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Le patronat marseillais et la deuxième industrialisation

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Xavier Daumalin

L’ébranlement des positions industrielles (1883-1895)

L’aggravation des tensions sociales

Texte intégral

1Les conséquences de la récession sur l’emploi et le pouvoir d’achat des ouvriers provoquent assez rapidement de vives tensions au sein des entreprises. Dès le début des années 1880, des mouvements revendicatifs se forment pour réclamer des hausses de salaires ou pour tenter d’obtenir que le travail en usine soit réservé aux seuls ouvriers français. Dans les deux cas, cela revient à remettre en cause les avantages économiques liés à l’emploi de travailleurs immigrés, c’est-à-dire un des éléments fondamentaux de la compétitivité de l’industrie marseillaise. L’expression et l’organisation de cette conflictualité sont favorisées par la légalisation des syndicats professionnels (1884) et par l’essor du mouvement socialiste marseillais, toutes tendances confondues. Même dans les activités où les ouvriers immigrés sont très largement majoritaires, les industriels sont confrontés à des conflits qui désorganisent durablement la production. Quelle est l’ampleur exacte de ces mouvements revendicatifs ? De quelle façon s’expriment-ils et comment sont-ils organisés ? Affectent-ils de la même manière toutes les branches ? Les avantages tant attendus – et longtemps obtenus – de l’emploi des ouvriers étrangers, sont-ils réduits au point de remettre en question les modes de fonctionnement hérités de la première révolution industrielle ?

Des rapports sociaux plus conflictuels

  • 1 A. Olivesi, Le socialisme à Marseille depuis la création de la première internationale ouvrière jus (...)
  • 2 Id., La commune de 1871 à Marseille et ses origines, Paris, Librairie Marcel Rivière, 1950, 169 p.  (...)
  • 3 Les plus importants sont l’Indépendance, le cercle Esquiros, l’Union des peuples latins ou Le socia (...)
  • 4 Le Travailleur, puis le Réveil marseillais, fondés par Antide Boyer ; L’Ami du peuple de Philémon G (...)
  • 5 Né à Aubagne en 1850, Antide Boyer a débuté sa vie professionnelle comme ouvrier potier – métier de (...)
  • 6 Paule Minck (Paulina Mekarska) est née en 1839 à Clermont-Ferrand. Son père s’était réfugié en Fran (...)
  • 7 Ancien communard, Clovis Hugues est élu député socialiste avant d’être attiré par le boulangisme.
  • 8 Il avait déjà été réélu en 1889 dans la 5e circonscription de Marseille. Il retrouvera encore son s (...)
  • 9 Siméon Flaissières sera réélu maire de Marseille de 1919 à 1931.

2Rappelons tout d’abord quelques-uns des jalons de l’histoire du mouvement socialiste marseillais pour mieux comprendre dans quel contexte politique les revendications ouvrières sont amenées à s’exprimer1. Partiellement décapité par la répression qui a suivi la Commune, le mouvement socialiste local a retrouvé une certaine vigueur lors du 3e congrès ouvrier organisé à Marseille en octobre 18792. Ce rassemblement s’est achevé par l’adoption de résolutions collectivistes concernant les moyens de production ainsi que par la création d’une Fédération du parti des travailleurs socialistes de France. Dans la foulée de cette manifestation, les militants socialistes ont essayé d’élargir leur audience en multipliant les initiatives dans plusieurs domaines : création de cercles3 ; lancement de quotidiens4 ; organisation de conférences populaires sur différents thèmes – l’histoire de la Commune ; l’exploitation et la solidarité ouvrière etc. – avec des orateurs comme Antide Boyer5, Philémon Gras, Jean Grave, Jean Lombard, Pierre Roux ou l’ancienne communarde d’origine polonaise Paule Minck6. Dans le courant des années 1880-1890, les socialistes marseillais parviennent aussi à accéder à différentes fonctions électives : en 1881, Clovis Hugues est élu député de la 2e circonscription de Marseille7 ; en 1884, Antide Boyer et Philémon Gras deviennent membres du conseil municipal de Marseille ; l’année suivante Clovis Hugues est réélu député tandis qu’Antide Boyer entre à son tour au Parlement ; en 1886, Philémon Gras devient conseiller général ; en 1892, Siméon Flaissières est élu maire de Marseille et l’année suivante Antide Boyer est réélu député pour la troisième fois8 ; en 1894 Paul Peytral devient sénateur. En l’espace d’une quinzaine d’années, les socialistes marseillais ont intégré tous les échelons de la représentation nationale, avec une vigueur toute particulière pour l’échelon municipal puisque Siméon Flaissières occupe le poste de maire jusqu’en 19029.

  • 10 Les statistiques ne permettent pas de faire la distinction entre les ouvriers des différents métier (...)
  • 11 S. Sirot, La grève en France. Une histoire sociale (xixe-xxe siècle), Paris, Éditions Odile Jacob, (...)

