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Pouvoirs des familles, familles de pouvoir

 | 
Michel Bertrand

Familles et institutions

Pouvoir local et stratégies des familles dans une petite ville du Sud-Ouest aquitain au XVIIIe siècle (étude du cas de Bergerac)

Michel Combet

Texte intégral

1Située sur la moyenne vallée de la Dordogne, en plein cœur de l’ancienne province du Périgord, dans la généralité de Guyenne, Bergerac, 6 000 habitants vers 1789, offre un cas exemplaire et en même temps singulier de l’étude du pouvoir des familles dans les petites villes du Sud-Ouest aquitain.

  • 1 L’édit de novembre 1771 rétablit les offices supprimés par la réforme de Laverdy et remet (...)

2Place de sûreté protestante de 1598 à 1621, Bergerac est l’ancienne capitale de la Réforme en Périgord. Frappée de plein fouet par la Révocation de l’Edit de Nantes, elle a subi entre 1681 et 1700 les conséquences d’une normalisation autoritaire. L’ancienne bourgeoisie municipale a dû se démettre ou se soumettre, tandis que de nouvelles élites catholiques ont été promues. Par ailleurs, les progrès de l’Etat se conjuguent au XVIIIe siècle avec la mise en sommeil des libertés communales et avec la paralysie progressive du système d’élection au corps de ville. Cette évolution arrive à son terme en 1774, alors que s’applique la réforme de Terray1 : le maire et les 4 consuls, renouvelés par moitié tous les deux ans, sont alors choisis par le pouvoir central dans une liste proposée par son représentant local et selon ses préférences ; le subdélégué de l’intendant est devenu le personnage essentiel d’un dispositif politique qui fait converger les intérêts de l’Etat et ceux d’un petit nombre de familles. Car, le passage par le consulat, même s’il n’est porteur d’aucun privilège exorbitant, représente sinon un enjeu du moins une étape importante dans les stratégies développées par un petit nombre de parentèles.

3La reconstitution de leurs généalogies permet de mesurer leur emprise réelle sur le pouvoir municipal et d’expliquer les stratégies développées, en particulier par la première d’entre elles. Le contexte local dans lequel se joue le jeu des familles et du pouvoir définit les grandes lignes d’un “modèle bergeracois”.

Familles et pouvoir local : étude prosopographique

4Si un jurat sur trois, 32 %, a été précédé dans la carrière par son père, soit de manière concomitante, soit décalée dans le temps, 73 % des 71 individus exerçant une charge entre 1700 et 1790 et 13 des 16 maires ont des liens familiaux étroits avec des hommes qui ont siégé avant eux au consulat. Ils sont issus de six groupes parentélaires fonctionnels fournissant, chacun, au moins quatre jurats.

5Ces groupes familiaux obéissent à des modèles dominants de deux types, lesquels, dans la réalité, ne s’excluent pas l’un l’autre. Les plus structurés sont constitués autour d’une lignée unique non exclusive et renforcée de rameaux collatéraux (type I). Leur cohésion, forte, se trouve renforcée par des mariages entre parents qui viennent périodiquement ressouder les liens de la parentèle. Complexes mais peu nombreux, ils peuvent maîtriser, grâce à des ramifications multiples, les différents lieux de pouvoir pendant de longues périodes. Moins aboutis, d’autres groupes (type II) sont de simples réseaux en étoile dans lesquels un individu assure ponctuellement, par ses liens personnels, la conjonction entre différentes familles consulaires. Il garantit à lui seul la cohésion du groupe, recueillant pour un temps, souvent très limité, l’expérience et la notoriété des différents lignages.

6La définition de ces groupes parentélaires pose la question de leur réalité et de leurs limites : leurs ramifications sont telles qu’ils se rejoignent exceptionnellement par leurs marges. Pour autant, ils définissent eux-mêmes ces limites par le jeu de la sociabilité d’Ancien Régime. Il associe parents et alliés à l’occasion des événements forts qui tissent les solidarités d’une famille et au-delà d’une parentèle. Baptêmes et mariages, surtout, sont les moyens de consolider ou de renouer des liens avec ceux – proches ou lointains parents – qui sont choisis pour parrains, pour marraines, pour témoins, avec ceux enfin qui assistent régulièrement à ces cérémonies. Ils témoignent, par leurs signatures répétées au bas des actes de leur solidarité familiale. D’autres parents, parfois proches, souvent éloignés, en sont toujours absents, absorbés par d’autres systèmes parentélaires qui s’ignorent : l’union, ponctuelle ou non, ne signifie pas l’intégration à la parentèle.

7La reconstitution des généalogies familiales à des fins prosopographiques donne une autre image du pouvoir des familles : inscrit dans la durée, il est aussi polymorphe et trouve une nouvelle lisibilité dans l’existence de réseaux extrêmement ramifiés. La durée effective de leur participation au corps de ville (années de présence cumulées), ainsi que leur longévité politique (dates extrêmes de début et de fin du premier et du dernier mandat), fournissent des indicateurs de leur influence politique réelle, renforcés à l’occasion par l’exercice de la charge de premier magistrat.

  • 2 A.M. Bergerac, Jurades, registres paroissiaux.

LES PRINCIPALES PARENTELES DE JURATS ET LEUR PRESENCE AU CONSULAT, AU XVIIIe SIECLE2

LES PRINCIPALES PARENTELES DE JURATS ET LEUR PRESENCE AU CONSULAT, AU XVIIIe SIECLE2
  • 3 Nous empruntons le terme prégnance au vocabulaire de la psychologie et l’utilisons à la (...)

