Arts décoratifs et industrie. L’exemple de la faïence fine et de la porcelaine, milieu XVIIIe-XIXe siècle
p. 9-20
Texte intégral
1Au cours du XVIIIe siècle, on assiste à une expansion des marchés et de nouvelles manières de consommer voient le jour. Quelques produits font, dès cette période, l’objet d’une « consommation en masse ». Les indiennes en sont l’exemple le plus spectaculaire1. Globalement, on finit par assister à une multiplication des objets dont l’accumulation tient aux héritages et surtout au développement de nouveaux modes de consommation. L’apparition puis le développement des classes moyennes accroissent en outre le nombre des consommateurs de produits de luxe et de demi-luxe, surtout en Angleterre. Pour la céramique, le processus concerne d’abord le développement de la faïence stannifère et de la porcelaine. La mutation culturelle dans la consommation de la faïence date du XVIIIe siècle lorsque les ménages la substituent à la vaisselle d’étain. A Paris, au XVIIe et au début du siècle suivant, la vaisselle courante est faite encore de ce métal et les pièces en faïence, même communes, n’apparaissent jamais sur la table avant les années 1720. La céramique n’est pas encore entrée dans le quotidien de la plupart des gens, et les objets en faïence, essentiellement pots, plats et tasses, sont des bibelots d’apparat servant de garniture de cheminée. C’est dans les années 1720-1730 que l’on assiste à une forte croissance de l’usage de la faïence et à la diversification des objets. Après 1750, l’étain est même en voie de disparition2. Ce phénomène observable partout ailleurs connaît cependant des variations dans le temps ; ainsi, à Toulouse, la mutation n’est sensible que dans la seconde moitié du siècle. Pour la porcelaine, on observe le même phénomène à Paris et à Toulouse ; mais le produit ne se répand toutefois que dans les catégories les plus aisées de la population3.
2Car, dans l’échelle des valeurs de la céramique, la porcelaine l’emporte largement pour sa dureté, son homogénéité, sa légèreté, sa blancheur et sa translucidité. La faïence stannifère ne soutient guère la comparaison du fait de sa lourdeur, de son épaisseur, de sa porosité, de sa fragilité, de la variabilité de ses teintes liée à la qualité des argiles qui la composent et qui imposent l’emploi d’une couverte en émail pour donner aux services une certaine homogénéité d’aspect. Cette disparité favorise l’apparition d’un nouveau produit céramique en Angleterre vers 1740-1750 que l’on se permettra de nommer commodément « faïence fine » – mais dont le colloque doit permettre de préciser et de discuter la terminologie afin de faire la part entre les différents produits qui se font jour entre le milieu du XVIIIe et le XIXe siècle. Sous le vocable d’ensemble « faïence fine », on entend tous les produits répondant à l’innovation commune ayant consisté dans le recours à l’emploi d’argiles cuisant blanc – supprimant la contrainte de l’émaillage – associés à du silex calciné qui apportait dureté et sonorité. Même si le produit obtenu ne permettait pas d’atteindre les qualités de la porcelaine, il en donnait du moins l’illusion. Cette céramique n’en restait pas moins une faïence donc non translucide et surtout poreuse. On imagina alors recouvrir le tout d’une glaçure plombifère pour remédier à cet inconvénient. On obtenait ainsi un produit blanc, plus fin, plus léger et plus dur que les faïences stannifères. A partir de 1754, Wedgwood perfectionna la pâte dans des recherches visant à tutoyer la blancheur de la porcelaine. La France n’est pas en reste en matière d’innovation et s’y l’on exclut l’expérience de la faïence de Saint-Porchaire de la seconde moitié du XVIe siècle, c’est au Pont-aux-Choux, à Montereau et à Lunéville que l’on doit les débuts de la fabrication du produit révolutionnaire entre 1743 et 1749. Pourtant, au cours de la seconde moitié du XVIIIe siècle, la production française demeure balbutiante, même si de nouveaux établissements sont créés après 1775. La réussite dans ce domaine est le fait de l’Angleterre et en particulier du Staffordshire ou Josiah Wedgwood crée en 1768 la manufacture Etruria qui ouvre l’ère de la production industrielle de la faïence. Les faïenciers britanniques sont-ils pour autant supérieurs aux Français ? Les émigrants Bagnall, Clark, Garvey, Hall, Hille, Leigh, Show, Warburton ou encore Wood – que l’on retrouve à l’origine de Forges-les-Eaux – ne sont-ils pas là pour le prouver ? A cela on pourra rétorquer que c’est Léon Arnoux, Français, ancien directeur de la manufacture de Saint-Gaudens qui, quelques décennies plus tard, est à l’origine de la célébrité de Minton par son génie dans la mise en adéquation