Les vêtements liturgiques provenant de la sépulture dite de Robert de Courtenay, évêque d’Orléans de 1258 à 1279
p. 113-141
Texte intégral
1Le Trésor de la cathédrale d’Orléans1 conserve un remarquable ensemble de vêtements liturgiques, de vases sacrés ou funéraires, et d’insignes ecclésiastiques médiévaux découvert dans des tombes d’évêques lors de fouilles entreprises dans la cathédrale en 1889 puis en 1937. La qualité des trouvailles de 1937, pour la plupart liées au culte et au sacré, fut révélée à la fin de la même année au public parisien par une exposition au musée du Louvre dans la galerie d’Apollon. Depuis lors, à l’exception d’un séjour dans un monastère entre 1940 et septembre 19452, le matériel archéologique est resté entreposé dans la sacristie de la cathédrale Sainte-Croix, les fragments de tissus étant présentés dans des sous-verre par groupes de même iconographie sans qu’il soit possible de comprendre la forme ni, souvent, la fonction des divers vêtements à l’origine de ces restes. Seuls, les textiles couvrant les pieds et les jambes d’un défunt ont été conservés dans une vitrine en verre tels qu’ils avaient été trouvés.
2Une opération de conservation-restauration lancée en 1997 à l’initiative de la Direction Régionale des Affaires Culturelles de la région Centre a conduit à renouveler la présentation de cet ensemble. Elle a été accompagnée d’une étude approfondie des textiles qui a permis de recomposer les différentes pièces formant le groupe le plus significatif, à savoir les vêtements d’un évêque qui, selon le chanoine Chenesseau (1938, p. 91-92), pourrait être Robert de Courtenay (1258-1279), petit-fils de Louis le Gros et cousin de saint Louis. Ce sont les résultats immatériels de ces recherches qui sont ici proposés, tandis que les tissus restaurés, en particulier la tunique (ou dalmatique) et la chasuble restituées à l’aide de fac-similés, sont entreposés dans la sacristie de la cathédrale dans l’attente d’une exposition au public lorsque la salle du Trésor aura été réaménagée.
3A l’issue de ce travail, on verra que plusieurs des soieries façonnées somptueuses employées pour la confection de ces vêtements sacrés avaient été importées d’Orient, et qu’à deux occasions, des gants épiscopaux comportant des éléments plus anciens que le reste du matériel archéologique trouvé dans la tombe, attestaient de réemplois, peut-être funéraires.
Les fouilles
4Les premières découvertes ont eu lieu lors de l’installation d’un calorifère dans le sous-sol de la cathédrale en 1889. Les deux sépultures en sarcophages contenaient des plaques de plomb précisant l’identité et la date du décès de leurs occupants : les évêques Guillaume de Bussy ou de Boësses (1238-1258) et Ferry de Lorraine (1297-1299) (Desnoyers, 1895 ; Lefèvre-Pontalis et Jarry, 1904, p. 351-355). D’après Desnoyers (1895, p. 551-552), une crosse en cuivre doré et émaillé, un anneau pastoral, un calice en plomb et sa patène, des débris de vêtement épiscopal en soie et fil d’or, des restes de chaussure en cuir, et une boucle en cuivre auraient été découverts dans la première tombe, tandis que d’autres objets en plus ou moins bon état se trouvaient avec des ossements à côté du second tombeau (une boucle en fer, le sommet et le bas de la tige d’une crosse privée de la partie en métal travaillé, des débris de vêtement épiscopal, le nœud d’un calice en plomb et des clous en fer). Le récit de la découverte par Lefèvre-Pontalis et Jarry (1904, p. 354-355) ne fournit pas tout à fait les mêmes listes d’objets. On note chez eux la présence d’un médaillon circulaire brodé d’un agneau qui aurait décoré le dos d’un gant épiscopal et surtout un refus d’attribuer certains restes textiles à l’une ou à l’autre tombe parce que le contenu de la seconde se serait déversé dans la première sous le poids des matériaux qui les recouvraient. Mais l’absence de couvercle sur la seconde tombe et de métal précieux parmi les restes épars avec les ossements hors de la sépulture signale plutôt que cette dernière avait dû être violée.
5Aujourd’hui, certains objets sont encore conservés dans le Trésor de la cathédrale tels la crosse (ibid. face p. 352), l’anneau pastoral (ibid., p. 354), les plaques en plomb (ibid., face p. 354 et p. 356) et des restes de galons de Guillaume de Bussy (Bédat, 1998c) et de Ferry de Lorraine (ibid, 1998d et1998e). Cependant, les divergences entre les deux publications anciennes incitent à la prudence quant à leur attribution à l’une ou à l’autre tombe. Dans la mesure où, au début de leur article, Lefèvre-Pontalis et Jarry (1904, p. 310) déplorent que le chantier ait été très peu accessible aux archéologues, on peut supposer que les sépultures ont été ouvertes par les ouvriers en l’absence des spécialistes, laissant ainsi la porte ouverte à des différences d’appréciation.
6Les deux sépultures étaient accompagnées de vestiges architecturaux préromans appartenant à une église antérieure dont le plan n’avait pas pu être reconstitué avec précision (ibid., p. 368-372). C’est afin de mieux comprendre ce plan que de nouvelles fouilles furent décidées en 1937. Sous la direction du chanoine Chenesseau, assisté de l’abbé Brun, huit jours furent consacrés à des sondages dans le chœur de l’édifice capétien au cours desquels fut mise à jour la tombe contenant les vestiges textiles ici présentés. Puis, devant l’intérêt des découvertes, le Service des Monuments Historiques étendit les fouilles à l’ensemble de l’édifice et deux autres sarcophages furent exhumés. Le premier contenait des fragments textiles et surtout une crosse considérée par Marquet de Vasselot comme datant de la fin du XIIe ou du début du XIIIe siècle, ce qui conduisit Chenesseau à attribuer hypothétiquement la tombe au premier évêque d’Orléans qui aurait été inhumé dans la cathédrale, Manassès de Seignelay (1207-1221)3. Le second sarcophage, pourvu d’une plaque en plomb, était celui de Raoul de Grosparmi, évêque d’Orléans de 1306 à 1311. Il contenait quelques vestiges de vêtements liturgiques, un fragment de calice en étain, un anneau de cuivre orné d’une pierre très abimée et deux médaillons de gants constitués de disques d’or décorés d’émaux cloisonnés. Ces derniers – récemment considérés comme produits en Italie du Sud au XIIe siècle – ou bien les gants sur lesquels ils étaient appliqués, auraient donc été réemployés au début du XIVe siècle (Chenesseau, 1937 et 1938 ; Little, 1944 ; Paris, 1965, n° 188-189 ; Frolov, 1966 ; Brun, 1979 ; Paris, 1992, n° 254).
7Le 17 décembre, le chanoine Chenesseau rendit compte de ses travaux à l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres et, l’année suivante, il fit paraître le texte de sa communication dans le Bulletin Monumental (Chenesseau, 1938). Il avait déjà publié dans Les Monuments Historiques de la France un bref compte-rendu de ces mêmes découvertes (id., 1937). Malheureusement, le chanoine ne trouvera pas le temps de rédiger avant son décès, en 1947, le chapitre qu’il comptait consacrer au mobilier funéraire qu’il avait découvert. Il ne reste de ce projet que des notes préparatoires très désordonnées et quelques photos prises lors de l’ouverture des sarcophages ; les procès-verbaux d’exhumations évoqués dans le journal des fouilles n’ont pas été retrouvés4. Mais quelques autres publications ont divulgué ces trouvailles : un article publié à New York (Little, 1944), et deux textes de synthèse de l’abbé Brun (1975 et 1979). Les objets provenant des cinq sépultures d’évêques des XIIIe-XIVe siècles ouvertes en 1889 et 1937 ont été classés Monuments Historiques le 7 novembre 1945, en même temps que d’autres vestiges découverts en 1937 : les restes d’une mitre brodée du XIVe siècle5 issus d’une sépulture anonyme, et des fragments des vêtements liturgiques de Louis-Gaston Fleuriau d’Armenonville (1706-1733) (Bédat, 1998a, 1998b, 1998f, 1998g).
La sépulture et son contenu
8La première sépulture découverte par le chanoine Chenesseau se trouvait à l’intérieur d’un sarcophage de pierre trapézoïdal de 192 cm de longueur interne, pourvu d’un couvercle à trois pentes attribué aux VIIe-VIIIe siècles. Du corps, il ne restait que des ossements à l’état pulvérulent, à l’exception de la tête d’un fémur teintée de violet. Subsistaient également de nombreux fragments de vêtements liturgiques visibles sur les photos prises pendant les fouilles et décrits dans les termes suivants par l’abbé Brun (1979, fig. 2-5 et p. 131) :
9« L’évêque était vêtu de grandes chausses de drap feutré prenant le pied, la jambe et le bassin, sur lesquels on lui avait passé ses caliges liturgiques (tissu à ramages) et ses sandales (bandes assemblées) ; par dessus, une longue robe en “camocas” de soie, ornée dans le bas d’un large galon pseudépigraphe et aux poignets d’un ruban soie-et-or finement tissé. Brochant sur le tout, la chasuble très ample, d’un tissu de soie à motifs brochés : une ligne de petits griffons, une ligne de petits aiglons et une ligne de chiens acculés, séparées les unes des autres par des lignes de petits groupes de trois points 2 et 1. La mitre, complètement effondrée, était à peine discernable et certainement irrécupérable. Les gants avaient disparu, mais il en subsistait deux médaillons brodés, l’un d’or et l’autre d’argent, ce dernier portant quelques lettres que nous n’avons pu assembler pour leur trouver un sens. L’ensemble des tissus avait viré à la couleur havane, mais devait être violet à l’origine, et surtout broché d’or, au témoignage des fils qu’on put tirer de petits fragments informes après une longue macération dans l’eau.
