Henri IV, la Ligue ou l’Artois ? La ville d’Ardres et l’établissement de la domination espagnole (1596-1598)1
p. 221-233
Texte intégral
1L’histoire des garnisons espagnoles en France pendant la dernière guerre de Religion et son corollaire, la guerre franco-espagnole de 1595-1598, n’ont presque pas attiré l’intérêt des historiens. En dehors des troupes « espagnoles » mobilisées pour la sauvegarde de Paris et de celles impliquées dans l’expédition de don Juan del Águila en Bretagne, les références à d’autres villes restent toujours marginales, réduites la plupart du temps à la confusion des lieux communs battus en désordre entre les traditions historiographiques locales et par le grand récit national. Ce déficit historiographique résulte peut-être de l’incommodité des sources directes ou évidentes ou encore s’explique par leur absence, mais il est aussi lié à la difficulté de dépasser une histoire nationale trop liée à l’ethos étatique ou national. En tout cas, l’importance donnée par la propagande d’Henri IV au pari « espagnol » de la Ligue radicale et par l’historiographie classique à la menace d’intervention des hommes de Philippe II sembla justifier une réflexion sur la signification politique et les possibilités de mobilisation des ligueurs espagnolisants sous la présence effective des « vrais » Espagnols2. Les hommes de Philippe II ont été présents dans une dizaine de villes et mirent en place en chacune d’elles un système de domination plus ou moins original, résultant du contexte local et de l’orientation conjoncturelle de la politique impériale de son maitre : étudier celles-ci de façon particulière permettra de comprendre les modalités de cette politique mais aussi sa signification, ses contradictions et ses opportunités.
2Le cas de la ville d’Ardres3 (Pas-de-Calais, arrond. Saint-Omer), occupée entre 1596 et 1598, peut permettre de cerner les conséquences politiques d’une incorporation forcée et les moyens de l’établissement d’un régime qui pouvait être hispano-bourguignon ou hispano-ligueur4. La différence de nature entre ces deux types d’occupation marquait le sens de l’intervention espagnole en 1596. Il faut se souvenir que l’expansion ibérique après 1595 se faisait au nom de l’appui théorique à la Ligue et en niant tout désir d’incorporation territoriale durable5. Cette occupation s’est déroulée dans la période finale des guerres de Religion (en ce qui concerne les conquêtes effectives de villes et non seulement l’établissement de garnisons comme entre 1589 et 1594). Rendue effective par la capitulation du comte de Belin avec le chef de l’armée des Pays-Bas (l’archiduc Albert d’Autriche), la prise d’Ardres a donné une possibilité inédite à la population locale de conserver ses biens, avec la promesse formelle du respect de ses privilèges et sans avoir à subir un trauma social comme les carnages de Doullens en 1595 et Calais en 1596 ou le sac d’Amiens en 1597. À Ardres, un convoi comprenant plus de 1500 soldats français fut autorisé à quitter la ville avec les bourgeois désireux de le suivre6.
L’occupation espagnole
3La mainmise ibérique n’était pas la première vécue par cette cité durant le XVIe siècle. Cet ilot juridictionnel français, poste avancé du royaume permettant en même temps de surveiller les Bourguignons d’Artois et de Flandres et les Anglais du Pale, avait enduré la présence Anglo-impériale pendant sept ans, avant d’être rendu au royaume de France grâce à la paix des Dames en 15297. La ville est ensuite devenue un des points forts de la frontière nord du royaume dans la politique de modernisation défensive de François Ier et, surtout, Henri II8. La reconquête de Calais par le duc de Guise a réduit la fonction de cette place à l’observation des territoires troublés des Pays-Bas.
4Le gouvernement « d’Ardres et du comté de Guînes » est passé de Jean de Biez à son gendre, Maberc de Bosc, et au fils de celui-ci, Isembert de Bosc, sieur de Bois d’Annebout9. La représentation de la justice royale était exercée par un bailli souverain membre d’une magistrature municipale composée, outre ce personnage, par un lieutenant de l’échevinage et six échevins. La population suivait la coutume de l’ancien comté de Guînes10. La fin des guerres de Religion et l’extinction de la Ligue en Picardie a permis à Henri IV de renforcer ses liens avec la ville en confirmant ses privilèges « en raison de sa fidélité et vraie obéissance »11. Le compromis du souverain avec ses sujets et l’intégration de la ville au contrôle effectif de la couronne sont devenus évidents avec l’arrivée dans la cité d’un important corps militaire commandé par le comte de Belin pour garantir la défense urbaine et menacer l’armée des Pays-Bas qui avait mené le siège devant Calais. Après avoir pris cette ville et sa citadelle, les troupes de Flandres mirent en toute hâte le siège devant Ardres, mais le roi préférait d’abord en finir avec le siège de La Fère, escomptant sûrement qu’Ardres tiendrait le temps nécessaire pour lui permettre de venir à son aide. Cependant, après quelques combats, le comte de Belin demande une capitulation que les Espagnols lui accordent non sans soulagement. Henri IV, qui venait de finir le siège de La Fère, n’a pas eu le temps de la secourir. Le 26 mai 1596 commençait la vie d’Ardres sous domination espagnole.
5En pleine guerre franco-espagnole, la présence des hommes du roi catholique dans la petite ville a été marquée par trois éléments majeurs jalonnant la chronologie de façon surement décisive, bien que nos sources soient toujours fractionnaires pour la reconstruire de façon satisfaisante12. Le premier est l’évolution des paiements effectifs reçus par les garnisons espagnoles. Ceux-ci ont suivi un rythme similaire aux autres villes de la frontière : les soldats ont été payés plus ou moins de façon stable, malgré le retard, et normale jusqu’à la fin de 1596 (trois mensualités au total pour six mois). Une très forte réduction est alors survenue et ce pour toute l’année 1597, au cours de laquelle les soldats n’ont perçu qu’une mensualité et 180 vêtements complets. Par la suite, ils n’ont rien touché13. Le second élément a été une conspiration anti-espagnole menée par quelques bourgeois de la ville afin de la livrer aux Français, et qui a été brutalement réprimée par les autorités d’occupation : les deux responsables ont été pendus le 18 février 159714. Cette entreprise n’a pas produit une mémoire littéraire des martyrs, contrairement au complot des Augustins d’Amiens pendant l’occupation espagnole. Il est seulement possible d’émettre des hypothèses sur son éventuel caractère exogène ou sur une dégradation des rapports de confiance entre la municipalité locale et les Espagnols suite à cet épisode15. Enfin, le troisième point est commun à la plupart des villes prises par les Espagnols en 1598 et a vraiment travesti le visage du pouvoir royal : la mutinerie de la garnison espagnole qui, déçue de ne pas avoir reçu les arriérés de ses traitements, a pris le contrôle de la ville le 15 janvier 159816, a jeté dehors le gouverneur et les officiers qui se sont retirés à Saint-Omer17, et a établi, toujours sous l’autorité ultime du roi Catholique, un gouvernement militaire autonome perdurant quasiment jusqu’à la veille du retour de la ville au roi de France après Vervins. Les soldats ont alors reçu de l’argent et un pardon général18.
