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Faïence fine et porcelaine

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Jean-Michel Minovez

Ouvriers et entrepreneurs de la faïence fine et de la porcelaine

Léon Arnoux chez Minton

Bernard Bumpus

Note de l’éditeur

La traduction finale de ce texte est due à Alain Bellecourt.

Note de l’auteur

Le texte de la communication sur laquelle se base le présent article a été traduit en français et lu au colloque par Madame Tamara Préaud, archiviste de la manufacture nationale de Sèvres. Je lui suis très reconnaissant pour son interprétation précise et éloquente de mon manuscrit et pour ses avis sur divers points de détail. J’aimerais également lui exprimer ma gratitude pour les facilités de travail offertes dans ces archives et pour la générosité témoignée aux chercheurs.

Texte intégral

  • 1 M. Digby Wyatt, « On the Influence Exercised on Ceramic Manufacturers by the Late Mr. Herbert Minto (...)

1« Un gentleman qui avait depuis longtemps la réputation d’en savoir plus long sur la production de la céramique et ses mystères qu’aucun autre savant en France ». Ainsi Sir Matthew Digby-Wyatt1, designer et architecte Anglais de renom, évoque-t-il Léon Arnoux. Ce qui atteste de la grande réputation dont jouissait Arnoux à son arrivée en Angleterre en 1849 (ill. 1).

2A ne pas en douter, les raisons qui à cette époque l’amenèrent à s’y rendre étaient de plusieurs ordres : problèmes – entre autres financiers – auxquels la manufacture Fouque-Arnoux était en butte, état de la France avec ses incertitudes, désir de voir de ses yeux l’industrie céramique anglaise.

  • 2 Llewellynn Jewitt, The Ceramic Art of Great Britain, London, 1878, vol. 2, p. 194. Cité aussi par M (...)

3L’appellation collective de The Potteries désigne Stoke-on-Trent et les cinq localités qui l’entourent. Stoke, au centre de l’Angleterre, est la capitale de l’industrie céramique. C’est donc là que se rendit Léon Arnoux, muni d’une lettre d’introduction d’un certain Evans, de chez les marchands de couleur Evans et Askin2. A Stoke il rencontra Herbert Minton, propriétaire d’une des manufactures céramiques les plus prospères du pays, avec qui il se lia bientôt d’amitié. Herbert Minton était un homme riche, volontaire et qui allait de l’avant. Il avait par exemple réussi à mettre au point une gamme de carreaux de sol encaustiques incrustés, sans se laisser décourager par nombre de premiers essais infructueux, et un coût de revient de plus en plus élevé. Arnoux bien sûr avait dû apprendre cela avant de faire sa connaissance. Minton avait également beaucoup de succès avec son Parian, porcelaine tendre mise au point depuis peu, que l’on utilisait à grande échelle pour la production de sculptures en biscuit. Ces nouveautés ont certainement attiré l’intérêt d’Arnoux, tout comme sa réputation de savoir faire en tant que céramiste, ingénieur et artiste devait plaire à l’esprit novateur d’Herbert Minton.

  • 3 G.W. and F.A. Rhead, Staffordshire Pots and Potters, London, Hutchinson, 1906, p. 127.

4C’est d’abord à cause de ses connaissances dans le domaine des porcelaines à pâte dure qu’un poste fut proposé à Arnoux. Herbert Minton faisait des essais sur une porcelaine grand feu utilisable en laboratoire, et aussi résistante à l’acide que la porcelaine de Meissen. Il est certain que lui proposer de continuer ces essais doit lui avoir paru intéressant. Il accepta, et son épouse et sa famille vinrent bientôt le retrouver. A l’arrivée d’Arnoux, Minton était déjà une affaire prospère. Pourtant c’est « à compter de celle-ci que Minton va acquérir une véritable célébrité3 ».

5Arnoux n’était pas le premier citoyen français à travailler chez Minton. Parmi ses collaborateurs de l’époque figurait le sculpteur Pierre-Emile Jeannest, qui faisait aller de pair son travail dans l’entreprise et celui de professeur de modelage à l’école d’arts appliqués de la ville. Jeannest jouissait d’une grande réputation en Grande Bretagne, la reine Victoria possédant plusieurs de ses bronzes.

  • 4 On ne sait pas au juste quand Arnoux prit le titre de directeur artistique. Dans les années 1860, s (...)
  • 5 M.L. Solon, Léon Arnoux 1816-1902, p. 5, tiré de The Staffordshire Advertiser, 6 Sept. 1902.

6Herbert Minton avait coutume de faire le tour de son entreprise tous les jours, et il demanda à Arnoux de l’accompagner. Très vite les avis et les conseils techniques d’Arnoux lui firent si grosse impression qu’il lui proposa le poste de directeur artistique4. C’était là une fonction bien dans les cordes d’Arnoux. Quoique ingénieur de formation, son goût le portait à l’artistique. Etudiant à Paris, il avait étudié la peinture sur porcelaine, on suppose au magasin de la Manufacture Royale de Sèvres, grâce à l’autorisation d’Alexandre Brongniart, le directeur de Sèvres, ami de son père5.

  • 6 L. Arnoux, « Miscellaneous Pottery », Official Reports on the London International Exhibition 1871, (...)

7Arnoux parvint à mettre au point une porcelaine dure qui résistait aux tests les plus poussés, mais celle-ci était difficile à produire dans les conditions de l’Angleterre. Aussi choisit-t-il de faire porter ses efforts sur l’amélioration des différentes pâtes déjà utilisées chez Minton, y compris le Parian. Mais les plus grandes nouveautés qu’on lui doive à l’époque sont les objets en majolica et en Palissy. La majolica, inspirée de maiolica, la faïence Italienne de la Renaissance, se caractérisait par des peintures à la main sur émail blanc opaque, appliqué sur un tesson de faïence (ill. 2). Les pièces en Palissy, en revanche, étaient le plus souvent décorées à l’aide d’une gamme d’émaux transparents colorés par oxydes métalliques, directement posés sur des tessons couleur terre, à grain très fin (ill. 3). C’est encore à Arnoux que l’on devait ces derniers. Certains de ces objets étaient effectivement modelés à la manière du céramiste français du XVIIe siècle. Mais c’était plutôt à la technique qu’au style que le nom correspondait. Les années passant, la composition des pâtes évolua, et la différence entre les deux céramiques s’estompa. Dès 1871 une note d’Arnoux affirme : « en Angleterre, l’habitude gagne d’appeler toute pièce habillée d’un émail coloré majolica6 ».