3C’est dans ce contexte politique local que la situation syndicale et les revendications ouvrières connaissent de profonds changements. Les syndicats ouvriers deviennent tout d’abord plus nombreux (tableau 8)10. Leur nombre passe de 43 à 89 entre 1883 et 1896 ; dans le même temps, le nombre des ouvriers syndiqués progresse de 6 518 à 14 462 personnes. Conformément à ce que l’on observe au niveau national, les grèves sont plus fréquentes qu’autrefois avec quelques pics en 1883, 1893 et 1895 (graphique 5)11. Leur moyenne annuelle triple entre 1873-1882 et 1883-1896 (tableau 9). La durée des conflits tend aussi à s’allonger. Si dans les années 1870 la plupart des grèves marseillaises ne duraient que quelques heures – 2 ou 3 jours exceptionnellement –, dans les décennies qui suivent on commence à voir apparaître des grèves d’une ou deux semaines et même de plusieurs mois (tableau 10), la plus importante étant celle des ouvrières des filatures qui cessent le travail pendant 5 mois en 1890. Ces conflits sont avant tout spontanés. Ils sont liés à la question du pouvoir d’achat et mettent systématiquement en avant des revendications salariales.

Tableau 8 : évolution du nombre de syndicats et d’ouvriers syndiqués à Marseille (1873-1896)

Années

Nombre de syndicats

Nombre de syndiqués

1873

9

679

1883

43

6518

1893

73

12277

1896

89

14462

P. Masson (dir.), op. cit., tome X, p. 189.

Tableau 9 : répartition par périodes des grèves ouvrières à Marseille (1873-1896)

Périodes

Nombre de grèves

Moyenne annuelle

1873-1882

26

2,6

1883-1896

101

7,7

P. Masson (dir.), op. cit., tome X, p. 210.

Tableau 10 : principaux conflits ouvriers dans les usines de Marseille (1873-1896)

Années

Professions

Motif

Durée

Résultats

1881

Ouvriers tanneurs

Salaires

1 mois

Échec

1883

Ouvriers des huileries

Salaires

2 semaines

Échec

1890

Ouvrières des filatures

Salaires

5 mois

Échec

1894

Ouvriers des tuileries

Salaires

1 mois et 3 semaines

Succès

1896

Fondeurs

Salaires

2 mois

Échec

P. Masson (dir.), op. cit., tome X, p. 212-246.

Graphique 5 : l’évolution annuelle du nombre de grèves à Marseille (1873-1896)

Graphique 5 : l’évolution annuelle du nombre de grèves à Marseille (1873-1896)

P. Masson (dir.), op. cit., tome X, p. 212-246.

Entre préférence nationale et syndicalisation des ouvriers italiens

  • 12 AD BdR, 1 M 884.
  • 13 AD BdR, 1 M 882.
  • 14 Ibid.
  • 15 Fournier et les raffineurs de sucre promettent d’engager 15 à 20 ouvriers français chacun (Id., ibi (...)

4Au-delà du constat d’un durcissement des relations sociales au sein de l’industrie marseillaise, la récession des décennies 1880-1890 est une période décisive pour les relations que les ouvriers français entretiennent avec les travailleurs immigrés. Jusqu’au début du xxe siècle, leurs rapports sont ambivalents. Les ouvriers marseillais sont régulièrement partagés entre des pulsions de rejets et une réflexion sociale qui les conduit à défendre et à appliquer une stratégie de lutte solidaire. En 1884, au cours d’un meeting réunissant plusieurs centaines d’ouvriers sans travail à propos des « causes de la crise et des remèdes à y apporter », les voix qui préconisent le renvoi des ouvriers italiens rencontrent ainsi « peu d’écho » et provoquent même le « vote d’un blâme » de l’assemblée à leur encontre12. La tonalité est toutefois bien différente en février 1897, lorsque la récession est devenue particulièrement sévère pour certaines branches comme l’huilerie. Dans une réunion rassemblant plus de 1 000 chômeurs à la Bourse du travail – fondée en 1888 –, des ouvriers français réclament « l’emploi de la force pour obtenir le renvoi des ouvriers étrangers » et annoncent leur intention « de prendre d’assaut les usines qui les occupent de préférence13 ». Les manifestants se rendent ensuite chez Fournier & Cie et autour des raffineries de sucre « pour inviter les patrons à remplacer les ouvriers étrangers qu’ils occupent par des ouvriers français14 ». Mais les réponses des industriels – accusés, pour l’occasion, d’être de « mauvais patriotes » – restent très évasives et nettement insuffisantes au regard des attentes des ouvriers15. D’une façon générale, le patronat industriel marseillais demeure fondamentalement hostile au renvoi des ouvriers immigrés, comme le précisait déjà Eugène Rostand en 1889 :

  • 16 « L’immigration et la concurrence des ouvriers non indigènes », E. Rostand, Questions d’économie so (...)

Gardons-nous de violences qui iraient contre l’intérêt d’une grande ville ouverte où la natalité est insuffisante, des industries locales qu’un large exode ébranlerait, et de cette population laborieuse elle-même. Il y a des répercussions économiques que nos ouvriers sont très excusables de ne pas apercevoir : si l’immigration était supprimée, une surélévation artificielle du salaire dans tel ou tel coin serait compensée par une baisse de production, au renchérissement des taux de journée correspondrait un renchérissement de tels articles que les petits consommateurs achèteraient plus cher. En tout cas, puisque la concurrence non indigène continue de troubler les esprits dans nos milieux de travail manuel, puisque l’opinion paraît divisée, nous proposons qu’au lieu de déclamer, de s’indigner en l’air, de pousser les députés à des initiatives parlementaires irréfléchies, on commence par une enquête16.

