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Les archives de l’invention

 | 
Marie-Sophie Corcy
, 
Christiane Douyère-Demeulenaere
, 
Liliane Hilaire-Pérez

Les rhétoriques de l’invention

Les stratégies de promotion de l’« invention ordinaire » dans un groupe professionnel en formation : les fabriques de papiers peints à Paris dans la deuxième moitié du XVIIIe siècle

Christine Velut

Full text

  • 1 L’apparition de ce nouveau bien de consommation sur le marché parisien et la formation du (...)
  • 2 Roche D., La France des Lumières, Paris, Fayard, 1993.
  • 3 On réserve ici le terme de papier peint aux décors à base de papier dont le motif est impr (...)

1L’idée d’utiliser le papier comme support de décoration murale est bien antérieure au milieu du XVIIIe siècle. Vers 1750 toutefois est mis au point, non sans tâtonnements, un nouveau produit pour l’ornement des intérieurs, ce qu’on appelle improprement le papier peint et que les contemporains qualifiaient de « papier de tenture » ou « papier pour meuble»1. Conçu pour un usage domestique, le papier peint constitue un bon spécimen de l’abondante panoplie de nouveautés destinées à un marché urbain en plein essor2. Point d’aboutissement des efforts collectifs de nombreux artisans et non d’un inventeur isolé, le papier peint au sens strict ne prend que progressivement sa forme définitive de composition décorative entièrement imprimée à la planche3. L’émergence du papier peint passe par l’addition et la combinaison de pratiques existantes, éventuellement légèrement modifiées, et par leur articulation avec des gestes plus novateurs. Cette progressive émergence d’un ensemble de techniques spécifiques repose par ailleurs sur un groupe d’acteurs venus de milieux professionnels divers et à la formation technique très hétérogène. On ne peut attribuer à aucun acteur en particulier l’une quelconque de ces améliorations, transpositions ou innovations et, progressivement, non sans hésitation, voire de réelles réticences, elles s’imposent à l’ensemble des ateliers et manufactures.

2Aucune figure d’inventeur au sens traditionnel du terme n’émerge donc du groupe des fabricants. Pourtant, une partie au moins des spécialistes de ce matériau, de plus en plus nombreux au fil de la période étudiée, font en sorte d’apparaître aux yeux du « public » comme des ferments de progrès et des porteurs d’innovations, aux applications certes restreintes à leur domaine propre, mais in fine bénéfiques pour l’ensemble du pays. Certains s’emploient par leur attitude, leurs démarches, les positions adoptées devant l’opinion (représentants de l’État aussi bien que simples consommateurs) à se démarquer de leurs confrères et concurrents grâce à un discours où entre en bonne place l’innovation. Dans l’argumentaire élaboré pour obtenir les marques de la reconnaissance officielle, et ainsi mieux attirer l’attention du public, on s’appuie sur les inventions mises au point, sur les perfectionnements apportés au sein de l’entreprise, à la fois en matière de techniques et de produits. Cette valorisation de la novation et les discours justificatifs élaborés autour de l’invention ne peuvent toutefois être dissociés des attentes en matière de commercialisation, attentes omniprésentes quoique le plus souvent de manière implicite. La pérennité des entreprises dépend en effet de leur capacité à s’attacher une clientèle, attirée autant par une offre de qualité et « à la dernière mode », que par l’orchestration qui est faite autour de cette offre.

3Les stratégies de valorisation et de commercialisation des « inventions ordinaires » acquises dans le cadre des fabriques de papiers peints peuvent être envisagées selon trois axes. Tout d’abord le discours autour de l’invention s’insère dans la florissante thématique de la nouveauté exploitée par certains imprimés périodiques, tels que journaux et almanachs. Parallèlement, quelques entrepreneurs cherchent à faire reconnaître par les instances officielles l’importance des progrès obtenus, jugés bénéfiques pour leur branche d’activité mais aussi pour l’ensemble de l’économie. Enfin on n’hésite pas à organiser une véritable mise en scène visuelle de l’excellence et de la réussite, fruit de la recherche constante de la qualité et des efforts persévérants vers l’innovation.

L’instrument périodique

  • 4 Feyel G., L’annonce et la nouvelle : la presse d’information en France sous l’Ancien Régim (...)
  • 5 Les sondages dans des journaux tels que les Annonces, affiches et avis divers, le Journal (...)
  • 6 Véronique Sarrazin, qui a étudié ce genre éditorial, a bien mis en évidence comment les al (...)

4Au cours du XVIIIe siècle, on le sait, la gamme des imprimés proposés à la population parisienne s’élargit considérablement. Dans ce foisonnement d’ouvrages se dégagent quelques genres éditoriaux qui s’avèrent de formidables tribunes pour les manufacturiers avides d’obtenir la reconnaissance du public. Deux types de publications périodiques leur permettent de mettre en relief ce qui doit les distinguer de leurs confrères et concurrents. Ce sont d’une part les journaux4 qui, en sus des rubriques florissantes de petites annonces entre particuliers, publient des informations d’ordre économique et commercial et progressivement les avis et messages d’annonceurs les plus divers5. On y relaie sans réticence les efforts des marchands et fabricants pour s’adresser aux consommateurs. Ce sont d’autre part les almanachs qui, quoique de périodicité annuelle et de livraisons souvent irrégulières, forment un bon complément des titres de presse précédents6. Conçus comme des outils pour les professionnels ou comme d’agréables aide-mémoire destinés à un plus large public à la recherche d’un contenu tout à la fois instructif, pratique et plaisant, ces publications font plus ou moins place aux avis des manufacturiers. La recension et l’analyse attentive des avis insérés tant dans ces journaux que dans ces almanachs permet d’analyser le discours tenu par les professionnels eux-mêmes.

