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Toulouse, une métropole méridionale

 | 
Bernadette Suau
, 
Jean-Pierre Almaric
, 
Jean-Marc Olivier

Images, représentations et art de vivre

Les âges d’or de Toulouse, entre Histoire et mythes

Dominique Allios et Delphine Durand

Résumé

Au cours du XIXe siècle, le mélange entre Histoire et Littérature à Toulouse a été déterminant pour l’établissement du passé de la cité gauloise, palladienne, wisigothique, comtale, cathare… Toujours martyre, toujours renaissante. L’invention et la sélection d’« âges d’or » dont les diverses apologies mêlent le monde politique, artistique et scientifique marque un tournant essentiel dans l’histoire de la création toulousaine. L’étude de la littérature régionaliste met en lumière l’évolution de ses représentations et modalités frappée d’une certaine ambiguïté. De nos jours, cette tradition prend de nombreuses formes où l’archéologie est utilisée comme élément de justification face à la destruction systématique de son patrimoine. La confrontation de l’étude des textes historiques et littéraires avec les manifestations reprenant les recherches des archéologues permet de proposer une grille de lecture oscillant entre l’invention des mythes, leurs réalités imaginées et leurs finalités. À la recherche archéologique se substitue le terroir mythique et idéalisé qui produit l’identité symbolique de la ville.

À nos professeurs

Texte intégral

1C’est dans toute l’Europe nationaliste du xixe siècle que les valeurs régionalistes trouvent leurs premières formulations esthétiques et littéraires. À ce titre, Toulouse apparaît comme un cas exemplaire, comparable à de nombreuses métropoles régionales européennes dont les expériences régionalistes polymorphes perdurent sur plus de deux siècles.

2Le mythe d’un âge d’or toulousain s’inscrit dans un contexte réactionnaire qui entend restaurer l’antique civilisation du Midi, avec d’autant plus de nécessité que le monde moderne a encore fragilisé une conscience régionale sans repères. Pour défendre la « civilisation méridionale », considérée comme un refuge identitaire, le passé est ressuscité dans une fossilisation du temps. Le mythe est sans cesse convoqué en tant que catalyseur des sentiments de l’expérience collective et émotionnelle. Dans le même ordre d’idées, les découvertes archéologiques se confondent avec le désir de revenir aux origines. L’invention d’une identité « toulousaine » s’inscrit donc à l’intérieur d’une pensée politique et culturelle marquée par la négation des contingences. Cette complexité se traduit par une dualité qui allie les moyens techniques et archéologiques et le conservatisme d’une pensée qui fuit le réel pour un passé mythique et sublimé.

  • 1 Emmanuel des Essarts, « Armand Silvestre », L’Âme latine, Toulouse, septembre 1904, p. 529.
  • 2 Armand Praviel, « Préface », L’Âme latine, Toulouse, janvier 1902, p. 2.
  • 3 Armand Praviel, Le Languedoc rouge, Paris, Privat, 1929, p. 94.

3À la fin du xixe siècle, Toulouse, honorée du titre de « palladienne » par le poète latin Martial, Toulouse « la romaine » chantée par Victor Hugo, cité des comtes, centre artistique et littéraire du Midi, ville de la musique et de la poésie, de Clémence Isaure et des Jeux floraux, des artistes et des troubadours, est souvent présentée comme « l’Athènes du Midi »1, la « Capitale du génie latin »2 où se sont rencontrés et mêlés les courants religieux, philosophiques, artistiques les plus divers. Carrefour des civilisations celtique et wisigothique, berceau de la Renaissance méridionale, ville magique pour les occultistes et point de rencontre des racines gréco-latines et de l’idéalisme chrétien, elle apparaît comme la source, le foyer où prend naissance une chimérique « race méridionale » dont l’origine remonterait « aux temps indéterminés du rêve »3. Ainsi le mythe se crée dans cette suspension du temps où le passé redevient présent, où la légende prend l’allure de la vérité historique.

  • 4 Paul Redonnel, « Mouvement provincialiste », La Plume, Paris, n° 246, 15 juillet 1899, p. 474.
  • 5 Adrien van Bever, « Introduction », in Adrien van Bever (sous la direction de), Les Poètes du terro (...)
  • 6 Armand Praviel, « Préface », art. cit., p. 1.
  • 7 Ibid.

4Dès le début de cette renaissance de l’identité régionale, la culture littéraire et artistique joue un rôle primordial. Il s’agit d’affirmer la langue d’oc et d’y rallier l’élite, puis de consolider les mythes fondateurs, ce que reflètent notamment les arts plastiques. Magnifique programme de cette ambition, la salle des Illustres devient alors le symbole de cette renaissance culturelle. À la fin des années 1890, le mouvement provincialiste s’affirme hostile au symbolisme parisien et s’étend sur toute la France, opposant à l’élitisme intellectuel de la capitale l’âme naïve et les légendes populaires de la Province. S’écartant de l’influence parisienne, la province devient alors la source de la force vitale de la culture : « Toute une génération éprise d’Art et de Beauté s’efforce de donner une vitalité nouvelle aux provinces qui ne veulent plus être traitées en filles soumises »4. Une foi inébranlable enflamme un culte pour la « petite patrie », pour les traditions locales qui galvanisent la sensibilité populaire. En 1909, Adrien van Bever pouvait écrire dans Les Poètes du terroir : « Ce n’est point d’hier seulement que date la suprématie provinciale et que l’on est admis à penser que la petite patrie, le terroir si l’on veut, a été sans cesse le sous-sol qui a fait germer, croître, s’épanouir la plus belle flore du génie français »5. Ce vaste mouvement de décentralisation littéraire va produire la renaissance provinciale et provoque une efflorescence de revues : à Toulouse, les Essais d’Art jeune de Maurice et André Magre, et L’Effort qui lui succède, Le Midi fédéral qui eut pour collaborateurs tous les principaux écrivains méridionaux (Laurent Tailhade, Émile Pouvillon, Louis-Xavier de Ricard) et donne l’essor à une véritable résurrection poétique et littéraire. C’est l’amour fervent du sol natal qui semble relier des revues aussi différentes que Le Pays de France d’Aix-en-Provence, la Revue provinciale de Toulouse, Gallia du poète Touny-Léris, L’Action méridionale de Montpellier, L’Âme française de Perpignan. Partout, on exalte la puissance du Midi. En 1897, L’Âme latine d’Armand Praviel, « méridionale, décentralisatrice et toulousaine »6, résume dans une brillante synthèse les origines latines les plus profondément « ethniques » et les aspirations chrétiennes de la « Cité de Pallas »7 appelée à devenir un « centre de renaissance religieuse ». Mais cet idéalisme se révèle à double tranchant : en 1904, dans L’Épopée d’une race, ouvrage publié par les soins de L’Action méridionale, Charles Pontier chante, sur le modèle hugolien de La Légende des siècles, la beauté et la vigueur de la race latine. Cette tentative d’exalter l’esprit des ancêtres témoigne d’un retour aux sources, d’un repliement sur un passé glorieux et mythique.