  • 17 AD BdR, 1 M 882.

5Les industriels restent dans une logique libérale où la liberté des échanges est aussi importante que celle des mobilités migratoires liées au travail. Face à l’attitude des entrepreneurs, une délégation est alors reçue par le maire socialiste Siméon Flaissières qui s’engage à accélérer le démarrage de plusieurs chantiers en attente – la réfection de la façade du palais de justice, le pavage des voies latérales du Prado, l’extension du cimetière Saint-Charles ou la construction d’une école dans le quartier de la Capelette – et à n’y employer que des ouvriers français, ce qui devrait permettre d’embaucher rapidement plus de 5 000 ouvriers17. Une nouvelle réunion organisée le 17 février 1897 sur les « moyens de donner du travail aux ouvriers qui n’en ont pas » débouche sur des propositions contradictoires qui en disent long sur le désarroi des ouvriers et sur l’importance économique des travailleurs immigrés :

  • 18 Ibid.

se rendre en bloc aux usines et dire aux patrons qu’ils acceptent de travailler au même prix que les Italiens ; demander aux patrons de ne conserver que 10 % d’étrangers et de remplacer les autres par les Français18.

  • 19 Ibid.

6L’ouvrier Gros propose quant à lui de « former une délégation de 20 à 30 membres pour aller dans les usines demander l’expulsion des ouvriers étrangers, seule cause du malheur des ouvriers français19 ».

  • 20 P. Milza, Français et Italiens à la fin du xixe siècle, Rome, École française de Rome, 1981, tome I (...)
  • 21 P. Milza, op. cit., p. 844.

7La mise en avant de revendications fondées sur le concept de préférence nationale ne doit pourtant pas faire illusion. Elle correspond davantage à un phénomène pulsionnel passager qu’à une tendance de fond durablement et uniformément partagée par l’ensemble des ouvriers marseillais. Car sur le terrain, c’est-à-dire dans les luttes, on constate que les rapports entre ouvriers français et étrangers sont déjà en train d’évoluer vers une solidarité de fait grâce, en particulier, aux progrès de la combativité et de la syndicalisation des ouvriers italiens. Dans sa thèse, Pierre Milza indique pourtant que cette combativité et cette syndicalisation ne débutent véritablement qu’en 1898 avec l’arrivée à Marseille des réfugiés politiques du Parti socialiste italien (PSI) – Campolongui, Montanari, Benuzzi, etc. – qui ont réussi à échapper à la répression des émeutes de Milan. Il précise que ce sont ces réfugiés du PSI qui ont incité les ouvriers immigrés italiens à entrer en masse dans les syndicats et à faire cause commune avec les ouvriers français, pour ne plus être systématiquement utilisés comme briseurs de grèves ou servir de boucs émissaires20. Pierre Milza constate également que la propagande du PSI est particulièrement efficace puisque dès 1899-1901 plusieurs conflits importants – maçons, dockers, huiliers, cimentiers – révèlent une solidarité sans faille entre les ouvriers français et italiens. Ces grèves seraient ainsi les premières à établir « un lien jusqu’alors inexistant entre les deux communautés », à permettre l’émergence d’une élite syndicaliste italienne et à faire reculer les violences xénophobes21.

  • 22 X. Daumalin, « Usages et résistances des ouvriers immigrés dans l’industrie marseillaise (1880- 191 (...)
  • 23 AD BdR, 1 M 929, rapport du commissaire central du 13 mai 1881.
  • 24 AD BdR, 1 M 879, note du 28 juillet 1881.

8Les recherches effectuées récemment sur les conflits sociaux au sein de l’industrie marseillaise des années 1880-1914 révèlent une situation plus complexe22. On constate, en effet, que que dès le début des années 1880, alors que les effets de la récession ne sont pas encore vraiment ressentis à Marseille, les ouvriers italiens participent déjà à des conflits sociaux et se retrouvent souvent en première ligne face aux entrepreneurs et aux forces de l’ordre. C’est le cas en mai 1881, lors de la grève des ouvriers tanneurs de l’industriel Jullien23 et, plus symboliquement encore, en juillet 1881 – un mois seulement après les « vêpres marseillaises » traditionnellement considérées comme l’acte fondateur de la xénophobie à Marseille –, avec la grève des huileries où « l’entente des ouvriers français et italiens est parfaite24 » :

  • 25 Ibid.

Les Italiens et quelques Français ont refusé le travail à la fabrique Jullien et Guiol aux Chartreux. Ces ouvriers demandaient une augmentation de 0,50 francs, ce qui leur a été refusé ; ils se sont rendus dans quelques fabriques, notamment à Arenc, où ils ont excité les ouvriers à cesser le travail mais ils n’ont point réussi. Ils sont allés à Saint-Just, là il s’est produit une certaine agitation après laquelle un grand nombre d’ouvriers ont quitté le travail25.

