Du stand paysan à la classe des propriétaires terriens et des agriculteurs1
Paysans-négociants dans le Palatinat, en Hesse Rhénane et dans la Haute-Rhénanie du Nord (1740-1880)
p. 211-228
Texte intégral
Remarques sur l’histoire sociale des paysans allemands
1En 1987, Christof Dipper soulignait que l’histoire sociale des paysans allemands restait encore à écrire ; à ce jour, ce souhait est resté lettre morte2. Le bilan de la recherche est précaire et pour remédier à cette situation, un cercle de travail sur l’histoire agraire s’est constitué depuis 1994. Il est à l’origine de plusieurs initiatives. Dans un volume collectif programmatique publié en 1998, Werner Troßbach, Clemens Zimmermann et Peter Blickle se sont prononcés en faveur d’une « redéfinition du terrain de l’histoire agraire3 » et de la délimitation du champ de recherches d’une « nouvelle histoire agraire4 ». Il s’agirait de mieux prendre en compte les pratiques, les stratégies et les champs d’action, les formes de rapports sociaux et les modes d’existence dans les sociétés rurales et de déconstruire les catégories de l’histoire agraire ancienne fondées sur une conception normative du droit (le « régime agraire », par exemple) ou héritées de l’économie (la « taille des entreprises », notamment).
2Si le souhait de voir émerger une histoire sociale des paysans a tardé à se réaliser, cela tient d’abord au fait que le groupe de travail pour l’histoire sociale moderne fondé en RFA en 1957 n’a pas lancé d’initiatives concernant l’étude des sociétés rurales5. D’autre part, aussi bien en RFA qu’en RDA, on a assisté, à partir des années 1980, à une prise de conscience accrue des problèmes posés par les notions et les concepts utilisés jusque-là dans la recherche historique sur les conditions de vie de la paysannerie et de la sous-paysannerie6. Depuis, les comptes rendus critiques de l’état de la recherche rapportent les constats suivants :
- La représentation juridique normative d’une unité du Stand paysan s’avère difficilement applicable au contexte du Haut Moyen Âge, étant donné les processus de différenciation sociale qui interviennent alors7.
- À partir des réformes agraires de la fin du xviiie siècle, il n’est plus possible de délimiter les groupes paysans au moyen de critères univoques, repérables dans les sources.
- La puissance explicative de la notion économique de classe n’a, jusqu’à présent, été vérifiée que dans des analyses de micro-histoire ; pour le reste, le concept de situation de classe n’est pas suffisant pour analyser les conditions sociales des producteurs agricoles paysans, aux profils de plus en plus hétérogènes, ni la représentation qu’ils se faisaient d’eux-mêmes, ni leurs orientations culturelles.
- Des notions comme la « taille d’une entreprise », le « propriétaire d’une entreprise », le « travail », le « salaire », le « marché », etc., qui sont d’usage courant en économie et dans les sciences agraires, doivent être déconstruites et contextualisées.
- Le groupe social des paysans représente un « cas particulier au sein de la société moderne8 », dans la mesure où il se caractérise par une « position professionnelle indépendante », « certains symboles de statut » et des « modes de vie » spécifiques9. En effet, les inégalités économiques de la situation de classe des différents groupes paysans sont compensées par l’existence d’un certain « Stand professionnel10 » : cette idée fut très fréquemment admise parmi la majorité des paysans dans le dernier tiers du xixe siècle11.
3Certains de ces constats ont conduit Christof Dipper à formuler le vœu que les recherches sur les mondes de vie de la paysannerie prennent davantage en compte la coexistence de facteurs de Stand et de facteurs de classe12. Il a attiré l’attention sur une étude pionnière, le travail d’histoire régionale de Josef Mooser13. Cette exigence pourrait tout à fait s’appliquer à une histoire sociale des paysans allemands ; d’autant plus que, selon le diagnostic de Jürgen Kocka, on peut observer, dans l’évolution sociale de l’Allemagne entre 1750 et 1900, une « inflexion des différences de classe en fonction du Stand » qui vaut à peu près pour tous les groupes sociaux14. Cet infléchissement en fonction du Stand, remarquablement durable, peut être constaté, selon Jürgen Kocka, dans la langue et la littérature, les coutumes et les symboles, le droit et les autres institutions. À côté de cette disposition nouvelle des acteurs à se définir par le Stand, on voit se constituer, observe-t-il, des classes de propriété (Besitzklassen) de plus en plus distinctes selon qu’elles incluent ou non la propriété de moyens de production15. On peut ainsi distinguer des « classes de rendement [Leistungsklassen] qui offrent différentes qualifications de rendement16 », mais qui sont en même temps « très profondément » marquées par des « vestiges de Stand » – en particulier chez les fonctionnaires, les médecins et les ingénieurs17. Jürgen Kocka ne s’est cependant pas prononcé sur la question de savoir si ces notions peuvent être appliquées aux groupes paysans. Cette lacune va de pair avec une autre omission : dans un collectif sur la professionnalisation des métiers bourgeois paru en 1988, ni les propriétaires nobles de biens fonciers, ni les fermiers et les paysans bourgeois ne sont pris en compte18, bien qu’un nombre jusqu’ici non précisé d’entre eux ait suivi une formation en sciences agraires pour devenir agriculteur19. Cette occultation des formations techniques agricoles est d’autant plus étonnante que, au début du xixe siècle, un nombre croissant d’établissements agricoles spécialisés20 et d’écoles professionnelles21 furent créés dans les territories allemands, sous l’influence du conseiller d’État prussien Albrecht Daniel Thaer, tandis que les publications spécialisées se multipliaient et que des associations agricoles22 étaient fondées.
4Récemment, Werner Troßbach a fait état à plusieurs reprises de son scepticisme quant à la possibilité d’une application des modèles de stratification et des analyses de classe à l’étude des relations entre les groupes des sociétés agraires23. Lui-même plaide pour la reconstruction de réseaux, qui permet selon lui de cerner beaucoup plus précisément que les catégories sociales traditionnelles la position sociale, culturelle et économique des personnes, ainsi que les liens et les obligations qui les rattachent à d’autres. Selon Gérard Béaur et Jürgen Schlumbohm, les aspects qui prennent en compte l’attitude concrète des acteurs dans leur environnement social jouent désormais un rôle central dans la nouvelle histoire agraire24. Grâce à une prise en compte plus détaillée des relations sociales, David W. Sabean25 et Jürgen Schlumbohm26 ont pu montrer, dans leurs études de micro-histoire sur des villages et des paroisses, l’existence de réseaux locaux, et observer comment des structures spécifiques de Stand, de clientèle et/ou de classe se sont constituées dans le monde rural entre les xviie et xixe siècles27.