10Outre ce qu’on put sauver des vêtements, lesquels tombaient en poussière au moindre contact, cette sépulture livra la crosse de l’évêque (volute de cuivre doré et ciselé, haste de bois avec embout de métal), son calice et sa patène d’argent avec rehauts d’or, son anneau pastoral d’un diamètre exceptionnellement étroit, orné d’une fine petite émeraude en losange, enfin une boucle de ceinture en fer. »
11Cette sépulture se trouvait dans des couches du XIIIe siècle du sous-sol de la cathédrale, une période en correspondance avec le calice et sa patène qui furent attribués par Marquet de Vasselot à la seconde moitié du même siècle (Chenesseau, 1938, p. 91). La crosse en cuivre ciselé et doré, décorée de feuillages naturalistes très courants à cette période fut considérée comme exceptionnelle à la fois par la forme de sa volute et par l’emploi de la technique de motifs de cuivre soudés, laquelle ne fut connue qu’à partir du XIVe siècle (ibid. ; Paris, 1965, n° 190). Selon Geneviève François (comm. perso. 2003), en resserrant les dates au maximum, on pourrait dire qu’elle correspond plutôt au milieu ou au troisième quart du XIIIe siècle. Quant à l’anneau épiscopal en or, s’il est bien orné d’une émeraude comme l’annonce Chenesseau (1937, p. 222 et1938, p. 91), il devait être de haut prix.
12Bien que le sarcophage n’ait contenu aucun signe distinctif de l’identité de son occupant, la richesse du mobilier archéologique, en particulier de l’orfèvrerie, poussa Chenesseau (id., 1938, p. 91-92) à avancer le nom d’un prélat de marque : Robert de Courtenay (1258-1279)6. Chanoine de Bourges puis doyen de Chartres avant de devenir évêque d’Orléans, il appartenait à la famille royale et participa à la huitième croisade. Il se trouvait aux côtés de saint Louis lorsque celui-ci mourut à Tunis en 1270. Par la suite, il appuya activement la canonisation du roi. Le successeur de Robert de Courtenay, Gilles Pasté (1280-1288), fut considéré comme un personnage « assez pâle » et donc peu en correspondance avec la qualité du matériel funéraire (Brun, 1979, p. 136). Ni Brun, ni Chenesseau ne mentionnèrent Berthold de Saint-Denis (1299-1307), pourtant reconnu comme enterré dans l’église, à son chevet il est vrai (Gallia Christiana, 1744, p. 1471 ; Desnoyers, 1895, p. 553). Tout récemment, Elzbieta Dabrowska (comm. perso. janvier 2004) a avancé la possibilité de se trouver devant les restes d’un évêque décédé lors d’un passage à Orléans.
13Les textiles confirment le luxe dont furent entourées les funérailles du personnage puisque, comme on le verra, les quatre soieries façonnées étaient de qualité, et au moins trois d’entre elles avaient été importées d’Orient. Ce qui reste aujourd’hui rend difficilement compte de la splendeur passée des vêtements en question car le séjour en contexte funéraire a altéré la résistance et la couleur de la soie devenue cassante et marron, ainsi que des fils d’or qui ont noirci. Des examens de précision ont été nécessaires pour reconstituer les patrons de la tunique, ou dalmatique, et de la chasuble très partiellement conservées, et pour proposer des hypothèses lorsque le matériel ne donnait pas la clé d’un problème. Il a fallu enfin l’imagination conjointe d’Isabelle Bédat et de Jacques Moulin, architecte en chef des Monuments Historiques, pour penser à restituer ces dernières dans un triptyque avec des fac-similés sur les faces extérieures.
14Nous examinerons maintenant les différentes pièces découvertes dans la tombe : en premier lieu les vêtements liturgiques et pontificaux tels les chausses de soie, les sandales, la tunique ou dalmatique, les médaillons ornant les gants, et la chasuble ou planète ; en second lieu le vêtement commun représenté par les chausses de laine7. Les nombreux problèmes soulevés par la reconstitution des deux grandes pièces ne nous ont guère laissé de temps pour analyser en détail les vêtements qui recouvraient les jambes et les pieds. Ceux-ci seront donc présentés succinctement en attendant que de nouvelles investigations soient autorisées. Nous n’avons pas trouvé, ou pas identifié, de restes d’amict, d’aube, de ceinture, d’étole, de manipule, ni de mitre. Mais il est possible que deux fragments d’un même galon aux cartons considérés comme provenant de la tunique aient décoré les extrémités d’une étole ou d’un manipule (voir infra).
1 - Les chausses de soie
15Elles sont toujours conservées telles qu’elles ont été trouvées, recouvrant les chausses de laine jusqu’aux genoux. Les pieds sont encore enveloppés par des sandales de soie et d’or. La présentation des trois pièces ensemble et en forme, comme sur les membres inférieurs du défunt, est spectaculaire (fig. 32), mais elle ne facilite pas l’examen des étoffes demeurées très froissées. Les textiles qui étaient sous les jambes sont manquants, tout comme les dos des vêtements qui recouvraient les autres parties du corps et qui ont dû se décomposer en même temps que celui-ci.
16Les chausses de soie se trouvaient maintenues au niveau des genoux par un lien faisant plusieurs tours. L’étoffe avait été disposée en biais autour de la jambe (fig. 33a), comme c’était le cas généralement pour les chausses de laine (voir infra), alors que bien souvent ce type de pièce était construit sur un modèle différent comprenant un morceau montant droit fil le long de la jambe et un ou plusieurs autres couvrant le dessus et le dessous du pied (fig. 33b ; voir aussi Nockert, 1992, p. 17-18 ; Vestiduras..., 1995, p. 186-194 ; Desrosiers, 2004, n° 155, 182, 186). Cette construction, qui semble contourner le problème d’une coupe selon un patron, pourrait faire penser que les chausses avaient été faites en urgence avant l’inhumation. Mais la doublure en taffetas de soie montre que leur confection avait été assez soignée.
17L’étoffe est un samit façonné 3 lats lié en sergé 2 lie 1 (S) avec un décor de deux grands oiseaux (faucons ?) affrontés mais regardant en arrière à l’intérieur d’une roue pleine (fig. 34). Des petites roues enserrant deux oiseaux ou une rosette ornent les points de tangence des grands médaillons tandis qu’une croix terminée par quatre fleurons occupe les écoinçons. Ces motifs ressortent en filé or (lamelle organique dorée enroulée S sur une âme en soie S) sur un fond en soie aujourd’hui marron jaune. Un troisième lat marron à reflets bleu clair colore certains détails. Le décor et les caractéristiques techniques, en particulier la torsion S du fil d’or et la proportion 1/1 des deux chaînes, signalent une production italienne ou d’une région proche pendant le XIIIe siècle (Desrosiers, 1999, p. 109 ; id., 2004, n° 109-111). Le dessin rappelle par exemple les oiseaux enfermés dans un treillis de losanges du parement de la dalmatique de Pierre de Charny (1267-1274) trouvé dans sa sépulture dans la cathédrale de Sens (Chartraire, 1918, p. 31, fig. 2).
2 - Les sandales
18Elles ont la forme de petites bottines d’environ 14 cm de hauteur, attachées avec un lien. Une sorte de gousset de 8 cm de haut sur le devant permettait de les enfiler facilement. L’étoffe a été passée autour du pied et de la cheville, en biais comme le tissu des chausses de soie. Les semelles manquent, mais des trous de couture montrent qu’elles devaient exister.
19La soierie est assez complexe et très fragile, donc difficile à étudier. Elle comprend une bande en samit d’environ 10 cm de haut surmontée d’un filet en samit uni (H. 1,5 cm), puis d’une autre bande d’environ 10 cm en lampas et enfin d’un autre filet uni peu visible. Les autres caractéristiques techniques, en particulier la proportion des chaînes (4 fils pièce doubles / 1 fil de liage), la nature des trois lats (soie, lamelle organique dorée ou argentée, filé métallique fait de la même lamelle enroulée Z sur une âme aux fibres non identifiées), et la finesse des fils de chaîne de torsion Z en font un type bien spécifique qui, à défaut du dessin quasi impossible à relever mais structuré par des bandes horizontales, fournit une piste fort intéressante pour retracer son origine. En effet, même si des analyses de matières premières et une ultime tentative pour distinguer des éléments du dessin sont encore souhaitables, ses traits techniques correspondent à ceux relevés par Wardwell sur des pièces attribuées à l’Asie centrale pendant la période mongole (catégories I et II de Wardwell, 1988-1989, p. 97-104). Les exemples archéologiques proviennent de tombes du premier tiers du XIVe siècle (ibid, p. 97), mais des documents repérés par Jacoby (à paraître) attestent que les marchands vénitiens faisaient dès la décennie 1260 le commerce de tartaires ou panni tartarici (nom donné aux soieries produites dans l’Empire Mongol). Cette conclusion très partielle montre l’intérêt qu’il y aurait à reprendre l’examen de cette pièce, en particulier pour préciser la date et l’origine du tissu, celui-ci pouvant être le plus tardif de l’ensemble et contredire l’attribution de la tombe à Robert de Courtenay.
3 - La tunique ou dalmatique en samit à petits losanges et parement à inscription coufique
20Quarante-neuf fragments étaient attribués à ce vêtement identifié dans le trésor comme une tunique. Ces fragments étaient exposés dans six cadres, pris entre deux verres après avoir été collés très ponctuellement sur un tulle de soie ou une toile de raphia. Un galon de forme cylindrique trouvé autour du poignet du défunt était présenté par l’abbé Brun comme ayant aussi appartenu à cette pièce. Après ouverture des sous-verre, nous avons effectué des relevés 1/1 de chaque élément sur transparents en notant non seulement les contours extérieurs et le décor mais aussi les traces de coutures plus ou moins disparues, les plis et cassures, les empreintes laissées par les fils métalliques oxydés des galons, et les défauts et irrégularités de tissage. C’est à partir de ces transparents que nous avons ensuite essayé de reconstituer le puzzle, évitant ainsi de manipuler les originaux très fragiles et nous inspirant de vêtements du XIIIe siècle mieux conservés trouvés dans les sépultures de l’archevêque de Tolède Rodrigo Ximénez de Rada (1170-1247) (Vestiduras..., 1995), d’un évêque de Bayonne du milieu ou de la seconde moitié du XIIIe siècle longtemps considéré par erreur comme ayant été Bernard de Lacarre décédé en 1204 (Dabrowska, 1995, p. 279 ; Desrosiers, 2004, n° 75 et 161), enfin d’un évêque de la Seo de Urgel, Pere d’Urg (1269 -1293) (Flury-Lemberg et Illek, 1995).
