Le système éducatif
| ,Cinquième partie. Récapitulatif programmatique (prospective citoyenne et institutionnelle)
Chapitre XV. Quel enseignement de la morale laïque et citoyenne ?
Texte intégral
- 1 Loi d’orientation du 8 juillet 2013.
1La loi d’orientation pour l’Éducation nationale1 met en place un enseignement de la morale laïque et citoyenne. Dans une première partie, sera établi le bilan socioéducatif sur lequel se fonde cette programmation. La démonstration portera ensuite sur l’intérêt de compléter cet enseignement dans les domaines de l’environnement, des médias et de l’interculturel. Enfin, au-delà d’un enseignement, n’est-ce pas d’éducation à une citoyenneté de l’altérité dont il pourrait s’agir, qui nécessite, ce faisant, l’élaboration d’une méthodologie d’ordre anthropologique ?
Programmation de l’enseignement de la morale laïque et citoyenne
2Sur la base du constat des déficits socio-éducatifs, Vincent Peillon a engagé son ministère dans la mise en place de ce nouvel enseignement. Spécialiste de Ferdinand Buisson et des penseurs républicains du xixe siècle, ce philosophe met ainsi ses pas dans ceux des pères fondateurs de l’école. L’Union européenne a fait également de l’éducation à la citoyenneté le grand défi du xxie siècle. La présentation de cet enseignement (en avril 2013) est intervenue au moment du débat sur la moralisation de la vie politique après l’affaire du compte suisse de l’ex-ministre du Budget, Jérôme Cahuzac. Ce sujet prend donc un relief tout particulier au moment où l’éthique d’une partie du personnel politique est mise en doute.
- 2 Peillon, 2013, p. 37.
Une éducation morale n’est pas un dressage. Elle est au contraire une réflexion sur le sens de l’existence, les grandes valeurs humaines… la possibilité d’interroger tous les pouvoirs au nom de la seule valeur imprescriptible qu’est la liberté et la dignité de la personne humaine2.
- 3 Loi d’orientation du 8 juillet, 2013, p. 7.
- 4 Bergougnioux, Loeffel et Schwartz, 2013, p. 7.
- 5 Bergougnioux, Loeffel et Schwartz, 2013, p. 24.
- 6 Bergougnioux, Loeffel et Schwartz, 2013, p. 28.
3Le rapport sur cette question commandé à trois spécialistes des questions éducatives, Alain Bergougnioux, Laurence Loeffel et Rémy Schwartz insiste sur « le fort consensus autour d’un besoin de morale3 » exprimé par les familles comme par les enseignants et les représentants de la vie scolaire auditionnés. Il s’agit de réinstituer une morale commune et fédératrice de manière à construire « une école inclusive en guerre contre toutes les discriminations4 ». Cet objectif nécessite de dépasser les termes d’une morale « minimale » (axée sur le respect des lois civiques, objets d’une contrainte extérieure) et « négative », celle-ci étant invoquée pour la résolution des conflits et des situations de crise. À la différence de l’esprit de discipline qui régit les sociétés traditionnelles, l’école doit instituer une « culture de la responsabilité5 » qui sollicite les ressources à la fois psychoaffectives, comportementales et cognitives des publics. Dans cette perspective, les valeurs à transmettre, « la dignité, la liberté, l’égalité, la solidarité, la laïcité, l’esprit de justice, le respect et l’absence de toutes formes de discriminations6 », inspirées de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen (1789) participent d’un humanisme moderne.
- 7 Peillon, 2013.
La laïcité introduit […] une hiérarchisation des valeurs, puisqu’elle conduit à placer le bien commun, l’égalité des droits et le respect de la personne au-dessus des coutumes et des traditions de quelque nature qu’elles soient […]. L’enseignement de la morale laïque doit veiller à ne blesser aucune conscience tout en transmettant des valeurs communes à tous les enfants, quelles que soient, par ailleurs, leurs croyances religieuses7.
4La progressivité des enseignements sera le gage de la construction méthodique de savoirs en la matière : ainsi, à l’école maternelle et primaire, il s’agit de dépasser les démarches de socialisation et de l’apprentissage des règles minimales par une reconfiguration pédagogique appropriée (qui complète le recours aux adages, par exemple). Au collège, un horaire spécifique sera alloué, l’objectif étant de fonder en raison et d’élucider les intuitions morales des élèves, à partir d’études de cas, de dilemmes moraux, de conversations philosophiques, de jeux de rôles… Au lycée, qui connaît déjà l’enseignement de l’ECJS en cours d’histoire-géographie, la problématisation éthique d’éléments mis aux programmes pourra être effectuée dans le cadre de modules interdisciplinaires, à l’image des TPE (travaux personnels encadrés) ou des itinéraires de découverte en collège par exemple.
5La vie scolaire sera particulièrement sollicitée dans la mesure où il y a là une occasion de revitaliser ce secteur, trop déconnecté des activités en classe. L’implication des CPE (conseillers principaux d’éducation) et des chefs d’établissement pourrait pallier au manque de réalisation concrète en matière de projet d’établissement.
6Comme les autres enseignements, celui de la morale laïque et citoyenne sera évalué, condition de sa reconnaissance par le plus grand nombre. Sont requises à la fois des compétences cognitives (en matière de savoirs notionnels) et comportementales (en matière de savoirs-être, de capacité à l’action citoyenne). La mise en œuvre d’une compétence coopérative au sein de la communauté scolaire sous des formes diverses – participation à la vie de l’établissement, engagement sous une forme ou une autre… – constitue une innovation notable. L’évaluation aux examens se fera sous la forme du contrôle continu, au brevet et au baccalauréat.
7Les ESPE constituent le foyer naturel de la formation à ce nouvel enseignement, qui sera opérationnel à la rentrée 2015.
Il importe de prendre des décisions fortes tant en matière de formation initiale que de formation continue, et ce pour toutes les catégories d’enseignants et d’éducateurs dans la mesure où la formation morale des élèves ne peut être qu’un projet collectif.
- 8 Loi d’orientation du 8 juillet, 2013, p. 41.
La création des nouvelles écoles supérieures du professorat et de l’éducation en est l’occasion. Leur responsabilité doit être clairement affirmée pour rendre tous les professeurs et tous les éducateurs conscients que l’Éducation nationale est cimentée par des valeurs sur lesquelles elle se fonde continûment pour leur permettre de les transmettre, de les faire respecter et de les faire partager8.
8Dans le prolongement des travaux du Conseil supérieur des programmes, deux modules obligatoires de formation sont mises en place, qui concernent l’un l’enseignement moral proprement dit et l’autre la laïcité et les valeurs de la République. Les conditions semblent ainsi globalement réunies pour que la nation donne à ses personnels les moyens d’une transmission et qu’inversement l’école puisse contribuer à refonder la République, sous l’angle de l’exercice démocratique.
9Cette élaboration coordonnée à plusieurs étages est un gage de solidité de l’édifice en construction, de cohérence des enseignements et de cohésion corporative, par un travail en interdisciplinarité entre autres. Une avancée programmatique à signaler, l’insistance mise à traiter la question de l’égalité entre filles et garçons. Le rappel d’une laïcité respectueuse de toutes les convictions dans le cadre d’un État et d’une école neutres pourra être fait utilement auprès des médias qui agitent périodiquement le chiffon rouge de « la montée des communautarismes » ; ce phénomène ne résulte-t-il pas d’abord de logiques d’exclusion voire de stigmatisation, de la part de tenants d’une « laïcité fermée » ?
