Minerais, charbons de bois et fers dans les Pyrénées de l’Est : trafic licite et contrebande aux XIVe-XVIe siècles
p. 581-606
Texte intégral
1Dès les lendemains de l’an Mil, le différend qui oppose l’abbé de Sainte-Marie d’Arles et le vicomte de Castelnou au sujet de la propriété d’une mine découverte à la Comba de Buxeda révèle l’importance accordée à l’industrie extractive et les enjeux financiers qui en résultent1. Les conflits sévères nés autour des milieux forestiers sont les témoins de pressions exercées sur ces espaces de plus en plus convoités, exploités et menacés2. Gisements miniers et massifs boisés représentent des sources de revenus considérables pour les autorités en place qui soumettent dès lors l’exploitation et le commerce de ces matières à une réglementation spécifique. Au XIVe siècle, la multiplication des exploitations métallifères, comme le développement de la métallurgie, liée à l’implantation de la mouline hydraulique, prouvent une croissance des productions sidérurgiques ; croissance qui sous entend une accélération des échanges et du commerce. Après le rattachement du royaume de Majorque, et donc du Roussillon et de la Cerdagne qui en dépendent, à la couronne d’Aragon, Pierre III est conscient de la richesse de ces contrées situées au nord des Pyrénées. Il souligne à cet égard : « notre possession si célèbre par l’opulence de ses produits… jouit d’une abondante richesse grâce, bien sûr, à la faveur des dieux ». Sans faire l’analyse de tels propos, la faveur des dieux n’a-t-elle pas offert à ce territoire d’abondants gisements miniers et de vastes espaces forestiers qui ont fait des Pyrénées méditerranéennes un important centre de production de fer durant plus de deux millénaires ? Quelques années après avoir réuni les comtés nord pyrénéens à son royaume, il promulgue plusieurs ordonnances par lesquelles il réglemente l’exploitation des forêts, codifie les usages et cantonne les pratiques3. Il contrôle l’industrie extractive et le commerce du minerai, soumis à des droits de péage et de leude. Par le biais de concessions il gère l’exploitation de ces ressources et fixe les redevances. Au cœur de multiples enjeux, l’exploitation et le trafic de ces matières, au même titre que les fers produits, sont alors strictement encadrés. L’organisation et le contrôle des échanges se traduisent par la mise en place de toute une politique commerciale, dictée à la fois par les enjeux financiers et les conflits politico-religieux.
2Avant de présenter les règles auxquelles obéit la circulation des produits liés à la sidérurgie, nous verrons que le Roussillon bénéficie d’une situation géographique favorable au commerce et aux échanges lointains. La province exporte largement ses minerais et ses fers par terre et par mer, en Europe, vers les pays du bassin méditerranéen et probablement jusqu’au Levant. La littérature et les sources disponibles pour la fin du Moyen Âge sont insuffisantes pour tirer des conclusions fines et définitives sur les circuits d’échanges et la complexité des réseaux marchands. Néanmoins, les registres notariés, les archives de la Procuration royale, les traités de commerce, les ordonnances ou délibérations communales, permettent d’apprécier la place de ces marchandises dans l’ensemble du trafic, et d’identifier les principales routes terrestres et maritimes empruntées par les traginers (« muletiers ») et marins chargés du commerce de ces produits. La documentation disponible révèle également l’origine et le rôle des acteurs du négoce dans le développement de l’industrie locale. Aux côtés de l’aristocratie roussillonnaise (marchands, banquiers, notaires, etc.), les mercaders étrangers occupent une place fondamentale. Des réseaux semblent soigneusement organisés par « des seigneurs du fer ». Dans un espace conflictuel, le commerce des pondéreux et des bois, matières indispensables au développement des communautés mais surtout fondamentales pour la fabrication d’armes, l’artillerie, l’équipement des châteaux ou de la flotte marchande et militaire, est interdit avec tout pays ennemi. Les prohibitions maintes fois renouvelées, les réglementations commerciales strictes, l’importance des droits de leudes, la restriction et le cantonnement des droits d’exploitation, vont rapidement être responsables d’un commerce interlope, commerce difficile à cerner mais qui prend pleinement part, dans ce pays frontière, à l’économie et aux échanges.
Les Pyrénées méditerranéennes : un carrefour commercial
3Comme tout pays montagnard, les Pyrénées nord catalanes peuvent apparaître de prime abord comme un espace fermé, enclavé et paralysé par des frontières naturelles. Ce territoire, dont les limites géographiques prises en compte dans le cadre de cette étude correspondent aux frontières des quatre anciens comtés catalans situés au nord de la ligne de crête pyrénéenne, inclut la plaine du Roussillon autour de Perpignan, le massif des Albères et la haute vallée du Tech (le Vallespir), le massif du Canigou bordé au nord par la vallée de la Têt (le Conflent), et la Cerdagne qui limite ces grands ensembles vers l’ouest de la chaîne. À bien y regarder, ce pays situé entre la montagne et la mer est un espace largement ouvert. Ouvert sur la vaste plaine du Roussillon qui, avec les cols de Jau et de la Quillane, lui permettent de commercer avec le Royaume de France ; ouvert par les cols de montagne au sud (le Col d’Ares, du Perthus et les multiples passages situés au fond de chaque vallée) vers le royaume d’Aragon auquel il est rattaché en 1344, le royaume de Castille et la plaine de l’Empurdan ; ouvert encore à travers le plateau cerdan à l’ouest, vers l’Andorre, le royaume de Navarre et le Comté de Foix ; ouvert enfin grâce à sa façade maritime vers tous les pays du bassin méditerranéen et le Levant. La province du Roussillon4 jouit ainsi d’une situation géographique privilégiée, au carrefour de routes maritimes et de voies terrestres. Sa position stratégique en Méditerranée est largement favorable au trafic de toutes marchandises échangées entre l’Europe et l’Orient. Au lendemain de l’an Mil, les relations commerciales entre les marchands roussillonnais et les marins des pays méditerranéens vont ainsi s’inscrire dans le cadre du développement du grand commerce international.
4Mais aborder le commerce des minerais, charbons de bois et fers, aux XIVe-XVIe siècles, ne doit pas nous faire oublier que la réalité des échanges autour de la sidérurgie, tout comme les principales voies commerciales, remontent à des temps bien plus anciens. Ces passages, ces cols, la plaine et la mer sont dès l’époque romaine les voies empruntées par les voyageurs et marchands du monde antique. Durant toute la période gallo-romaine, les Pyrénées méditerranéennes apparaissent déjà comme un centre de production sidérurgique majeur. D’importants ateliers de réduction s’implantent à proximité immédiate des mines ceinturant le massif du Canigou et autour des gisements de l’Albère5. La circulation des matières premières indispensables à la production de fers (le minerai et le charbon de bois) s’effectue sur de courtes distances6, mais le commerce des produits sortis des fonderies répond à la fois à des besoins locaux et alimente un marché plus vaste. Les principaux échanges s’effectuent à l’échelle valléenne et régionale mais les fers font également l’objet d’un trafic lointain, dépassant les frontières du Roussillon telles qu’elles sont définies à la fin du Moyen Âge.
5Aux XIIIe-XIVe siècles donc, de nombreux circuits commerciaux sont déjà en place et même si les ports de Collioure et de Canet, n’ont pas l’importance économique de Barcelone, ils sont localisés sur une des principales routes maritimes en méditerranée, largement favorable à l’exportation de ces produits.
La littérature et les sources écrites
6De nombreux médiévistes se sont intéressés à l’histoire économique de la Catalogne. Divers ouvrages ont été publiés sur Barcelone et son expansion commerciale aux XIIIe-XVe siècles7. Plusieurs historiens ont abordé le commerce catalan sur les côtes d’Egypte, de Syrie-Palestine et les pays du Levant8. Plus localement, certains auteurs se sont penchés sur le développement des villes marchandes roussillonnaises et languedociennes, et leurs relations économiques avec le monde méditerranéen9. D’autres recherches abordent de manière plus spécifique, le trafic de certaines marchandises10.
7Si le commerce des produits de luxe tels que les draps de Perpignan, la laine, les cuirs, ou celui de marchandises indispensables aux communautés telles que le sel, les céréales ou le vin, alimente largement cette littérature, peu d’auteurs ont abordé le trafic des fers et matières qui lui sont associés11. La rareté des lignes consacrées aux produits dépendant de la sidérurgie ne traduit nullement leur faiblesse dans les échanges commerciaux catalans. Les minerais, les fers, les bois bruts ou réduits en charbons circulent constamment et partout. La diversité de l’outillage, des pièces ou ustensiles métallurgiques, objets indispensables au développement de l’agriculture et à l’expansion de l’artisanat, la multiplicité des armes et pièces d’artillerie offensives ou défensives, au même titre que le bois et ses dérivés, matières fondamentales au Moyen Âge, sont autant de produits qui représentent durant ces périodes de croissance et de conflits un enjeu important, intéressant très largement le commerce.
8Ces marchandises, essentielles au développement des communautés, restent cependant relativement discrètes dans les archives commerciales de la fin du Moyen Âge. La nature des documents, l’indigence ou le silence de nombreuses sources administratives, judiciaires ou notariales, ou bien encore la disparité des informations, expliquent en partie la faiblesse des connaissances sur le grand commerce de ces produits12.
9Les premiers dépouillements des registres de notaires révèlent l’abondance de documents relatifs aux affaires commerciales, mais au regard de l’imposant corpus que représentent ces sources pour le Roussillon, peu de contrats concernent les échanges lointains des marchandises qui nous intéressent. De nombreux documents illustrent l’importance du trafic à l’intérieur de la province mais ils ne permettent guère d’apprécier les circuits plus vastes, dépassant les limites du comté. Si les registres de la procuration royale livrent plusieurs licences d’exportations permettant d’identifier les principales voies d’échanges au XIVe siècle, diverses autorisations commerciales, qui pourraient préciser ces réseaux, sont conservées dans les archives de la couronne d’Aragon et les archives majorquines et n’ont pour l’instant pas été consultées. Au-delà de ces sources, le dépouillement des actes signés à Valence, Marseille, Gênes et Naples, importantes citées marchandes qui entretiennent des relations étroites avec le Roussillon, apporteraient incontestablement d’autres éléments.