6Ainsi, l’existence de la garnison est devenue un miroir de la politique impériale de Philippe II dont les priorités de paiement ont eu un effet direct sur la population et ses possibilités de s’intégrer sous un régime vraiment espagnol, sinon bourguignon. Cette situation était plus ou moins générale aux villes qui devaient, malgré elles, tolérer la présence des professionnels de la guerre19, avec le caractère de transgression des privilèges et d’occupation de l’espace bourgeois que cette intrusion impliquait. Les effets politiques de désagrégation et de mécontentement entraînés par cette stratégie étaient plus radicaux dans des villes comme Doullens et Amiens où la conquête visait à l’établissement durable d’un nouveau régime. En revanche, pour les Ardrésiens l’existence d’une garnison professionnelle n’était pas du tout une nouveauté, car la fonction militaire était existante depuis presque un siècle.
L’administration royale
7Comme dans les autres villes conquises sur la frontière française, la fonction clé dans la gestion de la domination du roi catholique est celle du gouverneur militaire. Chef de guerre espagnol nommé par le gouverneur général des Pays-Bas, le gouverneur d’Ardres était le capitaine Domingo de Villaverde20. Répondant au titre de « gouverneur de ceste ville et du comté de Guisnes »21, il était néanmoins plus ou moins soumis à son homologue de Calais22. Villaverde était assisté par plusieurs officiers, notamment un sergent majeur (Pedro de Vega puis Francisco de Tamayo23), et jouissait d’une très forte autonomie en dépit des essais de contrôle de l’administration ordinaire des Pays-Bas sur les villes de la frontière à partir de la deuxième moitié de l’année 1596.
8Comme dans les autres villes occupées, le roi a rétabli la justice en nommant Gilles Le Roy au bailliage souverain d’Ardres24 car l’ancien titulaire de la charge, l’écuyer Laurent de Cocquerel, et son lieutenant Jacques Framery, étaient partis avec le convoi français25. Les sources locales évoquent son remplacement par François de Robins26, comme bailli. Il a pris sérieusement sa charge et les 20 et 23 d’août, 6 et 17 septembre, 9, 12 et 16 octobre, puis 14 novembre 1596, Robins a siégé comme président de la justice municipale en tant que « Bailli de la ville et eschevinaige d’Ardres ». Quand il est absent, comme le 7 septembre, le procureur du roi officie à sa place27.
9L’administration ordinaire locale n’a pas seulement continué à fonctionner pendant l’occupation : elle a également eu, du moins formellement, une importante capacité de négociation avec le pouvoir central. L’événement administratif le plus important a été la visite du chef président du conseil privé, Jean Ricardot, et de Louis Vereyken. Les deux ministres avaient été envoyés à une conférence secrète avec Dominicq de Vic pour négocier une trêve de mousson28. Pour camoufler ce mouvement diplomatique, ils avaient des instructions officielles pour établir les magistrats de Calais et Ardres, s’informer des biens saisis aux facteurs du prince de Béarn et nommer un nouveau bailli dans cette ville29. Les deux ministres sont effectivement passés par Ardres30 puis sont allés à Calais où ils ont renouvelé effectivement la Loi31. Cette présence directe du pouvoir central sur la ville d’Ardres montra que son incorporation à la Monarchie Espagnole se faisait selon les règles ordinaires des autres conquêtes : la collaboration et l’alliance avec les élites locales, le discours d’exclusivité confessionnelle et la confirmation des positions sociales et institutionnelles32.
Quelle souveraineté pour le roi catholique ?
10À l’image des conquêtes en général, il faut considérer celle d’Ardres dans le cadre d’une culture politique globale partagée, à plusieurs degrés, dans le monde occidental du XVIe siècle. Le prince se réservait la justice à l’heure du changement de souveraineté (juridictionnelle ou d’exercice) mais le gouvernement au quotidien restait aux représentants de la république locale. La prise d’Ardres a été une opération subsidiaire de celle de Calais, mais la ville n’avait pas les ambigüités juridictionnelles nées de l’application du traité de Cateau Cambrésis. En conséquence, il fallait compter avec la population locale (en plus elle n’avait pas été massacrée) et ne pas rêver, comme à Calais, à faire une nouvelle colonie et fonder la souveraineté du roi catholique sur la politique des faits accomplis33. Le cas d’Ardres était plus proche, mais pas du tout semblable, des incorporations par capitulation mises en place tant en France qu’aux Pays-Bas à la fin des troubles religieux et qu’ont étudié Wanegffelen et Cassan34. Pour définir la nature de la domination, il fallait cependant définir la nature de l’occupation : ce qu’on a fait au moment de la capitulation.
11La défense de la ville par ses milices, en 1596, est restée dans la mémoire institutionnelle d’Ardres jusqu’au XVIIIe siècle ; dans cet imaginaire, leur reddition n’a été due qu’à la soumission aux ordres du comte du Belin, c’est-à-dire à l’autorité ultime du roi35. À partir de là, il est possible pour la ville (et ses bourgeois) de définir, sous la contrainte de la nécessité et sans félonie, leurs nouveaux liens politiques. Une série de rites de passage à/de la souveraineté se sont mis en place après la réduction de la ville. La capitulation de la place donnait aux bourgeois le choix de rester ou partir mais pour ceux qui ont voulu y maintenir leur résidence, il fallait établir un lien de fidélité réciproque, mais non égalitaire, avec le nouveau prince.