5Pour bien juger de ces messages et de leur contenu, il faudrait pouvoir départager précisément ce qui revient à l’annonceur et au rédacteur. Le responsable du périodique dispose bien sûr d’un droit de regard sur le texte adressé par le fabricant. Il se réserve en particulier la possibilité de choisir parmi les avis qui lui sont soumis, et éventuellement de les modifier. Responsables de journaux comme d’almanachs n’hésitent pas à stimuler les annonceurs en leur faisant miroiter les bénéfices concrets qu’ils peuvent tirer d’une annonce judicieusement rédigée et placée. Les entrepreneurs qui utilisent régulièrement l’instrument périodique sont encore peu nombreux, et il n’est pas inutile de leur rappeler l’influence de l’écrit sur un lectorat composé d’autant de consommateurs potentiels. Comme le souligne sans fausse pudeur le rédacteur du Cabinet des modes,

  • 7 Cabinet des modes, février 1786, cité par Coquery N., De l’hôtel aristocratique aux minist (...)

les Amateurs, les Artisans, fabricans et manufacturiers [ont tout intérêt] à donner avis […] de tout ce qu’ils inventeront ou perfectionneront, tant dans les habillements et parures […] que dans les meubles de toute espèce, Décorations, Embellissemens d’appartements. Les marchands qui nous ont fait passer quelques détails s’en sont déjà bien trouvés, par la vente de plusieurs articles, qui peut-être n’aurait pas eu lieu sans notre annonce7.

Le propos est on ne peut plus clair. En omettant de s’adresser au public par le canal des périodiques, on se prive d’un moyen privilégié de retirer tous les fruits des progrès accomplis dans son domaine.

6De fait, certains fabricants de papier peint ne sont pas restés sourds à de telles invites. Une poignée d’entre eux se signalent par voie de presse et comptent donc sur cette forme d’écrit pour orchestrer la promotion des innovations mises au point dans leurs ateliers. Quantitativement, on reste très en deçà bien sûr de ce qui se pratique aujourd’hui dans les médias. Toutefois des avis repérés par sondage se dégagent quelques grandes lignes communes, qui forment une ébauche de rhétorique publicitaire.

  • 8 Windsor, anglais d’origine, débute vers 1770 sa belle carrière parisienne en s’installant (...)
  • 9 Les sondages le font apparaître à quatre reprises dans les journaux et dans autant d’alman (...)
  • 10 Journal de Paris, n° 164, 13 juin 1779, rubrique « Arts ». Ce sont des papiers à personnag (...)
  • 11 Selon une logique qui fait pencher l’intitulé de la rubrique « Arts » du côté des arts lib (...)
  • 12 Journal de Paris, n° 204, 22 juillet 1780, rubrique « Arts ».
  • 13 Il s’agit de papiers imitant toute la gamme des ornements sculptés de rigueur dans les int (...)

7Les annonces relatives à une invention s’inscrivent dans la thématique de la nouveauté, particulièrement bien représentée dans le corpus. La nouveauté ainsi invoquée sert d’abord à justifier le recours à l’annonce dans la presse. On informe utilement le lecteur lorsqu’on lui signale quelque chose de neuf. Ce peut être tout simplement une modification dans la localisation, l’organisation ou le fonctionnement du commerce ou de l’entreprise. Mais cela concerne aussi la gamme des produits offerts, qu’il s’agisse d’un simple enrichissement du répertoire de motifs imprimés ou bien d’une innovation plus marquante. C’est dans ce dernier cas de figure que doivent prendre place un petit groupe d’annonces dues à deux fabricants parisiens, Windsor8 et Robert. Est-ce une familiarité acquise dans son pays d’origine, le premier se signale volontiers dans les colonnes des périodiques9. Deux journaux au moins se font l’écho des nouveaux types de papiers peints sortis de ses ateliers. Les papiers « en figures », longuement présentés par le Journal de Paris, sont l’occasion de dresser le portrait d’un fabricant à l’affût de tout produit innovant10. La formule de rigueur dans les avis placés sous le signe de la nouveauté, « il vient de faire », ne permet guère de se prononcer sur le caractère récent de la trouvaille évoquée, mais l’annonce accumule les termes qui doivent établir la rupture avec ce qui se fait par ailleurs : « absolument différents de tous ceux qu’on a faits jusqu’à présent », ces papiers dits « en figures », composés « d’une manière tout à fait nouvelle », ont la caractéristique d’être « sans aucune répétition du sujet ou du dessin ». On notera au passage que ce n’est pas le terme d’inventeur qui clôt la présentation, mais celui d’auteur11. C’est bien en terme d’invention toutefois qu’on évoque ces mêmes papiers dans ce titre un an plus tard12. On y fait état du succès rencontré par cette première « invention d’un nouveau genre de tenture » avant de passer aux perfectionnements apportés à une autre catégorie de motifs proposés, les ornements d’architecture13. Il ne s’agit pas alors d’une nouveauté au sens strict du terme, puisque l’avis précédent les mentionne déjà brièvement. Mais les précisions supplémentaires visent à parfaire l’image d’un fabricant soucieux de toutes les améliorations qui peuvent faciliter leur emploi dans les intérieurs. Si l’on ne détaille pas les progrès techniques accomplis, on entend bien se placer sur ce plan : la formule habituelle des trouvailles techniques – « a trouvé le secret de les imprimer en huile » – et l’évocation d’une colle spéciale sont gages d’amélioration pratique pour l’utilisateur.

