Chapitre I. Cours pratiques et écoles secondaires1
Une expérience révolutionnaire étranglée ?
p. 21-50
Texte intégral
1Même si leur fonctionnement est mal connu, on sait au moins qu’il n’existe en France, entre 1803 et 1875, que trois facultés de médecine d’inégale importance, celle de Paris l’emportant de loin sur celles de Montpellier et, a fortiori, de Strasbourg2. En revanche, on ignore le plus souvent l’existence, le nombre et le rôle de la vingtaine de cours pratiques, baptisés écoles secondaires de médecine à partir de l’ordonnance3 de 1820. Peu étudiés et connus4, ces cours et écoles ont mauvaise réputation. Les rares historiens qui s’y sont intéressés insistent sur les conditions sordides de leur hébergement, leur manque de moyens matériels, l’illogisme des cursus, le peu de zèle et de capacité des professeurs et des étudiants. Tout cela est volontiers mis au compte d’une cascade de démissions : celle de l’État qui refuse de les financer ; celle des hôpitaux et des municipalités qui ne les soutiennent qu’avec réticence. Aussi, leur progressive intégration dans le sein de l’Université et leur transformation en écoles préparatoires aux facultés sont-elles toujours décrites comme des évolutions positives qui améliorent la qualité de l’enseignement dispensé et augmentent le niveau des connaissances de ceux qui les fréquentent5.
2 Pourtant, cette vision, qui reprend les attendus du procès instruit dès le départ par les élites médicales et les gouvernants ne saurait résumer toute l’histoire. À compulser les archives qu’ils ont laissées, on peut avoir le sentiment que ces cours ont été bien autre chose qu’une pâle copie de l’enseignement universitaire. Portés par des médecins de province, des autorités locales, des représentants du pouvoir central, ces cours et écoles ont été porteurs d’un projet cohérent dépassant largement les impératifs d’une formation technique. Il s’agissait, ni plus ni moins que de former de façon très pratique et solide des officiers de santé issus de milieux très modestes, destinés non seulement à soigner les habitants des campagnes mais aussi à leur apporter en douceur et avec compréhension les lumières de l’hygiène et de la civilisation. Aussi est-il permis de voir dans la critique, puis la mise au pas de ces expériences, le refus de méthodes et de projets trop révolutionnaires aux yeux d’une élite médicale soucieuse de réduire le nombre de médecins et empressée à faire disparaître l’officiat de santé. Soutenue par le pouvoir central, elle finit par l’emporter, gachant peut être les chances d’un dialogue plus égalitaire et fructueux entre les porteurs des Lumières et la masse de la population, compromettant les espoirs d’une médicalisation douce et acceptée. L’intérêt du sujet dépasse donc largement le récit d’une expérience limitée et malheureuse.
De la naissance à la reconnaissance
3Même s’il est loin d’être complet, le tableau des enseignements médicaux connus existant au tout début du xixe siècle est dense et bariolé. Cet enseignement naît d’initiatives locales associant médecins, municipalités, hôpitaux et autorités départementales. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, ces créations ne sont pas toutes imposées par la suppression de toute forme d’enseignement officiel entre 1792 et 1794 et nombre d’entre elles naissent avant la Révolution. Si les préfets jouent un rôle actif pour coordonner ces actions et organiser ces cours, ils le font beaucoup plus comme porte-parole des intérêts locaux que comme représentants du pouvoir central. Celui-ci ne reconnaît que tardivement, au coup par coup et avec beaucoup de réserves, l’existence de ces enseignements.
Les créations révolutionnaires
4L’image d’une Révolution faisant table rase de toute forme d’enseignement médical est bien simplificatrice. Des petites universités d’Ancien Régime comme celle de Douai délivre des diplômes jusqu’en 1793 et celle de Caen confère à nouveau des grades de docteur en médecine dès l’an III (1794-1795) et se voit reconnaître de facto par le ministre de l’Intérieur6. Là où cessent officiellement les enseignements, des cours informels prennent le relais comme à Toulouse où, « même dans les temps les plus orageux, des médecins et des chirurgiens, cédant à une foule d’étudiants qui suivent les hôpitaux, se déterminèrent à faire des cours publics dans l’une et l’autre science7 ». Le maintien de cours informels à Douai après la fermeture de l’université est plus douteux car il n’est attesté que quarante ans plus tard par un maire en campagne pour obtenir une école préparatoire. Selon lui, « les élèves n’avaient pas oublié les chemins de leur ancienne école. Quelques professeurs, heureux et fiers de cette marque de confiance, s’étaient empressés de satisfaire aux vœux de ces jeunes gens en ouvrant des cours gratuits et publics de médecine8 ».
5Paradoxalement, à Poitiers où l’enseignement avait cessé au milieu du siècle précédent, « les cours furent plus variés et plus nombreux sous la Révolution qu’auparavant9 ». Les anciennes écoles de chirurgie résistent encore mieux que les facultés de médecine et l’on voit celle de Rennes délivrer des diplômes jusqu’en 1795 avant de se prolonger par des cours donnés tant à l’hôpital que dans les prisons et les infirmeries militaires. À Lille, l’administration départementale décide dès mars 1797 d’instituer des cours de médecine et de chirurgie confiés aux anciens professeurs du ci-devant collège de chirurgie. Quant aux enseignements cliniques officieux établis à la fin de l’Ancien Régime, ils bénéficient plus qu’ils ne souffrent de la Révolution. Sur le modèle des leçons données par Pierre-Joseph Desault (1738-1795) et Louis Desbois de Rochefort (1750-1786) dans des hôpitaux parisiens, des enseignements cliniques informels fonctionnent dans des hôpitaux de province.
6À Bordeaux, deux séries de cours concurrents existent à la fin de la Révolution à l’hôpital Saint-André et à l’hôpital Saint-Côme. À Nantes se crée en mai 1793 une sorte de petite école de chirurgie particulière assez vite transférée dans les locaux de l’hôtel-Dieu de la ville et à Rouen il existe des cours réguliers et une école d’anatomie artificielle10. À Lyon, le chirurgien Marc-Antoine Petit (1766-1811) et son successeur Lucien-Victor Cartier (1768-1839) donnent des leçons cliniques à l’hôtel-Dieu de la ville. En l’an IX, l’enseignement chirurgical s’y structure de façon plus formelle. À l’hôpital des malades (Hôtel-Dieu), le chirurgien-major (chirurgien en chef recruté par concours) assure un cours de chirurgie théorique et d’opérations ainsi qu’un cours de clinique pendant que son adjoint (l’aide-major) fait « un cours d’anatomie complète auquel il joint les détails physiologiques11 ». Dans l’hospice voisin des vieillards et des orphelins (future Charité), le jeune chirurgien-major de cet établissement « professe un cours théorique et pratique d’accouchements, de maladies des femmes et des enfants nouveau-nés12 ».
7D’autres enseignements cliniques au statut encore plus original ne sont que temporairement affectés par la Révolution. C’est le cas de l’école d’anatomie et de chirurgie ouverte en 1771 à l’hôpital militaire de Grenoble où se formaient des élèves destinés à faire des officiers de santé pour les campagnes du département. Interrompue par suite de la Révolution, cette école survit si bien dans le souvenir que dès l’an XI, le préfet la rétablit. Très vite, son enseignement s’étend à toutes les branches de la médecine et de la chirurgie13. À Arras, l’école complète et gratuite de chirurgie établie par les États provinciaux d’Artois en 1757 ne semble guère disparaître avant d’être officiellement réorganisée par l’arrêté préfectoral du 28 thermidor an VIII14.
8Au total, la Révolution n’a pas freiné le développement d’un enseignement chirurgical essentiellement pratique et clinique. Bien au contraire, la disparition des anciennes facultés et des monopoles a plutôt stimulé leur création.
Une officialisation hésitante
9La période consulaire et les débuts de l’Empire voient l’officialisation de ces cours. Celle-ci vient avant tout des autorités locales. Sociétés de médecine reconstituées, commissions administratives des hôpitaux, municipalités, préfets s’associent pour pérenniser ces cours et leur donner un statut moins fragile. Le gouvernement central n’intervient que dans un deuxième temps. Malgré les apparences, les décrets qui légalisent les cours visent plus à limiter leurs prérogatives qu’à renforcer leur position.
10Assez tôt reconstituées, les sociétés locales de médecine jouent un rôle déterminant dans le processus d’institutionnalisation. À Bordeaux, une association libre de médecins est à l’origine des cours ouverts à l’hôpital Saint-Côme et à Rennes la société libre d’instruction médicale présente un projet d’école en 180015. À Grenoble, la société de médecine est aussi l’inspiratrice de l’arrêté préfectoral qui reconstitue l’école de l’Ancien Régime16. À Besançon, la société de médecine nomme six de ses membres pour former l’école libre de médecine17. Dans la Somme, le comité de vaccine du chef-lieu, Amiens, tient lieu de société de médecine et « forme par sa réunion une école pratique de santé à l’usage des élèves qui se destinent à la profession d’officiers de santé dans le département18 ». Si la société médicale de Toulouse locale n’obtient pas la création d’une école spéciale de médecine (de plein exercice, comme Montpellier) cela ne l’empêche pas d’organiser des cours, peut-être depuis l’an X, à coup sûr depuis le début de l’an XIV (septembre 180519). Seule la société de Douai, malgré le passé prestigieux de la ville, l’engagement de la municipalité et des efforts poursuivis jusqu’au milieu des années 1830, ne réussit pas à organiser un enseignement officiellement reconnu20.
