Les Guillelmides : une famille de l’aristocratie d’empire carolingienne dans le Midi de la Gaule (VIIIe-Xe siècles)

Christian Lauranson-Rosaz

doi:10.4000/books.pumi.36183

Les Guillelmides : une famille de l’aristocratie d’empire carolingienne dans le Midi de la Gaule (VIII^e-X^e siècles)

Christian Lauranson-Rosaz

p. 45-81

Texte intégral

Image 10000000000001DA00000226E2A72079207662D4.jpg — Fig. 1. [Guillaume le Pieux]

1Les Guillelmides, alias Guilhemides1, du nom de leur ancêtre fondateur et mythique qui est l’objet de ce colloque, sont un lignage de la Reichsaristokratie l’aristocratie d’empire, implanté comme tant d’autres dans le Midi de la Gaule par les Carolingiens, dans le cadre de ce qu’on peut appeler leur « dispositif » politique de reconquête et de contrôle des terres méridionales, des terres traditionnellement rebelles. C’est donc une famille franque « parachutée » dans le Sud par le pouvoir pour le servir, mais c’est aussi paradoxalement une famille qui s’est « acculturée » à ce Sud, au point d’en marquer durablement l’histoire : on peut dire sans exagération que la famille de saint Guillaume a d’une certaine manière « fait le Midi »2 …

2La problématique de cette contribution est double, puisqu’elle s’attache aux deux aspects qui la façonnent :

C’est d’abord, dans la plus pure tradition de l’historiographie française, un essai d’histoire politique : en termes modernes et anachroniques, nous dirons que c’est un problème de « science politique », celui des rapports entre le pouvoir central et les pouvoirs locaux, en l’occurrence entre les agents du pouvoir, plus ou moins contrôlés, et les élites locales3.
C’est ensuite, de manière plus sociale ou anthropologique, une étude des rapports entre le pouvoir et la parenté aristocratique, auxquels l’historiographie récente s’est beaucoup intéressée : pour les temps carolingiens, nous faisons référence aux travaux majeurs de Karl Schmid, Olivier Guillot, Régine Le Jan ou Karl Ferdinand Werner4.

3Chronologiquement, nous nous situerons entre le milieu du VIII^e siècle – au temps de l’ancêtre « historique » des Guillelmides, Thierry, père de l’ancêtre « mythique », Guillaume –, et le premiers tiers du X^e siècle. « Dynastiquement » parlant, ce sont six générations qui nous occuperont, avec Thierry, Guillaume de Gellone, Bernard de Septimanie [824-846] et sa célèbre épouse Dhuoda, Bernard Plantevelue [841-886], Guillaume le Pieux et ses neveux Guillaume II le Jeune et Acfred.

4Géographiquement, si les origines de la Sippe guillelmide sont à rechercher au Nord, dans la Francie austrasienne, sa « carrière » se fera dans le Midi. Un Midi carolingien ou « alti-médiéval » assez peu étudié en général, sur un fond d’historiographie encore bien « nordiste »5, un Midi carolingien dont nous avons, de ce fait, une vision bien déformée, il est important de le redire.

5L’histoire politique des Guillelmides est en quelque sorte inversement parallèle à celle du pouvoir carolingien :

6– Dans un premier temps, correspondant aux temps carolingiens « primitifs », de Charles Martel à Charlemagne et au début du règne de Louis le Pieux, du début du VIII^e au début du IX^e siècle, apparaissent les « héros » fondateurs de la lignée, Thierry et Guillaume de Gellone, qui posent les bases de la puissance de leur famille, dans une étroite osmose avec le pouvoir austrasien. Nous reviendrons donc d’abord sur ce temps des origines de la famille, afin de mieux comprendre sa destinée, une fois devenue « guillelmide ».

7– Une deuxième étape est celle de temps carolingiens « seconds », ceux du IX^e siècle, avec la seconde partie – plus malheureuse – du règne de Louis le Pieux et celui de Charles le Chauve. Tous deux, s’ils ont été plus habiles politiques qu’on n’a dit, ne peuvent contenir la montée en puissance des grands. Parmi ces grands, les Guillelmides, avec les « deux Bernards » – Bernard de Septimanie et Bernard Plantevelue –, qui de simples agents du pouvoir chargés de garder les marches méridionales du royaume, deviennent de véritables princes territoriaux, cumulant les honores.

8– Vient enfin l’apogée, avec Guillaume le Pieux et ses neveux et des temps carolingiens « tertiaires », partagés désormais entre Carolingiens et Robertiens, dans un X^e siècle qu’on peut qualifier de proto-féodal.

9C’est ainsi deux siècles d’histoire guillelmide que nous allons survoler, du début du VIII^e au début du X^e.

Les origines : Thierry et Guillaume « de Gellone »

10La première trace historiquement attestée des Wile lmides pas encore Guillelmides, remonte à721, date de l’acte de fondation de l’abbaye de Prüm, au sud d’Aix-la-Chapelle, par la princesse mérovingienne Bertrade de Laon, tante et filleule de la future épouse de Pépin le Bref, la fameuse « Berthe aux grands pieds »6. Bertrade de Laon serait la mère de Rolinde7, qui dans les mêmes années720 enfante de son époux Bernier, Thierry8. Bernier et Rolinde seront rappelés un siècle plus tard par Dhuoda dans le Manuel pour son fils, parmi les défunts de la famille de son époux9 : ce rappel généalogique, s’il est justifié par le prestige de cette « branche » de l’ascendance austrasienne des Guillelmides, est l’occasion de redire le poids de la memoria pour les mentalités aristocratiques d’alors, autant que l’importance de l’ascendance féminine, pour une époque où les structures de parenté ne sont pas encore agnatiques10. Plus généralement, la noblesse, qualité sociale par les liens avec le roi et la fortune terrienne, est aussi et autant une qualité familiale, par la gloire des ancêtres qui se sont illustrés à la guerre ou dans les hautes fonctions et ont transmis leur prestige à leurs descendants11.

11En tout état de cause, nous avons affaire à un lignage de Francs Ripuaires, au service du pouvoir austrasien montant. Un lignage illustre, qu’atteste à lui seul le port du nom mérovingien de Thierry12. Dans les milieux de la haute aristocratie carolingienne, le nom fait partie de l’hæreditas, il se transmet13. Comme le notait Marcel Chaume, « la famille austrasienne des Thierri, si remarquable par le soin jaloux qu’elle apporte à conserver, de génération en génération, le nom porté par quatre rois de la dynastie mérovingienne, est incontestablement l’une des plus illustres de celles qui gravitent autour des premiers Carolingiens »14. L’épouse même de Thierry, Aude/Alda(na), si elle n’est peut-être pas la propre fille de Charles Martel, est en tout cas une carolingienne très proche parente de Pépin le Bref15. Nul doute qu’une alliance de Thierri avec une aristocrate de très haut rang, de plus haut rang que lui (?) ait encore favorisé sa montée en puissance16.

12En742, alors que Pépin et son frère Carloman héritent du pouvoir de leur père Charles Martel, Thierry est cité comme comte d’Autun : le don de cet honor marque pour ainsi dire la première étape méridionale de la famille, car Autun, même si elle nous paraît encore bien septentrionale, est une prestigieuse cité de l’ancienne Gaule romaine17, un haut lieu de la mémoire et de la culture du haut Moyen Âge, profondément romanisé18.

13Thierry réapparaît dans les sources au début du règne de Charlemagne, vers770, quand il donne des villæ à l’abbé Fuldrad de Saint-Denis avant de figurer comme premier témoin à son testament en77719. Ces années-là sont bien sûr celles de l’expansion carolingienne et de la dilatatio regni : c’est ainsi que Thierry, en782, est missus en Saxe, ainsi qu’en791 et793, peu avant sa mort dont on ignore la date20.

14Aspect important de la dilatatio regni, la mise au pas politique des territoires conquis. Eduard Hlawitshka a naguère montré comment s’est opérée dès le VIII^e siècle une véritable « colonisation » de l’Italie par la Reichsaristokratie, mandatée par le pouvoir central21. C’est par contingents serrés que nobles francs, alamans, bavarois ou bourguignons sont envoyés en mission outre-Alpes, mais aussi plus simplement en Provence, en Aquitaine ou en Gothie (voir Fig. 2. [Les Guillelmides, tableau généalogique]).

15Figure emblématique de cette colonisation carolingienne du Midi, le fils de Thierry d’Autun, Guillaume bientôt saint. Plusieurs de mes collègues en parlent suffisamment à ce colloque pour que je ne m’attarde guère sur le héros du jour. Juste pour rappeler certains aspects soit politiques, soit privés du saint personnage, en tout cas son versant « laïc ».

Déjà le nom, Guillaume/Willelmus, nous importe d’autant qu’il identifie la famille des Guillelmides. Il est d’autant plus intrigant qu’il n’existe apparemment pas avant le saint dont la renommée va le diffuser : Marie-Thérèse Morlet n’en voit pas de mention antérieure aux années77022 ; Régine Le Jan en fait un nom « réservé » du groupe de parenté de Thierry, sans plus de précisions quant à ses origines23. L’énigme reste entière, même si des pistes sont à trouver du côté du système de dénomination germanique, en relation étroite avec le système des structures de parenté24 comme avec la me mo ria aristocratique25.

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16La notoriété de sa famille, sa parenté avec Charlemagne, les services rendus par son frère Thierry désignent Guillaume pour contrôler la grande marche méridionale de l’Aquitaine : en790, il est fait duc de Toulouse et marquis de Gothie, pour mieux lutter contre Basques et Arabes26. De fait, Guillaume s’illustre par des prodiges de courage qui commencent à forger sa renommée épique, notamment lors de la désastreuse mais honorable bataille de l’Orbieu contre les Sarrasins27. À la suite du plaid général qu’il tient à Toulouse en798, le jeune roi d’Aquitaine Louis prend des dispositions pour conquérir l’Espagne28 ; s’ensuivent d’infructueuses expéditions contre Barcelone avant celle victorieuse menée par Guillaume, son fils Herbert et le comte Berà, probablement en 80129.

17C’est sans doute alors que commence l’ancrage méridional de Guillaume, dont le prestige militaire contribue à la renommée auprès des populations. Peut-être cet ancrage est-il renforcé par une alliance matrimoniale, car si la première épouse de Guillaume, Cunégonde, est elle aussi issue de la Reichsaristokratie franque30, on ne sait rien de la seconde, Guitburgis, épousée vers770/5, ni d’une éventuelle troisième, que certains disent d’origine gothique. En tout cas, c’est bien Guillaume qui le premier s’acculture au Midi et mérite bien à ce titre d’avoir été l’éponyme d’une lignée perçue comme éminemment méridionale.

18L’acculturation passe nécessairement pour l’époque par le religieux, et l’on pense immédiatement à Gellone, secondairement à Benoît d’Aniane et aux influences wisigothiques. Avançons l’idée que la politique monastique de Louis le Pieux, guidée par Benoît, a été largement conditionnée par celle de Guillaume, plutôt que le contraire. D’autant que Guillaume apparaît à maints égards comme un agent de l’empereur Charles chargé de contrôler l’action de son fils en Aquitaine31.

19Gellone, fondation de Guillaume en 804, apparaît ainsi comme un poste stratégique avancé du pouvoir carolingien, à l’instar de toutes les grandes abbayes du Midi réformées par le moine conseiller de Louis. Gellone est aussi bien sûr une fondation de famille, comme l’atteste la charte de fondation faisant référence à la memoria des ancêtres du marquis. On sait l’importance que ce genre de don pieux a pour l’époque, comme l’immense prestige que vont en retirer les descendants du fondateur. De là sans doute une propension à s’identifier au pays où Guillaume a gouverné en prince et est mort en saint. Occasion, au passage, d’insister sur le rôle précurseur de Guillaume en tant que saint laïc, à l’instar duquel sera cent ans plus tard modélisé un Géraud d’Aurillac, ami de l’arrière-petit-fils homonyme de Guillaume, Guillaume le Pieux, lui aussi quasi sanctifié32…

20Mort sous la bure vers 812, Guillaume doit être remplacé dans ses charges. Un temps de latence s’ouvre alors pour les Guillelmides en devenir : à l’héritier du saint, Bernard, encore trop jeune pour exercer des fonctions, sont préférés Bégon, qui devient comte de Toulouse, et Berà comte de Barcelone. C’est peu après que l’Ordinatio imperii de 817 érige en marche distincte de l’Aquitaine la Gothie, au profit de Berà, tandis qu’à Toulouse Bégon est remplacé par le comte Bérenger, du « clan » des Unrochides de Tours. Beaucoup d’incertitudes tournent autour de ces deux personnages, notamment Berà, dans lequel Pierre Ponsich avait vu un fils de saint Guillaume33 : accusé de félonie, il est destitué en 820 au profit du franc Rampon, qui ne reste que six ans en place. La valse des honneurs bat son plein, et nous prouve que le pouvoir carolingien est une réalité, quoi qu’on ait dit des faiblesses politiques de Louis le Pieux.

21En tout cas, l’hérédité n’a encore rien à voir avec la transmission des charges, du moins l’hérédité « directe ». Car pour remplacer Rampon à la tête du marquisat de Gothie, en février 826, Louis va choisir l’un des fils de saint Guillaume, de bonne mémoire : il s’agit de Bernard, surnommé de par sa carrière « Bernard de Septimanie » ; à lui revient l’honneur de contrôler la Marche d’Espagne et d’assumer la défense de la cité de Barcelone, face à une insurrection gothico-sarrasine34. Avec lui commence un nouvel épisode de l’histoire guillelmide.

La montée en puissance : d’un Bernard à l’autre…

22Avec Bernard de Septimanie, passons donc aux temps carolingiens que nous avons appelés « secondaires », correspondant à la seconde partie du règne de Louis le Pieux et au règne occidental de Charles le Chauve (840-877). Seconde partie du règne de Louis, parce qu’on sait qu’elle fut plus malheureuse à partir du moment où ses fils entrèrent en révolte contre lui, et que les affaires d’Aquitaine l’empoisonnèrent particulièrement. Mais venons-en d’abord au guillelmide qui nous intéresse désormais, Bernard de Septimanie.

23Comme l’avoue Léonce Auzias35, avant sa promotion de 826 nous savons peu de choses de ce Bernard qui allait pendant près de vingt ans jouer un rôle capital dans la politique carolingienne36. Il était sans doute l’un des plus jeunes des fils de Guillaume, certains de ses frères étant déjà investis de charges importantes : Herbert, avait participé à l’expédition d’Espagne avec son père en 80137, Gaucelme avait été missus en Biterrois dès 807, puis depuis 812 au moins comte de Roussillon38, ensuite aussi de Gérone39. Par ses proches parents comme par ses collatéraux, Bernard est naturellement apparenté aux plus illustres personnages de l’empire.

24Bernard de Septimanie40 est né à l’extrême fin du VIII^e siècle (en795 ? )41. Il est dit « de race royale », et à ce titre sans doute élevé comme tous les aristocrates de son rang à la cour impériale. La situation faite à ses frères avant lui permet de croire qu’il a lui-même été pourvu très tôt d’une haute charge. C’est en tout cas au palais d’Aix-La-Chapelle, en présence de toute la cour impériale, que le29 juin 824, jour des saints Pierre et Paul, Bernard épouse la noble Dhuoda42. Était-elle bourguignonne comme la plupart le pensent, et comme les attaches autunoises des Thierry incitent à le penser43 ? Était-elle plutôt septimanienne ? Un peu des deux ; elle fut en tout cas très attachée à la Septimanie, à Uzès précisément où naissent ses enfants et où elle rédige son fameux Manuel44.