  • 26 Ils réclament l’instauration d’une pause entre midi et quatorze heures, l’augmentation du salaire d (...)
  • 27 AD BdR, 1 M 930, rapport de police du 3 juin 1883.
  • 28 AD BdR, 1 M 930, rapport de police du 19 juin 1883.
  • 29 AD BdR, 1 M 930, lettre de C.-A. Verminck au préfet, 2 juillet 1883.

9La forte résonance journalistique et diplomatique des « vêpres marseillaises » n’a donc pas empêché les ouvriers des deux nations à mener une lutte unitaire. Et contrairement à ce que l’on pourrait supposer, la combativité sociale des Italiens ne faiblit pas lorsqu’à partir de 1883 la récession commence à affecter sérieusement le fonctionnement des industries marseillaises. C’est ce que l’on observe en avril 1883, sur les docks, lorsque les ouvriers charbonniers du port – majoritairement italiens – déclenchent un conflit qui s’élargit à une grande partie des dockers et se prolonge jusqu’à la mi-mai26 ; en juin 1883, aux Fonderies de la Méditerranée, où une soixantaine d’ouvriers piémontais fait grève pendant trois jours pour tenter d’obtenir une augmentation de salaire27 ; en juin 1883 toujours, à l’huilerie Mante frères & Borelli, lorsque les ouvriers italiens entrent en grève pendant quatre jours pour essayer d’obtenir une augmentation de salaire de 25 centimes, avant que 15 d’entre eux ne soient arrêtés pour entrave à la liberté du travail28 ; en juillet 1883, aux huileries Verminck, où les ouvriers italiens déclenchent un conflit – ils réclament une augmentation de salaire de 5 centimes par jour – qui finit par mobiliser 1 885 ouvriers, soit plus de 80 % des effectifs de la profession29. C’est d’ailleurs au cours de ce conflit qu’est créé le premier syndicat ouvrier de l’huilerie. Les meneurs étant tous italiens, il s’agit aussi, dans l’état actuel des recherches, du premier syndicat italien de l’industrie marseillaise.

10Qui sont les principaux protagonistes de ces grèves ? En premier lieu, les ouvriers italiens eux-mêmes. Étrangers à la région, souvent pauvres, vivant dans la crainte d’être arrêtés et expulsés, ils n’en sont pas moins capables de ressentir l’injustice de leur situation, de développer une analyse sociale et de cesser le travail pour essayer de créer un rapport de force moins défavorable. Ils sont souvent épaulés par un groupe politique longtemps passé inaperçu : les socialistes marseillais. Très affaiblis par l’échec et la répression de la Commune de Marseille, ces derniers sont en plein renouveau depuis le congrès ouvrier de 1879 organisé dans leur ville. La jonction entre les ouvriers italiens et les socialistes de Marseille se produit dès le début des années 1880. Parfois, c’est plutôt à la demande des ouvriers, comme en juillet 1881 :

  • 30 AD BdR, 1 M 879, note du 28 juillet 1881

Ce matin à 11 h. nous avons reçu la visite de huit délégués ouvriers appartenant à plusieurs fabriques d’huile, notamment à la fabrique d’huile de monsieur Gounelle, il y avait quatre Français et quatre Italiens. L’entente est parfaite entre Français et Italiens. La grève sera générale à partir de samedi. Ces délégués ont pour mission d’organiser pour dimanche une grande réunion où les Français et les Italiens des fabriques d’huile seront convoqués par la presse. Le Peuple Libre leur a promis son appui. Au dire de ces délégués, Pierre Roux ira présider la réunion30.

  • 31 AD BdR, 1 M 930, rapport de police du 14 juillet 1883.

11Les grévistes obtiennent ainsi le concours d’un des cercles socialistes de la ville – le Peuple libre – et du leader Pierre Roux. La rencontre peut aussi se produire à l’initiative des socialistes marseillais. C’est le cas en juillet 1883 pendant une nouvelle grève des huileries. Les socialistes marseillais – Antide Boyer en tête – y jouent un rôle de premier plan, que ce soit dans le soutien moral accordé au mouvement, dans l’aide apportée à l’élargissement d’une plateforme de revendications plus large – « augmentation de 50 centimes par jour ; ½ heure de liberté le matin pour le déjeuner ; 1 heure de liberté pour le déjeuner ; suppression des cantines dans les usines ou au moins liberté complète pour l’ouvrier de s’approvisionner où il voudra31 » – ou pour la création du premier syndicat ouvrier de la branche. Le 14 juillet 1883, alors que les grévistes hésitent encore à créer leur syndicat, l’intervention d’Antide Boyer emporte la décision des ouvriers :

  • 32 Ibid. Ernest Farrenc est rédacteur en chef du journal socialiste la Voix du peuple.