de l’art et de la technique. A sa suite, dans la grande manufacture de Stoke-On-Trent, on ne peut ignorer le rôle clef joué par Louis Solon, ce Montalbanais formé à Sèvres. Cependant, à la fin de l’Ancien Régime, les produits français ne peuvent rivaliser avec ceux d’Angleterre. Cela ne manque pas d’inquiéter les autorités – comme l’enquête des préfets le prouve – et ceux qui sont impliqués dans les fabrications de céramiques. Parmi eux, l’illustre directeur de la manufacture de Sèvres, Alexandre Brongniart, a cherché des solutions en pratiquant des essais de production de faïence fine et en entretenant une importante correspondance avec les manufacturiers français. Cependant, la réalité de la concurrence anglaise signifie-t-elle pour autant que la production française est de moins bonne qualité que la britannique ? Les concurrents d’outre-Manche ne bénéficient-ils pas d’un autre avantage : celui d’un marché de consommation autrement développé ? L’étude des productions françaises et anglaises doit nous permettre de fournir un début de réponse et pour cela nécessite d’envisager l’approfondissement de nos connaissances sur les premiers produits innovants ayant fait l’objet des premières recherches, des premiers essais.
3Mais on ne saurait dissocier la production de la circulation et des marchés qui y sont liés dans la compréhension des phénomènes de croissance ou d’échec. Au milieu du XVIIIe siècle, la population est en attente de nouveaux produits ; pour la céramique, on recherche des objets qui aient les qualités de la porcelaine sans en avoir le prix, toujours prohibitif pour les classes moyennes surtout dans un contexte de maintien d’une production porcelainière de luxe. On peut alors se poser la question de savoir si le développement des classes moyennes, précoce en Angleterre, ne s’est pas traduit par une pression sur le marché provoquant innovation et croissance de la production. Bénéficiant d’économies d’échelle, les Britanniques se seraient alors imposés sur le marché international de la faïence fine, comme ce fut le cas pour les indiennes. Le développement plus tardif des classes moyennes françaises aurait vu alors le phénomène se décaler dans le temps. A retenir cette hypothèse, il reste à en définir la chronologie. Il est frappant de constater que la période de la Révolution et de l’Empire est particulièrement favorable à ce mouvement, même si beaucoup d’expériences finissent par avorter, comme l’enquête des préfets permet de le montrer4. Toutefois, c’est bien entre 1790 et 1798 que naissent Sarreguemines, Villeroy, Chantilly, Creil, Longwy auxquelles il convient d’ajouter Choisy-le-Roi en 1804, certaines étant à l’origine des plus belles réussites industrielles françaises et aussi européennes au XIXe siècle. S’il paraît évident que les classes moyennes ont pu faire pression sur le marché dans la seconde moitié du XIXe siècle5 – favorisant par exemple la croissance de la porcelaine du Berry – il reste à comprendre les raisons de la croissance d’établissements comme Sarreguemines, Creil-Montereau, Bordeaux et Fouque-Arnoux à Toulouse et Saint-Gaudens dans la première moitié du XIXe siècle. Leur expansion est-elle liée au développement antérieur de la demande ? Seule une étude approfondie se fixant comme objectif l’histoire de la consommation au XIXe siècle – qui reste à réaliser – permettrait d’y répondre.
4En l’état actuel de nos connaissances et dans l’attente de la réalisation d’un si vaste projet, un certain nombre de pistes peuvent toutefois être explorées sous l’angle de l’étude de la production, à la fois par une étude des lieux et aussi de celle des objets. Toutefois, l’étude des productions, notamment de la porcelaine, n’est pas sans poser problème. Avec la suppression de l’obligation de marque sous la Révolution, on observe son absence presque systématique dans la première moitié du XIXe siècle. Si on ajoute les grandes similitudes de formes et de décors, les attributions demeurent complexes à effectuer. En outre, la mobilité des ouvriers et des maîtres, le recours à des peintres identiques peut favoriser l’uniformisation des formes et des décors. Ce n’est qu’en pratiquant l’examen critique des productions par dépouillement systématique des sources archivistiques, l’inventaire des marques et des signatures, la création de répertoires des formes et des décors à partir de séries les mieux documentées que l’on devrait pouvoir tenter de reconstituer la gamme des objets fabriqués d’un centre à partir d’une documentation de référence. Un des objets du colloque est justement de réfléchir à la mise en place d’une méthodologie critique d’attribution. Au fond, là aussi le travail est à réaliser.