Mode de lecture du tableau : Les données portées dans la colonne (a) sont obtenues par la somme des années de mandat de chaque jurat membre de la parentèle. Celles de la colonne (d = c - b) représentent la durée de l’insertion de la parentèle dans le groupe des élites qui prend en compte la date de la première entrée au magistrat (b) et la date de la disparition définitive de celui-ci (c).
Lorsque (a) est supérieur à (d) il y a nécessairement cohabitation au corps de ville de deux ou plusieurs membres du même groupe familial et ce en dépit de la règle l’interdisant. Pour des raisons de nécessité celle-ci n’est appliquée de fait que dans le cadre de la proche parenté. La comparaison des colonnes (a) et (d) permet de définir la “prégnance”3 d’une parentèle.

  • 4 Cette présence aux affaires déborde largement le XVIIIe siècle en amont et en aval. Lorsqu (...)

8Ecrasant le microcosme bergeracois, la famille Gontier de Biran et ses alliés distance toutes les autres si l’on considère la charge de premier magistrat et la longévité politique : elle fournit un maire de Bergerac sur deux et se maintient au consulat du début du siècle à 17904, la durée des mandats cumulés de ses membres représentant 85 années. Résistant mieux que les autres à l’usure du temps, elle détient le record de longévité administrative et occupe les charges municipales de manière très dense, puisque théoriquement, près d’un magistrat sur cinq pendant tout le siècle, est issu de ses rangs.

9Seule la parentèle Girard des Gendres et alliés peut supporter la comparaison avec celle gravitant autour des Biran, qu’il s’agisse de son emprise sur le consulat ou du nombre de ses membres lesquels se placent même au premier rang, les Biran conservant la suprématie pour la charge de premier magistrat et pour la durée de l’insertion dans la bourgeoisie municipale. Son influence, moins dominante et visible que celle des Biran, ne lui vaut pas les mêmes inimitiés, voire les mêmes haines. De nature différente, elle vise, dans une stratégie beaucoup plus tournée vers d’autres horizons professionnels et géographiques, à un ancrage dans le microcosme local sans ambition de contrôle. Elle est la seule constituée autour d’une famille de la noblesse, certes toute récente, et comptant dans ses rangs secrétaire du roi et fermier général.

10Parmi les autres parentèles, trois se détachent encore nettement : leurs membres siègent au consulat 28 années au moins et sont très souvent présents dans ses rangs pendant leur période d’insertion. Leur “prégnance” est alors relativement élevée, mais elle ne s’inscrit pas dans la durée. De dimensions beaucoup plus restreintes, elles ne jouent un rôle que pendant une période réduite et égale ou inférieure au demi-siècle, soit qu’elles accèdent tardivement au corps de ville, soit au contraire qu’elles en disparaissent relativement tôt. Il est par ailleurs exceptionnel qu’elles fournissent à la ville son premier magistrat. La plus proche par ses choix et ses stratégies de la puissante parentèle Girard des Gendres est celle des Chanceaulme-Lespinasse-Rivasson. Elle est aussi celle qui s’en rapproche le plus par l’impact réel qu’elle a sur la vie politique locale (28 années de mandat pour 33 années d’insertion). Atypique, la parentèle Bouchon-Delpech de Lamothe représente la seule dynastie marchande qui intègre la dimension politique locale à ses ambitions familiales, au XVIIIe siècle. La dernière, enfin, reste relativement longtemps dans la sphère consulaire, mais sa participation, diluée et épisodique, ne lui confère qu’un poids relativement réduit : 32 années de mandat pour 62 années d’insertion.

11La répartition des places de jurats correspond à un équilibre entre les parentèles acceptables pour la formation du corps de ville, complétées à l’occasion par des individus isolés, alliés ou clients des unes ou des autres, en fonction de la parentèle dominante, celle-ci occupant la place de premier magistrat. Cet équilibre repose sur un double consensus, entre les groupes parentélaires pour un partage du pouvoir et des charges, entre ceux-ci et le pouvoir d’Etat via ses représentants locaux. Pendant la plus grande partie du siècle (depuis 1715) ces derniers sont les Gontier de Biran, subdélégués de père en fils. La logique du système favorise leur parenté, la coïncidence géographique entraînant, localement, une confusion des pouvoirs.

12Ce bel équilibre n’est rompu que rarement, lors des réorganisations municipales imposées par le pouvoir central, lors des crises plus ou moins fortes, les plus feutrées amenant pour un temps une autre parentèle au pouvoir. Les plus vives peuvent durablement modifier les règles habituelles de fonctionnement et éloigner tel ou tel groupe de la gestion municipale. Celle, aiguë et profonde de 1757 favorise la carrière d’un maire “occasionnel”, en même temps qu’elle permet à la parentèle Lespinasse-Chanceaulme-Rivasson d’intégrer le corps de ville dont elle était exclue. D’autres circonstances, les interventions du pouvoir royal pour renouveler radicalement le magistrat, les élections par une assemblée de notables, favorisent en 1731-1732 et en 1773 la parentèle Girard des Gendres qui monopolise alors quatre sièges sur cinq. La mise en application de la réforme de Terray, à partir de 1774, installe pour deux années consulaires quatre individus n’appartenant à aucune des parentèles considérées.

  • 5 Situé au sud de la Dordogne, la ville étant au nord.