  • 14 Annonces, affiches et avis divers, n° 120, 30 avril 1781, rubrique « Annonces ».
  • 15 Ce souci du détail peut paraître exagéré, mais il vise à éviter des ratés dans les effets (...)
  • 16 Annonces, affiches et avis divers, n° 305, 1er novembre 1781.

8Deux annonces parues à quelques mois d’intervalle dans les Annonces, affiches et avis divers attestent de l’intérêt des fabricants les plus actifs pour l’instrument périodique, qui se fait éventuellement l’écho de leur concurrence à propos de la mise au point d’un produit novateur. En avril 1781 on y signale le succès acquis dans les ateliers du même Windsor en matière de papiers en arabesque14. La notice souligne la durée du processus qui lui a permis, « après un travail de près de deux ans », de présenter au public « des arabesques pour tenture ». Suit une liste assez détaillée des qualités qui doivent leur gagner la faveur des amateurs, qualités sur le plan purement esthétique (élégance, délicatesse du dessin, sujets variés), sous le point de vue de la fabrication (netteté de l’exécution) et enfin sur le plan de la pose dans les pièces (ces papiers s’adaptent à l’orientation de la source lumineuse)15. Windsor est loin d’être le seul à s’essayer à ce nouveau genre de compositions en arabesque, et à le signaler dans la presse. Ainsi du papetier Robert, qui fait passer une annonce intéressante à double titre16. D’abord parce qu’elle reflète bien les ambiguïtés et les hésitations sémantiques et techniques qui accompagnent les débuts du papier peint. Les papiers peints en arabesque dont il fait la réclame ne sont pas - ou pas entièrement - imprimés à la planche, mais probablement peints à la main. En outre l’avis s’accompagne, en note, d’un avertissement à l’intention du public. On le met en garde afin qu’il fasse clairement la distinction entre les papiers de Robert et ceux de Windsor. Le terme d’invention semble alors de rigueur pour mieux fonder les prétentions à l’originalité des deux produits en compétition. En quoi peut bien consister cette part d’invention attribuée à Robert, on serait en revanche bien en peine de le dire. Manifestement, le vocabulaire de l’invention est nécessaire à la valorisation du travail accompli dans l’entreprise, valorisation à laquelle les périodiques contribuent indéniablement.

La consécration officielle

  • 17 Hahn R., L’anatomie d’une institution scientifique, L’Académie des sciences de Paris, 1666 (...)
  • 18 L’Académie fait ainsi office de « tribunal officiel des inventions soumises au pouvoir », (...)

9L’imprimé, par sa large diffusion, appuie les efforts publicitaires des fabricants. Toutefois la simple présence dans les périodiques, même avec une rhétorique ad hoc, ne suffit pas à donner tout le retentissement souhaité aux efforts innovants conduits dans les fabriques. Une sanction d’un tout autre prix, aux yeux des professionnels comme des particuliers, est attachée aux signes de reconnaissance délivrés par les institutions officielles ou les rouages étatiques. Les spécialistes du papier peint contribuent ainsi à leur mesure à l’afflux des requêtes auquel doivent faire face les membres de l’Académie royale des sciences17. Devenue l’arbitre en matière d’invention scientifique et d’innovation technique, la prestigieuse Académie est chargée par le pouvoir royal de se prononcer sur la nouveauté et l’utilité des produits ou procédés qui lui sont soumis. Son avis est en effet devenu une pièce indispensable à verser au dossier de quiconque souhaite obtenir privilège ou subvention18. Les postulants qui déposent des spécimens, des échantillons et ouvrent les portes de leurs ateliers aux commissaires désignés par l’Académie, n’ambitionnent pas tous de briguer le soutien du pouvoir royal. Solliciter l’avis de la docte assemblée s’inscrit aussi dans une stratégie où le soin pris de sa réputation le dispute à des considérations directement commerciales.

  • 19 Archives de l’Académie des sciences, procès-verbaux des séances, 31 janvier 1770.
  • 20 Les deux commissaires, Fougeroux et Brisson, n’hésitent pas à mentionner les « tentatives (...)
  • 21 Selon eux ces tapisseries de tonture de laine sont « infiniment plus belles et plus parfai (...)

10Les sondages réalisés dans les registres des procès-verbaux des séances montrent qu’au moins deux représentants de ce groupe professionnel se soumettent à la procédure d’appréciation de l’Académie. Ce n’est qu’à mot couvert, voire très indirectement, que les enjeux commerciaux et publicitaires entrent en ligne de compte dans les exposés lus en séance. Or, dans un secteur où il s’agit de capter la faveur de l’acheteur, avide de repères sûrs à propos d’un produit de diffusion relativement récente, la garantie de qualité ou d’innovation attachée à l’approbation de l’Académie est promesse de débouchés accrus. En soumettant ses papiers tontisses à l’examen minutieux des membres de l’Académie en 1769, la veuve Lecomte espère bien les distinguer de tous ceux qui sortent alors des ateliers concurrents19. Ce type de papier qui imite les velours existe sur le marché depuis déjà de nombreuses années. Il est d’autant plus utile de chercher à se singulariser de l’offre courante. Or, l’essentiel de l’argumentaire avancé par les deux commissaires consiste justement en un descriptif des étapes de la fabrication et des méthodes employées chez la veuve Lecomte en regard des techniques habituelles. Les pratiques innovantes mises au point après de longs tâtonnements20 sont gage d’une amélioration esthétique du produit. Toutefois, ces « nouvelles perfections » acquises selon les deux observateurs21 nécessitent un nombre considérable d’opérations. De fait, le descriptif du « manuel des opérations » exige un long développement, parfois quelque peu embrouillé. L’impression défavorable qui pourrait résulter d’une telle longueur est balayée par avance par le rédacteur : la beauté du résultat et la rapidité de l’exécution font mieux que compenser la complexité des gestes. Désireuse de prendre acte des progrès accomplis selon elle dans ce genre de papier peint, l’Académie accorde son approbation à la veuve Lecomte.