Sur ces entrefaites, arrive Boyer du cercle Esquiros, qui déjà s’est mêlé de cette grève. Il leur donne quelques conseils. Il leur dit de ne pas avoir peur. Il ajoute de tenir bon puisque la grève est déclarée et il leur assure que les Français sont avec eux puisqu’ils luttent pour améliorer leur situation et sauvegarder leur dignité. Il termine en les priant de nommer une délégation de 7 membres qui présenteront leurs réclamations aux patrons et qui seront en même temps le noyau de leur chambre syndicale. Cette proposition est acceptée à l’unanimité mais la même hésitation se produit et personne ne voudrait accepter. Sur quelques nouveaux conseils, on jette enfin les noms suivants : Santi Pietro ; Alto Domenico ; Angi Gierolamo ; Nicola Giuseppe ; Alvini Baptista ; Coni Antonio ; Crose. On décide que ces sept membres, aidés de Boyer et de Farrenc, feront un rapport pour demain 3 heures de l’après-midi ; qu’on le lira à l’assemblée qui l’approuvera et que lundi on ira trouver les patrons. En attendant, on décide de continuer la grève32.

12Même si le conflit échoue quelques jours plus tard, il n’en demeure pas moins que cette première tentative de création d’un syndicat ouvrier dans l’huilerie est bel et bien le fruit d’une rencontre et d’une collaboration étroite entre, d’une part, des ouvriers italiens qui n’hésitent plus à s’engager dans des mouvements revendicatifs et, d’autre part, des socialistes marseillais en quête d’une plus grande audience depuis le congrès de 1879.

Premier succès des ouvriers français et italiens réunis

  • 33 Ils perdent 30 centimes sur un salaire de 1,75 francs pour 12 heures de travail (Id., 1 M 933).
  • 34 Arch. Banque de France, Rapport concernant la vérification du service de la succursale de Marseille (...)

13Une autre grève, avant l’arrivée à Marseille des membres du PSI, joue un rôle important dans la syndicalisation des Italiens et surtout dans le rapprochement avec les travailleurs français. Il s’agit de la grève des ouvriers tuiliers qui éclate en 1894 dans les villages industriels de Saint-Henri, Saint-André et l’Estaque. Là encore, l’exemplarité du conflit est perceptible à plusieurs niveaux. Dans la rapidité de son déclenchement, tout d’abord, et dans son ampleur. Le mouvement débute le 2 mars avec la grève de 150 jeunes filles et garçons de 13 à 18 ans employés dans les tuileries qui protestent contre la diminution du temps de travail de 12 à 10 heures, une réduction qui s’est traduite par une baisse de 17 % des salaires journaliers33. On retrouve là un positionnement patronal déjà souligné par la Banque de France en 1884 : dans un premier temps, l’ajustement à la conjoncture se fait par la réduction de la journée de travail et non par la baisse du salaire horaire, qui doit déjà être au plus bas34. Signe qui en dit long sur le niveau de tension des rapports sociaux au sein de cette branche, les adolescents sont rapidement rejoints par l’ensemble des ouvriers de la profession – journaliers des carrières, charretiers, ouvriers des fours etc. –, y compris par ceux qui se trouvent dans d’autres quartiers – la Viste, Saint-Just – et même par les ouvriers de la tuilerie des Milles, non loin d’Aix-en-Provence. Dès le 5 mars, 1500 personnes ont cessé le travail pour réclamer des augmentations de salaires ; le 15 mars, ils sont près de 2000.

14Le deuxième niveau d’exemplarité concerne le mode de fonctionnement du syndicat des ouvriers tuiliers fondé dès le 3 mars. Composé de travailleurs français et italiens, disposant d’une caisse alimentée par les cotisations des ouvriers, les quêtes faites auprès des négociants et par les dons versés par le conseil général ou la municipalité de Marseille, il fait preuve d’une réelle maîtrise dans la conduite du mouvement, tenant régulièrement des réunions, distribuant des bons d’alimentation aux grévistes, exigeant des augmentations uniformes par catégories – et non suivant les capacités des individus comme le souhaitent les entrepreneurs –, sachant jouer des rivalités entre les industriels pour être reconnu comme le seul interlocuteur des ouvriers, réussissant à imposer que la reprise du travail ne se produise que dans les établissements où les entrepreneurs ont accepté par écrit leurs revendications salariales et parvenant finalement, après 7 semaines de lutte, à une victoire complète, la première du genre dans un si long conflit. Ce succès va d’ailleurs bien au-delà de la simple satisfaction des augmentations de salaire ou de la reconnaissance du syndicat. On perçoit bien, en analysant les différents rapports de police et les plaintes exprimées par les industriels, que le syndicat tend aussi à contrôler l’embauche :

  • 35 Rapport de police du 20 avril 1894 (AD BdR, 1 M 933).

Les ouvriers de l’usine Sacoman Pierre à l’Estaque ayant obtenu de ce fabricant satisfaction complète à toutes leurs revendications portant sur la réduction des heures de travail à l’augmentation des salaires avaient repris leur travail ; mais le syndicat ouvrier, afin d’avoir toujours la haute main dans les usines, a nommé un certain nombre d’ouvriers dans chaque usine qui sont spécialement délégués pour veiller aux embauchages et aux renvois d’ouvriers, afin d’empêcher le patron d’embaucher des ouvriers non syndiqués ou d’en renvoyer de ceux qui sont possesseurs d’un livret du syndicat35.

15C’est d’ailleurs ce qui décide les industriels à constituer leur propre syndicat.

  • 36 Le différentiel physique, qui permet notamment aux ouvriers italiens employés dans les salins de ga (...)