10Traiter le sujet avec les sources locales ne permet donc pas de démêler toute la complexité des échanges ou d’identifier les multiples acteurs du trafic. Toute conclusion définitive sur les circuits commerciaux et les destinations des produits reste prématurée. Toutefois, les sources roussillonnaises permettent d’apprécier l’importance de ces matières dans les échanges, de tracer les principales routes maritimes et terrestres empruntées par ces produits ou de mesurer les enjeux économiques et politiques qu’ils représentent. Ce corpus dévoile également la place occupée par certains aristocrates locaux et riches marchands étrangers dans le trafic de ces matières, et leur rôle dans l’expansion de la métallurgie locale.
Les principaux circuits des minerais, charbons de bois et fers
11Minerais et charbons de bois sont les matières premières indispensables à l’industrie sidérurgique. C’est sur le trafic de ces ressources que repose toute l’industrie locale. Il faut distinguer ici les échanges qui s’effectuent à l’intérieur de la province, destinés à l’approvisionnement des forges locales et le commerce plus large de ces produits, alimentant les établissements et ateliers situés à l’extérieur des frontières du Roussillon.
12Au début du XIVe siècle, la géographie des forges est bouleversée par l’installation des moulines hydrauliques sur les cours d’eaux importants. En s’édifiant dans les fonds de vallées et au cœur des forêts sous-exploitées, les premières moulines s’éloignent des mines, et imposent un commerce extra-valléen13. Les gisements qui ceinturent le massif du Canigou et les mines plus modestes de l’Albère alimentent les forges montagnardes et celles qui s’élèvent en bordure de la plaine comme la forge du Boulou. Près d’une trentaine d’ateliers implantés en Vallespir et Conflent s’approvisionnent dans les minières locales.
Trafic des minerais et charbons de bois au XIV° siècle

Les minerais
13Outre l’approvisionnement des usines locales, les minerais de fer roussillonnais alimentent plusieurs moulines installées en versant sud des Pyrénées, dépendant de la couronne. C’est vraisemblablement par le chemin de Requessens, le col du Perthus, la vallée de la Muga, le col d’Ares ou le plateau cerdan (Puigcerda) que le minerai rejoint les ateliers situés de l’autre côté de la ligne de crête.
14Au-delà de l’alimentation des forges du royaume, le bassin métallifère nord pyrénéen répond à des besoins plus lointains. Le minerai fait l’objet d’un commerce à l’extérieur des frontières aragonaises. Dès la première moitié du XIVe siècle, plusieurs forges situées dans le royaume de France s’approvisionnent dans les minières catalanes. Les moulines de Gincla, Gotmar, Sainte-Colombe et peut être Roquefort de Sault, réduisent le minerai extrait des gisements du Conflent, principalement celui de Sahorre14. Les vallées de Mosset, Ayguatébia et plus modestement la haute vallée de l’Aude, ouvertes sur le Languedoc, par les cols de Jau et de la Quillane, s’affichent comme les principales voies terrestres de ce commerce. Ce trafic, qui perdure au cours des siècles suivants, favorise le développement de l’industrie sur les rives de la Castellane, la rivière de Cabrils et les affluents de l’Aude. À la fin du XVIe-début du XVIIe siècle, pas moins de sept forges sont en activité dans la vallée de Mosset, trois s’installent sur le territoire d’Ayguatébia et quatre autres établissements battent le fer autour de Réal, Puyvalador et Formiguères15. Les minerais catalans empruntent également les routes de montagne pour rejoindre l’Andorre et le comté de Foix par les portes de la Cerdagne.
15Durant la première moitié du XVe siècle, le minerai est acheminé à travers la plaine roussillonnaise jusqu’à Collioure où il est embarqué sur des galères et transporté vers Majorque et l’Italie. Dans les années 1445-1450, Clément Gentil, important marchand génois16, obtient une concession, pour une durée de trente ans, lui permettant d’exporter le minerai du Conflent vers Gênes. Cette concession lui est renouvelée en 1476 et fait l’objet quelques années plus tard de contrôles ordonnés par le souverain17. Il est probable que le minerai catalan ne se soit pas arrêté à Gênes et qu’il ait poursuivi sa route vers l’Orient, jusqu’aux ports de Beyrouth, Alexandrie et les pays du Levant18. Si les sources locales sont muettes sur les destinations empruntées par les pondéreux catalans acheminés jusqu’à Gènes, limitant de fait l’appréciation des circuits commerciaux au-delà de la cité marchande, les travaux de Damien Coulon permettent d’avancer certaines hypothèses. L’auteur révèle qu’au cours de la première moitié du XIVe siècle, les Catalans jouent un rôle important dans les importations syriennes et égyptiennes de plomb et de mercure. Le rôle déclinant des marchands aragonais dans la commercialisation des métaux vers le Levant, à partir des années 1350, est relayé par les marins italiens ; les Génois et Vénitiens étant devenus grands pourvoyeurs de cuivre, plomb et étain sur les côtes d’Egypte et de Syrie19. On peut penser que le minerai de fer roussillonnais a pu suivre les circuits qui conduisent ces matières vers l’Orient et le Levant, très demandeurs en produits miniers et métallurgiques. La faiblesse des sources à l’égard du trafic lointain des métaux ferreux et produits dérivés, qui caractérise les sources roussillonnaises et barcelonaises, limite l’analyse20. Le silence de la documentation sur le commerce de ces produits au-delà du monde chrétien n’a cependant rien de surprenant. Il trouve son fondement dans l’interdiction promulguée par la papauté, au lendemain de la prise de Jérusalem par les Seldjoukides, de tout commerce, et plus particulièrement du trafic des marchandises et agrès « utiles à la guerre », avec les pays musulmans21.
16Malgré l’interdiction pontificale et les nombreuses ordonnances royales qui vont suivre, le commerce avec les pays ennemis n’est pas interrompu22. C’est parfois de manière licite, sous couvert d’autorisations spécifiques et moyennant des droits de leude considérables, que les marchands commercent les produits autorisés ou interdits23. Mais nous le verrons, c’est plus fréquemment de manière frauduleuse que semble s’organiser le trafic des marchandises prohibées.
17Si les sources ne sont pas très abondantes ou, plus justement peut-être, restent muettes sur les trafics miniers lointains, elles révèlent l’importance et les enjeux que représente ce commerce par les quantités de mines exportées, la nature des concessions promulguées et la fonction sociale des bénéficiaires. Si Clément Gentil, important marchand génois, a obtenu une concession pour soixante ans, certains notables obtiennent le privilège de commercialiser le minerai sans paiement d’aucune redevance et ce pour la durée de leur vie. Ainsi, le 25 octobre 1355, Castello Patau reçoit l’autorisation d’exporter en France ou ailleurs deux charges de minerai de fer du Conflent par jour, sa vie durant, sans paiement de péage, passage, leude ou autre droit24. Certaines de ces concessions montrent que le trafic de cette matière s’inscrit dans des réseaux commerciaux organisés et contrôlés par des aristocrates locaux ou riches marchands étrangers.
Le charbon de bois
18Au début du XIVe siècle, les charbonniers, occupés à la fabrication du combustible, et les muletiers, fréquemment employés de la forge, assurent aux moulines installées en Roussillon un approvisionnement en charbon dans le cadre d’un trafic essentiellement valléen. Chaque usine bénéficie d’un espace forestier proche, réservé à son affouage. L’acte de concession, autorisant l’implantation de la mouline, indique généralement le nom de la ou des forêts affectées à l’atelier. Le contrat facilite parfois l’accès à ces espaces en accordant le droit d’ouvrir des chemins25. Si le maître de forge bénéficie des droits d’usages sur les forêts désignées, il ne dispose cependant pas de l’intégralité des bois situés dans les limites des territoires alloués. Les essences « nobles » tel que le sapin, ou certains bois utilisés pour des usages spécifiques, tels que le bouleau ou le frêne, sont fréquemment exclues du charbonnage26. Pour limiter le trafic des charbons de bois, coûteux pour le maître de forge, le souverain autorise la mutation de l’établissement. Certains actes précisent que lorsque les bois les plus proches de la forge seront épuisés, elle pourra être déplacée dans un lieu plus boisé27. Autre mesure pour éviter de priver l’établissement de combustible ou le grever des frais de transports trop lourds, le souverain autorise les concessionnaires de l’atelier à s’approvisionner dans les forêts voisines. Lorsque la forêt de la Matte, en partie allouée à la mouline de Formiguères, sera « consumida o gastada », les propriétaires pourront exploiter les bois des seigneuries alentour. Cette mesure s’accompagne alors d’une baisse de la redevance en fer due au royaume, afin de compenser les frais de transport supplémentaires engagés28.
19Indépendamment des besoins en combustible pour la métallurgie, les bois ou charbons prélevés dans les forêts montagnardes répondent à de multiples besoins domestiques et artisanaux. Le trafic de ces matières s’effectue alors sur de plus longues distances. Les bois bruts, ou réduits en charbon sur les lieux même d’exploitation, alimentent les villages situés dans les vallées et les marchés urbains de la plaine roussillonnaise. Ainsi, certains maîtres de forges sont autorisés à vendre ou échanger ces produits extraits des forêts qui leur sont affectées. La fabrication du combustible domestique, comme sa commercialisation, sont strictement réglementées et contrôlées. Seuls les bois secs, morts et gisant à terre dans les limites des forêts allouées à la mouline pourront être charbonnés. Il est soigneusement stipulé que le transport du charbon vers les lieux de consommation devra exclusivement être assuré par les traginers responsables de l’approvisionnement en minerai de la forge. Si d’autres muletiers sont chargés du trafic, ils devront au préalable être nominativement désignés29. Le commerce de ce produit est soumis à une redevance fixée par le roi. Pour chaque charge de trois sacs de charbon, les propriétaires de la mouline de Saladeo devront payer cinq deniers à la fin de chaque semaine30.
