La représentation des repas populaires : un miroir des mentalités

p. 74-80


Texte intégral

1Naturel villageois, bonheurs simples, famille, éducation, retour à la terre sont les maîtres mots qui rythment les représentations des repas populaires du xviiie siècle. Loin de la misère qui marque les œuvres du xviie siècle réalisées par les frères Le Nain et par Sébastien Bourdon par exemple, le siècle des Lumières occulte totalement la pauvreté des paysans et des villageois pour montrer de leur vie une vision presque idyllique, voire paradisiaque. Les repas populaires ne sont donc plus des repas populaires à proprement parler. L’évolution des mentalités introduit dans ces repas des valeurs bourgeoises principalement incarnées en peinture par Greuze ou Chardin.

Les valeurs bourgeoises : piété filiale et éducation

2Dans La Piété filiale1, œuvre peinte par Jean-Baptiste Greuze en 1763, l’artiste met en scène un paralytique entouré de sa famille, principalement de ses enfants qui prennent soin de lui2. Les personnages sont disposés en frise et le paralytique est au centre de la composition dont la description détaillée est donnée par Diderot dans ses Salons3 :

Le principal personnage, celui qui occupe le milieu de la scène, et qui fixe l’attention, est un vieillard paralytique, étendu dans son fauteuil, la tête appuyé sur un traversin, et les pieds sur un tabouret. Il est habillé. Ses jambes malades sont enveloppées d’une couverture. Il est entouré de ses enfants et petits-enfants, la plupart empressés à le servir. Sa belle tête est d’un caractère si touchant ; il paraît si sensible aux services qu’on lui rend ; il a tant de peine à parler, sa voix est si faible, ses regards si tendres, son teint si pâle, qu’il faut être sans entrailles pour ne pas les sentir remuer. À sa droite, du même côté, son gendre vient lui présenter des aliments. Ce gendre écoute ce que son beau-père lui dit, et il a l’air tout à fait touché. À gauche, de l’autre côté, un jeune garçon lui apporte à boire. Il faut voir la douleur et toute la figure de celui-ci. Sa peine n’est pas seulement sur son visage ; elle est dans ses jambes, elle est partout. De derrière le fauteuil du vieillard sort une petite tête d’enfant. Il s’avance ; il voudrait bien aussi entendre son grand-papa, le voir et le servir ; les enfants sont officieux. On voit ses petits doigts posés sur le haut du fauteuil. Un autre, plus âgé, est à ses pieds et rarrange la couverture. Devant lui, un tout à fait jeune s’est glissé entre lui et son gendre, et lui présente un chardonneret. Comme il tient l’oiseau ! Comme il l’offre ! Il croit que cela va guérir le grand-papa. Plus loin, à la droite du vieillard est sa fille mariée. Elle écoute avec joie ce que son père dit à son mari. Elle est assise sur un tabouret ; elle a la tête appuyée sur sa main. Elle a sur ses genoux l’Écriture sainte. Elle a suspendu la lecture qu’elle faisait au bonhomme. À côté de la fille est sa mère et l’épouse du paralytique. Elle est aussi assise sur une chaise de paille. Elle recousait une chemise. Je suis sûr qu’elle a l’ouïe dure. Elle a cessé son ouvrage, et elle avance de côté sa tête pour entendre. Du même côté, tout à fait à l’extrémité du tableau, une servante qui était à ses fonctions prête aussi l’oreille. Tout est rapporté au principal personnage et ce qu’on fait dans le moment présent, et ce qu’on faisait dans le moment précédent. Il n’y a pas jusqu’au fond qui ne rappelle les soins qu’on prend du vieillard. C’est un grand drap suspendu sur une corde qui sèche. Ce drap est très bien imaginé et pour le sujet du tableau et pour l’effet de l’art.

3Cette œuvre, ainsi que d’autres de l’artiste, pose la question de l’éducation au xviiie siècle. L’Enfant Gâté et Une mère réprimandant son enfant réalisés par l’auteur sont à rapprocher d’un texte intitulé Bazille et Thibault, ou les deux éducations publié en 1861 par Philippe de Chennevières sous le titre Un roman de Greuze. En réalité, seul l’épisode « Le Jeune Thibault commence à montrer son mauvais naturel » est du peintre4. Ce petit roman montre les effets positifs et négatifs de deux éducations opposées : celle de Bazile qui devient quelqu’un d’apprécié et accède à un certain niveau social et celle de Thibault qui mène une vie de débauche. Deux épisodes, dans lesquels se rejoignent nourriture et éducation, montrent ces effets. Le premier parle de « Bazile à l’âge de six ans » :