- 9 Des pistes pédagogiques relatives à la question médiatique sont proposées dans le chapitre x, « Ax (...)
- 10 Le débat public, avec les syndicats notamment, a surtout porté sur les modalités : horaires et dis (...)
10Des oublis étonnants sont à signaler, avec l’absence de trois problématiques importantes, d’ordre environnemental, médiatique9 et (inter) culturel. Comme programmé par le ministre et en l’absence d’un débat épistémologique suffisant au sein de la communauté éducative10, la conception de cet enseignement en reste clairement à l’héritage de la philosophie des Lumières et de la laïcité. Cet héritage légitime en soi se cantonne à des formes d’universalisme abstrait dans la mesure où il est décontextualisé et où il ne prend pas suffisamment en compte des phénomènes importants de construction sociétale et juvénile. Ce programme d’éducation citoyenne pourra-t-il être sujet à pleine réalisation avec de telles limitations ?
11Pour exemple, on peut s’interroger sur l’absence de prise en compte des valeurs liées aux droits et devoirs écologiques : depuis 2004, la charte de l’environnement place les principes de sauvegarde de notre environnement au même niveau que les Droits de l’homme et du citoyen de 1789 et que les droits économiques et sociaux du préambule de 1946. En outre, l’article 8 précise que l’éducation et la formation à l’environnement doivent contribuer à l’exercice des droits et des devoirs définis par la présente charte. Comment en 2013 évoquer l’intérêt général sans y inclure la dimension environnementale, compte tenu de l’importance des enjeux écologiques actuels ? Comment évoquer les valeurs de la République sans y intégrer les valeurs de l’éducation à l’environnement et au développement durable ?
Paramètres émancipateurs
Sexualité, spiritualité, socialité : quelle harmonisation ?
- 11 Bergougnioux, 2013.
12Cette problématique fondamentale à laquelle se confrontent les jeunes est étonnamment absente du rapport. Ainsi, la libération des mœurs dont les médias et la loi se font l’écho régulièrement nécessite un traitement spécifique qui dépasse la composante biologique étudiée en cours de SVT ou les abstractions du cours de philosophie en terminale. Comment gérer les relations sexuées, l’inconscient qui prime à l’exercice du désir et de l’affectivité amoureuse, son orientation sexuelle ? Le rapport11 semble envisager la personnalité juvénile en construction sous l’angle d’une conscience médiane, purement rationnelle et éloignée des extrêmes ; faudrait-il laisser en jachère la gestion de l’inconscient, en proie qu’il est pourtant à l’instrumentalisation des stratégies de marketing et de communication médiatisées ?
- 12 Stiegler, 2009.
13La même question se pose concernant le statut à attribuer à la vie spirituelle, objet d’enseignement tout aussi légitime, manifestation cette fois-ci d’un sur-moi sublimateur et en recherche de sacralité. Faut-il l’évacuer des programmes au nom d’un amalgame réducteur, de type laïciste, entre religion et spiritualité ? Comment répondre alors à la volonté d’expérimentation des publics qui côtoient l’univers des religions et philosophies (christianisme, Islam, bouddhisme…) et parfois le monde sectaire au travers de formes culturelles et musicales dégradées (rock satanique…) ? Confrontée à la radicalisation de certains médias dans le contexte d’une société souvent pathogène12, leur interrogation métaphysique sur les contours et limites du bien et du mal doit pouvoir donner lieu à des réponses appropriées.
14D’une manière générale, l’absence de ces deux problématiques procède probablement de l’absence des SHS dans l’enseignement secondaire ; pour autant, les catégories psycho-sociales précitées font partie de corpus académiques parfaitement stabilisés. Une programmation actualisée dans le secondaire doit pouvoir situer et inscrire le processus de socialisation au carrefour de ces deux expériences existentielles que constituent sexualité et spiritualité.
Diversité et interculturel des paramètres fédérateurs dans le contexte de la mondialisation
15Le référentiel des compétences professionnelles du métier du professorat et de l’éducation offre la perspective de développements en matière de diversité et d’interculturel, notions jusque-là controversées ou minorées dans l’espace institutionnel.
Article 4 : Prendre en compte la diversité des élèves, adapter son enseignement et son action éducative à la diversité des élèves.
- 13 MEN, 1er juillet 2013.
Article 8 : […] Participer au développement d’une compétence interculturelle chez les élèves13.
16Cette évolution s’explique par la référence au « cadre européen commun de référence pour les langues ». Ce principe validé pour l’apprentissage d’une langue étrangère peut être tout aussi valable pour d’autres ; il serait intéressant de poursuivre le débat pour son ampliation, notamment dans le cadre de l’enseignement de la morale laïque et citoyenne.
- 14 Abdallah-Pretceille, 2004.
17La transmission des valeurs républicaines et d’une manière générale du patrimoine national doit être conjuguée à une démarche d’ouverture aux autres cultures, condition d’une dynamique salutaire et de leur pérennisation. Ainsi, l’adaptation de l’école à la mondialisation nécessite d’apporter des réponses aux questionnements d’ordre anthropologique des publics : concernant les relations à entretenir entre pays de l’Union européenne, du Nord et du Sud, avec l’Islam, la chrétienté et la laïcité, avec la francophonie, l’anglophonie et la culture people, entre les cultures de genre, entre les générations14… Une démarche interculturelle pacifiée présente aussi l’intérêt de réguler des violences internes à certaines communautés, notamment concernant le statut des femmes.
- 15 http://www.iesr.ephe.sorbonne.fr/ Composante de l’École pratique des hautes études, l’Institut eur (...)
- 16 Voir le projet d’une « Société éducatrice décentralisée ». www.pacte-educatif.org
- 17 Le projet d’une francophonie ouverte, défendu par Dominique Wolton du CNRS, contribuerait à réduir (...)
18Enfin, face à la déferlante des marchés et des médias, seuls les patrimoines civilisationnels, ancrés dans des langues-cultures, des religions et sur des territoires, sont en capacité de sauvegarder et d’adapter les repères et valeurs constitutifs d’une société. Dans cette optique, la démarche de laïcité ouverte préconisée par le rapport de Régis Debray15 consiste à intégrer les faits cultuels comme des faits de culture à vocation universelle. L’île de La Réunion présente un exemple réussi de cohabitation inter-religieuse, à la base d’un dialogue précurseur dans ce domaine. La pédagogie de la décentralisation territoriale16 permet aux publics de construire des repères de proximité et des liens concrets avec l’environnement et l’entourage socio-culturel immédiat. Les déclinaisons de l’éducation à l’interculturel sont en fait multiples : promotion des langues-cultures des régions historiques et des DOM-TOM, défendues par les Conseils régionaux depuis la loi de décentralisation de 1982, éducation à la parité et au développement durable, à une francophonie des peuples et de progrès17, à une authentique coopération européenne et Nord-Sud ainsi qu’à la solidarité internationale…
19En conclusion, le dialogue des cultures sous ses différents aspects s’avère une condition de la dynamisation de la vie scolaire et universitaire, un paramètre pour éduquer à une citoyenneté ouverte, complexe et évolutive ce faisant. À rebours des individualismes, des corporatismes, des communautarismes et des nationalismes, il s’agit de pratiquer « l’unité dans la diversité », pour reprendre la devise européenne. Ainsi, pourront se reconstituer par le haut une citoyenneté et une culture commune, fruits d’une identité nationale plurielle, en écho au concert mondialisé des nations et nationalités. Le sociologue Alain Touraine y voit l’aboutissement d’une troisième étape paradigmatique :
- 18 Touraine, 2005, p. 337.