  • 8 Dans ce cycle de peintures on peut citer : L’émigration des Tectosages (1683), La défaite de Ptolém (...)
  • 9 Cayla & Perrin-Paviot, Histoire de Toulouse depuis sa fondation jusqu’à nos jours, Toulouse, Bon et (...)
  • 10 M. Caze, « Aperçu général des travaux de la société archéologique depuis sa fondation », Mémoires d (...)
  • 11 Henri Ramet, Histoire de Toulouse, Toulouse, Tarride, 1935, p. 103.

5Ce régionalisme du Sud va puiser ses racines sentimentales dans le souvenir d’un âge d’or et d’une défiance, d’une hostilité envers le Nord. Capitale des Tolosates régénérée par la civilisation grecque, source de mystérieuses légendes aurifères, Toulouse la palladienne devint wisigothique avant de sombrer et de renaître avec les Comtes. Et c’est encore là qu’éclate la plus terrible des guerres, celle des Albigeois qui devait dévaster le Midi. Cette succession de faits mythiques et historiques apparaît comme l’anthologie des tendances centripètes alimentant le « patriotisme régional ». Au cours du temps, ils vont devenir partie intégrante du répertoire idéologique de l’art de Toulouse. La civilisation des Volques tectosages, présente dans l’iconographie toulousaine, est une des incarnations de ce répertoire. Au xviiie siècle, au Capitole, l’un des plus prestigieux chantiers de la ville, Antoine Rivalz et Antoine Coypel s’inspirent de cette mythologie revendiquée par la ville et les capitouls8. Succédant à cette période, la domination wisigothique, considérée comme « une des plus brillantes époques de l’histoire du Midi »9 par certains historiens du xixe siècle, devient le symbole de la civilisation et des arts avant de « sombrer à son tour sous le flot des Barbares du Nord »10. À partir du xixe siècle, les poètes et les historiens reprennent inlassablement la lutte séculaire du Nord contre le Sud. Le climat culturel se caractérise alors par une relation syncrétique au passé, par une prédilection pour la poésie et l’héroïsme de la « patrie romane » étouffée par le « rude gantelet de Montfort »11. La croisade contre les Albigeois est le mythe privilégié dans lequel s’incarne le Sud. La nostalgie de l’ancienne civilisation des troubadours et de la guerre qui l’a ruinée demeure vivace chez l’historien mystique Napoléon Peyrat qui fonde, avec son Histoire des Albigeois (1870-1872), une mythologie sombre et romantique du catharisme, une puissante et épique vision qui s’apparente à l’Iliade.

  • 12 Armand Praviel, « Le Livre du jour », L’Âme latine, Toulouse, mars 1909, p. 78.

6Dans la même lignée, La Conquête d’Albigeois, roman historique à la Walter Scott publié en 1890 par Ernest Roschach, exprime l’individualité immortelle d’une ville de fièvre et de gloire, détruite par les croisés. Cette exaltation du catharisme est à mettre en relation avec la crise de la défaite française de 1870 et l’expérience cataclysmique de la Commune et de sa terrible répression. L’effondrement du Second Empire prend une dimension eschatologique ; s’établit alors un parallèle entre la barbarie des hommes de Simon de Montfort et ceux de Bismarck. En 1909, Armand Praviel, commentant le roman de Maurice Barrès Colette Baudoche, écrivait : « l’antagonisme irréductible de la race latine et des hordes germaniques, le heurt impossible à éviter du Nord et du Midi […], la bataille éternelle de la civilisation et de la barbarie »12. Le poids de la croisade, l’humiliation qui la suivit, le ressentiment contre un vainqueur qui se montra impitoyable dans sa victoire pèsent lourdement sur le destin des hommes du Sud. Beaucoup d’auteurs subissent l’envoûtement de Peyrat, la vision d’une Aquitaine ruinée par les soudards :

  • 13 Alex Coutet, Toulouse, ville artistique, plaisante et curieuse, Toulouse, Librairie Richard, 1926, (...)

Ils accoururent d’un peu partout, les chevaliers féaux, d’au-delà de la Loire surtout, et c’est à proprement parler, la lutte du Nord contre le Midi, croisade peut-être, mais surtout déchaînement d’appétits et d’ambitions sur un pays riche, fertile, convoitise de comtés et de duchés où la vie est facile13.