12Le premier pas était l’expression de la libre volonté et de la grâce du souverain de les accepter comme sujets. Elle a été connue à travers son gouverneur général l’archiduc Albert qui, dans une lettre de Saint Omer du 6 juin 1596 présentée par le gouverneur Villaverde et Wallerant Obert conseiller au conseil d’Artois36, exprimait le désir du roi de les accepter et traiter « de pied esgal avec ses autres et loiaux subietz… ce quil entendoit leur faire… »37. Le lien d’union avec le prince était fondé sur le binôme loyauté envers Dieu-loyauté envers le roi. Les bourgeois devaient faire serment de « toute fidelite soubz l’obeissance encontre de nre saincte foy et religion catholicque romaine »38 et ne pas tolérer les hérétiques ou les suspects (une formule commode permettant d’inclure les facteurs et partisans du Biarnois) qui devaient sortir avec leurs biens. Même s’il manquait un parti au début du serment, il est clair que celui-ci garantissait leur fidélité sous la religion catholique et signifiait reconnaitre :
Doresnavant… au roi catholicque comme nostre prince… le servir bien et fidelement contre et envers tous sans prendre aucun party, de garder et… denoncer les conjurations q’icy se pourroient dresser contre lestat sans attendre ny souffrir attendre aulcune chose indesirable au service de sa d. Maté … (comme) bons et loiaulx subietz… reconnoissans estre comme habitans de la d. ville d’Ardre membre deppendant du comte d’Arthois39.
13Il faut garder à l’esprit quelques éléments pour comprendre l’option hispano-bourguignonne dans la fin des guerres de la Ligue. D’une part, l’égalité du traitement promis, comme des sujets naturels, était généralisée à tous ceux qui accepteraient la souveraineté de Philippe II et la justification historique-juridictionnelle permettant de penser l’occupation comme une réintégration des droits territoriaux de l’Artois sur l’Ardrésis40. D’autre part, la naturalisation des rapports roi-sujets permettait de présenter la domination comme un espace où pouvaient se développer les sentiments de fidélité qui fondaient l’ordre politique et religieux. Les conquis cessaient d’être des soumis, pour devenir des agents fiables et activés de la domination elle-même en développant un affect qui pouvait se penser héréditaire. Cette opération, orchestrée dans la majorité des territoires pris par la monarchie espagnole, n’était pas du tout impensable pour le nord de la France. Les bourgeois d’Amiens comme ceux d’Abbeville41 ont mobilisé l’héritage bourguignon pour justifier leur fidélité envers les Espagnols… et le devoir qu’avaient ces derniers de les protéger. La définition d’Ardres comme terre d’Artois représentait sans doute de solides avantages pour la politique espagnole. En revendiquant une restauration juridictionnelle fondée sur la mutabilité des frontières entre l’Artois et la Picardie, on pouvait clore le débat visant à déterminer si la domination sur la place était née d’une conquête réelle (impossible car il n’y avait pas une guerre effective contre le roi de France) ou de l’appui aux zélés français. Si cette mainmise n’était qu’une restauration, il devenait plus envisageable de conserver la ville (comme bastion de Calais) en cas de paix avec Henri IV. Cette opération a été prise très au sérieux et fut même débattue aux états provinciaux de la fin de 1596, dans le cadre d’une proposition concernant l’intégration effective de la ville en Artois42.
14Contrairement à Doullens43 ou Amiens, les Espagnols n’ont pas mis en place une administration vraiement ligueuse. Il faut ainsi souligner que la documentation utilisée ne contient pas les habituelles formules d’incorporation subsidiaire à la monarchie espagnole et à la fidélité au roi catholique en tant qu’il n’est pas un roi « vraiment catholique » en France, ou de références a une légitimité ligueuse de la domination espagnole sur la ville. Cette occultation de la Ligue pouvait aller dans le sens de la stratégie d’occupation des Espagnols au sens de l’écartement de la petite ville du royaume de France.
15Il faut noter deux possibles exceptions, nées plus surement de la pratique du pouvoir que d’une programmation politique. D’abord le cas de sieur Jean de Marnay, lieutenant de l’échevinage, qui a dû quitter le royaume après la dévolution de la ville en raison des persécutions de « ceulx tenans l’aultre party »44. Sans doute était-il Français et a-t-il exercé la charge au moment où les rapports entre les bourgeois et la garnison étaient de plus en plus tendus. L’autre cas est la présence de « Jacques Poly secretaire de monsieur le gouverneur de ceste ville… [qui demandait] à Dorbelt capitain des alemans tenans garnison en ceste ville » l’argent que ce dernier lui devait pour payer quelques pains45. Il est possible qu’il s’agisse de Jacques [Diego] Polin, le page du duc d’Aumale qui servait comme secrétaire particulier aussi avec le gouverneur de Doullens-Amiens46. Ces deux personnages sont deux cas particuliers placés à l’administration de façon plus utilitaire qu’institutionnelle. La nouvelle discipline collective mise en place pour la totalité de la population renvoie à une incorporation territoriale et non au soutien d’un parti en guerre civile.
Les (nouveaux) sujets du roi d’Espagne
16La population d’Ardres a prêté le serment de fidélité individuellement et par ordre : le clergé, la noblesse, la magistrature municipale et les bourgeois. L’occasion a permis de définir qui ne pouvait pas appartenir à la nouvelle communauté : les hérétiques, les suspects et ceux qui n’ont pas voulu prêter le serment. La fin de cette opération a consisté en la proclamation d’un lien d’amour eschatologique fondant la domination royale lorsque le curé de l’église paroissiale Anthoine Guillour exhorte le « peuple », durant la messe, à faire dorénavant ses prières pour Philippe II, ses fils, l’archiduc, les princes catholiques et même le gouverneur (dont on constate qu’il était présent). Fondée sur la religion et l’affect au prince, la communauté pouvait, et devait, s’organiser en termes institutionnels. À la fin de cette journée, les quatre échevins sont choisis et la réunion suivante, le 11 juin, permet de nommer (en fait, de confirmer) les officiers municipaux47.