  • 7 « The Great Exhibition 1851. Reports of the Juries on the Subjects to the Thirty Classes into which (...)
  • 8 Ibid.

8Minton exposa un certain nombre d’objets en majolica, pour la plupart des articles de jardin à décor renaissance, à la grande exposition de Londres en 1851. Le jury international tout en faisant l’éloge de Minton, « au tout premier rang des exposants anglais pour l’abondance, la variété et la beauté de sa production », décerna une mention spéciale à ces articles en majolica, les décrivant comme « remarquables à la fois par leur virtuosité technique et l’originalité et la beauté de leur facture7 » (ill. 4). Le jury loua également un grand service à dessert Minton « d’une facture originale, exemple remarquable de beauté et d’harmonie des effets8 ». C’est Jeannest qui en avait créé le modèle, mais Arnoux en personne doit avoir été étroitement associé à sa réalisation. Caractéristique originale des milieux de table : l’association de statues de Parian non émaillées et des plats de porcelaine émaillée et peinte à qui celles-ci servaient de support. A coup sûr, c’est à Arnoux que l’on devait cette nouveauté. Ce service fit forte impression, et pas seulement sur le jury. Il plut tant à la reine Victoria en personne, qu’elle en fit l’acquisition pour l’offrir en cadeau à l’empereur d’Autriche (ill. 5).

  • 9 Journal non identifié, 18 Sept. 1851.

9Après le succès de ce service à dessert, lire dans un compte rendu français sur l’exposition que ces modèles n’étaient pas originaux ne doit pas avoir été du goût d’Arnoux. Sa réaction fut immédiate : « le service de table que vous mentionnez est une création tout à fait originale de cette manufacture. Esquissé et composé par un de nos compatriotes résidant en Angleterre (M. Jeannest) il a été entièrement exécuté, sous les yeux de M. Minton et sur son programme, par les artistes tant français qu’anglais qu’il occupe dans sa manufacture… M. Minton serait mal récompensé de la sympathie qu’il a toujours montrée pour notre pays et nos compatriotes si vous n’admettiez ma réclamation9 ».

  • 10 Henry (Sir Henry par la suite) Cole, haut fonctionnaire, était aussi designer et auteur. Ami d’Herb (...)
  • 11 Journal de Cole, entrée du 23 Novembre 1851. Ibid., entrée du 6 Mars 1852. John Bell, sculpteur ang (...)
  • 12 Ibid., entrée du 1er Décembre.

10A la demande de la reine Victoria, c’était le commissaire général de l’Exposition, Henry Cole, qui devait remettre le service à dessert à l’empereur. Cole, qu’Herbert Minton et Léon Arnoux accompagnaient, se mit en route pour Vienne en Novembre10. Le groupe faisant de nombreux arrêts en route, le trajet prit du temps. Le 21 Novembre, ils arrivèrent à Cologne, où le représentant allemand de Minton vint les rejoindre. Deux jours plus tard, les notes de Cole mentionnent : « neige – sommes allés à la cathédrale avec M. Arnoux – très belle musique11 ». A Dresde ils allèrent visiter Meissen en traîneau12 ; c’est pense-t-on la première fois qu’Arnoux voyait cette manufacture célèbre. L’audience avec l’empereur eût finalement lieu le 15 Décembre.

  • 13 Ibid., entrée du 6 Mars 1852. John Bell, sculpteur anglais, fournit de nombreux modèles à Minton.

11Vers 1848, un autre artiste français, le sculpteur Albert Carrier de Belleuse, était venu en Angleterre. Sans aucun doute à l’instigation d’Arnoux, il se retrouva très vite chez Minton. On lui doit plusieurs des œuvres visibles à l’exposition de 1851, entre autres une grande statue de Galathée en terre cuite, de plus de deux mètres de haut. En 1852, il succéda à Jeannest au poste de professeur de modelage à l’école des arts appliqués. Henry Cole, qui à cette époque se rendait fréquemment à la manufacture Minton, note dans son journal : « modèles de Carrier très supérieurs à ceux de Bell13 ». Carrier rentra à Paris en 1855 mais continua de fournir des modèles à Minton et à d’autres céramistes anglais, même après sa nomination au poste de directeur des travaux d’art à Sèvres en 1875. En sus de la contribution de Carrier et de son successeur Hughes Prôtat à la production de Minton, leur travail exerça une influence durable sur les modeleurs anglais locaux. Parallèlement Arnoux passa commande de modèles à des artistes en France, par exemple au sculpteur de Sèvres Jules Klagmann.

  • 14 L. Arnoux, « Ceramic Manufactures, Pottery and Porcelain », Lectures on the Results of the Great Ex (...)

12Après l’exposition de 1851, l’époux de la reine Victoria, le prince Albert, organisa un cycle de conférences à Londres sur différents aspects de l’exposition. C’est à Arnoux que l’on demanda de parler de la céramique à cette occasion, et on l’autorisa à le faire en Français. Sa conférence fût ensuite traduite et publiée en Anglais14 – confirmation supplémentaire du prestige considérable qui était le sien en Angleterre à l’époque.

  • 15 Paris Universal Exhibition 1855. Catalogue of the Works Exhibited in the British Section of the Exh (...)

13La grande exposition internationale suivante eut lieu en 1855 à Paris. Le catalogue officiel mentionne comme objets exposés par Minton : « Porcelaines, biscuits, faïences fines, poteries de terre et de grès émaillées ou vernissées, majoliques. Tuiles unies et tuiles peints15 ».

  • 16 « Monde Industriel », Journal des Expositions Universelles, 9 Août 1855.

14Cet ensemble suscita encore une fois un intérêt considérable, et valut à Minton une grande médaille d’honneur, récompense qu’elle fut la seule entreprise étrangère à obtenir. Une médaille de première classe fut attribuée à Arnoux en personne. Mais ce furent les majolicas de Minton, avec toute la palette d’émaux mis au point par Arnoux, qui produisirent le plus d’effet. En plus des vases y figurait une grande fontaine de plus de quatre mètres de haut. Il y avait aussi une gamme de mobilier de jardin, dont la description disait : « élégants sièges jardin aux dessins et aux formes si variés, et qui, à l’exposition, ont fait la plus grande sensation16 ».

  • 17 Le comte de Nieuwerkerke, Art et pouvoir sous Napoléon III, musée National du Château de Compiègne, (...)

15Parmi les objets en biscuit se trouvait un buste de l’impératrice Eugénie, sculpté par le comte de Nieuwerkerke, l’intendant des Beaux Arts de Napoléon III. En 1854 Arnoux avait envoyé à Nieuwerkerke une lettre lui demandant l’autorisation de reproduire ce buste pour l’exposition. Nieuwerkerke la donna volontiers, ajoutant : « je ne puis qu’être flatté de votre intention et m’empresse de vous accorder le droit de disposer de mon œuvre pour cet objet [… ]17 ».