7La croisade ne fut pas seulement un problème de justice et d’émancipation politique, mais aussi un problème moral et métaphysique. On retrouve, à chaque traumatisme de l’Histoire, ce sentiment d’une culpabilité collective, ce profond et irrésistible appel du passé. La croisade du Nord contre le Sud est un des problèmes complexes et riches du Midi où cristallisent les passions, où s’opposent des familles d’esprit, où s’affrontent des absolus, la mystique et la politique, et dont l’issue fatale est dans le sang. À la fin du xixe siècle, le Nord demeure toujours, pour les partisans de l’Occitanie, l’incarnation du cosmopolitisme, du matérialisme, de l’industrialisme et de l’affairisme cynique ainsi que le rappelle Jean Montray :

  • 14 Jean Montray, « Hommes et choses du midi – Poètes et lauréats du xve siècle », L’Âme latine, 1902, (...)

Nous, donc, qui, dans une époque de médiocrité universelle et de byzantinisme déliquescent, avons relevé la noble bannière du pays d’Oc, nous qui voulons ramener quelques effluves de l’air natal dans une atmosphère alourdie par les arômes étrangers…14

  • 15 Jean Montray, « Le Mouvement régionaliste », L’Âme latine, février 1904, p. 56.
  • 16 Lettre de Napoléon Peyrat à L.-X. de Ricard du3 décembre 1876, citée dans René Soula, Les Cathares (...)
  • 17 Charles Maurras, « Le Midi », La Gazette de France, 18 décembre 1903, n. p.
  • 18 Henri Focillon, La Peinture au xixe siècle – Du réalisme à nos jours, 1927 ; réédition : Paris, Fla (...)
  • 19 Jean-Paul Laurens, Le Comte de Toulouse, Raymond VI, en prière dans une église, 1912, huile sur toi (...)

8Prenant appui sur les « droits imprescriptibles de la race et de la langue »15, les Occitans s’identifient aux cathares et réclament leur indépendance d’avec le Nord. Né en 1875, le félibrige rouge de Fourés, de Louis-Xavier de Ricard et d’Antonin Perbosc convoque les Albigeois dans leur lutte contre l’Église et contre la barbarie nordique : « Il faut remonter jusqu’aux héros et aux poètes de la Défense Nationale, jusqu’aux martyrs de Montségur »16. Objets de toutes les convoitises politiques, les Albigeois incarnent tour à tour le repli sectaire, l’athéisme libertaire ou le républicanisme anticatholique du Midi fustigé par Charles Maurras17. Symbole vivant de cet antagonisme entre le Nord et le Sud, le bouillant Jean-Paul Laurens était évoqué en ces termes par Henri Focillon : « il était de ces Toulousains qui rêvèrent, avec un mélange d’ironie et de foi, de restaurer la secte des Cathares, pour venger les Albigeois et dompter Paris »18. En 1895, la salle des Illustres résonnait des luttes politiques du temps et des positions républicaines et anticléricales du peintre quand celui-ci peignait dans La Muraille les Toulousains assiégés par Simon de Montfort, présenté comme un ennemi de la République, ou lorsque, fasciné par le personnage de Raymond VI19, il le représentait dans un dessin illustrant l’Histoire de Toulouse de Louis Ariste (1898) ou dans une toile pour le décor du Capitole (1902).

  • 20 Alex Coutet, Toulouse, ouv. cité, p. 19.
  • 21 Voir Luce Barlangue, La Vie artistique à Toulouse de 1888 à 1939, thèse d’État, université de Toulo (...)
  • 22 Louis Théron de Montaugé, « Billets à dame Clémence », L’Âme latine, mars 1903, p. 116.
  • 23 Jean Montray, « La Prière à Dame Clémence », L’Âme latine, 1910, p. 136.
  • 24 Richard Muther, The History of Modern Painting, Londres, 1896, cité dans : Joyce Henri Robinson, «  (...)
  • 25 Ibid.

9C’est à partir de cette période qu’est régénéré le concept d’art méridional dans le sens d’une exaltation de la valeur de la « race », de l’Histoire et de ses principaux personnages. En 1624, Toulouse offrait déjà aux visiteurs un musée d’Art et d’Histoire au Capitole dont le conservateur était le peintre Jean Chalette. Sur les plafonds, régnaient déjà les êtres idéaux, héros et symboles divins, les personnages historiques personnifiant les vertus morales et civiques de la ville. Symptôme du renouveau de la pensée et de l’action toulousaines, ce travail immense et varié transforme et récupère les mythes régionaux. Au début des années 1890, les « grands peintres du terroir »20 consacrent la supériorité de Toulouse dans le domaine des arts. L’ensemble de la salle des Illustres consacré à l’Histoire et à la Poésie propose une élévation vers un idéal lumineux, triomphant et rayonnant. Saluant en 1891 cette prestigieuse commande qui devait donner aux Toulousains la fierté de leur ville, le président de la République Sadi Carnot déclarait : « Sous l’égide protectrice de nos institutions républicaines, Toulouse, la ville du “Gay savoir”, la cité palladienne, travaille dans un recueillement fécond et maintient son universelle réputation littéraire et artistique »21. Ce haut degré d’idéalisme se traduit par le biais de la stylisation décorative et ornementale du Capitole, des personnages historiques ou mythiques tels que la Belle Paule ou Clémence Isaure « la vierge immortelle »22, la « reine du sol latin »23, facteurs de cohésion de cette volonté collective qui fait de Toulouse le centre de ce mouvement de renaissance intellectuelle et spirituelle. Cette salle des Illustres, dont la décoration baigne dans un détachement souverain qui confère aux tableaux une grandeur mythique, évoque le déroulement émouvant et hiératique de mystères anciens. Les images de ce passé aboli qu’on tente de ressusciter participent de ce que Richard Muther appelle des « conférences archéologiques »24 ou des « récits historiques en prose »25 venus consolider le mythe régional. Les évocations irréelles d’Henri Martin et de Paul-Albert Laurens, le parti pris de composition héroïque, de chevauchée et de gloire d’un Jean-Paul Laurens dans un temps où l’histoire n’est encore que de la légende traduisent une nostalgie, un élan vers l’âme de tout un peuple.