5Lorsqu’elle prend en compte les caractéristiques de Stand et de classe et les réseaux sociaux, l’analyse sociale a besoin d’être complétée, d’un point de vue méthodologique, par une étude aussi précise que possible de l’économie des exploitations et des comportements économiques des paysans. C’est à cette condition qu’on pourra disposer de critères fiables pour évaluer leur position particulière sur les marchés des produits bruts et manufacturés28.
6L’établissement d’un inventaire des positions constitue un préalable nécessaire, non seulement pour évaluer les chances des différents groupes de paysans sur le marché, mais aussi pour pouvoir répondre aux deux questions suivantes :
- Dans quelle mesure les paysans adoptèrent-ils un comportement économique allant dans le sens du capitalisme agraire au sens de Thaer, c’est-à-dire dans le sens d’une gestion rationnelle de leurs exploitations, orientée vers la production de profit ?
- Dans quelle mesure ce comportement fut-il orienté en fonction de leur statut social et dans quelle mesure leur capital fut-il utilisé pour acquérir des biens de consommation ?
7Afin de répondre à ces questions, l’école de Wilhelm Abel, à la fin des années 1960, a développé le calcul des revenus et des dépenses29, qui permet, lorsque les sources s’y prêtent, de calculer le produit brut et le produit net d’une exploitation agricole, ou du moins d’en donner une estimation. Les analyses historiques d’exploitations sont au demeurant restées extrêmement rares jusqu’à aujourd’hui30. Cela ne tient sans doute pas seulement à l’ampleur de la tâche, mais surtout à la nécessité de disposer de sources appropriées pour un tel usage.
8Parmi ce type de sources, il faut compter les registres des redevances seigneuriales et les « livres journaux » paysans (Schreibebücher). Depuis une bonne vingtaine d’années, ce dernier type de source suscite une attention toujours plus grande dans la nouvelle histoire agraire allemande31. Au demeurant, seuls Klaus-Joachim Lorenzen-Schmidt, Michael Kopsidis et Frank Konersmann ont entrepris de faire l’histoire d’exploitations agricoles à partir de livres journaux. Dans le cadre d’un projet basé à l’université de Bielefeld et portant sur les conditions, les facteurs et les phases de la modernisation agraire dans le Palatinat, la Hesse rhénane et la Rhénanie du Nord entre 1740 et 188032, on a pu étudier plus de 90 livres journaux de ce type, en provenance de quinze familles paysannes. Pour la reconstruction des réseaux sociaux et des relations de parenté, amitié, travail et affaires qui les sous-tendent, ces documents contiennent un grand nombre d’informations. À côté de données diverses concernant l’entreprise, on y trouve consignés les événements personnels et familiaux. De plus, ils contiennent des chroniques de la ferme, des chroniques familiales et des arbres généalogiques, ainsi que des copies de lettres, des contrats de mariage et des contrats de vente, parfois aussi des inventaires.
Caractéristiques spécifiques du groupe des paysans-négociants33
9Dans le sud-ouest de l’Allemagne, on peut situer la sociogenèse du groupe des paysans-négociants entre 1740 et 1770, c’est-à-dire dans une période marquée à la fois par un net accroissement de la population, par une intensification du commerce agricole orienté vers l’exportation et par des difficultés structurelles de l’économie agraire, liées à la raréfaction des ressources du sol34, en l’occurrence par un manque de bétail, de fumure et de fourrage chez les gros exploitants agricoles. Ce manque se fit d’abord sentir dans les régions les plus fortement peuplées : le Palatinat antérieur, la Rhénanie du Nord, entre Mannheim et Heidelberg, ainsi que certaines parties de la Hesse rhénane. Dans le dernier tiers du xviiie siècle, il se fit également criant dans les régions montagneuses du nord et de l’ouest du Palatinat et dans le Kraichgau, au sud de Heidelberg (voir carte). Ce problème structurel se renforça en raison du manque croissant de terres chez les petits paysans et les paysans microfundiaires, et il se doubla en outre de nombreux conflits relatifs à l’utilisation de la vaine pâture et des forêts communales.
10Alors que la situation commença à s’aggraver, vers la fin des années 1740, une petite minorité de producteurs agricoles, dont une part remarquablement élevée appartenait à la secte des mennonites, s’engagèrent dans des voies nouvelles. Il s’agissait là des paysans-négociants déjà évoqués. Après l’obtention de privilèges accordés par les autorités, ils installèrent des distilleries et combinèrent cette activité avec la stabulation à l’année et la culture du trèfle. Grâce à cette dernière et à l’exploitation des déchets des distilleries, riches en albumine, ils dépendaient moins des prairies pour la nourriture du bétail que la majorité des autres paysans. De plus, étant donné la taille plus élevée du cheptel qu’ils élevaient dans les étables qu’ils avaient construites, ils disposaient de quantités plus importantes de fumure qu’ils utilisaient à bon escient dans leurs champs et leurs prairies : ils purent ainsi augmenter le rendement agricole. Cette innovation clé dans le domaine agraire fut reprise une ou deux générations plus tard dans toute la région du sud-ouest de l’Allemagne, notamment pendant la période française (1794-1814), par un nombre toujours plus élevé de paysans moyens et de gros cultivateurs d’autres confessions, d’autant plus que la vente du bétail engraissé, des eaux de vie, du vinaigre, des graines de trèfle, du colza, du froment et du vin procurait des revenus importants. Dans les années 1820, la région comptait environ 3 000 distilleries, et il arrivait parfois qu’elles soient administrées par des coopératives de village35.

Carte d’après Karl Kollnig, Wandlungen im Bevölkerungsbild des pfälzischen Oberrheingebietes, Heidelberg 1952, p. 30, dessin par Frank Konersmann ; réalisation par Niels Gruene.