  • 18 Théodore Deck, mémoire autobiographique ms pour l’Union Centrale, 1869, pages non numérotées. Arch. (...)

16Ce fut après avoir vu la section de céramiques anglaises à l’exposition que Théodore Deck résolut de quitter Mme Dumas à Paris – il occupait une place de contremaître dans sa fabrique de poêles – pour ouvrir son propre atelier. Comme il l’indiqua par la suite : « L’exposition céramique anglaise de 1855 me suggéra l’idée de voir en France une poterie artistique qui manquait complètement18 ».

  • 19 The Illustrated London News, 14 Sept.

17S’il n’est pas fait précisément mention des majolicas de Minton, c’est bien l’exposition de ces pièces qui a eu sur Deck un effet déterminant ; Arnoux en témoigne. Son rapport sur la faïence de Deck à l’exposition universelle de Paris en 1867 spécifie : « Il est de fait que ce fut la sensation créée en 1855 à Paris par l’exposition des majolicas de Messieurs Minton et Compagnie qui a suscité l’avancée, puis développé la production de toute cette faïence d’art19 ».

18La fonction de commissaire pour l’exposition de Paris de 1855 fut à nouveau dévolue à Henry Cole. Etant chargé par les autorités anglaises du rapport officiel, il demanda à Arnoux d’y participer et de rédiger, en français, le chapitre sur les céramiques.

  • 20 Léon Arnoux, Paris Universal Exhibition, Report on Ceramic Manufactures, London, Eyre and Spottiswo (...)

19Ce compte rendu, qui donna lieu à traduction et publication, est plein d’intérêt. Arnoux y écrit au sujet de la poterie exposée : « Porcelaine mise à part, il n’y a dans cette exposition aucune poterie qui se puisse comparer à cette majolica en termes d’originalité de conception autant que d’effet produit (ill. 6). Si le procédé de fabrication n’a rien de nouveau, puisque faisant appel aux techniques des Arabes, de Bernard Palissy et de Luca della Robbia, c’est à Minton que l’on doit d’avoir su les associer – avec pour résultat ces vases tout à fait inattendus qui ont fait sensation chez le public20 ».

  • 21 Ibid. p. 5.

20Il avait auparavant insisté sur la nécessité pour la céramique de faire appel à de bons artistes : « Il y a vingt ans, en dehors de l’enceinte des manufactures royales, la question de l’art ne se posait pas : c’était à des artistes d’un rang très inférieur que les fabriques privées faisaient appel. De nos jours au contraire, grâce à l’impulsion donnée par l’exposition de 1851, ce sont des artistes de tout premier ordre, tout spécialement des sculpteurs, qui coopèrent avec les fabricants. Ceux-ci sont de la sorte à même de produire des objets d’une grande perfection. Les bénéfices de cette assistance mutuelle que se prêtent art et industrie sont maintenant trop bien entrés dans les mœurs pour ne pas perdurer ; il ne nous reste qu’une seule chose à appeler de nos vœux : que les améliorations futures ne manquent pas d’inclure la peinture21 ».

  • 22 Lettre de Lessore à Arnoux, 21 avril 1858.
  • 23 Lettre de Klagmann à Arnoux, 10 mai 1858.
  • 24 G. W. and F. Rhead, op. cit., p. 322.

21Arnoux pensait aux artistes qui avaient reçu une formation de peintre sur céramique, comme celle qu’il avait reçue à Sèvres. C’est d’ailleurs maintenant vers Sèvres et le reste de l’Europe, tout autant que vers les pistes locales, qu’il va se tourner pour recruter au bénéfice de Minton des artistes choisis. Il y avait parmi les candidats Emile Lessore, artiste aux talents variés dont la spécialité était la peinture à main levée22. Mais Lessore avait la réputation d’avoir un caractère difficile, et avant de lui proposer une place, Arnoux demanda son sentiment à Jules Klagmann, le modeleur de Sèvres. La réponse de Klagmann fut plutôt en sa faveur, et de fait Lessore se retrouva chez Minton23. Mais ce recrutement fut un échec et un an plus tard Lessore partit chez Wedgwood, semble-t-il parce ses sautes d’humeur l’empêchaient de s’entendre avec Arnoux24.

22En sa qualité de premier directeur du musée des arts décoratifs de South Kensington (de nos jours le Victoria and Albert Museum), Henry Cole avait le souci d’enrichir les collections d’objets modernes aussi bien qu’anciens. L’avocat et collectionneur Jules Soulages, ami d’Arnoux, venait de quitter Paris pour revenir à Toulouse avec sa riche collection d’œuvres Renaissance. Arnoux savait qu’il avait l’intention de vendre et en informa Cole. Cole alors, sans perdre de temps, entreprit de réunir l’argent. La collection fut achetée pour le musée en 1856, et son exposition attira de nombreux visiteurs. Bien que dispersée dans différentes sections, la plus grande partie de cette collection est encore visible au musée aujourd’hui.

  • 25 C.M. Campbell à Arnoux, 3 avril 1858.

23Herbert Minton mourut en 1858 et ses neveux, Colin Minton Campbell et Michael Daintry Hollins, prirent sa succession. Hollins s’occupait principalement dans l’entreprise de la partie production de carreaux, tandis que Campbell supervisait les autres fabrications céramiques. Comme son oncle Herbert Minton, c’était un homme énergique et entreprenant, et avec lui les relations de bonne entente avec Arnoux continuèrent. A la lettre de condoléances d’Arnoux Campbell répondit en ces termes : « Mon oncle avait pour vous une considération particulière, et c’est en mémoire de lui comme de par l’estime que je vous porte personnellement que j’accorderai toujours du prix à votre amitié25 ».

24Arnoux était constamment à la recherche de nouveautés à ajouter à la gamme Minton. Dans les années 50 l’intérêt était grand pour la mystérieuse faïence à incrustations connue sous le nom de faïence de Saint-Porchaire ou faïence Henri II. Plusieurs fabricants dont Minton firent des reproductions dans le goût de celle-ci, Arnoux ayant débuté ses premiers essais en 1858. Mais cette technique prenait énormément de temps, aussi Arnoux décida-t-il de l’enseigner à un des ouvriers les plus habiles de Minton, Charles Toft. Avec succès : Toft réalisa nombre de pièces de ce type, qui se révélèrent parmi les plus prestigieuses produites par la fabrique (ill. 7). C’est probablement pour Toft qu’a été dessinée l’aiguière portant l’inscription « L. Arnoux Direxit » et datée de fèvrier 1864 conservée au musée Minton (ill. 8).