Historiquement, le sujet moderne s’est incarné d’abord dans l’idée de citoyenneté, qui a imposé le respect des droits politiques universels par-delà toutes les appartenances communautaires. […] Pendant la période dominée par le paradigme social, c’est la lutte pour les droits sociaux et en particulier pour les droits des travailleurs, qui a été au centre de la vie sociale et politique. Aujourd’hui, l’installation du paradigme culturel met au premier plan la revendication de droits culturels. De tels droits s’expriment toujours par la défense d’attributs particuliers mais ils confèrent à cette défense un sens universel18.
L’éducation à une citoyenneté de l’altérité
20Dans la perspective du redressement matériel, intellectuel et moral de la France, le ministre Vincent Peillon invoque le concept de « laïcité intérieure » cher à Claude Nicollet et à Jean Baubérot, spécialistes du champ. Faire acquérir cette disposition intérieure à la liberté philosophique nécessite d’éduquer les publics à une décentration volontaire à l’égard des egos comme des instances de pouvoir et de consommation. Pour ce faire, l’exercice méthodique de l’intersubjectivité collective (entre cultures) contribue utilement à celui qui est préconisé dans le rapport ministériel à l’échelle interindividuelle, par exemple sous la forme des jeux de rôles. Le jeu des dynamiques dialogiques à deux ou plusieurs degrés est à même de contrer plus efficacement les stéréotypies ainsi que les systèmes de domination et de victimisation, tels qu’intériorisés par les publics. La socialisation de ceux-ci doit pouvoir être redéfinie sous l’angle d’un processus d’inter-individuation : de ce fait, du statut d’objets et d’agents soumis à des déterminismes et à des rôles psycho-sociaux, il est possible d’accéder à celui de sujets et d’acteurs conscients des possibles socio-éducatifs et existentiels. Ces démarches de transformation réciproque et en miroir permettent de s’émanciper des mimétismes et d’accéder in fine à des stratégies créatrices :
- 19 Touraine, 2007.
C’est l’ouverture sur l’autre qui élève l’individu vers le sujet […] Cette montée de l’individu vers lui-même en tant que sujet ne peut s’effectuer que par la reconnaissance de l’autre comme sujet […]. Reconnaître l’autre comme sujet, c’est reconnaître la capacité universelle de tous de se créer comme sujets19.
- 20 Levinas, 1995.
21Pour conclure, l’éducation à l’interculturel et à une citoyenneté de l’altérité20 est la pierre angulaire de l’édifice de la reconstruction d’une conscience morale, d’une créativité citoyenne adaptées à la période, assorties d’une promotion des droits humains. Etant donné sa complexité et ses nombreuses déclinaisons, il s’agit d’élaborer une didactique progressive et correspondant au degré d’intellectualité et de maturité des publics, aux différents cycles d’enseignement.
Degrés d’appartenance culturelle (ou sub-cultures)
- 21 Abdallah-Pretceille, 1999, p. 13.
Susceptible d’évolution permanente en fonction de l’histoire collective et individuelle, multiréférentielle et à « géométrie variable », l’identité se pense désormais en termes de pluralité, de complexité, de négociation et de stratégie. La possibilité ou l’obligation d’appartenir, simultanément et/ou chronologiquement à plusieurs subcultures (cultures régionales, professionnelles, sexuelles, générationnelles, religieuses, etc.) est un acquis de la démocratisation des sociétés. C’est aussi une reconnaissance de l’individu comme sujet, comme acteur21.
- 22 Abdallah-Pretceille, 1999, p. 15.
L’abandon d’une conception monolithique de l’identité au profit d’une identité plurielle contribue à définir l’individu à partir d’un réseau relationnel et des situations22.
Cultures et sub-cultures
- 23 Les « subcultures » sont à différencier des « sous-cultures » qui s’avèrent des formes inférieures (...)
22Quelles sont ces cultures et sub-cultures que la mondialisation médiatise et met en musique actuellement ? Les différents aspects identitaires23 de l’humaine condition, répercutés à l’échelle individuelle, sont les objets de référence des principales sciences humaines et sociales, auxquelles s’ajoutent les sciences du vivant : aspects écologique (ruraux/urbains, régions/capitale, chasseurs/écologistes), ethno-culturel (régions/capitale, Sud/Nord, immigrés/nationaux), psycho-sexué et générique (femmes/hommes, féminin/masculin…), générationnel (aînés/jeunes, parents/enfants…), socio-économique (peuple/bourgeoisie, pauvres/riches, peuples/élites, Tiers-Monde/Occident…), disciplinaire (religions, lettres et philosophie/sciences de la nature, sciences humaines et sociales/sciences de la matière et de la vie) et au-delà professionnel, sanitaire ou médical (handicapés et malades/bien portants…).
23Dans l’« envers de la médaille », la HALDE a recensé les discriminations dont pâtissent certains citoyens et groupes de citoyens, victimes de différents rapports de domination et de déterminismes sociaux, ces faits étant passibles de sanctions pénales :
- 24 HALDE, 2007.
Les discriminations prohibées par la loi portent notamment sur l’origine, le sexe, la situation de famille, la grossesse, l’apparence physique, le patronyme, l’état de santé, le handicap, les caractéristiques génétiques, les mœurs, l’orientation sexuelle, l’âge, les opinions politiques, les convictions religieuses, les activités syndicales, l’appartenance ou la non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une « race24 ».
24La charte de la diversité en entreprise élargit le panel des critères de discriminations prohibées :
- 25 HALDE, 2007.
l’origine, le sexe, les mœurs, l’orientation sexuelle, l’appartenance ou la non appartenance, vraie ou supposée à une ethnie, une nation ou une race, les opinions politiques, les activités syndicales ou mutualistes, les convictions religieuses, l’apparence physique, le patronyme, l’état de santé, le handicap, l’état de grossesse, l’âge, la situation de famille, les caractéristiques génétiques, l’identité sexuelle25.
25Outre les sanctions pénales, la lutte contre les discriminations est conditionnée à une positivation (ou neutralisation selon le cas) des différences objectives enregistrées entre citoyens. Les critères principaux de différenciation peuvent ainsi faire l’objet d’une éducation à une « citoyenneté de la diversité », comme le résume le tableau ci-après. Aux différents degrés (ou cercles) d’appartenance sociétale, l’identification des couples de dominés et de dominants donne lieu à une caractérisation des dérives à éviter et inversement des démarches citoyennes souhaitables. L’ensemble constitue pour chaque aspect identitaire une forme de « sub-culture citoyenne ».