Région de la recherche : le Palatinat, l’Hesse-Rhénanie et la partie septentrionale du Haut-Rhin
11Les paysans-négociants associèrent très tôt l’agriculture à des activités annexes et à la vente de leurs produits agricoles. Pour la coordination de ces différents domaines d’activité, ils firent appel à leur famille et à leur parenté éloignée ; ils firent un usage toujours plus fréquent des livres journaux, afin de disposer de données fiables sur la taille de leur cheptel, leur personnel et leurs affaires. Un des premiers paysans-négociants de ce type fut le mennonite David Möllinger, de Monsheim, en Hesse rhénane. Dès les années 1740, il tint un journal dans lequel il consignait le détail de ses ventes, les modalités de paiement qui avaient été convenues et les rentrées d’argent effectives36. Ses relations d’affaires s’étendaient à toute la région, dans un rayon de près de 150 kilomètres.
12Le paysan mennonite David Möllinger était propriétaire, depuis 1744, d’une propriété de 125 ha située sur le territoire du village de Monsheim. En tant que mennonite, Möllinger ne jouissait pas pleinement des droits de citoyenneté dans le village ; il avait le statut de membre protégé de la famille du comte de Leiningen, dont il fut dépendant, ainsi que sa famille, jusqu’à la fin du Saint-Empire. Ses descendants n’obtinrent la plénitude des droits de citoyenneté qu’en 1798, pendant la période française, et elle fut confirmée ensuite après 1814 par le grand-duc de Hesse-Darmstadt. David Möllinger put cependant jouir d’une entière liberté d’action économique ; aucun conflit avec le comte de Leiningen n’est signalé. On peut supposer que la plupart des autres fermiers mennonites disposaient de la même liberté d’action, que leurs propriétés aient été acquises par le partage réel ou par la transmission intégrale. Outre les impôts habituels, ils devaient s’acquitter de fermages élevés. Dans les conflits avec des habitants du village au sujet de l’utilisation de la vaine pâture, ils pouvaient en général compter sur le soutien des grands propriétaires fonciers, qu’il s’agisse de seigneurs, de prélats ou de princes37. Il est frappant de voir que les mennonites, dans le Saint-Empire, ne faisaient que rarement l’acquisition de propriétés, alors que ce fut souvent le cas dans le sillage des ventes organisées par les Français. Dans le Palatinat, il se peut que de telles réticences s’expliquent par l’existence d’une clause juridique permettant à l’ancien propriétaire de racheter son bien dans un délai de trois ans.
13Basée à Offstein, en Hesse rhénane, la famille de Jakob Kägy, apparentée à celle de David Möllinger par trois mariages croisés, administrait un domaine du prince palatin, d’une superficie de 36 ha, situé sur le territoire du village. Avec d’autres familles mennonites de même rang social et économique, les familles Möllinger et Kägy formaient un vaste réseau de parenté qui constituait l’armature d’un réseau de relations d’affaires très étendu38. Gendre de Möllinger, Jakob Kägy avait aidé son beau-père dans ses affaires de commerce pendant ses jeunes années, ce qui lui permit de découvrir les usages en vigueur dans le commerce agricole, de nouer des contacts avec des partenaires et de s’entraîner à tenir des livres journaux ; par la suite, en 1767, il administra lui-même une propriété dont il avait hérité et devint peu à peu paysan-négociant. Les livres journaux laissés par ces deux familles montrent que, dans le derniers tiers du xviiie siècle, des relations sociales de tous ordres furent nouées avec des habitants du village appartenant à d’autres confessions. Les familles Möllinger et Kägy embauchèrent, confièrent telle ou telle tâche, prêtèrent de l’argent, louèrent des maisons et des appartements et livrèrent différentes sortes de biens.
14Outre quelques paysans réformés aux exploitations relativement importantes, ce furent surtout des paysans mennonites qui marquèrent très tôt de leur empreinte le type social du paysan-négociant. Ce phénomène tient pour une bonne part à un facteur spécifique : le fait que cette minorité religieuse ait officiellement été tolérée dans le Palatinat à partir de 1664. Après une phase de consolidation qui s’étendit à peu près sur trois générations, et durant laquelle les mennonites furent dans un premier temps des journaliers ou des fermiers qui ne possédaient presque rien, une minorité représentant à peu près 15 % de ces 350 familles parvint à s’imposer dans des niches de l’économie agraire, comme les distilleries d’eau-de-vie, la production de vinaigre et l’engraissement des bestiaux, sans entrer directement en concurrence avec des groupes professionnels locaux. Pour eux, la pression à la réussite économique était forte, s’ils voulaient que les autorités continuent à les tolérer ; de surcroît, ils furent exposés, jusqu’en 1750 environ, à la méfiance constante du clergé protestant. Dans cette situation difficile, ils furent amenés à se lancer dans une agriculture expérimentale ; grâce à leurs contacts étroits avec des correligionnaires des Pays-Bas, ils importèrent semble-t-il de ce pays leur connaissance des techniques de la stabulation à l’année et de la distillerie d’eau-de-vie. Ces innovations dans l’exploitation agricole leur permirent de trouver une issue au problème structurel que rencontrait, comme on l’a vu, l’économie agricole de toute la région. À partir des années 1770, les auteurs de traités d’agriculture et les fonctionnaires réformateurs des gouvernements des principautés s’intéressèrent à ces nouvelles techniques, qui rencontrèrent un écho grandissant auprès de la moyenne et grande paysannerie, qui fournirent à leur tour beaucoup de représentants du type du paysan-négociant.