25Au nombre des autres productions de style Renaissance (ill. 9) dont Arnoux lança la fabrication se trouvent les pièces Della Robbia et les émaux limousins. Soit il s’agissait purement et simplement de copies d’œuvres prêtées par des musées ou des collections privées – la collection Soulages en fournit beaucoup – soit ils ne faisaient que s’en inspirer. A la différence des originaux, les émaux limousins n’étaient pas peints sur cuivre, mais ils cherchaient quand même à en reproduire l’esprit. Les spécimens Minton étaient peints en émaux de relief sur un tesson de faïence ou de porcelaine tendre émaillée, sur fond bleu foncé ou marron.

  • 26 Deck, op.cit.

26En 1861 Campbell et Arnoux se rendirent à Paris pour visiter l’Exposition des arts industriels. C’est à la suite de cette exposition, qui constituait la première tentative de replacer les arts industriels dans le contexte qui était le leur, qu’eut lieu la création de l’Union centrale. Ce qu’y présentait Théodore Deck, et plus précisément l’éventail de plats décorés de main d’artiste, leur fit si forte impression qu’ils allèrent ensuite visiter son atelier. Deck, flatté de cette visite, en fit par la suite état comme argument à l’appui de sa demande de légion d’honneur26.

  • 27 The Art Journal Illustrated Catalogue of the International Exhibition 1862, London, Virtue, 1862, p (...)

27La présentation de Minton à l’exposition internationale de Londres en 1862 est encore une fois exceptionnelle. Selon un témoignage : « L’ensemble réuni rassemble toutes les variétés possibles de productions de l’art céramique ; pas seulement des choses issues par modification ou adaptation de modèles maintenant devenus “classiques”, mais des pièces disons-le – au sens le plus commun du terme – “originales”. Leurs qualités ont fait l’objet de louanges unanimes […]. Dans cette manufacture à juste titre renommée les meilleurs artistes, étrangers tout comme britanniques, ont été sollicités pour la conception et les décors des objets, en même temps s’y sont exercés, en plus des effets d’une très grande expérience, qualité de jugement et sûreté de goût27 » (ill. 10).

28Au nombre des objets exposés figurait une paire de grands vases, chacun de près de deux mètres de tour, modelés par Carrier Belleuse. Mais l’œuvre la plus remarquable ne se trouvait pas dans la présentation Minton elle-même mais dans le grand hall de l’exposition (ill. 11). Il s’agissait d’une fontaine colossale de onze mètres de haut et de douze mètres de diamètre, en pierre et majolica. On peut supposer que c’était Léon Arnoux qui avait impulsé ce projet monumental, comme il était derrière tous les objets montrés.

  • 28 Ambroise Milet, Notice sur D. Riocreux, Paris, Rouam, 1883, p. 55. Milet cite aussi Discry et Halot

29« Toutes les variétés possibles de productions céramiques » dans l’exposition ? L’affirmation, en ce qui concernait un point important, n’était pas exacte. Minton, au grand regret de Campbell et d’Arnoux, ne produisait pas de pâte sur pâte. Le procédé dit pâte sur pâte était apparu à Sèvres aux environs de 1849, sa mise au point rendue possible grâce à des essais antérieurs effectués par d’autres, dont Léon Arnoux en 184428. Arnoux, selon toute vraisemblance, portait un intérêt particulier à cette technique de décoration. On avait vu quelques pièces de pâte sur pâte de Sèvres à l’exposition de 1851 ; par la suite Herbert Minton avait fait l’achat d’une paire de vases, et Henry Cole de même, tous deux peut-on penser sur les conseils d’Arnoux.

  • 29 The Art Journal, op. cit., p. 235.

30Ce procédé de décoration difficile, qui faisait intervenir à la fois l’habileté du sculpteur et celle du peintre, n’était pas encore complètement au point lorsque le jeune Louis Solon fut engagé à Sèvres. Solon, en plus de ses talents de créateur, montra vite un don particulier pour cette nouvelle technique. Il inventa d’ailleurs sa propre variété de pâte sur pâte, qu’il produisait dans son atelier de Sèvres. C’est la boutique d’Eugène Rousseau rue Coquillière qui commercialisait ses œuvres. Rousseau de plus exposa à l’exposition universelle de Londres en 1862, où sa présentation « provoqua l’admiration de tous29 ». Une grande partie des œuvres exposées étaient de Solon.

  • 30 Lettre de Campbell à Arnoux, 5 mai 1862.

31Parfaitement conscient des difficultés liées à la production des décors en pâte sur pâte, Arnoux était décidé à s’assurer le concours d’un artiste possédant l’habileté et l’expérience requises. C’est peut-être à l’exposition de 1862 que lui et Colin Minton Campbell décidèrent que Solon était l’homme qu’il leur fallait. Dans une lettre adressée à Arnoux à Stoke-on-Trent, Campbell écrit après avoir vu l’exposition : « Il y a beaucoup de bonnes choses chez Rousseau30 ».

32En dépit de ses nombreux succès chez Minton, un événement se produisit au cours de l’été 1864 qui provoqua le départ d’Arnoux de la manufacture. Qu’en fut-t-il exactement ? On l’ignore : mais cela était probablement lié à un désaccord à propos de salaire. Il semble toutefois ne pas avoir envisagé un retour en France : on le retrouve en effet très vite en pourparlers avec plusieurs autres fabriques de Stoke-on-Trent. Ceux-ci sans résultats : en Octobre il retourna chez Minton.

  • 31 Illustrated London News, 14 sept. 1867, p. 303.

33Arnoux revint à Paris en 1867 pour l’exposition universelle. A nouveau on lui demanda de rédiger le rapport officiel sur les céramiques, et l’Illustrated London News en publia des extraits. La participation de Sèvres lui inspire ces mots : « le trait le plus frappant dans la salle de Sèvres est la quantité de vases dans cette porcelaine dure appelée pâte sur pâte ». Il en décrit plusieurs et ajoute : « parmi les spécimens les plus réussis il faut faire mention du beau vase à forme antique peint par M. Solon ». Il affirme ensuite : « Le pâte sur pâte de Messieurs Pilliwuyt de Foëcy, Gibus de Limoges, et Rousseau de Paris, n’est que de très peu inférieur à celui de Sèvres31 ». Comme il était le seul artiste à faire du pâte sur pâte pour Rousseau, c’est d’évidence à Solon que s’adressait à nouveau l’éloge. Autre fait révélateur : Colin Minton Campbell faisait maintenant des achats directs de pâte sur pâte à Solon. Mais si Arnoux essayait de le convaincre de venir en Angleterre, ce fut à l’époque sans succès : ceci peut-être parce que Solon était très engagé dans la vie artistique parisienne ; il y avait de nombreux amis au nombre desquels Fantin Latour, Félix Bracquemond et l’écrivain et critique Philippe Burty.