21Parmi les fragments, on pouvait distinguer : une soierie à petits losanges tissée en samit façonné qui constituait le corps du vêtement, deux bandes décoratives tissées d’or en continuité avec le samit précédent qui ornaient le bas du devant et le bas du dos ou peut-être des manches, des galons tissés aux cartons de 1,65 et 0,85 cm de large ayant servi de clavi et de bordure pour l’encolure, enfin le galon plus large (L. 4 cm) qui aurait décoré l’extrémité d’une manche.
a) La soierie façonnée
Le samit à petits losanges a des fils de chaîne en soie de torsion Z dans une proportion de deux fils pièce pour un fil de liage. Ses deux lats liés en sergé 2 lie 1 (S) forment des passées paires à retour aujourd’hui d’une même couleur marron (fig. 35). Les analyses de colorants y ont décelé du tanin et, pour le lat 1, une source végétale de colorants indigoïdes ce qui permet de faire l’hypothèse que les losanges étaient blancs ou jaunes8 avec un centre bleu sur un fond en treillis bleu. Le rapport de dessin (7,4 à 8,4 cm de largeur) est marqué par de fines lignes verticales encadrant huit petits losanges d’environ 1 cm de large (fig. 39). Une particularité du mode de tissage a créé une irrégularité bien visible dans l’étoffe devenue monochrome. Sur la figure 35, présentée avec la même orientation que dans la tunique, des sillons plus accentués apparaissent dans la moitié supérieure des grands losanges et dans la moitié inférieure des losanges plus petits qui se trouvent à l’intérieur.
22Le plus grand fragment (2.1) sur lequel est reconnaissable la moitié gauche de l’encolure et une bonne partie de l’épaule gauche (fig. 36) a été très important pour la reconstitution. En effet, il a permis d’évaluer la largeur du panneau central (48 cm environ), de distinguer la présence de panneaux latéraux d’au moins 12 cm de large, d’identifier la couture du panneau latéral gauche par dessus le panneau central – couture cachée par un galon d’environ 1 cm de large –, et de repérer le sens dans lequel l’étoffe a été utilisée pour les deux morceaux (fig. 35). La couture de l’épaule montre que le dos a été construit de la même façon, avec un panneau central et des panneaux latéraux et une étoffe toujours employée dans le même sens. Cette couture d’épaule était cachée sous un galon étroit de même largeur et de même dessin que les clavi internes d’après l’empreinte laissée sur le samit par les fils d’or courant sur l’envers du galon (fig. 36). Les autres fragments ont pu être situés approximativement par rapport à celui de l’épaule grâce à tous ces détails et à la direction des plis un peu en biais qui s’étaient formés lorsque le corps avait été placé à l’intérieur du sarcophage (fig. 38). Le sens de la couture et des losanges du fragment 8.1 (fig. 39), la direction de ses plis, et l’empreinte du galonrepliéencontinuitésurlesamitde8.1etde8.2montrentqueceux-ci proviennent de la partie droite du vêtement et donc que le galon un peu plus large qui cachait la couture formait une seconde paire de clavi reliant les bandes latérales à des pièces extérieures destinées à donner de l’ampleur. Comme le montre la figure 38, le samit à petits losanges de ces pièces extérieures et des manches n’a pas été conservé, si bien qu’il était difficile de retrouver leurs formes ainsi que les dimensions totales du vêtement. Dans un premier temps, nous avons tenu compte de l’identification initiale et adopté le patron d’une tunique avec des éléments en forme de trapèze et le galon autour du poignet. Par la suite, l’étude des plaques de gant montra que le galon devait appartenir à l’un des gants (voir infra), et donc que les manches du vêtement n’étaient pas forcément resserrées au poignet : il pouvait aussi s’agir d’une dalmatique (voir l’exemple avec deux paires de clavi trouvé dans la cathédrale de Brême ; Nockert, 1981, p. 178, fig. 1 ; Borås, 1986, p. 48). Les deux hypothèses sont plausibles.
23La bande décorative située en bas du panneau central a approximativement la même largeur que celui-ci (48 cm entre les coutures latérales des deux fragments 3.1 et 3.2 qui se raccordent parfaitement l’un à côté de l’autre) et une hauteur de 12,4 cm (fig. 38). Des restes de la soierie losangée exécutée avec les mêmes fils de chaîne et la même croisure de samit façonné9 prolongent le tissu au-dessus et en dessous, prouvant ainsi que la bande a été tissée pour décorer transversalement cette étoffe. Le dessin tripartite a des motifs en fil d’or très noirci (filé or fait d’une lamelle organique dorée enroulée avec une torsion Z sur une âme entièrement désagrégée) ressortant sur un fond tissé de soie aujourd’hui marron clair. La partie centrale assez large comprend une inscription coufique avec, dans les interstices, des oiseaux et des quadrupèdes à longue queue (du type renard ou fennec). Elle est encadrée par deux frises avec d’autres quadrupèdes passants (lions ?) affrontés de part et d’autre de cœurs, la pointe dirigée vers le haut (fig. 40). Des barres unies en fil d’or et d’autres barrées de soie marron, originellement de plusieurs couleurs, s’intercalent entre les trois parties décorées et entre la bande et le fond losangé. Le sens du tissage des petits losanges montre que les animaux et l’inscription avaient la tête en bas lorsque la tunique était portée (fig. 41), ce que confirment les restes des panneaux latéraux encore cousus des deux côtés et l’empreinte du galon étroit formant le clavus interne sur la couture du côté gauche10. Le rapport de dessin est bien sûr de même largeur (L. 7,4 à 8,4 cm) que celui du fond losangé.
24La seconde bande décorative, constituée de cinq petits fragments, est très incomplète. Le dessin de la partie centrale à inscription est identique à celui de la précédente sauf qu’il a été tissé avec une troisième trame en soie marron foncé qui souligne les contours des motifs (fig. 42). Des analyses de colorants des deux lats en soie ont révélé la présence de tanin et d’une plante contenant un colorant indigoïde (pastel, indigo ou autre) pour les contours qui devaient donc être bleutés, et la présence de tanin et de garance (Rubia tinctorum L.), donc d’un coloris tirant vers le rouge pour le fond11. Les deux frises d’encadrement ne portent plus d’animaux mais un petit motif géométrique en soie marron sur un fond d’or. Enfin les barres intermédiaires reprennent les petits losanges du tissu de fond également présent sur le bord supérieur d’un fragment. L’irrégularité caractéristique des petits losanges montre qu’ici aussi les animaux et l’inscription avaient la tête en bas. Ces fragments très détériorés peuvent provenir d’une bande située en bas du dos ou avoir été intégrés au bas des manches. Comme il ne reste pas grand chose du dos du vêtement, nous avons opté pour la seconde solution (fig. 38 : fragments 4.1 à 4.5).
b) Les galons aux cartons
25Les clavi externes dont il reste un témoin sur le fragment de samit losangé 8.1 (fig. 39) sont faits d’un galon aux cartons - A - de 1,65 cm de large en soie brochée d’or et d’un peu de soie par endroits. Les motifs, indépendants et assez noirs, se détachent sur un fond marron en suivant un ordre presque régulier. Un losange avec quatre appendices alterne avec les six autres : une sorte de plante stylisée dans un vase à pied, un quadrupède (lion ?), un écu broché de soie et non d’or et divisé selon différents modèles, une variante de la plante stylisée, un losange accompagné de quatre « boules », enfin le même motif avec six « boules ». Les 28 fragments conservés forment une longueur de 315 cm lorsqu’ils sont mis bout à bout. Cette longueur excède celle des deux clavi du devant ce qui signifie qu’une partie des galons provient soit du dos ou d’une autre partie de la tunique comme les manches.
26Le galon d’épaule et d’encolure et les clavi internes - B - sont de même technique mais moins larges (L. 0,8-0,9 cm). Des empreintes similaires à celles de l’épaule sur les fragments 2.1, 2.3 et 2.4 attestent que le galon identifié plus haut (fig. 6) se prolongeait autour de l’encolure, probablement aussi sur l’épaule droite non conservée, et comme clavi internes. Il en est de même pour un autre galon - C - de largeur et technique identiques, dont les fils d’or ont laissé leur empreinte en biais sur le fragment 2.2. Il complétait probablement le précédent dont la longueur était insuffisante. Des petits motifs géométriques occupent toute la largeur des deux galons : variantes du losange intercalées avec deux petites fleurs ou croix pour l’un, signes en forme de X, de M, de bobines et de fleurs de lys pour l’autre (fig. 43a-43g).
27Deux fragments d’un quatrième galon - D - de même technique que les précédents et mesurant 1 à 1,1 cm de large étaient conservés dans les mêmes cadres. Son décor comprend une étoile à huit branches comprise entre deux chevrons et une fleur de lys présentée dans une sorte de cadre ou un motif en pyramide difficile à identifier (fig. 43h-43i). Nous n’avons aucun indice permettant de retrouver son emplacement original comme décor de la tunique en complément des galons B et C. Il n’est pas impossible qu’il s’agisse des seuls restes d’un manipule ou d’une étole dont l’étoffe aurait entièrement disparu.