5Il reste alors à envisager de poser le problème d’une manière globale à travers une approche générale par les lieux de production. Si l’on prend en compte l’ensemble des sites dont il est avéré ou supposé que de la faïence fine a été produite, on constate, qu’à part les créations de la Révolution et de l’Empire, la grande majorité des manufactures a continué à produire de la faïence stannifère. Faut-il voir là un souci de rentabilité, de prudence ou de diversification de la production ? Ne doit-on pas aussi résonner en terme de segmentation sociale et géographique des marchés ? Jusqu’à la révolution ferroviaire, les productions potières ou de faïences stannifères sont protégées par les coûts élevés des transports comparativement à la faible valeur de la production commercialisée. De ce fait, les manufactures locales, pour plusieurs décennies, conservent un public captif à faibles revenus, essentiellement composé de paysans. Il n’en est pas de même des produits de demi-luxe comme la faïence fine et la porcelaine commune, soumis à la concurrence internationale, bénéficiant des effets d’économies d’échelle aux prix permettant de supporter des coûts plus élevés de transport. La concurrence est alors plus rude d’autant que ces objets sont destinés à des populations exigeantes aux goûts changeants.
6Aussi, n’est-il peut-être pas étonnant de constater une adaptation mesurée et étalée dans le temps. Nombre d’établissements demeurent modestes dans le courant du XIXe siècle et n’abandonnent que très progressivement leur fabrication traditionnelle. La faïencerie de Salins en fournit un bon exemple et rejoint en cela ce que l’on avait pu observer pour Castres6. Dans ce dernier cas, l’innovation est même très tardive puisqu’elle ne s’effectue qu’au début du XXe siècle. On rejoint là les essais des ateliers martrais – ici sans lendemain – qui à la même époque se lancent dans une tentative de production de faïence fine. A cette époque, l’industrialisation de la céramique atteint un tel niveau qu’elle menace en effet les établissements traditionnels de poterie ou de faïence stannifère, dans un contexte d’unification des marchés dû au chemin de fer. Dans la fabrication de la faïence fine, comme dans celle de la porcelaine, si des établissements sont encore fort traditionnels, d’autres innovent rapidement ; ainsi Sarreguemines adopte dès 1836 la houille pour chauffer ses fours7, comme Bordeaux en 1851. Dans la fabrication de la porcelaine le nombre de fours augmente, les techniques de cuisson, de la fabrication des pâtes et de la décoration s’améliorent dans le second tiers du XIXe siècle. Le phénomène est aussi sensible dans la faïencerie fine. Le processus d’industrialisation s’accélère ensuite à partir des années 1880 « avec l’emploi des énergies charbonnières et mêmes électriques, des fours à feu continu, des fours à flamme renversée, etc.8 ». Les fabrications en série à moindre coût de produits de qualité intermédiaire auxquelles on aboutit, touchent des marchés de plus en plus larges – comme la porcelaine des Haviland aux Etats-Unis – et ne peuvent que condamner à terme l’existence des manufactures traditionnelles.
7Elles remettent aussi en cause la fabrication de luxe ; car, si la production de pièces exceptionnelles n’est pas abandonnée et représente la vitrine des grandes entreprises aux expositions universelles ou aux expositions de l’industrie, la majorité finit par être représentée par une production massive et très diverse de céramiques d’usage. Les produits sont proposés dans de nombreuses variétés de décors réalisés par impression, au pochoir, au tampon, à l’aérographe. Si les décors au pinceau perdurent, ils ne sont plus que rarement effectués par des artistes mais par de simples peintres ou décorateurs. Toutefois, au sein de cette mutation, le bouleversement le plus important est représenté par l’adoption des décors par transferts imprimés. En effet, alors que le façonnage se mécanise de plus en plus par abandon progressif du tournage au profit du seul moulage par calibrage, le décor reste en grande partie manuel. L’innovation du transfert imprimé a pour effet de permettre d’appliquer des décors de qualité acceptable d’une manière mécanique à des milliers d’exemplaires. La porcelaine ou la faïence fine, par leur blancheur, en fournissent les supports adéquats ; leurs glaçures, par leur transparence, permettent l’application et la protection du décor. Connue dès le milieu du XVIIIe siècle en Angleterre, la technique n’est utilisée que tardivement en France et certaines manufactures de céramique fine ne l’adopteront jamais. Pourtant, elle représente le moyen privilégié d’illustration de la vaisselle d’usage. Pour les historiens, l’étude des services de table offre une source de grande valeur à l’étude de l’imagerie et du goût au XIXe siècle par reconstitution des séries iconographiques ayant inspiré les décors9.