  • 26 Louis Maisonneuve, L’Express du Midi, 4 juin 1929.
  • 27 Ibid.
  • 28 Louis Théron de Montaugé, « La Renaissance des cigales », L’Âme latine, Toulouse, juin 1909, p. 252

10Après le traumatisme de la Première Guerre mondiale, les légendes mystiques et populaires du passé national vont éclipser les vieilles traditions régionales. L’aura céleste de Jeanne d’Arc, canonisée en 1920 et promue sainte de la patrie, prend le pas sur les pures héroïnes cathares. Victime propitiatoire, Walkyrie catholique conduisant à la gloire les soldats morts à la bataille de la Marne dans les tableaux de Maurice Denis, la sainte Pucelle rayonne jusque sur le Midi et Toulouse en 1929 résonne des fêtes du Ve centenaire de la prise d’Orléans présidées par Gaston Doumergue. Lors du 700e anniversaire de la fondation de l’Université en juin 1929, l’image d’une ville plus chargée de malheurs qu’aucune autre, sombre, fanatique et ensanglantée, s’efface au profit d’un Sud empreint de beauté, d’humanisme et de religion. Symbole de cette tolérance, le bienheureux Bertrand de Saint-Geniès, « splendide exemplaire de la valeur de sa race »26 selon les mots de Louis Maisonneuve, est célébré, digne pendant de la « vaillante et douce vierge lorraine »27. Le Midi est invité à puiser sans retenue aux sources profondes de la tradition française, sans perdre son temps à des « apitoiements albigeois, mal fondés »28.

11Mais qu’on ne s’y trompe pas, le mythe cathare s’est ancré dans la littérature bien plus profondément qu’il n’y paraît. Durant l’entre-deux-guerres, les romans ésotériques se répondent, s’enrichissent mutuellement grâce à une puissance d’évocation rendue possible par la manne albigeoise. Ce fait est dû tout d’abord au duc de Lévis-Mirepoix et à son Montségur. Publié en 1924, ce roman montre le lien évident de la mythologie avec les idées de la théosophie et de la symbolique néoplatonicienne de la lumière. Dans les années 20-30, l’écrivain toulousain Maurice Magre, passionné d’occultisme, ranime les anciennes traditions mystiques et ésotériques, ainsi que l’enseignement théosophique dans ses romans albigeois, Le Sang de Toulouse et Le Trésor des Albigeois. À travers ces deux œuvres, il impose sa vision de l’essence spirituelle du mythe qui influe toujours sur l’imaginaire collectif. Ainsi s’ouvre la voie d’un renouveau fondamental du mythe.

  • 29 Maurice Magre, Lucifer, roman moderne, Paris, Albin Michel, 1929, p. 247.
  • 30 Maurice Magre, Le Sang de Toulouse, 1931 ; réédition, Verviers, Marabout, 1987, p. 15.

12Cette vision cosmique, solaire, du catharisme s’oppose aux visions marquées par la guerre de 14-18 et dépasse par sa force le pessimisme, le sentiment national de la blessure. Pour Maurice Magre, la mission messianique des « parfaits » ressuscitée dans le Paris des années 20 fait contrepoids à la décadence de la société de l’entre-deux-guerres dont il dresse un sombre tableau dans le roman Lucifer en 1929 : « les hommes sont vendus à l’esprit du mal, les uns pour l’argent, les autres par ambition, les autres pour le plaisir de la chair. […] Toute la société était diabolique »29. Société infernale qui ne manque pas d’évoquer le xiiie siècle ravagé par « le mal et la haine »30. On peut souligner le lien de la symbolique utilisée en 1931 dans Le Sang de Toulouse des sept figures du Mal avec les sept degrés du chemin initiatique tel qu’il est décrit dans l’ouvrage ésotérique de Christian Rosenkreutz avec la liturgie rosicrucienne. Simon de Montfort « le mauvais, plus hermétiquement enfermé dans sa haine que dans sa cuirasse », Foulque « l’hypocrite », Raymond « l’incertain », Tancrède avec « ses oreilles d’âne et ses yeux de hibou », Dominique « le chauve » et Innocent « avec sa tiare en plumes de paon » apparaissent comme les sept têtes de la Bête de l’Apocalypse. Le personnage principal, Dalmas Rochemaure, est une sorte d’archétype grâce auquel Magre représente le combat intérieur où les forces contraires du psychisme sont interchangeables.

  • 31 Ce nouvel idéalisme, très imprégné d’ésotérisme fin-de-siècle, renouait avec la branche Rose+Croix (...)

13Puisant lui aussi dans les sources ésotériques, l’Allemand Otto Rahn a mis en scène dans ses livres un étrange savoir. Un savoir syncrétique sur les religions anciennes et les pratiques de magie qui s’exprime dans son intérêt pour les mouvements hérétiques de l’histoire de la spiritualité31.