28Le dernier galon - E - qui, d’après l’abbé Brun (1978, p. 131) aurait constitué le poignet de la tunique, est beaucoup plus large que les autres (4 cm) et très usé sur une lisière, avec des trous de couture sur l’autre (fig. 44). Sa longueur probablement insuffisante (23 cm) a été complétée par des tresses cousues côte à côte et disposées transversalement. L’ensemble a reçu ensuite près des deux bords une petite broderie aujourd’hui très détériorée. Le décor du galon est composé d’un seul motif qui fait penser à une plante très stylisée contenue dans un hexagone (fig. 45). Il se détache en soie marron sur un fond couvert de fils d’or.
c) Nouvelle présentation
29Finalement, les divers fragments ont été présentés dans un grand sous-verre, posés sur un taffetas de soie beige coupé selon la forme d’une tunique et maintenus en place par la pression du verre sur un fond malléable. Seule inexactitude : le galon de poignet du gant est demeuré à la place qui lui avait été assignée lors de la fouille.
30Ce cadre constitue la partie centrale interne d’un triptyque dont les deux volets contiennent sur leur face externe un fac-similé en taffetas de soie bleu foncé imprimé de bandes décoratives et de galons dorés (fig. 46). Tout en protégeant les fragiles restes archéologiques de la lumière, cette restitution donne au public une idée de la splendeur passée du vêtement funéraire dans l’une de ses deux versions possibles.
d) Commentaires
31Si l’on cherche maintenant à préciser les lieux et dates de fabrication des divers textiles qui viennent d’être décrits, certains contrastes apparaissent dans leurs provenances et datations.
32Selon Georgette Cornu (comm. perso., 2004), l’inscription des deux bandes décoratives s’apparente à celles qui ont été tissées sur des soieries hispano-mauresques du XIIIe siècle. Cependant, si l’on constate effectivement des liens de parenté avec de nombreuses inscriptions tissées dans des bandes barrant des soieries façonnées trouvées dans des tombes du XIIIe siècle en Espagne, la plupart sont en taqueté et incluses dans un lampas ou dans un taqueté (Gómez-Moreno, 1946, pl. LIX ; Herrero Carretero, 1988, p. 50, 54, 93 ; Vestiduras..., 1995, fig. 100, 103, 105, 114, 156 ; Desrosiers, 2004, cat. 133) et les deux exemples en samit sont fort différents (Gómez-Moreno, 1946, pl. LXXVI ; Flury-Lemberg et Illek, 1995, fig. 184 et 187 ; Herrero Carretero, 1988, p. 90)12. De plus, les inscriptions sont souvent plus angulaires et les bandes transversales auxquelles elles participent ne comportent pas d’animaux. Nous avons trouvé une telle bande ornée d’animaux passants se faisant face de part et d’autre d’une fleur de lotus dans la partie supérieure des chausses de soie de l’archevêque de Sens Gilon I Cornut décédé en 1254 (Sens, inv. B505 ; Chartraire, 1918, fig. 11 : relevé du dessin sans la bande en question), mais cette pièce est en lampas et non en samit comme le tissu d’Orléans. Et le reste de l’étoffe est décoré de petits médaillons entrelacés occupés par des fleurs à quatre pétales cordiformes crème sur fond turquoise avec des détails en filé or (lamelle organique dorée enroulée en Z autour d’une fine âme probablement en soie Z) qui semblent indiquer une production moyen-orientale. D’autres quadrupèdes tissés en alternance avec des croissants apparaissent sur une chasuble jadis conservée à Gdansk et considérée comme un tartaire tissé en Iran oriental (Khorassan), mais cette fois les animaux courent tous dans la même direction à l’intérieur de rayures parallèles à la chaîne (Wardwell, 1988- 1989, fig. 42, catégorie V). Quant à l’étoffe principale à petits losanges bicolores, elle nous ramène vers l’Espagne avec les draps d’areste en vogue au XIIIe siècle, tissés de filés or de direction Z, et dont les losanges se sont agrandis et sont devenus bicolores au moins dans la seconde moitié du siècle (Desrosiers, 1999, p. 110-117). Mais des samits à petits losanges ont aussi été produits au Moyen-Orient, comme l’enveloppe de la dalmatique de saint Ambroise de Milan et la chasuble de l’évêque Hartmann conservée à Bressanone. Ces soieries sont plus anciennes – XIe et XIIe siècles – mais portent des inscriptions arabes pointant vers une origine orientale (Müller-Christensen, 1955, n° 34 ; Schorta, 2001, n° 69, fig. 147 et n° 129, fig. 179-180). Il est probable que la soierie d’Orléans ait aussi été produite au Moyen-Orient, à une date plus tardive (vers le milieu du XIIIe siècle) étant donné ses éléments communs avec les caligae ou chausses pontificales de Gilon I Cornut. L’analyse du fil d’or apportera peut-être des informations importantes pour préciser son lieu de production.
33Pour ce qui est des orfrois, on dispose exceptionnellement de comparaisons assez précises. En effet, le galon A, celui des clavi externes, est très proche de fragments trouvés à Sens dans la tombe de l’archevêque Gilon II Cornut (+1292), à Bayonne dans celle qui fut attribuée à tort à l’évêque Bernard de Lacarre (+1204) et qui date du milieu ou du troisième quart du XIIIe siècle, à Troyes dans celle d’un évêque du nom de Hervée (1206-1223), à Old Sarum, près de Salisbury en Angleterre, dans un site d’habitat du XIIIe siècle, enfin à Orléans même, dans les tombes dites des évêques Manasses de Seignelay (1207-1221) et Guillaume de Bussy (1237-1258) (Gaussen, 1861, pl. 10, fig. 3 et 8-10 et p. 3, note 4 ; Chartraire, 1918, fig. 23 ; Crowfoot, 1991, p. 50-53 ; Bédat, 1998a, type A, et 1998c, type F ; Desrosiers, 2004, n° 75). Par ailleurs, le galon C ressemble à un exemple garnissant un cercueil de Las Huelgas de Burgos qui pourrait être, mais cela n’est pas prouvé, celui du roi Henri Ier de Castille mort en 1217 (Gómez-Moreno, 1946, pl. CXI et p. 25-26). Pour terminer, le galon plus large du poignet trouve un parallèle presque identique sur la célèbre dalmatique aux lions de la cathédrale d’Halberstadt en samit uni rouge brodé de fils d’or attribuée à l’Angleterre vers 1200 (Schuette, 1930, II, pl. 42 et p. 68 ; Schuette et Müller-Christensen, 1963, fig. 94 ; Wilckens, 1991, fig. 109, p. 103).
34En conclusion, la soierie dans laquelle a été taillée la tunique aurait été tissée au Moyen-Orient au XIIIe, peut-être vers le milieu du siècle. Le galon A pourrait avoir été réalisé en France, tout comme B, C et D de mêmes techniques et de dessins pas trop éloignés, et ceci à la même époque à quelques décennies près. Quant au galon du poignet, très différent et de bien meilleure qualité par son dessin et ses matériaux, il tranche sur le reste et pourrait avoir été exécuté beaucoup plus tôt en Angleterre comme la broderie de la dalmatique d’Halberstadt. Cette disparité nous a amenées progressivement à nous demander si ce dernier n’avait pas plutôt constitué le poignet d’une pièce plus ancienne que le vêtement considéré comme une tunique : l’un des gants dont les médaillons vont maintenant être examinés.
4 - Les deux médaillons ornant les gants épiscopaux
35La non conservation des gants permet de penser qu’ils avaient été fabriqués avec une fibre différente de la soie et de la laine qui sont bien représentées dans la tombe : probablement une fibre végétale comme le lin qui est attesté pour la fabrication de gants liturgiques à la fois par les textes et par des exemples conservés (Beaulieu, 1969, p. 139).
36Les médaillons sont de forme ovale et de petites dimensions (H. 5, 6-5,4 et L. 6,2-6 cm). La qualité des matériaux et les techniques employées en font deux objets bien différents l’un de l’autre.
a) Le premier médaillon (fig. 47a)
37Il est brodé de filé or au point couché-rentré sur un fond en samit uni. Le fil de lin qui maintenait les points sur l’envers a totalement disparu, comme les gants sur lesquels les médaillons devaient être appliqués. Le décor est constitué par une main partant du haut et entourée de lettres qui semblent se lire : « ASURTUS EST UT L » ou bien « ASURTUS EST L UT » et faire référence à la Résurrection du Christ lorsqu’on rétablit la lecture avec : « ASSUMPTUS EST UT I(N)… » ou bien « ASSUMPTUS EST I(ESUS) UT… »13.
b) Le second médaillon (fig. 47b)
38Il est brodé sur un fond très particulier. Il s’agit d’un très fin taffetas à liage repris lancé d’un fil double : un filé or dont la lame est vraisemblablement en métal presque pur car ses deux faces sont d’un même or non oxydé. Les liages dessinent un entrecroisement de doubles bandes en treillis formant des losanges occupés par des croix et des svastikas (fig. 48). Par sa raideur, ses matières premières, le liage du fil d’or par des fils repris sur la chaîne, et son dessin, ce petit morceau rappelle les galons tissés aux cartons. La broderie qui occupait le centre du médaillon est malheureusement très usée, seules quelques lettres brodées en soie marron rouge avec une sorte de point fendu sont encore visibles dans l’encadrement circulaire : « DEXTERA D NI », abréviation usuelle pour « DEXTERA D(OMI) NI ». Comme cette inscription apparaît sur quatre autres plaques de gants qui portent toutes une main bénissante dirigée vers le haut14, on peut supposer que la broderie centrale du second médaillon représentait un tel motif, similaire à celui du premier médaillon mais dirigé en sens inverse.
c) Nouvelle présentation
39Les deux pièces ont été placées côte à côte dans un même sous-verre comme les deux éléments d’une paire qu’ils ne constituaient pas car leurs techniques sont différentes et les plaques conservées par paires associent généralement une main bénissante avec un agneau portant l’étendard de la résurrection15.
d) Commentaires
40Il paraît difficile de situer la pièce très détériorée alors que la broderie faisant référence à la Résurrection peut être comparée avec une petite série de mitres brodées en Angleterre vers 1200 ou au début du XIIIe siècle. L’une a été donnée par la duchesse Ludmilla (1170-1240) au monastère de Seligenthal près de Landshut (Musée National de Bavière, Munich), une autre se trouvait dans le trésor de la cathédrale de Sens avant la Révolution et y est retourné en 1884, enfin une troisième faisait partie de la chapelle privée du cardinal-évêque Jacques de Vitry (1216-1240) et fut déposée après son décès au prieuré d’Oignies dans le pays de Liège (monastère des sœurs de Notre-Dame, Namur)16. Cette dernière est considérée comme ne pouvant être antérieure à la consécration épiscopale de Jacques de Vitry en 1216 (Chartraire, 1897, cat. 122, p. 49 ; Schuette et Müller-Christensen, 1963, n° 95-96 ; Durian-Ress, 1986, n° 2 ; Namur, 2003, cat. 28, p. 274-277 ; Vandecan, 2003, p. 48). Ces mitres montrent le meurtre de saint Thomas Becket, archevêque de Cantorbéry et/ ou le martyr de saint Etienne ou de saint Laurent. Les deux scènes sont surmontées d’une main tendue du ciel et accompagnées d’une inscription en caractères très proches de ceux du médaillon d’Orléans auquel on est tenté de donner la même attribution.