  • 22 Archives de l’Académie des sciences, procès-verbaux des séances, 19 août 1775.

11Dans un domaine voué au superflu et au décoratif, l’utilité, pour l’utilisateur, des améliorations même minimes, voire purement visuelles, vaut tout autant aux yeux des académiciens que les considérations purement techniques. Ainsi à propos des papiers à motif d’architecture présentés en 1775 par Arthur, les commissaires précisent bien que les « procédés […] ne sont pas absolument nouveaux », et qu’Arthur n’est pas non plus l’inventeur du type de papiers concernés. Pour motiver l’approbation in fine accordée, ce ne sont donc pas des considérations de techniques qui sont mises en avant cette fois-ci, mais bien les avantages procurés par ces papiers aux consommateurs. La comparaison ne prend donc pas pour objet des papiers similaires, mais le résultat du travail des peintres, auquel ces papiers veulent se substituer. Plutôt que de s’attarder sur des gestes qui sont simplement accomplis avec plus de soin dans les ateliers d’Arthur, les deux commissaires dressent un tableau des avantages de ces papiers en situation. Enumérant des points qui paraissent un écho direct de ce que le fabricant a pu lui-même leur exposer lors de la visite de sa fabrique, ils évoquent la régularité et l’uniformité des ornements imprimés à la planche, la modicité de leur coût, la rapidité de réalisation d’un décor, l’absence de toute odeur gênante. La phrase qui ferme le rapport montre bien comment les commissaires mêlent deux plans, celui, traditionnel, des progrès techniques, des améliorations apportées à un produit – selon eux Arthur « a ajouté de nouveaux degrés de perfection » à leur fabrication – et celui, plus nettement commercial, des préférences supposées du public. Ces avantages par rapport aux autres options décoratives doivent logiquement donner la préférence au papier peint qui ainsi « peut être utile au public»22.

  • 23 Cet argumentaire figure en tête de l’arrêt qui leur accorde le monopole de fabrication et (...)
  • 24 Bondois P.-M., « L’organisation industrielle et commerciale sous l’Ancien Régime : le priv (...)
  • 25 Archives de l’Académie des sciences, procès-verbaux des séances, 29 mars 1786.
  • 26 Exemple de la pluralité des procédures d’examen soulignée par Hilaire-Pérez L., « Les exam (...)

12Le même Arthur qui soumet avec succès sa production à l’appréciation des savants de l’Académie, sollicite à nouveau leur expertise pour un produit qui relève plus directement de la catégorie de l’innovation, un nouveau jaune dit « jaune minéral ». Or, à propos de ce jaune, on peut prolonger le point de vue des deux commissaires, Desmaret et d’Arcet, par l’argumentaire des deux associés, Arthur et Grenard23. Etape obligée avant de briguer le privilège exclusif24, dès la fin de l’année 1785 les deux manufacturiers entament leur démarche auprès de l’Académie des sciences. Les « éloges et l’approbation de l’Académie » proposés par Desmaret et d’Arcet sont présentés comme une juste reconnaissance des avantages apportés par cette nouvelle couleur, avantages dont ils ont pu se convaincre au sein même de la manufacture25. Leur conviction, forgée au cours de manipulations, après l’étude d’échantillons, s’appuie en outre sur des témoignages extérieurs. Expertise savante et avis des praticiens se conjuguent donc, mais se cantonnent aux « propriétés et avantages » de cette couleur26. Les perspectives commerciales qui sous-tendent la démarche d’Arthur et Grenard exigent de garder un silence prudent sur la nature exacte de la couleur mise au point. Témoins visuels des procédés de fabrication du jaune minéral, les deux commissaires les excluent de leur champ d’intervention sans guère s’embarrasser de justification.

13Sans entrer dans des considérations chimiques et techniques trop détaillées, les deux solliciteurs s’attardent quant à eux sur le contexte qui les a poussés à se lancer dans un domaine qui n’est pas directement le leur – la préparation des couleurs – et sur les circonstances dans lesquelles s’est faite la trouvaille. Confrontés quotidiennement aux problèmes liés à l’usage des pigments jaunes courants, ils se mettent à chercher au sein de leur « laboratoire des couleurs » une nouvelle préparation jaune qui satisfasse à toutes les exigences du métier (solidité, beauté, éclat) tout en étant exempte de tous les défauts des autres jaunes. Ils mettent l’accent sur la persévérance dont il leur a fallu faire preuve avant de parvenir au résultat escompté. Seules une « application constante et des expériences multipliées » leur ont permis de faire cette découverte ; c’est « à force de soins et d’expériences multipliées à beaucoup de frais » qu’ils sont parvenus à mettre au point un nouveau jaune, couronnement de tentatives menées durant de longues années. Etablie par tâtonnements successifs dans le secret de leurs ateliers, la formule de ce jaune est d’abord longuement testée en interne : « depuis environ deux ans […] ils l’ont employé avec le plus grand avantage dans leur fabrique ». Arthur et Grenard auraient pu en rester là et se contenter de l’employer dans le cadre de leur production de papier peint.