16La solidarité affichée par les ouvriers français et italiens constitue le troisième niveau d’exemplarité de cette grève. Nous sommes, ne l’oublions pas, sept mois seulement après les dramatiques événements d’Aigues-Mortes qui ont provoqué la mort d’une dizaine de journaliers italiens. Mais, l’industrie marseillaise n’est pas tout à fait dans la même configuration économique et sociale que les salins de Camargue et le conflit des tuileries ne s’inscrit pas dans le cadre d’une concurrence entre les deux communautés36. La solidarité s’affiche donc sans difficulté dans la lutte, les ouvriers italiens apparaissant même plus en pointe que les ouvriers français, à la grande surprise de la police qui redoutait des violences intercommunautaires :

  • 37 Rapport de police du 24 mars 1894 (AD BdR, 1 M 933).

Ce qu’il y a de frappant dans cette grève c’est l’union qui n’a pas discontinué de régner entre les ouvriers français et les étrangers. Ces derniers se sont montrés même plus tenaces que les premiers pour ne pas reprendre le travail avant d’avoir obtenu complète satisfaction37.

17Ou encore, une semaine plus tard :

  • 38 Rapport de police du 31 mars 1894 (Ibid.).

On n’a jamais redouté à Saint-Henri un conflit entre ouvriers français et ouvriers italiens. La plupart de ces derniers sont syndiqués comme les ouvriers français et ils ont soutenu les mêmes revendications qu’eux38.

18Un incident a pourtant suscité l’émoi de la police et de la presse nationale. Le 26 mars, alors qu’une soixantaine de grévistes italiens se rend à proximité de l’usine Guichard, Carvin & Cie pour faire pression sur les ouvriers employés à l’extraction de l’argile qui viennent de reprendre le travail sans que l’entreprise ait accepté les tarifs réclamés par le syndicat, le cri « d’Aigues-Mortes » est proféré plusieurs fois. Cela provoque l’arrestation d’une dizaine d’Italiens, dont l’ouvrier Jean Fiori, un des blessés d’Aigues-Mortes et auteur des cris. Le Figaro évoque alors une recrudescence des tensions intercommunautaires, mais l’enquête de police révèle que l’usage mémoriel fait par Jean Fiori, ouvrier non gréviste, du massacre d’Aigues-Mortes, s’adressait aux ouvriers italiens venus le convaincre d’abandonner son travail. Le problème s’est donc décentré. La rivalité ne s’exprime plus entre ouvriers français et ouvriers italiens, mais entre les ouvriers italiens syndiqués et ceux qui ne le sont pas encore. La solidarité sociale l’a cette fois emportée sur la solidarité nationale.

  • 39 Antide Boyer est lui-même membre du Parti ouvrier de Jules Guesde. La situation est différente dans (...)
  • 40 En 1900, la municipalité Flaissières joue ainsi un rôle de premier plan dans le soutien de la grève (...)

19Tous ces éléments incitent à proposer plusieurs inflexions aux analyses habituellement retenues pour caractériser les relations entre les ouvriers français et italiens à Marseille au cours des années 1880-1890. Il conduisent, en premier lieu, à relativiser le côté « génération spontanée » et uniquement exogène de la syndicalisation des ouvriers italiens à partir de 1898. Certes, l’action des réfugiés du PSI a été importante – on le constate dans l’engagement de ses leaders dans les grèves des années 1900-1901 –, mais elle a été précédée d’une phase d’une vingtaine d’années au cours de laquelle les socialistes marseillais ont contribué à intégrer et à former des ouvriers italiens aux luttes revendicatives unitaires et au syndicalisme. Même dans les moments forts de l’expression de la xénophobie ouvrière, certains socialistes locaux ne manquent jamais de rappeler que la véritable solution ne réside pas dans l’expulsion des ouvriers italiens mais plutôt dans une révolution sociale portée conjointement par les ouvriers français et italiens. Les membres du PSI ont donc davantage accéléré, qu’initié le processus de syndicalisation des ouvriers italiens et leur engagement dans les mouvements revendicatifs. D’une manière générale, le socialisme marseillais semble plus proche de l’internationalisme que du « socialisme national » de Maurice Barrès très influent, par exemple, dans le Nord de la France où les ouvriers belges sont régulièrement – et parfois violemment – stigmatisés39. L’influence de l’internationalisme est-elle plus forte à Marseille qu’ailleurs ? C’est une hypothèse qui demande à être vérifiée par une étude plus fine du mouvement socialiste de cette époque, des courants, des structures qui l’animent (cercles, journaux etc.), de ses leaders et de leurs prises de position successives40. Mais si de nouvelles recherches venaient à confirmer cette hypothèse, on pourrait alors avancer que Marseille est aussi, dans ces années-là, un des lieux privilégiés de la solidarité ouvrière.

  • 41 X. Daumalin, O. Lambert, P. Mioche, Une aventure industrielle en Camargue, op. cit., p. 22.
  • 42 Voir, notamment, les travaux de Jean-Marie Guillon et de Pierre Laborie.
  • 43 C. Regnard, « Une société xénophobe ? Marseille à la fin du xixe siècle », dans S. Mourlane, C. Reg (...)