Tableau 19 – Degrés (ou cercles) d’appartenance culturelle/sub-cultures
IDENTITÉ/ APPARTENANCE (par couples dominés/dominants) |
ÉTHIQUE CITOYENNE DE LA DIVERSITÉ (-) vs (+) |
|
1. écologique (environnement) |
ruraux/urbains |
écologie vs pollution |
2. ethno-culturel (origine) |
Sud/Nord |
racisme/xénophobie vs diversité/interculturalité sexisme vs parité |
3. générique (sexe) |
femmes/hommes |
machisme/misogynie/ androcentrisme vs féminisme |
4. générationnel (âge) |
aînés/jeunes |
agisme/jeunisme (conflit de générations) vs respect des aînés et des droits de l’enfant |
5. sexuel (orientation sexuelle) |
minorités sexuelles/ hétérosexualité |
homophobie vs intégration des minorités sexuelles/égalité des droits exclusion vs intégration |
6. socio-économique (situation) -> socio-culture |
peuple/bourgeoisie pauvres/riches peuples/élites |
(tiers-mondisme) |
7. disciplinaire/ cognitif et professionnel |
lettres et sciences humaines et sociales/sciences de la matière, de la vie et de l’information |
« conscientisme »/ technoscientisme humanisme/positivisme |
8. sanitaire/ médical (état de santé, génétique) |
handicapés et malades/bien portants |
exclusion vs intégration |
9. esthétique (apparence physique) |
laids/beaux, gros, moches/minces, sexy |
dictature du look et de la séduction vs convivialité |
Martine Boudet
26L’intérêt de la classification des aspects sub-culturels de la citoyenneté est double : gérer sa multidimensionnalité – son unité étant constituée de la combinaison de multiples options identitaires ou d’appartenance –, mettre à jour les analogies existant entre les degrés sub-culturels, plus exactement entre les couples d’opposés ou de complémentaires qui en sont la « substance » anthropologique. Cette démarche permet d’approfondir l’expérience intersubjective, à travers par exemple l’opposition/complémentarité générique féminin/masculin intériorisée par chaque individu, quel que soit son sexe biologique. Cette démarche permet d’accompagner par exemple les recherches occidentales sur la question des orientations sexuelles et de contrer sur le terrain scientifique l’homophobie…
27Le principe qui oriente la dialectique interculturelle selon une dynamique double, à la fois conflictuelle et dialogique, est éthique : il s’agit de dépasser les logiques réciproques de domination et de dépendance inhérentes à chaque degré sub-culturel, fondées souvent sur les dérives d’une organisation hiérarchique traditionnelle. Ainsi, l’analogie établie entre les couples de dominants/dominés favorise un humanisme transpersonnel, de par la corrélation des pôles positifs des forces en présence. Notons que les déviances qui portent atteinte à l’intégrité ont souvent donné lieu à des contre-idéologies ou corps constitués d’idées, sources de régression : racisme/ethnocentrisme (composante ethno-culturelle), agisme/jeunisme (composante générationnelle), sexisme/machisme/androcentrisme (composante générique), scientisme/positivisme (composante cognitive/disciplinaire)… À l’inverse, il existe assez peu de termes désignant des stratégies de dialogue ou de création sub-culturelle : écologisme, féminisme, tiers-mondisme ; ce sont souvent des termes généraux : humanisme ou des termes se référant à des idéologies réactionnelles, antiracisme.
28D’une manière générale, la dialectique interculturelle contribue à combattre le relativisme néo-libéral par la distanciation à l’égard de contre-modèles comportementaux et par l’identification à des types opposés ; le sujet est amené à prendre conscience des polarités positives et négatives des différents degrés sub-culturels, et à se positionner par rapport aux problématiques de la domination et de la dépendance ainsi que de leur revers, l’émancipation et la solidarité. Par la systématisation de la réflexion analogique et comparatiste, l’éducation à une citoyenneté de la diversité conduit à l’élaboration d’une pensée de la complexité, adaptée aux enjeux de la modernité mondialisée et médiatisée.
Les cultures de genre
29S’il est vrai qu’il existe une analogie structurelle entre les différents couples de complémentaires, l’opposition principale est la différence sexuée. L’histoire de l’humanité a été marquée par la prégnance du système patriarcal ; de l’émancipation féminine et de la mise à parité des relations homme-femme, dépend l’évolution de tous les autres types de relations humaines :
- 26 Agacinski, 2001, p. 50.
La différence sexuelle est universelle, elle est essentielle à l’espèce et au-delà aux espèces dont nous dérivons, elle transcende radicalement les différents types humains26.
- 27 Agacinski, 2001, p. 35.
Le sexe n’est pas un trait social ou culturel et pas davantage ethnique, il n’est pas la caractéristique commune de quelque « communauté » mais il est un trait différentiel universel, c’est-à-dire que le genre humain n’existe pas hors de cette double norme, masculine et féminine27.
- 28 Agacinski, 2001, p. 51.
C’est pourquoi c’est toujours la différence de sexe qui sert de modèle à toutes les autres et la hiérarchie mâle/femelle qui est prise comme métaphore de toutes les hiérarchies interethniques28.
30La différence sexuée a-t-elle une origine naturelle et/ou culturelle ? Telle est l’une des problématiques des théories du genre, issues des travaux nord-américains, entre autres ceux de Judith Bentler. Cette problématique est redoublée dans le cadre des débats sur l’intégration et les droits des homosexuels. Concernant l’orientation sexuelle comme pour le genre, le clivage est grand entre les tenants de l’innéité, souvent liés aux traditions cosmogoniques, religieuses et populaires, et ceux qui se réfèrent d’abord aux acquisitions socio-éducatives.
- 29 Héritier, 2002.
31La théorie du genre permet de scruter les hiérarchisations entre femmes et hommes et entre masculin et féminin, de comprendre comment les catégories sexuelles se sont construites, toujours associées à une hiérarchisation qui privilégie les hommes et le masculin. Cela conduit à décrire le système de pouvoir qui est attenant aux catégories de sexe ; c’est ce que montrent les travaux de Françoise Héritier29 : comment, à partir d’une observation des différences, s’est élaboré un système de hiérarchisation au détriment du féminin, dont nombre de traces sont encore perceptibles.
32Comme l’a montré l’actualité controversée des ABCD de l’égalité (document pédagogique), la dérive de ce relativisme culturel réside dans son anti-essentialisme relativiste : au nom du combat à l’encontre des stéréotypes de genre, qui conditionnent les situations de domination ou de sujétion, les identités sexuées risquent d’être niées, au profit du concept d’appartenances, construites et négociées au cours de l’existence. Le différentialisme partiel postule de son côté une position d’équilibre, fondée sur la prise en compte et des données biologiques et des constructions sociétales, qu’elles soient en positif ou en négatif.
- 30 Agacinski, 2012, p. 15.
L’histoire des sociétés et des cultures humaines ne s’explique pas par des propriétés biologiques, mais elle ne flotte pas non plus simplement au-dessus d’elles comme si les corps humains n’étaient pas aussi des corps vivants. L’acharnement que certains mettent à vouloir exclure a priori toute relation entre la vie et la culture relève d’un obscurantisme, d’inspiration théologique, qui place l’homme en dehors et au-dessus de la nature, et la culture dans une position quasi transcendantale30.
33Le travail sur le genre nécessite le dialogue des disciplines ; le croisement des disciplines donne la possibilité de mieux comprendre l’ensemble du système qui codifie et normalise les rapports de genre. Le dialogue entre les sciences dures et les sciences humaines et sociales porte sur les questions de détermination de sexe et de construction du genre. Le courant précité, très discuté par les spécialistes des sciences de l’éducation ou dans les sciences sociales, n’a pas trouvé autant d’écho chez les chercheurs en neurobiologie, en génétique ou en psychologie cognitive. Les recherches dans ces domaines sont en cours, leurs conclusions tendant pour certaines à présenter des observations opposées à celles de la théorie du genre et soulignant les différences dues à l’action des gènes, des hormones, voire à une organisation neuronale sexuée. Dans ce contexte, l’introduction peut-être prématurée de ce concept dans les programmes de SVT en lycée en 2011 a donné lieu à une controverse.