11La reconnaissance de ces cours est d’abord locale. Elle semble s’amorcer dans les départements « réunis » (annexés) de l’actuelle Belgique où les préfets français reconnaissent par arrêté des cours, sans doute établis auparavant, à l’hôpital Sainte-Élisabeth d’Anvers21, à Bruxelles et à Gand22. Le premier arrêté préfectoral de la France « de l’intérieur » concerne Arras23 (Pas-de-Calais) où l’école fondée par les États d’Artois n’avait jamais véritablement cessé de fonctionner. De là, l’exemple touche Lyon en l’an IX au moment où arrive un préfet jusque-là en poste à Anvers24. Suivent ensuite les arrêtés des préfets des départements de l’Isère (an XI25), de la Somme (an XII26) et du Nord (an XIII27) qui reconnaissent les écoles de Grenoble, Amiens et Lille. Ces mesures préfectorales ne sont pas toujours suivies d’effets. À Lyon, où l’arrêté du 5 thermidor an IX avait prévu d’ajouter un cours de clinique interne et un cours de clinique externe aux cours de chirurgie existants, rien ne se passe, sans doute parce que les hospices de Lyon peinent à financer la bibliothèque et le cabinet d’anatomie mis à leur charge par l’arrêté du préfet. À Grenoble, les départs massifs des jeunes chirurgiens pour les hôpitaux militaires et l’absence d’indemnités prévues pour les professeurs amènent une rapide décadence de ce premier enseignement reconnu28. D’autres projets d’arrêtés tentent de ranimer des institutions défaillantes comme à Lyon en 180629. Ailleurs, les réclamations des autorités locales débouchent sur des décrets impériaux qui semblent donner plus de solidité à ces cours.
12Les décrets impériaux puis les ordonnances royales qui interviennent à partir de 1806 sont pourtant loin de donner à ces cours l’assise solide que l’on supposerait. D’abord certains cours, et non des moindres, sont oubliés. Les cours de Lyon obtiennent leur reconnaissance nationale en 1819 seulement et fonctionnent avant cette date dans un cadre purement interne aux hôpitaux de la ville. Le cas de Marseille est tout à fait paradoxal. Créés par les médecins des hôpitaux en 1806 et 1807, les cours30 légalisés par un décret du 7 juillet 1808, ne sont pas assurés dans les années suivantes. Un nouveau décret et un règlement adoptés en 1813 n’ont guère plus d’effets, eu égard « aux événements qui ont suivi » et c’est à partir de 1819 seulement qu’est organisé un enseignement relativement complet31. Les cours des hôpitaux de Lille, oubliés par le gouvernement impérial, semblent disparaître purement et simplement. Quant à Douai qui n’obtient aucune reconnaissance officielle, ni locale ni nationale, des cours semblent y être donnés au moins par intermittence. D’après le maire de 1839 :
L’administration du département protégea et provoqua la continuation de cet enseignement (établi après l’an III), l’autorité municipale la consolida et la consacra par l’établissement de cours destinés à l’enseignement de l’anatomie, de la botanique, de la théorie des accouchements et de l’application des bandages. [À plusieurs reprises, ] des médecins chargés du service des hôpitaux firent des leçons cliniques32.
13Pour les autres cours, l’émiettement des décrets, leur caractère sommaire et contradictoire montre bien qu’il n’existe pas de volonté centrale de mettre sur pied un réseau cohérent d’écoles secondaires de médecine comblant les lacunes d’un filet universitaire particulièrement lâche. Les décrets ne parlent du reste jamais d’écoles mais de cours dont il est précisé qu’il s’agit « de cours pratiques de médecine, de chirurgie et de pharmacie établis dans les hôpitaux et destinés spécialement à l’instruction des officiers de santé ». Les deux ou trois articles qui suivent ne disent rien du programme et de l’organisation des cours. Ils se contentent de prévoir que les professeurs seront choisis de préférence parmi les médecins attachés aux hôpitaux, nommés par le ministre sur proposition des commissions administratives et après approbation des préfets. Quant au financement, il n’est question que de la rétribution des professeurs, immédiatement mise à la charge des hospices. Un dernier article prévoit le choix par concours d’élèves expectants, externes et internes pour faire le service des hôpitaux33. Ne marquant aucune volonté politique globale, ces décrets ne sont pas non plus des chefs-d’œuvre de la législation napoléonienne. Si les premiers textes mettent la dépense à la charge des hospices, d’autres, comme à Poitiers34, la font peser sur les communes où, comme à Arras35, sur le département. Sans doute parce qu’ils recopient les arrêtés préfectoraux, certains décrets ont l’imprudence de qualifier ces cours de gratuits36. La négligence est pourtant telle qu’à la limite un même décret peut déclarer dans son article premier que les cours sont gratuits et fixer dans son article trois le montant de l’inscription annuelle réclamée de chaque élève37.
Une méfiance tenace
14Refusant tout financement, l’État exprime d’emblée par des notes et des courriers la méfiance dans laquelle il tient ces cours et prend soin de limiter leurs éventuelles ambitions. Dès 1807, à tous les projets qui osent parler d’école secondaire, ou prévoir la nomination d’un directeur, comme à Clermont-Ferrand, le ministre de l’Intérieur répond que ces cours qui commencent à porter ombrage aux grandes écoles (les futures facultés) ne doivent point être organisés comme ces établissements, ni sous le rapport de l’enseignement ni sous celui de l’administration. Qu’on ne doit y faire donner aucune instruction spéciale, mais seulement des cours élémentaires propres à former des officiers de santé. Que « ceux qui aspirent à cette profession n’ont besoin de connaître que les parties les plus simples de l’art de guérir38 ». Répondant au préfet de l’Isère, le ministre est encore plus clair. Refusant la nomination d’un directeur et d’un bureau d’administration, il réaffirme que « les cours constituent une dépendance de l’hospice placée sous la surveillance spéciale et immédiate de la commission administrative ». Il demande aussi de :
N’employer en aucun cas la dénomination d’école mais bien celle de cours qui désigne mieux la nature de l’établissement dont il s’agit qui est purement élémentaire (souligné dans le texte) et qui sert à le distinguer des écoles de médecine (les trois futures facultés) où l’on professe toutes les parties de l’art de guérir propres à l’enseignement des docteurs39.
15La deuxième réserve, apparemment contradictoire avec la première, concerne la gratuité et le montant des inscriptions. Face aux demandes de gratuité ou de baisse des droits d’inscription le ministre répond :
Qu’il y a beaucoup de raisons de désirer que les jeunes gens qui se destinent à cet état appartiennent à des familles dont la condition puisse permettre de payer quelque droit d’inscription. Un officier de santé sans aucun moyen d’existence pourrait devenir un praticien dangereux et sans délicatesse.
16De plus, l’article 7 du règlement suppose chez les élèves une éducation libérale, ou « du moins qu’ils n’appartiennent pas à la classe la plus ignorante de la société40 ». Ces jugements sur les cours de médecine, reconnus comme par inadvertance, montrent que le pouvoir central adopte très tôt une conception restrictive et élitiste de la loi de ventôse an XI (mars 1803) sur l’exercice de la médecine, en particulier en ce qui concerne les officiers de santé. Médecins de second ordre, déjà réduits à n’exercer que dans le département dans lequel ils ont été reçus par le jury médical et interdits de grandes opérations par la loi, ils se voient empêcher de facto d’acquérir une formation solide. Le piège qui finira par emporter l’officiat de santé en 1892 est déjà en place. Ne pouvant acquérir qu’une formation modeste à un prix de plus en plus élevé, ils devenaient les cibles toutes désignées des docteurs qui avaient beau jeu de dénoncer leur incompétence, même si celle-ci leur avait été largement imposée. Dans ce scénario, le pouvoir central choisit d’emblée de défendre les positions de l’élite médicale, peut-être au détriment de la santé des plus démunis. A contrario, ces premières mises en garde contre les prétentions exagérées de ces cours témoignent de la vigueur d’une vision bien différente portée par les élites locales.
Des laboratoires de transformation sociale
17Loin d’être une utopie portée par quelques rêveurs ou révolutionnaires attardés, la volonté de recruter des officiers de santé modestes et bien formés est portée par une coalition de notables locaux soutenus, autant qu’ils le peuvent, par les préfets. Plus encore que de soigner les corps des campagnards, il s’agit à leurs yeux de transformer profondément l’économie et la société rurale de l’intérieur en formant et en utilisant des élites qui en soient issues. Les effectifs et le profil des élèves montrent que la société est capable de fournir des candidats à ces fonctions de médiateurs sociaux et culturels.
Un outil de promotion sociale
18La volonté d’ouvrir les cours à des gens d’origine modeste est indéniable. L’instauration de cours gratuits, les revendications de réduction des droits d’inscription, l’octroi de dispenses témoignent de ce désir d’instruire « ces jeunes gens qui ont souvent plus de zèle et d’aptitudes que de moyens pécuniaires41 ». « Il est de l’intérêt de la société comme de la justice » écrit le recteur d’Aix-en-Provence en 1820, « de rendre l’étude de cette science aussi utile que la médecine à la portée du plus grand nombre d’étudiants possibles42 ». Ce programme est assez largement suivi dans un premier temps. La gratuité totale (Dijon, Poitiers) ou partielle (Marseille) des cours, la modestie des droits (24 francs par an à Toulouse en l’an XIII), la réduction des tarifs officiels pour « faciliter aux jeunes gens les moyens de suivre les cours », la dispense de droits « pour les étudiants qui n’ont pas reçu de leurs parents la somme nécessaire43 » prouvent que l’ouverture sociale n’est pas seulement un thème de discours. À une époque où ce n’est pas commun, les pouvoirs locaux s’engagent dans le financement des cours de médecine, même si c’est à un niveau modeste. À Dijon, à Poitiers, à Clermont-Ferrand, les conseils municipaux ouvrent chaque année un crédit de deux à quatre mille francs. Dans le Pas-de-Calais, dans la Somme, le Puy-de-Dôme, les conseils généraux les rejoignent, votant des sommes comparables. En revanche, les conseils municipaux des grandes villes comme Toulouse et Lyon concentrent leurs efforts sur les demandes d’ouverture de facultés dans leur ville et se désintéressent de leurs cours pratiques ou écoles secondaires44. Peuplées de grands notables, les commissions administratives ou conseils d’administration des hôpitaux ne rechignent pas trop à assumer la dépense que l’on met le plus souvent à leur charge. Là où il existe un internat hospitalier, comme à Lyon depuis 1802, elles y voient :
L’avantage de former des médecins dont les services pouvaient être utiles aux hôpitaux et d’utiliser et de fixer dans la maison des élèves internes qui, sans se déplacer, tout en faisant leur service, trouvent l’instruction nécessaire et les moyens d’obtenir leurs grades. [De plus, attirant dans] nos murs un grand nombre de jeunes médecins, vos concours pour l’internat dans vos hôpitaux offriront à votre choix plus de sujets distingués45.