20Les conflits sociaux évoqués dans les développements précédents montrent aussi qu’en dépit des violences xénophobes qui ponctuent les années 1880-1890 – en 1897 une rixe très violente oppose encore Français et Italiens à l’usine Solvay de Salin-de-Giraud41 –, la conflictualité n’oppose plus seulement les ouvriers français aux ouvriers italiens ; elle existe aussi, désormais, au sein de la communauté italienne entre ceux qui ont commencé à participer aux grèves et aux mouvements syndicaux et ceux qui n’y participent pas encore. La solidarité de fait entre les ouvriers français et italiens, perceptible de façon récurrente dès le début des années 1880, invite enfin à reconsidérer l’importance accordée aux événements dramatiques des « vêpres marseillaises » et d’Aigues-Mortes dans la mesure de l’intensité de la xénophobie ouvrière au cours de cette période, en opérant un distinguo entre leur ampleur journalistique ou politique et leur impact réel sur le quotidien des travailleurs. De la même manière que l’histoire de la Résistance française a été profondément renouvelée et enrichie par une approche « par le bas »42, l’histoire de la xénophobie ouvrière à Marseille gagnerait sans doute à accorder davantage d’attention aux pratiques du vivre ensemble entre les ouvriers français et italiens comme le suggèrent déjà certains travaux43.

21Création de nombreux syndicats, augmentation de la fréquence des conflits et de leur durée moyenne, rapprochements entre les ouvriers français et les ouvriers italiens dans des structures syndicales de plus en plus puissantes qui bénéficient parfois du soutien des hommes politiques locaux, le tout dans un contexte récessif et de plus en plus concurrentiel : ces évolutions remettent non seulement en cause les stratégies d’adaptation à la récession fondées sur la réduction des coûts par la diminution du temps de travail, des salaires et des effectifs, mais elles limitent aussi considérablement les avantages que les industriels retiraient jusque-là de l’emploi d’un grand nombre d’ouvriers italiens. Dès l’instant où ces derniers intègrent les structures syndicales pour obtenir des augmentations de salaires, dès lors qu’ils cessent d’être des ouvriers « briseurs de grèves » pour devenir des ouvriers « meneurs de grèves », c’est un des principaux fondements de la compétitivité des industries marseillaises qui se trouve ainsi affecté en pleine récession et qui demande à être reconsidéré. Les industriels peuvent alors être tentés de privilégier davantage l’innovation, de pousser plus loin la mécanisation des opérations de production et/ ou de procéder à la réorganisation de leurs recrutements vers des populations immigrées plus récentes, encore peu habituées aux actions revendicatives.

Notes

1 A. Olivesi, Le socialisme à Marseille depuis la création de la première internationale ouvrière jusqu’à la fin de la Troisième République (1864-1940), Paris, Thèse soutenue sur un ensemble de travaux, 1950-1982, 30 vol.

2 Id., La commune de 1871 à Marseille et ses origines, Paris, Librairie Marcel Rivière, 1950, 169 p. ; L. Gaillard, « Le congrès de Marseille de 1879 », Bulletin du CIRA, no 5, 1970, 26 p.

3 Les plus importants sont l’Indépendance, le cercle Esquiros, l’Union des peuples latins ou Le socialiste phalanstérien. En 1881, le cercle Esquiros, « composé de tous les anciens condamnés et proscrits de la Commune de Marseille ainsi que des anciens gardes civiques », compte plus de 700 membres (AD BdR, 1 M 864).

4 Le Travailleur, puis le Réveil marseillais, fondés par Antide Boyer ; L’Ami du peuple de Philémon Gras ; Le Peuple libre de l’instituteur Jean Lombard ou La Voix du peuple de Valz, Reybaud et Esménard (P. Masson (dir.), Les Bouches-du-Rhône. Encyclopédie départementale…, op. cit., tome X, p. 148).

5 Né à Aubagne en 1850, Antide Boyer a débuté sa vie professionnelle comme ouvrier potier – métier de son père – avant de suivre des études au petit séminaire de Marseille.

6 Paule Minck (Paulina Mekarska) est née en 1839 à Clermont-Ferrand. Son père s’était réfugié en France en 1831 à la suite de la sanglante répression de la révolte polonaise par les troupes russes. Paule Minck a participé activement à la Commune de Paris aux côtés de Louise Michel (AD BdR, 1 M 794).

7 Ancien communard, Clovis Hugues est élu député socialiste avant d’être attiré par le boulangisme.

8 Il avait déjà été réélu en 1889 dans la 5e circonscription de Marseille. Il retrouvera encore son siège en 1898, 1902 et 1906. Il sera ensuite sénateur de 1907 à 1912.

9 Siméon Flaissières sera réélu maire de Marseille de 1919 à 1931.

10 Les statistiques ne permettent pas de faire la distinction entre les ouvriers des différents métiers (dockers, tuiliers etc.). Il faut donc entendre « ouvrier » au sens large du terme et pas uniquement les ouvriers travaillant en industrie.