25Bernard a délivré seul Barcelone en 826 et résisté de nouveau en 828. Comme son père Guillaume, il fait figure de héros, alimentant la veine épique qui se forme autour du père. Au Palais, il est l’homme du jour, le conseiller de Louis le Pieux dont il est chambellan, le protecteur de l’impératrice Judith et le précepteur de son jeune fils Charles45. Nithard commente : « Bernard abusait inconsidérément de son pouvoir dans l’État »46 ; Wala de Corbie calomnie, accusant d’adultère Judith et Bernard, dont la femme Dhuoda est reléguée au soleil d’Uzès47. La campagne porte ses fruits : Judith se réfugie au monastère de Laon et ne sera innocentée que par un serment purgatoire, tandis que Bernard regagne le Midi, que ses partisans sont disgraciés, son frère Herbert, pourtant valeureux chef de guerre, aveugl48 L’empereur se soumet à la volonté de ceux qui disent vouloir le délivrer et se retrouve en liberté surveillée, son fils aîné Lothaire régnant pour lui. Ses frères Pépin et Louis se liguent alors pour rétablir leur père. Il s’ensuit le partage d’Aix-la-Chapelle de 831, où l’empereur, comme jadis Charlemagne, prévoit sa succession à parts égales entre ses quatre fils Lothaire, Pépin, Louis et Charles, ne satisfaisant aucun d’eux. Dans la grande querelle de famille qui les oppose de 829 à 83449 et se termine par l’humiliation du père, la responsabilité de Bernard est grande, car lui-même, trop compromettant, n’a plus les faveurs du couple impérial. Il intrigue de nouveau avec Pépin, mécontent de sa part d’héritage et le pousse à la révolte. Pépin soumis est dépouillé de son royaume d’Aquitaine au profit du jeune Charles le Chauve, Bernard privé de ses honores au profit du comte Bérenger50. Nous sommes à la fin de 832 : toute la Gaule méridionale est insurgée. La révolte de Pépin amène sa conjuration avec Lothaire et Louis : c’est le fameux épisode du « Champ du Mensonge » qui aboutit à une nouvelle destitution de l’empereur, dont le règne se termine de manière piteuse. Quelques mois auparavant était mort dans la démence son fils rebelle Pépin.

26Après le traité de Verdun (843), le règne de Charles commence par une mise au pas du Midi : les Annales de Saint-Bertin disent pour l’année 844 : « Bernard, comte de la marche d’Espagne, entretenait depuis longtemps des projets de grandeur et il aspirait aux sommets du pouvoir. Il fut déclaré coupable de trahison par le jugement des Francs et exécuté en Aquitaine » au printemps 84451. La famille était sévèrement décimée : dix ans plus tôt avaient été tués quatre des frères et sœurs de Bernard : Herbert aveuglé, Gaucelme décapité, Gerberge, moniale trucidée, Hélimburge noyée…

27Quant au chef du clan, Bernard, sa disparition ouvre une succession des plus importantes : « à son titre de marquis l’illustre personnage ajoutait un nombre important de comtés grâce auxquels il était devenu le véritable souverain des régions méridionales. Habilement le roi morcela les territoires que le marquis avait réussi à grouper sous son autorité directe : il trouvait dans cette pluralité d’honneurs à distribuer la possibilité de satisfaire bon nombre de ses fidèles et dans leur séparation la possibilité de se parer contre une extension abusive de puissance »52. Sunifred d’Ausone, comte d’Urgel, Cerdagne et Conflent, hérite du titre de marquis tandis que pour favoriser la paix Charles octroie le capitulaire de Septimanie53 et le précepte pour les Espagnols54 qui ménagent le clergé et la population.

28La partie n’en est pas pour autant jouée : l’Aquitaine reste à présent fidèle à Pépin II, aussi rebelle que son père, tout au moins sa partie occidentale55. Charles se résigne dès les premiers jours de juillet 844 à lever le siège de Toulouse56. Pour éviter Pépin et le Quercy, il remonte en Francie par l’Auvergne qui lui est fidèle57. L’année 845 marque une trêve avec Pépin par le traité de Saint-Benoît-sur-Loire, qui permet à Charles de régler les affaires du Nord. Au Sud Pépin II délivre diplôme sur diplôme58, en vain : jugé inactif et incompétent contre les Normands, son crédit s’effondre. En 848, les Aquitains se retournent vers Charles, qu’ils acclament roi et sacrent à Orléans59 ; en août- septembre 849, il est accueilli à Limoges « avec le plus grand enthousiasme » par les élites aquitaines, en tête l’archevêque Raoul de Bourges, pourtant promu par Pépin.

29Charles liquide ensuite la « trahison » des Toulousains60 : à Barcelone est exécuté Guillaume « de Septimanie », fils aîné héritier de Bernard, destinataire du Manuel de Dhuoda : le clan guilhemide ainsi décapité paraît neutralisé à jamais. Lorsqu’en septembre 852 intervient la capture de Pépin II par les Vascons61 et son « emmonastérisation », Charles le Chauve peut se croire enfin maître du Midi : il fait proclamer roi d’Aquitaine son jeune fils Charles l’Enfant (853), bientôt couronné et sacré à Limoges (vers le 15 octobre 855)62 et entame une nouvelle réorganisation de l’Aquitaine63. Peine perdue : le jeune roi par ses maladresses et Pépin par sa propagande ont tôt fait de rallumer l’opposition des Aquitains, qui dès le début de 856 chassent l’Enfant et reconnaissent Pépin II, évadé de sa geôle64. Un répit de courte durée est offert au rebelle par la crise de 858-860 qui oppose de nouveau au plus haut niveau les frères ennemis Carolingiens65…

30On a peine à suivre les évènements : les rebondissements incessants de l’histoire entraînent des revirements qui mettent sans cesse à mal les notions de fidélité, de loyauté, voire de vassalité, du haut en bas de la hiérarchie nobiliaire. Derrière tant de soubresauts, de luttes confuses où alternent batailles et trêves, trahisons et ralliements66, il y a certes l’inconstance des grands, les membres de la Reichsaristokratie cantonnés dans le Midi, qui profitent des divisions des rois pour assouvir leurs propres ambitions ; ce sont eux qui apparaissent au devant de la scène, cités par les annales et des chroniques du temps. Sans nier leur rôle de premier plan que Jan Dhondt a bien mis en évidence67, on devine désormais le rôle que jouent les membres de la noblesse locale, ceux que les textes appellent de manière anonyme « les Aquitains » qui jouent pour ainsi dire à un « troisième niveau » : les rébellions des grands, qu’ils soutiennent et manœuvrent, ne sont qu’un exutoire à leurs propres revendications.

31En 862-86468, la révolte de Charles l’Enfant69, manœuvré par les comtes Étienne et Humfroi, usurpateurs des cités de Clermont et de Toulouse, « fait partie d’un vaste plan d’ensemble dirigé contre l’autorité de Charles le Chauve70 », un plan qui échoue lamentablement à cause des Normands71. À Clermont est rétabli le comte Bernard I^er, de la famille des Garin72, apparenté aux comtes de Mâcon et d’Autun, donc aux Guillelmides73, lequel depuis 846, tient le comté pour Charles le Chauve74.

32Jan Dhondt75 a souligné en quoi les années comprises entre 864 et 870 sont essentielles dans l’évolution qui amènera à la constitution territoriale des principautés de l’Aquitaine. La répartition des hon ores et la conduite des intérêts des magnats étaient toujours les points les plus délicats d’un gouvernement royal, comme le règne de Louis le Pieux l’avait montré76. « L’honor s’accompagne de prestige et de revenus et sa détention apporte une relative sécurité, un pouvoir plus stable que celui qui découle de l’héritage des terres. D’où le désir de cumuler dans une famille honneurs et charges qui échappent au partage. C’est ce qui explique les rivalités entre familles, voire dans une famille » . Par une étrange coïncidence tous les principaux honores viennent à vaquer en ce temps-là77. Par une habile redistribution, Charles le Chauve va jouer sur la concurrence des princes, divisant pour mieux régner.

33Parmi les grands qui viennent s’hommager à Charles le Chauve à Pîtres en juin 86478, se trouve un certain « Bernard, fils de Bernard »79 : c’est ainsi que surgit sur la scène politique l’ultime rejeton des Guillelmides, le jeune fils du « tyran » Bernard de Septimanie, Bernard « Plantevelue », alors âgé de23 ans80, rescapé du massacre de sa famille81. Bernard, dont les griefs envers Charles ne peuvent qu’être ainsi fondés, ne se soumet pas en fait complètement : pour preuve son brusque revirement et sa fuite en Lotharingie82. Il n’a de cesse de recouvrer les honneurs des siens.

34À ladite assemblée de Pîtres, il est déjà paru en qualité de comte du pagus d’Autun, où son père, son frère aîné et son oncle avaient eu des honores avant lui83. Son retour en grâce à l’Ouest n’a lieu qu’en décembre 869, et coïncide avec son accession au comté d’Auvergne, qu’il tient du roi, mais aussi de son mariage avec Ermengarde : celle-ci peut bien être la fille du comte Bernard I^er d’Auvergne, mais son nom, à lui seul, est l’indice d’une ascendance encore plus prestigieuse, probablement impériale84.

35Face au comte d’Auvergne se trouvent deux autres Bernards85, dont l’homonymie a entretenu de gênantes confusions86 : en Toulousain, un ennemi héréditaire, Bernard le Veau, fils du comte Raymond qui avait déjà obtenu Toulouse après la capture et la mort de Bernard de Septimanie, le père de Plantevelue, en 844 ; en Septimanie et en Autunois, terres chères aux Guillelmides, ainsi qu’en Berry et dans la Marche d’Espagne, Bernard de Gothie, d’un autre clan rival, celui des Rorgonides du Maine.

36L’équilibre est fragile entre les rivaux. En 872, le combat fait sa première victime : Bernard le Veau est assassiné, à l’instigation de Plantevelue dit-on87, premier meurtre qui va grossir le contentieux entre les clans. Le roi se contente de redistribuer les honneurs de la victime88 : Plantevelue récupère le Toulousain et le Limousin, tandis que Bernard de Gothie obtient le Carcassès et le Razès.

37La mort du roi Charles donne une nouvelle occasion à Plantevelue de consolider son dominium : Bernard de Gothie refuse de reconnaître Louis le Bègue et « se comporte en roi », s’en prenant notamment aux biens ecclésiastiques de ses comtés89. Se liguent pour le perdre les évêques Hincmar de Reims, Frotaire de Bourges et Adalgaire d’Autun, ces deux derniers ayant été préalablement et judicieusement placés par le roi auprès de Plantevelue et de Boson, pour mieux les surveiller – Frotaire a reçu l’abbatiat de Brioude90 Adalgaire est devenu chancelier de Boson à Vienne91. Un bref temps séduits eux aussi par la fronde, Boson et Plantevelue se rallient à la royauté et reçoivent les dépouilles du traître en 878 : le premier obtient l’Autunois et le Mâconnais92, le second – Plantevelue – le Berry et la Gothie, reconstituant la grande marche de son grand-père saint Guillaume93.

38Il ne reste plus qu’un Bernard, le nôtre, le Guillelmide : marquis de Gothie, comte d’Auvergne, de Limoges, de Rodez94, et un temps de Toulouse95. Lorsqu’à son tour tombe Boson, Plantevelue fait figure de prince le plus puissant et le plus indépendant de Francie96, face à une royauté affaiblie97. La mort l’arrête en pleine gloire, durant l’été 88698 : il laisse un héritier d’une quinzaine d’années, dont le nom de Guillaume est un symbole, dont le surnom de « Pieux » va être un programme.

L’apogée : Guillaume le Pieux et ses neveux99

39Nous en arrivons aux temps carolingiens « tertiaires », avec la rupture des années 870 et suivantes : plus que les problèmes dynastiques ou ceux dus aux Normands, captant d’ordinaire l’attention, ce sont les pr oblèmes institutionnels qui les caractérisent, révélés à l’instant par « l’insolence des marquis », pour reprendre l’expression d’Odon de Cluny dans sa Vita Geraldi100 : insolence de Bernard de Gothie qui s’est comporté en roi, insolence de Boson qui s’est fait proclamer roi, insolence de Bernard Plantevelue qui n’a cessé de donner des preuves de son détachement du royaume occidental, insolence enfin des grands du Nord qui, en 888 « de manière déshonnête101 », ont élu roi l’un des leurs, le Robertien Eudes102.

40Insolence conséquente des optimates d’Aquitaine où le paysage politique est doublement hostile au nouveau roi : à l’Ouest tout d’abord, avec le comte de Poitiers Rannoux (II), qui a recueilli l’héritier carolingien, le jeune Charles le Simple103 et se serait proclamé lui-même roi d’Aquitaine104 ; à l’Est ensuite, avec le nouveau comte d’Auvergne Guillaume, fils et successeur de Plantevelue, qui soutient Rannoux105 puis son fils bâtard Ebles « Manzer »106. S’ensuivent les expéditions militaires d’Eudes en Aquitaine, trois en tout, entre 889 et 893107, qui se terminent en fait par de nouvelles concessions aux princes territoriaux : le Robertien, trop occupé à asseoir sa propre légitimité en Francie et à lutter contre les Normands, n’interviendra au Sud que diplomatiquement pour concéder ou confirmer leurs privilèges aux églises et abbayes qui le sollicitent108. Son successeur, le Carolingien Charles le Simple, qui recouvrera son trône en 898, fera de même, reconnaissant naturellement ceux dans les domaines desquels il a été naguère recueilli et protégé, Guillaume et Ebles Manzer ; et pas une seule fois il ne franchira cette frontière qu’est devenue la Loire109.

41Bien que totalement ignoré des manuels d’histoire, Guillaume le Pieux est l’une des plus grandes figures des derniers temps carolingiens110. Encore jeune (environ 16 ans), lorsqu’il succède à son père en 886111, il se voit reconnaître tous les honores hérités de lui et se trouve à la tête d’un véritable condominium qui s’étend sur une large Aquitaine orientale, de la Loire aux Pyrénées, du Rhône aux rebords occidentaux du Massif central ; son autorité n’est limitée territorialement que par celles de deux voisins, le comte de Poitiers à l’Ouest, celui de Toulouse au Sud112.

42La maîtrise de sa principauté, Guillaume l’affirme par ses titres : en plus de ceux de « comte et marquis », il est « duc d’Aquitaine » : le premier de tous les princes, de sa propre initiative, il prend ce titre qui sera ensuite repris par tous les prétendants au gouvernement des provinces méridionales jusqu’à la fin du Moyen Âge113. L’affirmation par Guillaume de son pouvoir ducal a lieu dans une charte pour Saint-Julien de Brioude de mai 898, charte qui précise par ailleurs qu’il a été investi de l’abbatiat « par don royal » (d’Eudes) : d o n o regio114. On sait ce que la basilique Saint-Julien représente alors pour le Midi arverno-aquitain, qui garde en mémoire son prestigieux passé gallo-romain : elle abrite les tombeaux de saint Julien et de l’empereur Avitus, près desquels Guillaume se fera enterrer, plutôt qu’à Gellone ou à Cluny115.

Image 10000000000002E4000002098A4B0E96EE61CED4.jpg — Fig. 3. [La principauté guillelmide]

43Datée de l’année où est mort le roi Eudes116, le document feint d’ignorer son successeur Charles le Simple, ce qui permet au Guillelmide, avant toute entrevue avec le nouveau roi, de s’appuyer sur la donation de l’abbatiat par son prédécesseur pour se proclamer duc de manière légitime117. Il est abbé de Saint-Julien dono regio, mais surtout duc d’Aquitaine gratia Dei : il est un personnage sacré, à l’instar des rois des Francs.

44Olivier Guillot a bien montré l’importance que revêt la réutilisation du titre de princeps aux temps carolingiens118 : en tant que princeps, Guillaume jouit d’une potestas le plaçant au-dessus de la hiérarchie ordinaire des honores, exerçant théoriquement l’ensemble des droits régaliens. Il dicte son « ban », rend la justice, tient des plaids publics119 ; il gouverne par une administration centrale, organisée autour de la chancellerie et de ses notaires, relayée par des agents locaux (vicomtes, vicaires) rémunérés par honores et dotations fiscales. Enfin, le premier dans toute la Francie occidentale, Guillaume s’approprie le droit régalien de battre monnaie120.

45C’est aussi à cette époque que par tactique politique, il convole avec Ingelberge, fille du défunt roi de Provence Boson, rival de son père121, une union qui en fait le beau-frère du roi de Provence Louis l’Aveugle et le neveu du puissant duc de Bourgogne Richard le Justicier, ancien allié de son père : mais surtout, l’épouse de Guillaume le Pieux, par sa mère Ermengarde, est la petite-fille de l’empereur et roi d’Italie Louis II, donc une descendante directe de Charlemagne122.

Image 10000000000002E600000109D945683DF07C51A4.jpg — Fig. 4. [Seings de Guillaume et Ingelberge…]

46Il s’en est fallu de peu que Guillaume lui-même ne se proclame roi d’Aquitaine : seule l’en a probablement empêché sa fidélité envers le Carolingien Charles le Simple et le jeune comte de Poitiers Ebles Manzer, qu’il a recueilli enfant sur la prière de son ami Géraud d’Aurillac123.