13Bien qu’omniprésents ces groupes n’ont pas le monopole complet de la chose municipale et, qu’ils les souhaitent ou qu’ils leur soient imposés par le pouvoir d’Etat, ils laissent place à quelques jurats isolés. Les uns, acteurs de trajectoires individuelles, qui pour de multiples raisons traversent le microcosme bergeracois sans y prendre de racines ; les autres, “occasionnels” du magistrat par la volonté ou la faveur d’un protecteur auquel ils sont liés par un système de clientèle, troisième cercle des réseaux familiaux. Appoints indispensables (faubourg de La Madeleine)5, les “occasionnels” sont élus parmi un petit nombre d’hommes disponibles, d’autant moins nombreux que tous ne paraissent pas toujours acceptables aux parentèles en place. La plupart sont de simples pions manipulés par les puissants groupes familiaux au pouvoir, les Biran en particulier, plus rarement des alliés incontournables ou des personnalités locales poussées en avant par le poids de la conjoncture.

14Les groupes familiaux présentent un certain nombre de similitudes qui les caractérisent. Ce sont avant tout des parentèles essentiellement bourgeoises : peu prestigieuses, les fonctions municipales ont été délaissées depuis longtemps par le second ordre qui représente moins de 3 % des magistrats. La haute noblesse ne manifeste plus pour elles le moindre intérêt depuis les avatars de La Fronde ; la petite noblesse ne fournit que 2 maires (sur 16), encore sont-ils issus de familles fraîchement anoblies.

15Formées pour l’essentiel de robins – la parentèle Bouchon, marchande, exceptée – ces parentèles s’articulent pour l’essentiel autour de membres du sénéchal, de procureurs, de notaires royaux, d’avocats, plus rarement de professionnels de la santé. Ils ont, le plus souvent, été précédés dans ces métiers par leurs parents, ou sont les héritiers directs de juges et autres lieutenants des justices seigneuriales voisines, premiers degrés pour une intégration à la bourgeoisie municipale bergeracoise. Car, la Révocation de l’Edit de Nantes a favorisé l’implantation à Bergerac de bourgeois catholiques parmi les plus notables des petites villes et bourgs voisins (compris pour l’essentiel dans un rayon de 20 kilomètres autour de la ville). Saisissant l’occasion, ils ont échappé aux horizons étroits de ces micro unités urbaines pour tenter de franchir, dans la ville toute proche, une étape dans l’ascension sociale.

16Formées de bourgeois à talents, les familles consulaires se consolident par des stratégies d’alliances matrimoniales avec la bourgeoisie marchande, sans négliger à l’occasion les alliances avec la petite noblesse du cru en mal de finances – laquelle demeure le modèle social –, ni les unions endogamiques qui renforcent, à tous points de vue, la cohésion du groupe. Le réseau familial parvient donc à maîtriser – à travers des branches collatérales parfois peu intéressées à la chose municipale – différentes zones d’influence lui assurant un rayonnement qui va bien au-delà du pouvoir politique local. Des stratégies somme toute classiques pour une bourgeoisie conquérante, qui sacrifient les filles, condamnées au mariage convenu et conforme aux tactiques de l’échiquier familial, au célibat, ou à la réclusion aux Dames de la Foy ou dans un autre couvent. Mêlant étroitement familles catholiques et protestantes ou nouvellement converties, la majorité de ces parentèles, dépassent les clivages traditionnels et réalisent, durant le siècle, une synthèse au sein de la bourgeoisie bergeracoise qui anticipe l’Edit de Tolérance.

17Peu tournées vers l’extérieur, c’est à Bergerac que ces parentèles tentent, prioritairement, de consolider leur pouvoir et de promouvoir les carrières de leurs fils, ce qui n’exclut ni l’existence d’intérêts économiques outre-mer (aux Amériques en particulier), ni les carrières militaires, ni celles offertes par le parlement de Bordeaux. Ces dernières restent pourtant exceptionnelles. Seules les plus chanceuses ou les plus riches de ces familles parviennent, avec un succès modéré, à favoriser l’installation de quelques-uns des leurs dans des fonctions plus prestigieuses et hors de l’aire bergeracoise. Leurs fortunes, si elles leur assurent une certaine aisance à l’échelle locale, limitent leurs ambitions. Cependant, Chanceaulme de Fonrose, conseiller référendaire aux requêtes près le parlement de Bordeaux, Jean-Joseph Girard des Gendres, l’aîné, secrétaire des commandements du duc de Bourbon et secrétaire ordinaire de la reine, son frère, Jean-Joseph Girard des Gendres, puîné, fermier général, leur cousin germain Jean Roullin, à son tour secrétaire des commandements du prince de Condé et secrétaire du gouvernement de la province de Bourgogne, symbolisent la réussite de leurs familles et laissent espérer des avenirs radieux... Cependant, alors qu’éclate la Révolution aucune réussite extérieure n’est telle qu’elle aspire tout un lignage au point de le faire bientôt disparaître de l’aire bergeracoise. Arrivées pour l’essentiel dans le dernier quart du XVIIe siècle, cinq des six parentèles y sont encore présentes jusqu’à l’avènement définitif de la république. Une seule, la famille Lavergne-Laval de Vilhac-Bouygue, disparaît de la scène politique locale, mais pour des raisons sans prestige : deux de ses rameaux tombent en quenouille, le troisième est définitivement mis à l’écart, dès 1750, victime de la principale crise qui agite le XVIIIe siècle bergeracois. Présentes sur la longue durée, les familles des élites du Siècle des Lumières perdurent parfois longtemps dans le XIXe siècle, le pouvoir local demeurant pour partie entre les mains de leurs descendants jusqu’en 1870.