8Cependant, les historiens de l’art ont peu étudié cet art décoratif faisant la part belle à la machine qui reproduit à l’infini des motifs jugés sans âme. Il découle peut-être de ce phénomène le désintérêt porté à ce type de production10. Qualifiée longtemps « d’art mineur », comme le reste des arts décoratifs, la faïence fine portait en elle aussi le discrédit qui touche le produit industriel11. Quant aux historiens, ils ont négligé l’étude de la céramique qu’ils ne considèrent pas appartenir aux secteurs leaders de ce qu’il est convenu de nommer « révolution industrielle ». Or, son étude permet aussi d’analyser les facteurs de la croissance industrielle, d’envisager la complexité des formes d’organisation de la production en mettant en lumière des rythmes divergents dans la transition vers le système « usinier ». Elle permet de se placer dans les problématiques du phénomène d’industrialisation en tant que voie et de réfléchir aux rapports qu’entretiennent France et Angleterre dans ce domaine. Enfin, son étude trouve toute sa place dans notre appréhension de l’expansion des marchés et du rôle initial joué par la demande12.
9Compte tenu du chantier qui reste à ouvrir, il n’est pas question ici d’aborder toutes les questions que pose le sujet. Nous porterons donc, dans un premier temps, notre attention sur les aspects mal connus des débuts de la faïence fine en France. A cet effet on traitera des recherches menées sur sa mise au point technique, aux premiers essais, débouchant au tournant des XVIII et XIXe siècles à une croissance significative des lieux de production. Nous nous intéresserons ensuite au passage, réussi ou non, vers l’industrialisation de la production en réfléchissant aux modalités et aux rythmes. Le caractère révolutionnaire que la faïence fine finit par acquérir tient aux progrès techniques réalisés dans la mécanisation de la production et l’innovation dans les pâtes. Il tient aussi à l’invention du transfert imprimé des décors. Nous nous attacherons ici à faire le point sur les nouvelles recherches portant sur les rapports entre faïence fine et iconographie pour l’éclairage qu’il nous offre sur l’imagerie du XIXe siècle. L’étude de la production de céramique étant indissociable d’une bonne connaissance des objets mêmes, une partie importante des travaux devra s’intéresser aux problèmes d’attribution et de réévaluation des productions porcelainières, en particulier pour la première moitié du XIXe siècle. Enfin, on ne saurait ignorer le rôle déterminant exercé par les acteurs de la production de céramique. Parmi les nombreux aspects que pose le sujet, nous choisirons d’approfondir plus particulièrement les questions touchant à la circulation des hommes, des idées et des savoir-faire.
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Notes de bas de page
1 P. Verley L’Echelle du monde. Essai sur l’industrialisation de l’Occident, Paris, Gallimard, 1997, 713 p.
2 Le travail de synthèse de plusieurs dizaines de mémoires de maîtrises (40) – fondés sur le dépouillement de 2 783 inventaires après décès – effectué par Annick Pardailhé-Galabrun l’avait bien montré : A. Pardailhé-Galabrun, La naissance de l’intime. 3 000 foyers parisiens, XVIIe-XVIIIe siècles, Paris, PUF, 1988, p. 306-307.
3 C. Dousset, « Entre tradition et modernité : les intérieurs toulousains au XVIIIe siècle », Annales du Midi, n° 241, 2003, p. 39-40.
4 M. Dubus et B. Pannequin, La céramique française sous l’Empire à travers l’Enquête des préfets, 1805- 1810, Paris, Réunion des musées nationaux, 1999, 300 p.
5 Les professions libérales (avocats, notaires, médecins), les fonctionnaires (enseignants, employés de l’administration) et les commerçants ont leurs effectifs qui augmentent sensiblement dans la seconde moitié du XIXe siècle, cf. C. Charle, Histoire sociale de la France au XIXe siècle, Paris, Seuil, 1991, p. 180-227.
6 J.-M. Minovez, « De l’Atelier à l’usine : la manufacture de céramique de l’Albinque à Castres, vers 1820-1936 », Les arts du feu : céramique, verre et métaux, Actes du colloque 4 du 127e congrès des Sociétés historiques et scientifiques : Le travail et les hommes, Nancy, Faculté de droit, sciences économiques et gestion, 15 au 20 avril 2002, Paris, CTHS, (à paraître).