  • 27 On notera que s’exprime ici, quoique bien timidement, une attention aux maladies professio (...)

14Mais pour obtenir un privilège exclusif de préparation et de commercialisation, reconnaissance officielle des efforts accomplis, ils veulent établir la portée plus large de leur découverte. L’obtention du monopole doit leur permettre de compenser les frais avancés et doit surtout leur garantir de substantielles rentrées financières. Toutefois leur propos élude presque totalement ces aspects pour insister sur les bienfaits que pourront retirer de ce jaune minéral différentes catégories. Ce sont d’abord leurs confrères, qui pourront enfin disposer d’un jaune de qualité. Ce sont ensuite leurs ouvriers, ainsi délivrés de l’emploi quasi obligé de l’orpin, préféré jusque là au stil de grain ou au jaune de Naples en raison de sa plus grande résistance. Mais sa composition éminemment toxique, à base d’arsenic, en rend la manipulation dangereuse, provoquant des maladies auxquelles « il n’est pas rare de les voir succomber»27. Ce sont enfin les autres professions consommatrices de couleurs, en particulier les peintres et artistes, qui trouveront là un produit moins coûteux et de meilleure qualité que les pigments disponibles jusque-là sur le marché.

  • 28 Deyon P. et Guignet P., « The Royal manufacture and economy and technological progress in (...)
  • 29 Arguments repris en tête de l’arrêt leur accordant le titre de manufacture royale le 22 no (...)

15Accéder à leur requête leur paraît une juste reconnaissance des progrès accomplis pour le bien de tous et une faveur accordée à bon droit à une entreprise attachée à faire surgir l’innovation dans sa pratique quotidienne. Leur « étude constante et appliquée des différentes préparations, mélanges et autres manutentions » dans le domaine de la couleur leur a permis d’élaborer non seulement ce jaune minéral, mais aussi « une infinité de découvertes très utiles à leur fabrication », en particulier des laques. Un pouvoir avisé se doit d’encourager ce souci constant des améliorations possibles, des progrès accessibles grâce à un travail qui reste le plus souvent dans l’ombre et qui est présenté non comme le fait d’un individu, mais des efforts du groupe habilement guidé par l’entrepreneur. Car l’entreprise travaille ainsi au succès de la branche, et plus largement à la prospérité générale. L’ampleur des perspectives brossées par les deux solliciteurs contraste avec la modestie de la trouvaille. Elle éclaire bien la conviction que l’accumulation de menues avancées en matière de bagage technique contribue, tout autant que les ruptures spectaculaires, au bien général. Et cette patiente accumulation d’innovations au sein de ce qui est devenu une entreprise de premier plan, figure en bonne place dans l’exposé des motifs en tête de la requête pour obtenir le très convoité titre de manufacture royale28. Les ateliers dirigés conjointement par Arthur et Grenard s’enorgueillissent de « l’invention des papiers à l’imitation de la sculpture et de l’architecture », de la « découverte d’une nouvelle couleur jaune », signes tangibles de la politique d’excellence qui y est menée29.

Les prémices d’une formation du regard

  • 30 Dès le 7 septembre 1775, la Gazette des arts et métiers s’appuie sur l’exemple des papiers (...)
  • 31 Attroupement au faubourg Saint-Antoine, 28 avril 1789, d’après un dessin de Veny et Girard (...)

16Recherchées pour leurs avantages institutionnels et économiques, ces marques de distinction délivrées par l’Académie et par le pouvoir royal assurent une solide notoriété aux heureux élus, qui peuvent en attendre d’intéressantes retombées commerciales. Les considérations flatteuses des deux commissaires de l’Académie pour les papiers perfectionnés par Arthur trouvent assez vite un écho dans la presse30. L’écrit n’est pas seul mis à contribution pour tirer le plus grand parti d’un titre, celui de manufacture royale, considéré comme le juste aboutissement d’une carrière exemplaire. Accordée à l’issue de patientes démarches, cette reconnaissance d’un niveau de qualité particulièrement élevé conserve un poids considérable aux yeux du public. Les manufacturiers en font donc état sur tous les supports possibles, en particulier visuels. Le titre tant convoité peut être gravé dans la pierre, sous la forme des armes du Roi. Sur la porte principale de la manufacture d’Arthur et Grenard, située dans la partie du bâtiment en pan coupé à l’angle de la rue Louis-le-Grand et du boulevard ; au-dessus de la principale porte du vaste ensemble occupé par l’entreprise Réveillon, rue de Montreuil. Les armes de Sa Majesté, accompagnées de l’inscription « Manufacture royale de papiers peints et veloutés », figurent en bonne place sur l’une des nombreuses représentations des émeutes d’avril 178931. La mise en image des attroupements devant l’établissement de Réveillon souligne le caractère imposant des murs d’enceinte et l’aspect majestueux de la porte ornée de l’écu aux trois fleurs de lys surmonté de la couronne.

  • 32 Successeurs des fondateurs Arthur et Grenard.
  • 33 CHAN, T/183, facture du 13 avril 1790.

17L’utilisation de ce type de signe iconographique dans leurs papiers commerciaux contribue en outre à l’image flatteuse que ces grandes entreprises veulent donner d’elles-mêmes. Ainsi ce même symbole de la protection royale forme le cœur du groupe allégorique qui orne les factures à en-tête imprimé de l’entreprise Arthur fils et Robert32. L’inscription « Manufacture Royale de Papiers pour Tentures et Décorations des sieurs Arthur et Robert, rue de Louis le Grand au coin du boulevard » est distribuée de part et d’autre de deux figures féminines avec bouclier, rameau, caducée ou couronne, figures accoudées à l’élément central qui rappelle la prestigieuse distinction : l’écu aux fleurs de lys entouré des colliers des décorations de l’ordre de Saint-Michel et de l’ordre du Saint-Esprit, surmonté d’une imposante couronne33.