17Les officiers royaux du baillage sont, en toute logique, sortis avec les troupes du comte de Belin, mais en revanche, les membres de la municipalité et la majeure partie du clergé ont choisi de prêter le serment de fidélité à Philippe II. L’incorporation de la population d’Ardres dans cette procédure d’affirmation personnelle a été majoritaire48. D’après les listes d’habitants appelés à jurer fidélité au monarque espagnol, il apparaît que sur cent dix personnes appelées, seulement treize n’ont pas voulu le faire et sept autres, alors absentes, s’exécutent plus tard49. Les quatorze bourgeois expulsés de la ville étaient très proches du gouvernement antérieur. Il faut noter que l’établissement du pouvoir espagnol s’effectuait avec un net assentiment de l’élite locale qui prêta en masse le serment : huit des neuf ecclésiastiques présents dans la ville, la noblesse restante – quatre sieurs, parmi lesquelles Jacques Laurin sieur du Wort le lieutenant de l’échevinage, et deux écuyers (le troisième, le sieur de Brendan, fera son serment après50) – et toute la magistrature municipale : quatre échevins (Augustin Flahault, Pierre de Vaulx, Anthoine de Jourdin et Jacques Raverdy), le greffier (Claude Nanton), le procureur fiscal (Jean Flahault), l’argentier (Hugues Geller) et le sergent de la ville (Noël Amerel). Pour les Espagnols, l’alliance avec ce réseau social était fort intéressante si on considère que ces bourgeois avaient une forte expérience de la gestion des affaires récentes de la ville, car il y avait parmi eux au moins la moitié de ceux qui avaient eu la charge d’échevin dans les trois dernières années51. Cette image d’unité et de projection sur la population se traduit dans leur présence aux accords collectifs pour la protection des mineurs dans les cas de décès : la continuité du patriciat local se renforça par son action solidaire à la mort du greffier Nanton et pour la protection de ses fils52.
18Cet accord politique a été ratifié le 11 juin avec le renouement de la Loi, par une assistance comptant le sieur de Wort, les deux autres écuyers (les sieurs de Lannoy et de La Cornus, François de Montfort), et les quatre échevins (auxquels s’ajouta un cinquième : Jehan Bacheler53, ancien échevin) qui font serment de défendre le roi et la religion. La justice échevinale et la séance de plaidoyers sont assignées à deux nobles et deux échevins : Laurin (mort de la peste en novembre 159654), Montfort (natif de la ville), Flahault et Bacheler. Les autres officiers (procureur) et chargés (argentier, greffier, sergent) sont laissés à leurs postes à condition de faire un nouveau serment envers les nouvelles autorités municipales et royale (militaire avec Villaverde, administrative avec Obert et judiciaire avec le sieur Laurent Dehegel ou de Heguel) et religieuse (Guillour)55. La documentation disponible tend à indiquer que la visite de Richardot ne fait que confirmer cette situation car il n’y a aucune mention de changements ou de nouvelles nominations. Il ne fallait pas faire davantage : le régime espagnol avait, ainsi, obtenu un groupe notable de médiateurs auprès de la population locale, tant de la ville que du plat pays, car parmi les huit religieux prêtant serment il faut compter cinq curés des villages voisins présents dans la ville durant le siège. La négociation des tailles et sauvegardes de ces localités56 a du sans doute passer dans un premier moment par les réseaux fiscaux municipaux et ecclésiastiques antérieurs.
19Cette décision de participer à l’administration espagnole ne doit pas être seulement perçue comme un choix idéologique lié aux prises de position en faveur de la Ligue, mais aussi comme l’issue d’une logique géographique inscrite dans la tradition d’appropriation des villes en guerre. Les Ardrésiens ont pu penser qu’il s’agissait d’un changement de souverain résultant d’une guerre « ordinaire ». Les sympathies originelles pour les Espagnols s’incarnent notamment dans l’action d’Augustin du Brabant, curé de Louches, qui a délivré aux Espagnols de très importantes informations pendant le siège57. Initialement majoritaire, le compromis avec les Espagnols s’affaiblit par la suite en raison de la dégradation des rapports entre la garnison et les habitants tout au long de 1597.
20Lorsque la ville est ravagée par la peste dans la seconde moitié de l’année 1596, quelques personnages ont pris un rôle croissant dans l’organisation politique et se sont chargés d’organiser cet Ardres de Philippe II. Parmi les bourgeois exerçant comme échevins, certains avaient des intérêts des deux cotés de la frontière comme Jacques Raverdy. Celui-ci n’était pas du tout un nouveau venu à la magistrature municipale dans la mesure où il a participé au renouvellement du magistrat local des 6 janvier 1593, 1594 et 1595. En 1593, il est même nommé argentier de la ville et, en 1595, « meneur des potieres », « buisonnier des bieres » et en charge de la visite des marchés58. L’inclusion de la ville en Artois a permis à Raverdy d’essayer de régler la succession de sa femme, qui était de Saint-Omer, en cédant ses droits en échange d’une compensation et en nommant un procureur à Saint-Omer : Loys de Wissocq59. Les opportunités qu’ouvrait l’incorporation à la monarchie hispanique étaient plus larges car les Ardrésiens pouvaient profiter, ou du moins essayer comme le désirait le gouvernement général, de l’activation du commerce d’Artois60 ainsi qu’en témoignent les références au commerce de boisson avec l’hinterland naturel de la ville61. Pour l’année 1596 au moins, la coordination avec la garnison62 et le gouverneur fut importante, notamment sur la gestion de la peste et le fondamental contrôle des boulangeries63. Enfin, comme à Doullens et contrairement à Amiens, la population n’a pas été forcée de participer à la réparation des remparts64. L’intégration des élites locales à l’administration d’occupation n’a pas dû occasionner trop de désagréments pour leurs concitoyens car on constate la réintégration de quelques-uns de leurs membres, ou de leurs familles après la restitution de la place65.