41Il devient alors assez clair que le galon qui entourait un seul poignet du défunt appartenait probablement au gant qui portait ce médaillon, ou bien à l’autre gant aux fils d’or de même qualité, et non pas à la manche d’une tunique. Trois observations vont dans ce sens : le galon est une pièce unique comme chacune des deux plaques de gant, il est parfaitement contemporain de l’une d’elles au moins, et celui presque identique qui constitue les clavi de la dalmatique aux lions d’Halberstadt est associé à une broderie de même attribution que le premier médaillon : l’Angleterre vers 1200.
42Ces rapprochements effectués tardivement montrent les limites d’une fouille opérée sans la collaboration d’un spécialiste du textile qui, s’il avait été présent, aurait probablement remarqué que les traces de couture visibles sur un côté du galon étaient situées du côté de la main et non pas du bras. Ce spécialiste aurait alors cherché un autre signe pour savoir si le vêtement porté par l’évêque sous la chasuble était une dalmatique ou une tunique et l’on n’aurait plus d’hésitation sur la validité de la reconstitution présentée dans le triptyque. Bien évidemment, le galon aurait été présenté avec les plaques de gants plutôt qu’avec ce grand vêtement et l’on aurait perçu plus clairement que l’un des gants au moins était un remploi funéraire.
5 - La chasuble en samit à animaux brochés d’or
43Les vingt-huit fragments de soierie et les douze fragments de galon provenant de la chasuble étaient regroupés dans cinq sous verres et accompagnés d’une reconstitution du dessin réalisée par le Dr Falaize en 1937 (Little, 1944, pl. X-XI ; Brun, 1979, fig. 6). Nous avons procédé de la même façon que pour la tunique en commençant par relever sur transparents la forme et les caractéristiques de chaque fragment. Ceux-ci appartenaient à deux types de textiles : un samit façonné décoré d’animaux et un galon tissé aux cartons d’environ 2,2 cm de large. Il n’y avait pas de trace de doublure. Afin de comprendre comment avait pu être disposé le vêtement dans l’espace réduit du sarcophage, nous avons fabriqué une chasuble avec un tissu moderne, en tenant compte des éléments visibles sur la photographie du corps effectuée avant exhumation (Brun, 1979, fig. 4). C’est ainsi que nous avons pu constater qu’une partie du dos, entraînée par les avant-bras repliés sur le thorax, se trouvait rabattue sur le dessus du corps et donc conservée alors que le reste du dos de la chasuble, en contact avec les substances de décomposition dans le fond de la cuve, avait été détruit. L’évêque avait le bras gauche replié sur le droit. Il tenait son calice appuyé au creux de son coude gauche tandis que la hampe de sa crosse était placée en oblique entre son pied gauche et son oreille droite.
a) L’étoffe de la chasuble
44Il s’agit d’un samit façonné avec des fils de chaîne en soie de torsion Z dans une proportion de un fil pièce pour un fil de liage. Ses trois lats liés en sergé 2 lie 1 (Z) se suivent toujours dans le même ordre : 1er et 3e lats lancés en soie aujourd’hui marron, 2e lat broché en filé or très noirci fait d’une lamelle organique dorée enroulée en Z autour d’une âme en soie marron. Les analyses de colorant des lats ont décelé deux rouges à base de garance, le 3e lat (fond du dessin) comportant en plus des tanins ce qui permet de supposer que les motifs dorés et cernés de rouge assez vif ressortaient sur un fond rouge plus foncé.
45Les motifs sont organisés en rangées séparées par des zones de samit uni. Leur ordre de succession n’était pas évident à déterminer à première vue car deux fragments seulement sont assez hauts pour montrer deux rangées l’une au-dessus de l’autre. Certaines portent des aigles (ou des faucons) au corps de face, ailes éployées, avec la tête et les pattes de profil tournées tantôt vers la droite, tantôt vers la gauche. D’autres alternent un motif végétal stylisé avec deux lions adossés se retournant de part et d’autre d’un petit fleuron, et d’autres encore présentent des griffons de profil tournés alternativement à droite et à gauche (fig. 49). Enfin une quatrième rangée présente des petits groupes de trois disques plus denses que les autres motifs.
46L’examen attentif de chaque fragment, les indications fournies par des pièces contemporaines (en particulier les chasubles de saint Thomas Becket à Lisieux, de saint Regnobert à Bayeux, et de Pere d’Urg à la Seu de Urgel [Desrosiers et Bédat, 1992 ; Flury-Lemberg et Illek, 1995 ; Bédat, 1995 et 1997]), et la taille importante du prélat ont permis de reconstituer sa chasuble (fig. 50) ainsi que le dessin du samit (fig. 51) qui se révèle un peu différent de celui proposé par le Dr Falaize car les rangées de griffons et d’aigles sont superposées et non pas décalées, et elles sont toutes deux décalées par rapport aux rangées associant lions et fleurons. Ont joué un rôle important : les traces de coutures parallèles signalant l’emplacement d’un galon ou bien la présence d’un tel fragment (fragments 5.1, 5.7, 5.8, 6.4, 7.1, 7.4, 7.6, et 8.3) ; un ourlet arrondi (7.5) ; les traces d’oxydation arrondies du bord du calice (7.1) ; des défauts et des différences ou similitudes de tissage des motifs qui ont permis de regrouper les fragments horizontalement (5.1 et 5.7-5.8 ; 6.6 et 6.1 ; 6.7 et 6.2 ; 6.11, 6.12 et 6.13 ; 7.1 et 7.5), ou verticalement (5.4, 6.4 et 7.3 ; 5.7-5.8, 6.1 et 7.1 ; 6.4 et 6.10 ; 6.4 et 8.3) ; enfin le sens des cassures du tissu (en S du côté droit et en Z du côté gauche) et les traces noires laissées par la hampe posée en travers du corps (6.1, 6.2 et 6.7). Les fragments avec plusieurs localisations possibles ont été placés à l’endroit le plus probable.
b) Le galon aux cartons
47Le galon constituant l’orfroi est lancé d’or dans presque toute sa largeur (2,5 cm), le fil précieux étant lié par un fil sur les quatre constituant chaque corde comme beaucoup d’autres galons de cette période. Un motif de svastika a été relevé avec difficulté sur le morceau le moins détérioré (fig. 52).
c) Nouvelle présentation
48Comme pour la tunique, les fragments ont été replacés sur une forme en soie beige à l’intérieur d’un sous-verre en triptyque en tenant compte de toutes les remarques précédentes. Les fragments de galon ont été situés aux emplacements où ils avaient laissés des traces en respectant aussi souvent que possible le rapport de dessin.
49Lorsqu’ils sont refermés, les deux volets du triptyque présentent au public un fac-similé en taffetas de soie rouge foncé imprimé avec un produit contenant de la poudre d’or (fig. 53).
d) Commentaires
50Les lieux et dates de fabrication des deux textiles ne sont pas faciles à préciser, y compris pour le galon dont la technique était pourtant très courante au XIIIe siècle et bien que le motif de svastika semble alors assez fréquent (par exemple dans la tombe de l’archevêque Gautier Cornu (+ 1241) à Sens, ou sur le cercueil d’Éléonore d’Angleterre, reine de Castille (+ 1214), à Las Huelgas de Burgos [Chartraire, 1918, fig. 18 ; Gómez-Moreno, 1946, pl. CV]). Il est possible que le galon ait été tissé en France, comme ceux de la tunique, mais ce n’est qu’une hypothèse parmi d’autres.
51La question est beaucoup plus complexe pour le samit façonné dont le filé or de torsion Z fait penser à une région islamique. La finesse des fils de chaîne pourrait correspondre à une production espagnole, mais leur proportion d’un fil pièce pour un fil de liage, qui redevient un peu plus courante au XIIIe siècle et au début du XIVe pour des samits très légers (Desrosiers, 2004, n° 109-113), n’a pas encore été localisée avec précision pour des exemples de bonne qualité. Et nous n’avons jusqu’ici repéré qu’un seul autre samit broché d’or avec des motifs d’animaux organisés en rangées séparées par des zones de samit uni : le tissu aux lions d’or avec des contours et des détails violets et blancs sur fond jaune de la cathédrale de Passau dont le décor est attribué selon les auteurs à la Mésopotamie du XIe siècle ou du début du XIIIe siècle (Falke, 1913, I, p. 105, fig. 161 ; Munich, 1955, n° 32). En attendant de pouvoir réaliser des comparaisons plus étroites avec d’autres samits, les caractéristiques techniques et le décor de la chasuble d’Orléans semblent plutôt correspondre aux productions d’une région islamique orientale qui pourrait être la Mésopotamie du XIIIe siècle.