20Le droit de charbonnage peut être accordé à des entrepreneurs indépendants qui assurent l’approvisionnement des marchés urbains. En 1369, Arnaud Mayas et deux associés reçoivent l’autorisation de charbonner, pour une durée de dix ans, dans les bois de la vallée de Conat. La concession est stricte et explicite. Elle fixe clairement le nombre de charbonniers, l’outillage à utiliser, les bois à carboniser, les hommes chargés du transport, comme le montant de la redevance31. Durant toute la première moitié du XIVe siècle, la multiplication des règlements et droits d’usages en forêts, le cantonnement et les restrictions des pratiques, les interdictions ou règles concernant le charbonnage, la désignation des muletiers affectés au transport des marchandises, la nomination croissante de gardes forestiers, etc. sont autant de mesures qui révèlent les enjeux économiques et commerciaux dont les milieux boisés font l’objet. Les concessions forestières promulguées en faveur des fusters (« charpentiers ») sont nombreuses et tout aussi encadrées que les droits d’usages dont bénéficient les maîtres de forges ou petits exploitants indépendants. C’est fréquemment par flottage que les bois marchands prélevés en altitude sont acheminés vers la plaine. Bois de chauffage et bois d’œuvre sont également échangés par le biais d’un trafic côtier, entre Collioure et Canet. Ainsi, bois et combustibles circulent sur tous les axes marchands du Roussillon et sont soumis à une réglementation commerciale stricte et contrôlée par les autorités32.
21Au-delà de l’approvisionnement des marchés locaux, ces marchandises répondent à des besoins plus larges. C’est par mer que les produits issus des forêts sont commercialisés et acheminés vers différents ports de la Méditerranée. Dans le leudaire de 1330 de Collioure, ces matières figurent parmi les nombreuses marchandises échangées. La taxe pour le charbon, fixée pour le « sac de Cobliure », s’élève à un denier. Pour les bois marchands commercialisés en fûts, comme pour les planches pour la marine ou le bois d’œuvre, le prix est fixé à un denier par livre. Le prix est calculé à la charge pour les objets finis ou semi finis, tels que les tonneaux, cercles, comportes, douves, écuelles, etc.33. Certaines forêts roussillonnaises sont mises en réserve pour les besoins de la marine, qu’il s’agisse de la fabrication et de l’entretien de la flotte marchande ou des galères militaires. L’exploitation y est strictement réglementée et contrôlée. Les bois sont transportés jusqu’à Collioure, où l’on construit des navires, ou bien ils sont expédiés vers les ports royaux, en charge d’armer ou de réparer les bateaux du royaume34.
22La réduction progressive des milieux boisés sous la pression continue et grandissante de l’industrie, associée aux besoins croissants des communautés, impose aux forges de la fin du Moyen Âge un approvisionnement plus lointain. Certes, au lendemain du dramatique épisode de Peste noire, les forêts ont connu un moment de répit. La crise démographique et le déclin des activités économiques et industrielles se sont traduits par un ralentissement des prélèvements forestiers et l’enfrichement de certains espaces abandonnés35. Si ce court intermède fut salutaire aux milieux boisés, il n’a fait que différer l’élargissement du trafic des bois et charbons. Il ne modifie en rien la tendance qui s’est amorcée dans les années d’avant crise. Rapidement, les échanges se diversifient et se compliquent, suscitant la mise en place de nouveaux réseaux commerciaux. Alors que la plupart des forêts importantes de la plaine ont disparu et que les forêts montagnardes sont de plus en plus menacées, les marchés s’ouvrent vers l’extérieur. Progressivement, plusieurs forges localisées en Conflent s’approvisionnent en charbon des forêts de l’Aude, alors que certaines forges vallespiriennes ont recours au combustible confectionné dans les massifs localisés en versant sud des Pyrénées36.
Le fer
23Bien plus que les charbons de bois et le minerai, les fers bruts ou les produits finis intéressent très tôt un commerce à grande échelle. Bien sûr les forges alimentent les circuits locaux. Les productions des ateliers circulent dans toute la province et répondent aux besoins de l’agriculture, de l’artisanat, de l’industrie et de l’armée. La guerre, entre seigneurs et entre royaumes, est une grosse consommatrice de fer et prive en ce sens une partie du commerce de ces marchandises. Les forges du Canigou sont sollicitées pour équiper troupes et cavaleries, armer les places fortes, les galères militaires ou les navires marchands37. Certaines usines semblent même s’être spécialisées dans la fabrication de canons et de bombardes, alors que des forgerons d’Arles, généralement des Basques, confectionnent des armes blanches (dagues, épées et lances)38. Mais les fers roussillonnais et objets manufacturés se retrouvent dès le XIVe siècle sur les plus importantes places marchandes européennes. Le trafic à grande échelle de ces produits reste pourtant, au regard de son importance, difficile à appréhender.
24À travers les actes notariés on connaît la quantité de fer vendu par les maîtres de forges, le nom et la ville d’origine des marchands. Les contrats mentionnent presque toujours la typologie des fers produits ou commandés, leur qualité, le lieu où ils doivent être livrés et leur prix39. Francesch Palo, marchand de Montpellier exige ainsi du procureur du vicomte d’Evol, à qui il achète 250 quintaux de fer, de le livrer au port de Canet40. Précieuses dans le cadre d’une étude sur la production des forges, les échanges locaux ou la valeur marchande des produits, ces données n’éclairent guère l’analyse des grands circuits commerciaux. Si l’importance des fers fabriqués permet de mesurer le poids économique qu’ils représentent pour la province, le commerce lointain de ces matières reste en partie dans l’ombre. Il est en effet difficile de suivre le parcours des fers vendus à un marchand perpignanais, à un négociant d’Olette ou de Collioure, ou celui embarqué sur les nau, lenys, sagitta ou lembut41 de ces importants marchands montpelliérains, marseillais, génois, ou florentins qui fréquentent régulièrement les places marchandes et les ports catalans et qui se retrouvent, régulièrement impliqués dans les contrats de vente de fer.
25Identifier les réseaux commerciaux, démêler tous les circuits intermédiaires ou suivre les itinéraires empruntés par les fers ou objets manufacturés, s’avère d’autant plus difficile que ces produits s’inscrivent au premier rang des marchandises dont le commerce est, durant la période considérée, fortement réglementé voire même strictement prohibé. Indispensable au développement et à l’enrichissement des communautés, le fer sert surtout à la fabrication des armes et autres objets de guerre. L’Aragon connaît, tout au long des XIVe et XVe siècles, une période sombre marquée par une série de guerres et de conflits. Dans un tel contexte, on comprend aisément les interdictions promulguées envers les pays ennemis, à l’égard du commerce des minerais, des bois utiles à la marine, des fers et autres objets sortis des forges.
26À travers les sources dépouillées se dessinent néanmoins les principaux circuits empruntés par les fers et objets manufacturés qui quittent la province. D’importantes quantités sont acheminées par terre ou par mer vers le sud du royaume. Figuères, Rosas, Blanes, Saint Feliu de Guixols, Barcelone, Valence et Mallorque sont les principales destinations42. Difficile ensuite d’apprécier les parcours de ces marchandises. Plusieurs documents des XIVe-XVe siècles prouvent que Barcelone exporte du fer vers le royaume de Castille mais aussi vers les pays du Maghreb, Chypre, Alexandrie et Beyrouth43, malgré l’interdiction pontificale toujours en vigueur. On ne sait pas si il s’agit réellement de produits fabriqués dans les forges du Canigou, mais l’hypothèse n’est pas exclue et même probable, au regard des quantités de fers expédiées de Collioure vers Barcelone et les ports voisins à cette époque. C’est par cabotage que les fers roussillonnais transitent vers les cités portuaires de Catalogne sud. On peut aisément imaginer qu’ensuite, des côtes de Barcelone ou de Majorque, zones portuaires les plus importantes du royaume, fréquentées par les marchands orientaux, s’organisent les grands marchés licites ou illicites, à travers la Méditerranée. Damien Coulon souligne que les documents relatifs aux ventes de fers en direction de l’Orient sont rares dans les registres notariés ou les archives commerciales de la couronne d’Aragon. Comme les minerais, c’est peut-être par l’intermédiaire des Génois, qui sont - on le verra - largement impliqués dans l’industrie sidérurgique roussillonnaise, que les fers catalans atteignent les côtes orientales et les pays du Levant44. Un contrat signé devant notaire en 1404 prouve la réalité de ce commerce. L’acte signé au mois de septembre devant B. Nadal, précise que 106 quintaux, 2 arrobes et 20 livres (soit près de 4450 kg) sont expédiés vers Alexandrie et Beyrouth45. Les sources roussillonnaises révèlent quant à elles qu’aux XVe-XVIe siècles, les marchands génois et marseillais qui traitent des affaires à Collioure sont particulièrement actifs dans le commerce de ces produits, et acheminent fers bruts et objets finis, mais aussi armes et munitions, vers Gênes et l’ancienne cité phocéenne46. En 1532, un marchand de Marseille demande à récupérer les marchandises perdues lors du naufrage du navire de son père au large de Collioure ; la cargaison est essentiellement constituée de « mercaderias ferramenta, bombardes, sarcias » et autres artilleries et munitions47.
27C’est également à partir des reconnaissances de dettes ou des litiges concernant les engagements passés, que l’on sait que dès le XIVe siècle les fers sont expédiés vers le royaume de France. Petro Taquini, florentin d’origine mais qualifié de « mercator Perpinianus », a vendu 84 quintaux de fer (soit 3508 kg) à des habitants de Peyrepertuse48. Par voies maritimes ou terrestres les forgerons languedociens s’approvisionnent en fers sortis des forges catalanes. Par mer, ils sont exportés vers Narbonne ou débarqués à Aigues Mortes, important port situé aux portes de Montpellier49. Ces marchandises sont chargées à Collioure mais également à Canet, qui progressivement, sous la volonté des marchands perpignanais, s’agrandit et concurrence les ports de la côte rocheuse50.