  • 32 Armand Praviel, La Ville rouge, Paris, La Renaissance du livre, 1933, p. 14.
  • 33 Louis Thomas, « Voyages – Notes d’un nationaliste », L’Âme latine, Toulouse, mai 1909, p. 163.
  • 34 Jean-Marc Bernard, « Questions littéraires – Enquête sur la littérature nationale », L’Âme latine, (...)
  • 35 Armand Praviel, Le Languedoc rouge, Toulouse, Privat, 1929, p. 94.
  • 36 Toulouse, Guide bleu illustré, Paris, Hachette, 1931, p. 10.
  • 37 Pierre Belperron, La Croisade contre les Albigeois, Paris, Plon, 1942, p. 9.

14Dans les années 20-30, le souvenir de la Grande guerre cristallise une perception tragique du temps et de l’histoire. Suivant cette dynamique, la vision infernale des romans albigeois de Maurice Magre rejoint les épopées historico-nationales à caractère apologétique de ses confrères. De fait, les écrits d’Armand Praviel participent à la constitution et à l’entretien d’une image à la fois terrifiante et héroïque, celle d’une « ville rouge ». Ici, la mort et l’histoire se conjuguent dans une geste frénétique qui rassure l’homme moderne en proie au doute. Le sang permet d’échapper à une modernité démoniaque pour conserver la sensation d’un âge idéal. L’image de Toulouse la sanglante se prolongera en topique. Au-delà de la référence biblique, il témoigne d’une interrogation sur le sens du sacrifice avec lequel se confond l’histoire. Construction chimérique, la ville révèle son atavisme sanglant avec le martyre de saint Saturnin, « sinistre présage d’égorgements inconnus »32 qui fonde son identité. Ce rouge ne cesse de resplendir en une apologétique populaire, une épiphanie de la ville avant de brûler et de s’étendre comme une lèpre. Rouge qui allume les antagonismes et les haines raciales. Dès les années 10, la flamme nationaliste s’embrase et dépasse les particularismes régionaux : « une image plus solide de la France se forme et se précise en nous, et notre patriotisme, de local et de particulier qu’il était, devient plus général, plus complet »33. Il s’agit, pour Jean-Marc Bernard, de renforcer l’unité du pays afin de lutter contre « des centres métèques qui empoisonnent les individualités nationales »34. Épousant les angoisses de son temps, Armand Praviel, exalte une « race toulousaine » dont l’origine remonterait « aux temps indéterminés du rêve et de la légende », affleurant dans un sombre tableau : « la colonie espagnole et italienne ne cesse de s’accroître ; les arabes, les noirs la renforcent tandis que la race autochtone disparaît tous les jours »35. Parmi ces écrits nous signalerons un Guide bleu anonyme de 1931 qui fournit des éléments de réponse à la sous-jacente et essentielle question identitaire. L’hérésie albigeoise y est décrite comme « un mélange d’arianisme, de judaïsme apporté par de nombreux juifs dans le midi » et, comble de l’horreur, comme « une sorte de communisme anarchiste »36 ! Pour Pierre Belperron, fustigeant la France libre, la croisade contre les Albigeois apparaît comme un châtiment métaphysique et cathartique visant à punir les débordements d’un Sud diminué par les jouissances matérialistes. Les Toulousains y sont décrits comme « des mangeurs d’ail, d’huile et de figues qui rappelaient aux croisés l’impureté du sang mauresque et juif et le Languedoc leur semblait une autre Judée »37.

  • 38 Armand Praviel, La Ville rouge, ouv. cité, p. 80.
  • 39 Tolosa, 7 avril 1935. Cité par Luce Barlangue dans : « Le décor peint et sculpté », Les artistes de (...)
  • 40 Alex Coutet, Toulouse, ouv. cité, p. XXII.

15Cette « individualité immortelle »38 forgée dans le sang du martyre et des guerres coexiste avec une claire vision poétique. À l’historicisme romantique de la salle des Illustres avec ses visions d’un passé héroïque succède une vision de fraternité et d’euphorie sentimentale, d’élévation spirituelle. De nouvelles conceptions artistiques voient le jour, montrent de plus en plus de vitalité. S’imposent alors la pensée et l’art de ces « artistes toulousains » qui intensifient le concept d’art régional dans le sens d’une exaltation de la culture antique, d’une prédilection pour la richesse du verbe dans la poésie et la forme décorative. Cette renaissance de l’identité toulousaine trouve son expression la plus achevée en 1935 avec la bibliothèque municipale, sorte d’anthologie d’« un art essentiellement local, puisque les manifestations en sont dues au crayon, au ciseau, d’artistes toulousains de naissance ou d’adoption »39. Renouant avec ce génie toulousain qu’Alex Coutet qualifie de « vigoureux et autoritaire, passionné d’équilibre et de clarté, profondément latin »40, les frises de Sylvestre Clerc La Symphonie toulousaine et Les compagnons du Gay savoir expriment une vie et une sensualité luxuriantes. Ardente et sereine dans sa nudité, Toulouse veille sur de nobles travaux et sur des contrées florissantes. Autre création du « génie d’Oc », le décor poétique de Marc Saint-Saëns, Le Parnasse occitan, de facture radieuse et d’inspiration néoplatonicienne, qui célèbre l’âme immortelle et créatrice de Toulouse avec une richesse d’imagination, une unité de rythmes, d’idées et de métaphores uniques.

16Le régionalisme apparaît donc comme un processus dynamique où tout est réinterprété, qui donne le jour à de nouveaux mythes, à des significations inédites où l’imaginaire historique est redéfini, où l’on fait renaître les grandes figures d’un patrimoine culturel toujours vivant. C’est aux intellectuels et aux artistes toulousains qu’il faut attribuer le mérite d’avoir organisé la pensée et l’imaginaire de la ville, d’en avoir défini les topoï historiques et artistiques. Car c’est toujours au bout de la quête, Toulouse déterminant sa place dans le monde.