6 - Les chausses de laine, seul vêtement non liturgique
52Selon une photo prise au moment de la fouille, les chausses montaient au moins jusqu’à mi-cuisses. Elles ont été coupées au-dessus des genoux et seule une petite partie dépasse des caligae ou chausses de soie (fig. 32). Le tissu est enroulé en biais autour du mollet. Il s’agit d’un drap de laine marron rouge en sergé 2 lie 2 lainé et tondu sur les deux faces, tissé avec des fils de torsion Z en chaîne et en trame. Des analyses de qualité de la laine et du colorant sont prévues pour compléter ces données.
53Les comparaisons montrent que ce type de tissu a été employé pour confectionner d’autres chausses médiévales comme celles trouvées dans la tombe de R. Ximénez de Rada (1170-1247) (Vestiduras..., 1995, p. 180-185) et dans celle d’un évêque inhumé à Lubeck dans la seconde moitié du XIIIe siècle ou peut-être au début du XIVe siècle (Nockert, 1992, p. 19). Par contre, celles du Comte Raimond de Toulouse (+ 961) ont été taillées dans un sergé 2 lie 1 avec des fils Z en chaîne et S en trame, et d’autres exemples ont été confectionnés dans des toiles (Cardon, 1995, p. 38 ; Desrosiers, 2004, n° 72). Mais toutes les chausses dont le patron est connu ont été coupées dans le biais du tissu, certainement pour donner une meilleure élasticité à cette pièce qui moulait la jambe depuis le pied jusqu’à la cuisse.
Conclusion
54Au terme de l’examen du contenu textile de la tombe d’Orléans dite de Robert de Courtenay, nous pouvons faire un certain nombre d’observations.
55Tout d’abord, les différentes soieries façonnées sont attribuables au XIIIe siècle, plutôt vers le milieu du siècle pour celle de la tunique-dalmatique, et vers la fin du siècle ou le début du XIVe siècle pour celle des sandales. Curieusement, nous avons rencontré des difficultés pour trouver des éléments de comparaison avec les tissus principaux de la tunique-dalmatique et de la chasuble. Et ces éléments proviennent en majorité d’autres tombes d’ecclésiastiques, ce qui semble signifier que les tissus alors employés pour les vêtements liturgiques et pontificaux avaient des sources d’approvisionnement communes. Il est clair que l’Orient islamique était alors un fournisseur très important, mais les productions de la Méditerranée occidentale, en particulier de l’Espagne, de l’Italie et du Languedoc étaient également appréciées des dignitaires de l’Église comme le montrent d’autres sépultures du XIIIe siècle découvertes sur une large aire géographique s’étendant de l’Espagne à la Norvège (voir par exemple Desrosiers, 1999 ; Desrosiers et Bédat à paraître). On peut espérer que la multiplication des études de trouvailles archéologiques similaires permettent un jour de mieux connaître les réseaux de commercialisation existant et de comprendre si les choix opérés par les religieux correspondaient à leur statut hiérarchique au sein de l’Église, à leur réseau de connaissances, à la région géographique dans laquelle ils évoluaient, ou bien encore à d’autres facteurs.
56L’un des deux médaillons de gants, et le galon qui faisait office de poignet, proviennent d’une autre zone textile, l’Angleterre où les brodeurs tentaient de réaliser à l’aiguille des décors encore plus inventifs que ceux tissés au métier. La date de fabrication de ces éléments – vers 1200 ou au début du XIIIe siècle – signale sur ce point le remploi d’un ou de deux gants qui n’ont pu être confectionnés expressément pour le défunt enterré bien plus tard, une remarque qui vaut aussi pour les plaques de gant émaillées du XIIe siècle trouvées dans la tombe de Raoul de Grosparmi (1306-1311) dans la même cathédrale d’Orléans (voir supra).
57A l’inverse, si la soierie employée pour les sandales se révélait être du début du XIVe siècle plutôt que des quarante dernières années du XIIIe siècle, on ne pourrait expliquer sa présence par l’ajout d’un textile lors d’une ouverture de la tombe ou d’une éventuelle translation comme ceci a été le cas pour une sépulture découverte en 1853 dans la cathédrale de Bayonne (Desrosiers, 2004, n° 65), car les sandales sont trop bien ajustées pour avoir été ajoutées longtemps après l’inhumation. La suite de l’étude viendra donc peut-être contester l’identification du défunt comme Robert de Courtenay (1258- 1279), une identification proposée par le chanoine Chenesseau après observation du faste dont avaient été entourées les funérailles. En l’absence de sceau ou d’inscription dans une sépulture, ou bien de textes précisant l’emplacement des différents occupants du sous-sol d’un bâtiment religieux, il est souvent périlleux d’identifier un prélat en fonction du matériel découvert dans sa tombe, sachant que la liste des occupants potentiels est difficile à dresser puisqu’il faudrait tenir compte des étrangers de passage.
58Finalement, malgré son contexte difficile, la réalisation de ce projet a abouti à des hypothèses réalistes et à des reconstitutions devenues plus compréhensibles grâce aux fac-similés que le public pourra admirer dès que la nouvelle salle du trésor de la cathédrale Sainte-Croix aura été réaménagée.
Bibliographie
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Annexe
Annexes : analyses techniques des pièces
1) chausses de soie (fig. 32-34)
Dimensions : H. environ 56 cm
État de conservation : mauvais. La soie, originellement de deux couleurs, est devenue marron jaune et les fils d’or noirs car la lamelle organique dorée est presque entièrement désagrégée. L’étoffe est très cassante, impossible à manipuler et donc difficile à étudier
Qualification technique : samit façonné 3 lats, le 3e interrompu, lié en sergé 2 lie 1 léger (S)
Chaînes : 1 fil pièce / 1 fil de liage, soie filée Z marron foncé ; découpure : 1 fil pièce ; 15 fils de liage et 15 fils pièce / cm
Trames : 1.2.3.1.2.3 ; 1er lat (fond) : soie, trame x bouts sans torsion appréciable, marron jaune ; 2e lat (motifs) : filé or légèrement riant constitué d’une lamelle organique dorée enroulée S sur une âme en soie S marron ; 3e lat (détails des fleurons, centre des rosettes et peut-être les yeux des faucons) : soie, trame x bouts sans torsion appréciable, marron gris (reflet bleu ciel ?) ; découpure : 2 passées ; 31 passées / cm
Colorant : l’analyse de la trame du fond n’a pas permis de détecter un colorant
Rapport de dessin : environ 20 cm de large sur 18,8 cm de haut, fait de deux chemins à retour
Doublure : taffetas marron, probablement rouge à l’origine (soie Z dans les deux directions avec 32 fils / cm pour les plus fins et plus tordus (chaîne), et 26 fils / cm pour les fils un peu plus gros et moins tordus (trame). Soierie façonnée et doublure sont cousues bord à bord au point de surjet, avec un léger repli de chaque tissu à l’intérieur
Lien sous le genou : ruban en taffetas face chaîne enroulé sur lui-même et donc de largeur non appréciable ; chaîne en soie marron retors S de 2 bouts, 10 fils / 0,2cm ; trame en soie marron sans torsion apparente, très fine, 14 coups / cm
2) sandales (fig. 32)
Dimensions : après reconstitution avec un tissu moderne, il apparaît qu’un fragment d’étoffe de 45,5 cm de large par 34,5 cm de haut ait suffi pour la paire de sandales qui remontent à environ 14 cm de haut sur la cheville
État de conservation : très mauvais. La soie est devenue presque uniformément marron et les fils d’or se sont en grande partie désagrégés. L’étoffe est très cassante, impossible à manipuler
Qualification technique : Etoffe formée par le tissage successif de bandes en samit façonné 3 lats, en samit uni barré, et en lampas façonné 2 lats de lancé fond taffetas par fils doubles (envers non accessible). Liage du samit et du lampas en sergé 2 lie 1 (S)
Chaînes : 4 fils pièce doubles / 1 fil de liage ; fils pièce : doubles, soie filée Z marron foncé (nettement bleus dans le lampas quand les fils pièce travaillent en taffetas) ; fils de liage : soie filée Z marron foncé, fine ; découpure : 2 fils pièce doubles ; 10-11 fils de liage et 40-44 fils pièce doubles / cm
Trames : 1.2.3.1.2.3 ; 1er lat (fond du lampas) : soie marron assez fine, sans torsion appréciable, ou bien 1er lat (contours des motifs du samit) : soie, trame x bouts sans torsion appréciable, marron rouge ; 2e lat (motifs) : lamelle organique dorée d’environ 0,4-0,5 mm de largeur ; 3e lat (probable fond du samit) : filé or riant constitué d’une lamelle organique dorée enroulée Z sur une âme de matière non encore identifiée de torsion Z ; découpure : 1 passée ; 13-14 passées / cm dans le samit façonné ; 18 passées /cm dans le samit uni ; 16 passées / cm dans le lampas
Rapport de dessin : L. 23,2 cm de large
Lien maintenant le haut des sandales autour des chevilles : côté gauche, tube d’environ 1,8 mm de diamètre, tissé en taffetas face chaîne en soie marron rouge Z aussi fine que la chaîne du tissu. Côté droit, lien de nature très différente et mixte (lien de la chausse pontificale associé à des lisières de galons aux cartons) ; d’après une photographie ancienne, il était presque inexistant au moment de la fouille. On peut donc penser que celui qui est observable actuellement a été mis en place lors de la présentation de 1937
3) tunique ou dalmatique
Dimensions de la reconstitution : H. 135 x L. 175 cm
État de conservation : mauvais dans l’ensemble, même si les fils d’or ont permis une meilleure conservation des galons. La soie est devenue presque uniformément marron et les fils d’or ont noirci. Les textiles sont très friables, difficiles à manipuler et donc à étudier
a) Samit à petits losanges et bandes transversales à inscription coufique (fig. 35-42)
Qualification technique : samit façonné 2 lats lié en sergé 2 lie 1 (S) coupé de bandes transversales comprenant du samit uni, l’une de ces bandes étant à 3 lats
Chaînes : 2 fils pièce / 1 fil de liage, soie marron filée Z ; découpure : 1 fil pièce ; 15-18 fils de liage et 30-36 fils pièce / cm
Trames du fond losangé : 1.1.2.2 ; 1er lat : soie marron x bouts sans torsion appréciable ; 2e lat : soie marron x bouts sans torsion appréciable ; découpure : 2 passées ; 36-39 passées / cm
Trames des bandes transversales : 1.2.3.1.2.3 ; 1er lat : soie marron clair x bouts sans torsion appréciable, diamètre plus gros que dans la zone losangée ; 2e lat : filé or, lamelle organique dorée guipée Z sur âme complétement désagrégée ; 3e lat (formant les contours des motifs dans la seconde bande transversale seulement) : soie marron foncé x bouts sans torsion appréciable ; découpure : 1 passée ; 24-26 passées / cm et 18-20 passées / cm dans la seconde bande transversale