COMMERCE DES FERS AUX XIV°-XV° SIECLES

28L’existence d’une maison de la leude du poids du fer à Puigcerda dans la première moitié du XIVe siècle révèle que ces marchandises transitent également par les routes commerciales de Cerdagne pour rejoindre l’Andorre et le pays de Foix. L’ordonnance interdisant « de faire passer en France et dans le comté de Foix des armes, des chevaux » et autres marchandises, promulguée dès la fin du XIVe siècle, n’a pas enrayé le commerce. D’autres ordonnances suivront et ne seront guère plus suivies d’effet51.
29Il est pour l’heure difficile de tirer une conclusion définitive à propos des circuits commerciaux empruntés par les fers roussillonnais. Au-delà des routes identifiées à travers l’Europe et la Méditerranée il y a lieu de croire que ces produits se retrouvent par le biais de réseaux intermédiaires ou d’un trafic interlope sur plusieurs marchés des pays d’Orient et du Levant. Dès le XIVe siècle, des Marseillais, des Allemands, des Génois que l’on sait particulièrement actifs dans le commerce avec les ports orientaux, des Florentins et Pisans qui transitent par Collioure et poursuivent leur route jusqu’en Flandre, font escale et traitent des affaires dans les ports catalans. Des marchands de Perpignan fréquentent les foires de Champagne, les côtes africaines et les ports d’Italie et d’Orient52. Dans cette complexité des réseaux marchands tissés à travers l’Europe et l’Orient, nous verrons que le trafic des fers est souvent dissimulé derrière ce qu’il convient d’appeler « l’industrie de la contrebande ».
30Au delà de l’identification de divers circuits d’échanges et d’une certaine organisation du trafic, les sources mettent en évidence le rôle de plusieurs aristocrates, locaux ou étrangers, dans le dynamisme économique et commercial de l’industrie sidérurgique locale.
L’organisation du commerce et les acteurs du négoce
31Bien avant le XIVe siècle, l’activité minière et métallurgique suscite de substantiels bénéfices et représente un moyen de puissance et de contrôle majeur pour les autorités en place53. C’est entre les mains de l’aristocratie que se développent ces activités et que s’organise une part importante du commerce. L’exploitation des gîtes métallifères est fréquemment accordée aux maîtres de forges54, mais ils ne sont pas seuls à bénéficier des privilèges de l’industrie extractive. Individuellement ou en association, de nombreux aristocrates, notaires, riches marchands, banquiers, médecins, conscients des revenus que procure l’industrie extractive sollicitent le droit de rechercher et d’exploiter des gisements55. Par le biais des ordonnances le souverain réglemente l’exploitation de ces ressources, contrôle le commerce et fixe le montant des redevances à payer en fonction du type de minerai découvert et extrait56.
32De semblables concessions sont également accordées à des notables proches du roi, souvent récompensés pour les services rendus à la couronne. Ils sont non seulement autorisés à exploiter – ou faire exploiter – et commercialiser le minerai hors du royaume, mais ce privilège s’accompagne généralement d’exemption de droits de leude57. Jaspert de Tregura, seigneur de Paracols, se voit confirmer en l’an 1391, une franchise pour le commerce du minerai de fer de Sahorre. Il est exempté de toute redevance pour deux charges de minerai qu’il peut exploiter, exporter et vendre chaque jour, où il voudra. Il reçoit cette concession en gage de bon souvenir, « bona memoria », pour la durée de sa vie. Cette concession, accordée par ordonnance royale prononcée à Tortosa le 30 janvier 1383, lui permet par la suite d’approvisionner à moindre frais la forge de Campôme dont il est propriétaire58. Si les faveurs consenties ne rapportent aucun bénéfice direct au Domaine, elles contribuent néanmoins à dynamiser l’industrie, augmenter la production et développer le commerce.
33Indépendamment des aristocrates et des privilégiés du royaume, les hommes ou les communautés d’habitants qui exploitent les mines à des fins commerciales paraissent, au regard des sources du XIVe siècle, assez peu nombreux. Les revenus perçus par le Domaine sur le commerce du minerai, le fermage des droits d’exploitations des gîtes métallifères, ou les chartes édictées pour légiférer cette industrie, prouvent néanmoins l’existence d’une activité minière parallèle59. C’est seulement à partir de la seconde moitié du XVIe siècle que l’industrie extractive semble réellement se démocratiser. Les licences d’exploitation se multiplient dans les archives de la procuration et les ouvriers ou paysans figurent désormais parmi les bénéficiaires de concessions60.
34Au côté de l’aristocratie locale, les mercaders ou notables étrangers bénéficient de semblables droits. Au XVe et XVIe siècle les génois, allemands, navarrais et basques sont même nombreux a obtenir la permission de rechercher et exploiter les mines dans le massif du Canigou et les montagnes environnantes61. Au lendemain de la grande épidémie de peste noire, les Génois et les Basques participent d’ailleurs très activement à la reprise de l’industrie sidérurgique locale. Ils redressent les forges ruinées, en construisent de nouvelles ou bien prennent en fermage les moulines des seigneurs locaux62. Les familles Travi, Gentil, Alamany, Alsubidé, Porra, De Andara, et bien d’autres, deviennent indissociablement liées à la métallurgie roussillonnaise. Ils sont à la fois concessionnaires miniers, locataires ou propriétaires des forges, fermiers des pasquiers royaux pour l’approvisionnement en charbon des usines, et très souvent marchands63. Si, individuellement ou au sein d’une même famille, ils ne cumulent pas ces diverses fonctions, c’est avec des citoyens de même nationalité qu’ils signent les contrats. Jacques Cohorts et Baptiste de Travi, tantôt qualifiés de génois ou de lombards, se sont largement engagés dans l’exploitation minière et forestière, la fabrication de fer et le commerce des produits64. Les Gentil, famille de marchands génois ont investi, on l’a souligné, dans le commerce des minerais et des fers roussillonnais au-delà de la Méditerranée, mais ils sont également impliqués dans l’activité des forges du Vallespir65. C’est à un patron de navire et marin de Gênes, Andréas Corso et Lazare Doria, que Clément Gentil confie en 1480 ses cargaisons de fers66. Quelques années plus tard, on retrouve Pierre Gentil et Baptiste Gentil, qualifiés de mercaders dans la gestion des forges récemment édifiées au Tech67. Fréquemment, ces étrangers vendent, louent ou cèdent leurs biens ou droits de concessions à des parents ou bien à des hommes de même nationalité68.
35Pour bénéficier des exemptions de droits de leude, Italiens et Basques, qui sont les plus nombreux, se déclarent citoyens de Perpignan, de Collioure ou autres cités du Domaine. L’ordonnance royale du 24 septembre 1323 précise que « tout homme qui veut jouir des franchises de la ville (Perpignan) devra y résider au moins six mois »69. De nombreux étrangers, artisans, négociants, exploitants miniers, forgerons et autres, acquièrent ainsi maison ou local afin d’être considérés comme des habitants du lieu70. Pierre Gentil se marie même en 1494 avec Margarida, fille de Jaume Font, notaire de Perpignan71. L’alliance avec une fille de notaire n’est peut-être pas fortuite ; on retrouve régulièrement ces notables directement impliqués dans les contrats de vente de fers, dans la propriété des forges ou dans les actes de concessions minières. Rapidement, de nombreux étrangers se fixent en Roussillon et finissent par faire souche. Les Travi présents dès la seconde moitié du XVe siècle en Vallespir migrent ensuite vers le Conflent et la Cerdagne, où ils sont propriétaires ou fermiers de forges, exploitants miniers et forestiers, ou encore marchands72. L’on retrouve fréquemment dans les forges qu’ils dirigent des forgerons ou commis de même nationalité. De nombreux Italiens à la réputation d’excellents charbonniers sont également employés à la fabrication du combustible en forêt73.
36Ces réflexions mettent en lumière l’existence de réseaux visiblement organisés ; réseaux qui s’efforcent de contrôler les différents maillons de la chaîne opératoire du fer : de l’exploitation minière et forestière à la fabrication des fers et au commerce des produits sortis des usines. Aux côtés des Gentil, des Travi, et autres puissants marchands étrangers, plusieurs exemples d’aristocrates locaux pourraient être cités. Celui notamment de Bérenger d’Oms, conseiller du Roi ou encore la famille Banyuls, seigneurs de Nyer. À la fin du XIVe siècle, Bérenger d’Oms signe plusieurs contrats auprès des maîtres de forges, pour l’achat de quantités de fer74. En 1419, il bénéficie des franchises précédemment octroyées à Guillaume Roger Suau, avec réduction de cens, sur une des forges de Prats-de-Mollo qu’il s’engage à reconstruire75. Six ans plus tard, son fils se voit concéder un bail emphytéotique des droits de leude sur les minerais de fer du Conflent exportés en France76. En 1428, il est gouverneur du royaume de Majorque et reçoit en sa qualité de châtelain de Collioure un salaire annuel de 100 livres77. Ces revenus contribuent largement à consolider sa position et à multiplier ses investissements en matière sidérurgique. Dans les années 1430-1450, c’est lui qui confie d’importantes quantités de fers à des marchands de Collioure, simples intermédiaires qui se chargent de la vente de ses produits78. Un peu plus tard, l’exemple des Banyuls ou des Llupiá, illustre avec autant de clarté le pouvoir de ces « seigneurs du fer »79.
37À ce stade de la recherche toute la complexité des réseaux n’est pas totalement démêlée. S’il ne fait aucun doute sur le fait qu’ils occupent une place prépondérante dans le dynamisme de l’industrie locale, il semble également qu’ils contrôlent directement une partie du grand commerce des minerais et des fers au delà des limites du Comté.