Caractéristiques du Stand des paysans-négociants
15De façon générale, l’origine sociale, le statut juridique qui va de pair et le prestige social sont regardés comme les caractéristiques décisives d’un Stand. Les paysans-négociants du sud-ouest de l’Allemagne étaient tous des descendants de paysans dépendants ou non-libres, auxquels les seigneurs appliquaient des désignations diverses évoquant leur sujétion personnelle (Untertan), leur lien à la terre (Landmann) ou leur qualité de chefs d’exploitation (Beständer, Hausvater). À bien des égards, ils se distinguaient de la plupart des autres paysans ; Jean Vogt et Gunter Mahlerwein les ont décrits comme une « aristocratie paysanne39 » ou comme une « aristocratie des fermiers40 ». Selon les témoins de l’époque, ils possédaient un habitus de patrons. Celui-ci se manifestait dans la tournure clientéliste que revêtaient leurs relations avec les petits paysans et les paysans microfundiaires qui leur louaient des terres en fermage41, travaillaient pour eux comme journaliers et dont les enfants étaient employés chez eux comme domestiques42. Au tournant du xixe siècle, des familles entières de paysans microfundiaires faisaient partie de la clientèle des paysans-négociants. Ces relations de patronage clientéliste, à strates multiples, furent encore renforcées, dans la première moitié du xixe siècle, lorsque des paysans eurent la possibilité de proposer leurs domestiques et leurs journaliers pour des prix, qui les distinguaient pour leur loyauté et leur ardeur au travail43.
16La position en vue des paysans-négociants dans la société rurale du Saint-Empire, qui s’apparentait à celle d’un Stand, se fondait de surcroît sur le fait qu’ils se virent confier des charges dans les villages et les églises. À partir de l’exemple de la famille réformée des Hirsch, dans le village d’Alsheim, en Hesse rhénane, Gunter Mahlerwein a pu montrer que les représentants masculins de la famille occupaient depuis plusieurs générations des charges d’échevins et de bourgmestres44. Les sources indiquent la même chose dans le cas des deux familles de paysans luthériens d’Adam Müller et de Michael Höh, dans le village de Gerhardsbrunn, à l’ouest du Palatinat, auxquelles revinrent des charges de bourgmestres et de presbytes45. On a la preuve que presque tous les paysans-négociants mennonites remplirent des fonctions dirigeantes, celles de doyen ou de diacre. La charge de diacre, en particulier, fut d’une importance capitale pour cette communauté religieuse, parce que le diacre administrait les finances de celle-ci, contrôlait l’assistance aux pauvres et prenait part à toutes les décisions importantes. Même si ces paysans occupaient ces charges parce qu’ils avaient à chaque fois été élus par leurs concitoyens, la longue durée de leurs mandats et le fait que de telles charges soient régulièrement attribuées à des membres de leur famille traduisaient à n’en pas douter la position durablement dominante de certaines familles dans les communautés villageoises et dans les paroisses. Pendant la période française, c’est également dans ces cercles sociaux que se recrutaient souvent les notables, auxquels étaient réservées les charges de maire ou d’agent46, en raison de leur fiscalité élevée. Il en allait de même avec les membres des associations agricoles de la Hesse rhénane et des territoires rhénans appartenant au royaume de Bavière, dans la première moitié du xixe siècle. En Hesse rhénane, surtout, les « propriétaires de biens » d’origine paysanne étaient quasiment les seuls à être représentés47 ; dans les territoires appartenant à la Bavière, de nombreux villages comptaient parmi les membres corporatifs48. Dans l’ensemble, ces associations présentent un caractère ambigu, à mi-chemin entre la corporation et le Stand de propriétaires, d’une part, et, d’autre part, l’association de défense d’intérêts professionnels.
17Ces indices attestant l’émergence d’une couche supérieure de paysans-négociants dans le sud-ouest de l’Allemagne, vers 1750, se trouvent de surcroît corroborés par l’existence, jusqu’au début du xixe siècle, d’une endogamie sociale et confessionnelle dans les pratiques matrimoniales. Ces pratiques peuvent être observées au même titre chez les réformés, les luthériens et les mennonites, aussi bien dans les régions de partage réel que dans celles de transmission intégrale. Lorsqu’un mariage était en voie de conclusion, un conseil de famille comprenant des membres des deux familles se réunissait pour étudier les modalités de la transaction de biens qui en résulterait. Ces tractations avaient à l’évidence pour but de préserver le statut des enfants à marier. En ce qui concerne les enfants d’une génération restés célibataires – le cas n’était pas rare – on peut penser que les projets de mariage étaient contrôlés par les parents et la famille. Cette observation est confirmée par le fait que, à partir du dernier tiers du xviiie siècle, ces familles paysannes cherchèrent souvent des partenaires appropriés hors du village, faute d’en trouver sur place. Ce fut en particulier le cas des familles mennonites qui vivaient dispersées dans toute la région, et qui étaient de surcroît soumises à l’interdit religieux du mariage mixte49. Dans le cas des familles mennonites, cette règle fut en général maintenue jusque dans les années 1840. L’endogamie sociale des alliances matrimoniales s’observait en outre dans les origines paysannes de la majorité des partenaires.
Caractéristiques de classe des paysans-négociants
18Pour le groupe des paysans-négociants, on peut évoquer aussi bien les traits caractéristiques d’une classe de propriété que ceux d’une classe de rendement, encore que ces derniers semblent prédominer sur les premiers. Cette hypothèse est fondée sur le fait que beaucoup de représentants de ce groupe appartenaient à la confession mennonite qui, jusqu’à la fin du Saint-Empire, fit peser en permanence une forte contrainte de rendement sur ses membres, entraînant une augmentation de leurs profits ainsi que de leur revenu imposable. Cette contrainte de rendement les incita à concentrer leurs forces sur les segments de l’exploitation agricole qui pouvaient rapporter des revenus élevés et qui leur permettait de procéder à des expérimentations.
19Les paysans que Jean Vogt a désignés comme une « aristocratie paysanne » peuvent être caractérisés comme les représentants d’une classe de propriété rurale ; leur perception d’eux-mêmes en tant que paysans dépendait pour une part non négligeable de la superficie de leurs exploitations. En témoigne le fait que beaucoup d’entre eux cherchaient à évincer leurs concurrents lorsque des fermes étaient vendues50 et à mettre en œuvre diffférentes stratégies pour acquérir des parcelles de la vaine pâture51. Le paysan-négociant mennonite Jakob Kägy et son fils David s’engagèrent eux aussi, à partir des années 1770, dans une pratique renforcée de l’accumulation de terres, les documents l’attestent52. Les petits paysans et les artisans qui avaient contracté des dettes auprès d’eux mettaient dans un premier temps leurs parcelles en hypothèque et étaient contraints par la suite de les vendre à très bas prix à la famille Kägy. Cette pratique de l’accumulation de terres semble cependant avoir fait figure d’exception chez les mennonites ; le plus souvent, ils administraient des propriétés relativement importantes acquises par héritage ou des domaines du prince. Au début du xixe siècle, dans les listes de contribuables et dans les associations agricoles, les paysans assez importants et les paysans-négociants étudiés jusqu’ici étaient désignés comme « propriétaires d’un bien53 ». Il faudra d’autres recherches pour évaluer dans quelle mesure l’activité de ces associations et leur prise d’influence sur la politique des États constitutionnels de l’Allemagne du sud-ouest avaient pour premier objectif la préservation des intérêts d’un Stand de propriétaires.