21Dans ce contexte, qui a changé tout au long de 1597, la justice municipale a pu se développer, sous le contrôle de la municipalité. Raverdy a été présent avec régularité, Bacheler surtout jusqu’à la fin de novembre et Augustin Flahault, à partir de ce moment. Bien que la plupart des affaires vues touchent aux relations entre bourgeois et avec les fermiers des droits municipaux66, il faut noter l’existence d’une sorte d’intermédiation, comme à Amiens, avec la société militaire d’occupation67. En 1596, le bailliage de la ville mena diverses actions que n’ont pas été, selon la documentation conservée, extraordinaires. De fait, pour les autorités espagnoles, sa fonction était de gérer, au sens large, la population locale. Il est fort probable que les magistrats ardrésiens ont occupé des fonctions similaires à celles des autres villes occupées, notamment Doullens et Amiens. La ville a confirmé le mandat du responsable de la maladrerie de Lostebarne, pour le renouveler peu après68, et a dû faire face à la crise du montant des fermes et des droits sur le plat pays ainsi qu’aux problèmes de ravitaillement de la ville dus aux vols des soldats69. En somme, ils ont gouverné une ville soumise à la terrible crise des années 1596-1598, comme l’ont fait aussi les patriciats des localités alentours.
22Qu’était l’Ardres « espagnole » ? La réponse est complexe. Les données avancées dans ce texte peuvent donner l’image d’une certaine stabilité qui n’a pourtant pas été réelle. La dégradation des rapports entre la garnison et la population locale comme la déception des attentes bourgeoises ont pu avoir un effet de dissolution qui s’est cristallisé dans la conspiration de 1597. Quelques mois après, la mutinerie des soldats montra à quel point la politique espagnole en France n’avait pu maintenir la mobilisation des ressources nécessaires pour établir un régime durable. Néanmoins, le processus d’incorporation aux territoires sous le contrôle de Philippe II montre la flexibilité et la multiplicité des stratégies menées par l’administration espagnole après 1595. Les plans visant à incorporer le district Calais-Ardres à l’Artois sont révélateurs de ce que les Espagnols, confrontés à l’établissement de plus en plus inéluctable du pouvoir d’Henri IV, avaient commencé à mettre en place dans leur intervention au Nord de la France : une logique plus patrimoniale que confessionnelle. Toutefois, ils n’avaient pas fermé la porte à une re-confessionnalisation de cette politique, comme à Amiens en 1597. Cette multiplicité d’options laissait encore ouverte la porte d’une paix avantageuse (en retenant le Pays Reconquis) ou d’une intervention continuelle en cas de refondation de la Ligue. En même temps, cette indéfinition peut être lue comme symptomatique de la tension entre les partisans d’une politique bourguignonne ou catholique dans l’administration espagnole. Une tension qu’a lestée la pratique politique des hommes de Philippe II envers la France et qui n’allait se résoudre qu’avec la paix de Vervins.
Notes de bas de page
1 Ce texte a été realisé dans le cadre du projet de recherche « Hispanofilia, la proyección política de la Monarquía Hispánica (I) : aliados externos y refugiados políticos (1580-1610) », HAR2008-01107 HAR2008-01107/Hist du Ministerio de Ciencia e Innovación (Espagne). Je tiens à remercier M. Michel Cabal pour ses savants et forts utiles renseignements sur l’histoire d’Ardres et pour son aide amicale.
2 Il manqua dans cet article la place permettant une approche approfondie des visions historiques sur l’intervention espagnole, bien que la plupart de la production parue en lien avec la commémoration de l’assassinat d’Henri IV montre à quel point les récits et les lieux communs de l’historiographie traditionnelle ont jusqu’à aujourd’hui une énorme actualité, malgré la recherche récente. En tout cas je renvoie le lecteur intéressé aux actes du Colloque international : Les Ligues catholiques & leurs alliés dans la France des guerres de Religion (vers 1576-1598). Historiographie et méthodes d’analyse (Montpellier, 2008), à paraître prochainement. Je termine actuellement une recherche sur la présence des garnisons espagnoles et leur action politique en France de 1590 jusqu’à 1598 ; trois travaux avançant d’ores et déjà quelques informations ponctuelles à ce sujet : « De la Guerre Civile à la Guerre royale : Espagnols à Amiens en 1597 », dans Carpi (O.) et Nivet (P.) dir., La Picardie Occupée du Moyen Âge au XXe siècle, Amiens, Encrage, 2005, p. 50-70 ; « La guerre, les princes et les paysans. Les pratiques de neutralité et de sauvegarde dans les Pays-Bas et au Nord du royaume de France au XVIe et au début du XVIIe siècle », dans Chanet (F.) et Windler (C.) dir., Les ressources des faibles. Neutralités, sauvegardes, accommodements en temps de guerre (XVIe-XVIIIe siècle), Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2009, p. 187-204 ; et « “A Thing Not Seen in Paris since Its Founding”. The Spanish Garrison of 1590 to 1594 » (sous presse).
3 L’historiographie sur Ardres est assez remarquable ; il faut notamment citer le travail d’érudition de Ranson (E.), Histoire d’Ardres depuis son origine jusqu’en 1891, Ardres, 1986 [réimpr. de Saint-Omer, Impr. du Mémorial artésien, 1891]. Très utile pour une vision rapide, l’édition de Cabal (M.), avec la collaboration de Bassez (V.), Bellet (M.), Blondel (R.) et alii, Ardres au XVIe siècle, Ardres, ACHA, 1995.
4 Cette implication politique de l’occupation d’Ardres dans le contexte de la fin des guerres de Religion est déjà soulignée par Ranson à deux reprises : quand il évoque le choix du clergé de rester en ville après la capitulation (p. 244, note 1 : « On ne sera surpris de voir figurer en tête de la prestation de serment à sa Majesté Catholique le clergé, que l’esprit de la Ligue avait rendu plus Espagnol que Français ») et quand il fait une évaluation générale de l’occupation (p. 246 : « L’occupation espagnole n’apporta pas grande perturbation dans la vie sociale des habitants : l’autorité militaire seule était complètement transformée ; il n’y avait qu’une substitution de domination. Les privilèges anciens furent respectés, et nous voyons par les registres de la municipalité, que les nominations des échevins et d’officiers en charge furent faites en la manière accoutumée », p. 247 « nous ne connaissons aucune particularité du séjour et de l’occupation momentanée des Espagnols à l’intérieur de la ville », et p. 248 « il est vrai que cette domination ne fit pas peser sur la ville une main de fer : et le prétexte des intérêts catholiques, dont le cardinal archiduc se présentait comme le défenseur, à la suite des temps troublés et des consciences surexcitées par les guerres de Religion, apportait un adoucissement à la haine héréditaire de l’étranger, ou rendait moins pénible et moins odieuse la sujétion à ceux que l’aveuglement fanatique faisait parfois regarder comme des alliés plutôt que comme des ennemis »).