47En véritable disciple du saint d’Aurillac qui est comme un modèle pour lui, en digne représentant des Guillelmides et en référence évidente à l’ancêtre éponyme, fondateur de Gellone, Guillaume mène une active politique religieuse. Sa piété lui vaut son surnom ; il a une vénération particulière pour la Sainte Croix, comme son illustre trisaïeul, au point qu’il se fera inhumer près de l’autel dédié à l’insigne relique, au milieu de la nef de la basilique Saint-Julien de Brioude124. Malheurs du temps obligent, Guillaume accueille aussi les communautés religieuses fuyant les Normands : celle de Saint-Philibert de Noirmoutiers à Saint-Pourçain, celle de Saint-Maixent de Poitiers à Ébreuil, celle de Saint-Martin de Tours à Marsat125.

48Sans mettre en doute la piété de Guillaume, ne trouve-t-il pas dans le religieux un instrument supplémentaire de gouvernement des plus efficaces : contrôler les abbayes comme les sièges épiscopaux affermit les bases du pouvoir des princes126. Ce pouvoir s’ancre dans des établissements insignes qui font partie du patrimoine matériel et spirituel des dynastes, qui s’y font enterrer : les comtes de Poitiers à Saint-Hilaire et Saint-Cyprien, ceux de Toulouse à Saint-Gilles, ceux d’Angoulême à Saint-Cybard, Guillaume à Brioude127.

49Et puis, bien évidemment et surtout il y a Cluny, abbaye bénédictine fondée en 909 en Mâconnais par Guillaume en marge de ses domaines aquitains… Inutile d’insister sur l’importance de cette fondation dont sortira bien avant la Réforme grégorienne le courant libérateur de L’Église ; « fondation d’autant plus remarquable qu’elle est l’œuvre d’un laïc, inspiré par le précédent d’Aurillac, fondation qui en ce sens s’apparente à un testament, une passation de pouvoirs symbolique : Guillaume donne à Rome… comme cent ans plus tôt la réforme de Benoît d’Aniane, Cluny est l’expression de la tradition philoromane dans laquelle les Guillelmides se sont fondus »128.

50Ne nous faisons pourtant pas trop d’illusions sur la puissance de Guillaume, théâtralement mise en scène dans la charte de fondation de Cluny qui montre près d’une cinquantaine de fidèles approuvant de leurs signatures l’action du duc ; on connaît l’ambiguïté des fidélités, et partant la fragilité du r e g n u m , les limites de l’autorité du prince. Le nombre grandissant de fondations religieuses aristocratiques – Aurillac, Souvigny, Déols, – n’est-il pas révélateur du rôle majeur que joue désormais l’aristocratie à côté ou indépendamment du prince ?

51Le 11 septembre 909, Guillaume fonde Cluny ; le 13 octobre suivant meurt Géraud d’Aurillac : tout un symbole : les années 910 sont un nouveau tournant. Car malgré son apparente puissance, la principauté du marquis Guillaume est insuffisamment structurée, écartelée entre Gothie, Berry et Lyonnais, moins structurée par exemple que celles de Robert en Neustrie ou de Richard en Bourgogne. De toutes les marges de ce dominium hétéroclite surgissent les difficultés : au Nord, en Berry, la poussée franque qui ébauche la coupure politique du pagus décrite par Guy Devailly129 ; au Sud, l’influence toulousaine, déjà présente aux confins du Rouergue, qui déborde en Limousin (à Beaulieu), en Haute-Auvergne (à Aurillac, Carlat, Conques), en Gévaudan, et surtout en Gothie occidentale, jusqu’à Nîmes ; à l’Est enfin, Guillaume n’est pas sûr du Lyonnais, du Velay et du Nîmois, voire de l’Uzège qui lorgnent vers la Provence bosonide, en proie à une véritable guerre civile qu’a décrite Jean-Pierre Poly130, et qui a évidemment des répercussions dans les terres guillelmides131.

52Guillaume tourne de plus en plus son regard vers l’Est, à l’instar de son choix matrimonial, cherchant notamment à renforcer sa position lyonnaise132. Les dernières années du « règne » trahissent ce changement d’orientation géographique et de stratégie politique133. Au vu des très graves évènements de Provence – massacres, exils, faïdes et règlements de compte en tout genre –, Guillaume ne s’interroge-t-il pas sur son propre pouvoir ? : lui-même ne fait pas partie des forces vives du pays ; il n’en est que le prince. Il comprend que seule la fusion entre la Reichsaristokratie dont il est, et la noblesse autochtone, lui permettra de conserver sa principauté méridionale. Cette prise de conscience l’amène à une politique de « médiatisation » à l’égard de sa noblesse, politique classique qui devient une tradition dans le Midi, aspect le plus intéressant des dernières années du règne du duc.

53Rien ou presque rien, dans les annales, les chroniques ou les diplômes, ne nous signale l’existence de cette aristocratie locale, substrat fondamental de la société « provinciale » du fait de l’importance économique de la terre. Si son rôle était curieusement mieux mis en évidence dans les sources tardo-antiques, sa vitalité ne semble pas avoir été atteinte par l’apparente remise au pas de la reconquête carolingienne puisqu’elle réapparaît maintenant, alors que le pouvoir royal s’affaiblit, que les pouvoirs locaux reprennent le dessus. Ce sont tous ces nobiles, viri, illustri, proceres, optimates, provinciales, principes, seniores qui apparaissent près du duc Guillaume et forment son entourage134, tel Géraud d’Aurillac déjà cité ou Ebbe de Déols en Berry, et d’autres du même ordre, qu’on hésite à appeler du nom que prendront les premiers grands lignages châtelains en descendant : Aimard ancêtre des Bourbon, Ithier des Mercœur, Armand des Polignac, Vivien, Héracle, Étienne, les vicomtes Dalmas ou Armand « de Brioude », Robert « de Clermont », Claude « de Chanteuges », etc.

54Pour asseoir son pouvoir, sur des bases plus solides que le prestige moral qu’il s’est acquis face à la royauté, Guillaume essaie de s’attacher étroitement cette aristocratie, par tous les moyens. Il lui a donné des charges publiques, procédé classique à l’instar de la politique royale135 ; il joue maintenant la carte des alliances matrimoniales, indispensable à une fusion souhaitée entre haute aristocratie et noblesse autochtone : Géraud d’Aurillac refuse le mariage avec sa sœur, une union suggérée par la comtesse mère Ermengarde136.

55Guillaume essaie enfin d’attirer les optimates dans son réseau de fidélité, en les débauchant de leurs allégeances antérieures ; Odon de Cluny le dit explicitement, toujours pour Géraud : « Guillaume, duc d’Aquitaine, une fois parvenu à une exceptionnelle puissance, tâcha d’obtenir de Géraud, pas par menaces, seulement par prières, qu’il abandonnât le service du roi pour se commender à lui. Lui ne voulut absolument pas. Guillaume ne lui en tint pas rigueur »137. L’intègre Géraud, imprégné des principes moraux antiques et chrétiens, est avant tout vassal du roi, vassus regalis, l’un des derniers connus dans le Midi d’ailleurs138 ; il refuse les avances du duc, auquel il n’est lié qu’au titre de ses obligations publiques, Guillaume étant représentant du roi, mais le roi étant leur commun senior. Son attitude révèle la situation flottante d’une aristocratie partagée entre les valeurs traditionnelles et les nouveaux impératifs de la vie proto-féodale : par-delà l’alibi légitimiste, qui va faire de Géraud une sorte de miroir, modèle du miles fidèle qui ne se commende qu’au roi ou à Dieu139, le refus qu’il oppose à Guillaume est aussi l’expression du désir de se passer des grandes familles de l’aristocratie d’Empire, en n’acceptant qu’un roi tutélaire et sacré mais lointain. C’est la fin d’un monde…

56Le duc Guillaume le Pieux, q ue les sources vo nt sur nommer symptomatiquement « le Grand »140, meurt à Lyon, au faîte de sa puissance, le 28 juin 918, vigile de la fête de l’Apôtre Pierre auquel il était si dévoué ; huit jours plus tard, le 6 juillet il est inhumé en grandes pompes à Brioude141. Son convoi funéraire, qu’on imagine facilement « processionner » de manière solennelle du Lyonnais à l’Auvergne, atteste symboliquement de la réussite de son entreprise de constitution d’une principauté. Cette victoire cache cependant mal la force croissante des élites locales, qui dans les dernières années du « règne » du prince, contrecarrent son pouvoir ; les efforts que fait Guillaume pour maîtriser les proceres sont une preuve de leur vitalité, les échecs qu’il subit la confirmation de leur irréversible ascension.

57Avec les neveux de Guillaume le Pieux, la « monarchie guilhemide » change de nature : Guillaume « le Jeune » (918-926) puis son frère Acfred (926- 927) sont les enfants de la sœur de Guillaume, Ava, et d’un comte méridional authentique, Acfred de Carcassonne, de souche wisigothique. C’est là un point capital, qui mérite qu’on s’y arrête.

58Depuis Alda, la mère de saint Guillaume, jusqu’à Ermengarde, celle de Guillaume le Pieux, l’identité des épouses guillelmides reste le plus souvent énigmatique et nous réduit à des conjectures sans fin. Le « stock » anthroponymique de ces épouses – Cunégonde, Guitburge, Dhuoda, Ermengarde – oriente en tout cas vers les plus hautes strates de la Reichsariostokratie carolingienne, voire la famille impériale, ce que corrobore l’identité de la dernière duchesse guillelmide connue, Ingelberge, l’épouse de Guillaume le Pieux. Ce n’est donc pas directement par des unions matrimoniales que l’implantation locale de la dynastie a pu se faire jusque là.

59La succession « féminine » de Guillaume le Pieux est en ce sens une victoire des familles aristocratiques locales : le prince qui arrive sur le trône en 918 est l’un des leurs, ce qui explique à la fois le développement de sa politique de méridionalisation, et son attitude vis-à-vis des Robertiens.

60Le neveu de Guillaume le Pieux, Guillaume (II) le Jeune, apparemment disposé à mener la même politique que son oncle, va avoir du mal à garder intact l’héritage : le Berry lui échappe dès 919, confisqué par les Robertiens Raoul et Robert142 ; s’il garde le Mâconnais et le Lyonnais143, les menaces sont plus sérieuses à l’Ouest144. Pour parer au danger, Guillaume choisit le comte de Toulouse Raimond, malgré le contentieux qui existe entre les deux lignages : il doit céder la Gothie, pourtant si chère, pour sceller une réconciliation effective145. Lorsqu’en 923 Charles le Simple est détrôné au profit de Robert, le frère d’Eudes, puis de Raoul de Bourgogne, Guillaume peut se féliciter de s’être ménagé l’alliance toulousaine, face au puissant clan roberto-bourguignon qui accède ainsi au pouvoir au Nord et qui menace en permanence les frontières septentrionales de l’Aquitaine ; on comprend mieux, de fait, le sursaut légitimiste qui agite alors le Midi, comme en 888.

61L’historiographie traditionnelle imprégnée de la notion moderne de fidélité patriotique a voulu à tout prix, dans cette période marquée par de nombreux changements dynastiques, classifier, catégoriser les fidèles de telle ou telle maison : légitimistes, non légitimistes, pro-carolingiens, pro-robertiens, que ce soit en 888 pour l’avènement d’Eudes, en 893 pour celui de Charles le Simple, ou en 923-924 pour ceux de Robert et Raoul… et bien sûr en 987 ! Il semble qu’une fois de plus on n’ait pas perçu clairement les véritables motivations des antagonistes. L’exemple des Guillelmides est pourtant net. On ne saurait, à suivre la conception classique, comprendre l’attitude de Guillaume le Pieux ou de son neveu, qualifiés tantôt de légitimistes, tantôt de rebelles à la royauté carolingienne. La vérité, c’est que cette dynastie guilhemide qui a jeté les bases de ce qui aurait pu devenir un État occitan146 a des ennemis divers, conséquence de son arrivisme et de son indépendantisme. Elle conçoit ses ralliements et ses défections en fonction de ses inimitiés ou de ses amitiés envers les clans familiaux de l’aristocratie d’Empire.

62Guillaume tergiverse, « diffère de se soumettre »147, refusant de reconnaître Robert puis son gendre Raoul un an plus tard, protestant contre l’injuste usurpation du trône148 et se titrant duc d’Aquitaine149. Les chroniqueurs parlent d’une campagne militaire de Raoul au Sud150 : elle s’arrête en fait à la Loire et se solde par un compromis à l’avantage du duc, qui récupère le Berry151 : les concessions de Raoul achètent la fidélité des Méridionaux et stabilisent les rapports de force pour une trêve de courte durée152 : en 926, profitant des difficultés de Raoul avec les Hongrois et les Normands, Guillaume proteste contre la captivité de Charles le Simple et proclame de nouveau illégale l’élection du Bourguignon153. Nouvelle expédition royale, nouvel échec154, que relativise la disparition subite du duc Guillaume, le 16 décembre 926, en pleine révolte155. Une révolte que continuera d’assumer son frère cadet Acfred durant les dix mois de son principat156.

63Le dernier mot reviendra une fois de plus à la noblesse locale. Derrière la guerre de succession qui va opposer une vingtaine d’années le comte de Toulouse et celui de Poitiers pour l’héritage du titre ducal d’Aquitaine, les manœuvres de la noblesse locale se feront au grand jour, amorçant la crise finale qui débouchera autour de l’an Mil sur la féodalité méridionale. Tel un signe « posthume » de la promotion de l’aristocratie locale, à la mort du dernier duc Acfred, c’est le vicomte Dalmas, principal fidèle des Guillelmides, et sans doute lié par alliance157, qui récupère l’abbatiat de Brioude.

64Le problème central du pouvoir carolingien tourne autour de la fidélité des élites »158. De Pépin le Bref à Raoul de Bourgogne, du VIII^e au X^e siècle, les stratégies utilisées par le pouvoir central pour tenter de mater ou d’apprivoiser les Méridionaux ont été bien différentes159 : emploi de la méthode forte et normalisation militaire du pays, réorganisation des structures administratives et redistribution des charges, politique de réforme ecclésiastique destinée à contrôler les grandes abbayes, tous ingrédients que sont chargés d’administrer les agents du pouvoir, choisis et placés de manière tout aussi stratégique et variable.

65Lorsque comtes et marquis s’émancipent de la tutelle royale, ils réutilisent naturellement les mêmes formules, et leur politique « fiscale » vise tout autant à contenir les forces d’une aristocratie locale plus agissante qu’on ne croit. Ils sont bien placés pour savoir l’importance politique d’une bonne distribution des honores et des alleux, et en quoi leur cumul confère sa réalité palpable à la notion d’implantation régionale ou locale d’un groupe160.

66Malgré leur opacité et leur laconisme, les sources de l’histoire méridionale des temps carolingiens permettent d’entrevoir, « au travers de ces remous si favorables aux initiatives et à l’émancipation des princes territoriaux, combien ont dû contribuer à l’éclosion de la féodalité en Aquitaine la désorganisation du pouvoir central, l’affaiblissement de l’autorité royale, cette situation énervante autant que confuse qui, en raison même de la pluralité des monarques, devait être assez voisine de l’anarchie »161. C’est en ce sens qu’on peut parler de faillite du système carolingien.

67Au tout début du X^e siècle, la fin des princes Guillelmides en pleine révolte contre la royauté nordiste est des plus emblématiques. Ceux que l’historiographie appelle depuis Jan Dhondt les « princes territoriaux » donnent finalement un bref instant – les dernières décennies du IX^e siècle – l’illusion d’avoir sapé le pouvoir royal, un pouvoir déjà mis à mal de l’intérieur par les problèmes de succession dynastique, miné de l’extérieur par la « seconde vague » des invasions. Mais en vérité, depuis quelque temps déjà, ce n’est pas plus la Reichsaristokratie que la royauté qui contrôle le Midi : c’est la noblesse locale. Après s’être « choisis des rois, tirés de leurs entrailles »162, les grands les modèlent à leur idée. Tout le X^e siècle confirme cette montée des puissances locales qui vont faire bientôt la féodalité. Mais c’est là une autre histoire, et un débat qui nous échappe, ici en l’occurrence !

Image 100000000000016E000001927E03BAC254D7C8FD.jpg — Fig. 5. [Géraud d’aurillac]
BNF, Ms. 5301, f° 221.

Notes de bas de page

1 Xavier de Fourvières, Lou pichot tresor, dictionnaire provençal-français et français-provençal, Avignon, 1975, p. 442-443 : Guihèn, sm. cirse épineux ; fretin, rebut || guilhéumado (à la) expr. adv. en faisant la chaîne || Guilhèume ou guilhauyme, sm. men. guillaume ; bot. pied d’alouette | faire – faire la chaîne || guihéumen, enco, adj. de Guillaume || guiléumet, sm. guillemet || Guilhéumeto ou Guihaumeto, n. de f. Guillelmine || guilhéumino, sf. ancienne monnaie provençale. – NB. guillemet, 1677, Miege, d’un nom propre dimin. de Guillaume, imprimeur qui inventa ce signe, d’apr. Ménage. († Albert Dauzat, Jean Dubois et Henri Mitterand, Nouveau dictionnaire étymologique et historique, Paris, 1964, p. 360).