  • 32 Exposition universelle de Paris, 1867. Rapports du jury international, vol. III, Paris, Dupont, 186 (...)

34Comme le rapport du jury international le confirma, l’exposition fut un nouveau succès pour Arnoux et pour Minton : « M. Minton était alors l’initiateur des grands progrès que venait d’accomplir la céramique anglaise ; nous les retrouvons aujourd’hui, non plus en sa personne, mais dans celle de ses successeurs. Les produits sont toujours les mêmes, aussi beaux, aussi grands, aussi bien réussis ; les faïences de jardin surtout méritent aujourd’hui, comme il y a douze ans, les plus grands éloges, et l’on ne peut voir, sans être frappé de leurs mérites, ces grands vases à fond bleu roi, à anses à reliefs, ces coquilles marines de dimensions colossales, dont MM. Minton et Cie ont orné, dans le parc et dans le palais, la section anglaise [… ]32 » (ill. 12).

  • 33 Illustrated London News, 14 sept. 1867, p. 302.

35Les faïences de jardin en effet occupaient une place de choix dans la présentation de Minton ; Arnoux lui-même le souligna : « c’est tout particulièrement grâce à leurs pièces de jardin, pots de fleur et sièges de jardin que la majolica de Messieurs Minton a acquis une telle notoriété33 ». Ces sièges de jardin présentaient une très grande variété, et certains d’entre eux étaient fort originaux – avec entre autres un siège en forme de singe.

  • 34 Ibid. p. 303.

36Minton exposait aussi d’autres faïences : des faïences Henri II, Palissy, et des émaux limousins. Dans ce domaine, plusieurs autres fabricants anglais envoyèrent des pièces en nombre ; pourtant la présentation de Minton les surpassait toutes. En revanche, pour la porcelaine, il n’y eut que Minton et une autre maison anglaise, Copeland, à faire des envois. Comme bon nombre de manufactures françaises, Sèvres en tête, affichaient des porcelaines, on fit à Arnoux la critique que les présentations anglaises ne soutenaient pas la comparaison. Il attira en réponse l’attention sur la haute qualité des œuvres présentées, faisant observer : « dans les productions de Minton et Cie, on a fait passer la richesse au second plan ; le but recherché est davantage d’élégance et de distinction » : affirmation à retenir car exprimant ce qu’il pensait depuis longtemps – selon des opinions probablement conçues alors qu’il était encore en France. Arnoux souligna également les qualités de la porcelaine tendre de Minton qui permettaient au décor peint de « se fondre dans la glaçure, obtenant de la sorte des ombres d’un éclat et d’une transparence extraordinairement limpides34 ». Et Minton en définitive obtint une médaille d’or.

37En Décembre 1869, sa situation chez Minton bien assise, Arnoux obtint son certificat de naturalisation. Ce qu’il avait accompli pour la maison en avait fait une des manufactures céramiques les plus célèbres et les plus prospères au monde.

  • 35 Official Reports, London International Exhibition 1871, Part V, Léon Arnoux, Report on Miscellaneou (...)

38Si Minton se mit à produire de la pâte sur pâte, ce fut la conséquence indirecte de la guerre Franco-Prussienne qui éclata l’été 1870. Arnoux rapporte : « la récente guerre et le siège de Paris ayant dispersé les artistes de pâte sur pâte attachés à la manufacture de Sèvres, Messieurs Minton n’ont pas hésité à s’assurer la collaboration du plus talentueux d’entre eux, M. Solon35 ». Solon était arrivé à Stoke le 19 septembre, peu de temps après avoir obtenu son passeport à Paris. Dès le lendemain il commençait des essais de couleur, et bientôt on le vit au travail sur sa première pièce en pâte sur pâte. Qu’il ait mis si peu de temps prouve que les essais qu’Arnoux avait effectués sur les techniques de pâte en relief, en utilisant de la porcelaine tendre cuite à plus basse température – le Parian de Minton – n’avaient pas étés vains.

  • 36 The Times, 15 mai 1871.

39En fait ces premiers essais furent si réussis que Minton put monter une exposition de pièces en pâte sur pâte à l’exposition internationale de Londres en Mai 1871. L’initiative eut un grand retentissement dans la presse anglaise ; le compte rendu du The Times par exemple commence de la sorte : « Considérant ce que l’industrie céramique produit de plus beau et de plus choisi, peut-être convient-il de mettre au premier rang ce que l’on nomme pâte sur pâte, où les décors sont réalisés en relief, argile sur argile36 ». Suivait, comme dans d’autres journaux, un examen plus détaillé que de coutume de plusieurs des œuvres de Solon (ill. 13).

  • 37 Arnoux, Official Reports, 1871, op.cit., p. 13.

40La rédaction du rapport officiel sur les céramiques échut à nouveau à Arnoux. D’autres contributions ayant cette fois-ci été sollicitées, Arnoux se limita à la section « poteries variées ». Ceci incluait la pâte sur pâte, et s’y ajoutaient plusieurs gammes de nouveautés Minton : le Parian émaillé, les modèles Perses, et « la porcelaine émaillée turquoise », celle-ci une imitation des cloisonnés chinois. Seule la porcelaine anglaise, prétendait Arnoux, permettait d’obtenir ce turquoise ; « sur une porcelaine dure y parvenir est tout simplement impossible37 ».

41En Mai 1871, le mois même de l’ouverture de l’exposition, Solon épousa Marie Antoinette Laure, la fille aînée d’Arnoux. Elle était née à St-Gaudens. Comme il n’y avait guère plus de huit mois que Solon était à Stoke, la conclusion rapide de ce mariage laisse penser que son projet avait été évoqué avant l’arrivée de Solon en Angleterre. Ce mariage se révéla heureux et des neuf enfants du couple – huit garçons et une fille – plusieurs firent des carrières de marque dans l’industrie céramique.

42D’autres émigrés avaient été amenés à Stoke-on-Trent par la guerre Franco-Prussienne. Parmi eux un Parisien, l’artiste céramiste Antonin Boullemier (ill. 14), que Solon avait sollicité, et William Mussill. S’ajoutant aux nombreux artistes de talent déjà employés, ces recrues permirent à Minton de remporter un nouveau succès à Vienne en 1873. Ce fut l’occasion pour Arnoux de montrer les pâte sur pâte de Solon sur le continent pour la première fois, et les réactions furent très favorables. Arnoux en conclusion reçut la Croix de l’ordre de François Joseph.