5 Descimon (R.) et Ruiz Ibáñez (J. J.), Les ligueurs de l’exil. Le refuge catholique français après 1594, Seyssel, Champ Vallon, 2005, p. 112 et p. 118-119.
6 Il y a plusieurs récits sur la reddition de la ville : Archivo General de Simancas (désormais AGS) Estado (désormais E) 610, n° 206 et 207, 23 mai 1596, le prince d’Orange à Philippe II et au prince Philippe (futur Philippe III) ; AGS E 611, n° 109, « Relaçion de la presa de Ardres » ; AGS E 611 n° 109, « Relaçion de la presa de Ardres » ; AGS E 615 n° 4, « Relon de lo succedido en la presa de Ardres » ; Bibliothèque Nationale de France (désormais BNF) Manuscrits Français (désormais ms.fr.) 23195, f° 279-283, 10 juillet 1596, Bruxelles, Domingo de Spinarieta à Christobal de Spinarieta « mi hermano del Consejo de su majestad y sus° de la Hazienda » ; Ranson (E.), Histoire d’Ardres…, op. cit., p. 243 ; Deschamps( L.), « Siège et prise de Calais et d’Ardres en 1596 par l’archiduc Albert d’Autriche et réception de ce prince à St-Omer », Bulletin Historique de la Société des Antiquaires de la Morinie, 8, 1887-1892, p. 625-633 ; De Villalobos y Benavides (D.), Comentarios de las cosas sucedidas en los Países baxos de Flandes desde el año de mil quinientos y noventa y quatro hasta el de mil y quinientos y noventa y ocho, Madrid, 1612 (1611), p. 65.
7 Ranson (E.), Histoire d’Ardres…, op. cit., p. 213 ; Cabal (M.), avec la collaboration de Bassez (V.), Bellet (M.), Blondel (R.) et alii, Ardres au XVIe siècle, op. cit., p. 8-9.
8 Potter (D.), War and Government in the French Provinces. Picardy 1470-1560, Cambridge-New York-Oakleigh, Cambridge University Press, 1993, p. 281-282.
9 Ranson (E.), Histoire d’Ardres…, op. cit., p. 232.
10 Cabal (M.), avec la collaboration de Bassez (V.), Bellet (M.), Blondel (R.) et alii, Ardres au XVIe siècle, op. cit., p 8. En 1585 se sont assemblés les états du Calaisis, avec représentation du clergé d’Ardres, pour y admettre la coutume de Paris ; Ranson (E.), Histoire d’Ardres…, op. cit., p. 230.
11 BNF ms Picardie (désormais Pi) 26, fol. 76, août de 1594, copie ; Archives Départementales du Pas de Calais (désormais ADPaC) 2MI118R1 fols 90-93 (une référence correspondant à celle donné par Ranson comme Archives d’Ardres BB 1).
12 Ranson fait une description de la documentation résiduelle consultée aux Archives d’Ardres au XIXe siècle (p. 243), conservée actuellement à l’identique aux ADPaC dans la signature 2MI118R1 ; il y a une copie en très bon état et avec les instructions et le rapport des actions du conseiller Obert dans ADPaC B 41. Il reste aussi quelques lettres échangées aux Archives Communales de Saint-Omer (ACStO) qui, avec le Journal Hendricq de la Bibliothèque Municipale de Saint-Omer (BMStO) [utilisé de façon partiale par Ranson surtout pour la description du siège et capitulation de la ville] permettent de reconstruire le rapport de la ville avec son contexte géographique. L’histoire institutionnelle de la ville, au moins pour la présence militaire, peut être suivie dans les registres des Archives générales du Royaume/Algemeen Rijksarchief (AGR/AR Bruxelles) de la Secrétairerie d’État et de la Guerre/Secretarie van State en Oorlog (SEG). À l’AGS, dans les séries de la Contaduría Mayor de Cuentas (CMC), on a trouvé la comptabilité de plusieurs unités de la garnison, permettant ainsi de reconstruire à peu près l’évolution des payements effectivement reçus par les soldats.
13 AGS CMC II 877, comptabilité de Walter Zapata.
14 Le récit est du Journal de Hendricq : BMStO ms 808, I, f° 270v-271 : « qui avoient conspirez comme eux meme declarerent avec plusieurs bourgeois de la villa livrer le gouverneur monsieur de Villagarde (sic) abvec la ville en mains de franchois qui a un jour redit se debvoient venir… pres de la et surprendre le gouverneur qui coustumierement allait a la chasse en cet endroit, puis trouvans les portes ouverts par le moien de ces traistres couper la gorge aux centinelles et entrer dedans mais pour la vigilance d’iceluy gouverneur la trahison… les principaux de cette conjuration furent punis par le dernier suplice et plusieurs taxes de meme en grand danger de passer ».
15 La dernière activité documentée du gouverneur, du bailli et des échevins dans les sources qui restent aujourd’hui est datée du 9 décembre 1596 ; ADPaC 2MI118R1 fol. 147.
16 Coloma (C.), Las guerras de los Estados-Bajos, desde el año de 1588 hasta el de 1599, Madrid, Biblioteca de Autores Españoles, 1948, p. 148 176a ; Ranson (E.), Histoire d’Ardres…, op. cit., p. 248 ; Parker (G.), El Ejército de Flandes y el Camino Español, 1567-1659. La logística de la victoria y la derrota en las guerras de los Países Bajos, Madrid, Humanes Madrid, 1986 [1972], chapitre 8.
17 AMStO C 12 fol. 244, 26 janvier 1598.
18 AGR/AR SEG 18, fol. 130, 30 juin 1598, Bruxelles.
19 Un sujet attirant de plus en plus l’attention des historiens, voir Bragard (P.), Chanet (J.-F.), Denys (C.) et Guignet (P.) éd., L’armée et la ville dans l’Europe du Nord et du Nord-Ouest. Du XVe siècle à nos jours, Louvain-la-Neuve, Burylant-Academia, 2006.