2 Christian Lauranson-Rosaz, « Le roi et les grands dans l’Aquitaine carolingienne », dans La royauté et les élites dans l’Europe carolingienne (du début du IX^e aux environs de 920), Lille, 1998, p. 409-436.

3 Idem . Voir notamment les conclusions de Pierre Toubert, p. 519-526. Il parlait d’« interrogation, tardive et timide jusqu’à présent, dans un grand courant historiographique dominant depuis plusieurs décennies en Allemagne et en Grande-Bretagne, celui de l’histoire de l’aristocratie carolingienne dans ses structures internes, ses stratégies identitaires et ses rapports avec un pouvoir royal lui-même étudié dans ses définitions idéologiques et dans tous ses relais institutionnels. Sans doute doit-on compter avec la thèse de Régine Le Jan (1995) et quelques travaux importants mais plus ponctuels qui ont porté, en particulier, sur l’anthroponymie, sur les fiscs, sur la sainteté royale et aristocratique, sur l’entourage du souverain et sur quelques grands foyers monastiques. Ces exceptions faites, on ne peut que constater, malgré tout, la modestie de l’apport des historiens français, au cours de ces dernières décennies, aux problèmes centraux du IX^e siècle dont l’exposé inaugural a délimité les champs de pertinence et les axes d’analyse. À l’arrière-plan de ce constat : une prédominance longtemps écrasante de la production allemande, un essor brillant de la recherche britannique, un éveil plus récent de l’école italienne »… Il notait aussi de manière plus générale « le regain d’intérêt pour l’histoire socio-politique du IX^e siècle ».

4 Karl Schmid, « Zur Problematik von Familie, Sippe und Geschlecht, Haus und Dynastie beim mittelalterlichen Adel », dans Zeitschrift für die Geschichte des Oberrheins, 105, 1957, p. 1-61. Remise en question par Constance B. Bouchard, « Family structures and family consciousness among the aristocracy in the ninth to eleventh centuries », Francia, 14 (1986) [Prosopographica VII], p. 639-658. Cf.p. 641 : « Afamily, thenwasanabstraction… ». Sesdéveloppementssur les Guillelmides, p. 641-643. – Olivier Guillot, dans Id., Albert Rigaudière, Yves Sassier, PouvoirsetinstitutionsdanslaFrancemédiévale, Paris, 1994,t. I(Desoriginesàl’époqueféodale), p. 156-158. – Régine Le Jan, Famille et pouvoir dans le monde franc (VII^e-X^esiècle). Essai d’anthropologie sociale, Paris, 1995. – Karl Ferdinand Werner, Naissance de la noblesse. L’essor des élitespolitiquesenEurope, Paris, 1998. – Voiraussipourlesseulstempsmérovingiens, Isabelle Réal, Vies de saints, vie de famille. Représentation et système de la parenté dans le Royaume mérovingien (481-751) d’après les sources hagiographiques, Turnhout,2001. – De manière plus générale, Martin Aurell, La noblesse en Occident (V^e-XV^e siècle), Paris, 1996, et plus récemment Jean-Pierre Poly, Le chemin des amours barbares. Genèse médiévale de la sexualité européenne, Paris, 2003.

5 L’ouvrage auquel nous empruntons le plus est celui de Léonce Auzias, L ’Aquitaine carolingienne, Toulouse, 1937, rééd. Pau,2003 (avec une pagination différente), que nous adoptons ici. –Cf. aussi des études plus classiques ou vieillies : – René Poupardin, Le royaume de Provence sous les Carolingiens (855-933), Paris, 1901, réimpr. Genève-Marseille, 1974. – Id., Le royaume de Bourgogne (888-1038). Étude sur les origines du royaume d’Arles, Paris, 1907, réimpr. Genève-Marseille, 1974. – Alfred Richard, Histoire des comtes de Poitou (778-1204), Paris, 1903, et Maurice Chaume (Abbé), Les origines du duché de Bourgogne, Dijon, 1925.
Quelques récentes monographies régionales viennent heureusement modifier le paysage historiographique du Midi carolingien : Élisabeth Magnou-Nortier, La société laïque et l’Église dans la province ecclésiastique de Narbonne (zone cispyrénéenne) de la fin du VIII^e à la fin du XI^e siècle, Toulouse, 1974. – J.-P. Poly, La Provence et la société féodale (879-1166). Contribution à l’étude des structures dites féodales dans le Midi, Paris, 1976. – Michel Rouche, L’Aquitaine carolingienne (418-781). Naissance d’une région, Paris, 1979. – André Debord, La société laïque dans les pays de la Charente, X^e-XII^e siècle, Paris, 1984. – Chr. Lauranson-Rosaz, L’Auvergne et ses marges (Velay, Gévaudan) du VIII^e au XI^e siècle. La fin du monde antique ?, Le Puy-en-Velay, 1987. – Jacques Bousquet, Le Rouergue au premier Moyen Âge (vers 800-vers 1250). Les pouvoirs, leurs rapports et leurs domaines, Rodez, 1992. – Frédéric de Gournay, Du Rouergue carolingien au Rouergue féodal (IX^e-XII^e s.), thèse, Toulouse-Le Mirail,2001. – Pierre Ganivet, “Potestas, auctoritas, sublimitas”. Recherches sur l’évolution des pouvoirs dans les pays lyonnais de l’époque carolingienne aux lendemains de l’an mil, thèse de doctorat d’histoire du droit, dactylo., Clermont-Ferrand I,2000. – Laurent Grimaldi, Le Viennois du monde carolingien au début des temps féodaux, thèse dactylo., Clermont I, 2003.

6 Heinrich Beyer, Urkundenbuch zur Geschichte der mitelrheinischen Territorien, vol. 1, Koblenz, 1860, réimpr. Hildesheim, 1974, p. 10-11, n° 8.

7 Au bas de la charte de fondation de Prüm (ci-dessus), après Bertrade et son fils Her(i)bert, signent Bernarius, Chrodlanda et Theodericus (gendre, fille et petit-fils de Bertrade, laquelle n’a pas d’autre fils qu’Her(i)bert…).

8 C. B. Bouchard, The Family…, Appendix. The problem of the three Bernards and the dukes of Aquitaine, p. 656. Ce serait un autre Thierry à la génération supérieure selon Eduard Hlawitschka, « Die Vorfahren Karls des Grossen », dans Karl der Große, Lebenswerk und Nachleben (5 vol., Düsseldorf, 1965-1968), vol. 1, p. 76-78, n° 26. Le nom de Thierry, trop mérovingien (?), ne sera pas repris : il y a un petit-fils de Thierry, fils de saint Guillaume, et il est comte d’Autun comme son grand-père (et parrain), mais la transmission s’arrête là. Notons aussi la reprise des noms très mérovingiens de Hlodwich, Dag(o)bert, (C)Hun(i)bert. – Sur la famille guillelmide en général, Joseph Calmette, « De Bernardo ; La famille de saint Guilhem », dans Annales du Midi, 1906, p. 145-165 ; « La famille de saint Guilhem et l’ascendance de Robert le Fort », ibid., 1928, p. 225-245 ; M. Chaume, Les origines… », p. 85-86 et 546-547 ; L. Auzias, « Ramifications de la famille de saint Guillaume », dans L’Aquitaine carolingienne, Appendice I, p. 369-373.

9 Éd. Pierre Riché, trad. Bernard de Vrégille et Claude Mondésert, Paris, 1975,2^e éd., 1991, réimpr. 1997. X, 5 : Nomina defunctorum : quos de quosdam praedictis supra praetermisi personis, his breuiatos agnosce. Id sunt : Wilhelmus, Chungundis, Gariberga, Vuithburgis, Teddericus, Gothzelmus, Guarnarius, Rotlindis [et un peu plus loin :] de domno Ariberto auunculo tuo …

10 Christian Settipani, La Préhistoire des Capétiens 481-987, I^ère partie, Villeneuve d’Ascq, 1993, p. 173.

11 Michèle Gaillard et Anne Wagner, Les sociétés en Europe du milieu du VI^e à la fin du IX^e siècle, Paris,2004, p. 83 sq. Cf. aussi bien sûr M. Aurell, La Noblesse…, p. 5-52, K. F. Werner, Naissance de la noblesse…, R. Le Jan (éd.), La Royauté et les élites…

12 Léonce Auzias ne doute pas, « bien que la filiation soit imprécise, des attaches mérovingiennes de saint Guillaume (qui) […] par sa mère Aude […] se rattache aussi à la dynastie carolingienne » (L’Aquitaine carolingienne, appendice I, p. 369).

13 R. Le Jan, Famille et pouvoir…, p. 179-223, où est analysé le nom comme vecteur des valeurs familiales.

14 M. Chaume, Les origines…, que nous nous permettons de citer largement ici (p. 85-86) : « C’est aussi l’une des mieux connues, grâce au précieux Manuel de la duchesse Doue [Dhuoda. cf. infra, n.20]. Son ancêtre le plus lointain figure, en720, dans la charte de fondation de Prüm aux côtés de la mérovingienne Bertrée et de son fils Charibert ; il s’appelle Garnier ou Bernier et souscrit immédiatement après eux, en compagnie de sa femme Rolent et de leur fils Thierri. Un autre fils de Garnier et de Rolent, Jousseaume, est le père de Thierri I^er, comte d’Autun sous Pépin III (756). À ce Thierri se rattache la branche des premiers comtes d’Autun, personnages assez effacés, dont on connaît tout juste les noms : Thouin, Thierrin II et peut-être Audri ; – puis Guillaume († 806) et dont il suffit, pour évoquer le tragique destin, de rappeler qu’elle compta parmi ses membres Jousseaume II [86] († 834), Herbert († ap. 843), Bernard le chambrier († 844), Guillaume († 850) […], tous suppliciés ou mis à mort sous prétexte de révolte ou de trahison. »… « Il est intéressant de noter ici que, malgré les situations éminentes que beaucoup de ces personnages occupèrent dans l’empire franc, aucun d’eux n’oublia le pays où s’était formé aux fonctions administratives leur lointain ancêtre, le comte d’Autun Thierri I^er. Autun leur apparaissait, semble-t-il, comme une sorte d’héritage sacré, qu’ils ne craignaient pas de revendiquer envers et contre tous et parfois en désespérés ; c’est ainsi que, pendant tout le règne de Charles le Chauve, le problème de la succession de Thierry III, frère du chambrier Bernard et comte d’Autun sous Louis le Pieux, mit aux prises un certain nombre de familles bourguignonnes, qui prétendaient se rattacher de près ou de loin aux derniers comtes, celle du marquis Guérin, celle de Robert le Fort, et celle du chambrier Thierri. » (p. 125-126) « Thierri I^er, que nous avons vu exercer les fonctions de comte d’Autun tout au début du règne de Pépin, nous apparaît précisément comme l’un de ces personnages modestes, dont l’activité s’employa tout entière à obtenir, en récompense de leurs propres services, de brillantes situations pour leurs descendants. En791, on le retrouve sur le Danube, où il opère contre les Avars ; à cette occasion, il pousse fort loin vers l’Est et regagne la Francie orientale par la Bohême, après avoir dévasté la majeure partie de la Pannonie. Lorsqu’il meurt en793, au cours d’une bataille contre les Saxons, il fait figure de marquis et commande en chef toute la région qui s’étend du Fli au Weser. – Parmi les frères de ce second Thierri, issus comme lui du mariage de Thierri d’Autun avec la princesse carolingienne Aude, l’un, Guillaume, se fixera dans le midi de la Gaule et mourra sous l’habit monastique après s’être illustré comme marquis de Gothie ; un autre, Thouin, recueillera Autun et consolidera ainsi les prétentions héréditaires de sa maison sur ce comté ; quant au plus jeune, Alleaume, il fera sa fortune dans la Francie proprement dite. »

15 Pour beaucoup d’auteurs, Aude serait une fille de Charles Martel ou d’une de ses femmes, donc une [demie-] sœur de Pépin le Bref. Contra, E. Hlawitschka, ibid.

16 Nous sommes dans une « une société où les possibilités d’ascension sociale reposaient largement sur l’accès à la lignée d’ancêtres d’une épouse appartenant à un groupe familial plus puissant ». P. Toubert, Introduction, p. 521.

17 Mathieu Pinette et Alain Rebourg, Autun. Ville gallo-romaine. Musée Rolin et Musée Lapidaire, Guides archéologiques de la France, n° 12. – Autun. Sept siècles de civilisation gallo-romaine vus d’Autun. Autun, Société éduenne des lettres, sciences & arts, 1986.

18 Alors que les X^e et XI^e siècles seront assez obscurs, le IX^e siècle est marqué par la valeur intellectuelle de l’évêque Modoin ; il semble que l’ancienne bibliothèque d’Autun lui doive beaucoup ; il dut réorganiser l’école capitulaire qui existait déjà depuis le VII^e siècle. Denis Grivot (chan.), Autun, Lyon, 1968, p. 7. Les manuscrits d’Autun témoignent de ce passé culturel prestigieux. Avec ceux des bibliothèques d’Albi, Saint-Gall, Bobbio, Verceil, Vérone, ils attestent notamment la présence des réfugiés wisigothiques dans le monde franc : P. Riché, Écoles et enseignement…, p. 61 et 86, et Éducation et culture, p. 413-414. Cf. la vita de l’évêque saint Léger († 678), écrite par le moine Ursin peu de temps après sa mort (MGH, SRM, V, 110).

19 Testament édité par Michael Tangl, « Das Testament Fuldrads von Saint-Denis », dans Neues Archiv der Gesellschaft für ältere deutsche Geschichtskunde,32 (1906), p. 207-210.

20 Eginhard, Annales (éd. M G H , SS, I), ad ann. 782, 791, 793, p. 163, 177, 179. Contra, L é o n Levillain qui en fait le fils homonyme de Thierry : « Les Nibelungen historiques et leurs alliances de famille », dans Annales du Midi, XLIX, 1937, p. 337-408 et L, 1938, p. 5-66, ici p. 5-6. Cf. aussi un troisième Thierry, son petit-fils, fils de Thouin/T(h)eud(o)inus, comte d’Autun entre 815 et 819, rappelé par Charles le Chauve comme Theodericus, fils de Theodinus. Arthur Giry, Maurice Prou, Ferdinand Lot et Georges Tessier, Recueil des actes de Charles le Chauve, Paris, 1943-1955, vol. 2, p. 5-7, n° 227 ; Recueil des chartes de Saint-Benoît-sur-Loire (éd. Maurice Prou et Alexandre Vidier, vol. 1, Paris, 1900), p. 24-30,36-37, n° 10-13, 16. Il lègue tous ses biens à Bernard de Septimanie, et agit comme parrain du fils de Bernard, Guillaume (Dhuoda, Manuel pour mon fils, éd. Pierre Riché, Paris, 1975, VIII, 14, p. 320).

21 Franken, Alemannen und Burgunder in Oberitalien (774-962). Zum verständnis der fränkischen Königsherrschaft in Italien, Freiburg im Breisgau, 1960.

22 Les noms de personne sur le territoire de l’ancienne Gaule du VI^e au XII^e siècle, I. – Les noms issus du germanique continental et les créations gallo-germaniques, Paris, CNRS, 1971, p. 225.
Guillaume le Conquérant sera le vecteur indubitable du nom outre-Manche et par delà dans le monde anglo-saxon : il le tenait de son trisaïeul Guillaume « Longue-Épée », duc de Normandie de 927 à 942, fils du chef wiking Rollon et de Poppa, elle-même fille du comte Bérenger, par lequel on remonte à d’autres Guillaume. Katharine S. B. Keats-Rohan, « Poppa “de Bayeux” et sa famille », dans K. S. B. Keats-Rohan et Chr. Settipani (ed.), Onomastique et Parenté dans l’Occident médiéval, Oxford, Prosopographica et Genealogica vol. 3,2000, p. 140-153, notamment p. 146. Christian Settipani, 1993, p. 220 et n.208. Du même auteur, plus récemment, « La noblesse du Midi carolingien : études sur quelques grandes familles d’Aquitaine et du Languedoc du IX^e au XI^e siècle : Toulousain, Périgord, Limousin, Poitou, Auvergne », dans Prosopographica et genealogia, Oxford,2004.