L’exception Biran

18Atypique, la parentèle constituée autour des Gontier de Biran consacre l’essentiel de son énergie à la maîtrise des lieux du pouvoir politique dans la ville : la mairie, la subdélégation, le sénéchal aussi où ils représentent le ministère public, sans oublier le bailliage (jusqu’à sa suppression en 1749) et même la paroisse.

19Omniprésente, la famille des Gontier de Biran retient d’autant plus l’attention qu’elle a, de surcroît, “produit” son grand homme : le philosophe Maine de Biran (1766-1824), lequel assure sa postérité au-delà de ce siècle et de l’aire bergeracoise, mais se situe politiquement dans la continuité de ses cousins, oncles, et grands-pères, acteurs du XVIIIe siècle bergeracois. Premiers par le nombre de maires qu’ils fournissent à la ville au XVIIIe siècle, les Biran sont des néo-bergeracois et c’est la recomposition de la classe politique et l’exclusion des protestants qui favorise – à la fin du XVIIe siècle – leur accès au corps de ville, puis, rapidement, le contrôle du magistrat.

  • 6 A.M. Bergerac, BB 54.

20La politique royale de création d’offices vénaux installe, en effet, durablement Pierre Gontier de Biran comme maire perpétuel, de 1693 à 1710, date de sa mort, et après lui son fils cadet jusqu’en juin 1717, date de la suppression de l’office. Ce dernier, puis son frère aîné conservent néanmoins la fonction jusqu’à l’installation, le 23 mars 1724, de Jean Desmoulins acquéreur de l’office nouvellement recréé (en 1722)6.

  • 7 Dictionnaire Robert de la langue française.

21À partir de là, cette famille va déployer une véritable stratégie de conquête et de maîtrise de la ville que l’on peut définir comme un “système” dans le sens où ce terme ne désigne pas une construction théorique, mais un « ensemble coordonné de pratiques tendant à obtenir un résultat7 ». Ce projet émerge vraisemblablement dès la fin du XVIIe siècle, lorsque Pierre Gontier de Biran se voit privé de plus hautes espérances par la confiscation de la majeure partie de son patrimoine héréditaire, au profit d’un beau-frère quelque peu indélicat. Ce projet est servi par des progénitures nombreuses et de belles longévités et un patrimoine foncier de tout premier ordre à l’échelle bergeracoise.

  • 8 Ainsi Guillaume II Gontier de Biran épouse-t-il en 1756 Marie-Josèphe Trottier de Saunier (...)

22Il mêle pratiques sociales et pratiques politiques, et repose tout d’abord sur la constitution d’un réseau d’alliances très ramifié qui lie les Biran à des familles de la bourgeoisie et de la petite noblesse. Ce réseau est d’autant plus étendu que les cadets sont nombreux dans une famille prolifique (huit à dix enfants vivants par ménages), au point que l’on peut suggérer une stratégie – une volonté tout du moins – nataliste, dans un siècle où la catégorie sociale à laquelle les Biran appartiennent pratique de plus en plus un contrôle de la natalité. Les unions matrimoniales se font préférentiellement à l’extérieur de la parentèle, dans l’aire bergeracoise, plus exceptionnellement avec des familles bordelaises8, mais associent sans exclusive catholiques et protestants.

23Le “système” vise à assurer le contrôle des lieux du pouvoir local. Dans une ville dépourvue de cour souveraine, de présidial, ils sont peu nombreux et se limitent au sénéchal, à la subdélégation, à la mairie. Les voies d’accès en sont l’achat d’office qui permet aux Biran de s’installer à l’hôtel de ville pendant près d’un quart de siècle, à cheval sur les XVIIe et XVIIIe siècles, puis d’en devenir les habitués même lorsque l’office est supprimé et d’y siéger 58 années entre 1700 et 1790 : de 1700 à 1724, de 1725 à 1730, de 1738 à 1750, de 1750 à 1757, de 1771 à 1773 et de 1779 à 1790.

  • 9 Telle que la vivent les Bergeracois du XVIIIe siècle : « suivant l’usage observé dans cett (...)
  • 10 A.D. Dordogne, B 1756 à 1761, sénéchal de Bergerac, réception et installation des officier (...)
  • 11 A.D. Gironde, C 875 / 18.

24C’est aussi l’achat de l’office qui leur permet d’intégrer le sénéchal, d’abord comme procureurs du roi. Second magistrat du siège, le procureur du roi est le représentant du ministère public : installé dès 1702, Guillaume I Gontier de Biran accède aux premiers rangs de la hiérarchie sociale de l’honneur9 et apparaît très vite comme le représentant de la volonté royale et plus exactement comme son expression judiciaire, poste clé dans une région de lutte contre l’hérésie. Par la suite10, les Biran y ajoutent, au grès des achats et héritages, les offices de lieutenant criminel (1728-1790), de lieutenant général (1728-1790) et même d’avocat du roi par réunion à l’office de procureur du roi (1764-1789)11, qui leur garantissent un pouvoir d’influence à l’échelle d’une région plus étendue que la ville et son terroir.

  • 12 A.D. Gironde, C 443 à 459, fonds de l’intendance, correspondance du subdélégué de Bergerac (...)
  • 13 Intendant de Guyenne de 1743 à 1757.
  • 14 Celui-ci apparaît au tome deux du Code de la police ou analyse des règlements de police di (...)