20Dès la deuxième moitié du xviiie siècle, dans plusieurs secteurs d’activité, les paysans-négociants firent leurs premiers pas en direction d’une agriculture rationnelle au sens d’Albrecht Daniel Thaer. Si l’on raisonne à partir des concepts de Jürgen Kocka, on peut interpréter ces phénomènes comme caractéristiques d’une classe de rendement. Dans le livre journal du paysan réformé Johann Jakob Biebinger (Palatinat antérieur), on peut relever, vers 1750, des contrats d’accord avec ses employés et des comptes personnels dans lequel il détaille les rendements de travail et les formes de rémunération54. La présence de ce type de comptes relatifs au travail est attestée dans tous les livres journaux des paysans-négociants. On retrouve un type de comptabilité analogue pour leurs affaires financières ; en ce qui concerne les transactions monétaires, non seulement ils établissaient de pareils comptes pour les affaires conclues avec des étrangers, mais ils le faisaient également pour les transactions avec des membres de leur famille. Dans les deux cas, il n’était pas rare que des intérêts de crédit soient prélevés. Dans la deuxième moitié du xviiie siècle, le mennonite David Möllinger et son gendre Jakob Kägy, lui aussi mennonite, avaient à l’occasion recours à des moyens de paiement comme la lettre de change, les obligations et les assignats. Dans le courant du xixe siècle, ses descendants plaçaient une partie de leur capital dans des emprunts d’État et des actions de chemin de fer et investissaient l’autre dans la rénovation des étables et l’achat de nouvelles machines et outils.
21Pour les premiers paysans-négociants, le recours aux trois techniques culturelles de la lecture, de l’écriture et du calcul allait de soi. Cette spécificité peut être mise en relation, d’une part, avec la valorisation de la lecture dans l’Église réformée et dans les communautés mennonites55. D’autre part, la familiarité des mennonites avec les modes de calcul fondamentaux n’était pas sans lien avec leurs nombreux contacts d’affaires par delà les frontières territoriales : il fallait tenir compte, pour les modalités de règlement, des mesures et des monnaies à chaque fois différents qui étaient utilisés. Les contacts étroits et fréquents avec les villes de Mannheim, Heidelberg, Francfort et Worms, qui figuraient parmi les commanditaires de grandes quantités d’eaux de vie, exigeaient une grande flexibilité dans l’utilisation de ces trois techniques culturelles. Ces savoirs acquis par l’expérience et le recours toujours plus spontané aux livres journaux, chez les paysans-négociants, constituent les premiers rudiments d’une professionnalisation des paysans. Par suite, il n’est pas surprenant que l’auteur de traités d’agriculture Friedrich Casimir Medicus (Palatinat) ait désigné, dès les années 1770, ces paysans mennonites comme des « agriculteurs » (Landwirte56), parce que leurs pratiques agricoles étaient orientées vers la production de profit. Une génération plus tard, on trouve dans les livres journaux du paysan mennonite David Möllinger junior et dans ceux du paysan luthérien Adam Müller des références aux ouvrages de Thaer et de Dombasle ; on observe également leur souci de systématiser les procédés d’engraissement et d’élevage, d’assolement et de fumure.
22Le tournant des exploitations vers la stabulation à l’année, la culture de la luzerne et la distillerie conduisit tous les paysans-négociants à pratiquer l’engraissement, l’élevage et la culture de fourrage. En outre, ils se spécialisèrent dans la culture du colza, de la vigne, du froment et du seigle : sur les marchés allemands mais aussi étrangers, la demande était forte. Certains paysans-négociants acquirent une position dominante sur beaucoup de marchés régionaux. Pour ce qui concerne la culture des céréales et de la vigne, ainsi que l’élevage, Gunter Mahlerwein a noté qu’au xixe siècle, en Hesse rhénane, les petits paysans et paysans microfundiaires avaient été refoulés hors de ces secteurs de production57, pour se concentrer sur la production de pomme de terre et l’élevage de petit bétail58. Cette différenciation de l’activité des groupes paysans sur plusieurs secteurs du marché agricole peut être vue comme un indicateur de la constitution de classes économiques dans le sud-ouest de l’Allemagne.
23Les paysans-négociants et les gros cultivateurs qui, selon Gunter Mahlerwein, développèrent un habitus bourgeois au plus tard vers le milieu du xixe siècle59, et renforcèrent alors leurs liens avec les cercles sociaux de la bourgeoisie et de la noblesse, font clairement partie d’une classe de rendement. Dans le processus de transformation que connut le sud-ouest de l’Allemagne, leurs représentants remplirent peu à peu le rôle d’une élite fonctionnelle. Aussi bien sur les marchés locaux du capital et du travail que sur les marchés des produits agricoles, ce rôle était décisif60. Il tint sans doute pour une bonne part à la faible différenciation sectorielle de l’économie dans le Palatinat, la Hesse rhénane et la Haute-Rhénanie du Nord : dans ces régions, les processus d’urbanisation et d’industrialisation ne devinrent perceptibles qu’à partir du dernier tiers du xixe siècle61. C’est ce qui explique que les paysans-négociants aient exercé les fonctions d’employeur, de patron, de créancier, aient loué des maisons et des appartements, produit et vendu des marchandises agricoles. Par là, ils contribuèrent à élargir le spectre social de la société rurale dans le Palatinat, la Hesse rhénane et la Haute-Rhénanie du Nord.