23 Famille et pouvoir…, p. 213 et tableau n° 19. « Un groupe de parenté caractérisé par les noms en Adel/Alt (Adelhelm, Alda, Altuuin, Altmar, Aldramnus, Ademar), Willi- (Willisuuinde, Willihelm), Walt (Wieldrut, Waldrat, Wialdrut, Waltger) ou en Helm (Willihelm, Adelhelm) s’est donc maintenu entre le milieu du VIII^e et la fin du IX^e siècle, du Rhin moyen à la Francie occidentale. Il était lié aux Thierri (mariage d’Alda et de Thierri), aux Rupertiens (mariages de Williswinde et de Rupert I^er, de Wialdrude et de Rupert III) et aux Géroldiens (mariage d’Adrian et de Waldrade) ».

24 R. Le Jan, Ib id ., p. 175 sq. : « Aux VII^e-VIII^e siècles, toutes les familles aristocratiques pratiquaient le principe de la transmission par élément avec variation de la racine ou de la finale des noms ». Chez les Thierry, on transmit les racines Teud, Willi, Adal, Bern et Bert et les finales -helmus, -inus, -ana, -rada.

25 Dans la charte de fondation de Gellone, Guillaume rappelle ses parents Theodericus et Aldana, ses deux épouses, Cunigunda et Witburgis, et ses frères, sœurs et enfants. Thégan, (Thegani) Vita Hludowici imperatoris [abr. Vita Hlud.], 5, dans MGH, SS II, 1829, p. 590-603, ici p. 609. Dom Claude Devic et Dom Joseph Vaissète, Histoire Générale de Languedoc [abr. HGL], Toulouse, 1872-1904, vol. 2 (Toulouse, 1875), Preuves, col. 65-68, n° 16.

26 L. Auzias, L’Aquitaine…, p. 60 et n.49. – Vita Hlud., V : Chorsone porro e ducatu Tholosano submoto, ob cujus incuriani tantum dedecus regi et Francis accederat, Willelmus pro eo subrogatus est…

27 L. Auzias, L’Aquitaine…, p. 64.

28 Vita Hlud., VIII.

29 L. Auzias, L’Aquitaine…, p. 68, n.26 : « La grande part que prit Guillaume au siège de Barcelone ressort des textes d’Ermold le Noir et de l’Astronome qui le dit primus signifer ». Le « Prince des Goths » reçoit la garde de Barcelone en 803. Vita Hlud., XIII. Convaincu de félonie en 820, il est dépouillé de ses honneurs et relégué à Rouen (ibid., XLVI, Ermold le Noir, Poème sur Louis-le-Pieux, éd. Ernst Dümmler, dans J. P. Migne, Patrologiæ cursus completus, series Graeca [abr. PG], Poet. II (1884),4-91, v. 1806-1871 ; Ann. roy., 820 ; Vita Hlud., XXXVIII. Sur la date, cf. la communication à ce même colloque de Josep Maria Salrach.

30 Chr. Settipani, La Préhistoire des Capétiens…, p. 213 (et p. 186, n.240) : Cunégonde, 1^ère épouse de Guillaume (vers768/770), est selon lui la mère de Gariberga et d’Herbert. Il y annonce aussi pour la2^e partie une étude sur cette alliance : « Pour Cunegunde, très franchement, j’hésite encore à proposer une solution. Mais en revanche, j’ai tenté de montrer dans la partie déjà rédigée de mon texte qu’on pouvait écarter celle de M. Chaume, qui en faisait la fille du roi Carloman, sur des bases vraiment peu solides. En réalité, il faut tenir compte du nom de Gariberga, porté par la fille de Guillaume et de Cunegunde, sans doute aussi celui de Charibert, fils de Guillaume, que je pense être né de son union avec Cunegunde. Les noms de Charibert et de Gariberga se retrouvent, séparément dans plusieurs familles de l’époque mérovingienne, et, ensemble, chez les rois Lombards. Maintenant, la prochaine occurrence du nom Cunegunde à ce niveau de l’aristocratie, c’est chez la femme de Bernard d’Italie, épousée vers 813. On admet généralement (même si j’ai soutenu le contraire en 1993), qu’elle se rattachait aux Supponides d’Italie, eux-mêmes apparentés à l’ancienne maison royale ». Conclusion : Cunegunde, épouse de Guillaume était peut-être une Lombarde, ou peut-être pas ! »

31 Ce qu’a récemment suggéré à juste titre Alain Dubreucq, « Le contexte historique de la fondation de Gellone », dans Xavier Barral i Altet et Chr. Lauranson-Rosaz (dir.), Saint-Guilhem-le-Désert. La fondation de l’abbaye de Gellone. L’autel médiéval, actes de la table ronde d’août2002, Aniane, Amis de Saint-Guilhem-le-Désert,2004, p. 17-28. Voir aussi sa communication à ce colloque, « Guillaume de Toulouse et la politique carolingienne en Aquitaine, d’après les sources narratives ».

32 Chr. Lauranson-Rosaz, « La Vita Geraldi, vecteur d’une conscience aristocratique dans le Midi de la Gaule », dans Michel Lauwers (dir.), Guerriers et moines. Conversion et sainteté aristocratiques dans l’Occident médiéval, Antibes-Nice,2002, p. 157-181.

33 Berà I, comte de Barcelona, et « Le Conflent et ses comtes du IX^e au XII^e siècle », dans Études Roussillonnaises, Vol. I, 1951. Il semble qu’il faille écarter l’hypothèse : cf. la communication à ce même colloque d’Alain Dubreucq. – Pierre Bonnassie (La Catalogne du milieu du X^e à la fin du XI^e siècle, t. I, Toulouse, 1975, p. 84, n.20), a vu en Berà, un goth issu d’une famille installée en Haut-Conflent, les deux-petits-fils de Bera, Bera et Esteve, exerçant les fonctions de juges en Conflent, au nom du comte Mir I^er. Un arrière-petit-fils, Bernard, épousa la fille du comte Frédelon de Toulouse, Udalgarda. Une arrière-petite-fille, Ridlinda, se maria avec Radulf, frère des comtes Guifred le Poilu et Mir I^er, et devint sans doute comtesse de Besalú. La descendance de Berà a été bien sûr aussi étudiée par Ramón d’Abadal i de Vinyals, « À propos des attaches familiales de Girart de Roussillon en Catalogne », dans Mélanges René Louis, II, 1982, p. 767-778 ; « La institució comtal carolíngia en la pre-Catalunya del segle IX », dans AEM, 1, 1964, p. 29-75, notamment p. 55-58, La familia del comte Berà.

34 Cf. la communication de Josep Salrach, citée supra, n.29.

35 L’Aquitaine…, p. 98.

36 C’est probablement lui qui est signalé comme comte du palais en 818 et qui fut un des souscripteurs en 811 du traité conclu avec les Normands (Ann. royales, 811).

37 Supra.

38 HGL, t. II, Preuves, col.71.

39 Joaquin Botet i Siso, Condado de Gerona : Los condes beneficiarios. Gerona, 1890, p. 17.

40 Bernard est dit de stirpe regali, et petit-fils de Charlemagne (Vita Hlud.,36, dans MGH, SS, II). La plupart des auteurs ont trouvé le lien familial avec les Carolingiens par Aldana, épouse de Thierry (supra). Aldana est inscrite dans un nécrologe d’Aquitaine avec des sœurs nommées Hiltrudis et Landrada. Charles Martel avait une fille nommée Hiltrudis (Continuationes Fredefarii 25, dans MGH, SRM, II, p. 180) et, selon une Vie écrite au IX^e ou X^e siècle (Vita Chrodegangi episcopi Mettensis 6-7, dans M G H, SS, X, p. 556), une fille L andr a da (mère de l’évêque Chrodegang de Metz). Contra, E. Hlawitschka, « Die Vorfahren Karls des Grossen », Karl der Große, Lebenswerk und Nachleben (5 vol., Düsseldorf, 1965-1968), vol. 1, p. 76-78, n° 26. – La charte de Guillaume pour Gellone cite Bernard en premier, ce qui en fait l’aîné des enfants du saint. Une Vie contemporaine de Benoît d’Aniane dit que Guillaume laissa ses comtés à ses fils quand il se fit moine ; une Vie de Guillaume, du XI^e siècle, basée en partie sur la Vie de Benoît d’Aniane, dit qu’il laissa ses comtés à ses fils Bernard et Gaucelme (Ardo, Vita Benedicti abbatis Anianensis et Indensis, dans MGH, SS, XV, p. 213 et n.2) – Bernard est cité pour la première fois en 864 dans les Annales de Saint-Bertin (Annales Bertiniani [abr. Ann. Bertin.], éd. Georg Waitz, dans MGH, SS rerum germanicarum in usum scholarum, 5, Hanovre, 1883) ad. ann. 864, p. 113- 114 ; il y est dit « Bernard, fils de Bernard » (ce dernier exécuté par Charles le Chauve, dixit Hincmar).

41 La date de naissance de Bernard est antérieure au 15 décembre 804 puisque sa mère était décédée à cette date. Charte de fondation de Gellone. Son parrain avait été le roi d’Aquitaine lui-même.

42 Manuel de Dhuoda, cit., supra, n.20.

43 Sœur du comte Eckart. Il est à remarquer que la mère du comte bourguignon Eckard s’appelait Doda (Testament d’Eckard). – La supposition que la femme de Bernard était une sœur ou belle-sœur de Louis le Pieux (Émile Mabille, « Le Royaume d’Aquitaine et ses marches sous les Carolingiens », dans HGL, t. II, 1875, p. 10) a été ruinée définitivement par Léopold Delisle (Comptes rendus de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres [abr. CRAIBL], Paris, 1885, p. 237 sq.). Elle a été reprise sans raison par M. Chaume (Les origines du duché de Bourgogne). Sur tout cela, cf. Joseph Calmette, « La famille de saint Guillaume et l’ascendance de Robert le Fort », dans Annales du Midi, XXXIXe et XLe années, 1927-1928, p. 225-245.

44 Manuel…, p. 21 sq. Dodana, Doda sont des noms usités en Septimanie (HGL, II, Pr., col. 81, 84). Renée Mussot-Goulard a vu en Dhuoda une gasconne ! (Les Princes de Gascogne 768-1070, Marsolan, 1982, p. 111-112).

45 P. Riché, Les Carolingiens. Une famille qui fit l’Europe, Paris, 1983, p. 154.

46 Ibid., p. 155.

47 Ibid. d’après Paschase Radbert, le biographe de Wala (Epitaphium Arsenii seu vita venerabilis Walae, éd. PL, t. 120, col. 1559-1650).

48 En 830 en fait. Infra.

49 L. Auzias, L’Aquitaine…, p. 101 sq.

50 Ibid., p. 106-107.

51 Ann. Bertin. ad ann. 844. L. Auzias, L’Aquitaine…, p. 160.

52 Ibid., p. 188-189.

53 Ibid., p. 165-167, avec texte et trad.

54 Ibid., p. 168-171, avec texte et trad. Janet L. Nelson, Charles le Chauve, Paris, 1994, p. 163-164.

55 Cf. l’embuscade tendue à l’armée royale par Pépin II, secondé par Guillaume, fils de Bernard de Septimanie, par Turpion, comte d’Angoulême, peut-être par Landri, comte de Saintes, et Bernard, frère d’Emenon et comte de Poitiers (L. Auzias, L’Aquitaine…, p. 171 ; J. L. Nelson, op. cit., p. 164).

56 L. Auzias, L’Aquitaine…, p. 214.

57 Le 12 août, il est encore près du comte Guillaume († 846) ; à la fin de septembre, il est rentré à Compiègne de son infructueuse chevauchée.

58 L. Auzias, L’Aquitaine…, p. 176 et 188 pour les diplômes de Pépin II. J. L. Nelson, op. cit., p. 166 et 167.

59 Ann. Bertin. ad ann. 848.

60 L. Auzias, L’Aquitaine…, p. 202-203.

61 Ibid., p. 207.

62 Ann. Bert., ad ann. 854. L. Auzias, « Recherches d’histoire carolingienne. I. Les fluctuations politiques de quelques Grands d’Aquitaine au temps de Charles le Chauve (846-874) », dans Annales du Midi, XLIV (1932), p. 385-416, ici p. 405, n.2.

63 L. Auzias, L’Aquitaine…, p. 247.

64 L. Auzias, ibid., p. 228-231. Les Aquitains ont fait appel à Louis le Germanique.

65 Cf. K.-F. Werner, Les origines (avant l’an mil) [t. 1 de l’Histoire de France dir. par Jean Favier], Paris, 1984, p. 414-415. La crise se termine par les accords de Gondreville entre Charles le Chauve et Louis le Germanique (860) acculant de nouveau Pépin à la fuite (L. Auzias, ibid., p. 230).

66 L. Auzias, L’Aquitaine…, p. 105 et suiv.

67 Études sur la naissance des principautés territoriales en France, Bruges, 1948. Études qui commencent précisément avec le règne de Charles le Chauve.

68 Ann. Bertin., 862 et 864. L. Auzias, L’Aquitaine…, p. 240-243, et « Les fluctuations… », p. 409.

69 L. Auzias, L’Aquitaine…, p. 214,247 et261. Charles l’Enfant, soumis, est gravement blessé en 864, et meurt en 866.

70 L. Auzias, « Les fluctuations… », p. 410.

71 Ibid. : « Tandis qu’Humfroi se chargeait d’enlever Toulouse au comte Raimond, cet obstiné fidèle de Charles le Chauve, Étienne – le comte dont Hincmar avait dissous l’union avec précisément la fille du comte Raimond – se donnait ou recevait pour mission d’enlever Clermont au comte Bernard (I^er). L’expulsion de l’évêque Sigon par son ordre et sa présence dans la ville au moment de l’attaque normande attestent que, comme Humfroi, il avait réussi. Mais leurs succès à tous deux furent sans lendemain : obligé de soutenir à Clermont, comme son complice à Toulouse, l’assaut des pirates, Étienne succomba dans la mêlée « avec quelques-uns de ses partisans » … La disparition d’Étienne et la soumission de Charles l’Enfant firent à nouveau de Bernard le maître incontesté de l’Auvergne. Nous le retrouvons avec les titres de comte et d’abbé en mai 866 ».

72 Bernard est de nouveau comte d’Auvergne et abbé de Saint-Julien de Brioude en mai 866 : Henry Doniol, Cartulaire de Brioude (Liber de honoribus Sancto Juliano collatis), Clermont-Ferrand-Paris, 1863 [complété par Anne-Marcel et Marcel Baudot, Grand cartulaire du chapitre Saint-Julien de Brioude. Essai de restitution, Clermont-Ferrand, 1935 ; les deux seront ici abrégés Br.], n° 210 ; de même qu’en août de la même année, nous retrouvons comme évêque de Clermont ce Sigon qu’Étienne avait expulsé (L. Auzias, L’Aquitaine…, p. 240, n.38). – Cf. Br. XCVIII (Bernardus comes, Lieugardis) et CCXXXV (Bernardus comes).

73 Cf. M. Chaume, Les origines du duché de Bourgogne…, p. 530-531, tableau généalogique n° II, Les Guérin. Revu par Constance B. Bouchard, « Family structures… », et Chr. Settipani, La Préhistoire des Capétiens, p. 375-376 et n. 93. Voir notre propre tableau, joint à cette étude (fig. 2).

74 Avant lui avaient été comtes d’Auvergne successivement Gérard, tué à Fontenoy en 841, et son frère Guillaume (L. Auzias, « Les fluctuations… », p. 402 et n.3 d’après Adémar de Chabannes, Chronique (Ademari Cabannensis Chronicon, éd. P. Bourgain, R. Landes et G. Pon, Turnhout, 1999), III, 16, et p. 406). Le même Bernard aurait fait défection entre le mois de février 857 et le mois de mars 858 (Ibi d . , p. 406, et L’Aquitaine…, p. 223 n.49) : il est apparemment retourné à Pépin II (?). Il est abbé de Brioude de février 857 (Br.77) à avril 868, date à laquelle il est cité une dernière fois par le cartulaire de Saint-Julien (Br.304). Il meurt avant novembre 869 et probablement avant septembre 868, date à laquelle il est remplacé par Garin/Warinus (Br.257). Il avait pour épouse Liutgarde.

75 Études…, p. 199.