17En témoigne, de nos jours, le livre de Dominique Baudis qui dresse un portrait de Raimond VI dit « le cathare » romantique et plein de force virile et d’une Toulouse éternelle déjà esquissée par Emmanuel Delbousquet et Maurice Magre. Ici, la ville est saisie dans ses multiples incarnations voluptueuses :

  • 41 Dominique Baudis, Raimond « le Cathare », Paris, Le Livre de poche, 1998, p. 45.

Sa beauté plus que millénaire défie le temps, offrant fièrement à la caresse des doigts ou des yeux sa belle chair de brique […] Rose et pâle comme la peau d’une fraîche pucelle sous les premiers rayons du matin.41

18L’ancien maire de Toulouse creuse encore la voie vers l’idéalisme du Sud, jusqu’à affirmer sa conviction que les Toulousains, ne serait-ce que par les tourments cruels qu’ils ont subis pendant les années d’oppression de la croisade, sont un peuple voué à la transcendance. Le comte de Toulouse devient alors le symbole de cette volonté collective qui, dans le sens de l’histoire, exige l’existence spirituelle la plus élevée pour son peuple.

19Cette vision poétique et mystique, idéaliste par essence, de la Cité repose sur une unité archétypale qui tente d’échapper à l’histoire. Or ce désir d’immobilité grandit en même temps que résonnent les voix collectives des nations tout au long du xixe siècle dans l’espace européen. C’est la littérature qui détermine les avatars du lieu à travers un chaos de discours et d’images.

  • 42 Cette situation s’accentuant récemment par la destruction de sites entiers lors de vastes opération (...)

20Or, en même temps que prolifèrent et s’enracinent les mythes originels, on observe la quasi destruction du patrimoine archéologique de Toulouse. Face à ce paradoxe, la question des origines de la ville se pose de façon plus exigeante42 : quel est le rapport de l’archéologie aux mythes de l’imaginaire local ?

21L’aura de la ville ancienne reste intacte, voire renforcée par l’étroite relation entre les littératures historico-mythiques et l’archéologie depuis les toutes premières recherches. Ce qui frappe avant tout, ce sont les rapports étranges et complexes qui unissent la littérature, l’archéologie et la politique d’aménagement de la ville dans le jeu de miroir de la modernité.

  • 43 Collectif, Toulouse et l’Antiquité retrouvée au xviiie siècle, Musée Saint-Raymond, catalogue d’exp (...)
  • 44 À l’image des personnages du Cabinet des Antiques de Balzac : Balzac, Le Cabinet des antiques, Pari (...)
  • 45 De 94 ap. J.-C.
  • 46 Dante, Purgatoire, XXI, 88-90 ; Nicolas Bertrand, La geste des Toulousains, p. 13 ; Antoine Noguier (...)
  • 47 Cl. Devic et J. Vaissète, Histoire générale de Languedoc, Toulouse, 1730, rééd. Privat, 1830.
  • 48 Ibid., Privat, 1830.

22Les prémices de l’archéologie régionale, au xviiie siècle, sont le fait d’humanistes et d’érudits dont les cabinets de curiosité sont composés d’« antiques »43, de curiosités naturelles (les documents préhistoriques faisant partie de la géologie44), le Moyen Âge étant délaissé au profit d’époques plus porteuses. C’est la « redécouverte » de l’épigramme de Martial45 offrant à Toulouse son titre de « palladienne » qui, associée à la référence erronée de Dante46, lui donne le statut de capitale culturelle et universitaire antique. L’Antiquité demeurera pour longtemps l’unique référent capable de confondre le réel et l’imaginaire dans une vision symbolique. Face à cette machine à enfanter des mythes, l’unique monument consacré à la ville et sa région est l’Histoire générale de Languedoc47, publiée en 1730, sans références archéologiques, dont la réédition de 1830 par Du Mège comblera partiellement les lacunes48.

  • 49 M. Caze, « Aperçu général de la Société archéologique depuis sa fondation », Bulletin de la Société (...)

23Par surcroît, dans l’année suivante, la création de la Société archéologique du Midi de la France à Toulouse épouse le mouvement national qui, lui-même, s’inspire de l’exemple anglais. Elle cherche à sauver le patrimoine des destructions, à valider les recherches historiques ; comme le déclare Caze en 1865 : « l’archéologie est le bras de l’histoire »49. Il s’agit enfin de pourvoir Toulouse de témoins matériels de sa grandeur passée :

  • 50 Ibid.

Il y avait une place pour les études spéciales de l’archéologie dans une cité dont l’origine se perd dans la nuit des temps, qui fut capitale de deux royaumes, qui toujours étendit au loin son rayon d’influence, et qui à vu s’accomplir les phases successives de trois civilisations. Il suffit de heurter le sol pour en faire jaillir de précieux dépôts, des ruines éparses qu’une main intelligente sait réunir, et qui deviennent ainsi les plus irrécusables témoignages des faits historiques ou méconnus ou dénaturés.50

24Les recherches de la Société archéologique du Midi se réduisent le plus souvent à des découvertes localisées ou fortuites, rarement méthodiques, préférant le spectaculaire et le bel objet rangé sous la bannière régionaliste. Jusqu’à la seconde moitié du xxe siècle, elles demeureront inchangées et intègreront tardivement les méthodes de fouille moderne (en regard de l’Europe ou du moins du reste de la France).

  • 51 Dominique Allios, Le vilain et son pot, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2004.

25Avec les années 1850, cependant, se produit un tournant : les recherches se clarifient, en même temps que se précise le caractère scientifique, menées par des personnalités comme Edmond Cabié51, Caraven-Cachin, Jules Momméja et Barrière-Flavy pour les périodes médiévale ou de l’Antiquité tardive. Mais elles sont emportées par le flot d’une abondante littérature pseudo-archéologique qui submerge toutes les revues locales.