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Les paysans-négociants dans le processus de transformation d’un Stand de propriétaires en classe de propriétaires terriens et d’agriculteurs. Synthèse provisoire
24Dès la deuxième moitié du xviiie siècle, la production agricole et industrielle des paysans-négociants fut largement orientée vers le marché. Une innovation de leurs exploitations, la stabulation à l’année, combinée à l’activité de distillerie, les conduisit à chercher des débouchés pour leurs produits sur les marchés national et international. En ce sens, ce groupe de paysans peut être désigné comme une classe de plus en plus dépendante du marché, selon la terminologie de Jürgen Kocka. Cette caractérisation s’applique tout spécialement à ses représentants mennonites, qui furent d’emblée soumis à une forte pression de rendement. Ces observations sont confirmées par le fait que, à partir de 1750, on repère chez eux les premiers signes d’une organisation rationnelle de l’agriculture. Dans leurs livres journaux, ils consignaient déjà des bilans comptables simples. Ce groupe de paysans présente indéniablement des traits de professionnalisation : le paysan tend à devenir un « agriculteur » (Landwirt), comme le résume Albrecht Daniel Thaer au début du xixe siècle. À n’en pas douter, les paysans-négociants représentaient une minorité – la proportion est évaluée par Gunter Mahlerwein, pour la Hesse rhénane, à un tiers des gros exploitants62.
25À l’évidence, les paysans-négociants s’appréhendaient encore clairement eux-mêmes comme un Stand de propriétaires, attaché à des relations de patronage clientéliste. En témoigne le caractère nettement patriarcal des rapports qu’ils entretenaient avec leurs employés extérieurs au cercle de la famille63. Au xixe siècle, cette tendance fut confortée par les associations agricoles. De plus, le faible développement du marché du travail dans le sud-ouest de l’Allemagne, jusque dans les années 1860, favorisa sans doute le maintien de ces relations clientélistes. L’évolution des pratiques matrimoniales atteste que les paysans-négociants modifièrent peu à peu la perception qu’ils avaient d’eux-mêmes comme un Stand de propriétaires. En témoigne l’éclatement de cercles matrimoniaux jusque là demeurés socialement, confessionnellement et professionnellement fermés : des mariages mixtes furent conclus avec des partenaires d’autres confessions et le choix du conjoint put se faire dans d’autres groupes professionnels. Ces nouvelles pratiques matrimoniales tendirent à relativiser considérablement l’importance des origines de Stand pour faire passer au premier plan le critère de l’appartenance à une classe de propriété64.
Notes de bas de page
1 La traduction a été assurée par Isabelle Kalinovski (Mission historique française en Allemagne). Pour leur lecture critique de cet article et leurs indications souvent stimulantes, mes remerciements vont à Niels Grüne, Wolfgang Mager et Gunter Mahlerwein.
2 Christof Dipper, « Bauern als Gegenstand der Sozialgeschichte », dans Wolfgang Schieder, Volker Sellin (éd.), Sozialgeschichte in Deutschland. Entwicklungen und Perspektiven im internationalen Zusammenhang, t. IV, « Soziale Gruppen in der Geschichte », Göttingen, 1987, p. 9-33, ici p. 19.
3 Werner Troßbach, Clemens Zimmermann, « Einleitung », dans Wolfgang Schieder, Volker Sellin (éd.), Agrargeschichte. Positionen und Perspektiven, Stuttgart, 1998, p. 1-6, ici p. 3.
4 Peter Blicke, « Deutsche Agrargeschichte in der zweiten Hälfte des 20. Jahrhunderts », dans Troßbach, Zimmermann, Agrargeschichte, op. cit., p. 7-32, ici p. 30 sq.
5 Christof Dipper, art. cit. (note 2), p. 19.
6 Ibid., passim ; Ilona Ballwanz, « Der Bauer als historische Kategorie », Jahrbuch für Wirtschaftsgeschichte, IV, 1980, p. 215-226 ; Werner Troßbach, « Historische Anthropologie und frühneuzeitliche Agrargeschichte deutscher Territorien. Anmerkungen zu Gegenständen und Methoden », Historische Anthropologie, 5, 1997, p. 187-211 ; Susanne Rouette, « Der traditionale Bauer. Zur Entstehung einer Sozialfigur im Blick westfälisch-preußischer Behörden im 19. Jahrhundert », dans Ruth Dörner, Norbert Franz, Christine Mayr (éd.), Lokale Gesellschaften im historischen Vergleich, Trêves, 2001, p. 109-138, ici p. 123-125.
7 Winfried Schulze, « Theoretische Probleme bei der Untersuchung vorrevolutionärer Gesellschaften », dans Jürgen Kocka (éd.), Theorien in der Praxis des Historikers. Forschungsbeispiele und ihre Diskussion, Göttingen, 1977, p. 55-74. Voir aussi le compte rendu de la discussion qui suit, p. 74-85.
8 Christof Dipper, art. cit. (note 2), p. 19.
9 Gerhard Albrecht cite Ilona Ballwanz, « Bauernschaft und soziale Schichten des Dorfes im Kapitalismus », Jahrbuch für Wirtschaftsgeschichte, III, 1980, p. 9-24, ici p. 13. Sur ce point, voir aussi Wolfgang Jacobeit, « Dorf und dörfliche Bevölkerung Deutschlands im bürgerlichen 19. Jahrhundert », dans Jürgen Kocka (éd.), Bürgertum im 19. Jahrhundert. Deutschland im europäischen Vergleich, Munich, 1988, p. 315-339, ici p. 334-339.
10 Ibid.
11 Heinrich Muth, « “Bauer” und “Bauernstand” im Lexikon des 19. und 20. Jahrhunderts », Zeitschrift für Agrargeschichte und Agrarsoziologie, 16, 1968, p. 72-98, ici p. 89-98. À propos de la France, des observations analogues ont été faites par Jean-Pierre Jessenne, « Le pouvoir des fermiers dans les villages d’Artois (1770-1848) », Annales ESC, 3, 1983, p. 702-734, ici p. 703.
12 Christopf Dipper, art. cit., p. 28.
13 Josef Mooser, Ländliche Klassengesellschaft 1770-1848. Bauern und Unterschichten, Landwirtschaft und Gewerbe im östlichen Westfalen, Göttingen, 1984.