19Plus encore, les mêmes acceptent le rôle que les médecins novateurs veulent confier aux hôpitaux. Ceux-ci « ne sont pas seulement faits pour le soulagement des malheureux mais encore pour l’instruction de ceux qui se destinent à la profession de médecin et de chirurgien ». Ainsi, financer une école « ce n’est pas détourner pour un usage étranger les fonds de ces établissements46 ». Cette politique volontariste réussit quelque temps et rencontre les aspirations de milieux sociaux modestes mais placés bien au-dessus du seuil de pauvreté.
20L’origine sociale « médiocre » des élèves ne fait guère de doute même si l’affirmation s’appuie plus ici sur des indices que sur l’analyse de registres d’inscription hélas absents des liasses consultées.
21À Toulouse en 1825, les responsables de l’école se désolent que peu d’élèves se présentent aux concours d’internes et externes qui ont lieu après la fin des cours. En effet, disent-ils, « presque tous les étudiants, appartenant à des parents peu fortunés habitant les campagnes, se sont hâtés, après la clôture des cours de rejoindre leurs familles, soit pour les aider à surveiller les travaux de la moisson, soit surtout pour abréger un séjour à Toulouse trop dispendieux47 » pour eux. Plus que des fils de métayers, on imagine bien d’après cette description des fils de ces petits bourgeois ruraux si typiques de l’Aquitaine, allant aider leurs parents à surveiller le travail des « estivandiers », ces salariés à l’année chargés des moissons48.
22Protestant contre l’absence de fonds ministériels, les élèves de « l’école publique de chirurgie de la ville d’Arras » affirment « être réduits à l’impossibilité de continuer leurs études car les grandes écoles ne peuvent être d’aucune utilité tant à cause des grands frais qu’elles occasionnent que de leur éloignement ». Il y a, ajoutent-ils « peu de parents dans ce pays capables d’apporter de si grands frais pour l’éducation d’un enfant et l’exercice de la chirurgie est trop modique pour faire la compensation de tant de frais et de sacrifices49 ».
23La modestie intellectuelle va de pair avec la modestie sociale. Les règlements ne réclament des élèves qu’un âge minimum (15 ou 16 ans), la capacité à parler et écrire correctement le français, savoir l’arithmétique et au moins les éléments de la langue latine qui permettent d’entendre les auteurs de la basse latinité. Encore cette disposition n’est-elle guère respectée, puisqu’à Toulouse, en 1820 « plusieurs élèves avaient négligé cette étude50 ». Les protestations et les émotions suscitées par les augmentations de droits d’inscription imposées par le gouvernement et la baisse des effectifs qu’elles entraînent, disent bien que l’essentiel de la clientèle de ces cours se recrute dans ces milieux situés dans une très petite aisance. À lire certains témoins, certes intéressés, on devine que la carrière d’officier de santé, si modeste et ingrate soit-elle, peut être une solution pour ceux qui, « nés au village, ont mesuré la difficulté d’y vivre et pour qui donner à leurs fils une profession non manuelle est le terme de leur ambition51 ». Parmi les avantages que vantent leurs défenseurs, les écoles rendent service aux familles en contribuant à « donner à peu de frais l’instruction médicale première à des jeunes gens dont l’avenir ne devait pas se borner au deuxième degré52 » (c’est-à-dire l’officiat de santé). Cette volonté d’ascension sociale par l’officiat de santé est confirmée par le directeur de l’école de Poitiers qui affirme en 1820, que « tant de familles sont en peine pour le choix d’un état qu’elles n’hésiteraient pas à faire parcourir à leurs enfants si, par de nouvelles difficultés il n’était plus permis de s’y introduire qu’après avoir reçu une éducation convenable53 ». Les effectifs de ces élèves modestes ne sont pas négligeables. Dans les deux premières décennies du siècle, les plus petites écoles, comme Reims (Rheims comme on l’écrit encore parfois), comptent une trentaine d’élèves. Le plus grand nombre (Dijon, Clermont-Ferrand, Grenoble, Poitiers, Amiens, Rennes) en comptent entre quarante et cinquante. Les plus grandes (Lyon, Marseille, Toulouse) entre quatre-vingt et plus de cent54.
24Ce bien trop bref aperçu sur les élèves permet pourtant de jeter un bref regard sur ces campagnes non immobiles, sur ces petits notables « accoucheurs du social55 » mis en scène par Balzac dans Le médecin de campagne.
Former les agents d’un service médical public
25Les cours de médecine servent pourtant à bien d’autres choses qu’à satisfaire les désirs d’ascension sociale des classes moyennes rurales. Ils sont par ailleurs loin de se limiter aux buts explicites que laisse supposer leur institution.
26Il s’agit bien sûr d’abord de former des officiers de santé compétents. À cet égard, les professeurs des écoles, docteurs en médecine, se lancent dans des plaidoyers qui tranchent avec les condamnations de leurs collègues parisiens et permettent de remettre en cause la prétendue unanimité des docteurs dans la dénonciation des médecins du second ordre accusés de tous les maux. Certes, par l’instauration des cours, il s’agit d’abord de combattre l’ignorance et le charlatanisme qui infesteraient les bourgs et les villages56, mais aussi d’éviter que les jeunes gens qui se destinent à l’art de guérir n’acquièrent qu’une expérience empirique faute d’être « dirigés dans leur état par un enseignement méthodique et progressif57 ».
27L’existence de deux ordres de médecins paraît à certains indispensable pour « assurer à tous des soins utiles et administrés à temps58 ». Cette volonté d’égalité entre les villes et les campagnes, cette idée d’une médecine égale pour tous est assez répandue. On la trouve à l’état pur au début du Consulat sous la plume des médecins titulaires de l’Hôtel Dieu de Lyon qui dénoncent un système qui priverait les pauvres des soins des médecins les plus confirmés pour les livrer à « des jeunes gens qui, sortant de leurs brillantes études viendraient sans garde, tenter l’application des connaissances qu’ils auraient acquises » et il se formerait ainsi « aux dépens des infortunés des médecins praticiens pour le public riche ». Aussi concluent-ils leur texte par une exhortation au conseil d’administration des hospices : « Ouvrez des écoles de clinique et les pauvres vous devront bientôt l’inappréciable avantage d’être soignés par des hommes dignes d’être comparés à ceux qui sont déjà en possession de la confiance de la classe opulente59 ». Fournir des médecins compétents aux habitants des campagnes est jugé nécessaire même et surtout « dans les contrées montueuses et difficiles dépourvues d’officiers de santé ».
28Autant que sur l’idée de justice, le projet s’appuie sur des notions d’utilité sociale dans lesquelles la représentation d’une médecine du travail réparatrice n’est pas loin puisqu’il s’agit de donner « à la classe utile des cultivateurs des secours dans leurs maladies et dans les accidents auxquels ils sont exposés par la nature de leurs travaux60 ». L’idée de faire de la médecine un véritable service public, héritière des expériences révolutionnaires et annonciatrice des débats sur les médecins cantonaux est présente au conseil municipal de Dijon qui, en 1808, imagine que, après l’école, « les préfets assigneraient aux officiers de santé des arrondissements et, lorsqu’une place viendrait à vaquer, son successeur pourrait être choisi parmi les meilleurs élèves61 ». À condition de ne pas redouter l’anachronisme du vocabulaire, on a parfois le sentiment qu’il est parfois question de faire des écoles des sortes d’observatoires de la santé et des centres de formation continue pour les médecins. Qu’on en juge :
Les professeurs de l’école, placés au milieu d’un pays industriel et agricole... ont pu, par les rapports qu’ils conservent avec leurs anciens élèves se faire une opinion assez exacte et des besoins sanitaires de la population et de l’importance de l’enseignement médical secondaire.
29En effet, ces écoles devraient être, aux yeux des mêmes professeurs, des « foyers qui recevront et resserreront les découvertes de la science et autour desquels viendront se ranger tous les praticiens des départements limitrophes ». Cela fera « un dépôt de secours pour les médecins qu’une grande épidémie effraie en bouleversant leurs idées62 ». Ce sera « une source où ils viendront retremper leur courage dans les moments difficiles63 ». Dans le même ordre d’idées, le préfet du Rhône propose en 1806 de charger le professeur d’hygiène et de la médecine légale [sic] d’une tâche « entièrement neuve » :
Il entrera dans ses attributions de faire un cours de trois mois pour les gardes malades64 dans lequel il leur fera connaître les devoirs et les fonctions de leur état, la manière d’aborder un malade, de lui parler, de le servir, de le transporter, de le changer, de donner un médicament, enfin tous ces détails que le temps seul peut apprendre aux gardes qui savent observer, qu’un grand nombre n’apprend jamais et qu’il est temps de placer parmi les plus indispensables de toutes en les considérant comme le seul moyen qui peut leur mériter le droit d’exercer leurs honorables fonctions65.
30À Amiens, laboratoire décidément dynamique en ce domaine, on prévoit d’imposer aux professeurs de donner trois fois par semaine des consultations gratuites dans une salle de la ville pour limiter le recours à l’hôpital et ainsi freiner la mendicité soi-disant provoquée par l’hospitalisation des chefs de famille66.
Apporter la « civilisation » dans les campagnes
31Les partisans des écoles de médecine dépassent en effet très vite les seuls arguments purement médicaux. La mission des officiers de santé qu’ils doivent former est « tout entière sociale puisque c’est sur leurs talents que repose la prospérité des campagnes car ils doivent détourner des habitants des campagnes cette source de misère » (qu’est la maladie). En plus :
Ils dissipent toutes les causes prédisposantes à ces maladies épidémiques si journellement néfastes mais ils portent dans l’hygiène publique cette perfection que, en vain, sans eux on attendrait longtemps, parce qu’elle leur a été démontrée dans toute sa clarté. L’économie sociale s’enrichira de ces principes et ils en seront considérés comme des fanaux qui devront être consultés.