Le jeune Bazile aperçoit un pauvre petit garçon qui demande l’aumône ; la scène se passe dans une grande cour au bas d’un escalier, d’où il a l’air de descendre avec précaution. Comme il n’a rien à donner que son déjeuner qui est un morceau de pain et deux pommes, il en fait volontiers le sacrifice en se cachant le mieux qu’il peut ; il regarde avec un air inquiet à une fenêtre qui est au-dessus de sa tête pour savoir s’il n’est pas aperçu. Le père et la mère sont au haut du perron, qui, le voyant sans en être vus, s’embrassent et semblent s’applaudir de voir dans leur enfant un aussi bon cœur et un aussi bon naturel.

4Le second décrit la « faiblesse dangereuse de la mère de Thibault » :

La mère du jeune Thibault le fait déjeuner dans son lit après dix heures du matin, ce qui est indiqué par un rayon de soleil qui marque sa hauteur et qui donne dans sa chambre. Sa mère est assise auprès de son lit, tenant un pot de confitures avec lesquelles elle le fait déjeuner. La grand’mère aussi auprès du lit, d’une colère furieuse, fait des reproches à sa fille de la faiblesse qu’elle a pour son petit-fils et semble lui prédire toutes sortes de malheurs. Le petit garçon a la tête baissée avec un sourire moqueur.

5Ces deux épisodes appuient sur les conséquences d’une bonne ou d’une mauvaise éducation et les comparent.

6Plus spécifiquement, la place de l’éducation des enfants à table existe également. En effet, la notion d’éducation religieuse est présente, comme le montre Jean-Siméon Chardin avec son Bénédicité (ill. 18). Plusieurs versions de cette œuvre ont été réalisées (avec principalement un rajout d’ustensiles de cuisine) mais la composition reste la même. Au premier plan, le plus jeune des deux enfants, vu de profil avec le visage tourné vers sa mère qui le regarde, est assis sur une petite chaise en bois et joint ses mains en signe de prière. La mère tient une assiette dans sa main gauche et une cuillère dans sa main droite et sert la soupe. L’autre enfant, assis, regarde la petite fille au premier plan. Le bénédicité récité avant le repas est un thème très présent dans l’iconographie des repas du xviie siècle, qui se raréfie au siècle suivant. De plus, l’artiste qui mêle ici « profane et sacré5 » semble figurer une scène de la vie quotidienne plutôt qu’une scène religieuse.

7Les artistes représentant les repas populaires et bourgeois mettent l’accent sur la famille et l’enfant avec une place importante accordée à leur éducation, mais aussi l’amour que portent les parents à leurs enfants.

8La question de l’éducation, centrale dans les œuvres de Greuze, s’insère dans un contexte plus large d’une attention portée à la famille et à l’enfant qu’illustrent les compositions du xviiie siècle. Cela a d’ailleurs déjà pu être noté dans les représentations de consommation des boissons exotiques citées précédemment. Aussi, de nombreuses œuvres présentent un intérieur mettant en scène une famille. Si avec les œuvres de Greuze on assiste à deux exemples opposés d’éducation donnée par les mères, dans les autres illustrations mettant en scène des mères (et/ou pères) avec leurs enfants, c’est plutôt la joie d’une vie familiale qui est prônée.

9Ceci peut être mis en relation avec l’affirmation nouvelle du « sentiment de l’enfance » qui existe au xviiie siècle et qui montre la volonté des parents d’avoir des enfants « pour les aimer et en être aimés », et non plus uniquement pour prolonger le cycle qui consiste à avoir des enfants pour perpétuer la famille6.

10François Boucher illustre également cette « vogue » dans certaines de ses œuvres. Il a représenté ce qu’on appelle les « Enfants Boucher » pour la manufacture de Sèvres et les enfants sont souvent présents dans ses peintures de villageois.

11À la mort du peintre, le Mercure de France décrit ce style propre à Boucher :

Mais ce qui paroît inconcevable dans cette étonnante fécondité, c’est qu’il ne peignit la nature qu’en beau, qu’il ne la montra jamais que sous un aspect aimable et riant ; il évita sur-tout ce mélange ridicule d’objets qui ne se sont jamais trouvés ensemble & qui répugnent au goût en mettant le jugement en défaut : s’il s’égaya quelque fois dans le genre de Bamboche, il sçut l’embellir sans le dénaturer & n’offrir jamais des objets odieux ou dégoûtans, parce qu’il savoit que les yeux ont horreur des choses que les mains ne voudroient pas toucher7 […]

12L’idéalisation marque donc l’œuvre de Boucher comme on peut le voir dans ses « pastorales villageoises ». Les pastorales sont également à mettre en rapport avec l’univers idéalisé du théâtre d’où sortent certains de ces personnages et l’univers de la littérature puisque la Pastorale n’est pas un genre ; « il s’agit d’un milieu, d’une atmosphère, d’un déguisement conventionnel qui, théoriquement, pourraient se retrouver dans n’importe quel genre littéraire » et que ce milieu « est représenté par la nature intacte, qu’aucune civilisation n’a encore corrompue, une nature qui tient encore du divin et où les divinités primitives ont toujours leur siège8 ».