20 Il signa aux actes municipaux d’Ardres « Domingo de Viaverde » ; ADPaC 2MI118R1 fol. 134v, assemblée du 11 juin 1596.
21 ADPaC 2MI118R1 fol. 147v.
22 AGR/AR SEG 16 fol. 100v-102, 1er mai 1596, lettres patentes pour le gouverneur de la citadelle de Calais (don Juan de Rivas) ; et fol. 108-109, 28 mai 1596, Saint-Omer, pour le gouverneur d’Ardres. Quand il a été nommé, il était affecté au commandement militaire espagnol comme « capitán reformado y entretenido », après avoir fait un voyage en Espagne. Il avait été employé à quelques missions extraordinaires ; AGR/AR SEG 15, fol. 246v, 20 janvier 1595. La politique de nomination aux charges des Pays-Bas à la fin du XVIe siècle dans Esteban Estringana (A.), « Cabos de guerra : satisfacción de la oficialidad y eficacia bélica en el ejército de Flandes, entre los ss. XVI y XVII » (sous presse).
23 AGS CMC II 877, Lo pagado a oficiales mayores y ministros de justicia deste exerçito, pl° 3c, 19 juillet 1597 et Lo pagado a la infantería española, pl° 120c, 11 et 13 février 1599 : 50 ecus de 50 patards payés à Tamayo par ses arriérés pl° 75a, 11 avril 1598 ; 170,54 écus à Catalina de Messa, veuve Pedro de Vega, « por lo que resta de su sueldo ».
24 AGR/AR A 2621, non numéroté, 13 septembre 1596, Bruxelles, commission à Le Roy ; AGR/AR A 1843-4a, 30 juillet 1596, Sint-Niklaas, Instruction à Jean Richardot et Louis Verreycken. La documentation d’Ardres datant de 1597 et 1598 étant manquante, on n’a pas pu certifier la présence effective de Le Roy. Sur le bailliage souverain voir Klimrath (H.), Études sur les coutumes, Paris, Levrault, p. 40.
25 Il récupère son poste lorsque la ville revient dans le giron français.
26 Dans un acte de 1583 on parla de lui comme bailly d’Audruicq et pays de Bredenarde ; v. http://www.lemarois.com/jlm/data/a05pagart.html.
27 On constate la présence de Robins à ADPaC 2MI118R1 fol.132, 137, 140 et 142. Ranson (E.), Histoire d’Ardres…, op. cit., p 246 et p 249 parla de Robins comme substitut de Cocquerel. Deschamps (L.), « Précis historique sur Ardres », Mémoires de la Société des antiquaires de la Morinie, vol. 4, 1837- 1838, paru en 1839, p. 379-396, notamment p. 387 parla de Robins comme « maire ».
28 Imhof (A.E.), Der Friede von Vervins, 1598, Zurich, 1966, p. 13-15.
29 AGR/AR A 1843-4a, non numéroté, 30 juillet 1596, Sint-Niklaas, Instructions.
30 AGR/AR A 1843-4d, non numéroté, 7 août 1596, Jean Richardot et Louis Verreycken à l’archiduc Albert ; et 8 août 1596, Ardres, à Dominic de Vic.
31 Koller (F.), « Calais sous l’occupation espagnole, 1596-1598 (Documents inédits) », Bulletin historique et artistique du Calaisis, 32 (1967), p. 15-140, et 33 (1968), p. 153-160, surtout. p. 132.
32 Voir Ruiz Ibáñez (J. J.) et Sabatini (G.), « Monarchy as Conquest : Violence, Social Opportunity and Political Stability in the Establishment of the Hispanic Monarchy », Journal of Modern History, 81, 3, (2009), p. 501-536.
33 L’incorporation calaisienne à la Monarchie Espagnole sera développé par extenso dans le travail sur les garnisons espagnoles en France évoqué en note 2.
34 Wanegffelen (T.), « Entre concorde et intolérance. Alexandre Farnèse et la pacification des Pays-Bas », Id. ed., De Michel de l´Hospital à l’édit de Nantes. Politique et religion face aux Églises, Aubenas d’Ardèche, Presses universitaires Blaise Pascal, 2002, p. 51-70 ; Cassan (M.), « La réduction des villes à l’obéissance », Nouvelle Revue du XVIe siècle, 22-1 (2004), p. 159-174.
35 Joblin (A.), « Les milices provinciales dans le Nord du Royaume de France à l’époque moderne », Revue du Nord, 85-350 (avril-juin 2003), p. 279-296, surtout p. 280 et p. 287.
36 Les sources sont assez abimées et quelques confirmations manquent pour identifier certains personnages. Dans l’assemblée du 10 juin 1596, on trouva le commissaire Grégoire Tuifleman, huissier du conseil d’Artois qui assisait Obert ; ADPaC 2MI118R1, fol. 134v.
37 ADPaC 2MI118R1, fol. 131.
38 ADPaC 2MI118R1, fol. 131.
39 ADPaC 2MI118R1, fol. 131v.
40 De fait, la ville avait été sous contrôle bourguignon entre 1435 et 1482 ; Cabal (M.), avec la collaboration de Bassez (V.), Bellet (M.), Blondel (R.) et alii, Ardres au XVIe siècle, op. cit., p. 8.
41 Carpi (O.), Une république imaginaire. Amiens pendant les troubles de religion (1559-1597), Paris, Belin, 2005, p. 216-227 ; Descimon (R.) et Ruiz Ibáñez (J. J.), « La imagen de Felipe II en la Liga radical francesa (1589-1598) », dans Rivero Rodriguez (M.), Felipe II (1527-1598). Europa y la Monarquía Católica, tomo 1, El Gobierno de la Monarquía (Corte y Reinos), Madrid, Parteluz, 1998, p. 111-136, p. 122 ; Ruiz Ibáñez (J. J.) et Sabatini (G.), « Monarchy as Conquest… », art. cit., p. 504- 509.
42 Hirschauer (C.), Les États d’Artois de leurs origines à l’occupation française, 1340-1640, Paris-Bruxelles, 2 vols, 1923, t. II, p. 95 ; sur l’assemblée des états des 12 et 13 novembre 1596 où l’on a discuté de l’incorporation de Calais et Ardres. En 1597, pendant les premiers pourparlers de la paix de Vervins, le président Richardot a essayé de convaincre Villeroy des droits historiques de Philippe II, comte d’Artois, sur la ville ; BNE (Biblioteca Nacional de España), ms. 3832, fol. 100-105.