32Ils favoriseront aussi le développement de la chimie dans l’agriculture. « Qui doute que sans elle l’agriculture française ne soit jamais venue à bout d’affranchir la France du monopole de l’Angleterre » (nous sommes en 1813). Enfin, les cours pratiques de médecine sont une école de morale et de formation sociale :
En effet, c’est au lit de la pitié reconnaissante, c’est à la vue du spectacle de toutes les misères que le cœur se forme. C’est en prenant pour guide ces hommes vertueux (les administrateurs), qu’on apprend à devenir le père des pauvres, le consolateur de l’homme souffrant67.
33Une fois faite la part du lyrisme et de l’exagération intéressée, il semble néanmoins que ces écoles, comme d’autres initiatives, manifestent la volonté de répandre largement les lumières et la prospérité. Faire reculer la maladie, répandre les bienfaits de la science et de l’instruction, développer la production agricole, faciliter la promotion sociale et promouvoir de nouvelles relations sociales, c’est tout un. Le meilleur exemple est celui de Douai. Fières du passé universitaire de la ville et de sa cour d’appel, les municipalités du début du siècle se lancent dans une politique « tous azimuts » pour faire de l’agglomération un centre de diffusion de l’instruction pratique. À en croire le maire en poste en 1838, l’administration municipale aurait créé successivement des écoles d’anatomie, de botanique, de peinture, de dessin, de calligraphie, de musique, d’architecture, de sciences appliquées aux arts et à l’industrie, de dessin pour la broderie lorsque la fabrication de tulle était en voie de prospérité et, plus tard une école d’enseignement mutuel, une école primaire supérieure. En même temps, elle ne négligeait rien de ce qui pouvait contribuer à leur développement. C’est dans ce but que :
Le musée prit chaque année un accroissement considérable et qu’indépendamment d’une bibliothèque précieuse et de riches collections de tableaux de zoologie, d’ornithologie, d’ichtyologie, de mollusques et de minéralogie, il possède une galerie d’anatomie comparée remarquable par le nombre de pièces quelle renferme68.
34Tableau visiblement flatté, projet encyclopédique un peu fou, sans doute. Néanmoins, on ne compte plus les villes qui organisent leur jardin botanique, (certaines allant même jusqu’à salarier un conservateur-professeur), les cours communaux de chimie, de physique, de mathématiques, les écoles de dessin qui fleurissent dans ces villes non universitaires.
35Certes, il s’agit là d’un prolongement direct du mouvement des Lumières du siècle précédent. On notera simplement qu’il se poursuit plus longtemps que les dates habituellement reconnues (vers 1820) et que les pouvoirs publics locaux semblent y jouer un rôle au moins aussi important que les philanthropes sur lesquels l’attention a été justement attirée il y a quelques années69. Enfin, de façon peut-être plus nette qu’au siècle précédent, ce changement culturel et économique ne compte pas seulement sur les élites pour triompher mais s’appuie explicitement sur des couches sociales intermédiaires.
Un enseignement riche, une pédagogie active
36Même s’il est plus difficile à appréhender, le caractère novateur de l’enseignement dispensé dans ces cours et écoles, est évident. Il repose essentiellement sur l’engagement demandé aux étudiants et sur la confiance qui leur est faite.
Un cursus complet
37Le tableau des enseignements démontre la volonté de fournir aux élèves une formation complète. Les différentes branches de l’art de guérir y sont d’emblée enseignées presque partout : anatomie, physiologie, pathologie et clinique externe, pathologie et clinique interne, accouchements et opérations, thérapeutique et matière médicale.
38Cependant, les plus petites écoles mettent en place ce programme de façon progressive. À Reims, l’enseignement clinique, créé à la fin de l’Ancien Régime (1780) est présent dès la création officielle du cours (1808). L’enseignement des accouchements et opérations s’y ajoute en 1810, suivi par l’anatomie et la physiologie et la pathologie chirurgicale en 1811. Enfin la matière médicale et la thérapeutique sont introduites en 181870. Le nombre variable des professeurs explique aussi certains regroupements, lacunes et particularités. Jusqu’en 1810 l’école d’Arras n’a que trois professeurs : le médecin enseigne la physiologie et la pathologie ; le premier chirurgien les accouchements, les maladies des os ; le second l’anatomie, l’art des bandages et des appareils71. Avec l’arrivée d’un quatrième enseignant, la recomposition nous paraît tout aussi curieuse : un professeur enseigne les éléments de médecine ; un autre la physiologie, l’hygiène et la pathologie chirurgicale ; le troisième l’anatomie et les opérations ; le quatrième la thérapeutique chirurgicale, les maladies des os, les bandages et les appareils.
39Dans la plupart des écoles, munies de six professeurs, le dispositif le plus fréquent associe anatomie et physiologie, matière médicale et thérapeutique, accouchements et opérations, pathologie et clinique externe, pathologie et clinique interne. Néanmoins, cours de clinique et cours de pathologie sont parfois entièrement séparés (Clermont-Ferrand et Grenoble en 1807, Marseille en 1819). L’hygiène, la salubrité, la médecine légale sont plutôt l’apanage des plus grandes écoles, à l’exception d’Amiens décidément porteuse du projet global le plus cohérent. L’enseignement de l’hygiène et de la salubrité y apparaît de façon autonome dès l’an XII. À Besançon il est associé à celui de la pharmacie, à Toulouse à celui de la physiologie, à Nantes à celui de la thérapeutique. Lyon l’ignore jusqu’en 1830 où elle apparaît sous le nom de médecine légale, comme à Clermont-Ferrand dès 1807. Seule Marseille en 1819 crée une chaire d’hygiène publique et de médecine légale. Malgré ces ajustements progressifs, les cours et écoles de médecine finissent très vite par calquer leurs programmes sur celui des facultés.
40En revanche la régularité des enseignements, l’établissement d’un cursus rigoureux prennent plus de temps. À Amiens au début du siècle, chaque cours ne dure que deux mois par an à raison de trois leçons d’une heure par semaine. Par la suite, l’enseignement s’étend sur l’ensemble de l’année (1er octobre / 31 août) mais il est plus ou moins intense (trois heures par jour à Besançon en 1807 ; une leçon par jour à Amiens à partir de 1806) et irrégulièrement suivi par les étudiants, surtout à la belle saison72. L’établissement d’un cursus progressif est loin d’être de règle. Il apparaît d’abord à Clermont-Ferrand en 1808 où l’on distingue la section des débutants, livrée pendant le semestre d’été à l’étude de l’anatomie et de la chimie et pendant le semestre d’hiver à celle de la pathologie externe et des opérations. La deuxième section étend son apprentissage à la pathologie interne, à l’art des accouchements, à la matière médicale. La troisième section s’initie à la clinique, à la médecine légale tout en approfondissant l’étude des pathologies externe et interne73. Ce modèle qui va du plus théorique au plus pratique et du plus externe au plus interne s’impose ensuite à Rennes (1819-1821) puis à Lyon (1825) avant d’être généralisé par les ordonnances de 1837.
Le primat de la clinique
41Beaucoup plus que les cours théoriques qui peuvent paraître limités, les écoles privilégient l’enseignement clinique. Les cours de clinique représentent souvent le tiers de l’enseignement, et la préoccupation pratique irrigue tous les cours. À Amiens, « les professeurs s’attachent de toujours étayer la théorie par une pratique sage et pure et il (l’enseignement) est organisé de manière que le matin les élèves reçoivent au lit des malades une ample leçon de pratique de sorte que la clinique devient pour eux un cours perpétuel74 ». À Lyon il est de tradition que les chirurgiens en chef donne des « leçons familières non préparées inspirées journellement par les résultats de leur pratique75 ». Ces pratiques reflètent le prix que les organisateurs des cours accordent à la clinique. « Il est hors de doute », écrit l’administration des Hospices civils de Lyon :
Que dix années d’études dans les livres ne seront jamais aussi profitables à celui qui veut pratiquer l’art de guérir qu’un bien moins grand nombre d’années passées auprès du lit des malades dans un hôpital où toutes les espèces de maladies passeront successivement sous ses yeux... Ces considérations peuvent faire présager un avenir brillant à notre école puisqu’elle possède l’avantage d’offrir aux élèves d’excellentes leçons de clinique médicale et chirurgicale, que presque aucune autre école secondaire de médecine ni même aucune faculté ne peut rivaliser avec elle76.
42Dans certains cas on peut connaître un peu plus précisément le déroulement de ces leçons.
Au début, le professeur fait des leçons préliminaires qui ont pour objet quelques notions de pathologie régulières et surtout l’art d’examiner et d’interroger les malades. Au lit du malade, on se borne à constater les symptômes. Tout ce qui est relatif à la nature de la maladie, à son degré de gravité, au traitement, est expliqué par le professeur dans la salle des leçons après que les élèves qui en sont chargés aient donné leur avis. La maladie une fois terminée, l’histoire est lue aux élèves et fournit au professeur la matière de développements plus ou moins étendus selon l’importance du sujet. Lorsque le malade a succombé, le professeur se livre à des conjectures sur les lésions que l’on doit trouver dans le cadavre. L’ouverture est faite avec soin et on cherche les rapports qui peuvent exister entre les symptômes notés pendant la maladie et les altérations après la mort77.
43On ne saurait donner plus parfaite et plus stricte définition de la démarche anatomopathologique élaborée par Bichat quelques années plus tôt. Ailleurs :
Les élèves de troisième et de quatrième années recueillaient dans la clinique interne, jour après jour, des observations sur des imprimés. Ces observations étaient lues, expliquées et commentées dans l’amphithéâtre. Le professeur exposait de plus la situation de tous les malades. Tous les cadavres étaient ouverts pendant la durée du cours de clinique et les recherches faites sur les organes malades devenaient la matière d’une leçon78.