38C’est aussi entre les mains de gens plus modestes que circule une partie des fers produits en Roussillon. Les quantités achetées ou vendues n’ont rien à voir avec les affaires signées par les grands acteurs du négoce, concernant des centaines ou milliers de quintaux par contrat. Les sources notariales montrent que des hommes de couches populaires achètent quelques kilos de métal chez des marchands d’Olette, de Perpignan ou de Collioure. Tisserands, cordonniers, marins, pêcheurs, acquièrent pour quelques livres des fers en vergas, raladas ou cayradets80. Ce sont ces mêmes marchands, spécialisés dans le commerce de ces produits, que les petits investisseurs constituent parfois procureurs pour la vente, à Barcelone ou ailleurs, des quelques quintaux acquis. Brigitte Lainé se demande à juste titre si le fer représente un produit de capitalisation, un bien sûr pour lequel on n’hésite pas à investir quelques sous, ou bien si les barres de métal sont destinées à la fabrication d’objets utiles à l’économie domestique81. Le dépouillement des inventaires après décès du XVIIe siècle montre que certains bourgeois semblent spéculer autour de ces produits. Dans le cadre de ses recherches, Laurent Hernandez a trouvé quelques mentions de barres de fer stockées chez ces hommes, dont les relations avec les milieux d’affaires locaux sont permanentes82. Sur l’important corpus de registres dépouillés, les découvertes restent néanmoins ponctuelles et ne permettent pas de parler d’un phénomène général de spéculation. Un dépouillement plus large des registres et l’analyse des inventaires disponibles pour la fin du Moyen Âge reste indispensable pour apprécier la réalité ou non d’une capitalisation autour du fer.
39Si l’hypothèse d’un investissement voué à la fabrication d’un petit outillage semble peu probable, on peut s’interroger sur la participation de ces petits acquéreurs à l’obscure « industrie de la contrebande », à ce commerce interlope des minerais et des fers où riches et moins riches semblent trouver leur compte. Disloquée, éparpillée, éclatée entre les mains de multiples acteurs, la circulation des produits soumis à des droits de leude importants et interdits au grand commerce, devient plus difficile encore à cerner. Etant l’affaire de tous, nul ne le dénonce. Rares sont les délations concernant les échanges de ces produits effectués par cabotage le long des côtes catalanes ou les trafics par les sentiers escarpés des montagnes. L’importance comme la diversité de ce commerce interlope et de ces pratiques illicites sont pourtant bien réelles et les ordonnances prononcées à la fin du XVIe siècle sont éloquentes83.
Réglementations commerciales des minerais et fers
40Sources de revenus et de puissance pour les uns, moyens de subsistance pour les autres, le charbonnage des forêts, l’exploitation minière, la fabrication des fers et autres objets métallurgiques, comme le commerce de ces matières, on l’a compris, sont au cœur d’enjeux importants, et ont très tôt conduit à un contrôle et une réglementation des échanges84.
41Dès le XIIe siècle, les mines d’argent ou de plomb argentifère découvertes en Roussillon suscitent bien des convoitises et animent d’importants conflits. Utilisés pour la fabrication de multiples objets d’orfèvrerie, ces métaux servent aussi à frapper la monnaie. L’exploitation de ces mines et le commerce qui en découle sont strictement contrôlés et font l’objet de mesures particulières85. L’abondance des gisements de fer en Roussillon aurait pu justifier une relative souplesse de l’exploitation et du commerce des minerais, comme des produits qui en découlent. Or, le fer, indispensable au développement de l’agriculture et de l’artisanat, de plus en plus utilisé dans l’architecture religieuse, militaire et la construction navale, fondamental pour l’artillerie et la fabrication d’armes, obéit à une réglementation commerciale dictée par des enjeux financiers et des guerres diverses.
42Après la prise de Jérusalem par les Turcs, les conflits entre chrétiens et musulmans ont poussé la papauté à interdire tout échange avec les pays ennemis et plus particulièrement le commerce des fers, armes, bois, poudres et autres objets utiles à la guerre. L’ordonnance royale prononcée en 1284 précise qu’il est « défendu d’exporter et de vendre chez les Sarrasins et surtout dans les pays soumis au sultan d’Alexandrie, de la farine, des armes, du fer, du plomb, de la poix, des cordes, des nefs, des lenys et autres espèces de navires ; tout autre objet pourra être exporté et vendu au roi de Tunis et dans les autres pays des Sarrasins, excepté ceux du sultan d’Alexandrie »86. À cette prohibition succède une série d’interdictions dictées par les menaces étrangères et les guerres de conquêtes. Entre 1276 et 1344, le Roussillon et les Baléares constituent un royaume distinct : le royaume de Majorque. Le rattachement de ce dernier à la couronne d’Aragon ne se fait pas sans heurts et transforme le Roussillon en théâtre d’affrontement. Les luttes armées pour le royaume déchu durent pendant plus d’un demi siècle et plongent l’Aragon dans la guerre avec la Castille, qui bénéficie alors de l’appui de l’Angleterre, du Portugal et de la Navarre. Le rattachement de Montpellier à la couronne de France ne rend pas plus clémentes les relations avec les voisins du nord ; relations qui s’aggravent encore au lendemain de la signature du traité de Bayonne, alors même que les expéditions contre la Sicile et la Sardaigne ont envenimé les conflits avec Gênes, et que les guerres napolitaines s’associent aux luttes permanentes contre les Turcs en Méditerranée. Face à de telles difficultés politiques et dans un tel contexte, on comprend aisément la multiplication d’ordonnances royales prohibant le commerce des pondéreux, bois et artillerie militaire, à l’égard de toute puissance étrangère ennemie, alors que l’interdiction pontificale envers les pays musulmans est toujours en vigueur.
43L’interdiction du commerce du minerai hors des frontières fut parfois motivée par les fraudes opérées par certains maîtres de forges. À la fin du XIVe siècle, les forgerons de Gotmar et Sainte-Colombe-sur-Guette se livrent à des pratiques préjudiciables à la réputation des produits du royaume. Ils fabriquent des fers estampillés fers catalans en mélangeant le minerai de Sahorre avec la falsa mena ferri extraite d’un gisement récemment découvert à la Resclause. Dans un premier temps le souverain soumet le commerce du minerai et la fabrication des produits à des règles plus draconiennes et exige des fraudeurs une redevance de 200 livres barcelonaises pour les dommages causés à la Couronne. Deux ans plus tard, malgré les mesures répressives et les serments prêtés par les forgeurs, les fraudes se perpétuent dans la plupart des moulines françaises et tout commerce des minerais du Conflent vers les moulines audoises est alors prohibé87.
44À l’intérieur de la province, le trafic des bois, des charbons, des minerais et des fers est soumis au paiement de droits de leudes. C’est donc par les chemins royaux, bornés de péages, que les muletiers et marchands doivent faire voyager les marchandises. Avec la multiplication des autorisations d’exploitations minières, les limites des concessions se fixent de manière plus précise, les périmètres se réduisent, les règles d’exploitations sont plus clairement exposées. Rapidement les concessionnaires doivent tenir à jour un cahier des charges. En forêt, la politique se durcit, les droits d’usages sont réduits et certaines pratiques sont cantonnées à un espace restreint, voire même interdites. Les maîtres de forges sont à leur tour priés de tenir une comptabilité précise et d’engager à leurs frais des gardes forestiers. La multiplication d’ordonnances à ces égards, la création de nouveaux postes de douane, la nomination de nombreux maîtres de ports, gardes-frontières et forasters (« gardes forestiers »), les criées publiques portant règlement sur le commerce des fers, sont autant de mesures qui mettent en évidence les préoccupations financières du souverain à l’égard du trafic de ces matières. Précieuses ou moins nobles, elles animent autour d’elles de nombreuses convoitises. La croissance des fraudes et des délits pousse les souverains à instaurer une politique minière, forestière et commerciale toujours plus sévère et à mettre progressivement en place une série de mesures pour circonscrire et combattre l’exploitation et le commerce illicite88. Malgré ces dispositions et une législation stricte, ils ne parviennent pas à enrayer ce marché parallèle, cette « industrie de la contrebande », qui apparaît à travers les sources omniprésente et permanente.
Le commerce interlope des minerais et des fers : une industrie lucrative
45Le silence relatif des sources à l’égard du grand commerce des matières associées à la sidérurgie ne trouve-t-il pas une part d’explication dans la promulgation des nombreux interdits ? Que transportent ces navires qui se rendent sans autorisation à Damas, Beyrouth ou Alexandrie ? Les fers, les armes, les munitions, matières très convoitées dans les pays d’Orient, ne représentent-ils pas une part notable de leur cargaison ? Ces marchands cherchent-ils simplement à échapper au paiement de la leude ou « quiriat », ou bien est-ce la nature de leurs marchandises qui les pousse à naviguer clandestinement ? Si les fraudeurs sont vraisemblablement intéressés par cette double possibilité de gain, il reste difficile de connaître la réalité des objets trafiqués. Les contrevenants ont tout loisir de se livrer à de fausses déclarations puisque les marchandises ont été chargées et déchargées en toute clandestinité. Indiscutablement, le non paiement des droits et la vente de produits prisés rend le voyage fort lucratif, même si parfois certains patrons de navires sont interpellés à leur retour et contraints de s’affranchir de la leude royale89.
46Rares sont les sources qui attestent l’existence d’un trafic licite, sous couvert d’autorisations spécifiques, vers l’Orient ou les pays ennemis aux époques de prohibitions. On pourrait croire que le commerce lointain ne représente qu’une part infime du marché des minerais et des fers, or divers documents prouvent que malgré les interdits, la contrebande s’est chargée de donner à l’industrie sidérurgique et au commerce de ces produits un réel dynamisme. Les prohibitions envers le trafic de ces matières ne pouvaient stimuler de larges échanges que par le biais de fraudes ou de corruptions. À l’intérieur de la province comme au-delà de ses frontières, les échanges délictueux sont loin d’être marginaux. Ce commerce interlope, traduit par les sources, reste néanmoins délicat à cerner, à reconstituer, parce qu’il ne suscite aucun recours à l’écrit, si ce n’est lors de procédures engagées contre les fraudeurs malchanceux. C’est à travers les saisies effectuées par les maîtres des ports, les naufrages de galères en mer, les arrestations et procès déclarés suite aux trafics illicites ou les contestations concernant les affaires maritimes, que nous est dévoilée une partie du commerce des minerais et des fers vers les pays ennemis.