34À la différence de la méritocratie individualiste prônée entre autres par Elizabeth Badinter, la parité offre le cadre institutionnel d’une promotion de l’égalité des droits entre hommes et femmes. Pour autant, le pouvoir politique n’a pas à trancher sur l’aspect scientifique et philosophique de la problématique, en l’occurrence dans le sens d’une indifférenciation de genre entre hommes et femmes, qui réduirait la question des inégalités à des faits sociaux de domination :
- 31 Comité interministériel des droits des femmes, 2012.
Ces inégalités ne sont le fruit ni du hasard ni d’une sorte de soi-disant gène féminin qui ferait apprécier aux femmes davantage qu’aux hommes les tâches ménagères, ou qui leur ferait craindre les responsabilités politiques ou dans l’entreprise. Non. Notre société si elle veut avancer doit en finir avec les inégalités entre les sexes, avec les stéréotypes, avec les préjugés31.
35La confusion entre égalité de droits et identité de genre, l’amalgame fait entre les stéréotypes sexistes (à caractère négatif) et les traits identitaires de genre (à caractère général et neutre) constituent des obstacles à une réflexion de type anthropologique.
36Par ailleurs, se pose la question des relations à établir entre les droits des femmes et ceux des minorités sexuelles. Le concept de genre a permis de déconstruire les normes sexuelles dominantes qui faisaient de l’homosexualité une pathologie. À l’occasion du vote de la loi adoptant le mariage et l’adoption pour tous, le débat public a réactivé ces problématiques anthropologiques. L’évolution sociétale s’est traduite en droit par l’égalité des droits pour les homosexuels.
37Une délimitation de ces deux champs doit cependant être clairement établie pour éviter les confusions : la défense de l’intégrité morale des homosexuels ne peut être conditionnée à la généralisation d’un système de valeurs relativiste ou indifférencié, pour traiter des relations homme-femme et au-delà des constructions individuelle et familiale. Tel était l’argument de certains opposants à un enseignement du genre en cours de SVT : la promotion de la liberté sexuelle et la lutte contre l’homophobie auprès des publics scolaires ne doivent pas dériver en une forme de promotion d’une contre-culture sexuée et sexuelle de ce type. Sans exclure les processus dynamiques et évolutifs à l’œuvre dans l’histoire des sociétés et des individus, l’éducation à la citoyenneté nécessite la référence à des repères anthropologiques stables et fiables. Ainsi, dans le débat pour l’adoption de la loi sur le mariage pour tous, les pouvoirs publics ont dû renoncer à introduire dans le Code civil la notion trop indifférenciée de « parents » en lieu et place de « père » et de « mère ».
- 32 Agacinski, 2003.
38Par ailleurs, le maintien dans un positionnement relativiste et anti-essentialiste explique, entre autres facteurs, le manque de visibilité du mouvement féministe et de co-leadership, sur le plan des valeurs éducatives et politiques par exemple, à titre de contre-pouvoir dans une société encore patriarcale. À l’heure de la parité, certaines campagnes électorales ont été marquées par une compétition parfois déloyale entre candidats masculins et féminins ou par une surenchère médiatique à l’encontre de candidates ou de responsables innovantes, mises en difficulté de faire entendre leur différence, en l’absence de soutien suffisant. A contrario, le différentialisme partiel renforce l’intégrité de la communauté des femmes et contribue à la promotion de l’interculturel comme co-construction anthropologique et citoyenne alternative32. Cette démarche offre la perspective de dépasser le cadre d’une complémentarité passive des rôles masculins et féminins (complémentarité qui confine traditionnellement la femme dans les seconds rôles) et favorise l’adoption réciproque de valeurs attribuées culturellement au genre opposé. Le dialogue des cultures de genre participe d’un paradigme sexoculturel : dans cet ordre d’idées, si la femme se libère, s’autonomise et accède à différents domaines de la vie publique jusque-là gérés par l’homme sur la base des valeurs précitées et de sa volonté agissante, celui-ci bénéficie en retour des valeurs que cultivait en privé la femme « gardienne du foyer », celles de pacifisme, de solidarité, de culture du lien social et inter-humain. Dans la triangulation familiale et scolaire, cette émulation inter-générique est une source d’équilibration au plan éducationnel. C’est l’objectif d’expériences menées en termes de co-éducation de genre, en Espagne en particulier, ou du care dans le monde anglo-saxon.
- 33 Touraine, 2007, p. 200-201.
Le sujet apparaît mieux quand il est porté par une catégorie dominée, rejetée par les puissants, qui lui refusent toute subjectivité, même à l’intérieur des sociétés les plus modernisées. La catégorie qui porte le mieux le sujet est aujourd’hui celle des femmes, car plus que toute autre catégorie, elles se sont vues refuser longtemps le droit à la subjectivité, en particulier les droits politiques. […] Ce sont les femmes qui opèrent le grand bouleversement culturel qui nous conduit d’une culture de conquête du monde à une culture de connaissance et de construction de soi33.
39Pour conclure, au-delà des droits politiques et socio-économiques à l’égalité pour les femmes, doit être défendu un droit à la différence culturelle et à la parité dans ce domaine également. C’est le rôle de l’enseignement de la morale laïque et citoyenne que de participer à cette évolution et de promouvoir la créativité spécifique des filles mais aussi des garçons dans cette perspective.
État/école/citoyenneté : une modélisation émergente
40L’État a commencé à formaliser ces valeurs émergentes dans la société civile, par l’adoption juridique des principes de la parité homme-femme et de la diversité culturelle… Si la laïcité reste un rempart précieux à l’égard des communautarismes et le garant de la liberté de conscience, la parité homme-femme instituée en 2001 sur le plan politique et la diversité culturelle, reconnue comme principe républicain suite aux émeutes des banlieues en 2005, sont autant d’acquis institutionnels récents.
41Ces préceptes ne pourront cependant vraiment influer sur les mentalités et les comportements que par le concours de l’école et de l’Université, matrices de citoyenneté et de démocratie.
L’éducation à l’égalité entre les sexes
42Le gouvernement Hollande a manifesté un fort investissement dans ce domaine, mis en oeuvre par le ministère des droits des femmes, dirigé par Najat Vallaud-Belkacem. Il s’agit d’actualiser les objectifs de la convention interministérielle « pour l’égalité entre les filles et les garçons, entre les femmes et les hommes, dans le système éducatif » qui datait de 2007. Le constat est celui du maintien d’une stéréotypie inégalitaire voire discriminatoire, de représentations sexistes qui freinent les évolutions, d’où la nécessité d’éduquer à une culture sociétale paritaire. Une nouvelle convention interministérielle, adoptée entres autres par le ministère de l’Éducation nationale, est articulée autour de trois chantiers prioritaires qui sont déclinés dès 2013 :
1. Acquérir et transmettre une culture de l’égalité entre les sexes ;
2. Renforcer l’éducation au respect mutuel et à l’égalité entre les filles et les garçons, les femmes et les hommes ;
- 34 Comité interministériel aux droits des femmes, 2013.
3. S’engager pour une plus grande mixité des filières de formation et à tous les niveaux d’étude34.
43Ce dispositif est associé à ceux, précités, qui concernent l’égalité professionnelle homme-femme dans le cadre de l’ESR et de l’EN. Il restera à en faire le bilan à terme.
L’éducation à la diversité culturelle
44Un point d’appui important est la signature en 2005 à Paris de la convention de l’UNESCO sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles.
- 35 Mathien, 2013.