44Bien sûr cet enseignement clinique nécessite des aménagements qui sont loin d’être toujours parfaits. Les jugements sur l’équipement matériel de ces écoles ont été très sévères et largement condescendants79 mais l’on n’a peut-être pas assez pris soin de noter que ces condamnations émanaient toutes du pouvoir central et en particulier de Mathieu Orfila (1787-1853), grand inspirateur de la politique médicale de la monarchie de Juillet et fort hostile aux écoles secondaires et aux officiers de santé. En effet si certains amphithéâtres sont dans un état lamentable, Clermont et Grenoble en possèdent un dès 1806 et, dans cette dernière ville, la salle de dissection est indépendante. Des écoles situées dans des villes modestes comme Amiens et Arras ont des amphithéâtres vastes, bien éclairés et construits peu de temps avant 1830. Comme dans les facultés, les cadavres à disséquer manquent souvent. À Marseille, cela vient en partie du refus de l’administration des hôpitaux de livrer des cadavres de femmes80. Si la pénurie n’existe pas à Arras en 183481, elle est présente à Amiens où « le nombre de cadavres est ordinairement trop bas et l’école reste souvent des semaines entières sans avoir de cadavres82 ». À Lyon, comme dans les facultés, se met en place un marché du cadavre, dont le prix fluctue selon les années83. Au total pourtant, le manque de cadavres est moins marqué que dans les facultés et l’enseignement clinique plus efficace qu’à Paris où des étudiants trop nombreux ne voient rien des malades et n’entendent guère les commentaires du professeur.
La formation d’omnipraticiens
45L’enseignement pratique des accouchements se met plus difficilement en place mais il paraît plus développé que celui offert aux futurs docteurs.
46Alors qu’il existe des écoles d’accouchements dans la plupart des villes sièges d’écoles, les raisons de moralité retardent l’initiation des futurs officiers de santé à l’art des accouchements mais elles ne l’empêchent pas. À Grenoble, la question n’est envisagée qu’en 1834. À Amiens on s’y résout dès 1806, à Clermont en 1807 et à Arras en 1813, en prenant soin que les élèves qui sont choisis à tour de rôle pour aider aux accouchements ne soient pas appelés en même temps que les élèves accoucheuses. Dans les deux cas on insiste « pour renouveler le choix des élèves le plus souvent possible pour répandre l’instruction pratique84 ». En 1834, les responsables de l’école d’Amiens affirment qu’« en sortant de l’école les élèves ont nécessairement des connaissances pratiques sur cette branche de la médecine85 ». En 1838, chaque élève sortant de cette école aurait pratiqué 10 accouchements et en aurait vu pratiquer 8286.
47Malgré leurs indéniables défauts dont on verra les causes principalement externes, les cours ou écoles de médecine ont donné ou voulu donner à leurs élèves une formation complète et pratique, bien adaptée pour former des omnipraticiens ruraux devant tout faire seuls. Le recteur de l’académie de Clermont redoute même « qu’il n’y ait pas de professeur de pharmacie dans des écoles spécialement chargées de former des officiers de santé placés dans des communes rurales où ils sont obligés de fournir et de préparer eux-mêmes les médicaments ». Dans la même ville, Antoine Blatin87 (1769-1846), nommé professeur de médecine légale, juge plus avantageux de leur enseigner la thérapeutique et la matière médicale « qui s’applique d’une manière plus immédiate à l’exercice de leur profession88 ». Les écoles ont, consciemment ou non, œuvré pour une médicalisation réelle des campagnes, lutté pour une égalité de compétence entre les médecins des pauvres et ceux des riches, combattu la médecine au rabais inscrite dans les dispositions de la loi de ventôse sur la formation et l’exercice des officiers de santé. En acceptant les certificats de complaisance fournis par les médecins et les notables pour accéder à l’examen, en tolérant le laxisme des jurys médicaux et en plaçant les officiers de santé sous un impossible contrôle des docteurs, la loi faisait en effet déjà beaucoup pour discréditer la profession qu’elle créait.
Un enseignement ouvert
48La pédagogie des écoles ne manque pas d’originalité et s’inspire du modèle de l’enseignement mutuel qui connaît dans les années 1820 son bref et relatif apogée. L’interrogation des élèves en début de chaque leçon est une pratique répandue. À Grenoble ceux qui suivent le cours de physiologie doivent présenter systématiquement l’analyse de la leçon précédente et à Amiens la plupart des professeurs interrogent pendant un bon quart d’heure quatre à cinq élèves au début de chaque leçon. Partout, des examens de fin d’année, voire semestriels, ont lieu de façon régulière. À Arras, « les élèves sont interrogés à la fin de l’année pendant trois ou quatre jours dans des séances de trois à quatre heures et ensuite des prix sont distribués89 ». Les leçons d’anatomie y sont actives puisque les élèves doivent s’exercer à la dissection sous la conduite du prosecteur et des élèves les plus distingués. À Amiens ils sont chargés de la préparation des leçons d’anatomie. Le rôle majeur revient pourtant aux élèves expectants (ou aspirants en général six) externes (trois) et internes (trois également) prévus par les décrets impériaux et recrutés par concours. Ces derniers sont envisagés à Grenoble en 1806 et strictement organisés à Clermont dès 1808 : les candidats aspirants subissent des épreuves d’anatomie, de chimie, de physique ; les candidats externes sont interrogés sur la chimie, l’anatomie, la pathologie externe ; les candidats à l’internat sur l’anatomie, la physiologie, la pathologie et les opérations90. Ailleurs les procédures sont plus floues, sauf là où existent des internes et externes des hôpitaux, comme à Lyon, mais ce genre de répétiteurs existent bel et bien. Une fois nommés, les internes font les autopsies, aident les professeurs, préparent les leçons d’anatomie mais peuvent aussi faire les répétitions pour les plus jeunes et se charger de la police des salles de cours. Les externes font les pansements, les expectants tiennent les cahiers de visite91.
49Les écoles ont aussi le souci de donner à leurs élèves des formations complémentaires, peut-être pour répondre à la volonté de transformer les officiers de santé en relais de la science dans les campagnes. Si elles ne peuvent assurer elles-mêmes des enseignements pratiques de chimie et de physique médicale, les écoles incitent ou obligent les inscrits à suivre des cours à l’extérieur. Dans les villes qui disposent de la présence d’une université, comme Grenoble, les élèves y suivent des cours de botanique, de physique, d’histoire naturelle92. Ailleurs on est réduit à utiliser les cours communaux, plus actifs et plus nombreux qu’on ne pourrait le croire. De nombreuses agglomérations veillent jalousement sur leur jardin botanique et certaines, comme Besançon ou Dijon, rétribuent même un « botanicien » ou conservateur chargé de donner des cours93. À Marseille, les trente-huit élèves de l’école rejoignent la centaine d’auditeurs gratuits accueillis aux cours municipaux gratuits de botanique et de chimie94. Les élèves en médecine d’Amiens sont non seulement tenus d’aller herboriser tous les jeudis de la belle saison, mais aussi de suivre les cours de géométrie et mathématiques, de physique, de chimie appliquée que met en place une municipalité presque aussi férue de culture scientifique que celle de Douai. En échange, les professeurs d’anatomie doivent donner des cours d’ostéologie et de myologie aux élèves des écoles de dessin95.
50Sans vouloir parer les cours et écoles secondaires de toutes les vertus, on ne peut qu’être frappé par la richesse et la nouveauté des projets dont ils étaient porteurs. Il ne s’agissait pas seulement de former par une pédagogie active de véritables omnipraticiens munis d’expérience pratique, mais aussi de garantir à tous, pauvres et campagnards compris, un accès égal à des soins de qualité. Les cours et écoles donnaient aussi un appui aux projets de promotion sociale des élites modestes et offraient des perspectives réalistes pour une transformation en douceur de la société rurale. Le contraste entre ces ambitions et les réalités est grand, comme l’ont noté les études précédentes, mais il s’accroît avec le temps, en grande partie sous l’impulsion des mesures gouvernementales.
La fin d’une expérience
51En 1820, les cours deviennent des écoles qui sont placées sous la surveillance du Conseil royal de l’Instruction publique. Elles sont réorganisées en 1837 et certaines sont promues au rang d’écoles préparatoires en 1840. Toutes ces mesures ont été interprétées en termes de progrès comme si le modèle unique devait être celui des facultés et comme si seule la centralisation pouvait amener ce bienfait. Cette interprétation ne doit pas faire oublier que cet alignement des cours sur les facultés passe aussi par l’augmentation massive des droits et la réduction des effectifs étudiants. L’activité intellectuelle et le rayonnement des petites villes en sont amoindris, les campagnes voient de moins en moins d’officiers compétents s’installer en leur sein. Loin d’être naturelle cette évolution est voulue et programmée. Toute une série de mesures tentent en effet de réduire le nombre de ces cours et d’en faire de simples classes propédeutiques préliminaires à l’entrée dans les facultés. Cette politique correspond bien aux vœux de l’élite médicale qui veut réduire le nombre de médecins et faire disparaître l’officiat de santé96.
L’hostilité gouvernementale
52La méfiance gouvernementale exprimée en 1806-1807 se mue très rapidement en franche hostilité. Très vite, les mesures vexatoires se multiplient. Les demandes de création de chefs de travaux anatomiques se heurtent à des refus systématiques, le titre étant jugé prétentieux pour de si modestes lieux d’enseignements.
53Les rapports mal informés et aux limites de la mauvaise foi pleuvent sur les écoles. Chargé d’inspecter l’école d’Amiens, Mathieu Orfila fait en 1820 un tableau apocalyptique des professeurs, mais il avoue dans une lettre adjacente qu’il s’est trouvé à Amiens au moment des vacances et qu’il lui a été impossible d’assister aux leçons. Néanmoins, ajoute-t-il, « je crois pouvoir assurer que les renseignements qui m’ont été fournis (par qui ?) sur les professeurs sont exacts97 ». Plus honnête, le grand hygiéniste Emmanuel Fodéré (1764-1835) est bien mal informé puisqu’il affirme que Mâcon et Chalon-sur-Saône sont censées avoir une de ces écoles et que des médecins y sont nommés alors qu’aucun autre document ne mentionne la moindre esquisse de projet d’école dans ces deux villes98. On comprend mieux dans ces conditions et cette ambiance hostile que le responsable de l’enseignement supérieur au ministère, l’aliéniste Antoine Royer-Collard (1763-1845) affirme dans un projet d’ordonnance que « l’école d’Arras n’a jamais fonctionné » alors qu’elle a eu jusqu’à quarante élèves et qu’elle en a dix-sept en 1820 comme le signale une lettre du directeur adressée au ministère deux mois auparavant99.