43 Descimon (R.) et Ruiz Ibáñez (J. J.), Les Ligueurs de l’exil…, op. cit., 2005, p. 121.
44 Ibid., p. 176.
45 ADPaC 2MI118R1 fol. 146, sans date, mais début décembre 1596. En tous cas, on trouva au moins deux Jehan Poulain, le curé et le bourgeois, aussi aux sources locales ; v. fol. 23v, 35v, 39, 40, 50v, 56 et 131v.
46 Descimon (R.) et Ruiz Ibáñez (J. J.), Les ligueurs de l’exil…, op. cit., p. 121-122.
47 Ces actes ont été reproduits en grand partie dans Ranson (E.), Histoire d’Ardres…, op. cit., p. 242- 245 ; mais il est toujours plus intéressant d’aller directement aux sources originales dans ADPaC 2MI118R1, fol. 131-133v.
48 À contrario, voir Deschamps (L.), « Précis historique sur Ardres », art. cit., p. 387 : « tous les habitants refusèrent de prêter serment au roi d’Espagne ».
49 Nonobstant, il faut noter que dans les listes de la ville et sa banlieue, dressées en 1593 et 1594, on comptait à peu près entre 160 et 170 noms : ADPaC 2MI118R1, fol. 53v-55 et fol. 82-84, 22 septembre 1593 et 15 septembre 1594.
50 Mais il faut considérer que, certainement, les autres gentilshommes sont sortis avec les troupes de Belin ; en plus, deux gentilshommes du pays (les sieurs de Barret et de Mont-Cornet) avaient déjà été expédiés vers Henri IV avec un mémoire justificatif de la ville contre la reddition de l’ancien gouverneur de Paris, Deschamps (L.), « Précis historique sur Ardres », p. 387.
51 Ainsi, Laurin avait été procureur de la justice et lieutenant en 1593 et 1594, Augustin Flahault avait été échevin en 1592, 1593 et 1594, « meneur des potieres » en 1595 puis contrôleur du pain blanc ; Jourdin avait été échevin et chargé du contrôle des marchés en 1593 et 1594, de Vaulx avait été échevin en 1592, 1593 et 1594, administrateur de la Chapelle de Notre Dame et fermier du vin en 1594, enfin Nanton était greffier au moins depuis 1594 ; ADPaC 2MI118R1 fol. 8, fol. 29-31 et fol. 63v-64. Ranson (E.), Histoire d’Ardres…, op. cit., p. 246.
52 Comme on peut le voir dans les trois accords de tutelles passés en août 1596 ADPaC 2MI118R1 fol. 136-137v. Ranson (E.), Histoire d’Ardres…, op. cit., p. 682, reproduit l’accord pour les fils du greffier Nanton : son beau frère, l’échevin Pierre de Vaulx, est nommé comme leur tuteur par un conseil auquel il participe lui-même ainsi que les échevins Flahault, Bacheler et Raverdy et l’écuyer Montfort (tous qualifiés comme « voisin et bon ami du défunt ») et deux bourgeois (Claude Campion « ami du défunt » et Hubert Ganost marié avec Marguerite Guassiot, tante maternelle de Nanton). À celui des fils de Françoise Pelle (bin) ont assisté A. Flahault, Raverdy, Montfort et Antoine Guillord, tandis qu’à celui, très abimé, de François Doret, seul y assiste Pierre de Vaulx.
53 On a respecté l’orthographe des signatures.
54 Après la mort du lieutenant a lieu un procès contre un soldat bourguignon au sujet de la propriété du blé en sa maison ; ADPaC 2MI118R1 fol. 142, 16 novembre 1596.
55 ADPaC 2MI118R1, fol. 134v. Deheguel, Bailli de Licques, avait été appelé par Obert pour sa connaissance de la ville, et ce n’est qu’après qu’il est devenu lieutenant au baillage souverain ; ADPaC B 41, fol. 10-16.
56 Le système fiscal et d’extorsion de l’occupation est abordé dans mon travail de 2009 cité à la note 2.
57 Ranson (E.), Histoire d’Ardres…, op. cit., p 235 ; AGR/AR A 1838-2, non numéroté, du « XII de novembre 1597 ».
58 ADPaC 2MI118R1 fol. 30, fol. 63, fol. 88v et fol. 113.
59 AMStO 4E 5 52 n° 158, Saint-Omer, 26 septembre 1596.
60 AMStO CM 23, n° 61, 60 et 106, 5, 9 et 12 mai 1596, Albert d’Autriche à la ville de Saint Omer.
61 ADPaC 2MI118R1 fol. 146, début en décembre 1596.
62 ADPaC 2MI118R1 fol. 132v (« b », mal placé), 17 septembre 1596, commission à « Henry Barbier et Jehan Clerq chirurgiens de la compagnie de Monsr de Fouzel ayant pour charge de Monsr le bailly voir et visiter le corps mort de certain enfant… ».
63 ADPaC 2MI118R1 fol. 147v, 9 décembre 1596, ordonnances de Villaverde.
64 AGS CMC II 877, Personas que han de dar quenta, pl° 7c, 14 janvier 1597 : payement de 400 écus de 50 patards à Domingo de Villaverde « para pagar algunos obreros que habían trabajado en la guarnicion ».
65 ADPaC 2MI118R1 fol. 164, référence à Pierre Flahault comme procureur fiscal en 1616.
66 ADPaC 2MI118R1 fol. 136, 6 septembre 1596, fol. 136v, fin septembre 1596 : requête d’Adrienne Framer ; fol. 140, requête de Marie de Haudricourt.
67 ADPaC 2MI118R1 fol. 142, 14 de novembre 1596, requête de Jeanne Raverdy.
68 Ranson (E.), Histoire d’Ardres…, op. cit., p 246-247 et p. 681.
69 ADPaC 2MI118R1 fol. 135, 20 août 1596 et fol. 146v-147, 7 et 10 décembre 1596.
Auteur
Docteur en histoire moderne, Universidad de Murcia, Catedrático de Histoira del Pensamiento y de los Movimientos Sociales y Políticos,
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