Particularité du tissage : un décalage entre le travail du tisseur et celui du tireur produit une irrégularité dans les zones en samit losangé (fig. 4) : les fils pièce sont visibles dans la moitié supérieure des grands losanges et dans la moitié inférieure des petits losanges qui occupent leur centre parce qu’ils ne sont pas recouverts par une passée qui a été rejetée sur l’envers du tissu. L’irrégularité symétrique, à savoir les deux lats sur l’endroit avec le même liage, n’est pas visible car les deux lats ont aujourd’hui la même couleur marron
Colorants : fils pièce : tanins purs ; fils de liage : traces de tanin ; 1er lat : tanins et source végétale de colorants indigoïdes (pastel, indigo, ou autre) ; 2e lat : traces de tanins
Rapport de dessin : chaque losange mesure environ 1 cm de côté, mais une sorte de bande verticale disposée tous les 8 losanges montre que le rapport de dessin mesurait environ 8,2 cm de large et 1,2 cm de haut
b) Galons aux cartons
Galon A (clavi externes) (fig. 39)
Dimensions : L. 1,65 cm x longueur des 28 fragments mis bout à bout : 315,45 cm
Qualification technique : galon aux cartons broché or et soie
Chaîne : soie aujourd’hui marron, retors S de 2 bouts, 4 fils par corde, 41 cordes dans la largeur ; découpure : 1 fil dans la même corde ; 25 cordes / cm ou 100 fils / cm
Trames : 2 lats par 1 coup de chaque ; 1er lat (fond) : soie marron, retors S de 2 bouts ; 2e lat (broché, latté) : filé or fait d’une lame de métal doré (argent doré ? car extérieur de la lame de couleur or et intérieur noir) enroulé S sur une âme en soie marron, latté ponctuellement avec de la soie marron jaune assez grosse, filée Z ; découpure : 1 passée ; 23-32 passées / cm
Lisières : ne se distinguent pas du reste du galon
Galon B (clavi internes, couture d’épaule) (fig. 43a-43c)
Dimensions : L. 0,8-0,9 cm x longueur de 20,4 cm + 9,4 cm + 1,7 cm
Qualification technique : galon aux cartons broché or et soie
Chaîne : soie aujourd’hui marron, retors S de 2 bouts, 4 fils par corde, 13 cordes dans la largeur ; découpure : 1 fil dans la même corde ; 15,3 cordes /cm
Trames : 1.2.1.2 ; 1er lat (fond) : soie marron, 4 bouts Z assemblés sans torsion appréciable ; 2e lat (broché) : filé or double, chaque bout étant fait d’une lame de métal doré (argent doré ? car extérieur de la lame de couleur or et intérieur noir) enroulée S sur une âme en soie marron), et soie marron clair assez grosse, faible Z ; découpure : 1 passée ; 17-19 passées / cm
Lisières : ne se distinguent pas du reste du galon
Galon C (complément du galon B) (fig. 43d-43g)
Dimensions : L. 0,8-0,9 cm x longueur de 10,8 cm + 11,8cm + 10,2 cm + 9cm
Qualification technique : galon aux cartons broché or et soie
Chaîne : soie aujourd’hui marron, retors S de 2 bouts, 4 fils par corde, 17 cordes dans la largeur ; découpure : 1 fil dans la même corde ; 20 cordes / cm
Trames : 1.2.1.2 ; 1er lat (fond) : soie marron, 4 bouts Z assemblés sans torsion appréciable ; 2e lat (broché) : filé or fait d’une lame de métal doré (argent doré ? car extérieur de la lame de couleur or et intérieur noir) enroulée S sur une âme en soie marron), et soie marron clair assez grosse, retors S de 2 bouts Z ; découpure : 1 passée ; 20-24 passées / cm
Lisières : ne se distinguent pas du reste du galon
Galon D (utilisation inconnue, peut-être extrémités d’étole ou de manipule) (fig. 43h-43i)
Dimensions : L. 1-1,1 cm x longueur de 9,5 cm + 11,6 cm
Qualification technique : galon aux cartons broché or et soie
Chaîne : soie aujourd’hui marron, retors S de 2 bouts, 4 fils par corde, 27 cordes dans la largeur ; découpure : 1 fil dans la même corde ; 26 cordes / cm
Trames : 1.2.1.2 ; 1er lat (fond) : soie marron non analysable ; 2e lat (broché) : filé or double, chaque bout étant fait d’une lame de métal doré (argent doré ? car extérieur de la lame de couleur or et intérieur noir) enroulée S sur une âme en soie marron), et soie marron clair assez grosse faite de x bouts Z ; découpure : 1 passée ; 18 passées / cm
Lisières : ne se distinguent pas du reste du galon
Galon E (décrit par les fouilleurs comme un poignet de la tunique mais il s’agit plus probablement d’un poignet de gant) (fig. 44-45). L’ensemble a reçu une petite broderie le long des bords. D’un côté sont visibles des traces de couture, de l’autre la lisière est beaucoup plus usée (les 4 dernières cordes manquent)
Dimensions : L. 4 cm x longueur de 20,4 cm + 10 morceaux de tresse cousus côte à côte et disposés transversalement sur 2,8 cm
Qualification technique : galon aux cartons lancé or
Chaîne : soie aujourd’hui marron plus ou moins foncé, retors S de 2 bouts ; 121 cordes de 4 fils dans la largeur ; découpure : 1 fil d’une corde ; 30 cordes de 4 fils / cm
Trames : 1.2.1.2 ; 1er lat (fond) : soie marron, 2e lat (lancé) : filé or fait d’une lame de métal doré (argent doré ? car extérieur de la lame de couleur or et intérieur noir) enroulée S sur une âme en soie marron jaune, et soie marron clair assez grosse, retors S de 2 bouts Z ; découpure : 1 passée ; 29-32 passées / cm
Lisières : 2 cordes plus foncées puis cordes de même couleur que le centre. Pour 2 / 8 passées, le filé or ne s’arrête pas aux cordes plus foncées mais réapparaît derrière en formant deux petits traits au-dessus de 5 cordes
Tresses : Dix tresses plates de 0,32 cm de large en sergé 2 lie 2 faites à l’aide de 14 fils : 8 fils de soie marron composés de 3 ou 4 retors S de 2 bouts, et 6 fils doubles filé or fait d’une lame de métal doré enroulée S sur une âme en soie marron de torsion S (assez semblable au filé or du galon mais de grosseur moindre). Ces tresses sont cousues côte à côte à l’aide d’un fil en soie marron retors S de 2 bouts
Broderie : Elle a été réalisée après couture du galon à la tresse car elle est continue de l’un à l’autre et de chaque côté. En très mauvais état, car il ne reste que quelques fragments de fil de soie beige retors S de 2-3 bouts maintenus en place le long du bord, juste après les fils plus foncés marquant le début de la lisière
4) médaillons de gants
a) premier médaillon brodé sur samit (fig. 47a)
État de conservation : tissu de fond assez élimé et de couleur grise avec un reflet bleuté. La lame du filé or est devenue gris foncé quand elle est conservée, sinon l’âme en soie est dénudée. Le fil en matière végétale qui maintenait le point couché-rentré sur l’envers (probablement du lin comme sur les autres exemples de broderies anglaises) a complètement disparu
Dimensions : : H. 5,6 x L. 6,2 cm ; le tissu de fond est replié sur l’envers sur environ 0,5 cm de large ; sa chaîne est horizontale
Qualification technique : samit uni lié en sergé 2 lie 1 léger (S), brodé
Chaînes : 1 fil pièce /1 fil de liage ; soie Z marron clair, diamètre = 0,01-0,18 mm environ ; 36 fils de liage et 36 fils pièce / cm
Trames : 2 lats par 1 coup de chaque ; 1er et 2e lat : soie marron sans torsion appréciable ; 66 passées / cm
Broderie au point couché-rentré : sur l’endroit ; filé or couvert fait d’une lame de métal doré enroulée S sur une âme en soie jaune S, diamètre = 0,2-0,3 mm. Sur l’envers, fil de soutien disparu
Broderie au point de tige (?) pour les contours du dessin de la main et les détails internes : fil de soie retors S de 2 bouts
b) second médaillon brodé sur tissu d’or (fig. 47b-48)
État de conservation : encore bon pour le tissu façonné servant de fondation, mais les fils de soie de la broderie sont très détériorés et passés ; le motif central est invisible et les lettres sont aujourd’hui marron rouge alors qu’elles étaient probablement rouges à l’origine. L’or est parfaitement conservé parce qu’il semble assez pur (il est également visible à l’extérieur et à l’intérieur de la lame métallique enroulée autour de l’âme)
Dimensions : H. 5,4 x 6 cm ; le tissu de fond a ses bords coupés nets, sans repli sur l’envers
Qualification technique : taffetas lancé 1 lat à liage repris par un peu moins de 2 fils / 4, brodé
Chaîne : 1 seule chaîne ; soie marron, retors S de 2 bouts, diamètre = 0,01 mm environ ; découpure : 1 fil parmi ceux employés pour le liage ; 92 fils / cm (et 38 liages / cm)
Trames : 1.2.1.2 ; 1er lat (fond) : soie marron retors S de 2 bouts, diamètre = 0,012-0,015 environ ; 2e lat (lancé) : fil double, filé or couvert constitué d’une lame en or assez pur enroulée S sur une âme en soie S (diamètre = 0,15-0,2 mm environ pour chaque filé) ; découpure : 1 passée ; 31-32 passées / cm
Broderie : sorte de point fendu exécuté avec une soie retors S de 2 bouts rouge marron pour les lettres, marron plus clair pour le cercle qui forme la couronne, et marron jaune pour le motif très détérioré au centre. Point de feston avec une soie retors S de 2 bouts marron rouge pour le bord d’environ 3 mm de large qui compense probablement l’absence d’un ourlet impossible à réaliser avec ce tissu raide
Rapport de dessin du tissu de fond : L. 1,2 x H. 1,45 cm de haut pour 46 fils et 46 coups
5) chasuble
État de conservation : 29 fragments de samit façonné et 11 fragments d’un galon aux cartons lancé d’or. Pas de trace de doublure, ni de lisière pour la soierie. Mauvais état dans l’ensemble, même si les fils d’or ont permis une meilleure conservation des galons. La soie est devenue presque uniformément marron et les fils d’or ont noirci. Les textiles sont pulvérulents, difficiles à manipuler et donc à étudier. Il est très difficile de reconstituer le vêtement et le dessin de la soierie
a) Samit à animaux brochés d’or (fig. 49-51)
Qualification technique : samit façonné 3 lats, le 3e broché, lié en sergé 2 lie 1 (Z)
Chaînes : 2 fils pièce/1 fil de liage ; soie aujourd’hui marron foncé, filée Z ; découpure : 1 fil pièce ; 26-27 fils de liage / cm
Trames : 1.2.3.1.2.3 ; 1er lat (contours des motifs) : soie, trame x bouts sans torsion appréciable, aujourd’hui marron avec des reflets rouges par endroits ; 2e lat (broché) : filé or - lamelle de membrane animale dorée enroulée Z sur une âme en soie marron de torsion Z ; 3e lat (fond) : soie, trame x bouts sans torsion appréciable, aujourd’hui marron ; découpure : 1 passée ; 25-36 passées / cm
Colorants : 1er lat : colorant végétal de type Rubiaceae : garance (Rubia tinctorum L.), garance sauvage (Rubia peregrina), ou autre ; 2e lat : mélange de tanins et de garance (Rubia tinctorum L.)