54L’hostilité aux écoles, le mépris dont elles sont abreuvées inspirent des mesures qui, cyniquement ou non, aboutissent à l’étranglement des institutions que l’on affirme par ailleurs protéger.
55Redoutables sont les pratiques relatives aux questions d’équivalence et de dispense de droits. En la matière, c’est l’arrêté du 20 prairial an XI qui devrait faire autorité. Il prévoit que « les élèves qui auront suivi la pratique des grands hôpitaux où il y a une instruction médicale établie pourront être dispensés des quatre années dans les écoles (futures facultés) à condition de justifier leur assiduité et d’acquitter les frais d’inscription ». Assez logique, lorsque les cours sont gratuits, la mesure devient un très net handicap lorsque ceux-ci deviennent payants et que les droits y augmentent nettement. Passer par les écoles pour accéder au doctorat devient encore plus coûteux (en termes de droits) que de faire toutes ses études en faculté. Par cette disposition, l’accès au doctorat d’élèves d’origine modeste est définitivement barré. De plus, jusqu’en 1820, les études accomplies ne semblent pas toujours reconnues par les facultés. Ainsi se plaint-on à Grenoble que « les facultés comptent pour rien le temps qu’ils (les étudiants) ont passé à suivre l’enseignement établi dans l’hospice de Grenoble100 ». Même son de cloche à Toulouse où l’on se plaint que la « faculté de Montpellier a toujours craint l’école de Toulouse et n’a jamais voulu tenir compte aux élèves du temps d’étude qu’ils y ont passé malgré l’arrêté du 20 prairial101 ». La situation change à partir de l’entrée en vigueur des ordonnances de 1820 qui placent les écoles sous la dépendance de l’Université. Un article prévoit que, sous réserve de respecter des clauses en matière d’enseignement, trois années d’études en école équivaudront à deux années d’études en faculté. Il y a donc bien là une légalisation de l’infériorité des écoles par rapport aux facultés.
56De plus, le contrôle strict du versement des droits d’inscription vient annuler ce qui aurait pu représenter une amélioration par rapport à la situation antérieure. Si peu de cours sont entièrement gratuits, (malgré les demandes initiales à Grenoble, Toulouse et Poitiers), sauf à Amiens (encore en 1834), les droits sont parfois minimes (5 francs par trimestre à Arras en 1834, 24 à 30 francs à Toulouse). La solution la plus fréquente, jusqu’en 1820, consiste à afficher des tarifs élevés (80 à 100 francs par an) imposés par le pouvoir central, malgré la résistance des préfets et recteurs102, mais à ne pas les encaisser. On pratique volontiers la ristourne, la dispense, l’accueil des auditeurs libres. Les étudiants amplifient le mouvement et ne prennent qu’une inscription annuelle comme à Marseille où il y a 32 inscriptions au premier trimestre de l’année 1819-1820 et une seule au quatrième. À Poitiers, en 1812, 52 élèves ne fournissent que 86 inscriptions trimestrielles en une année. À partir de 1820, le versement des droits est rigoureusement exigé ce qui provoque toute une série de manifestations étudiantes, comme à Grenoble et à Toulouse où l’on passe d’une exigence théorique de 30 francs par an à un versement réel de 60 francs. Ces troubles amènent fermetures et suspensions de cours ce qui affaiblit encore la position des écoles. À Grenoble l’enseignement est suspendu en 1820, à nouveau pendant deux ans entre mars 1821 et le 20 janvier 1823103 et encore de 1826 à 1828.
Un engrenage infernal
57Le cercle vicieux est désormais enclenché. Il sera impitoyable.
58L’augmentation des droits réels se traduit par une baisse sensible des effectifs. À Grenoble ils étaient passés de 25 à près de 50 pendant les années 1810. Ils retombent dès 1821 à 12, à 8 en 1827 et n’atteindront plus la vingtaine avant 1840. Partout on observe des chutes comparables : les effectifs passent de 30 ou 40 à 13 à Dijon, de 52 à 14 à Clermont-Ferrand, de 33 à 12 à Reims104. Les seules exceptions concernent les écoles qui restent gratuites ou presque. À Arras le reflux est plus léger qu’ailleurs puisque l’on glisse de 20 en 1813 à 17 en 1820 et 14 en 1827. Amiens voit ses effectifs se maintenir à une bonne quarantaine. Seul le maintien de la gratuité explique ces effectifs considérables malgré la modestie de la population de la ville. On en déduira volontiers que les candidatures à ces écoles existaient bien toujours et qu’elles ont été sciemment éliminées par des tarifs élevés.
59Ces effectifs réduits découragent les professeurs. Comme le dit et le répète le recteur de Clermont-Ferrand, « ce petit nombre d’élèves répartis dans les divers cours ne forment qu’un auditoire trop petit pour exciter et animer les professeurs dans l’exposition de leurs leçons105 ». Par ailleurs des difficultés de paiement contribuent à la démobilisation. Au moment de la reconnaissance légale des cours, les traitements des professeurs sont très variés. S’il est prévu que chaque professeur touche 2 000 F par an à Besançon106, la moitié de cette somme est jugée suffisante pour rétribuer ensemble les cinq professeurs de Grenoble107 (1 250 F). Entre les deux, Arras rémunère 1 000 francs par an chacun de ses professeurs108, Toulouse 500 francs de même que Grenoble à partir de 1813. Poitiers s’en tient à 300 francs109. L’État insiste pour limiter le montant de ces indemnités et divise par trois les propositions toulousaines de 1806110. Ces traitements forfaitaires sont irrégulièrement versés au gré des difficultés des écoles. L’interruption des versements est en particulier à l’origine de la troisième suspension des cours grenoblois entre 1826 et 1828111. Dans la plupart des écoles, la rétribution des professeurs est assurée par les droits d’inscription des élèves. Elle est d’emblée modeste et par nature variable : les six professeurs d’Amiens, de Clermont-Ferrand se partagent entre 3 000 et 5 000 francs dans les bonnes années de la décennie 1810112. L’irrégularité des inscriptions, puis la baisse des effectifs réduisent ces émoluments comme une peau de chagrin, parachevant la démobilisation des professeurs.
60On ne s’étonne plus dans ces conditions que le corps enseignant n’ait plus été composé à partir de 1820 que de vieillards cacochymes ou de jeunes arrivistes sans ampleur. Les inspecteurs et recteurs ont alors beau jeu de dénoncer une situation que l’État a grandement contribué à créer. Sans l’avoir jamais entendu, Orfila ridiculise en ces termes le professeur de chimie et de pharmacie de l’école d’Amiens : « auteur d’un ouvrage sur le paratonnerre et les paragrêles, il emploie presque tout son enseignement (la moitié) à l’histoire du magnétisme et de l’électricité. Dans les autres leçons, il expose la chimie comme il aurait pu le faire en 1780113 ». Les recteurs de l’académie de Grenoble ne sont pas en reste dans le dénigrement. Un premier décrit en 1827 « un ramassis d’opposants politiques, d’atrabilaires et de vieillards sans énergie morale114 ». En 1834, son successeur dénonce à l’inverse « des jeunes professeurs parvenus au sommet de leurs ambitions et, n’étant point excités par aucun motif d’émulation, manquent d’assiduité et de zèle115 ». Au détour de leurs dénonciations, ces censeurs mettent pourtant le doigt sur les vraies causes de cette médiocrité et ses conséquences. Le préfet de la Somme signale avec esprit et perspicacité que « les professeurs presque sans appointements ont si bien fait, à force de vouloir punir par l’inexactitude de leur travail, l’inexactitude qu’on mettait à les payer que les élèves se sont réduits à huit116 ». Dix ans plus tard, le recteur de Grenoble met aussi le doigt sur cette cause essentielle :
Il faut être animé d’une grande ardeur pour l’enseignement et en même temps posséder une fortune indépendante pour se dévouer ainsi à un travail pénible et assujettissant pour le seul amour de la gloire et l’honneur du titre de professeur. Or on sait que ce mode d’existence est incompatible avec les besoins sociaux et que l’intérêt matériel est le premier mobile de nos actions. Le médecin vit des honoraires que lui payent ses malades. Et voilà pourquoi ceux-ci ont la préférence sur un enseignement gratuit117.
61On touche bien là au nerf de la guerre. Les écoles de médecine n’ont jamais pu disposer de budgets décents et rien n’a été fait, bien au contraire, pour les aider. En effet, à partir de 1820, lorsque la guerre contre les écoles paraît ouverte, le gouvernement refuse les votes de crédits par les conseils généraux. Les préfets de la Somme et du Pas-de-Calais doivent lutter pied à pied pour obtenir le maintien de ces crédits. Néanmoins le découragement gagne devant l’augmentation des déficits et la dépossession du pouvoir au profit de l’administration centrale. À partir de 1820, le droit de nomination des professeurs et la direction effective des écoles échappent de plus en plus à ceux qui les financent. La municipalité de Poitiers réduit son engagement118 dès 1812. Celle de Dijon le supprime complètement et récupère le bâtiment consacré à l’enseignement médical sans en proposer un autre, entraînant de facto la disparition de l’école119. Les hôpitaux de Lyon rechignent eux aussi et certains proposent dès 1832 de renoncer au financement et à la direction de l’école120. La chose est acquise121 en 1837, de même qu’à Amiens l’année suivante122. Ces deux décisions sont liées aux mesures prises par Orfila dans « l’été décisif » de 1837. Leur philosophie consiste « à transformer les écoles secondaires en écoles préparatoires où les élèves pendant les deux premières années au moins apprendraient les fondements de l’art de guérir » avant d’aller en faculté passer des doctorats. Avant même que ne paraisse l’ordonnance du 13 octobre 1840 qui crée ces écoles préparatoires et les mesures qui suivent123, c’en est fini de cet enseignement décentralisé, ouvert, destiné à former des médecins de seconde classe, mais de qualité.
62Le texte qui précède n’est qu’une esquisse dressée à partir des seules archives nationales et des archives lyonnaises. Il existe sans doute dans les archives départementales et hospitalières de riches informations qui permettraient de nuancer ou d’enrichir les hypothèses formulées ici. Plus encore, l’exploitation de ces sources permettrait d’apporter des compléments sur la connaissance des milieux intermédiaires au début du xixe siècle, sur les Lumières tardives, sur la diffusion de la science, la vie scientifique et culturelle dans les villes de province, sur les manifestations des identités locales.