13L’idéalisation de ces représentations n’est pas sans rappeler le goût pour le primitivisme à la Cour de France sous Louis XVI.

Primitivisme

14Ce goût pour le primitivisme est en partie lié à l’influence des Physiocrates. La pensée physiocratique française se développe autour de Quesnay. Il s’agit d’une école d’économistes prônant le « gouvernement par la nature9 ».

15Pour les Physiocrates, les idées viennent de l’extérieur par l’intermédiaire de nos sens tandis que les sensations sont le résultat de l’action de Dieu qui manifeste ainsi sa présence. D’un point de vue économique, l’agriculture prime car la terre est pour ainsi dire « sacralisée ».

16En 1774, Turgot est appelé au contrôle général des Finances, ce qui lui donne l’occasion d’appliquer la théorie physiocratique au sein de la politique économique générale du pays. Son passage trop court au pouvoir ne lui permet pas de mettre en œuvre la totalité des réformes qu’il souhaitait faire. Il n’en reste pas moins que les Physiocrates ont laissé leur empreinte durant la décennie précédant la Révolution française.

17D’un point de vue artistique, un retour à une simplicité est recherché par Marie-Antoinette avec le Hameau construit par Richard Mique entre 1783 et 1787. La souveraine se rendait dans sa retraite pour y vivre comme une simple bergère. Il en est de même pour la laiterie de Rambouillet que le roi lui offre en 1787 où la sculpture principale représente une Jeune fille à la chèvre de Pierre Julien. Ce goût pour un retour à la vie simple, important pour Marie-Antoinette, est déjà prôné par Jean-Jacques Rousseau (1712-1778), notamment avec la publication de L’Émile en 1762. L’auteur y explique que l’enfant doit être élevé à la campagne et que sa nourriture doit également être simple et issue de la nature :

Notre premier aliment est le lait, nous ne nous accoutumons que par degrés aux saveurs fortes, d’abord elles nous répugnent. Des fruits, des légumes, des herbes, et enfin quelques viandes grillées sans assaisonnement et sans sel firent les festins des premiers hommes. […] Je n’examine pas ici si cette manière de vivre est plus saine ou non, ce n’est pas ainsi que je l’envisage. Il me suffit de savoir pour la préférer que c’est la plus conforme à la nature et celle qui peut le plus aisément se plier aux autres10.

18Même la nourriture de la nourrice est importante puisque son lait est bu par le nouveau-né : elle ne doit pas en changer mais être mieux choisie11. Durant le xviiie siècle, on note donc un goût pour les choses simples de la nature, pour la vie campagnarde, qui se retrouve par ailleurs dans les objets à décor champêtre de la manufacture de Sèvres, mais aussi dans les œuvres de Boucher comme on vient de le voir. Si le goût de la vie en plein air se remarque durant la totalité du siècle des Lumières, l’attrait pour la simplicité dont elle est la conséquence est surtout visible dans la seconde moitié du siècle.

19Rousseau écrit, avec L’Émile, un traité d’éducation ; la littérature romancée, elle, fait écho à cette volonté de recherche de simplicité et de nature. En 1788, Jacques Henri Bernardin de Saint-Pierre (1737-1814) publie un roman dont l’action se situe dans les Îles (l’actuelle Île Maurice) : Paul et Virginie. Enfants respectifs de Marguerite, paysanne séduite puis abandonnée et de Madame de La Tour, veuve, ils vivent dans deux cabanes et s’aiment jusqu’à ce que la jeune fille soit envoyée chez une tante en France. Ne s’habituant pas à la société de la capitale, Virginie retourne chez elle et périt dans un naufrage. Sa mort est suivie de près par celle de Paul et des deux mères. L’histoire est racontée par un vieillard (ayant connu les héros de cette histoire) à un voyageur. La simplicité de la vie marque cette œuvre notamment grâce à la frugalité des repas, comme on peut le relever dans le passage suivant :

Combien de fois, à l’ombre de ces rochers, ai-je partagé avec elles vos repas champêtres qui n’avaient coûté la vie à aucun animal ! des calebasses pleines de lait, des œufs frais, des gâteaux de riz sur des feuilles de bananier, des corbeilles chargées de patates, de mangues, d’oranges, de grenades, de bananes, de dattes, d’ananas, offraient à la fois les mets les plus sains, les couleurs les plus gaies, et les sucs les plus agréables12.