47L’intention spéculative motive assurément les contrebandiers qui évitent délibérément les maisons de la leude afin de ne pas déclarer les minerais et les fers commercialisés. Les procès relatifs au non paiement des droits occupent des pages des registres de la Procuration. À l’intérieur même de la province, échapper au paiement des taxes imposées sur le trafic des bois, charbons, minerais ou fers, est l’affaire de tous. Les nobles, les clercs, comme les « petites gens » se retrouvent sur les chemins de l’illégalité. Les propriétaires des moulines ne sont pas étrangers, loin s’en faut, à la corruption. À la fin du XIVe siècle les maîtres de forges de Mosset et du Boulou, profitent largement de la situation de leurs ateliers, implantés sur les grands circuits de commerce des minerais vers la France et la Méditerranée. Faute de déclarer les charges de minerai reçues, ils se voient contraints par une ordonnance royale de 1399 à tenir une comptabilité précise. Chaque charge devra être inscrite sur un registre, ainsi que la date de réception, le nom du traginer et la provenance du minerai90. Au-delà des fausses déclarations relatives à la consommation de mine ou le trafic des charbons de bois, ils n’hésitent pas à dissimuler une partie des ventes de fers produits dans leurs usines. Abbés et moines, soucieux de tous gains et profits procurés par l’industrie sidérurgique, ne reculent pas devant la fraude. En 1431, l’abbé de Saint-Michel de Cuxa, propriétaire de plusieurs forges en Conflent est condamné à payer les droits de leude pour le fer qu’il vend dans le leudaire de Perpignan ou exporte en dehors du Conflent91. Les muletiers chargés du transport des marchandises sont eux aussi tentés de tirer profit, aussi maigre soit-il, des abus liés au trafic. Fréquemment, ils évitent les chemins royaux et empruntent les sentiers éloignés des collecteurs de la leude ; parfois ils rusent en chargeant plus de minerai que ce qu’ils ne déclarent. Au mois de mars 1446, l’ordonnance prononcée interdit ainsi aux traginers qui portent le minerai du Conflent de compter plus de trois quintaux par charge92.
48Pour empêcher le départ des navires qui ne se sont pas acquittés des droits, les gardes-ports de Collioure sont parfois contraints de saisir timons et voiles93. Par terre, les officiers procèdent à la saisie des montures ou plus fréquemment des marchandises. En 1503, ce sont les maîtres du port de Salses qui saisissent des armes blanches, six épées et deux lances, acheminées vers le royaume de France de manière illicite par des Génois, résidants à Arles en Vallespir94.
49L’absence de déclaration n’est pas le seul moyen d’échapper au paiement des redevances. Les mercaders étrangers, ne bénéficiant pas d’exemptions de droits, passent des accords avec des marchands locaux qui vont servir de prête nom. Au mois d’avril 1585, un procès oppose le fermier de la leude royale de Collioure à un citoyen de Barcelone. Ce dernier réclame en vertu de sa franchise, un billet de desempaix pour trois mille quintaux de fer. Le fermier refuse de délivrer le billet de sortie soupçonnant que le fer appartient à une compagnie de Génois et exige en ce sens le règlement des droits de leude à raison de quatre deniers par quintal95. Difficile pour les gardes d’apprécier la légalité des échanges et d’identifier ces louches trafics qui se dissimulent derrière des affaires apparemment honorables. Autre méthode des contrebandiers, la corruption des gardes. Malgré les prestations de serment, de nombreux officiers se laissent aisément corrompre et cautionnent le commerce interlope. Dénonciations, paiement des dommages, révocations, sont autant de mesures qui ne suffisent pas à enrayer le mal. À la fin de l’année 1545, ce sont tous les maîtres de ports de nationalité française, soupçonnés ou non de corruption, qui sont déchus de leurs fonctions96. C’est parfois sous la menace et contraints par la force que ces gardes se plient aux exigences des fraudeurs. Les autorisations de port d’armes, les lettres de sûreté et de protections, révèlent l’insécurité dans laquelle ces officiers exercent leur tâche97.
50En 1583, l’ordonnance royale prononcée publiquement pour réglementer le trafic des produits sidérurgiques dénonce l’ampleur du commerce interlope de ces produits. Elle révèle que d’importantes quantités des fers sont expédiées par mer, des plages de Sainte-Marie, d’Argelès ou des ports de Collioure et de Canet, pour être acheminées en terres de infels y enemisos de la dita réal magestat y en lo regne de França98. L’ampleur de ce commerce comme ses conséquences économiques restent difficiles à mesurer ; néanmoins, la contrebande des minerais, des fers et des bois est sans aucun doute une activité permanente, omniprésente et enrichissante. Préoccupante pour les intérêts de la couronne, elle donne à l’industrie sidérurgique locale un élan et un dynamisme incontestable, sans cesse menacés par les prohibitions et interdits. Largement favorisée par sa situation en « pays frontière » et par son ouverture sur la mer, elle occupe et occupera au cours des siècles suivants une place fondamentale dans l’économie et le commerce roussillonnais99.
Conclusion
51Si au début du XIVe siècle l’industrie drapière offre à Perpignan une prospérité et un rayonnement sans précédent, le commerce des minerais et des fers participe également, de manière non négligeable, à l’essor économique de la province. Bien avant le rattachement du Roussillon à la couronne d’Aragon, mines, forges et forêts font l’objet de convoitises. Aux côtés de l’aristocratie locale, mercaders et riches financiers étrangers ne tardent pas à investir dans l’industrie. Génois, Lombards, Basques ou Navarrais en deviennent d’importants acteurs qui prennent place au côté des « seigneurs du fer » locaux. Propriétaires de forges, concessionnaires miniers et forestiers, ils contrôlent directement une partie du négoce des produits liés à la sidérurgie. Les marchandises voyagent par terre et par mer, au-delà des frontières du royaume. La complexité des réseaux n’est pas totalement élucidée, les circuits lointains ne sont pas clairement tracés, mais les produits transitent sur les plus grandes routes commerciales d’Europe, sillonnent la Méditerranée et atteignent probablement les places marchandes d’Orient. De manière licite ou illicite, minerais et fers suivent les circuits empruntés par les marchands étrangers ou les marins perpignanais qui conduisent draps et autres matières en France, en Italie, jusqu’à Constantinople, Rhodes, Chypre, en Syrie ou en Egypte, malgré les prohibitions royales et pontificales en vigueur. Procès pour fraudes, malversations, fausses déclarations, usurpations de droits, délits dérogeant aux règles commerciales draconiennes édictées autour de ces produits, révèlent la permanence d’un commerce interlope. L’importance de ces trafics et échanges conclus en toute discrétion, dissimulés derrière des contrats qui semblent en tous points honorables, est difficile à apprécier, même s’il ne fait aucun doute que la contrebande est partie prenante de la prospérité de l’industrie. Les barrières douanières, les droits plus pesants, la limitation des pratiques, les contrôles plus nombreux, mesures théoriquement paralysantes, sont en totale contradiction avec la réalité d’une économie croissante. Comment expliquer un tel essor, un tel développement, une telle expansion de l’industrie extractive et de la production des fers dans un contexte d’enfermement commercial de la province ? Nobles ou moins nobles, riches marchands, notaires ou simples muletiers et artisans, sous couvert d’autorisations légales ou dans l’ombre, chacun spécule ou se hasarde à améliorer le quotidien en gagnant quelques sous dans ce trafic incessant des matières prohibées.
Notes de bas de page
1 Arch. dép. Pyr.-Or., 1 B 234, f° 14 v-15 ; cf. transcription de l’acte, V. Izard, Les montagnes du fer. Eco-histoire de la métallurgie et des forêts dans les Pyrénées méditerranéennes (de l’Antiquité à nos jours), Thèse, Université de Toulouse II, Toulouse, 1999, tome II, annexe VIII, p. 110-111. S’il s’agit là d’une mine d’argent dont la valeur marchande est plus importante que le minerai de fer, les mines, de quelque nature qu’elles soient, ont fréquemment été l’objet de conflits épineux.
2 V. Izard, « La forêt médiévale : enjeux, gestion et mutation d’un espace menacé », La montagne et ses usages, actes du colloque international, Font-Romeu (Pyrénées-Orientales), 8-10 novembre 2002, Résopyr, à paraître.
3 Dans son ordonnance de 1345, Pierre III durcit la politique forestière amorcée quelques décennies auparavant par le souverain de Majorque. L’ordonacio prononcée per la cosa publica e per conservatio dels comptatz impose des mesures restrictives à l’égard des forêts et vise à harmoniser les pratiques et usages à l’ensemble des peuplements appartenant au domaine ou possédés en indivis. Sur la gestion des forêts, la politique mise en œuvre et le contrôle de l’extraction minière à la fin du Moyen Âge je renvoie à ma thèse : V. Izard, Les montagnes du fer…, op. cit., p. 247-253 et 447-484 ; à paraître sous le titre : Le fer, la forêt et les hommes. 2000 ans d’histoire de l’environnement dans les Pyrénées méditerranéennes, Perpignan, éd. Trabucaire.
4 On retiendra parfois l’appellation de « Province du Roussillon » ou de « Roussillon » pour désigner l’ensemble du territoire qui nous intéresse. Ce n’est qu’au lendemain du rattachement des quatre anciens comtés nord catalans à la couronne de France (par le Traité des Pyrénées en 1659) que le terme de « Province du Roussillon » apparaît dans la littérature et représente l’espace géographique qui nous préoccupe ; mais, dés le XIIIe siècle, le nom de « Roussillon » et régulièrement employé pour désigner l’ensemble de cet espace, alors nouvellement annexé par le Royaume d’Aragon.