63Par ailleurs ces écoles organisées ne disent pas tout de la formation de ces médecins de deuxième ordre. Au détour des liasses on voit signaler des instructions particulières concurrentes faites par des médecins124. Dans la perspective d’une histoire renouvelée des personnels sanitaires de second ordre (officiers de santé, pharmaciens, sages-femmes, herboristes), on ne saurait oublier l’armée comme lieu de formation. Si Jacques Léonard a montré le rôle des officiers de santé de la marine française125, les officiers de santé de l’armée de terre et les hôpitaux d’instruction militaire attendent encore leurs historiens.
64En attendant ces éventuels travaux, il semble que l’épisode des cours pratiques et des écoles secondaires n’est pas un conflit entre le bricolage local d’un côté et la vraie et bonne science de l’autre. Il ne saurait non plus se réduire, même si cette dimension est bien là, à un combat de l’élite des docteurs contre les officiers de santé. Au-delà, le conflit oppose les périphéries, soucieuses de défendre leur autonomie et d’affirmer leur réussite, et Paris, soucieux de les réduire.
65En fait, il s’agit d’un conflit interne aux élites. Plus qu’une simple concurrence de pouvoir, ce combat oppose deux représentations de la société et des façons de la gérer, au-delà de la seule question de la médicalisation des classes populaires. Pour décrire ces officiers de santé issus de classes modestes, médiateurs culturels et sociaux, il ne parait pas incongru d’établir un parallèle avec les instituteurs décrits par Guizot quelques années plus tard : « un grand corps laïc, une grande association profondément unie à la société et la connaissant bien, vivant dans son sein, unie aussi à l’État, tenant de lui son pouvoir exerçant sur la population cette influence morale qui la forme à l’ordre, à la règle126 ». Il suffit de remplacer État par médecine, ordre par hygiène pour obtenir la meilleure définition du projet sous-jacent aux cours pratiques et écoles de médecine. De l’autre côté ceux qui prétendent « régir la société par des forces extérieures à ses forces, par des machines établies à sa surface mais qui n’ont point de racines dans ses entrailles127 », en l’occurrence des docteurs en médecine urbains et lointains, des hôpitaux machines à guérir tout aussi étrangers à la vie sociale normale. Le triomphe de cette deuxième formule n’est étrangère ni à la lenteur de la médicalisation des classes populaires, ni à son relatif échec. On ne peut dire que la santé publique y ait gagné.
Notes de bas de page
1 Texte publié dans le n° spécial « La formation des médecins (xixe-xxe siècles) » du Bulletin du Centre Pierre Léon, 1998, n° 1-2, p. 9-27.
2 Jacques Léonard, Les médecins de l’Ouest au xixe siècle, Lille, Atelier de reproduction des thèses, 1978, 3 volumes, vol. 1, p. 226-228, 358-359, vol. 2, p. 963-964. Baptisées écoles de santé en 1794 puis écoles spéciales de médecine en 1795 et encore en 1803, elles deviennent facultés au terme du décret du 17 mars 1808. Les autres facultés créées seront Lille (1875), Lyon (1877), Bordeaux (1878).
3 On emploiera indifféremment les deux expressions même si, légalement, on ne peut parler d’écoles secondaires avant 1820.
4 Olivier Faure, Histoire sociale de la médecine, Paris, Anthropos/Économica, 1994, 272 p., en oublie deux dans sa liste p. 82. Jacques Léonard ne donne pas la date exacte de la création de celle de Rennes.
5 Jacques Léonard, Les médecins de l’Ouest..., op. cit., vol. 2, p. 651-657. Olivier Faure, Genèse de l’hôpital moderne. Les Hospices civils de Lyon de 1802 à 1845, Paris/Lyon, PUL/CNRS, 1982, 229 p., p. 128-134, 201-206.
6 Jacques Léonard, Les médecins de l’Ouest..., op. cit., vol. 1, p. 218 et 250-251.
7 Archives nationales (plus loin AN,), F17 2311, Lettre de la société de médecine au ministre de l’Intérieur, s. d. (an XIII).
8 AN, F17 2301, Mémoire pour le placement d’une école préparatoire de médecine à Douai, 15 mars 1839.
9 AN, F17 2309, Note sur l’enseignement de la médecine à Poitiers par les professeurs de l’école secondaire, 1824.
10 Jacques Léonard, Les médecins de l’Ouest..., op. cit., vol. 1, p. 237-242, 367-368, 370-371.
11 Archives départementales du Rhône (plus loin ADR,), 1 XP 147, Observations du citoyen Cartier, chirurgien-major de l’hospice des malades, 14 fructidor an IX.
12 ADR, 1 XP 147, Lettre du conseil général des Hospices civils de Lyon au préfet, fructidor an IX.
13 AN, F17 2306, Lettre de la commission administrative de l’hospice civil de Grenoble au préfet, 29 septembre 1806. Ibid., lettre du préfet au ministre de l’Intérieur, 20 octobre 1806.
14 AN, F17 2301, Pétition des élèves, 1er juin 1806. Ibid., Lettre du préfet au ministre, 24 septembre 1809. Ibid., Arrêté préfectoral du 28 thermidor an VIII.
15 Jacques Léonard, Les médecins de l’Ouest..., op. cit., vol. I, p. 242 et 368.
16 AN, F17 2306, Lettre de la commission administrative de l’hospice civil de Grenoble au préfet, 29 septembre 1806.
17 AN, F17 2302, Certificat du maire et des adjoints, 16 août 1806. Ibid., Note des professeurs, 22 juillet 1809. AN, F17 2299, Note au conseiller d’État Fourcroy, 6 avril 1806.
18 AN, F17 2299, Arrêté préfectoral du 2 thermidor an XII, article 5.
19 AN, F17 2311, Affiches de l’an X et du 20 Brumaire an XIV.
20 AN, F17 2305, passim.
21 AN, F17 2399, Lettre du préfet de la Somme au ministre de l’Intérieur, 18 novembre 1806.
22 Ibid., Décret du 2 juillet 1806.
23 AN, F17 2301, Arrêté préfectoral du 28 thermidor an VIII.
24 ADR, 1 XP 147, Arrêté préfectoral du 5 thermidor an IX.
25 AN, F17 2306, Arrêté du 14 frimaire an XI, cité dans lettre de la commission administrative de l’hospice au Préfet de l’Isère, 29 septembre 1806.
26 AN, F17 2299, Arrêté préfectoral du 2 thermidor an XII.
27 AN, F17 2299, Arrêté préfectoral du 29 Pluviôse an XIII.
28 AN, F17 2306, Arrêté du 14 frimaire an XI.
29 Archives des Hospices civils de Lyon (plus loin AHCL), école de médecine, carton 2, Lettre du préfet au Conseil d’administration des Hospices civils de Lyon, 20 juin 1806.
30 Qui comprennent aussi un enseignement de maladies épidémiques et contagieuses.
31 AN, F17, 2307, passim.
32 AN, F17 2301, même référence que dans la note 27.
33 AN, F17 2299, Décret du 2 juillet 1806, créant les cours établis dans les hospices de malades de Bruxelles, Gand et Amiens. Il s’agit du premier décret en date sur lequel les suivants se calquent plus ou moins.
34 AN, F17 2309, Décret du 19 octobre 1806.
35 AN, F17 2301, Décret du 20 octobre 1809 et arrêté préfectoral du 17 juillet 1810.
36 AN, F17 Décret du 19 octobre 1806, article 1.
37 AN, F17 2311, Décret du 1er mai 1806.
38 AN, F17 2305, Rapport au ministre de l’Intérieur sur le projet de règlement des cours pratiques établis à l’hospice de Clermont-Ferrand, 8 mars 1807.
39 AN, F17 2306, Lettre du ministre de l’Intérieur au préfet de l’Isère, 20 décembre 1806.
40 AN, F17 2309, Lettre du ministre de l’Intérieur au préfet de la Vienne, 4 avril 1807.
41 AN, F17, 2306, Rapport de la commission administrative de l’hospice civil de Grenoble, 29 septembre 1806.
42 AN, F17 2307, Lettre du recteur à la commission royale de l’Instruction publique, 28 juillet 1820.
43 En particulier à Toulouse. AN, F17 2311, Lettre du recteur au président de la commission royale d’instruction publique, 6 décembre 1817 et du préfet au recteur, 4 décembre 1820.
44 AHCL, école de médecine, carton 2, Délibération du conseil municipal de Lyon, 28 mai 1824.
45 Ibid., Rapport sur l’école de médecine, s. d. (mai 1823).
46 Ibid.
47 AN, F17 2312, Rapport sur l’état et la disciplines des études pendant le troisième trimestre de 1825.
48 Georges Duby, Armand Wallon, dir., Histoire de la France rurale, Paris, Seuil, 1976, vol. 3, 569 p., p. 100, citant André Armengaud, Les populations de l’Est aquitain au début de l’époque contemporaine : recherches sur une région moins développée (vers 1845-vers 1871), Paris/La Haye, Mouton, 1961, 961 p. 79-82.
49 AN, F17 2301, Pétition des élèves de l’école d’Arras au Conseil général du Pas-de-Calais, 1er juin 1806.
50 AN, F17 2311, Lettre du recteur au ministre, 4 décembre 1820.
51 AN, F17 2299, Lettre des professeurs de l’école d’Amiens au ministre de l’instruction publique, 21 mai 1840.
52 Ibid.
53 AN, F17 2305, Lettre du directeur de l’école de Poitiers au recteur, 6 novembre 1820.
54 D’après les données de Jacques Léonard, Les médecins de l’Ouest..., op. cit., vol. 2, p. 661 et celle des Archives nationales F17 2299 à 2212.
55 Emmanuel Leroy-Ladurie, « Technologie douce et folklore rural », préface à Honoré de Balzac, Le médecin de campagne, Paris, Gallimard, rééd. 1974, 472 p., p. 41-42.