7 E. Decker, Sarreguemines au XIXe siècle : la faïencerie Utzschneider, 1790-1914. Contribution à une histoire des goûts et des styles au XIXe siècle, Thèse de doctorat d’histoire de l’art, Université de Nancy, 2001, p. 81.
8 A. Faÿ-Hallé et B. Mundt, La porcelaine européenne au XIXe siècle, Paris/Fribourg, Vilo/Office du livre, 1983, p. 112, 234 et 237.
9 Angélique Amandry a montré la voie dans son travail pionnier : A. Amandry, L’indépendance grecque dans la faïence française du XIXe siècle, Athènes, Fondation ethnographique du Péloponnèse, 1982, 199 p. On constatera en outre – à la suite de Christian Maire – que le formidable répertoire scénographique ainsi créé n’a d’égal que celui produit par les cartes postales à la fin du XIXe et au début du XXe siècle : C. Maire, L’impression sur faïence fine. Histoire, technique, iconographie, Montereau, Les Amis de la faïence fine, Les dossiers de la faïence fine, n° 11, 2001, 20 p.
10 Le produit n’est pas totalement ignoré comme le prouvent les mentions faites dans les ouvrages de synthèse : J. Giacomotti, La céramique. Vol. 3, La faïence fine, la porcelaine tendre et la porcelaine dure, Paris, Flammarion, 1949. Mais les études approfondies font défaut. Il a fallu attendre le travail pionnier et monographique de Maddy Ariès pour que le terrain commence à être défriché : M. Ariès, Creil : Faïence fine et porcelaine, 1797-1895, (1re éd. 1974), 2e éd., Paris, Librairie Guénégaud, 1994, 108 p. On notera que depuis quelques années l’association Les Amis de la faïence fine s’est donnée comme principal objet l’étude de cette production et publie les résultats des chercheurs dans ce domaine dans les Dossiers de la faïence fine. Enfin, on pourra observer que le nouvel intérêt porté à cette production a donné lieu, il y a quelques années, à une publication destinée à un large public : D. Guillemé-Brulon, La faïence fine française, 1750-1867, Paris, Massin, 1995, 138 p.
11 L’exposition de 1969 le prouve bien ; si pour la première fois une manifestation a pour objet exclusif la faïence fine, la date butoir en est fixée à 1820 parce qu’ensuite on entre dans « une conception industrielle de la céramique » – de l’aveu même d’Henry-Pierre Fourest : H.-P. Fourest (sous la dir.), La faïence fine française des origines à 1820 : catalogue de l’exposition de Sèvres-musée national de céramique, 2 juin-27 octobre 1969, Cahiers de la céramique du verre et des arts du feu, Sèvres, Société des amis du musée national de céramique, 1969, 57 p. Au fond, chercheurs et conservateurs restent encore à cette époque essentiellement intéressés par les faïences artistiques et les porcelaines de l’époque moderne : H.-P. Fourest et J. Giacomotti, L’œuvre des faïenciers français du XVIe à la fin du XVIIIe siècle, Paris, Hachette, 1966, 332 p. ; H.-P. Fourest, G. Le Duc, A. Faÿ-Hallé et E. Fontan, Faïences françaises : XVIe-XVIIIe siècles, catalogue de l’exposition aux Galeries nationales du Grand Palais, Paris, 6 juin- 25 août 1980, Paris, Ed. de la Réunion des musées nationaux, 1980, 321 p. Mais le discrédit qui touche la faïence fine comme produit industriel atteint aussi la porcelaine au XIXe siècle ; il faut attendre l’ouvrage d’Antoinette Faÿ-Hallé et de Barbara Mundt pour proposer une première synthèse sur la porcelaine à l’âge industriel : A. Faÿ-Hallé et B. Mundt, La porcelaine européenne au XIXe siècle, Paris/Fribourg, Vilo/Office du livre, 1983, 302 p.
12 Tous les historiens ne l’ont pas ignoré et Patrick Verley a pu souligner le rôle joué par Wedgwood dans la multiplication des produits et dans le changement en matière de consommation : P. Verley, La Révolution industrielle, Paris, Gallimard, 1997, 543 p. Mais le travail reste à réaliser pour la France ; la question est d’importance et Alain Plessis soulignait d’ailleurs l’intérêt qu’il y aurait à mener une telle étude : A. Plessis, « Note critique sur l’ouvrage de Patrick Verley : L’Echelle du monde. Essai sur l’industrialisation de l’Occident », Revue d’Histoire du XIXe siècle, n° 23, 2001, p. 225.
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