5 V. Izard, Les montagnes du fer… . op. cit., p. 121-143.
6 Les plus importants centres de réduction romains recensés à ce jour se sont implantés à proximité des gisements miniers de la montagne de Batère. Les sidérurgistes ont trouvé dans ces secteurs les conditions favorables à l’implantation des ateliers. Outre des ressources métallifères facilement exploitables au moyen des procédés antiques, les sidérurgistes se sont installés au cœur de vastes espaces forestiers, indispensables à l’approvisionnement en combustible, et proches de petits cours d’eau, ressource nécessaire à la fabrication des fourneaux et aux besoins des ouvriers. D’imposants ferriers, témoins d’une activité qui s’échelonne entre le IIe siècle avant J.-C. et le IVe siècle après, se situent principalement autour des villages actuels de Saint-Marsal, La Bastide, Corsavy, Taurinya et Valmanya. V. Izard, Les montagnes du fer… ., op. cit.
7 C. Carrère, Barcelone, centre économique à l’époque des difficultés (1380-1462), [2 vol.], Paris et La Haye, 1967. M. Del Treppo, Els mercaders catalans i l’expansió de la corona catalano-aragonesa al segles XV, Barcelone, 1976. Capmany, Memorias históricas sobre la marina, comercio y artes de la antigua ciudad de Barcelona, Madrid, Antinoi de Sancha, 1779-1792, 5 vol. in-4°.
8 P. Vidal, « Expéditions des marins et des marchands roussillonnais sur les côtes de la Syrie et de l’Egypte pendant le Moyen Âge », Bulletin de la Société Scientifique et Littéraire des Pyrénées-Orientales, Perpignan, 1900, vol. 41, 221-257. D. Coulon, Barcelone et le grand commerce d’Orient : un siècle de relations avec l’Egypte et la Syrie-Palestine (1330-1430 environ), Thèse, Université de Paris I, 1999.
9 G. Romestan, « Le Commerce à Narbonne dans le second quart du XIVe siècle », Mémoires de la société archéologique de Montpellier, Hommage à Jean Combes, Montpellier, 1991, t. XIX, 47-60. Du même auteur : « La foire d’Elne au XIVe siècle », Cahiers Ligures de Préhistoire et d’Archéologie, 1969, n° 18, 79-82 ; « L’activité des muletiers catalans entre Perpignan et Valence dans la première moitié du XIVe siècle », Bulletin Philologique et historique jusqu’en 1610, 1967, Paris, 1969, p. 779-796 bis ; « Les relations commerciales entre Perpignan et la Ligurie aux XIVe et XVe siècles », Atti del Congresso Storico Liguria-Catalogna (Ventimiglia-Bordighera-Albenga-Finale-Genova, 14-19 ottubre 1969. Instituto Internazionale di Studi Liguri, Bordighera, 1974, 361-375. J-B. Renard de Saint Malo a publié plusieurs articles relatifs au commerce maritime et au port de Collioure dans : Le Publicateur du département des Pyrénées-Orientales, années 1835- 1837.
10 Je pense notamment aux travaux d’Anthony Pinto sur le commerce des draps et le pastel.
11 Dans son article, R-H. Bautier met en évidence la présence du fer comme produit échangé dans le cadre de l’expansion du commerce en Europe Occidentale. R-H. Bautier, « Notes sur le commerce du fer en Europe Occidentale du XIIIe au XIVe siècle », Revue d’histoire de la sidérurgie, 1960, p. 7-35. Pour les Pyrénées centrales, C. Verna s’est largement intéressée à l’organisation du commerce des minerais et des fers produits dans les comtés de Foix, la seigneurie de Mirepoix et la vicomté de Béarn. Verna C., Le temps des moulines. Le fer et son exploitation du Comté de Foix à la vicomté de Béarn (fin du XIIe siècle-fin du XVe siècle), Université de Paris I, 1994, p. 169 et suiv.
12 Plusieurs historiens spécialistes des relations commerciales entre les côtes catalanes et les pays méditerranéens soulignent le silence relatif des sources sur le trafic des minerais de fers et produits sidérurgiques. Capmany, Mémorias históricas…, op. cit. ; D. Coulon, Barcelone et le grand commerce d’Orient…, op. cit. ; H., Ferhat, Sabta des origines au XIVe siècle, éd. Al Manahil, Rabat, 1993, p. 334.
13 L’étude sur le long terme visant à apprécier l’impact de la métallurgie sur les dynamiques environnementales a mis en évidence que, dès le haut Moyen Âge, les ateliers de réduction s’éloignent progressivement des mines et s’installent au cœur des espaces forestiers. Les ressources en combustible déterminent dès lors l’implantation des fourneaux, dont la durée d’activité n’a plus rien de comparable avec les gros centres de réductions antiques. V. Izard, Les montagnes du fer… . op. cit., p. 143-164.
14 Arch. dép. Pyr.-Or., 1 B 122, fol. 21-v ; 1 B 158, fol. 28-v ; 1 B 153, fol. 19 v-20, fol. 24 et fol. 126 ; 1 B 226 ; 1 B 110, fol. 86 v-87
15 V. Izard, Les montagnes du fer… . op. cit.
16 Clément Gentil est un facteur des Doria, puissante famille génoise qui, comme les Spinola, s’est largement intéressée à l’industrie sidérurgique et au commerce de ses produits.
17 Arch. dép. Pyr.-Or., 1 B 299, prorogation de la concession daté du 6 juillet 1476 ; 1 B 412, fol. 167 v, 1489.
18 On connaît la puissance et la domination de Gênes sur une grande partie des trafics méditerranéens au début du XIVe siècle, grâce notamment à ses établissements en Méditerranée orientale, ses comptoirs en Syrie et en Mer noire. Les Génois commercent activement avec Alexandrie, Chypre, la Petite Arménie, l’Empire de Trébizonde et le port de Tana sur la route mongole de la soie et des épices.
19 D. Coulon, Barcelone et le grand commerce d’Orient… op. cit., tome II, p 468-469.
20 Damien Coulon, qui a travaillé sur les sources conservées à Barcelone, souligne le silence des documents à ce sujet.
21 Cf. infra : Réglementations commerciales des minerais et des fers.
22 Les actes signés devant les notaires Jacques Molines (1388-1393), Raymond Ferrer (fin XIV- 1413), ou Jacques Nadal (1412-1415) prouvent que certains marchands perpignanais entretiennent à la fin du XIVe siècle et au XVe siècle des relations régulières avec Chypre, Damas, Beyrouth et Alexandrie ; Arch. dép. Pyr.-Or., 3 E 1/465 - 3 E 1/474, 1 B 195 ; 1 B 198 ; 1 B 199.
23 André Borrell de Collioure, patron de la nef Sent Johan Batista, s’acquitte de la somme de 210 livres, payée à la procuration royale, pour les droits sur les marchandises qu’il exporte vers les pays du Soldan (Sultan d’Alexandrie). Arch. dép. Pyr.-Or., 1 B 196 ; 1 B 198 ; 1 B 199.
24 Arch. dép. Pyr.-Or., 1 B 110, fol. 50 v -51
25 Les lieux d’installation des premières moulines du XIVe siècle sont dictés par la disponibilité des ressources forestières. Pour le souverain comme pour les clercs, propriétaires de vastes espaces boisés, la mouline, au même titre que la scierie, s’inscrit comme un moyen de mise en valeur des ressources sous-exploitées. Dans le cadre de la politique de gestion stricte des milieux qui se met en place au lendemain du rattachement du Roussillon à la couronne d’Aragon, la forêt charbonnée n’est pas livrée sans contrôle à la hache des charbonniers. Le commerce du bois comme des charbons est contrôlé par les autorités ; cf. V. Izard, Les montagnes du fer… . op. cit., p. 454-484.
26 Arch. dép. Pyr.-Or., 1 B 94, fol. 26 v, 1314 ; transcription de l’acte, V. Izard, Les montagnes du fer… op. cit., tome II, annexe IX, p. 117.
27 Arch. dép. Pyr.-Or., 1 B 94, fol. 65, 1321 ; transcrip. ibid., p. 119-120.
28 Arch. dép. Pyr.-Or., 1 B 94, fol. 75 v-76, 1323 ; transcrip. ibid., p. 122-123.
29 Arch. dép. Pyr.-Or., 1 B 94, fol. 65, 1321 ; transcrip. ibid., p. 119. Arch. dép. Pyr.-Or., 1 B 94, fol. 81 v, 1326 ; transcrip. ibid., p. 126.
30 Ibid.
31 V. Izard, Les montagnes du fer… op. cit., tome II, annexe X, p. 153-154.
32 V. Izard, « Bois et charbons de bois : organisation et réglementation du commerce aux XIVe-XVIIe siècles », à paraître.
33 Arch. dép. Pyr.-Or., Livre vert mineur de Perpignan, fol. 177 v-180 ; 3 E 1/4899.
34 Arch. dép. Pyr.-Or., 1 B 228, fol. 3, Notule de Raymond Ferrer, 1420 ; Arch. dép. Pyr.-Or., 1 B 94, fol. 20, 1311, transcrip. : V. Izard, Les montagnes du fer… op. cit, tome II, annexe X, p. 137 ; 1 B 218.
35 Je renvoie au chapitre de ma thèse : « Le temps de la crise démographique au déséquilibre écologique », V. Izard, Les montagnes du fer… op. cit, 485-499.
36 V. Izard, « Bois et charbons de bois… », op. cit.
37 V. Izard, Les montagnes du fer… op. cit, 203 et suiv. Arch. dép. Pyr.-Or., 1 B 34 , 1 B 94, 1 B 121 ; 1 B 221 ; 1 B 240 ; 1 B 242 ; 1 B 244 ; 1B 278, fol. 56 ; 1 B 418, fol. 84-v-85.