  • 34 L’annonce de 1781 dans le journal des Annonces, affiches et avis divers signale qu’« on pe (...)
  • 35 Annonces, affiches et avis divers, n° 142, 22 mai 1806.
  • 36 Journal de Mme Cradock, voyage en France (1783-1786), traduit d’après le manuscrit origina (...)

18Il est enfin une autre manière d’inscrire visuellement dans l’espace de l’entreprise la valorisation des innovations et réussites techniques patiemment engrangées. Les fabriques soucieuses d’accueillir agréablement les visiteurs et clients prennent la peine d’aménager confortablement leurs boutiques. Celles qui souhaitent attirer plus précisément l’attention du public sur leurs réalisations les plus novatrices ou les plus frappantes ne s’en tiennent pas là et expérimentent de véritables mises en scène. L’exposition en vraie grandeur des papiers les plus aboutis doit susciter l’enthousiasme du visiteur, séduit par l’effet spectaculaire obtenu dans des pièces spécialement conçues pour la démonstration visuelle. Une telle stratégie, qui exige d’engager des frais et de réserver un minimum d’espace, se retrouve chez au moins trois manufacturiers. Windsor d’un côté qui, pour assurer la réussite commerciale des papiers en arabesque récemment mis au point dans ses ateliers, ne compte pas seulement sur les avis dans la presse, mais propose aux curieux de venir se faire une idée par eux-mêmes des mérites de sa production34. Vingt ans plus tard, de tels aménagements paraissent toujours une forme de spectacle technique remarquable, du moins c’est l’idée que veut faire passer l’annonce des fabricants Jourdan et Villard. Revendiquant indûment une exclusivité qui doit allécher le public, ils annoncent l’ouverture « d’un magasin unique en son genre. On y voit les tentures ornées de leurs lambris et bordures, et on peut juger d’un coup d’œil l’effet qu’elles produisent, comme si elles étaient posées dans un appartement»35. De fait, le témoignage conservé émanant d’une visiteuse confirme le pouvoir de séduction exercé par ces espaces de démonstration. Le récit que Mme Cradock fait de sa visite de l’entreprise d’Arthur et Grenard s’arrête significativement sur la première étape d’un parcours apparemment bien rodé36. Elle rapporte dans son Journal l’impression ressentie lorsque, de l’espace de vente proprement dit, elle passe dans les deux pièces suivantes, aménagées pour frapper l’œil. La première, « entièrement tapissée de papier » et dont le plafond rappelait un cadre en bois avec un ciel nuageux au milieu, tout autant que la seconde, plus petite, « tapissée en compartiments, [où] les moulures ressemblent, à s’y méprendre, à du bois sculpté et doré, et [où] quelques cadres reproduisent admirablement le verre » soulèvent des commentaires très élogieux. Ces pièces font l’éclatante démonstration des prouesses imitatrices des papiers imprimés chez Arthur et Grenard en même temps que de la virtuosité de la pose réalisée par les colleurs de l’entreprise.

  • 37 Les sources n’ont rien révélé des circonstances et du contexte précis dans lequel ce dessi (...)
  • 38 Selon toute probabilité, c’est cet architecte peu connu qui est l’auteur de cette coupe. S (...)
  • 39 Nicolas Pierrot achève sous la direction de Denis Woronoff des recherches de doctorat sur (...)

19Ornements gravés dans la pierre, papiers commerciaux, pièces de démonstration s’adressent à un public le plus large possible. Ces mises en scène visuelles de l’excellence et de l’inventivité de l’entreprise s’inscrivent clairement dans une stratégie où soigner sa réputation passe par des moyens de nature publicitaire. La cible visée par la représentation en coupe de la manufacture Arthur et Grenard est nettement plus incertaine. Ce document iconographique remarquable à plus d’un titre se présente indéniablement comme une célébration de la manufacture37. Signé « Moette architecte », ce dessin aquarellé de bonne dimension est probablement réalisé courant 1788 par l’architecte Jean-Baptiste-Philibert Moitte38. Prenant la forme d’une habile recomposition, le dessin atteste d’une réelle connaissance de l’entreprise et de son activité. S’il est l’un des rares exemples conservés de représentation du travail au sein d’une fabrique du XVIIIe siècle, ce dessin procède à une relative stylisation des lieux39. Accentuant la verticalité du bâtiment principal, il répartit sur six niveaux les divers ateliers de fabrication, tout en en respectant globalement la succession et les dimensions.

  • 40 Moitte fait en particulier disparaître toutes les installations de rangement des planches (...)
  • 41 Ce qui ne correspond guère à ce que l’on sait par ailleurs de l’encombrement et du désordr (...)
  • 42 Rosseti Gabriel N., La fabrique d’indiennes des frères Wetter, 1764, Orange, Musée municip (...)