25La désignation par l’Etat, ou son représentant provincial, l’intendant, à la subdélégation complète efficacement le “système”... Or, à partir de 1715, date à laquelle est supprimée la vénalité de l’office, les Biran monopolisent et jusqu’à sa suppression la fonction de subdélégué de l’intendant de Guyenne à Bergerac, fonction fondamentale dans une période où s’affirme le pouvoir central et où les cadres administratifs plus spécialement territoriaux restent à inventer12. Fonction gratuite, basée sur une aisance financière certaine, elle est totalement assujettie à la confiance de l’intendant : l’habileté des Biran est d’avoir su la conserver et durant tout le siècle, malgré des crises et des problèmes graves qui éclaboussent jusqu’à l’intendant et ne sont pas totalement indifférents à la mise à l’écart du grand Tourny13. Sans doute devaient-ils avoir les qualités requises que leur ami et protecteur, Duchesne, subdélégué général de l’intendant de Bordeaux, organisait l’un des premiers, pour définir le profil de cette fonction dans son « Mémoire sur les fonctions des subdélégués d’intendance »14. Elles leur garantissent une influence grande et quasiment sans partage que différents courriers échangés avec Bordeaux permettent d’apprécier à son juste niveau.

  • 15 A.D. Dordogne, Q 104.

26Aussi, lorsqu’à la fin du XVIIIe siècle, la réforme de Terray place la nomination du maire directement sous l’autorité du ministre, l’identification des Biran au pouvoir d’Etat est totale en Bergeracois : maire de Bergerac, subdélégué de l’intendant, lieutenant général, procureur et avocat du roi, ils sont devenus des notables indispensables dans cette partie de la province à la bonne marche de l’Etat. Le “système” qui a assuré leur promotion s’il n’est pas unique a été particulièrement efficace en ce qui les concerne. Il a été largement servi, d’abord par une solide fortune terrienne qui place les Biran – surtout ceux de la branche aînée – au niveau supérieur de la strate supérieure de la société locale. En 1794 les biens fonciers de Pierre-Elie-Joseph Gontier de Biran et de son épouse Marie de Lapoujade (branche aînée) sont estimés à 370 333 francs et représentent plus de 420 hectares ; en l’an IV, ceux de Pierre-Ignace et de son épouse Marie-Anne Fraigneau (branche cadette) sont évalués 103 509 francs pour 125 hectares15. Les Biran sont encore servis par de belles longévités qui leur garantissent la pérennité dans les différentes places, non sans provoquer quelques impatiences chez leurs fils, d’abord, en manque de reconnaissance sociale : Guillaume I est procureur du roi au sénéchal de 1702 à 1754, son fils Pierre-Elie-Joseph de 1754 à la fin de l’Ancien Régime, leur frère et oncle, Elie-Joseph, est subdélégué de 1715 à 1766 !

27Le “système” n’est pourtant pas sans failles et sans imperfections. La multiplication de la progéniture, si elle a favorisé les alliances, placé quelques cadets dans les cures voisines ou à la tête d’institutions charitables où ils complétaient harmonieusement “le système”, rendait de plus en plus difficile au cours du siècle, l’installation de tous les fils. Elle plongeait les puînés dans une certaine précarité sans autoriser pour autant la carrière exceptionnelle d’un fils, les Gontier de Biran faisant le choix d’un partage mesuré des héritages. Or, les charges assurées à Bergerac, peu lucratives, ne compensaient en rien la dispersion de la fortune ! L’échec politique subi au milieu du siècle hypothèque durablement leur crédit les empêchant sans doute de gravir un degré supplémentaire dans l’échelle des carrières. A cette date, leur main mise sur les lieux de pouvoir, la mairie en particulier, avait suscité forces jalousies et rendu la famille Gontier de Biran insupportable à toute une fraction de la bourgeoisie locale, exclue de son fait de l’accès à des charges, auxquelles ses conditions de fortune, son rang social et sa catholicité avérée donnaient droit. Mené par le lieutenant particulier Chanceaulme, habile et roué, s’engageait alors un conflit, une “cabale”, relayée par le parlement de Bordeaux, pour faire échec aux Biran. Elle aboutissait à leur mise à l’écart du corps de ville pendant plus de vingt ans, de 1757 à 1779, tandis que l’intendance leur conservait, bon gré mal gré, sa confiance comme subdélégués.

  • 16 Celle-ci ne se réalise qu’au XIXe siècle et très imparfaitement... Le philosophe Maine de (...)
  • 17 Maine de Biran (F.), Journal (édition établie par H. Gouhier). Neuchâtel, La Baconnière, 1 (...)

28Ces mêmes raisons participent de leur échec dans des tentatives tardives d’agrégation à la noblesse16 et leur incapacité à échapper à l’enfermement bergeracois. Tous leurs efforts, toute leur énergie sont consacrées à la maîtrise de la ville, sans perspective de carrières nationales. On touche là sans doute à la psychologie de ces personnages, à leur manque d’ambition et de volonté politique qui leur fait préférer une vie facile dans leur province à une fonction de responsabilités. Etat d’esprit que résume le plus célèbre d’entre eux, paradoxalement le seul qui ait accédé durablement à la représentation nationale : « j’éprouve ici, écrit le philosophe, et depuis que je suis rentré dans mon pays un sentiment de calme et de sérénité qui tient à ce que j’ai la certitude de n’être dominé par personne, de n’avoir pas de “juge” et de jouir de la bienveillance du plus grand nombre. A Paris chaque jour offre des devoirs plus ou moins difficiles à remplir ». Et, quelques semaines plus tard, alors qu’il a rejoint la capitale : « à Grateloup, je me sens maître de moi, de mon temps et supérieur à tous. Ici, je porte le joug des devoirs d’Etat et ceux de société que je m’impose ; j’ai à penser à l’emploi de mon temps, je ne suis jamais sûr de faire ce que je devrais pour remplir ces devoirs et mériter la considération. Je ne connais pas bien ma place ; l’instinct variable de faiblesse ou de force me la montre tantôt plus haut, tantôt plus bas »17. Solidement implantés dans leur province, les Biran gèrent le pouvoir local comme leurs biens de famille, en “dilettantes”... Ils sont en cela tout à fait caractéristiques de ces notables provinciaux qui n’ont jamais été véritablement tentés par les carrières parisiennes et dont les fils reçoivent les responsabilités politiques, en même temps que leur patrimoine familial, en héritage.