56 AN, F17 2299, Lettre du préfet de l’Escaut (Gand) au ministre de l’Intérieur, 11 fructidor an XIII. F17 2305, Lettre du conseil municipal de Dijon au ministre de l’Intérieur, 21 juin 1806.
57 AN, F17 2306, Rapport de la commission administrative de Grenoble, 29 septembre 1806.
58 Ibid., Lettre des professeurs de l’école d’Amiens au ministre de l’Instruction publique, 21 mai 1840.
59 ADR, 1 XP 147, observations des citoyens Figurey, Gonnelle, Morizot, Willermoz, médecins titulaires sur le projet Duchanoy, s. d. (an IX).
60 AN, F17 2299, Lettre des professeurs de l’école d’Amiens au ministre de l’Instruction publique, 21 mai 1840.
61 AN, F17 2305, Lettre du conseil municipal au ministre de l’Intérieur, 21 juin1806.
62 Nous sommes quelques années après la première épidémie de choléra qui a durement frappé les régions du Nord de la France, auxquelles appartient la Somme. Cf. Patrice Bourdelais, Jean-Yves Raulot, Une peur bleue : histoire du choléra en France (1832-1854), Paris, Payot, 1990, 310 p.
63 AN, F17 2299, Lettres des professeurs de l’école d’Amiens, 21 mai 1840.
64 René Magnon, « Les manuels d’enseignement infirmier », Cahiers d’histoire, 1984, n° 23, p. 211-238.
65 AHCL, école de médecine, carton 2, Lettre du préfet au Conseil général d’administration des Hospices civils de Lyon, 20 juin 1806.
66 AN, F17 2299, Lettre du préfet au ministre de l’Intérieur, 18 novembre 1806 et rapport au ministre, 6 décembre 1806. Sur les méfaits sociaux présumés du séjour hospitalier cf. Olivier Faure, « La médecine gratuite au xixe siècle : de la charité à l’assistance », Histoire, Économie, Société, 1984, n° 4, p. 593-608. Id., « L’hôpital et le monde du travail : une relecture nécessaire ? », Prévenir, n° 19, p. 89-98.
67 AN, F17 2299, Rapport des professeurs des cours d’instruction médicale du département de la Somme, adressé au préfet, 4 décembre 1813.
68 AN, F17 2305, Lettre du maire de Douai au ministre, 17 décembre 1838.
69 Catherine Duprat, Usages et pratiques de la philanthropie : pauvreté, action sociale et lien social à Paris au cours du premierr xixe siècle, Paris, CTHS, 1969 et 1997, 2 vol., 1398 p., Id., et alii, dir., Philanthropies et politiques sociales en Europe, (xviiie-xxe siècles), Paris, Anthropos/Économica, 1994, 233 p.
70 AN, F17 2309, Lettre de l’inspecteur d’académie au Conseil royal de l’Instruction publique, 2 juillet 1820.
71 AN, F17 2301, Arrêté préfectoral du 17 juillet 1810.
72 Sur Nantes voir Jacques Léonard, Les médecins de l’Ouest.., op. cit. Pour Lyon, Olivier Faure, Genèse..., op. cit. Sur les autres écoles AN, F17 2299 à 2312.
73 AN, F17 2305, Règlement pour les cours d’enseignement médical, 9 avril 1808.
74 AN, F17 2299, Rapport des professeurs des cours d’instruction médicale du département de la Somme, 4 décembre 1813.
75 AHCL, école de médecine, carton 1, Lettre du docteur Faivre au conseil général d’administration, s. d. (1823).
76 Ibid., Rapport du docteur Faivre sur l’école de médecine, s. d., (mai 1823), l7 p., ms.
77 Ibid., lettre du docteur Richard de Laprade au Conseil d’administration, s. d. (1829).
78 AN, F17 2299, Lettre du directeur de l’école d’Amiens au recteur, 21 octobre 1837.
79 Jacques Léonard, Les médecins de l’Ouest..., op. cit., vol. 2, p. 650-658. Olivier Faure, Genèse de l’hôpital..., op. cit., p. 134 et 202.
80 AN, F17 2307, Lettre du recteur au ministre, 24 décembre 1829.
81 AN, F17 2311, Réponse de l’école à l’enquête de 1834.
82 AN, F17 2299, Lettre du directeur au recteur, 21 octobre 1837.
83 AHCL, Pétition des élèves, (13 décembre 1826) se plaignant du triplement du prix des cadavres. En 1836, le prix du cadavre (3 F) est fixé par le règlement de l’amphithéâtre (règlement du 1er novembre 1836).
84 AN, F17 2299 et 2301, Règlement de l’école d’Amiens, 12 novembre 1806, article 25. Règlement de l’école d’Arras, 1813.
85 Ibid., (2299), Réponse aux questions du Conseil royal de l’Instruction publique, 25 septembre 1834.
86 Ibid., Rapport sur la situation de l’école d’Amiens du 1er juillet au 31 août 1838.
87 Maire de la ville de 1822 à 1830.
88 AN, F17 2305, Lettre du recteur au ministre de l’Instruction publique, 19 décembre 1820 et 22 février 1825.
89 AN, F17 2301, Réponses à l’enquête de 1834.
90 AN, F17 2305, Règlement pour les cours d’enseignement médical, 9 avril 1808.
91 AN, F17 2299, Réponse de l’école d’Amiens au questionnaire de 1834, 25 août 1834.
92 AN, F17 2306, Rapport du recteur de l’académie de Grenoble sur l’enquête de 1834.
93 AN, F17 2302, Lettre du préfet du Doubs au ministre de l’Intérieur, 6 janvier 1821. F17 2305, Décret du 28 août 1808 organisant les cours de Dijon. Règlement des cours, s. d. (1808).
94 AN, F17 2307, Lettre du recteur de l’académie d’Aix au Conseil royal de l’Instruction publique, 28 juillet 1820.
95 AN, F17 2299, Réponses aux questions du Conseil supérieur de l’instruction publique, 25 septembre 1834.
96 Jacques Léonard, La médecine entre les savoirs et les pouvoirs, Paris, Aubier, 1981, 384 p., p. 84-89.
97 AN, F17 2299, Rapport d’inspection de l’école d’Amiens, 10 novembre 1820. Lettre d’Orfila au président du Conseil royal d’Instruction publique, mars 1821.
98 Ibid., Lettre de Fodéré au Conseil royal d’Instruction publique, 27 novembre 1820.
99 Ibid., Rapport de Royer-Collard au président du Conseil royal sur un projet d’ordonnance, 8 octobre 1820. F17 2301, Lettre du directeur de l’école d’Arras au ministre, 28 juillet 1820.
100 AN, F17 2306, Délibération de la commission administrative de l’hospice civil de Grenoble, 10 septembre 1810.
101 AN, F17 2311, Note anonyme, 1816.
102 AN, F17 2307, Lettre du recteur au Conseil royal de l’Instruction publique, 28 juillet 1820. Lettre du préfet de la Vienne au ministre de l’Intérieur, 18 mars 1807.
103 AN, F17 2306, Rapport du Conseil royal de l’Instruction publique, avril-mai 1821. Lettres du recteur au ministre, 31 janvier 1823 et 6 mai 1828.
104 Sans compter le déclin des écoles de Lyon, Rennes et Nantes décrits par Léonard et Faure. Pour les autres, indications fournies dans la sous-série F17 des AN, (en particulier dans les rapports trimestriels et les réponses à l’enquête de 1834).
105 AN, F17 2305, Lettres du recteur de Clermont au ministre, 12 janvier et 11 avril 1838.
106 AN, F17 2299, Rapport de Fodéré au Conseil royal de l’Instruction publique, 27 novembre 1820.
107 AN, F17 2306, Délibération de la commission administrative de l’hospice civil de Grenoble, 3 août 1807.
108 AN, F172301, Délibérations du conseil général du Pas-de-Calais, 23 février et 13 juillet 1810.
109 AN, F17 2309, Lettre du préfet de la Vienne au ministre, 2 février 1813.
110 AN, F17 2311, Lettre du préfet de la Haute-Garonne au ministre, 12 juin 1806. Remarques sur le projet de règlement des cours de Toulouse, s. d. (1806).
111 AN, F17 2306, Lettre du recteur au ministre, 6 mai 1828.
112 AN, F17 2299 et 2305, Lettre du préfet de la Somme au ministre, 17 février 1825. Comptes des années 1808 à 1810.
113 AN, F17 2299, Inspection de l’école d’Amiens, 10 novembre 1820.
114 AN, F17 2306, Lettre du recteur au ministre, 17 décembre 1827.
115 Ibid., Rapport du recteur au questionnaire de 1834.
116 AN, F17 2299, Lettre du préfet de la Somme au ministre de l’Instruction publique, 17 février 1825.
117 AN, F17 2306, Réponse du recteur au questionnaire de 1834.
118 AN, F17 2309, Lettre du préfet de la Vienne au ministre, 2 février 1813.
119 AN, F17 2305, Lettre du recteur aux membres du Conseil supérieur de l’Instruction publique, 14 juin 1820.
120 AHCL, école de médecine, carton 2, Note ms., s. d. (1832).
121 Olivier Faure, Genèse..., op. cit., p. 205.
122 AN, F17 2299, Lettre du préfet de la Somme au ministre, 9 novembre 1838.
123 Jacques Léonard, Les médecins de l’Ouest..., op. cit., vol. 2, p. 658-659.
124 AN, F17 2309, (Reims), Lettre de l’inspecteur d’académie au Conseil royal d’Instruction publique, 2 juillet 1820. AHCL, école de médecine, carton 1, Lettre du docteur Faivre au conseil d’administration des Hospices civils de Lyon, s. d., (1823) décrivant son école particulière.
125 Jacques Léonard, Les officiers de santé de la marine française de I814 à 1835, Paris, Klincksieck, 1967, 333 p.
126 Pierre Rosanvallon, Le moment Guizot, Paris, Gallimard, 1985, 414 p. Discours de Guizot à la Chambre des députés, 25 avril 1844.
127 Guizot, toujours lui, en 1820. Cité par Pierre Rosanvallon, L’État en France de l789 à nos jours, Paris, Seuil, 1990, 370 p.
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