20Les caractéristiques essentielles de ces locaux sont efficacement exprimées – de larges espaces ouverts pour laisser circuler l’air ; de grandes baies pour garantir une bonne luminosité ; l’alignement des tables pour traduire la longueur des pièces – mais l’auteur choisit de dégager au maximum l’espace : les murs sont nus40, les planchers parfaitement dégagés41. Une bonne lisibilité d’ensemble est recherchée et les différentes étapes du processus de fabrication sont représentées avec une certaine distance. Privilégiant l’impression de masse plutôt que le traitement détaillé de chaque poste de travail, il s’attache toutefois à représenter exactement les gestes observés dans l’entreprise. On peut noter le caractère mixte des techniques d’impression : au maillet pour les papiers courants, à la presse à levier pour les papiers tontisses. Les étapes préalables à l’impression proprement dite – confection des rouleaux par raboutage des feuilles ; fonçage ; lissage – sont représentées dans les étages supérieurs tandis que la préparation des couleurs, avec ses moulins à broyer et les chaudières, occupe le rez-de-chaussée. Est-ce à la demande de son commanditaire, Moitte s’en tient aux espaces de fabrication et laisse de côté tout ce qui se rapporte à l’encadrement et à l’administration. Les ouvriers sont apparemment livrés à eux-mêmes et on est frappé par l’abscence des manufacturiers. À titre de comparaison, le directeur de la fabrique d’indiennes Wetter et Cie, à Orange, figure en bonne place dans les panneaux exécutés par Rosseti en 1764-176542. On sait que ces derniers furent conçus pour orner les murs du salon de la maison du directeur. On peut supposer que la coupe de Moitte devait être placée sur les murs du bureau du fondateur, montrée aux visiteurs et aux principales relations d’affaire des manufacturiers, dans une forme de célébration de l’entreprise plus que de son créateur.

21Dans un domaine comme celui du papier peint, où nul procédé chimique délicat n’intervient, où il n’est besoin d’aucun équipement compliqué, les progrès apportés au processus de fabrication, les améliorations accumulées au sein des ateliers relèvent plus de ce que l’on peut appeler l’invention ordinaire que de la grande invention. Une fois les techniques de l’impression à la planche de bois fixées vers le milieu du XVIIIe siècle, nul bouleversement n’intervient dans les méthodes de travail avant l’adoption de la mécanisation dans la deuxième moitié du siècle suivant. Toutefois, les entrepreneurs qui s’emploient à entretenir et renouveler la demande jugent habile d’utiliser la carte de l’innovation et de la nouveauté pour se distinguer de leurs concurrents. Thématique de choix des discours publicitaires relayés par la presse, l’invention se rapporte éventuellement aux gestes et procédés techniques, mais essentiellement aux produits conçus pour stimuler la curiosité du public. Quel que soit le canal emprunté par ce discours et quelle que soit la stratégie adoptée par l’entrepreneur, on retrouve des termes bien connus de l’historien des techniques et de l’innovation, tels que « secret », « nouveauté », « invention ». Cette apparente continuité avec les périodes antérieures ne doit pas tromper : les mots demeurent, mais leurs référents évoluent. L’un des signes de la réussite économique est toujours la capacité à améliorer, à innover. Mais dans un secteur voué au superflu, à l’ornement et à la mode, cette capacité s’exerce bien plus sur les produits que sur les techniques.

Notes

1 L’apparition de ce nouveau bien de consommation sur le marché parisien et la formation du milieu professionnel qu’elle induit ont fait l’objet de mes recherches de doctorat. Velut C., Décors de papier. Production, commercialisation et usages des papiers peints à Paris, 1750-1820, thèse de l’Université de Paris I sous la direction de Daniel Roche, 2001. De nombreuses illustrations sont publiées dans : Velut C., Décors de papier. Production, commerce et usages des papiers peints à Paris, 1750-1820, Paris, Monum/Editions du patrimoine, 2005. Sur la commercialisation, on peut consulter Velut C., « Le monde intérieur de la boutique : les boutiques de papiers peints à Paris, 1750-1820 », dans Coquery N. éd., La boutique et la ville, Commerces, commerçants, espaces et clientèles, XVIe-XXe siècles, Actes du colloque des 2-4 décembre 1999, Université François-Rabelais de Tours, Tours, CEHVI, 2000, p. 277-294. Sur l’implantation des entreprises, on peut lire Velut C., « L’industrie dans la ville : les fabriques de papiers peints du faubourg Saint-Antoine (1750-1820) », Revue d’histoire et moderne et contemporaine, n° 49-1, janvier-mars 2002, p. 115-137.

2 Roche D., La France des Lumières, Paris, Fayard, 1993.

3 On réserve ici le terme de papier peint aux décors à base de papier dont le motif est imprimé à l’aide de planches de bois gravées en relief, sur la surface d’un rouleau de papier dont la couleur de fond a été préalablement posée à la brosse.

4 Feyel G., L’annonce et la nouvelle : la presse d’information en France sous l’Ancien Régime, 1630- 1788, Oxford, Voltaire Foundation, 2000.

5 Les sondages dans des journaux tels que les Annonces, affiches et avis divers, le Journal de Paris ou l’Avant-Coureur ont permis de constituer un bon corpus de notices qui hésitent entre information et publicité.

6 Véronique Sarrazin, qui a étudié ce genre éditorial, a bien mis en évidence comment les almanachs s’emploient à délivrer des informations pratiques et commerciales, sous la forme d’annuaires commerciaux, de guides « à l’usage des voyageurs et de commerçants », voire des simples curieux, etc., voir Sarrazin V., Les almanachs parisiens au XVIIIe siècle : production, commerce, culture, thèse de doctorat de l’Université de Paris I, sous la direction de Daniel Roche, 1997.

7 Cabinet des modes, février 1786, cité par Coquery N., De l’hôtel aristocratique aux ministères : habitat, mouvement, espace à Paris au XVIIIe siècle, thèse de doctorat de l’Université de Paris I, sous la direction de Daniel Roche, 1995, p. 120.