Elle est devenue une étape majeure dans le renforcement d’une dynamique ancienne de reconnaissance des spécificités sociales, linguistiques et culturelles. Dans sa démarche, l’agence des Nations unies est fidèle à sa vocation première. À savoir : promouvoir « la féconde diversité des cultures » et « faciliter la libre circulation des idées, par le mot et par l’image » comme stipulé dans son Acte constitutif de 1946. Faisant suite à la déclaration universelle de 2001 sur le même objet, la convention ne prend en compte que le domaine relevant de l’article 8 de celle-ci : « les biens et services culturels, des marchandises pas comme les autres35 ».
45Avec l’entrée en vigueur de cette législation onusienne et à l’image de la bio-diversité, la diversité linguistico-culturelle doit être intégrée dans les problématiques du développement (macro)économique, de la démocratisation (géo)politique, de l’éducation à une citoyenneté altermondialisée… Il y a là un frein nécessaire aux appétits des marchés technoscientistes et aux autoritarismes étatiques uniformisateurs, et un coup d’accélérateur pour les promoteurs de la libre expression des cultures des peuples et des communautés.
46Deuxième étape institutionnelle, la publication en 2007 par le Conseil de l’Europe d’un Livre blanc sur le dialogue interculturel. Est significative l’évolution du constat et du respect des différences à la praxis d’un dialogue entre les groupes porteurs de ces différences culturelles. Cette démarche permet de cultiver la « multiperspectivité » et la polyphonie d’une pensée complexe et au-delà transculturelle :
Le dialogue interculturel n’est pas une expression du relativisme culturel, pas plus qu’il n’y conduit. Le dialogue doit se fonder sur des valeurs d’universalité et d’indivisibilité des droits de l’homme, de la démocratie et de la primauté du droit. Le Conseil de l’Europe rejette l’idée d’un conflit des civilisations et affirme qu’une participation accrue à la coopération culturelle – au sens large du terme – et au dialogue interculturel contribuera au contraire à la paix et la stabilité internationales à long terme.
47Aujourd’hui, la philosophie, les sciences du langage, la biologie, l’écologie, les sciences de l’éducation, la sociologie des organisations ont intégré le concept de diversité culturelle comme paramètre épistémologique. Le concept interculturel a également gagné du terrain au sein des ONG, des entreprises et même des institutions publiques qui sont des espaces riches de confrontation des cultures. La création des chartes de la diversité en entreprise en 2004 formalise cette dynamique.
- 36 ACSE.
En réponse à la crise des banlieues de l’automne 2005, la création en 2006 de l’Acsé, l’Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances vise à renforcer l’efficacité de l’action de l’État en faveur des habitants des quartiers prioritaires de la politique de la ville, de l’intégration des personnes immigrées et issues de l’immigration et de la lutte contre les discriminations36.
- 37 Ci-après la liste, par ordre chronologique de création, des principales institutions relatives à l (...)
48Est à signaler également la création du statut de préfet de la diversité, qui parachève cette construction au sommet de la hiérarchie républicaine37.
- 38 Lorcerie, 2003.
49La question de l’éducation à la diversité culturelle et à l’interculturel reste quant à elle épineuse dans la mesure où elle s’inscrit dans un contexte idéologique lourd de clivages et de malentendus et qu’elle est censée s’adresser à l’ensemble des publics. Préconisant de renoncer à cette tâche ambitieuse, certains ont beau jeu de désigner par exemple le communautarisme et l’intégrisme musulmans comme fauteurs de troubles socio-éducatifs : il faut les combattre sans complaisance – encore qu’ils soient limités en France – mais sans confondre les causes et les effets ni déresponsabiliser la communauté nationale par là même. Le système éducatif ne pourra résorber, avec ses seuls acquis épistémologiques actuels que sont les savoirs rationnels et la laïcité, les discriminations négatives dont peuvent faire l’objet les enfants de l’immigration non européenne ni dialoguer avec une pertinence suffisante avec les stratégies de résistance au modèle dominant et de contre-acculturation propres à ces publics38. La chute du mur de Berlin et ses incidences géopolitiques ont entraîné un effet de bascule dans les rapports de force internationaux, dont il serait vain de dissimuler la portée au niveau de l’école.
50Fait symptomatique intéressant, la loi votée en 2004 sur l’interdiction du port du voile – et des signes religieux – à l’école est globalement respectée par la communauté musulmane représentée par le porte-parole du CFCM (Conseil français du culte musulman), Dalil Boubakeur. En reconnaissance de cet effort d’adaptation et par compensation, certaines des mesures de « laïcité ouverte », préconisées par Bernard Stasi, rapporteur du projet de loi et ancien médiateur de la République, sont mises en application :
- Faire des fêtes musulmane et juive de l’Aïd el-Kébir et de Yom kippour des jours fériés dans les écoles publiques, mesure qui s’appliquerait à tous les élèves. Dans les entreprises, les salariés pourraient choisir un jour de fête religieuse sur leur crédit de jours fériés ;
Améliorer l’enseignement du principe de laïcité :
- Adopter une « charte de la laïcité », qui serait remise à plusieurs occasions : la remise de la carte d’électeur, la rentrée des classes, l’accueil des migrants, l’acquisition de la nationalité ou la formation initiale des agents publics ;
- Instaurer à l’école une « journée de Marianne » pour enseigner aux élèves le principe de laïcité ;
- Insérer la laïcité dans le programme des journées de préparation à la défense.
Assurer la diversité spirituelle :
- Prévoir des mets de substitution dans les cantines publiques ;
- Lever les obstacles à la construction des mosquées et synagogues ;
- Mieux prendre en compte les différents rites funéraires ;
- Faciliter les abattages rituels ;
- Recruter des aumôniers musulmans dans l’armée et les prisons ;
- Améliorer l’enseignement du fait religieux, sans en faire un cours à part entière ;
- Faire en sorte que l’esclavage, la décolonisation et l’immigration occupent une place plus importante dans les programmes d’histoire ;
- Lutter contre les discriminations ;
- Encourager la destruction des « ghettos urbains » ;
- Mettre en place une autorité de lutte contre les discriminations et lutter plus fortement contre le racisme et l’antisémitisme ;
- 39 Stasi, 2003.
- Rendre possible l’accès à l’école publique dans toutes les communes, afin d’éviter que des parents soient obligés d’inscrire leurs enfants dans des écoles privées sous contrat39.
- 40 Charte de la laïcité, 2013. http://www.education.gouv.fr/cid73666/charte-de-la-laicite-a-l-ecole.h (...)
51L’abrogation de l’article de la loi de février 2006 rendant obligatoire l’enseignement du caractère positif de la colonisation est un autre signe d’ouverture, qui pose un jalon principiel : l’interculturel n’équivaut pas à une forme de relativisme idéologique qui conduirait par exemple à légitimer un système révolu de domination. Cette controverse montre bien pour autant la nécessité de s’ouvrir aux problématiques multi et interculturelles à l’égard des publics issus de l’immigration non européenne, tout en préservant la structure unitaire générale des principes et programmes ; a contrario d’un unitarisme rigide, il serait pertinent d’assimiler la devise de l’Union européenne, « l’unité dans la diversité ». C’est ainsi que peut être élaborée cette « culture commune » à laquelle appelle l’article 7 de la charte de la laïcité, adoptée à la rentrée 201340. Cette démarche existe d’ores et déjà dans un premier cercle concentrique de l’État-école-nation qu’est celui des régions historiques et des DOM-TOM. La pérennisation des écoles primaires en langues régionales (calandretas en Occitanie, écoles diwhan en Bretagne, bressoletas en Catalogne, iskastolas au pays Basque…) et l’enseignement du créole dans les DOM, effectués dans le contexte de la décentralisation régionale et avec le soutien du gouvernement Jospin-Lang, sont des exemples de pédagogie différenciée. Le statut de l’Alsace-Moselle en matière d’enseignement religieux à l’école publique fournit un autre exemple de traitement spécifique, adapté aux réalités historiques et culturelles des publics concernés. La création d’écoles et de lycées musulmans privés va dans le même sens. Comme en Finlande, et sur le modèle des anciennes aumôneries et du dialogue inter-religieux valorisé par les Églises, serait bienvenue une présence des différents cultes, cette forme d’animation permettant à des élèves de confessions différentes de se rencontrer.
