Une approche sociologique du corps
p. 21-22
Texte intégral
1PROPOSER QUELQUES CLARIFICATIONS d’ordre conceptuel pour délimiter l’objet de cette recherche et montrer sa légitimité scientifique, tel est l’objectif du premier chapitre.
2Par la suite, nous allons reconstituer l’enjeu de la construction sociale du corps en traçant les grands axes de son histoire contemporaine, une histoire conçue comme processus. Ce deuxième chapitre vise donc à mettre en relief la valeur explicative de l’approche historique, tout en soulignant que le passage du temps n’est pas équivalent au changement, et encore moins à une approche évolutionniste du corps. Cette remise en cause des illusions évolutionnistes cherche à démolir l’inclination à faire équivaloir la supériorité des techniques corporelles contemporaines à la supériorité morale du sujet qui les met en œuvre.
3Au-delà de cette mise en perspective, démontrer que l’histoire du corps ne ressemble pas forcement à un modèle de l’évolution de l’espèce revient à établir les éléments historiques et contextuels qui marquent le début d’une séquence de modifications, puis à tracer cette séquence en tant que processus de transmutations institutionnelles (A. Giddens, 1987). Dans ce cadre, l’étude du changement social en matière de corporéité se situe dans le temps institutionnel.
4Cette approche, plutôt structurelle du corps, n’exclut pas les analyses qui intègrent les explications des pratiques somatiques renvoyant aux logiques et aux ressources des individus qui les mettent en place ainsi qu’aux relations que ces individus entretiennent entre eux. Autrement dit, en matière de corporéité « le structurel ne détermine pas plus l’action que l’action ne détermine le structurel (…) La sociologie structurelle et l’individualisme méthodologique ne forment pas une alternative et, par conséquent, l’acceptation de l’un n’entraîne d’aucune façon le rejet de l’autre » (A. Giddens, 1987 : 279-280). En accord avec cette posture épistémologique, dans le troisième chapitre nous nous efforcerons de délimiter le cadrage théorique de cette recherche en montrant que pratiques corporelles et propriétés structurelles (dont font partie les statuts sociaux) entretiennent un rapport dialectique.
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Emmanuelle Santelli
2001