A. Les alliances matrimoniales des grandes maisons

1Si nous prenons les chefs des sept familles considérées comme les plus anciennes et les plus honorables, nous constatons que tous sauf un (François Dupouey, qui n’apparaît pas sur le schéma) sont unis, au moins deux par deux, par des alliances matrimoniales, et que Sébastien Cazajous a, pour sa part, des relations de cousinage avec quatre autres caps de case (chefs de maison). Tous sont aînés, héritiers et (à part Jacques Barrère, malade) tous ont été conseillers.

• Jacques Barrère-Laurent Cazalet : cousins germains.

• Jacques Barrère-Sébastien Cazajous : cousins issus de germains.

• Laurent Cazalet-Jean-Baptiste Bernède : cousins issus de germains.

• Laurent Cazalet-Sébastien Cazajous : cousins plus éloignés.

• Sébastien Cazajous-Pierre Domingue : cousins germains.

• Sébastien Cazajous-Jean-Baptiste Bernède : cousins issus de germains.

• Pierre Domingue-héritière Lapuyade : cousins issus de germains.

B. Les grandes maisons et leur clientèle

2Chacune des grandes maisons apparaissant au schéma A entretient ou a entretenu, d’après la mémoire collective, des relations matrimoniales avec une ou des familles souches agricoles de moindre prestige ; celles-ci peuvent être alliées à une ou plusieurs grandes maisons. Des liens de clientèle sont ainsi créés. Sous les noms des grandes maisons figurant au schéma A, on a noté entre parenthèses le nom de la – ou des – familles cliente(s) sous celui de la grande maison. Plusieurs cas attestés montrent que l’alliance se fait souvent entre des cadettes des grandes maisons, non héritières donc, et l’héritier d’une famille de moindre prestige.

• Les Domingue sont alliés aux Cami-Debat par les cousins germains de la souche actuellement présente à Labarthe. Cette mésalliance des Domingue est due à la fugue d’une fille de la famille « avec quelqu’un qui n’était pas de leur rang » mais elle est maintenant consacrée par la descendance.

• L’alliance des Lapuyade et des Bonnecaze représente un cas intéressant de stratégie matrimoniale. Les Lapuyade sont une des trois souches inscrites au censier de Gaston Phébus mais, à la différence des deux autres familles dans ce cas, ils n’ont pas réussi à monter au bourg ni à acquérir un patrimoine foncier qui les classerait actuellement parmi les premières exploitations. Aussi, bien qu’honorés pour leur ancienneté et alliés aux autres grandes maisons, ils font figure de noblesse déchue et, dit-on, sont très jaloux des gros du bourg dont ils copient les modes de vie et les achats.

3Les Bonnecaze, de leur côté, appartiennent à une famille ancienne, d’origine non datée mais dont le nom même est récent : il date de deux générations, lorsque l’héritière, qui n’était pas fille de la maison mais était venue en tant que nièce faire héritière à la ferme-café Peyrot, épousa Louis Bonnecaze. Celui-ci venait d’un autre village du canton et s’installa donc chez Peyrot en tant que gendre, en fait mari de la nièce faite héritière. Ils eurent deux fils. Le cadet s’exila à Pau, ce qui entraîna, « normalement », la disparition actuelle de cette branche cadette du territoire communal. En revanche, Justin, l’aîné, reprit la maison et le café, épousa Phanie, venue elle aussi d’un village voisin, et leurs deux fils sont toujours à Labarthe. Cas extrêmement rare, l’aîné, Firmin, s’est marié et s’en est allé faire gendre chez une autre héritière, fille unique des Lapuyade, dont l’exploitation était supérieure à la sienne. Le cadet, André, que nous connaissons bien, se trouve de ce fait héritier de la petite ferme et du café paternels où il vit avec sa mère maintenant veuve. La maison Bonnecaze chapeaute ainsi deux exploitations et un commerce ; de plus, son alliance avec une souche remontant au xiv^e s. accroît son prestige. Les alliances heureuses ont continué puisque l’aîné de Jean a épousé une héritière d’un village voisin.

• L’aïeule encore vivante des Lapuyade vient de chez Cami-Debat (comme fille cadette mariée à l’héritier Lapuyade).

• Bernède : deux alliances connues avec les Cazabonne.

• Sébastien Cazajous est cousin des Bonnecaze (la grand-mère de Sébastien était la tante de la belle-mère de Phanie Bonnecaze).

• Les Cazalet sont alliés aux Mesplède, famille de très petits exploitants mais très ancienne et alliée elle-même à plusieurs maires, dont Sébastien.

• Alliance des Cazalet avec les Cami-Debat : un frère du père de l’actuel héritier avait épousé la sœur de madame Cazalet.

• Les Dupouey, pour lesquels nous ne connaissons pas d’alliance avec les autres grandes maisons sont alliés avec plusieurs souches de second ordre. Le cap de case actuel est, entre autres, cousin issu de germain avec le chef de la maison Cazalis et avec les Campistrou.

C. Autres liens

4Sans prétendre à l’exhaustivité, on peut faire apparaître un certain nombre de liens matrimoniaux qui mettent en relation des souches agricoles secondaires avec des souches agricoles mineures ou non agricoles ; celles-ci se trouvent ainsi indirectement impliquées dans des relations avec les grandes maisons, selon des réseaux qui vraisemblablement intègrent la totalité de la population ancienne. À titre d’exemple, nous avons essayé de décrire les réseaux d’alliance des Cazabonne ; d’abord parce que par l’intermédiaire des Bernède ils sont liés à Sébastien ; ensuite parce que, très anciens et nombreux, ils forment une tribu (selon la dénomination locale) dont plusieurs membres, à titre d’acteurs secondaires, nous sont apparus comme importants dans l’analyse du pouvoir local.

D. Conséquences électorales pour Sébastien

5En rassemblant ici les données des trois précédents schémas et en admettant que le lien consanguin et l’alliance parentale entraînent une option électorale positive, nous avons essayé de dénombrer les voix a priori acquises à Sébastien. Nous y avons adjoint celles qui découlent du lien de voisinage. Nous avons inclus dans les voix des familles celles des enfants majeurs vivant à l’extérieur de Labarthe mais dont la plupart continuent à voter à Labarthe.

1) Voix des grandes maisons : 30 voix, se décomposant ainsi :

2) Voix de la clientèle par alliance : 28 voix, se décomposant ainsi :

6Si nous ajoutons, en ce qui concerne uniquement le réseau Cazabonne, les familles impliquées dans des réseaux secondaires à partir des grandes maisons, on obtient :

7Soit en tout 66 personnes.

8Au total, pour les seuls réseaux que nous avons observés, c’est 124 voix que les alliances matrimoniales et de voisinage apportaient a priori à Sébastien.