  • 38 Exposition universelle de Vienne, 1873 : Commission Supérieure française. Rapports, vol. III, Paris (...)
  • 39 Rapports de la délégation ouvrière française à l’exposition universelle de Vienne 1873, Céramistes  (...)

43Le rapport de la commission supérieure française sur l’exposition fut élogieux, faisant observer : « Nous n’avons pas besoin de dire que cette fabrique continue à justifier le rang élevé qu’elle a conquis dans l’industrie céramique38 ». Quant à celui que fit une délégation d’ouvriers de l’industrie céramique de Paris et de Limoges, il était flatteur au plus haut point : « La maison Minton est la plus importante ; elle dépasse de beaucoup les maisons de commerce de Paris ; elle égale la manufacture de Sèvres dans l’application des pâtes rapportées, sur fond céladon, et la dépasse dans certaines pièces dues à son esprit d’initiative39 ».

44Ce rapport faisait aussi l’éloge des pièces Henri II et de plusieurs vases, citant Boullemier et Mussill, sans oublier des formes modelées par Carrier Belleuse.

  • 40 Archives Minton, ms 957.
  • 41 Archives Minton, ms 970. Milet était responsable des fours de grand feu à Sèvres.

45En tant qu’ingénieur, Arnoux avait toujours porté grand intérêt à la conception des fours. Il avait dressé les plans d’un premier prototype avant de quitter la France ; en 1850, son père l’avait fait breveter à son nom. Il entreprit maintenant de dessiner un four susceptible de réduire coûts de construction et encombrement tout en économisant le combustible et réduisant les émissions de fumée. Effectivement en Mai 1873 Minton prit un brevet pour un four de type nouveau, basé sur ses plans, « destiné à la fabrication d’articles de porcelaine et de faïence40 ». Un an plus tard Arnoux et Minton, ayant conclu un accord, lancèrent ce four sur le marché, tous deux se partageant les bénéfices à parts égales. Ce four, appelé four Minton à flamme renversée, se répandit rapidement et on en installa des exemplaires partout en Europe, et jusqu’aux Etats-Unis. Arnoux se rendait quelquefois sur place en personne, généralement pour prodiguer des conseils d’installation ou aider à résoudre les problèmes. Quand cela était en France, de temps à autre Ambroise Milet l’accompagnait41.

  • 42 A.-R. de Liesville, « La Céramique moderne », Exposition universelle de 1878, Les Beaux-Arts et les (...)

46Les années 1870 furent dix ans de grands succès pour la maison Minton, avec en point d’orgue sa présentation à l’exposition universelle de Paris en 1878, qui à nouveau lui valut la plus haute récompense, alors qu’Arnoux était fait Chevalier de la Légion d’Honneur. Si c’était le pâte sur pâte de Solon que l’on remarquait le plus (ill. 15), les éloges s’adressaient à l’exposition Minton dans son ensemble. Un sentiment que traduit bien cette phrase de De Liesville : « La maison Minton est toujours la plus puissante, celle qui a les plus grandes pièces, la production la plus variée, et assurément elle fabrique de belles choses, et des choses difficiles à fabriquer42 ».

  • 43 Adrien Dubouché, « Poteries décoratives », Rapports sur la Céramique, Exposition universelle de 187 (...)

47Quant à Adrien Dubouché, il observe en conclusion dans son rapport officiel sur les céramiques Minton : « Il nous plaît de saluer M. Minton comme un industriel considérable, M. Arnoux comme un administrateur éclairé et dévoué, et l’artiste Solon comme un maître43 ».

48Après ces sommets, la manufacture connut un déclin progressif. Dans les années 80 le commerce devint plus difficile et la concurrence plus rude. La demande pour le pâte sur pâte, grand succès des années 70, diminua ; pour les majolicas également. La santé de Colin Minton Campbell n’était pas bonne, et avant sa mort en 1887 il réorganisa la firme, Arnoux en devenant actionnaire. Il semble que ce soit lui, étant donné le peu d’intérêt qu’y portait le fils de Campbell, qui ait alors pris la direction de la maison (ill. 16).

  • 44 Staffordshire Weekly Sentinel, 9 avril 1892.
  • 45 Ibid.

49Quand cinq ans plus tard, Arnoux annonça qu’il prenait sa retraite, un journal local lui consacra un article illustré, faisant remarquer : « un des grands secrets du brillant succès de M Arnoux réside dans l’étendue de ses connaissances – depuis la technique la plus habituelle jusqu’aux formes de décoration les plus abouties, atteignant au domaine de l’art44 ». Le journaliste concluait : « au nombre des citoyens de Stoke il ne se trouve personne de plus vif, de plus enjoué, et de meilleure disposition que cet artiste potier chevronné45 ». Peu de temps après, il reçut du personnel un cadeau : il y avait des pâte sur pâte, des pièces Henri II et deux plaques peintes par A. Boullemier ; il les avait lui même choisies.

  • 46 La tombe est située au carré 88, rangée 10, au cimetière de Stoke.

50Arnoux vécut encore paisiblement une dizaine d’années. Dans ces dix ans il fut bien sûr heureux de voir l’aîné de ses petit-fils, Léon Solon, faire entrer avec succès Minton dans le vingtième siècle. Il mourut le 25 Août 1902 et fut enterré dans le cimetière de Stoke-on-Trent46. Sur sa tombe (ill. 17), une épitaphe latine :

HIC JACET
JOSEPHUS FRANCISCUS LEO ARNOUX
CONIUX FIDELIS PARENS OPTIMUS
VIR ARTIS FIGULNIAE PERTISSIMUS
NATUS TOLOSAE XXV MARTII MDCCCXVI
OBIIT APUD STOKE XXV AUGUSTI MDCCCCII
R. I. P.

  • 47 The Pottery Gazette, 1er septembre 1902, p. 898.

51Une de ses notices nécrologiques évoque en lui : « l’homme qui a fait le succès de Minton47 ».