14 Jürgen Kocka, « Stand – Klasse – Organisation. Strukturen sozialer Ungleichheit in Deutschland vom späten 18. Jahrhundert bis zum frühen 20. Jahrhundert im Aufriß », dans Hans-Ulrich Wehler (éd.), Klassen in der europäischen Sozialgeschichte, Göttingen, 1979, p. 137-165, ici p. 148.
15 Ibid., p. 144.
16 Ibid.
17 Ibid., p. 155.
18 Hannes Siegrist (éd.), Bürgerliche Berufe. Zur Sozialgeschichte der freien und akademischen Berufe im internationalen Vergleich, Göttingen, 1988.
19 Wolfgang Jacobeit a été le premier à souligner la nécessité d’éclaircir ce point (W. Jacobeit, art. cit. (note 9), p. 322 sq. et 331 sq.).
20 Rudolf Endres, « Zur Frühgeschichte des landwirtschaftlichen Bildungswesens in Deutschland », dans Hermann Kellenbenz, Jürgen Schneider (éd.), Auf dem Weg zur Industrialisierung (Beiträge zur Wirtschaftgeschichte, t. 6), Stuttgart, 1978, p. 187-202.
21 Ulrike Laufer, Technik und Bildung. Bürgerliche Initiativen und staatliche Reglementierung im beruflich-technischen Schulwesen Bayerns und der bayerischen Pfalz 1789-1848, Mannheim, 2000, p. 211 sq. et p. 328-331.
22 Marten Pelzer, « Was die Schule für das heranwachsende Geschlecht ist, das ist der landwirtschaftliche Verein für die älteren Landwirte… », Zeitschrift für Agrargeschichte und Agrarsoziologie, 52, 2004, p. 41-58.
23 Werner Troßbach, « Historische Anthropologie », art. cit. (note 6), p. 193 sq. ; du même, « Beharrung und Wandel “als Argument”. Bauern in der Agrargesellschaft des 18. Jahrhunderts », dans Werner Trossbach, C. Zimmermann (éd.), Agrargeschichte, op. cit., p. 107-136, ici p. 110-117.
24 Gérard Béaur, Jürgen Schlumbohm, « Einleitung : Probleme einer deutsch-französischen Geschichte ländlicher Gesellschaften », dans Reiner Prass, Jürgen Schlumbohm, Gérard Béaur, Christophe Duhamelle (éd.), Ländliche Gesellschaften in Deutschland und Frankreich, 18.-19. Jahrhundert, Göttingen, 2003, p. 28.
25 David Warren Sabean, Property, production and family in Neckarhausen, 1700-1870, Cambridge, 1990 ; du même, Kinship in Neckarhausen, 1700-1870, Cambridge, 1998.
26 Jürgen Schlumbohm, Lebensläufe, Familien, Höfe. Die Bauern und Heuerleute des osnabrückschen Kirchspiels Belm in proto-industrieller Zeit, 1650-1860, Göttingen, 1997 (2e édition revue).
27 Béaur, Schlumbohm, « Einleitung », art. cit. (note 24).
28 Toni Pierenkemper, « Englische Agrarrevolution und preußisch-deutsche Agrarreformen in vergleichender Perspektive », dans Toni Pierenkemper (éd.), Landwirtschaft und industrielle Entwicklung. Zur ökonomischen Bedeutung von Bauernbefreiung, Agrarreform und Agrarrevolution, Stuttgart, 1989, p. 7-25, ici p. 16.
29 Friedrich-Wilhelm Henning, Dienste und Abgaben der Bauern im 18. Jahrhundert, Stuttgart, 1969, p. 146-151.
30 Je renverrai ici à cinq études de cas : Friedrich-Wilhelm Henning, Bauernwirtschaft und Bauerneinkommen im Fürstbistum Paderborn im 18. Jahrhundert, Berlin, 1970 ; Walter Achilles, Die Lage der hannoverschen Landbevölkerung im späten 18. Jahrhundert, Hildesheim, 1982 ; Klaus-Joachim Lorenzen-Schmidt, « Anlivres journaux als Quelle zur Wirtschaftsgeschichte bäuerlicher Betriebe in Schleswig-Holstein », Zeitschrift der Gesellschaft für Schleswig-Holsteinische Geschichte, 109, 1984, p. 151-165 ; Rainer Beck, Unterfinning. Ländliche Welt vor dem Anbruch der Moderne, München, 1993 ; Michael Kopsidis, Marktintegration und Entwicklung der westfälischen Landwirtschaft 1770-1880, Münster, 1996.
31 Marie-Luise Hopf-Droste (éd.), Katalog ländlicher Anschreibebücher aus Nordwestdeutschland, Münster, 1982.
32 Frank Konersmann, « Agrarmodernisierung zwischen 1750 und 1850. Frühformen rationeller Landwirtschaft in der Pfalz, in Rheinhessen und am nördlichen Oberrhein », Newsletter des Arbeitskreises für Agrargeschichte, 4, 1998, p. 22-40.
33 Frank Konersmann, « Existenzbedingungen und Strategien protokapitalistischer Agrarproduzenten. Bauernkaufleute in der Pfalz und in Rheinhessen (1770-1860) », Österreichische Zeitschrift für Geschichtswissenschaften, 13, 2002, p. 62-86.
34 Frank Konersmann, « Entfaltung einer agrarischen Wachstumregion und ihre ländlichen Akteure am nördlichen Oberrhein », Zeitschrift für die Geschichte des Oberrheins, 154, 2006 (sous presse).
35 Frank Konersmann, « Bäuerliche Branntweinbrenner. Ihre Schlüsselrolle in der Agrarmodernisierung des deutschen Südwestens (1740-1870) », dans Gefion Apel, Heinrich Stüwe, Uta Halle (éd.), Technische Innovation auf dem Dorf, Bielefeld, 2006 (sous presse).
36 Frank Konersmann, « Handelspraxis von Bauern und ihre verwandtschaftlichen Netzwerke. Die mennonitischen Bauernfamilien Möllinger und Kägy in Rheinhessen (1744-1870) », dans Mark Häberlein, Markwart Herzog, Christof Jeggle (éd.), Praktiken des Handels, St. Katharinen, 2006 (sous presse).