76 J. L. Nelson, op. cit., p. 240.

77 J. Dhondt, Études…, p. 200 : « La déposition d’Humfred rendit libre la charge de marquis de Gothie et celle de Toulouse, les comtés de Narbonne et Toulouse, sinon d’autres comtés de la Septimanie. La confiscation des honores de Bernard [Plantevelue], fils de Bernard de Septimanie laissa le Razès sans possesseur ; les comtés de Rouergue et de Limousin, détenus précédemment par Raimond de Toulouse, lequel paraît avoir été tué en 862, attendaient toujours un titulaire… En Aquitaine centrale, le Berry est enlevé en 867 à Gérard par le roi, l’Auvergne perdra en 868 son comte, Bernard. Dans la partie occidentale de la région, les comtes de Saintonge, Angoumois et Périgord et Poitiers périssent tous trois de mort violente au cours de 866. Comment Charles le Chauve, à ce moment tout puissant en Aquitaine, a-t-il pourvu au remplacement de tous ces comtes ? » « Il a fait appel, d’une part, à des personnages que des liens de parenté proche rattachaient aux possesseurs précédents des honores à conférer, d’autre part, à des nouveaux venus étrangers à l’Aquitaine, pour autant du moins qu’un membre d’une dynastie comtale carolingienne puisse être étranger à une région quelconque de l’empire. »

78 Déjà à la fin de l’année 863 à Nevers ?

79 Ainsi nommé par les Annales de Saint-Bertin et par Hincmar (L. Levillain, « Les Nibelungen… », p. 371).

80 Bernard le jeune est connu dans l’historiographie moderne sous le surnom de « Plantevelue », au sens d’hirsute, surnom sous lequel ses contemporains le connurent plus tard (Ann. Bertin., ad ann. 880). – Né le 22 mars 841 à Uzès. Vita Hlud.,41, dans MGH, SS, II, p. 630. Dhuoda, Manuel…, préface, p. 84. Sur Bernard Plantevelue, L. Auzias, « Les fluctuations… », p. 385 sq., et L’Aquitaine…, p. 298, n. 67.

81 Il était en bas âge lors de l’exécution de son père, et n’était encore qu’un enfant lors de celle de son frère aîné Guillaume.

82 L. Auzias, L’Aquitaine…, p. 251-252… Ann. Bertin., ad ann. 864. Bernard prend la permission du roi pour quitter l’assemblée plus tôt que prévu. Des rumeurs alarmantes se répandent : « Certains disent qu’il projetait d’assassiner Charles, pour venger la mort de son père », tandis que d’autres allèguent que les victimes supposées étaient les comtes Robert et Raoul, alors au zénith de la faveur royale. Le résultat est que Charles dépossède Bernard « Plantevelue » de son comté pour l’attribuer à Robert. Mais cela est plus facile à dire qu’à faire : Bernard a hérité de terres et d’influences en Autunois et il refuse de bouger ». La Bourgogne est en rébellion, le beau-frère du roi lui-même, Guillaume, rejoint les révoltés et est décapité pour trahison en septembre 866 (Ann. Bertin., ad ann. 869). Bernard fuit en Lotharingie en 868 ; Lothaire l’accueille et lui accorde des terres dans l’Ornois, à l’est de Toul. – J. L. Nelson, Charles le Chauve, p. 240.

83 Ann. Bertin., ad ann. 864 et 866 rétrospectivement. L’assemblée bien connue de Pîtres de juin 864 et celle de Servais d’avril 865 réorganisent le Midi : le royaume d’Aquitaine fondé en 855, est reconstitué pour contenter les Aquitains qui persistent « à vouloir un roi à eux, à être les maîtres chez eux, à mener une vie politique distincte de celle des hommes d’outre-Loire » (L. Auzias p. 247 et257) ! Mais c’est un sous-royaume où Charles le Jeune puis Louis le Bègue sont étroitement contrôlés par leur père (J. L. Nelson, Charles le Chauve, p. 233).

84 Épousée vers 868. La théorie traditionnelle (L. Auzias, M. Chaume et L. Levillain) fait de l’épouse de Bernard Plantevelue, Ermengarde, la fille de Bernard I^er (lui-même un Warinide) et de Liutgarde (un nom qui peut évoquer les Liudolfingiens : E. Hlawitschka, « Zur Herkunft der Liudolfinger und zu einigen Corveyer Geschichtsquellen », dans R h e i n i s c h e Vierteljahrsblätter, 98 (1974), p. 92-165) : F. Lot, « Études carolingiennes. I. Les comtes d’Auvergne entre 846 et 877 », dans Bibl. Éc. chartes, 1941, t. 102, p. 282-287, réimpr. dans Recueil des travaux historiques, II, p. 664-669. Jean-Noël Mathieu avait un projet d’article où il soutenait une autre théorie, mais celle-ci n’avait rien de convaincant (communication de Chr. Settipani). Cf. aussi contra, C. B. Bouchard, « Family structures… », p. 657, qui suggère que Plantevelue avait épousé la fille de Warin, comte de Mâcon.

85 Tous trois sont déjà présents à Pîtres.

86 L’énigme « des trois Bernards » a été embrouillée à souhait : L. Auzias, « Bernard “le Veau” et Bernard “Plantevelue” comtes de Toulouse (?) (863-872-885) » dans Annales du Midi, XLIV, 1932, p. 257-295 ; Id., « Les fluctuations… » – F. Lot, « Études carolingiennes. I. Les comtes d’Auvergne entre 846 et 877 », dans Bibl. de l’Éc. des chartes, 1941, t. 102, p. 282-287 et dans Recueil des travaux historiques, t. II, Genève, p. 664-669. – L. Levillain, « Les Nibelungen… » ; « Les personnages du nom de Bernard dans la seconde moitié du IX^e siècle », dans Le Moyen Age, t. LIV (4^e série, t. III), 1947, n° 3-4, p. 197-242. – J. Calmette, « L’effondrement d’un empire », p. 134-138 ; Id., « Les comtes Bernard sous Charles le Chauve. État actuel d’une énigme historique », dans Mélanges d’histoire du Moyen Age dédiés à la mémoire de Louis Halphen, Paris, 1951, p. 103-109.
Elle a été éclaircie par J. Dhondt, « Le problème des Bernards », dans Études…, Appendice IV, p. 293-313, et plus récemment revisitée par C. B. Bouchard, « Family structures… », p. 651-658, Appendix. Cf. aussi J. L. Nelson, op. cit., p. 253-254.

87 Ann. Bertin., ad ann. 872 : « Nunciatur ab hominibus Bernardi filii Bernardi, Bernardus, qui Vitellus cognominabatur occisus, et ejus honores praedicto Bernardo sunt dati ».

88 J . Dhondt, Études…, p. 205.

89 Aux biens rémois situés en Auvergne, à ceux des diocèses de Bourges et d’Autun, de l’abbaye de Flavigny. Hincmar de Reims charge le comte de Rodez Frédelon et l’évêque Adalgaire, de défendre ses biens en Poitou, Auvergne et Limousin. Flodoard, Historia Remensis Ecclesiæ, alias Annales, III,20, éd. MGH, SS, XIII, 1881, p. 409-599, ici p. 513 ; Jacques-Paul Migne, Patrologiae cursus completus, series Latina (abr. P L), t. 135, col.234. Bernard « d’Auvergne », auquel Hincmar, à la mort de Pépin II, a fait confiance pour protéger les biens auvergnats de l’église de Reims, aurait trahi cette confiance. Jean Devisse, Hincmar, archevêque de Reims, 845-882,3 vol., Genève, 1975-1976, p. 901.

90 La « nomination » intervient entre novembre 869 (Br. CXCI) et janvier 874 (B r . 132), probablement en même temps que l’accession de Plantevelue au comté. Chr. Lauranson-Rosaz, L’Auvergne…, p. 54. L. Auzias, L’Aquitaine…, p. 270 : (à la mort de Bernard I^er) « le roi a donné le comté d’Auvergne au fils du comte défunt, nommé Warin. » [Plantevelue lui succède]. Frotaire est remplacé à sa mort, après septembre 888 (Br.38 et225) par Adalgaire d’Autun.

91 Chr. Lauranson-Rosaz, L’Auvergne…, p. 55. Chargé des négociations pour le titre impérial, Adalgaire en obtient l’évêché d’Autun (875) et l’abbatiat de Flavigny (876/7), dans la principauté de Bernard de Gothie. Il est habilement recommandé par Charles à Boson qui en fait son chancelier. Adalgaire est cité comme abbé de Brioude de juin 889 (Br.278) à juillet 892 ; il est empoisonné par le diacre Gerfredus, prévôt de Flavigny, fin 893 (Gallia Christiana, IV, Instr., col. 64-65, jugement de l’assassin). Guillaume le Pieux l’a remplacé avant juillet 893, alors qu’il est cité depuis fin mai comme chancelier d’Eudes. Sur le personnage, sa carrière, son action, sa mort, cf. G. Tessier et R.-H. Bautier, introduction (par ce dernier) du Recueil des actes d’Eudes roi de France (888-898), Paris, 1967, p. XXXII-XXXIII.
J. L. Nelson, Charles le Chauve, p. 254-255 : « L’une des principales erreurs de la théorie des « principautés territoriales » est en effet l’absence des hommes d’Église. Ce furent [pourtant] les évêques et les abbés qui aidèrent Charles le Chauve à gouverner effectivement son royaume, à la fois au centre et dans les régions ; toute explication du gouvernement carolingien, surtout sous le règne de Charles, doit faire place aux interactions du pouvoir laïc et du pouvoir religieux ».

92 Celui qu’on peut aussi appeler Bernard « d’Autun » (L. Auzias, L’Aquitaine…, p. 251), attaché à cette région plus qu’à toute autre « par une tradition de famille, par ses origines, par ses intérêts, par sa carrière passée » (Id., p. 410), récupère le comté de 874 à 876. Il en est frustré alors par Carloman au profit de Richard, obtenant le Mâconnais en compensation. « Bernard espérait qu’il s’y adjoindrait, au fur et à mesure des conquêtes, d’autres territoires arrachés à Boson et qui, adossés à ses possessions de Mâconnais, Auvergne et Gothie, développeraient vers le Sud-Est sa puissance ».

93 L. Auzias, op. cit., p. 289-290. La donation est assortie d’un contre-don, Boson offrant sa fille Ingelberge au jeune fils du roi, Carloman.

94 Léonce Auzias attribue à Bernard le Rouergue plutôt que le Razès, à partir d’une mention par Hincmar de Bernardus comes Redonensis, rapportée par Flodoard : « Recherches d’histoire carolingienne. II. Le personnel comtal et l’autorité royale en Septimanie méridionale (872- 878) », dans Annales du Midi, XLV (1933), p. 121-147. Cf. aussi R. Poupardin, « Une charte inédite de Bernard Plantevelue », dans Annales du Midi, XIV (1902).

95 Le Toulousain est ensuite octroyé, en 875 à Eudes, frère de Bernard le Veau. Quant au Berry, en 872 il fait partie des honores du comte Gérard, qui sont confiés à Boson.

96 Plutôt que sa défection, on a souligné son attitude passive vis-à-vis du roi de Francie occidentale (L. Auzias, L’Aquitaine…, p. 301 sq.) : il affecte d’ignorer son souverain et ne cesse de donner des preuves de son attachement à Charles le Gros. Pas une fois dans les actes de Saint-Julien de Brioude, on ne voit se référer pour la date au règne de Carloman, mais toujours à celui de Charles le Gros. C’est encore par l’empire de Charles le Gros qu’on date dans le Carcassès que gouverne le comte Effroi, gendre de Plantevelue. Et voici le texte le plus suggestif parce qu’il émane de Plantevelue lui-même : la donation du puissant marquis et de son épouse Ermengarde à l’abbaye de Conques en 883, c’est par le règne de Charles « roi des Francs et des Lombards » qu’elle est datée… Mais il y a plus : l’attachement de Plantevelue à sa cause, Charles le Gros [qui n’est sans doute pas fâché de se créer en plein royaume de son cousin un allié reconnaissant] le signale lui-même, et avec quelle insistance ! : « avec combien de dévouement, de courage et de constance dans la fidélité Bernard, le glorieux comte et marquis, s’est opposé à ses ennemis, à leurs embûches, à leurs déprédations, au tyran Boson et à ses complices, avec quel zèle il a sacrifié sa vie en luttant contre les perfides susdits avec une admirable fidélité », Hist. de France, t. IX, p. 349). « La collusion de Plantevelue et de Charles était pour ainsi dire sollicitée par la convergence de leurs ambitions ». Plantevelue obtient en 885 de l’empereur la confirmation des privilèges de l’église de Lyon : Johann Friedrich Böhmer & Ernst Mühlbacher, Die Regesten des Kaiserreichs unter den Karolingern, 751-918, I, Innsbrück, 1980, rééd. Hildesheim, 1966, n° 1660.

97 Cf. J. L. Nelson, Charles le Chauve, p. 254, parlant de « cette nouvelle race de prince territorial dont le pouvoir régional consolidé affaiblissait celui du roi », et citant Edward James, The Origins of France, Londres, 1982, p. 175 ; Riché, Les Carolingiens, p. 188.

98 Sa mort se situe après le21 juillet 886, date à laquelle il donne avec Ermengarde à Conques : Cartulaire de l’abbaye de Conques, éd. Gustave Desjardins, Paris, 1879 [abr. Conq.], n° 153. S’il est mort en combattant Boson, il ne peut avoir péri qu’en cette année 886, puisque Boson mourut le 11 janvier 887 (R. Poupardin, Le royaume de Provence, p. 140, n.3). Cf. le diplôme de Charles le Gros du 16 août 886 citant Guillaume fils de Bernard (Cartulaire de Saint-Cyr de Nevers, éd. René de Lespinasse, Nevers-Paris, 1916, n° 15, et GC, XII, col.319, instr. XIV) est faux.

99 Pour cette dernière partie de l’exposé, a été très largement réutilisé notre article, « Les élites… ».

100 Nam reipublicæ statu jam nimis turbato regales vassos insolentia marchionum sibi subjugaverat (Vita Geraldi [abr. VG], éd. PL, t. 133, I,32, col. 660).

101 C’est le sens même de la formule utilisée par certaines chartes contemporaines. La charte clunisienne de novembre 893 par laquelle Ava, sœur de Guillaume d’Auvergne, cède à son frère le domaine de Cluny est datée de la première année de la lutte des deux rois pour le règne, à savoir Eudes et Charles (Recueil des chartes de l’abbaye de Cluny [abr. Clu.], éd. Auguste Bernard et Alexandre Bruel, tome I (802-954), Paris, 1876, n° 53).

102 Exceptionnelle fut cette année 886/7 : en quelques semaines, alors que le royaume de France est sous la régence du trop germanique Charles le Gros, meurent Hugues l’Abbé, qui avait joué lui aussi un moment le rôle de régent, le comte d’Angoulême Vulgrin, Bernard Plantevelue et Boson, maîtres du Massif Central et du bassin du Rhône. Encore plus marquante l’année 888, lorsque au Carolingien Charles le Gros succède le Robertien Eudes : « cassure, rupture nette avec une tradition périmée, signal de la désagrégation territoriale de l’Empire et de la ruine de la dynastie » (L. Auzias, L ’Aquitaine… , p. 313). Plus qu’un changement de dynastie, ce fut la « fin du mythe carolingien », au point que certains historiens en datent la fin du haut Moyen Âge.

103 Cf. Auguste Eckel, Charles le Simple, Paris, 1899, p. 10. Léonce Auzias (op. cit., p. 312, n. 50) avait émis l’hypothèse que Rannoux II ait été le protecteur du jeune Charles parce qu’il était son parâtre : il aurait en effet épousé Adda, alias Adélaide, veuve du roi Louis II le Bègue, mort en 879. Du même L. Auzias, « Les origines carolingiennes des ducs féodaux d’Aquitaine et des rois capétiens », dans Rev. hist., t. 173, 1934, p. 91-102.

104 Les Annales de Fulda laissent entendre que Rannoux II aurait repris le titre de roi d’Aquitaine en 888, juste avant de mourir, le citant parmi les grands qui usurpèrent le titre de roi à la mort de Charles le Gros : Odo filius Ruodberti usque ad Ligerim fluvium vel Aquitanicam provinciam sibi in usum usurpavit. Deinceps Ramnulfus se regem haberi statuit. Cette affirmation sera reprise au XI^e siècle par Hermann Contractus dans sa Chronique (RHF, t. VIII, p. 247) : Odo filius Rudperti in Gallia usque ad Ligerim et in Aquitania ultraque in Gallia Ramnolfus regium nomen invasere. Ajoutons l’indice numismatique que cite L. Auzias, L’Aquitaine…, p. 436, n. 59, d’après A. Richard, Histoire des comtes de Poitou, t. I. Aucun historien de la Francie occidentale ne fait la moindre allusion à cette royauté. En tous les cas, Rannoux est nommé par les Annales de Saint-Vaast « duc de la majeure partie de l’Aquitaine ».