Vers une anthropo-éthique41
État-citoyen : modélisation de la démocratie (inter)culturelle
- 42 Ferréol et Jucquois, 2003, p. 100-101.
L’émergence d’une épistémé de la diversité impose des remises en cause méthodologiques et épistémologiques […]. Tous les États occidentaux sont confrontés à ces interrogations. Le modèle centralisateur et uniformisateur jacobin dont la France post-révolutionnaire fut l’exemple achevé, mais qui fut à l’œuvre, avec des nuances, partout en Occident ainsi que dans l’ensemble des anciennes colonies et particulièrement au Nouveau monde, est progressivement contesté. […] Parallèlement émerge une nouvelle mentalité visant à prendre davantage en compte les différentes composantes de la diversité. Ce phénomène s’explique par une meilleure prise de conscience de l’altérité, par la multiplication des échanges et des rencontres interculturelles, par les nécessités d’améliorer les relations entre les communautés et d’éviter les dérives « nationalitaires42 ».
- 43 Touraine, 2005.
52Le processus d’individuation propre à la citoyenneté mondialisée conduit à l’émergence de sujets assumant davantage leurs appartenances culturelles et représentés par des leaders alternatifs accédant aux pouvoirs d’État. Ainsi, l’élection de Barack Obama, métis afro-américain à la présidence des États-Unis, consacre cette évolution historique et suscite une forte émulation. Ces phénomènes concourent à l’établissement discret mais bien réel d’une « démocratie culturelle » : celle-ci complète l’œuvre de la démocratie politique, fondée sur le critère du pouvoir alloué à une majorité d’individus ; elle part également des acquis de la démocratie sociale qui fonde son exercice sur l’officialisation des conquêtes sociales, sous l’impulsion des anciennes démocraties populaires et de leurs correspondants en Occident43.
53Achille Mbembe insiste sur l’intérêt de l’expression et de la représentation en bonne et due forme des différentes formes de diversité, à l’heure de la société des médias :
- 44 Mbembe, 2010, p. 115-116.
Entreprise d’expression, capacité de se donner une voix, et un visage, la démocratie est fondamentalement, une pratique de la représentation – une prise de distance par rapport à autrui aux fins d’imagination de soi, d’expression de soi et de partage dans l’espace public, de cette imagination et des formes que prend cette expression. […] Pour que la démocratie à venir prenne sens et forme, et pour qu’émerge, dans sa multiplicité dispersante, cette nouvelle nation qui commence à se faire, sous nos yeux, une nouvelle économie élargie de la représentation qui prenne en compte toutes les formes de production et d’affirmation des identités collectives est nécessaire44.
54Universalisme et interculturalité ne s’opposent pas mais peuvent au contraire coexister, sachant qu’un universalisme bien compris doit porter sur des fondamentaux tels la rationalité et les droits humains :
- 45 Touraine, 2007, p. 255.
L’idée de communication interculturelle ne peut se développer que dans l’aire d’influence des sociétés qui reconnaissent l’universalisme de la raison et celui des droits humains45.
- 46 Touraine, 2007, p. 257.
La modernité n’existe pas sans le sujet, et celui-ci n’existe pas sans la modernité, c’est-à-dire hors de l’association de la raison et des droits individuels. Avec cette triade, la communication interculturelle est possible46.
55Sur cette base philosophique, le dialogue des cultures peut jouer sa partition propre, celle du jeu des différences identitaires qui apportent leur « substantifique moelle » à l’édifice des droits et des devoirs et qui contribuent, ce faisant, à l’édification du sujet-citoyen.
Enseignement de la morale laïque et citoyenne et/ou éducation à ses valeurs ?
56Au moment de la programmation de cet enseignement, le débat a été mené sur la différence entre un enseignement de la morale laïque et citoyenne et une éducation à ses valeurs. Dans les faits, faut-il choisir entre l’implicite des comportements et l’explicitation de choix éthiques républicains ?
- 47 Bussienne et Tozzi, 2014, p. 10.
Ce dossier des Cahiers pédagogiques prend parti dans le débat français : il parle d’éducation laïque à la morale, insistant sur le caractère vécu, et non seulement appris, des valeurs. Il pense qu’une éducation à la morale est distincte d’une éducation civique, qui tire davantage la morale vers la citoyenneté politique qui n’en est qu’une des dimensions. […] Il prône une éducation à la morale qui s’appuie d’une part sur la raison argumentative et la délibération individuelle dans la tradition des lumières, mais aussi sur la sensibilité, sans laquelle on manque d’attention au visage de l’autre et ne prend pas soin de son altérité avec sollicitude47.
Des humanités émergentes
57Ces principes établis, quels peuvent être les objectifs programmatiques de l’enseignement de la morale laïque ? Au plan socio-cognitif, il s’agit de mettre au point une méthodologie de l’intersubjectivité et des stratégies correspondantes de médiation et de médiatisation. Au sens de Morin, la constitution d’une science générale de l’humain permet de fédérer et d’harmoniser les différentes forces vives à l’œuvre : la globalisation et ses alternatives telles qu’étudiées par la géopolitique, la stratégie, la macro-économie et le droit international, les identités ou appartenances aux cultures de genre, d’origine… objets de référence de l’anthropologie, descendante décomplexée de l’ethnologie paternaliste et coloniale ; les représentations symboliques médiatisées qu’explorent sémiologie, sémiotique, archétypologie ; les modes de communication modernes décrits par la médiologie, les sciences du langage (linguistique de la communication, pragmatique…).
- 48 Morin, 1999, p. 11.
Notre travail doit permettre de favoriser l’émergence de nouvelles humanités à partir des polarités complémentaires et non antagonistes, la culture scientifique et la culture humaniste. Ces humanités permettraient de reconnaître l’humain dans ses enracinements physiques et biologiques et dans ses accomplissements spirituels ; de se reconnaître humain et de reconnaître en autrui un être humain complexe ; de devenir apte à se situer dans son monde, sur sa terre, dans son histoire, dans sa société. Ces nouvelles humanités sont indispensables à la régénération de la culture humaniste laïque48…
58Ci-après, pour une mise en perspective, l’esquisse d’un programme de recherche-enseignement alternatif dans le domaine des LLA-SHS.