20Le « primitivisme » est une forme d’exotisme qui transparaît également à travers les domestiques des deux familles qui sont aidées par des serviteurs de couleur. Il s’agit d’une coutume courante dans la bonne société. Les serviteurs étrangers sont appréciés pour l’image qu’ils donnent de la maison dans laquelle ils servent, mais les grands seigneurs préfèrent généralement les domestiques maures.

21Cet engouement pour les domestiques de couleur est visible dans les scènes de repas, collations et rafraîchissements dès la fin du xviie siècle et durant le xviiie siècle. Jean-François de Troy, dans le Déjeuner de chasse (ill. 11) montre un serviteur, une bouteille en verre à la main, qui sert du vin rouge dans un verre que tient un homme. Carle Van Loo, dans la Halte de chasse (ill. 10), et Nicolas Lancret, dans le Déjeuner de jambon (ill. 1), montrent également deux serviteurs maures, l’un occupé à porter un panier en osier dans lequel se trouvent assiettes, serviettes et bouteilles, et l’autre se tient debout parmi les autres serviteurs et regarde le groupe de convives. Un tableau anonyme conservé au musée des Arts décoratifs de Paris (ill. 19) en est un autre exemple. À droite, deux jeunes enfants, dont un maure, retiennent un chien par le cou.

22Notons, par ailleurs, que les serviteurs maures sont vêtus de costumes exotiques. On voit ainsi, dans la Halte de chasse (ill. 10) de Carle Van Loo, le serviteur, vêtu d’une chemise blanche et d’une veste jaune et rouge. Le rouge, surtout présent sur les manches retroussées et attachées par des boutons, est rappelé par le turban qui couvre la tête du domestique. Ce turban, rouge et blanc, décoré d’une plume bleue, est caractéristique de l’habillement de ces serviteurs de couleur.

23Claude Petitfrère, dans son ouvrage sur la domesticité, explique qu’avoir des serviteurs étrangers servait à donner un certain éclat à la maison. Ces domestiques pouvaient être européens ; mais de façon générale, les grands seigneurs « sont particulièrement friands de domestiques venus d’Afrique, d’Asie, ou bien des Îles »13. Cette mode, qui existait déjà avant le xviiie siècle, prend son essor au siècle des Lumières. En effet, dès la fin du xviie siècle, la princesse Palatine relate une journée de la duchesse de Lesdiguières qui ne fait rien

de tout le jour […] que boire du café et du thé, elle ne lit pas, elle n’écrit ni ne joue ; quand elle boit du café ses femmes de chambre sont obligées de s’habiller en turques, elle-même s’habille de même ; quand elle boit du thé c’est le costume indien qu’on revêt. Les femmes de chambre pleurent souvent à chaudes larmes d’avoir à changer de costume deux ou trois fois par jour14 […].

24Et au xviiie siècle, on continue à se vêtir de la sorte pour consommer ces boissons.

25Quelquefois, il peut y avoir des enfants noirs, comme on peut le voir dans le tableau anonyme conservé au Musée des Arts décoratifs de Paris (ill. 19). La comtesse de Genlis relate que les princes d’Orléans aimaient les domestiques de couleur. L’un d’entre eux, nommé Scipion et âgé de trois ans, « par sa gentillesse, sa naïveté et la bonté de son cœur et de son caractère, fit pendant toute son enfance les délices du Palais-Royal ; on le gardait toute la journée dans le salon même les jours où l’on recevait le plus de monde15 ». Claude Petitfrère explique qu’à travers la citation de Madame de Genlis, on comprend que l’enfant est considéré comme un jouet.

26Par ailleurs, avoir des domestiques de couleur est à rapprocher du mythe du « bon sauvage » qui consiste « à idéaliser l’humanité la plus simple sinon la plus primitive16 ». Ainsi, les vertus que doit posséder le serviteur idéal sont le courage, l’honnêteté et le dévouement, qui sont censées être celles de ce type de serviteurs. L’exotisme pour les contrées lointaines et le primitivisme sont donc étroitement liés et plusieurs facteurs en sont les causes.