105 Adémar de Chabannes souligne l’amitié qui lie Guillaume et son cousin Rannoux (L. Auzias, L’Aquitaine…, p. 435, n. 57). Sur la déférence du premier envers le second, qu’il explique par l’origine carolingienne du comte de Poitiers, raison de ses prétentions royales, L. Auzias, Les origines…, notamment p. 100. Seul, au Sud, le comte de Toulouse, nommé justement Eudes ou Odon, frère de Bernard le Veau, est un allié potentiel du roi. Charles le Gros, déposé en novembre 887, meurt le 13 janvier 888.

106 En 892. Sur tous ces événements, cf. Chr. Lauranson-Rosaz, L’Auvergne… sans être d’accord avec l’analyse que donne Auzias de la passivité de Guillaume (L’Aquitaine…, p. 434-435). C’est à l’initiative de Géraud d’Aurillac, qui l’avait d’abord recueilli, que le jeune Ebles Manzer est confié à Guillaume. Adémar de Chabannes, C h roniq u e, II,21 : Et dum regalem aulem assiduaretur, veneno nectatus, (Ramnulfus) in extremis sancto Geraldo, ibi tunc presenti, parvulum filium subductum filium Ranulfi a Pictavis Willelmo, duci Aquitanie, comiti Arvernis, credidit nutriendum cui propinquus erat.

107 En dix années d’un règne mal connu, nous est conservé le souvenir de trois expéditions en Aquitaine : c’est énorme ! Étrange effort militaire au Sud, alors que les Normands assaillent la Francie. Édouard Favre, Eudes comte de Paris et roi de France, 882-898, Paris, 1893 ; G. Tessier, R.-H. Bautier, Rec.…

108 Un seul de ces actes concerne l’Auvergne, plus précisément le chapitre cathédral de Clermont : Arch. dép. du Puy-de-Dôme,3G Arm. 18, sac A, c. 1, (après le 15 octobre 893 ; le 16 juin 897 ?), éd. G. Tessier, R.-H. Bautier, Rec… n° 49). « Diplôme du roi Eudes confirmant les lettres données par Charles le Gros, empereur, voulant et ordonnant, à la sollicitation d’Adalard, évêque d’Auvergne, que les chanoines jouissent paisiblement des biens qui leur ont été donnés dans les appartenances de Lanciac, Cussiac, Acciac, Merlini, Pomeris. Signées du chiffre d’Eudes, contresignées et scellées par l’ordre de Suderius, archevêque (?), grand chancelier. Un autre acte du chapitre cathédral de Clermont date du règne de Charles le Simple (… et de Guillaume le Pieux) : il s’agit, en 911, d’une donation faite par Adalard, évêque d’Auvergne, à Léotard, sa vie durant seulement, de l’église de Saint-Victor avec ses appartenances, mas, moulins, terres, prés, vergers et bois, à la charge de payer tous les ans, pour le luminaire des saints Agricol et Vital, deux sols. Après la mort dudit Léotard, l’église de Saint-Victor et ses appartenances, appartiendra à l’église de N. D. et SS. Agricol et Vital. Donation signée de plusieurs personnes, datée de la 13^e année de Charles le Simple, roi de France ». Prochaine édition des Chartes du chapitre cathédral de Clermont par J.-P. Chambon, M. de Framond, Chr. Lauranson-Rosaz.

109 Philippe Lauer, Recueil des actes de Charles III le Simple (893-923), Paris, 1949, n°s XXXI (899, pour Aurillac), XLIV (903-923, pour Conques), CXXVI (912, pour Souvigny, faux), L (pour Beaulieu).

110 Sans parler de son surnom de « Pieux », attribué tardivement, le nom même de Guillaume est tout un programme : n’est-ce-pas celui de son ancêtre Guillaume de Gellone ? S’il n’y avait le risque de confusion avec le duc d’Aquitaine homonyme du XI^e siècle, on pourrait tout aussi bien le surnommer « le Grand », comme ce fut fait dès sa mort, pour le différencier de son successeur, « le Jeune » : Willelmus ille major et sui temporis vir magnificus. Diplôme du roi Raoul confirmant l’acte de fondation de Cluny, le 9 septembre 927 (Clu.285).

111 Né vers 870, Guillaume reçoit une éducation de prince, dans un contexte intellectuel qu’on a tendance à sous-estimer : son père Bernard Plantevelue avait pour ami le saint laïc Géraud d’Aurillac, si imprégné des « valeurs antiques » ; Guillaume a pour conseiller le savant Abbon, legis doctor, dont le fils Odon, élevé à sa cour, sera un jour abbé de Cluny et biographe de saint Géraud (Chr. Lauranson-Rosaz, « Les origines d’Odon de Cluny », dans Cahiers de civilisation médiévale, X^e-XII^e siècles, t. 147. XXXVIII^e année, n° 3, juillet-sept. 1994, p. 255-270). C’est tout un réseau de gens notables qui gravitent autour du duc et forment comme une cour savante du palais d’Aquitaine.

112 L. Auzias, L’Aquitaine…, p. 323 : « Il faut renoncer, tant nos sources sont indigentes pour les vingt premières années du X^e siècle, à suivre, même par bribes, l’évolution des pouvoirs de Guillaume le Pieux et les circonstances dans lesquelles il continua à gouverner l’Aquitaine. Seuls quelques actes disséminés, rarissimes, jettent sur l’extension de la puissance de fugitives lueurs, actes peu explicites et qui posent à chaque pas des énigmes, mais qui suffisent à convaincre que cette époque est le moment crucial pour la constitution du duché féodal d’Aquitaine ».

113 Avant même Richard de Bourgogne.

114 Br.309 : Guillelmus, comes, marchio atque dux … regio dono, abbatiali videor fungi officio …

115 Pour le tombeau de Guillaume le Pieux, G. Fournier, « Les plus anciens sanctuaires élevés sur le tombeau de saint Julien de Brioude », dans Almanach de Brioude, 1967, t. 47, p. 13-28, ici p. 18 sq.

116 Eudes est mort le 1^er,2 ou3 janvier (G. Tessier, R.-H. Bautier, Recueil…, p. CLVII et n. 1).

117 Une titulature que son père Bernard Plantevelue avait certes naguère « tentée » : il s’était dit gratia Dei comes en 864 (Br. 176) et en 886 (Conq. 153), avec son épouse Ermengarde. En 881, c’est celle-ci, seule, qui se proclamait Dei gratia comitissa (Br. 131). – Guillaume prend le titre en mars 900 (Br.317, gratia Dei comes et abbas, Br. 118, 898-909) ; en avril 902 (Br.241) gratia Dei comes … rector (id. Br. CCCXI, 897-911 et 121, 911-918) ; en août 907 (Br.26⁴) et juin et novembre 909 (Br.44 et45) gratia Dei dux, rector ; le 11 avril 917 (Br.324) gratia Dei comes, Aquitanorum princeps, rector. Ebles Manzer prend aussi la titulature gratia Dei en 907. A. Richard, op. cit., p. 62 et n. 1.

118 « À lui et à ses successeurs, le roi, dans ses diplômes, ne donnera jamais ces titres nouveaux, jusqu’en 987. Et cependant, comme il apparaît dès 899, quand le roi traite d’un problème touchant le regnum d’Aquitaine dans un diplôme, désormais il n’y intervient, en principe, que par l’intermédiaire de Guillaume. Il n’y a que quelques exceptions qui visent, semble-t-il, quelques rares églises. La position du roi est remarquable : il se refuse à officialiser un titre qui s’est imposé à lui (par le fait de son prédécesseur) ; mais il reconnaît que la fonction royale s’accomplit ordinairement en la personne de Guillaume, s’agissant de l’Aquitaine » . O. Guillot, op. cit., p. 157.

119 Tel celui de Lyon en 901. Jean Mabillon, AA SS OSB, V, p. 89-90, cité par Étienne Fournial, « Recherches sur les comtes de Lyon aux IX^e et X^e siècles », dans Le Moyen Âge, t. LVIII, 1952, p. 237 et n.77, et par Pierre Ganivet, “Potestas, auctoritas, sublimitas”… Autres plaids : Cartulaire de Sauxillanges, éd. Henry Doniol, Clermont-Ferrand, 1864 [abr. Saux.], n° 146 ; Clu. 192… sans oublier les plaids mentionnés dans la Vita Geraldi, passim : Chr. Lauranson-Rosaz, « La Vita Geraldi… ».

120 Cf. Gabriel Fournier, Les origines de Brioude, n. 130 et le denier de Brioude d’1,40 gr du trésor de Rennes : Jean Lafaurie, Revue de numismatique, 1965, p. 298, qui l’attribue, plutôt qu’à Guillaume le Pieux, à Guillaume le Jeune (cf. la concession de la monnaie à ce dernier, infra, n. 151). Sur le monnayage guillelmide à Brioude, cf. P. Cubizolles, Le noble chapitre Saint-Julien de Brioude, Brioude, 1980, p. 100-102.

121 Le mariage a lieu avant mai 898. Ingelberge est citée dans l’acte de fondation de Cluny (909- 910, Clu. 112), qu’elle signe [cf. illustration] et en 914 dans le diplôme pontifical de Jean X confirmant la donation par le duc Guillaume de sa cour de Moissat aux moines de Saint-Lomer de Blois (A.-C. Chaix de Lavarène, Monumenta Pontificia Arverniæ…, Clermont-Ferrand, 1880, n° V). Ingelberge serait elle-même morte à Moissat en 919, et inhumée dans l’église qu’elle y avait fait construire (Notice manuscrite sur Moissat, provenant de la Biblioth. des P. Jésuites de Billom, p. 60. Contra, Chr. Settipani, La Préhistoire des Capétiens, p. 375, qui lui fait finir sa vie au monastère de Saint-Sixte de Plaisance). Peut-être est-ce une fille homonyme d’Ingelberge et de Guillaume qui est mariée au Dalmas vicomte, abbé laïque de Brioude après la mort des neveux de Guillaume, alors qu’il est veuf de Bertranne (c. 922-936)…

122 Le mariage est une promotion supplémentaire si Ingelberge est bien la fille de Boson d’abord fiancée en bas-âge à Carloman, le 11 septembre 878 à Troyes (Ann. Bert.), lequel Carloman meurt le 6 décembre 884 (G. Tessier, R.-H. Bautier, Re c.…, p. LIV-LVI). P. Riché, L e s Carolingiens. Une famille qui fit l’Europe, Paris, 1983 ; C. B. Bouchard, « The Bosonids or rising to power in the late Carolingian age », dans French Historical Studies, vol. XV, n° 3, printemps 1988 [p. 407-431], p. 426 : « Hence, the marriage between William of Aquitaine and Angilberga marks the duke’s attempt to attach himself to a family of kings, and the foundation of Cluny, in many ways a Bosonid foundation, may be seen as an attempt by the duke to emulate these kings in the patronage of monks who might pray both for his success and for his soul ». – En parlant d’Ermengarde, la femme de Boson, Hincmar de Reims dit : « Elle déclarait ne vouloir pas vivre si, fille d’empereur d’Italie et fiancée à un empereur de Grèce, elle ne faisait pas de son mari un roi » (Annales Bertiniani, ad ann. 879). Cf. à cet égard la formule utilisée dans la charte du25 juillet 879, par laquelle Boson et Ermengarde font don à l’abbaye de Montieramey de biens reçus de Charles le Chauve à Lanty-en-Lassois (R. Poupardin, Rec. des actes des rois de Provence [855-928], Paris, 1920, p. 31, n° XVI) : Ego Boso, gratia Dei, id quod sum … et dilecta conjux mea Hirmingardis, proles imperialis. NB Le id quod sum fait directement référence à la première épître de saint Paul aux Corinthiens [10] : gratia autem Dei, sum id quod sum.

123 Ad. Chab., Chron., III,21 : in extremis sancto Geraldo ibi tunc praesenti, parvulum filium suum Eblum commisit tutandum. Il est curieux qu’on n’entende plus parler d’Ebles jusqu’à la disparition des Guillelmides. Le comté de Poitiers lui est restitué en 902, lorsqu’Adémar est chassé en Périgord par Guillaume. Sur la déférence de ce dernier envers Ebles, et déjà envers Rannoux, cf. L. Auzias, « L’origine carolingienne des ducs féodaux d’Aquitaine et des rois capétiens », dans Revue historique, 1934 (59^e année), p. 91-102, ici p. 100.

124 Gabriel Fournier, « Les plus anciens sanctuaires élevés sur le tombeau de saint Julien de Brioude. Notes complémentaires », dans Almanach de Brioude, 1967, p. 9-31, notamment p. 22- 24. Sur le culte de la Croix, Dominique Iogna-Prat, « La Croix, le moine et l’empereur : dévotion à la Croix et théologie politique à Cluny autour de l’an Mil », dans Haut Moyen Âge. Culture, éducation et société. Études offertes à Pierre Riché, Centre de Recherche sur l’Antiquité Tardive et le haut Moyen Age de l’Université Paris-X-Nanterre (coord. Michel Sot), 1990, p. 449-475. Pour Gellone, Édina Bozoky, « Le comte et la Croix. La relique de la Vraie Croix dans la légende de la fondation de Gellone », dans Xavier Barral i Altet et Chr. Lauranson-Rosaz (dir.), Saint-Guilhem-le-Désert…, p. 79-84.

125 Chr. Lauranson-Rosaz, L’Auvergne…, p. 229. G. Fournier, Le peuplement rural en Basse-Auvergne durant le haut moyen âge, Paris, 1962, avec des notices correspondant à tous ces lieux.

126 Rappelons déjà sous Bernard Plantevelue les fondations féminines de Blesle en Brivadois (G. Fournier, op. cit., p. 555) et Cusset, près de Vichy (Cartulaire de Saint-Cyr de Nevers, n° 16, diplôme de Charles le Gros du 14 août 885, GC, XII, col.309, instr. XII et XIII).

127 Ceux de Bourgogne à Saint-Germain d’Auxerre, Saint-Martin d’Autun ou Sainte-Colombe de Sens… Guillaume contrôle aussi certains sanctuaires par personnes interposées : ainsi peut-être Saint-Martial de Limoges où est abbé laïque son ami le legis doctor Abbon (père d’Odon de Cluny, supra). Le Limousin lui échappe, « tenu » par les comtes de Toulouse. La seule charte sur laquelle on s’est fondé pour affirmer la présence de Guillaume en Limousin est la charte n° X du Cartulaire de l’abbaye de Beaulieu (éd. Maximin Deloche, Paris, 1859, abr. BL), datée de 886/7. C’est en fait une donation par le comte Odon de Toulouse et son épouse Garsinde, signée entre autres par un Guillaume comte, lequel est le comte de Bordeaux, parent de la comtesse, et non Guillaume le Pieux.

128 Chr. Lauranson-Rosaz, loc. cit.

129 Ibid., p. 122.

130 J.-P. Poly, La Provence…, p. 20-23.

131 Dès 912, un affrontement meurtrier oppose les clans bourguignons et ceux dits « légitimistes », et bientôt les Toulousains ; les Guillelmides ont du mal à rester neutres dans le conflit : à la suite des massacres de 916, c’est en terres guillelmides, en Mâconnais, que se réfugie la famille du jeune Mayeul, plus tard abbé du Cluny, bientôt rejoints par l’abbé Agio de Vabres, chassé de l’évêché de Narbonne. Cluny, la fondation religieuse, révèle sa dimension sinon politique du moins culturelle par le rôle qu’elle joue alors de refuge et de conservatoire : auprès d’elle se réfugient naturellement les grands de la noblesse méridionale victimes des troubles. Mais les exilés se retrouvent aussi sur les terres auvergnates : en 916 l’archevêque Libéral d’Embrun, fuyant son diocèse avec les reliques de saint Marcellin, traverse le Brivadois où vingt ans plus tard, avec une partie de ces reliques sera fondé le prieuré de Chanteuges. On ne peut nier que la guerre civile qui secoue pendant plus de dix ans tout le Sud-Est de la Gaule ait eu des retentissements jusque dans les « États » du marquis Guillaume. En Gothie, les textes sont là : c’est même à Narbonne que les hostilités ont débuté. Dans les autres comtés, les sources moins explicites laissent cependant percevoir des retombées plus ou moins directes des événements, surtout dans les marges de l’Est, exposées à l’influence bourguignonne, tels le Velay ou le Lyonnais. Seul le noyau primitif formé par l’Auvergne semble demeurer sous l’autorité incontestée du duc. Mais même là, on sent que sa principauté est en fait déjà minée par les forces locales, que touche la subversion. Une autre politique s’impose alors à Guillaume.

