewitz, « Namengebung und Sippenbewusstsein in den deutschen Königsfamilien des 10. bis 12. Jht. », Archiv für Urkundenforschung, 1944/18, p. 23-27.

    89 Jörg Jarnut, Agilolfingerstudien. Untersuchungen zur Geschichte einer adlingen Familie im 6. und 7. Jht., Stuttgart, Hiersemann, 1986.

    90 Karl Bosl, « Der Adelsheilige. Idealtypus und Wirklichkeit, Gesellschaft und Kultur im merowingischen Bayern des 7. und 8. Jhts », Speculum Historiale. Fs J. Spörl, 1965, p. 167-187.

    91 Jörg Jarnut, « Nobilis non vilis, cuius et nomen et gens scitur », in Dieter Geuenich, Wolfgang Haubrichs, Jörg Jarnut éd., Nomen et gens : zur historischen Aussagekraft frühmittelalterlicher Personennamen, New York – Berlin, De Gruyter, 1997, p. 116-126.

    92 Id., « Avant l’An Mil », in L’anthroponymie : document de l’histoire sociale des mondes méditerranéens médiévaux, Rome, EFR, 1996, p. 7-18.

    93 Georges Duby éd., Histoire de la famille, Paris, Armand Colin, 1986 ; Michel Rouche, « Des mariages païens au mariage chrétien, sacré et sacrement », in Segni e riti nella chiesa altomedievale occidentale, Spoleto, 1987 (Settimane di studio del Centro del Centro italiano di studi sull’alto medioevo, XXXIII), p. 835-880.

    94 Wenskus, Stammesbildung und Verfassung. Das Werden der frühmittelalterlichen gentes, Cologne, Böhlau, 1961.

    95 Céline Martin, « La notion de gens dans la péninsule ibérique », in Véronique Gazeau, Pierre Bauduin, Yves Modéran, dir., Identité et ethnicité. Concepts, débats historiographiques, exemples (iiie-xiie siècles), Caen, Centre de Recherches Archéologiques et Historiques Médiévales, 2008, p. 75-89.

    96 Anne Lefebvre-Teillard, Le Nom. Droit et histoire, Paris, PUF, 1990 : contrôle du nom premier stade du contrôle administratif des individus par l’état ; Guy Brunet, Pierre Darlu, Gianna Zei, dir., Le Patronyme. Histoire, anthropologie, société, Paris, CNRS éditions, 2002 : l’article de Patrick Beck, Monique Bourin et Pascal Chareille, « Nommer au Moyen Âge : du surnom au patronyme », p. 13-38, revient sur l’évolution des surnoms de la fin du xe siècle au xiie en soulignant l’importance des divergences régionales. Parallèlement Nicole Lapierre, « L’emprise du national sur le nominal », Ibid., p. 115-131, rappelle les processus autoritaires étatiques de changement de nom.

    97 Anita Guerreau-Jalabert, Régine Le Jan, Joseph Morsel, « De l’histoire de la famille à l’anthropologie de la parenté », in Schmitt et Oexle, 2002, p. 433-446.

    98 Didier Lett, Famille et parenté dans l’Occident Médiéval ve-xve siècle, Paris, Hachette, 2000 ; Régine Le Jan, Famille et pouvoir dans le monde franc (viiie-xe siècle). Essai d’anthropologie sociale, Paris, Publications de la Sorbonne, 2003 ; Id. et François Bougard, Laurent Feller éd., Dots et douaires dans le monde franc, Rome, EFR, 2002 ; ead., Male ordine tenent. Transferts patrimoniaux et conflits dans le monde franc, Rome, EFR, 2006.

    99 Laurence Leleu, Autour de Thietmar de Mersebourg et de sa Chronique. Représentations de la famille aristocratique en Germanie vers l’an mil, Thèse soutenue le 12 juin 2010 sous la direction de Régine Le Jan, Université de Paris I- Panthéon Sorbonne, publication en cours ; Hans Werner Goetz, « Verwandtschaft im früheren Mittelalter (I) : Terminologie und Funktionen », in Gerhard Krieger éd., Verwandschaft, Freundschaft, Bruderschaft. Soziale Lebsens- und Kommunikationsformen im Mittelalter, Berlin, Akademie Verlag, 2009, p. 15-35.

    100 Nous renvoyons ici en priorité aux travaux de Claude Gauvard.

    101 « Pendant toute cette longue période, les clercs adaptent progressivement les anciens modèles culturels romains et bibliques de la lignée agnatique, dont ils sont les dépositaires, aux tendances dans la société des généalogies germaniques, nordiques ou celtiques, qui donnent autant d’importance aux familles alliées qu’aux ancêtres directs. La réapparition de la généalogie savante se fait donc par le biais de généalogies religieuses, dans le domaine hagiographique » : les généalogies de saints, par exemple en 1075 la Vita Servatii, et innovation au xiie avec l’arbre de Jessé, métaphore végétale de l’arbre pour imager la filiation biblique, Codex aureus de Lorbach et verrières de Saint-Denis programmées par Suger. Sur ce sujet, Emmanuel de Bos, La généalogie. Familles, je vous aime, Paris, Gallimard, 1998, p. 42-43. L’ouvrage de référence sur l’émergence, le développement, l’iconographie de ces arbor consanguinitatis ou affinitatis : Christiane Klapisch-Zuber, L’ombre des ancêtres. Essai sur l’imaginaire médiéval de la parenté, Paris, Fayard, 2000.

    102 Tel qu’il apparaît en général quand on pense généalogie : par exemple Tifaine Barthélémy et Marie-Claude Pingaud dir., La généalogie entre science et passion, Pairs, éditions du CTHS, 1997.

    103 Joseph Morsel, L’aristocratie médiévale – La domination sociale en Occident (ve-xve siècle), Paris, Armand Colin, 2004.

    104 Ernest Renan, Qu’est ce qu’une Nation ?, Paris, Calmann Levy, 1882, p. 16.

    105 La question est désormais débattue (colloque de Berlin 2015 « Genetic History : A challenge to Historical and Archeological Studies », Session de l’Institute for Medieval Studies de Leeds de 2015 « Methods to Reconstruct Migration », colloque « Genetics and the hongobard Migration » porté par le groupe ERC « Social cohesion, identity and religion in Europe 400-1200 ».

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    Graceffa, A. (2016). Recréer un récit génétique pour les nations françaises et allemandes aux xixe et xxe siècles. In I. Luciani & V. Piétri (éds.), L’incorporation des ancêtres (1‑). Presses universitaires de Provence. https://doi.org/10.4000/books.pup.27643
    Graceffa, Agnès. « Recréer un récit génétique pour les nations françaises et allemandes aux xixe et xxe siècles ». In L’incorporation des ancêtres, édité par Isabelle Luciani et Valérie Piétri. Aix-en-Provence: Presses universitaires de Provence, 2016. https://doi.org/10.4000/books.pup.27643.
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    Luciani, I., & Piétri, V. (éds.). (2016). L’incorporation des ancêtres (1‑). Presses universitaires de Provence. https://doi.org/10.4000/books.pup.27588
    Luciani, Isabelle, et Valérie Piétri, éd. L’incorporation des ancêtres. Aix-en-Provence: Presses universitaires de Provence, 2016. https://doi.org/10.4000/books.pup.27588.
    Luciani, Isabelle, et Valérie Piétri, éditeurs. L’incorporation des ancêtres. Presses universitaires de Provence, 2016, https://doi.org/10.4000/books.pup.27588.
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