52Voilà ce qu’assurément il aurait apprécié.

ill. 1 : Léon Arnoux, photographie de famille peut-être prise vers le moment de son arrivée en Angleterre

(Coll. part.).

ill. 2 : Vase en majolica, décor Renaissance

(Potteries Museum, Stoke-on-Trent).

ill. 3 : Vase Palissy, dit « Continents » vers 1850

(Minton Museum, Stoke-on- Trent).

ill. 4 : Vase à fleurs en majolica présenté par Minton’s à l’Exposition de 1851.

ill. 5 : Pot à crème du service à dessert

(Minton Museum, Stoke-on-Trent).

ill. 6 : Pièce du jardin ornementale en majolica esposée à Paris en 1855 et aujourd’hui au musée des Poteries à Stoke.

ill. 7 : Pièce Henri II par Toft

(Minton Museum, Stoke-on-Trent).

ill. 8 : Dessin d’Arnoux pour un aiguière Henri II, 1864

(Minton Museum, Stoke-on-Trent).

ill.9 : Plat en majolica signé et daté L. Arnoux 1859.

ill. 10 : Ensemble de porcelaines de Minton’s à l’exposition internationale de Londres en 1862 (« Masterpieces of industrial art and sculpture at the international Exhibition, 1862 », selected and described by J.B. Waring. London, Day and Sons, 1863, p. 228).

ill. 11 : Fontaine gigantesque, exposition internationale de Londres, 1862. Elle était composée de 379 morceaux et il fallut plus de deux mois pour l’assembler

(J.B. Waring, 1863, p. 300).

ill. 12 : Grand vase présenté à l’exposition universelle de Paris en 1867. D’après l’Art Journal dont est tirée cette illustration, ce vase fut « généralement » admiré.

ill. 13 : Ensemble de pièces Minton’s, principalement des pâtes sur pâte de Solon, présentées à l’exposition internationale de Londres en 1871

(Art Journal).

ill. 14 : Assiette à dessert peinte par Antonin Boullemier en 1873. Elle faisait partie d’un grand service exécuté pour le mariage du duc d’Edimbourg avec une fille du Tsar Alexandre II

(Minton Museum, Stoke-on-Trent).

ill. 15 : Bouteille en pâte changeante à décor par Solon en pâte sur pâte intitulé « Chiffonière », présenté à l’exposition universelle de Paris en 1878

(Minton Museum, Stoke-on-Trent).

ill. 16 : Léon Arnoux dans son bureau chez Minton’s vers 1885

(Coll. part.).

ill. 17 : La tombe d’Arnoux à Stoke. L’inscription porte :
hic jacet
josephus franciscus leo arnoux
coniux fidelis parens optimus
vir artis figulniae pertissimus
narus tolosae xxv martii mdcccxvi
obiit apud stoke xxv augusti mdccccii
r.i.p.

Notes

1 M. Digby Wyatt, « On the Influence Exercised on Ceramic Manufacturers by the Late Mr. Herbert Minton », Journal of the Society of Arts, 28 Mai 1858, p. 443.

2 Llewellynn Jewitt, The Ceramic Art of Great Britain, London, 1878, vol. 2, p. 194. Cité aussi par Marie-Germaine Beaux-Laffont, Une grande manufacture Pyrénéenne, Aspet 2001, p. 49.

3 G.W. and F.A. Rhead, Staffordshire Pots and Potters, London, Hutchinson, 1906, p. 127.

4 On ne sait pas au juste quand Arnoux prit le titre de directeur artistique. Dans les années 1860, son titre officiel était ‘Art Director and Superintendent of Messrs. Minton & Co.’s Manufactory (Directeur Artistique et Directeur Général de la manufacture Minton et Cie).

5 M.L. Solon, Léon Arnoux 1816-1902, p. 5, tiré de The Staffordshire Advertiser, 6 Sept. 1902.

6 L. Arnoux, « Miscellaneous Pottery », Official Reports on the London International Exhibition 1871, Part V, p. 16, London, 1851..

7 « The Great Exhibition 1851. Reports of the Juries on the Subjects to the Thirty Classes into which the Exhibition was Divided », Class XXV, Report on Ceramic Manufactures, Vol. III, p. 540.

8 Ibid.

9 Journal non identifié, 18 Sept. 1851.

10 Henry (Sir Henry par la suite) Cole, haut fonctionnaire, était aussi designer et auteur. Ami d’Herbert Minton, il fut le premier conservateur du musée de South Kensington (actuellement le Victoria and Albert Museum). Tout au long de sa vie il tint un journal intime, maintenant conservé à la National Art Library (Bibliothèque Nationale des Arts), à Londres. (Collection Cole, 55.cc).

11 Journal de Cole, entrée du 23 Novembre 1851. Ibid., entrée du 6 Mars 1852. John Bell, sculpteur anglais, fournit de nombreux modèles à Minton.

12 Ibid., entrée du 1er Décembre.

13 Ibid., entrée du 6 Mars 1852. John Bell, sculpteur anglais, fournit de nombreux modèles à Minton.

14 L. Arnoux, « Ceramic Manufactures, Pottery and Porcelain », Lectures on the Results of the Great Exhibition of 1851, Second Series, London, 1853, pp. 377-401.

15 Paris Universal Exhibition 1855. Catalogue of the Works Exhibited in the British Section of the Exhibition, London, 1855, p. 75.

16 « Monde Industriel », Journal des Expositions Universelles, 9 Août 1855.

17 Le comte de Nieuwerkerke, Art et pouvoir sous Napoléon III, musée National du Château de Compiègne, catalogue de l’exposition, no 123, 2000, Blanchard, Plessis-Robinson.

18 Théodore Deck, mémoire autobiographique ms pour l’Union Centrale, 1869, pages non numérotées. Arch. Nat. F/ 12/ 5121.

19 The Illustrated London News, 14 Sept.

20 Léon Arnoux, Paris Universal Exhibition, Report on Ceramic Manufactures, London, Eyre and Spottiswood, 1857, p. 7.

21 Ibid. p. 5.

22 Lettre de Lessore à Arnoux, 21 avril 1858.

23 Lettre de Klagmann à Arnoux, 10 mai 1858.

24 G. W. and F. Rhead, op. cit., p. 322.

25 C.M. Campbell à Arnoux, 3 avril 1858.

26 Deck, op.cit.

27 The Art Journal Illustrated Catalogue of the International Exhibition 1862, London, Virtue, 1862, p. 126.

28 Ambroise Milet, Notice sur D. Riocreux, Paris, Rouam, 1883, p. 55. Milet cite aussi Discry et Halot.

29 The Art Journal, op. cit., p. 235.

30 Lettre de Campbell à Arnoux, 5 mai 1862.

31 Illustrated London News, 14 sept. 1867, p. 303.

32 Exposition universelle de Paris, 1867. Rapports du jury international, vol. III, Paris, Dupont, 1868, p. 160.

33 Illustrated London News, 14 sept. 1867, p. 302.

34 Ibid. p. 303.

35 Official Reports, London International Exhibition 1871, Part V, Léon Arnoux, Report on Miscellaneous Pottery, London, 1871, p. 7.