Rapport de dessin : environ 24 cm de large. La présence de défauts symétriques sur plusieurs fragments et la disposition des motifs permettent de comprendre que le rapport de dessin comprend deux chemins à pointes simples. 302 cordes de rame comptées sur le fragment 7.5
b) Galon
Dimensions : L. 2,5 cm x longueur totale des 12 fragments mis bout à bout : 282,7 cm
Qualification technique : galon aux cartons lancé or
Chaîne : 1 seule, soie marron retors S de deux bouts Z ; 45 cordes de 4 fils dans la largeur ; découpure : 1 corde ; 45 cordes / 2,5 cm, soit 18 cordes de 4 fils / cm
Trames : 1.2.1.2 ; 1er lat (fond) : soie marron ; 2e lat (lancé) : filé or fait d’une lame de métal doré enroulée S sur une âme en soie S ; découpure : 1 passée ; 20 passées / cm
Lisières : composées de 7 cordes de chaque côté (3 cordes foncées, 2 claires, 2 foncées en partant de l’extérieur). Le 2e lat passe sur l’envers à la limite de la lisière, puis il revient former le dessin ou bien il forme quatre flottés successifs à intervalles réguliers au-dessus des 2 cordes claires
6) chausses de laine
Dimensions : Actuellement 62 cm de haut à droite et 58 cm à gauche
État de conservation : coloris marron rouge probablement bien plus vif avant l’inhumation
Qualification technique : drap de laine en sergé 2 lie 2, lainé et tondu sur les deux faces
Chaîne : laine marron rouge filée Z assez fortement tordue ; 16 fils / cm
Trame : laine marron rouge filée Z moins fortement tordue que la chaîne ; 12 coups / cm
Notes de bas de page
1 Nous tenons à remercier vivement les personnes qui ont facilité nos recherches sur les tombes de la cathédrale d’Orléans : MM. J.-L. Aurat, M. Botlan, et F.-C. James (Direction Régionale des Affaires Culturelles de la Région Centre), Mme C. Richard, conservateur des Antiquités et Objets d’Art du Loiret, MM. F. Maury et J. Debal (Société Archéologique et Historique de l’Orléanais), M. J.-D. Pariset, directeur de la Médiathèque de la Direction de l’Architecture et du Patrimoine à Paris, enfin M. J. Moulin, architecte en chef des Monuments Historiques. Le texte a bénéficié des remarques constructives de G. Cornu, G. François, E. Dabrowska et J.-P. Leclercq, ainsi que de l’aide précieuse de F. Maury qui a inventorié le Fonds Chenesseau à la médiathèque d’Orléans.
2 Voir les courriers conservés dans le dossier concernant le trésor de la cathédrale d’Orléans, au service de documentation des objets mobiliers, médiathèque de la Direction de l’Architecture et du Patrimoine, Paris.
3 Postérieurement, l’examen du squelette révéla que le défunt était âgé d’environ 70 ans – or Seignelay était né vers 1150 – et qu’il souffrait d’une luxation probablement congénitale de la hanche gauche, une infirmité jamais évoquée de son vivant mais suggérée par des passages de la chronique de son frère Guillaume de Seignelay, évêque d’Auxerre. Mais ces observations qui suffirent à Brun (1979, p. 140) pour confirmer l’identité de l’évêque ne sont pas totalement convaincantes car les déformations osseuses devaient être courantes à l’époque.
4 Notes, photos et journal de fouilles sont conservés à la Médiathèque d’Orléans avec les archives du chanoine Chenesseau inventoriées par F. Maury. Un second jeu de photos se trouverait aux archives départementales du Loiret.
5 Les restes très détériorés sont comparables à la mitre brodée du Trésor de la Sainte-Chapelle conservée au musée national du Moyen Âge-Thermes de Cluny, Cl. 12923 (Paris, 2001, n° 58).
6 Selon François Maury (comm. perso. 2004), aucun argument décisif en faveur de cette attribution n’apparaît dans les archives du chanoine Chenesseau.
7 Les analyses techniques des textiles sont présentées en annexe.
8 car les colorants jaunes se conservent plus difficilement que les autres dans les textiles d’origine funéraire
9 à l’exception de l’ordre des lats qui sont passés pairs à retour (1.2.2.1) dans la soierie losangée et suivis (1.2.1.2) dans la bande transversale.
10 Ces détails montrent que la reconstitution effectuée à partir des fragments épars et proposée à Chenesseau par le Dr J. Falaize (Little, 1944, pl. XII) est inexacte car le dessin de la bande y est dans le bon sens et bordé par le galon large et non pas par celui du clavus interne.
11 Toutes les analyses de colorants ont été réalisées par J. Wouters, IRPA, Bruxelles.
12 La garniture externe du cercueil de Marie de Almenar semble tout en samit mais sans fil d’or, et les parements des manches de la dalmatique de Pere d’Urg sont en samit lié en sergé 3 lie 1 avec des chaînes en proportion de 1/1.
13 Nous remercions Jean-Paul Leclercq (comm.perso. 2004) pour avoir attiré notre attention sur des passages de Marc (16,19) : « Assumptus est in caelum et sedit a dextris Dei », et de saint Augustin (sermon 80) : « (…) unus enim Christus, deus et homo, homo assumptus est, ut in melius mutaremur, (…) » qui nous ont aidé à lire et à comprendre cette inscription.
14 Les quatre médaillons brodés (sauf le dernier en cuivre émaillé) proviennent de tombes ouvertes dans les cathédrales de Brême, Cahors et Sens (Chartraire, 1918, fig. 7 [tombe de Pierre de Charny, 1267-1274] ; Borås, 1986, n° 7 et 21 [deux tombes du XIIIe siècle, l’une attribuée par erreur à l’archevêque Bezelius – selon E. Dabrowska (comm. perso. 2004) citant Weizbezahn, 1997] ; Barbier de Montault, 1876, pl. face p. 784, Trésor…, 1965, n° 530, et Thesaurus, 1999, p. 330 [tombe de Cahors : plaques en cuivre émaillé fin XIIe-début XIIIe siècle])
15 Tel est le cas des plaques citées dans la note précédente et de deux autres exemples provenant de tombes d’un abbé de Corbie et d’un évêque de Troyes, Hervée, inhumé dans la cathédrale en 1206 (Barbier de Montault, 1876, p. 781-785).
16 Deux autres mitres sont associées à ce groupe. La première a été trouvée dans le tombeau de Bernat d’Olivella (1272-1287), archevêque de Tarragone. Y apparaissent les martyrs des saints Étienne et Laurent. N’en ayant pas vu d’illustration, nous ne savons pas si une main occupe sa partie supérieure (Namur, 2003, cat. 28, p. 275). La dernière est conservée dans le trésor de la cathédrale d’Anagni et ne montre pas de main à son sommet (Christie, 1938, pl. XII A et B).
Auteurs
Maître de conférences à l’EHESS (Paris).
Restauratrice textile à Paris.
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2016
Dissidences en Occident des débuts du christianisme au XXe siècle
Le religieux et le politique
Jean-Pierre Albert, Anne Brenon et Pilar Jiménez (dir.)
2015
Huit ans de République en Espagne
Entre réforme, guerre et révolution (1931-1939)
Jean-Pierre Almaric, Geneviève Dreyfus-Armand et Bruno Vargas (dir.)
2017