27Comme pour les pastorales de François Boucher, les scènes de la vie bourgeoise et populaire de Jean-Siméon Chardin et Jean-Baptiste Greuze montre que l’intérêt porté au primitivisme est issu de représentations mentales que l’élite de la société a de ces couches sociales et à travers des filtres souvent littéraires.

Notes de bas de page

1 La piété filiale illustrée en peinture par Jean-Baptiste Greuze est également présente dans la littérature de ce xviiie siècle. Dans son introduction de La Vie de mon père, Nicolas Rétif de La Bretonne emploie l’expression de « piété filiale ». À travers son livre, il désire rendre un hommage à son père, qu’il dit lui-même être « vertueux sans éclat », qui par son comportement est un exemple parfait de cette piété filiale. « D’autres célèbrent les Guerriers qui triomphent par les armes : Les Académiciens décernent des prix aux Écrivains, qui donnent un nouvel éclat à la gloire des anciens Ministres, des Hommes-de-Lettres distingués : Moi je vais jeter des fleurs sur la tombe d’un Honnête-homme, dont la vertu fut commune à tous les jours, pour ainsi parler… Il ne fut que juste et laborieux : qualités qui sont le fondement de toute société, et sans lesquelles les Héros mourraient de faim. J’ouvre une nouvelle carrière à la piété filiale : Si le fils de tout Homme en place était obligé d’écrire la Vie de son Père, cette institution serait des plus utiles. Quel est le Père qui, sachant que son propre Fils sera forcé d’être un jour son Historien véridique, n’acquérait pas quelques vertus ; ne ferait pas quelques bonnes actions, dans la vue au moins de n’être pas déshonoré par celui même qui doit perpétuer son nom. Ce serait là, sans doute, le frein le plus puissant contre la corruption rapide de nos mœurs ».

2 Pour une analyse plus approfondie de cette question : Sandrine Krikorian, « Pour une interprétation littéraire et morale de l’iconographie des repas populaires français des xviie et xviiie siècles à travers les œuvres de Bourdon et Greuze », 131e CTHS, 2009, Jean-René Gaborit, dir.

3 Diderot et l’art de Boucher à David. Les Salons, 1759-1781, Hôtel de la Monnaie, 5 octobre 1984 – 6 janvier 1985, Paris, Réunion des musées nationaux, 1985, p. 232-234.

4 « Il est dans la chambre de sa mère et tient un oiseau par les pattes et le plume tout en vie. Sa grand’mère qui est présente à cette action barbare semble s’y opposer fortement ; elle est repoussée par la mère de l’enfant qui fait un grand éclat de rire. Une jeune domestique qui est debout derrière la grand’mère pleure, voyant que le petit oiseau sera la proie d’un chat qui va le dévorer et qui est devant le petit garçon ; le père, assis dans l’embrasure d’une fenêtre et écrivant sur une petite table semble ne faire aucune attention à ce qui se passe », in Emma Bark, Greuze and the painting of sentiments : the familly in the French art (1755-1785).

5 Pierre Rosenberg, Chardin, Paris, Réunion des musées nationaux, 1999, p. 247.

6 C’est ce qu’explique Jacques Gélis dans son article qu’il consacre à « L’individualisation de l’enfant ». Philippe Ariès, Georges Duby, dir., Histoire de la vie privée, tome III. De la Renaissance aux Lumières, Paris, Seuil, 1985, p. 303-318.

7 AAVV, François Boucher (1703-1770), Paris, Galeries nationales du Grand Palais, 18 septembre 1986-5 janvier 1987, Paris, Réunion des musées nationaux, 1986, p. 146.

8 Daniela dalla Valle Carmagnani, « Pastorale », in Encyclopaedia Universalis.

9 Abel Poitrineau, Physiocrates, in Encyclopaedia Universalis.

10 Jean-Jacques Rousseau, L’Émile ou De l’éducation, Paris, Gallimard, 1969, livre II, p. 244.

11 Ibidem, livre I, p. 110-112.

12 Jacques Henri Bernardin de Saint-Pierre, Paul et Virginie, Librio, 2001, p. 30.

13 Claude Petitfrère, L’œil du maître. Maîtres et serviteurs de l’époque classique au romantisme, Bruxelles, Éd. Complexe, 1986, p. 43-46.

14 Lettres de la Princesse Palatine (1672-1722), Mercure de France, 1986, lettre du 8 mars 1699, p. 171.

15 Comtesse de Genlis, Le La Bruyère des domestiques, in Claude Petitfrère, L’œil du maître. Maîtres et serviteurs de l’époque classique au romantisme, Bruxelles, Éd. Complexe, 1986, p. 45.

16 Claude Petitfrère, L’œil du maître, op. cit., p. 46.


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