  • 18 Lettre du préfet de l’Ardèche au ministre de l’Intérieur (1842), citée par A.-J. Tudescq, (...)

29Totalement intégrés par leur réseau d’alliances à la strate supérieure de la société locale, qu’elle soit de petite noblesse ou bourgeoise, les Biran sont ainsi à Bergerac – et dans le Bergeracois – les agents privilégiés du pouvoir d’Etat. Désignés par leurs pairs, mais aussi créatures des intendants, ils prennent en charge une pratique nouvelle qui unit périphérie provinciale et centre, et transforme les élites en notables. A travers eux s’offre in fine l’étude d’un cas d’espèce : l’émergence des notabilités, qui vont jouer un rôle clé dans la vie politique de la province, au moins jusqu’en 1914. Car, si un notable est « à la fois un homme important par sa fortune et sa position sociale, distingué par ses connaissances, et utile au gouvernement et à l’administration par le zèle et le dévouement dont il ne cesse de donner des preuves »18, ce portrait, brossé par un préfet du XIXe siècle, ressemble trait pour trait à celui d’un Gontier de Biran du Siècle des Lumières.

Un “modèle bergeracois”

30Il paraît donc possible de dégager les spécificités d’un “modèle bergeracois” : c’est celui de la petite ville dans laquelle le pouvoir local n’est pas un enjeu suffisant pour mobiliser toutes les énergies des élites et ce, au-delà du problème religieux et de l’exclusion décrétée de celles restées fidèles à la foi protestante. En leur sein, certains choisissent de se détourner de l’exercice – peu rentable – du pouvoir local pour faire fructifier leur patrimoine et jouir des bienfaits de l’aisance, tandis que d’autres mettent leurs ambitions plus haut, et plus loin.

31Essentiellement constitué de bourgeois (97,4 % des magistrats) le corps de ville n’est conduit qu’à deux reprises par deux membres de la petite noblesse et pour des périodes courtes. En contraste avec le XVIIe siècle, durant lequel, à Bergerac comme ailleurs, petite et grande noblesse ne négligent pas ces charges, le XVIIIe siècle correspond à l’achèvement d’une mutation qui résulte d’une double évolution. D’une part, la petite ville ne représente plus le supplément de prestige, le supplément de reconnaissance sociale auxquels pourraient être sensibles les membres du second ordre : leur retrait illustre un comportement classique dans une ville où la participation aux affaires n’offre guère la possibilité de se distinguer du commun. D’autre part, le rôle grandissant du subdélégué, synonyme d’une soumission du corps de ville, ne rend pas non plus ces fonctions attrayantes à des hommes attachés au commandement. Alors que le XVIIe siècle et ses crises (affrontements religieux, Fronde) avaient constitué le pouvoir municipal en enjeu, en plaçant les magistrats en interlocuteurs du pouvoir royal, le triomphe du centralisme monarchique du XVIIIe siècle amène la noblesse à s’en désintéresser.

  • 19 Chevé (J.), « Nobles et bourgeois de Périgueux à la fin de l’Ancien Régime », in Noblesses (...)

32Les premiers résultats d’une enquête en cours sur Périgueux, les travaux de Gontran du Mas de Payzac ou de Jœlle Chevé19, viennent confirmer l’ensemble de ces conclusions tout en soulignant la spécificité bergeracoise. Dans cette cité voisine, de population à peu près équivalente mais catholique, le vivier est finalement plus large et les parentèles participant au consulat plus nombreuses d’autant qu’il y a, à Périgueux, un maire et sept consuls qui sont en principe en charge pour une seule année. Alors même que l’accès au consulat ne procure pas plus d’avantages qu’à Bergerac, des puissants réseaux familiaux s’assurent, sur de longues décennies, une présence effective aux affaires municipales. Pourtant, exceptés lorsqu’ils sont propriétaires de leur charge, les officiers municipaux restent en général au consulat pour des périodes beaucoup plus courtes qu’à Bergerac : un passage souvent sans lendemain, le suivi familial étant assuré par d’autres membres de la parentèle. Car, on se détourne rapidement d’une fonction peu prestigieuse, laissant la place à un vague parent, à un lignage récemment intégré à la parentèle.

  • 20 Chevé (J.), op. cit., p. 46.

33La majorité des maires, qu’ils soient selon les périodes, élus, propriétaires de leurs charges ou désignés par le roi, appartiennent à la noblesse, ancienne parfois. Ils ne s’en détournent véritablement qu’après la réforme de Terray, considérant leur désignation par le roi comme la « marque d’une intolérable autorité »20. Au contraire, les consuls appartiennent à la bourgeoisie et sont issus majoritairement de la bourgeoisie de robe : comme à Bergerac, le pouvoir des juges – ici ceux du présidial – est dominant.