132 Guillaume est bien comte de Lyon : P. Ganivet, op. cit., et Hubert Gerner, Lyon im Früh-Mittelalter, Cologne, 1968 (carte p. 286). L’œuvre de Guillaume sera bien fragile puisque Guillaume le Jeune ne pourra apparemment rien contre Hugues d’Arles, malgré un effort de consolidation. Cf. aussi Clu.205 (janv. 917), donation par Guillaume du fisc de Romans in pago Lugdunense (Romans au nord d’Ambérieux, Ain).

133 Les deux églises majeures de Brioude et Cluny, par la richesse de leur fonds documentaire certes, mais aussi par leur position éminemment stratégique, seront en fait des points d’observation de la crise qui couve, avant d’en être ses centres névralgiques.

134 Au bas de la charte de fondation de Cluny, après les signa de Guillaume, de sa femme Ingelberge (cf. fig.4), de l’archevêque Madalbertus de Bourges, des évêques Adalard de Clermont et Atton (de ?), de Guillaume comte, neveu du fondateur, suivent36 signatures de fidèles ainsi énumérés : Armannus, Wigo, Ugbertus, Stephanus, Heracl(i)us, Gotbrannus, Gauzfredus vicomte, Teutardus, Isnardus, Urso "le Grec", Rataldus, Rainbertus, Isingerius, Rotbertus, Girbertus, Bermundus, Gerardus, Amblardus, Aimardus, Achedeus, Wido, Grimbertus, Umbertus, Arnaldus, Ainardus, Rotbertus, Bodo, Atso, Girbaldus, Ismido, Teotbertus, (autre) Teotbertus, Bernardus, Walo, Geraldus, Truannus. – Sur les grands d’Auvergne mentionnés par la documentation entre 886 et 918 (cf. Br.337), Chr. Lauranson-Rosaz, L’Auvergne…, ch.2, avec généalogies des familles. Il faudrait aussi parler de tous ces fidèles inclassables parce que non identifiés ou non localisés : Roger, Humbert, Guillaume vicomte, etc.

135 C’est ainsi que sont apparus les premiers vicomtes, fidèles du duc : en Mâconnais Liétaud et Racoux, en Berry Geoffroy, en Auvergne Jean, Armand, Étienne, Hubert, Robert (Chr. Lauranson-Rosaz, Les élites…).

136 VG, I,34 et Adémar de Chabannes, Chronique, III,21. Peut-être Guillaume a-t-il donné une fille en mariage à son fidèle Dalmas. Infra, n. 157.

137 VG, I,32. Odon rajoute que Géraud « commenda » toutefois à Guillaume son neveu Raynaud, avec un important contingent d’hommes d’armes : Willelmus plane dux Aquitanorum, vir bonus, et per multa laudabilis, cum tandem vehementer invaluisset, non minis quidem, sed precibus agebat, ut Geraldus a regia militia discedens, sese eidem commendaret. Sed ille favore comitis nuper usurpato, nequaquam consensit. Nepotem tamen suum nomine Rainaldum eidem cum ingenti militum numero commendavit. Sed et isdem Willelmus nullatenus illi indignatus est, quippe non immemor, qui a pater suus Bernardus ipsum adhuc adolescentem eidem domno Geraldo, amoris causa commendavit. Sur l’attitude de Géraud, Chr. Lauranson-Rosaz, L’Auvergne…, p. 62 et p. 330. Odon lui-même a été élevé à la cour de Guillaume (Vita Odonis abbatis Cluniacensis auctore Iotsaldo monacho Cluniacense (BHL 6281), éd. Luc d’Achery, Jean Mabillon, Acta sanctorum Ordinis S. Benedicti, 6, Paris 1701, 679-710, I, 5. – Guillaume réussit néanmoins à se rallier d’autres vassi, tels Ebbe de Déols, ou Roger de Carcassonne.

138 En Auvergne, après Géraud, on ne connaît pas d’autre vassus regalis qu’Étienne II, évêque de Clermont (v. 945-984/90). Sur ce personnage, cf. récemment Jean-Pierre Chambon et Chr. Lauranson-Rosaz, « Un nouveau document à attribuer à Étienne II, évêque de Clermont (ca 950 – ca 960) », dans Annales du Midi, t. 114, n° 239, juillet-septembre2002, Mélanges et documents, p. 351-363.

139 Cf. Chr. Lauranson-Rosaz, « La Vita Geraldi, vecteur d’une conscience aristocratique dans le Midi de la Gaule », dans Guerriers et moines. Conversion et sainteté aristocratiques dans l’Occident médiéval (IX^e-XII^e siècle). Actes de la table-ronde organisée les 5-6 mars 1999 par le Centre d’ÉtudesMédiévalesdeNice. ÉtudesréuniesparMichelLauwers, Antibes, ÉditionsAPDCA (Collection d’études médiévales de Nice, volume4, CNRS, Centre d’études Préhistoire, Antiquité, Moyen Âge),2002, p. 157-181.

140 Br.318 (oct. 918), Guillelmus comes, successor Guillelmi Majoris.

141 GC., II, col.473-475 ejus obitiis notatur in necrologio Brivatensi his verbio, fol. 167 – « II nonas Julii obiit Guillelmus pius comes Pictavensis, dux Aquitanim », etc … Obit. Br. (HGL., II, p. 310). Cf. l’Obituarium Lugdunensis Ecclesiæ, p. 56, qui donne le28 juin 918 (soit le2 des calendes de juillet). Ann. Masc., 919 (en fait 918), Guillelmus famosus dux Aquitanorum efflavit et conjux ejus Ingelberga finem vivendi fecit. P. Ganivet, op. cit.

142 Peut-être même dès 916 avec l’incendie de Bourges (Annales de Massay, Annales Masciacenses, éd. MGH, SS, III, 170, a° 916 : Bituricas incenditur, Jean Dufour, Recueil des actes de Robert I^er et de Raoul, rois de France (923-936), Paris, 1977, p. XCV, n. 1, et Philippe Lauer, Robert I^er et Raoul, p. 4). En 918, éphémère prise de possession de la ville par Guillaume selon les mêmes Annales de Massay : Hoc anno urbs Biturix a Guilelmo nepote fraude intercepta a suis potenter recipitur concivibus.

143 Cart. de Saint-Vincent de Mâcon, éd. Camille Ragut, Mâcon, 1864, n° 501, plaid de mai 926, et Clu.276 (déc. 926) marchio Alvernorum et comes matisconensis. Cartulaire de l’abbaye de Savigny, éd. Auguste Bernard, Paris, 1853, n° 12 (921) et7 (août 923). Cf. cependant Étienne Fournial, « Recherches sur les comtes de Lyon aux IX^e et X^e siècles », dans Le Moyen Âge, t. LVIII, 1952, p. 221-249, n. 149.

144 En 920, Charles le Simple prescrit à Étienne, abbé nouvellement élu de Saint-Martial de Limoges, d’élever deux fortes tours pour résister à Guillaume d’Aquitaine. Adémar de Chabannes, Commemoratio abbatum basilicæ S. Marcialis, éd. Henry Duplès-Agier, dans Chroniques de Saint-Martial, Paris, 1874, p. 1-27, ici p. 3.

145 Après le 7 juillet 919, date de la délivrance par Charles le Simple d’un diplôme pour Narbonne à la requête du marquis Guillaume (Ph. Lauer, Recueil…, n° CII). Le Carcassès serait déjà toulousain à cette date (L. Auzias, op. cit., p. 453, n.7, plaid d’Alsone). – Les historiens placent en général cette réconciliation arverno-toulousaine beaucoup plus tôt, sous Guillaume le Pieux, sur la foi d’un acte du cartulaire de Beaulieu mal daté (supra, n. 127). La vie d’Eudes de Cluny nous donne d’ailleurs confirmation que Guillaume le Pieux tenait la Gothie (Vita Odonis, I. 5 : eo tempore Aquitaniam Gothiamque suo jure tenebat). C’est donc son neveu qui la cède à Raimond. Dès 922 tout rentre dans l’ordre en Gothie. J.-P. Poly, La Provence, p. 24 : « Il est possible que les affaires méridionales aient été réglées à l’Assemblée d’Autun, en mars 924, où se trouvent avec le roi Raoul, Hugues d’Arles et Guillaume d’Auvergne. Dès 924 un nouveau vicomte commande à Narbonne, Eudes, tandis que paraît également un nouveau vicomte à Béziers-Agde, Thion ». L’alliance sera profitable, permettant aux deux associés de contenir efficacement sur le front oriental les ambitions des Robertiens et de Hugues d’Arles. Elle sera profitable dans la lutte contre les Normands en 923, et peut-être contre les Hongrois en 926 (Chronicon Nemausense, éd. G. Pertz, MGH, SS, III, Hanovre, 1830, p. 219, a° 925, HGL, III, 99-100).

146 P. Bonnassie, « L’Occitanie, un État manqué ? », dans L’Histoire, n° 14, p. 31, place l’occasion ratée de la formation d’un État occitan vers l’an mil, avec la maison de Barcelone comme force d’union. Une précédente occasion semble s’être présentée un siècle plus tôt avec les Guillelmides.

147 Richer, Histoire (éd. Robert Latouche, Histoire de France [888-995], Paris, 1967 et 1964), I. 48. Flodoard, a° 924. Les Toulousains reconnaissent Raoul, avec Raimond-Pons, successeur d’Eudes, mort en 918 : BL LXII (nov. 923), I° Rodulfo.

148 Br. 16 (924) regnante Karolo. Br. 167 (juillet 923, après le 13) I° Rodulpho rege et Carolo in custodia tenente (charte suspecte, par ailleurs). Sur la reconnaissance de Robert et de Raoul, Cf. J. Dufour, Recueil…, introd. p. CV et ss. En juillet, Acfred, frère de Guillaume, s’empare de l’abbatiat de Brioude que Charles avait apparemment retenu à la mort de leur oncle : Br. 167, comes et abbas. En mars 922, Acfred est déjà dit comes et rector, formule vague autant que Br. 15 (s.d.) comes et amicus ecclesiæ. Il préparait la prise du titre abbatial.

149 Flodoard, Annales…, a° 923.

150 Richer, Histoire, I.48, et Flodoard, Annales…, a° 924. Guy Devailly, Le Berry du X^e siècle au milieu du XIII^e, Paris-La Haye, 1973, p. 121, n. 1.

151 La rencontre d’Encize, début 924, est une entrevue et non une soumission du duc d’Aquitaine : le roi n’a pas pénétré outre-Loire, il s’est arrêté au fleuve. Flodoard (Annales, a° 924) décrit la rencontre : « Après avoir échangé des messagers, ils convinrent de tenir une réunion sur le fleuve, dans le pagus d’Autun. Mais ils restèrent là tout le jour, Raoul sur une rive, Guillaume sur l’autre, tandis que leurs représentants allaient et venaient. La journée terminée, Guillaume traversa le fleuve et, la nuit une fois tombée, se rendit près de Raoul. Descendant de cheval, il s’avança à pied vers le roi qui restait monté sur son propre cheval. Le roi l’embrassa et on se sépara. Le lendemain, Guillaume revint vers le roi. On se mit d’accord pour une trêve de huit jours. La semaine étant passée, Guillaume se recommanda au roi » (et il récupéra au moins le sud du pays de Bourges). – À l’assemblée d’Autun du mois de mars 924, qui procède à des restitutions de biens en Lyonnais et sans doute aussi en Auvergne ; les seniores aquitains sont présents. Si les terres de Saint-Rémi de Reims en Lyonnais sont rendues par Hugues d’Arles, Flodoard ne parle ni de l’Auvergne ni de la Provence. – Au concile de Chalon du 8 avril suivant, l’évêque du Puy Adalard, sur requête du duc Guillaume, se voit concéder le droit de battre monnaie pour le roi et reconnaître son autorité sur la civitas vellavensis. J. Dufour, Recueil…, n° 4. M. Prou, Catalogue des monnaies françaises de la Bibliothèque nationale. Les monnaies carolingiennes, Paris, 1896, p. LVI, 107 (n° 772). Ph. Lauer, Recueil…, p. 85 (monnaies de Raoul au Puy, à Bourges). Cf. également Mireille Castaing-Sicard, « Monnaies féodales et circulation monétaire en Languedoc (X^e-XIII^e s.) », dans Cahiers de l’assoc. Marc Bloch, Études d’histoire méridionale, n° 4, Toulouse, 1961, p. 53.

152 Les chartes de Brioude sont datées de son règne à partir de juillet 924. Br. 169, 104, 112,224, 236,255, 123,291, 155 (juil. 924 – oct. 927). Mauvaises datations de Br. 57 (XXX° Carolo : fév. 922 et non 927) et Br.285 (II° Ludovico, 939 et non 926). On ne reconnaît pas Raoul à Conques avant la mort de Charles, qu’on prendra comme début de son règne : Conq. 6, 91,200,208, et surtout291 (22 avril 930) anno II quod Karolus rex obiit a sæculo et Rodulfus rex cepit regnare.

153 Br.39 (16 févr. 926) anno tertio que (sic) Karolus rex per infidos francos dehonestatus est ; Br.315 et CCCCXXIII, et S a u x . 13 (11 oct. 927) : anno IV° quo Franci dæinhonestaverunt regem suum Karolum et contra legem sibi Rodulfum in regem elegerunt… Anno V° quo infideles Franci regem suum Karolum inhonestaverunt et Rodulphum in principe eligerunt. Br.327 (8 déc. 926) : anno IV quo infideles Franci principem suum Karolum propia sede exturbaverunt et Rodulphurn elegerunt, Roberto interfecto.

154 Selon Flodoard, Raoul aurait alors lancé contre son adversaire une seconde expédition, pénétrant en territoire aquitain… On sait que le frère de Guillaume, Acfred, se jette sur Nevers. Flodoard, Annales… a° 926. Richer n’en parle pas.

155 Obit. Br., HGL, III, 104. – Ann. Masc., a° 927, Guillelmus dux Aquitanorum hominem exivit.

156 Le duc d’Aquitaine Acfred meurt l’année suivante, après le 11 octobre 927, date de son testament (Br.315 et CCCCXXXIII, Saux. 13).

157 Dalmas est cité marié à Ingelberge en 922 (Br.30), 923 (Br. 63) et 936 (Br.337, fondation de Chanteuges). Il ne peut s’agir de la duchesse, qui veuve se serait remariée à Dalmas ; en effet, bien que les Annales de Massay notent le décès d’Ingelberge avec son époux (Guillelmus famosus dux Aquitanorum efflavit et conjux ejus Ingelberga finem vivendi fecit : Ann. Masciacenses, dans M G H , S S, III, 169, pour 919, en fait 918), on sait qu’elle est morte avant lui (exécution testamentaire par son mari Guillaume, avec donation du fisc de Romans, en janvier 917 : Clu. 205, et supra, n. 132). L’épouse de Guillaume aurait fini sa vie au monastère de Saint-Sixte de Plaisance, en Italie (Chr. Settipani, La Préhistoire des Capétiens…, p. 375).

158 P. Toubert, « Conclusion » au colloque de Lille de 1997, La royauté…, p. 520. R. Le Jan, « Introduction » au même colloque, p. 9 : « À la fin du siècle dernier, Fustel de Coulanges avançait déjà l’idée qu’en Francie, aux VII^eet VIII^esiècles, le succès des Pippinides avait tenu à ce qu’ils avaient réussi à grouper toute la « fidélité » dans leurs mains, une fidélité faite d’obligations diverses et nombreuses auxquelles tous les sujets étaient tenus de se soumettre. »

159 Chr. Lauranson-Rosaz, L’Auvergne…

160 P. Toubert, loc. cit., p. 521-522. « Au cœur de l’empire comme dans ses marges, le cumul programmé des charges publiques, des honneurs et des dignités ecclésiastiques a partout permis aux élites en place de se prémunir contre les menaces que faisait d’autre part peser sur les bases économiques de leur puissance une pratique successorale généralement fondée sur le partage des patrimoines fonciers. Le dynamisme dont certains réseaux familiaux ont su faire preuve en étendant leurs ramifications vers la périphérie (regnum Italiae, France méridionale et marche d’Espagne) a été particulièrement bien illustré ».

161 L. Auzias, « Les fluctuations … », p. 416.

162 Selon la fameuse formule de Réginon de Prüm, dans sa C h r o n ique, M G H, SS rerum germanicarum in usum scholarum, 5, Hanovre, 1883, p. 61.

Auteur

Christian Lauranson-Rosaz

Université de Jean Moulin Lyon 3.

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