26Cette production suivait une démarche hypothético-déductive, déformant les faits observés pour asseoir des interprétations à caractère méridionaliste. En réalité, cette pratique dominante se nourrissait de tout l’environnement culturel et littéraire que nous avons vu, sans se confronter aux sources, tout en restant repliée sur le plan local.

  • 52 La liste de ces pratiques est considérable, par exemple on peut citer, J.-P. Cros, « Mémoire sur le (...)

27Désormais, toutes les recherches se concentrent sur les quatre périodes élues pour leur valeur apologétique : les fondateurs gaulois, la Palladia Tolosa romaine, les Wisigoths et, bien entendu, le comté de Toulouse. Brillantes, promises à des avenirs exceptionnels, elles sont toutes annihilées par des hordes intrusives qui se convertissent par la suite au génie local. Les autres périodes (par exemple le Néolithique, l’Âge du Bronze, le bas Moyen Âge et la Renaissance) sont quasiment délaissées, si l’on met à part la Préhistoire ancienne. Quant aux découvertes qui ne peuvent être datées ou attribuées à une culture précise, elles sont assimilées comme wisigothiques ou cathares52.

28Cependant ces périodes élues n’offrent que peu de traces et se laissent mal appréhender. De plus, leur évocation complexe et diverse est déroutante et suscite bien des interrogations : où sont passés les vestiges tectosages, romains et wisigoths ? L’archéologue (qui en ces temps privilégiait le monumental) est confronté, dès le début du xixe siècle, à ce hiatus existant entre l’histoire et le terrain. Si le matériel de l’Antiquité n’offre aucune difficulté à être identifié, les productions protohistoriques et médiévales donnent lieu à des interprétations souvent délirantes. Les hypothèses ou les clefs interprétatives sont aisées à distinguer : religieuses et mystiques, apologétiques et ethnocentriques.

  • 53 Les rapports de fouilles, appelés Documents de synthèse final, ne peuvent se substituer à des étude (...)

29Cette orientation de la recherche va rester tristement homogène jusque dans les années 1960-70, qui voient les destructions urbaines sensibiliser l’opinion : la porte romaine de la place du Capitole, les quartiers antiques du quartier Saint-Georges et d’Ancely, etc. Or ces manques et ces échecs coïncident exactement avec un investissement de l’État qui s’oppose à la municipalité, souvent au détriment des associations ou des initiatives locales, pour aboutir dans les années 1990 à une archéologie « professionnelle de sauvetage » qui semble, à première vue, dégagée des convictions locales. Les grandes opérations de sauvetage sur la ville ont commencé en 1992 avec les fouilles de la place Saint-Étienne de Toulouse et se poursuivent à un rythme régulier, amassant une quantité considérable de documents et d’artefacts, qui, pour l’heure, n’ont donné lieu à aucune monographie exhaustive53, alors que sont systématiquement détruites les découvertes mises au jour. La seule source d’information accessible au public est constituée par les expositions qui, inlassablement, s’emparent du légendaire trésor de Toulouse et le déclinent à travers d’innombrables ouvrages dont les titres sont éloquents : L’or de Tolosa – Palladia Tolosa, Toulouse Romaine – Tolosa, nouvelles recherches sur Toulouse et son territoire – De Toulouse à Tripoli, la puissance toulousaine au xiie siècle, huit-centième anniversaire de l’indépendance municipale – Archéologie et vie quotidienne aux xiiie-xive siècles en Midi-Pyrénées, etc.

30Malgré la qualité des travaux de recherche des scientifiques, il est à regretter que cette riche production serve à une mise en scène du mythe qui fait la part belle à l’imaginaire tout en restant hermétique au profane dans la partie scientifique des catalogues.

31S’épanouissent encore de nos jours les quatre grandes périodes fondatrices de l’identité toulousaine, faisant l’objet d’approches particulières qui atteignent vite leurs limites.

  • 54 Les pillards venaient d’Asie Mineure, Michel Labrousse, Toulouse antique, ouv. cité, p. 129-136.

32Cela est particulièrement sensible dans l’évocation des Volques Tectosages qui sont associés à diverses légendes, dont la plus fameuse reste « l’or de Toulouse », issu du pillage du temple de Delphes en 278 av. J.-C., qui aurait été caché dans un lac souterrain, puis volé par les Romains, n’apportant que ruine et malédiction. Démystifiée dans les années 1820 par Alexandre Du Mège, puis en 1960 par Michel Labrousse54, la légende de cet or fascine encore et l’exposition L’or de Tolosa joue sur cette ambiguïté, même si elle est vigoureusement démentie par Daniel Cazes, conservateur du Musée Saint-Raymond, dans l’avant-propos du catalogue :

  • 55 Collectif, L’or de Tolosa, catalogue d’exposition, Musée Saint-Raymond, 2002, Éd. Odyssée, 2001, D. (...)

Chacun se souvient d’avoir lu un jour quelques pages, quelque article de journal ou de revue sur le sujet, d’en avoir entendu de multiples versions, souvent enrichies par l’exagération méridionale ou une imagination stimulée par la fascination qu’exerce le précieux métal.
Comment […] arrêter cette rumeur qui s’élève encore depuis les strates les plus profondes de l’histoire de Toulouse, l’empêcher de provoquer des interrogations et de susciter de nouvelles recherches ?55

  • 56 Collectif, Gaulois des pays de Garonne, iie-ier siècle avant J.-C., catalogue d’exposition, Musée S (...)