34Plus anciennement enracinés dans le microcosme local, préservés des mesures d’exclusion de l’Edit de Révocation, les hommes du consulat sont plus nombreux à accéder à la noblesse et à quitter les horizons étroits de la petite ville par le “haut”. Quelques-uns procurent à leurs fils des carrières prestigieuses. Les Bertin de Bourdeille, qui donnent un contrôleur général des finances à Louis XV, en représentent l’exemple le plus éclatant. Il constitue un cas très exceptionnel à côté duquel, un ambassadeur de France (Mèredieu) ou un consul en Andalousie (Dumazel de Puyabri) font pâle figure... Par ailleurs, à travers la présence de lignages secondaires, enrichis continuellement par l’agrégation d’hommes nouveaux, des parentèles restent présentes dans la gestion de la ville, longtemps.

  • 21 Cf. Tudescq (A.-J.), op. cit.

35À Bergerac, la Révocation, en rejetant les anciennes élites du champ du pouvoir local a favorisé l’émergence d’un nombre exceptionnellement restreint de groupes parentélaires intéressés à la gestion de la ville : à l’intérieur même de ceux-ci, des comportements divergents du fait de projets, individuels ou non, existent, qui éloignent de façon temporaire ou définitive, telle génération, tel lignage, des préoccupations municipales et bergeracoises. Cependant, les nouvelles familles consulaires, imposées par le pouvoir d’Etat conservent, et jusque dans le dernier quart du XVIIIe siècle, un intérêt fort pour le consulat : non parce qu’il confère un pouvoir réel, en réalité très amoindri, mais parce qu’il concrétise l’intégration à la hiérarchie des honneurs à travers un pouvoir virtuel. Au-delà, s’il ne mobilise pas en général la totalité des énergies d’une parentèle, il est loin d’être accessoire et sert de point d’appui aux ambitions familiales. Tournées parfois vers la maîtrise du sol et le commerce des denrées qu’il produit, elles sont plus généralement orientées vers la promotion de quelque fils aux rangs de la noblesse de robe qui consacre la réussite d’une bourgeoisie dont l’accès au second ordre reste, jusqu’en 1789 au moins, l’idéal social. Seule de ces parentèles, celle constituée autour des Gontier de Biran – finalement atypique – consacre tous ses efforts à contrôler les lieux du pouvoir local, c’est ce qui fait sa force, mais aussi explique ses faiblesses : elle constitue l’exemple même d’une nouvelle catégorie sociale à l’avenir prometteur, celle des notables provinciaux, héritiers politiques d’une tradition familiale forte et personnages indispensables à l’Etat qui les choisit pour être ses représentants21.

Bibliographie

Bibliographie

Bordes (Maurice), La réforme municipale du contrôleur général Laverdy et son application, Toulouse, Publications de la faculté des Lettres et Sciences humaines de Toulouse, 1968.

Chevé (Joëlle), « Nobles et bourgeois de Périgueux à la fin de l’Ancien Régime », in Noblesses et villes (1789-1950). Actes du colloque de Tours (17-19 mars 1994), Tours, Université de Tours, Maison des Sciences de la ville, 1995, p. 39-51.

Combet (Michel), Jeux des pouvoirs et familles : les élites municipales à Bergerac au XVIIIe siècle, Toulouse, Université Toulouse-Le Mirail, thèse dactylographiée pour le doctorat d’histoire, 1997, 4 vol., Bordeaux, Fédération historique du Sud-Ouest, 2002 (version abrégée).

Combet (Michel), « Les élites municipales à Bergerac au XVIIIe siècle », Annales du Midi, t. 112, N° 230, avril-juin 2000, p. 183-200.

Guignet (Philippe), Le pouvoir dans la ville au XVIIIe siècle, Paris, E.P.H.E.S.S., 1990.

Maine de Biran (François), Journal (édition établie par Henri Gouhier), Neuchâtel, La Baconnière, 1955, 3 vol.

Mas de Paysac (Gontran du), Les “Nobles Citoyens” de Périgueux, Université de Paris IV Sorbonne, thèse pour le doctorat d’histoire, dactylographiée, 1989, 3 vol.

Tudescq (André-Jean), Les grands notables en France (1840-1849). Etude historique d’une psychologie sociale, Paris, P.U.F., 1964, 2 vol.

Notes

1 L’édit de novembre 1771 rétablit les offices supprimés par la réforme de Laverdy et remet au pouvoir d’Etat le choix des magistrats en l’absence de création de ces offices ou de rachat.

2 A.M. Bergerac, Jurades, registres paroissiaux.

3 Nous empruntons le terme prégnance au vocabulaire de la psychologie et l’utilisons à la manière des psychologues pour désigner la force, la stabilité et la fréquence d’une organisation (Gestaltheorie).

4 Cette présence aux affaires déborde largement le XVIIIe siècle en amont et en aval. Lorsque Pierre Gontier de Biran devient premier consul, en 1684, il a été précédé au consulat par son beau-père, Pierre de Chapelle, bailli de Bergerac et maire de la ville en 1655. Jean-Pierre-François Gontier de Biran est le dernier membre de la famille a participer à l’administration de la ville dont il est maire de 1850 à 1863.