36 The Times, 15 mai 1871.

37 Arnoux, Official Reports, 1871, op.cit., p. 13.

38 Exposition universelle de Vienne, 1873 : Commission Supérieure française. Rapports, vol. III, Paris, Imprimerie Nationale, 1875, p. 17.

39 Rapports de la délégation ouvrière française à l’exposition universelle de Vienne 1873, Céramistes : peinture et fabrication, Paris et Limoges, Paris, Morel, 1874, pp. 27-28.

40 Archives Minton, ms 957.

41 Archives Minton, ms 970. Milet était responsable des fours de grand feu à Sèvres.

42 A.-R. de Liesville, « La Céramique moderne », Exposition universelle de 1878, Les Beaux-Arts et les Arts Décoratifs, vol. 1, Paris, Gazette des Beaux Arts, 1879, p. 418.

43 Adrien Dubouché, « Poteries décoratives », Rapports sur la Céramique, Exposition universelle de 1878, Groupe III, Classe 20, Troisième partie, Paris, Imprimerie Nationale, 1882, p. 94.

44 Staffordshire Weekly Sentinel, 9 avril 1892.

45 Ibid.

46 La tombe est située au carré 88, rangée 10, au cimetière de Stoke.

47 The Pottery Gazette, 1er septembre 1902, p. 898.

Table des illustrations

Légende ill. 1 : Léon Arnoux, photographie de famille peut-être prise vers le moment de son arrivée en Angleterre
Crédits (Coll. part.).
URL http://books.openedition.org/pumi/docannexe/image/40771/img-1.jpg
Fichier image/jpeg, 20k
Légende ill. 2 : Vase en majolica, décor Renaissance
Crédits (Potteries Museum, Stoke-on-Trent).
URL http://books.openedition.org/pumi/docannexe/image/40771/img-2.jpg
Fichier image/jpeg, 23k
Légende ill. 3 : Vase Palissy, dit « Continents » vers 1850
Crédits (Minton Museum, Stoke-on- Trent).
URL http://books.openedition.org/pumi/docannexe/image/40771/img-3.jpg
Fichier image/jpeg, 23k
Légende ill. 4 : Vase à fleurs en majolica présenté par Minton’s à l’Exposition de 1851.
URL http://books.openedition.org/pumi/docannexe/image/40771/img-4.jpg
Fichier image/jpeg, 19k
Légende ill. 5 : Pot à crème du service à dessert
Crédits (Minton Museum, Stoke-on-Trent).
URL http://books.openedition.org/pumi/docannexe/image/40771/img-5.jpg
Fichier image/jpeg, 13k
Légende ill. 6 : Pièce du jardin ornementale en majolica esposée à Paris en 1855 et aujourd’hui au musée des Poteries à Stoke.
URL http://books.openedition.org/pumi/docannexe/image/40771/img-6.jpg
Fichier image/jpeg, 35k
Légende ill. 7 : Pièce Henri II par Toft
Crédits (Minton Museum, Stoke-on-Trent).
URL http://books.openedition.org/pumi/docannexe/image/40771/img-7.jpg
Fichier image/jpeg, 32k
Légende ill. 8 : Dessin d’Arnoux pour un aiguière Henri II, 1864
Crédits (Minton Museum, Stoke-on-Trent).
URL http://books.openedition.org/pumi/docannexe/image/40771/img-8.jpg
Fichier image/jpeg, 42k
Légende ill.9 : Plat en majolica signé et daté L. Arnoux 1859.
URL http://books.openedition.org/pumi/docannexe/image/40771/img-9.jpg
Fichier image/jpeg, 44k
Légende ill. 10 : Ensemble de porcelaines de Minton’s à l’exposition internationale de Londres en 1862 (« Masterpieces of industrial art and sculpture at the international Exhibition, 1862 », selected and described by J.B. Waring. London, Day and Sons, 1863, p. 228).
URL http://books.openedition.org/pumi/docannexe/image/40771/img-10.jpg
Fichier image/jpeg, 56k
Légende ill. 11 : Fontaine gigantesque, exposition internationale de Londres, 1862. Elle était composée de 379 morceaux et il fallut plus de deux mois pour l’assembler
Crédits (J.B. Waring, 1863, p. 300).
URL http://books.openedition.org/pumi/docannexe/image/40771/img-11.jpg
Fichier image/jpeg, 16k
Légende ill. 12 : Grand vase présenté à l’exposition universelle de Paris en 1867. D’après l’Art Journal dont est tirée cette illustration, ce vase fut « généralement » admiré.
URL http://books.openedition.org/pumi/docannexe/image/40771/img-12.jpg
Fichier image/jpeg, 12k
Légende ill. 13 : Ensemble de pièces Minton’s, principalement des pâtes sur pâte de Solon, présentées à l’exposition internationale de Londres en 1871
Crédits (Art Journal).
URL http://books.openedition.org/pumi/docannexe/image/40771/img-13.jpg
Fichier image/jpeg, 22k
Légende ill. 14 : Assiette à dessert peinte par Antonin Boullemier en 1873. Elle faisait partie d’un grand service exécuté pour le mariage du duc d’Edimbourg avec une fille du Tsar Alexandre II
Crédits (Minton Museum, Stoke-on-Trent).
URL http://books.openedition.org/pumi/docannexe/image/40771/img-14.jpg
Fichier image/jpeg, 28k
Légende ill. 15 : Bouteille en pâte changeante à décor par Solon en pâte sur pâte intitulé « Chiffonière », présenté à l’exposition universelle de Paris en 1878
Crédits (Minton Museum, Stoke-on-Trent).
URL http://books.openedition.org/pumi/docannexe/image/40771/img-15.jpg
Fichier image/jpeg, 16k
Légende ill. 16 : Léon Arnoux dans son bureau chez Minton’s vers 1885
Crédits (Coll. part.).
URL http://books.openedition.org/pumi/docannexe/image/40771/img-16.jpg
Fichier image/jpeg, 14k
Légende ill. 17 : La tombe d’Arnoux à Stoke. L’inscription porte :hic jacetjosephus franciscus leo arnouxconiux fidelis parens optimusvir artis figulniae pertissimusnarus tolosae xxv martii mdcccxviobiit apud stoke xxv augusti mdcccciir.i.p.
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Auteur

Spécialiste de la céramique européenne - Londres.

Le texte et les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont sous Licence OpenEdition Books, sauf mention contraire.

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