38 V. Izard, Les montagnes du fer… op. cit, 246. Arch. dép. Pyr.-Or., 3 E 1/6284 ; 1 B 183.
39 Les actes notariés relatifs à la vente des fers à la sortie de la forge sont nombreux. Ils permettent d’apprécier la quantité et le type de produits vendus. À titre d’exemple, on peut citer la vente de fer : “de verga de sinch vergas” 3 E 1/2617 ; « de plata de tres y de quatre pesses » 3 E 1/2617 ; « dos cents cinquanta quintars de verga y cinquanta quintars de cayradet y lo restant cinquanta quintars de plata » 3 E 2/275. Les fers à livrer doivent être : « bo e mercader de bon pes » 3 E/1 2617 ; « ferro verga bo, mercader rebedor y no trencadis y de bon pes » 3 E/1 4131. Lorsque les contrats précisent les lieux de livraison des produits, il s’agit habituellement de la boutique du négociant ou du marchand signataire de l’acte.
40 Arch. dép. Pyr.-Or., 3 E 2/6275.
41 Différents types de bateaux sont utilisés pour le commerce maritime. Les plus petits, les barques et les lenys (de 30 à 80 botes) servent aux échanges effectués par cabotage. Les sagittas, navires à voile et à rame, les lembuts (de 80 à 500 quintaux) ou les naus, sont des bateaux beaucoup plus imposant qui servent à la navigation en haute mer.
42 Les documents sont nombreux mais on peut citer : Arch. dép. Pyr.-Or., 3 E 1/2250, fol. 41 ; 3 E 1/2253, fol. 18 ; 3 E 1/261, fol. 6 ; 3 E 20/20, fol. 34-v-35 ; 3 E 1/1660 ; 3 E 2/846 ; 1 B 418, fol. 163 ; 1 B 434, fol. 50 ; 3 E 1 /4899 ; 1 B 94, fol. 90 ; 1 B 176 ; voir aussi : E. Carrere, Barcelone, centre économique à l’époque des difficultés (1380-1462), Paris, 1967, p. 355.
43 Capmany, Memorias históricas sobre la marina, … op. cit ; En septembre et octobre 1355, quatre licences d’exportations de fer à destination de Chypre sont signées. Au total, 365 quintaux de fer en barres (soit environ 15 tonnes) seront expédiés à bord de la nef de Joan Lombarda. Arch. de la Couronne d’Aragon, Real Patrimonio, Rég. 1054, fol. 8 et 12 v ; document communiqué par D. Coulon ; D. Coulon, Barcelone et le grand commerce… op. cit.
44 D. Coulon, Barcelone et le grand commerce… op. cit.
45 ibidem.
46 Arch. dép. Pyr.-Or., 3 E 1/1982, fol. 27 ; 3 E 2/846 ; 1 B 427, fol. 100 ; 1 B 434, fol. 214 v-215
47 Arch. dép. Pyr.-Or., 1 B 424, fol. 191 v-192.
48 Arch. dép. Pyr.-Or., 3 E 1/474, fol. 50, notule de Jacques Molines.
49 Arch. dép. Pyr.-Or., 3 E 2/275, manuel de J. A. Vilella ; 1 B 434, fol. 103-v-104 ; G. Romestang, « Le commerce à Narbonne dans le second quart du XIVe siècle », Mémoires de la société archéologique de Montpellier, Hommage à Jean Combes (1903-1989), Etudes Languedociennes, Montpellier, 1991, t. XIX, 47-60.
50 Dès la fin du XVe siècle, Canet joue un rôle de plus en plus important dans le commerce maritime. Aux XVIe-XVIe siècles, c’est de là que sont expédiés la plupart des fers produits dans la province. Certaines licences d’embarquement concernent jusqu’à 3000 quintaux. Arch. dép. Pyr.-Or., 1 B 434 fol. 91, 1583.
51 Arch. dép. Pyr.-Or., 1 B 94, f° 12 v° ; 1 B 121 ; 1 B 373 ; 1 B 434, fol. 103-104.
52 On peut lire à ce sujet : B. Lainé, La vie économique et sociale à Collioure (1360-1490), mémoire dactylographié, Paris, 1965, 432 et annexes.
53 V. Izard, Les montagnes du fer… op. cit, p. 228-256.
54 Arch. dép. Pyr.-Or., 1 B 94, fol. 61 v, fol. 69 ; 1 B 257, fol. 61 v -63 ; 1 B 265, fol. 149 ; 1 B 424, fol. 225 v-226
55 Comme pour l’édification de certaines moulines, plusieurs notables s’associent et s’engagent dans l’exploitation des gisements locaux. Arch. dép. Pyr.-Or., 1 B 241 ; 1 B 419, fol. 140 ; 1 B 428, fol. 208 v -209 ; 1 B 430, fol. 52 v-53-v, fol 78 v et suiv.
56 Arch. dép. Pyr.-Or., 1 B 237, f° 18.
57 Arch. dép. Pyr.-Or., 1 B 110, fol. 50 v-51 et fol. 86 v -87 ; 1 B 153, fol 19 v-20-v.
58 Arch. dép. Pyr.-Or., 1 B 153, fol. 24 ; 1 B 351, fol. 30.
59 Arch. dép. Pyr.-Or., 1 B 381, fol. 22 v ; 1 B 111, fol. 40 v -41 ; 1 B 100, fol. 72 v-73 ; 1 B 121, fol. 80 ; 1 B 122, fol. 21-v ; 1 B 145, fol. 23 ; 1 B 152, fol. 28-v ; 1 B 177, fol. 63 v-64, etc..
60 Arch. dép. Pyr.-Or., 1 B 435 ; 1 B 436 ; 1 B 437.
61 Arch. dép. Pyr.-Or., 1 B 415, fol. 74 v-75 ; 1 B 420, fol. 142 ; 1 B 424, fol. 225 v-226 ; 1 B 427, fol. 97-v - 98 ; 1 B 436, fol 29-v ; 1 B 437, fol 38-v, fol 47...
62 V. Izard, Les montagnes du fer… op. cit, p. 278-287.
63 Arch. dép. Pyr.-Or., 1 B 413, fol. 82 v ; 1 B 419, fol. 205 ; 1 B 418, fol. 191.
64 Arch. dép. Pyr.-Or., 124 AC 154 ; 1 B 351, fol. 12 ; 1 B 413, fol. 82 v ; 1 B 418, fol. 191 ; 1 B 419, 31 mai 1514, fol. 206, 16 septembre 1514 ; pour ce qui concerne les relations entre ces étrangers, je renvoie à ma thèse V. Izard, Les montagnes du fer… op. cit, p. 278-287.
65 Arch. dép. Pyr.-Or., 1 B 416, fol. 279 ; 1 B 419, fol. 150.
66 Arch. dép. Pyr.-Or., 3 E 1/1982, fol. 27.
67 Arch. dép. Pyr.-Or., 1 B 417, fol. 63-v-64.
68 Arch. dép. Pyr.-Or., 1 B 416, fol. 279.
69 Arch. dép. Pyr.-Or., 1 B 94, fol. 74 v.
70 Arch. dép. Pyr.-Or., 1 B 420, fol. 52 v ; 1 B 27, fol. 24.
71 Arch. dép. Pyr.-Or., 3 E 1/798.
72 Arch. dép. Pyr.-Or., H 174 ; 3 E 21/198.
73 V. Izard, Le fer, la forêt et les hommes…, op. cit.
74 Arch. dép. Pyr.-Or., 1 B 131, 1375.
75 Arch. dép. Pyr.-Or., 1 B 257, fol. 61-v-63-v.
76 Arch. dép. Pyr.-Or., 1 B 232 fol. 110 v-114.
77 Arch. dép. Pyr.-Or., 1 B 232, fol. 153 v-154, 1428.
78 Arch. dép. Pyr.-Or., 3 E 1/260, fol. 35, 1435. B. Lainé, La vie économique… op. cit.
79 V. Izard, Les montagnes du fer… op. cit.
80 Il s’agit de barres de fer de différentes dimensions. Arch. dép. Pyr.-Or., 3 E 1/2254, fol. 30 -31 ; 3 E 1/225, fol. 9, 29, 41, 126 ; B. Lainé, La vie économique… op. cit., p. 112.
81 Ibid.
82 Je remercie Laurent Hernadez de m’avoir transmis ces informations qui font partie de sa thèse en cours d’achèvement sur les Confréries du rosaire dans le diocèse d’Elne.
83 Arch. dép. Pyr.-Or., B 434, fol 103-104 ; 1 B 379, fol. 24-v-25.
84 Je ne reprends pas ici les réglementations relatives au commerce des bois et charbons. La législation mise en place autour de ces ressources, brièvement évoquée au début de cet article, comme le trafic licite ou interlope de ces produits sont plus largement traités dans : V. Izard, « Bois et charbons de bois… op. cit.
85 Arch. dép. Pyr.-Or., 1 C 1234 ; 1 B 94 ; fol. 69 ; 1 B 232 ; 1 B 233.
86 Arch. dép. Pyr.-Or., 1 B 146 16-v -17.
87 V. Izard, Les montagnes du fer… op. cit, p. 251-253.
88 V. Izard, Les montagnes du fer… op. cit. p. 247-253.
89 Arch. dép. Pyr.-Or., 1 B 147 fol. 117-v - 118.
90 Arch. dép. Pyr.-Or., 1 B 177 fol. 63-v - 64.
91 Arch. dép. Pyr.-Or., 1 B 367, fol. 179.
92 Arch. dép. Pyr.-Or., 1 B 267, fol. 109 v.
93 Arch. dép. Pyr.-Or., 1 B 281 ; 1 B 192.
94 Arch. dép. Pyr.-Or., 1 B 416, fol. 175.
95 Arch. dép. Pyr.-Or., 1 B 434, fol. 214-v - 215.
96 Arch. dép. Pyr.-Or., 1 B 427, fol. 43.
97 Arch. dép. Pyr.-Or., 1 232 ; 1 B 434.
98 Arch. dép. Pyr.-Or., 1 B 434, fol 103-104.
99 Sur la contrebande en Roussillon à la fin du XVIIIe-début XIXe siècle, lire l’excellent chapitre de Michel Brunet dans son ouvrage : Le Roussillon, une société contre l’état (1780-1820), éd. Trabucaire, Perpignan, 1990.
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