5 Situé au sud de la Dordogne, la ville étant au nord.

6 A.M. Bergerac, BB 54.

7 Dictionnaire Robert de la langue française.

8 Ainsi Guillaume II Gontier de Biran épouse-t-il en 1756 Marie-Josèphe Trottier de Saunier fille d’un négociant bordelais qui avait acquis en 1751 l’office anoblissant de secrétaire du roi audiencier à la cour des Aides de Montauban (A.D. Gironde, 3 E 23 412).

9 Telle que la vivent les Bergeracois du XVIIIe siècle : « suivant l’usage observé dans cette ville, aux processions du saint sacrement, les maire et consuls portent le dais et immédiatement après vient le corps du sénéchal, et aux autres processions, telles que le jour de l’Assomption ou des Rameaux, le sénéchal marche aussi immédiatement après le clergé, après quoi vient le corps des officiers municipaux. » (A.M. Bergerac, BB 56, lettre adressée par maire et consuls au duc de Richelieu, gouverneur de la province, le 23 août 1764).

10 A.D. Dordogne, B 1756 à 1761, sénéchal de Bergerac, réception et installation des officiers.

11 A.D. Gironde, C 875 / 18.

12 A.D. Gironde, C 443 à 459, fonds de l’intendance, correspondance du subdélégué de Bergerac avec l’intendant. Le dernier, Elie-Joseph Gontier de Biran fut ensuite sous-préfet de Bergerac, en 1814-1815, après son parent Maine de Biran (1806-1811).

13 Intendant de Guyenne de 1743 à 1757.

14 Celui-ci apparaît au tome deux du Code de la police ou analyse des règlements de police divisé en douze titres. Par M. D***, ancien Conseiller du Roi, Lieutenant général de Police de la Ville de......... en Champagne. Quatrième édition revue, corrigée, augmentée et mise en deux parties. A Paris, chez Prault père, imprimeur des Fermes du roi, quai de Gèvres, au Paradis, MDCCLXVII.

15 A.D. Dordogne, Q 104.

16 Celle-ci ne se réalise qu’au XIXe siècle et très imparfaitement... Le philosophe Maine de Biran était anobli par Louis XVIII, en septembre 1814 en reconnaissance de son action comme membre de “la commission des Cinq” qui s’était opposée à Napoléon. Les autres branches de la famille ne bénéficièrent pas d’une telle mesure. Guillaume III Gontier de Biran, dernier maire d’Ancien Régime et député aux Etats généraux était à son tour anobli en septembre 1814 avec quelques-uns de ses anciens collègues de cette assemblée. Célibataire, appauvri par l’émigration, et déjà âgé, il renonça à cet anoblissement tardif et personnel, dont les lettres devaient être acquises contre paiement de 4 000 francs.

17 Maine de Biran (F.), Journal (édition établie par H. Gouhier). Neuchâtel, La Baconnière, 1955, 3 vol., t. II, p. 66, 29 septembre 1817, p. 85-86, 31 octobre 1817. C’est en 1797 que Maine de Biran commence sa carrière nationale comme député au Conseil des Cinq-cents. Il retrouve ensuite des fonctions périgordines qui l’amènent à la sous-préfecture de Bergerac de 1806 à 1811. Il entre alors au Corps législatif (1812-1816). Battu aux élections de 1816 il devient conseiller d’Etat, mais retrouve sa place à l’assemblée dès 1817 et jusqu’à sa mort, survenue en 1824. Grateloup est sa résidence bergeracoise, située sur la commune de Saint-Sauveur, à quelques kilomètres au nord-ouest de Bergerac, héritée d’un bisaïeul protestant qui avait fait fortune dans les îles : Joseph Deville. Celui-ci était aussi le bisaïeul de Joséphine de Beauharnais.

18 Lettre du préfet de l’Ardèche au ministre de l’Intérieur (1842), citée par A.-J. Tudescq, Les grands notables en France (1840-1849). Etude historique d’une psychologie sociale, Paris, P.U.F., 1964, 2 vol., p. 88.

19 Chevé (J.), « Nobles et bourgeois de Périgueux à la fin de l’Ancien Régime », in Noblesses et villes (1789-1950). Actes du colloque de Tours (17-19 mars 1994). Tours, Université de Tours, Maison des Sciences de la ville, 1995, p. 39-51 ; Mas de Paysac (G. du), Les “Nobles Citoyens” de Périgueux. Université de Paris IV Sorbonne, thèse pour le doctorat d’histoire, dactylographiée, 1989.

20 Chevé (J.), op. cit., p. 46.

21 Cf. Tudescq (A.-J.), op. cit.

Table des illustrations

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Titre LES PRINCIPALES PARENTELES DE JURATS ET LEUR PRESENCE AU CONSULAT, AU XVIIIe SIECLE2
Légende Mode de lecture du tableau : Les données portées dans la colonne (a) sont obtenues par la somme des années de mandat de chaque jurat membre de la parentèle. Celles de la colonne (d = c - b) représentent la durée de l’insertion de la parentèle dans le groupe des élites qui prend en compte la date de la première entrée au magistrat (b) et la date de la disparition définitive de celui-ci (c).Lorsque (a) est supérieur à (d) il y a nécessairement cohabitation au corps de ville de deux ou plusieurs membres du même groupe familial et ce en dépit de la règle l’interdisant. Pour des raisons de nécessité celle-ci n’est appliquée de fait que dans le cadre de la proche parenté. La comparaison des colonnes (a) et (d) permet de définir la “prégnance”3 d’une parentèle.
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Auteur

Maître de conférences en histoire moderne, IUFM d’Aquitaine, Centre aquitain d’histoire moderne et contemporaine – Université de Bordeaux 3.

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