37 Jean Vogt, « Aspects de la révolution agricole du Palatinat et de l’Alsace d’Outre-Forêt », dans Actes du 84e Congrès National des Sociétés Savantes, Dijon, 1959. Section de Géographie physique et humaine, Paris, 1960, p. 139-160, ici p. 146-150.
38 Frank Konersmann, « Rechtslage, soziale Verhältnisse und Geschäftsbeziehungen von Mennoniten in Städten und auf dem Land. Mennonitische Bauernkaufleute in der Pfalz und in Rheinhessen (18.-19. Jahrhundert) », Mannheimer Geschichtsblätter, 10, 2003, p. 83-115, ici p. 98-102.
39 Jean Vogt, art. cit. (note 37), p. 146 ; du même, « Notes agraires rhénanes : laboureurs et petites gens à la fin du xviiie siècle », Revue géographique de l’Est, 2, 1961, p. 145-149, ici p. 145.
40 Gunter Mahlerwein, Die Herren im Dorf. Bäuerliche Oberschicht und ländliche Elitenbildung in Rheinhessen, 1750-1850, Mayence, 2001, p. 187. Nous ne pouvons malheureusement pas nous étendre ici sur les différences et les points communs entre ce groupe et celui des paysans fermiers qui, selon Jean-Pierre Jessenne, formaient dans l’Artois une « fermocratie ». Sur les caractéristiques de cette « fermocratie », voir J.-P. Jessenne, art. cit. (note 11), p. 720-725. À la différence des paysans-négociants, les fermiers de l’Artois n’engraissaient pas les bestiaux (cf. ibid., p. 722 sq.).
41 Jean Vogt, art. cit. (note 37), p. 144.
42 Frank Konersmann, « Bauernkaufleute auf Produkt – und Faktormärkten. Akteure, Konstellationen und Entwicklungen in der Pfalz und in Rheinhessen (1760-1880) », Zeitschrift für Agrargeschichte und Agrarsoziologie, 52, 2004, p. 23-43, ici p. 34-39.
43 Werner Weidmann, Die pfälzische Landwirtschaft zu Beginn des 19. Jahrhunderts, Saarbrücken, 1968, p. 270 sq. ; Gunter Mahlerwein, op. cit. (note 40), p. 256 ; Frank Konersmann, « Soziogenese und Wirtschaftspraktiken einer agrarkapitalistischen Sonderformation. Mennonitische Bauernkaufleute in Offstein (1762-1855) », dans André Hollenstein, Sabine Ullmann (éd.), Nachbarn, Gemeindegenossen und die anderen. Minderheiten und Sondergruppen im Südwesten des Reiches während der Frühen Neuzeit, Epfendorf, 2004, p. 215-237, ici p. 232 sq.
44 Gunter Mahlerwein, op. cit., p. 265 sq.
45 On trouvera davantage de détails dans ma thèse d’habilitation, dont le titre de travail est le suivant : Bauernkaufleute in einer agrargewerblichen Wachstumsregion. Bedingungen, Faktoren und Akteure wirtschaftlicher Wachstumsdynamik in der Pfalz, in Rheinhessen und am nördlichen Oberrhein (1740-1880), et qui sera soutenue en 2006 à la faculté d’histoire, de philosophie et de théologie de l’université de Bielefeld.
46 En français dans le texte [N.d.T.].
47 Gunter Mahlerwein, op. cit., p. 257.
48 Je renvoie ici à ma thèse d’habilitation.
49 Frank Konersmann, art. cit. (note 38), p. 98 sq. ; du même, art. cit. (note 43), p. 229.
50 Jean Vogt, art. cit. (note 37), p. 147.
51 Ibid., p. 146.
52 Frank Konersmann, art. cit. (note 43), p. 230.
53 Ce fait est confirmé par tous ; voir par exemple W. Jacobeit, art. cit. (note 9), p. 321 sq.
54 Frank Konersmann, « Schriftgebrauch, Rechenfähigkeit, Buchführung und Schulbesuch von Bauern in der Pfalz und in Rheinhessen (1685-1830) », dans Alwin Hanschmidt, Hans-Ulrich Musolff (éd.), Elementarbildung und Berufsbildung 1450-1750, Köln/Weimar, 2005.
55 Frank Konersmann, « Studien zur Genese rationaler Lebensführung und zum Sektentypus Max Webers. Das Beispiel mennonitischer Bauernfamilien im deutschen Südwesten (1632-1850) », Zeitschrift für Soziologie, 33, 2004, p. 418-437.
56 Friedrich Casimir Medicus, « Ueber die blos praktischen Beispiele », dans Bemerkungen der kuhrpfaelzischen physikalisch-oekonomischen Gesellschaft, Lautern, 1775, p. 210-259, ici p. 215, 258 sq.
57 Gunter Mahlerwein, op. cit., p. 226 et 246.
58 Niels Grüne, « Vom innerdörflischen Konflikt zum “modernen” antiobrigkeitlichen Gemeindeprotest. Ergebnisse und Perspektiven einer Mikrostudie zum Wandel der lokalgesellschaftlichen Grundlagen kommunalpolitischen Handelns am unteren Neckar (ca. 1770-1830) », Zeitschrift für die Geschichte des Oberrheins, 151, 2003, p. 341-383.
59 Gunter Mahlerwein, op. cit., p. 149-152.
60 Frank Konersmann, art. cit. (note 42), passim.
61 Frank Konersmann, art. cit. (note 34), passim.
62 Gunter Mahlerwein, op. cit., p. 245 sq.
63 Des observations comparables ont été faites, en ce qui concerne l’Allemagne du Nord, par J. Schlumbohm (op. cit. [note 26], p. 615-620) et J. Mooser (op. cit. [note 13], p. 272-280 et 350-355).
64 Pour le cas de la Westphalie, voir Josef Mooser, « Familen, Heirat und Berufswahl. Zur Verfassung der ländlichen Gesellschaft im 19. Jahrhundert », dans Heinz Reif (éd.), Die Familie in der Geschichte, Göttingen, 1982, p. 137-162, ici p. 146.
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