Tableau 20 – Esquisse d’un programme de recherche-enseignement alternatif dans le domaine des LLA-SHS
Critères d’(inter)subjectivité |
Sciences humaines et sociales (référentialité) |
Sciences du langage, types de littérature (discursivité) |
Individualité/juvénilité (personnalité, âge, sexualité) |
Psychologie-psychanalyse |
Psycholinguistique (littératures juvénile, autobiographique…) |
Masculinité-féminité (sexe-genre) |
Idem, psycho-anthropologie culturelle |
Idem, psycho-ethno-linguistique (littérature féminine) |
Citoyenneté/socialité (état-civil, statut…) |
Sociologie, économie, droit, sciences politiques |
Socio-linguistique (roman social…) |
Identité-altérité |
Anthropologie culturelle |
Ethno-linguistique (littératures régionale, francophone, européenne, étrangère) |
Spiritualité |
Sémiologie, archétypologie |
Sémiotique littéraire, poétique (textes fondateurs) |
Martine Boudet
Raison et pensée mythique/analogique
59Dans la lignée des philosophes du xviiie siècle, le ministre de l’Éducation nationale Vincent Peillon fait de la raison la faculté maîtresse devant régir l’enseignement de cette nouvelle discipline, la morale laïque. Le discernement des valeurs et contre-valeurs éthiques, la libération des déterminismes qui entravent l’accès à une conduite morale, l’exercice équilibré des droits et des devoirs sont à rechercher dans l’application des principes républicains dont la trilogie « liberté, égalité, fraternité ». Edgar Morin met en garde quant à lui sur une programmation qui, au nom de la seule raison, préconiserait une éthique sociale plutôt abstraite, générale et objectiviste. Sans prise en compte suffisante des expériences intersubjectives d’ordre psychosocial, (inter) culturel, médiatique, symbolique telles qu’analysées par les SHS…
- 49 Morin, 2013.
L’idée d’introduire l’enseignement d’une morale laïque est à la fois nécessaire et insuffisante. La laïcité du début du xxe siècle était fondée sur la conviction que le progrès était une loi de l’histoire humaine et qu’il s’accompagnait nécessairement du progrès de la raison et du progrès de la démocratie. Nous savons aujourd’hui que le progrès humain n’est ni certain ni irréversible. Nous connaissons les pathologies de la raison et nous ne pouvons taxer comme irrationnel tout ce qui est dans les passions, les mythes, les idéologies49.
60Pour résumer, la raison discerne les catégories mais les sépare dans le même temps en les tenant à distance ; tandis que la sensibilité médiatisée actuelle, au risque de confusions, les met en dialogue. L’heure est à l’empathie, il reste à lui octroyer une méthodologie sur le terrain éducatif. Le débat et l’argumentation philosophiques, si importants soient-ils pour la construction de la personnalité intellectuelle et de la citoyenneté, peuvent-ils y suffire ? La crise des humanités et du français – comme discipline scolaire – vient entre autres de la domination exercée par ce mode de pensée. Par exemple, la pensée populaire de type proverbial est abusivement exclue des enseignements. L’excès de rationalisme apparaît comme une source d’appauvrissement, qui conduit à l’universalisme abstrait, au technoscientisme, au technocratisme… La création littéraire et artistique est minorée dans ce système, l’imaginaire collectif étant recyclé et « sous-géré » dans la publicité et autres moyens médiatiques people. Le dialogue interculturel qui s’engage ne peut se situer sur le seul plan des idées, repères référentiels et systèmes de valeurs, il doit intégrer la question des symboliques, partie immergée et fondamentale des langues-cultures. Pour exemple, la pensée allemande (voir le romantisme) relie nettement cultures populaires et pensée mythique, archétypale, analogique et sensible.
Conclusion
61Pour conclure, ces pratiques d’intelligence collective et ces dynamiques fraternitaires sont autant de démarches pour accéder à des formes de citoyenneté complexe, conditions de la démocratie à venir. Dans le sillage des mutations quantique, informatique, génétique, écologique, c’est donc l’évolution anthropologique qui est à l’ordre du jour, celle qui ajoute à la gestion des machines, des corps et de l’environnement une meilleure maîtrise des mentalités, des comportements, en somme des diverses composantes de l’intersubjectivité, base de la personnalité individuelle et de la citoyenneté.
Notes
1 Loi d’orientation du 8 juillet 2013.
2 Peillon, 2013, p. 37.
3 Loi d’orientation du 8 juillet, 2013, p. 7.
4 Bergougnioux, Loeffel et Schwartz, 2013, p. 7.
5 Bergougnioux, Loeffel et Schwartz, 2013, p. 24.
6 Bergougnioux, Loeffel et Schwartz, 2013, p. 28.
7 Peillon, 2013.
8 Loi d’orientation du 8 juillet, 2013, p. 41.
9 Des pistes pédagogiques relatives à la question médiatique sont proposées dans le chapitre x, « Axes de recomposition programmatique » (Martine Boudet).
10 Le débat public, avec les syndicats notamment, a surtout porté sur les modalités : horaires et disciplines d’accueil de cet enseignement, types d’évaluation, formation des enseignants…
11 Bergougnioux, 2013.
12 Stiegler, 2009.
13 MEN, 1er juillet 2013.
14 Abdallah-Pretceille, 2004.
15 http://www.iesr.ephe.sorbonne.fr/ Composante de l’École pratique des hautes études, l’Institut européen en sciences des religions a été créé en 2002. L’IESR répond aux recommandations du rapport de Régis Debray (2002) sur « l’enseignement du fait religieux dans l’école laïque » : « rapprocher les démarches pédagogiques et la recherche scientifique ».
16 Voir le projet d’une « Société éducatrice décentralisée ». www.pacte-educatif.org
17 Le projet d’une francophonie ouverte, défendu par Dominique Wolton du CNRS, contribuerait à réduire l’impact souterrain des mentalités et des imaginaires néo-coloniaux.
18 Touraine, 2005, p. 337.
19 Touraine, 2007.
20 Levinas, 1995.
21 Abdallah-Pretceille, 1999, p. 13.
22 Abdallah-Pretceille, 1999, p. 15.
23 Les « subcultures » sont à différencier des « sous-cultures » qui s’avèrent des formes inférieures de culture souvent massivement commercialisées et médiatisées, telle la culture people.
24 HALDE, 2007.
25 HALDE, 2007.
26 Agacinski, 2001, p. 50.
27 Agacinski, 2001, p. 35.
28 Agacinski, 2001, p. 51.
29 Héritier, 2002.
30 Agacinski, 2012, p. 15.
31 Comité interministériel des droits des femmes, 2012.
32 Agacinski, 2003.
33 Touraine, 2007, p. 200-201.
34 Comité interministériel aux droits des femmes, 2013.
35 Mathien, 2013.
36 ACSE.
37 Ci-après la liste, par ordre chronologique de création, des principales institutions relatives à la diversité : Haut conseil de l’intégration (1989), Conseil français du culte musulman (CFCM, 2003), Comité pour la mémoire de l’esclavage (2004), Haute autorité pour la lutte contre les discriminations (HALDE, 2004), ACSE (Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances, 2006), Institut du monde visible, délégué interministériel pour l’égalité des chances des Français d’outre-mer (2007), musée des Arts premiers (2006), CNHI-Cité nationale de l’histoire de l’immigration (2007).
38 Lorcerie, 2003.
39 Stasi, 2003.
40 Charte de la laïcité, 2013. http://www.education.gouv.fr/cid73666/charte-de-la-laicite-a-l-ecole.html
41 Morin, 1999.
42 Ferréol et Jucquois, 2003, p. 100-101.
43 Touraine, 2005.
44 Mbembe, 2010, p. 115-116.
45 Touraine, 2007, p. 255.
46 Touraine, 2007, p. 257.
47 Bussienne et Tozzi, 2014, p. 10.
48 Morin, 1999, p. 11.
49 Morin, 2013.
Table des illustrations
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Titre | Tableau 21 – Morale laïque et citoyenne (esquisse de configuration idéologique) |
Légende | Martine Boudet |
URL | http://books.openedition.org/pumi/docannexe/image/6216/img-1.jpg |
Fichier | image/jpeg, 334k |
© Presses universitaires du Midi, 2014