8 Windsor, anglais d’origine, débute vers 1770 sa belle carrière parisienne en s’installant dans un des hauts lieux de la vie commerciale de la capitale, le préau de la foire Saint-Germain.

9 Les sondages le font apparaître à quatre reprises dans les journaux et dans autant d’almanachs différents.

10 Journal de Paris, n° 164, 13 juin 1779, rubrique « Arts ». Ce sont des papiers à personnages inspirés de la sculpture antique.

11 Selon une logique qui fait pencher l’intitulé de la rubrique « Arts » du côté des arts libéraux.

12 Journal de Paris, n° 204, 22 juillet 1780, rubrique « Arts ».

13 Il s’agit de papiers imitant toute la gamme des ornements sculptés de rigueur dans les intérieurs.

14 Annonces, affiches et avis divers, n° 120, 30 avril 1781, rubrique « Annonces ».

15 Ce souci du détail peut paraître exagéré, mais il vise à éviter des ratés dans les effets d’ombre au moment de la pose.

16 Annonces, affiches et avis divers, n° 305, 1er novembre 1781.

17 Hahn R., L’anatomie d’une institution scientifique, L’Académie des sciences de Paris, 1666-1803, Bruxelles, Ed. des Archives contemporaines, 1993 (1ère édition Berkeley, 1971).

18 L’Académie fait ainsi office de « tribunal officiel des inventions soumises au pouvoir », selon l’expression de Roger Hahn.

19 Archives de l’Académie des sciences, procès-verbaux des séances, 31 janvier 1770.

20 Les deux commissaires, Fougeroux et Brisson, n’hésitent pas à mentionner les « tentatives infructueuses », les essais répétés.

21 Selon eux ces tapisseries de tonture de laine sont « infiniment plus belles et plus parfaites » que leurs concurrentes ordinaires.

22 Archives de l’Académie des sciences, procès-verbaux des séances, 19 août 1775.

23 Cet argumentaire figure en tête de l’arrêt qui leur accorde le monopole de fabrication et de vente de cette nouvelle couleur.

24 Bondois P.-M., « L’organisation industrielle et commerciale sous l’Ancien Régime : le privilège exclusif au XVIIIe siècle », Revue d’histoire économique et sociale, XXI, 1933, p. 140- 198. Hilaire-PérezL., L’invention technique au siècle des Lumières, Paris, Albin Michel, 2000.

25 Archives de l’Académie des sciences, procès-verbaux des séances, 29 mars 1786.

26 Exemple de la pluralité des procédures d’examen soulignée par Hilaire-Pérez L., « Les examens d’invention au XVIIIe siècle », dans Brian E. et Demeulenaere-DouyèreC., Règlement, usages et science dans la France de l’absolutisme, Actes du colloque des 8-10 juin 1999, Paris, Ed. TEC & DOC, 2002.

27 On notera que s’exprime ici, quoique bien timidement, une attention aux maladies professionnelles et le souci de les limiter, lorsque cela est possible.

28 Deyon P. et Guignet P., « The Royal manufacture and economy and technological progress in France before the Industrial Revolution », Journal of European Economic History, IX, 1980, p. 611- 632.

29 Arguments repris en tête de l’arrêt leur accordant le titre de manufacture royale le 22 novembre 1788, CHAN, E*/1669/B, Conseil des finances.

30 Dès le 7 septembre 1775, la Gazette des arts et métiers s’appuie sur l’exemple des papiers fabriqués par Arthur pour illustrer un long article sur la « dominoterie ou papier pour ameublement ». C’est l’occasion pour le rédacteur de reprendre presque in extenso le rapport originel.

31 Attroupement au faubourg Saint-Antoine, 28 avril 1789, d’après un dessin de Veny et Girardet, gravé par Lépine et C.Niquet, Bibliothèque de l’Institut d’histoire de la Révolution.

32 Successeurs des fondateurs Arthur et Grenard.

33 CHAN, T/183, facture du 13 avril 1790.

34 L’annonce de 1781 dans le journal des Annonces, affiches et avis divers signale qu’« on peut voir chez lui un appartement tendu de cette manière ».

35 Annonces, affiches et avis divers, n° 142, 22 mai 1806.

36 Journal de Mme Cradock, voyage en France (1783-1786), traduit d’après le manuscrit original et inédit par Delphin Balleyguier O., Paris, Perrin, 1896, p. 72.

37 Les sources n’ont rien révélé des circonstances et du contexte précis dans lequel ce dessin a été commandé par les entrepreneurs et réalisé. On est donc contraint à s’en tenir à des hypothèses d’interprétation.

38 Selon toute probabilité, c’est cet architecte peu connu qui est l’auteur de cette coupe. Ses liens avec les deux manufacturiers commanditaires restent toutefois indéterminés.

39 Nicolas Pierrot achève sous la direction de Denis Woronoff des recherches de doctorat sur « Les images de l’industrie en France, peintures, dessins, estampes, vers 1760-vers 1890 ».

40 Moitte fait en particulier disparaître toutes les installations de rangement des planches comme des rouleaux.

41 Ce qui ne correspond guère à ce que l’on sait par ailleurs de l’encombrement et du désordre relatif qui sont de règle dans les lieux de travail.

42 Rosseti Gabriel N., La fabrique d’indiennes des frères Wetter, 1764, Orange, Musée municipal. Reproduction de « l’atelier de satinage », l’un des cinq éléments de la fresque, dans Woronoff D., Histoire de l’industrie en France, du XVIe siècle à nos jours, Paris, Seuil, 1994, p. 100.

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