11 S. Sirot, La grève en France. Une histoire sociale (xixe-xxe siècle), Paris, Éditions Odile Jacob, 2002, 306 p. ; G. Noiriel, Les ouvriers dans la société française xixe-xxe siècle, Paris, Éditions du Seuil, 1986, p. 99-119 ; M. Perrot, Les ouvriers en grève (France 1871-1890), Paris, Mouton, 1974, 2 vol., réédité en 2001 par l’EHESS.

12 AD BdR, 1 M 884.

13 AD BdR, 1 M 882.

14 Ibid.

15 Fournier et les raffineurs de sucre promettent d’engager 15 à 20 ouvriers français chacun (Id., ibid.).

16 « L’immigration et la concurrence des ouvriers non indigènes », E. Rostand, Questions d’économie sociale dans une grande ville populaire, Paris, Guillaumin, 1889, p. 442.

17 AD BdR, 1 M 882.

18 Ibid.

19 Ibid.

20 P. Milza, Français et Italiens à la fin du xixe siècle, Rome, École française de Rome, 1981, tome II, p. 833-857. Voir aussi : É. Temime, T. Vertone (dir.), Gli italiani nella Francia del Sud e in Corsica (1860-1980), Milan, Quaderni di affari internazionali/Franco Angeli, 1988, 238 p. ; R. Lopez, É. Temime, Migrance, Aix-en-Provence, Édisud, 1990, tome II, p. 127-146.

21 P. Milza, op. cit., p. 844.

22 X. Daumalin, « Usages et résistances des ouvriers immigrés dans l’industrie marseillaise (1880- 1914) », dans G. Buti, O. Raveux, A. Bartolomei (dir.), Travailler chez l’autre en Méditerranée (xive-xixe siècle), Nice, Université de Nice-Sophia Antipolis, 2012, p. 235-252 ; Id., « De l’usage mémoriel du massacre d’Aigues-Mortes par les ouvriers Italiens de Marseille », dans S. Mourlane, C. Regnard (dir.), Les batailles de Marseille. Immigration, violence et conflits xixe-xxe siècles, Aix-en-Provence, Presses universitaires de Provence, 2013, p. 125-136.

23 AD BdR, 1 M 929, rapport du commissaire central du 13 mai 1881.

24 AD BdR, 1 M 879, note du 28 juillet 1881.

25 Ibid.

26 Ils réclament l’instauration d’une pause entre midi et quatorze heures, l’augmentation du salaire de nuit et du dimanche et l’abolition du travail à forfait (AD BdR, 1 M 929, note du 15 avril 1883).

27 AD BdR, 1 M 930, rapport de police du 3 juin 1883.

28 AD BdR, 1 M 930, rapport de police du 19 juin 1883.

29 AD BdR, 1 M 930, lettre de C.-A. Verminck au préfet, 2 juillet 1883.

30 AD BdR, 1 M 879, note du 28 juillet 1881

31 AD BdR, 1 M 930, rapport de police du 14 juillet 1883.

32 Ibid. Ernest Farrenc est rédacteur en chef du journal socialiste la Voix du peuple.

33 Ils perdent 30 centimes sur un salaire de 1,75 francs pour 12 heures de travail (Id., 1 M 933).

34 Arch. Banque de France, Rapport concernant la vérification du service de la succursale de Marseille, 1884.

35 Rapport de police du 20 avril 1894 (AD BdR, 1 M 933).

36 Le différentiel physique, qui permet notamment aux ouvriers italiens employés dans les salins de gagner davantage que les ouvriers français tout en ayant un salaire horaire inférieur, ne joue pas de la même manière dans l’industrie (G. Noiriel, Le massacre des Italiens. Aigues-Mortes, 17 août 1893, Paris, Fayard, 2010, p. 112).

37 Rapport de police du 24 mars 1894 (AD BdR, 1 M 933).

38 Rapport de police du 31 mars 1894 (Ibid.).

39 Antide Boyer est lui-même membre du Parti ouvrier de Jules Guesde. La situation est différente dans le Nord de la France où le « socialisme national » de Maurice Barrès fait davantage d’émules. Gérard Noiriel évoque le ainsi cas de l’ancien mineur et député Émile Basly qui, en 1893, milite activement en faveur d’une loi protégeant le travail national (G. Noiriel, op. cit., p. 98).

40 En 1900, la municipalité Flaissières joue ainsi un rôle de premier plan dans le soutien de la grève des huileries. Les militants socialistes sont encore très présents dans les grèves de 1907, 1908 et 1910, que ce soit dans celles des huileries ou des raffineries de sucre (AD BdR, 1 M 955).

41 X. Daumalin, O. Lambert, P. Mioche, Une aventure industrielle en Camargue, op. cit., p. 22.

42 Voir, notamment, les travaux de Jean-Marie Guillon et de Pierre Laborie.

43 C. Regnard, « Une société xénophobe ? Marseille à la fin du xixe siècle », dans S. Mourlane, C. Regnard (dir.), op. cit., p. 150.

Table des illustrations

Titre Graphique 5 : l’évolution annuelle du nombre de grèves à Marseille (1873-1896)
Crédits P. Masson (dir.), op. cit., tome X, p. 212-246.
URL http://books.openedition.org/pup/docannexe/image/15848/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 22k

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