33La légende ou le mythe sont donc générés par la ville elle-même ; celui des ancêtres fondateurs56 est une source d’admiration pour le maire de la ville, Philippe Douste-Blazy :

  • 57 Collectif, Gaulois des pays de Garonne, catalogue d’exposition, musée Saint Raymond, Toulouse, 2005 (...)

Beaucoup d’entre nous sont les descendants des Gaulois des pays de Garonne […], nos lointains aïeux étaient issus de tribus dont les noms parlent encore à notre imaginaire : Cadurques, Nitiobroges, Pétrocores, Bituriges, Vivisques… Sans oublier ces fameux Volques Tectosages, qui posèrent les fondations de notre Tolosa. […] Bien avant la brillante civilisation occitane, ces Gaulois étaient des artistes, des gens de goût, raffinés et à mille lieux des clichés toujours en vogue…
Grande plate-forme d’échanges, Tolosa, grâce à ses négociants gaulois, pérennisait déjà la vocation qui est la sienne aujourd’hui.
[…] [L’exposition] atteint son but : nous renvoyer à nous-mêmes, à un riche passé que l’on a tendance à oublier mais qui reste fondateur de notre identité.57

34La « ville » gauloise porte donc en germe les prédispositions qui en feront cette capitale mondiale de l’aéronautique…

35Source perpétuelle du renouvellement du Mythe, l’Antiquité demeure la période de référence absolue pour Toulouse. Pourtant, en 1935, Henry Ramet observe la disparité entre l’aura antique de la cité et ses faméliques vestiges :

  • 58 H. Ramet, Histoire de Toulouse, 1935, rééd. Toulouse, 1994, p. 16.
  • 59 Ibid., p. 22.

Moins heureuse que Nîmes, Arles ou même Autun et Bordeaux, la Tolosa romaine n’a conservé debout aucun des monuments de son antique splendeur, ni le Capitole […] ni la curie, ni les temples ni l’amphithéâtre, ni les bains publics, bâtiments que l’on trouvait dans toute ville romaine58… La curie, le théâtre, les bains publics, tout a disparu sans laisser aucune trace.59

36Mais le prestige de la ville continue de rayonner au-delà de ce constat, et Palladia Tolosa demeure une capitale dans la pensée collective.

  • 60 Ibid., p. 3.
  • 61 M. Labrousse, Toulouse antique, des origines à l’établissement des Wisigoths, Paris, 1968. p. 277.

37En 1968, le premier inventaire critique des vestiges antiques de la cité est dressé par Michel Labrousse : « les textes littéraires sont indigents, l’épigraphie d’une exceptionnelle pauvreté et les vestiges de monuments subsistant quasiment misérables »60. L’édification de la plus vaste muraille de la Gaule est considérée par ce chercheur comme étant le fruit d’une entreprise gratuite ou somptuaire de la part des Romains61. À l’intérieur de la cité, la rareté des vestiges, conséquence d’une forte présence barbare, de récupérations et de destructions systématiques, n’interdit pas d’accorder toutefois à la ville une certaine importance régionale :

  • 62 Ibid, p. 591.

Du ier au ve siècle de notre ère, Toulouse est, à coup sûr, une grande ville et une ville riche. De Pomponius Mela à Ammien Marcelin, géographes et historiens sont unanimes à cet égard et leur témoignage se trouve corroboré par le peu qui nous reste des monuments toulousains. Sans prétendre rivaliser avec Narbonne ou avec Nîmes, la ville a reçu la parure d’édifices qui convenait à une grande cité de la Narbonnaise.62

  • 63 Collectif, Tolosa, nouvelles recherches sur Toulouse et son territoire dans l’Antiquité, Coll. Écol (...)
  • 64 Métropolis, catalogue d’exposition, Toulouse, 2007, p. 73.
  • 65 Collectif, « Le capitolium de Toulouse, l’église saint Pierre et saint Géraud et le martyre de sain (...)

38La carte des découvertes antiques ne paraît pas moins un peu clairsemée63 pour le profane64. En 1992, les fouilles menées sous la place Esquirol ont révélé la base d’un grand temple urbain de 27 mètres de largeur. Dans les articles consécutifs à ces travaux, l’accent sera porté sur le martyre de saint Saturnin et l’invention de son crâne, plus que sur l’édifice aux marches assassines !65

  • 66 J. Schmidt, Le royaume wisigoth de Toulouse, Perrin, Paris, 1992, p. 37.

39Quant au règne des Wisigoths, rien ne semble faire obstacle à son épanouissement dans la cité. Pendant 89 ans, la ville fut la capitale de ce royaume barbare (de 418 à 507), mais elle n’a pas livré de vestiges matériels ou archéologiques dignes de ce nom. L’hypothèse généralement admise par la communauté scientifique est que les populations ont adopté le mode de vie et la culture matérielle romaine. De quoi alimenter le fantasme d’une civilisation raffinée, rompue aux subtilités d’un art de cour brillant comme en témoignent les auteurs contemporains : « On peut penser aussi qu’à la cour des rois wisigoths, dont on ignore le lieu exact de résidence, se déroulent non seulement des conseils des ministres, mais également des réceptions, des banquets, des fêtes »66.

40Lors des fouilles de sauvetage sur le site de l’ancien hôpital Larrey, en 1988, la découverte des niveaux de fondations de grandes salles basilicales à caractère somptuaire est source de controverse. Datés du ve siècle par les archéologues, les vestiges n’ont livré aucun document quant à leurs occupants et leurs fonctions pour accréditer la thèse wisigothique : les fondations des bâtiments, n’ayant livré aucun niveau de sol ni de vestiges directeurs précis, sont insérés dans une fourchette chronologique large, déployée sur toute « l’antiquité tardive ». Il peut s’agir de constructions renvoyant aux mondes romain ou barbare (c’est-à-dire wisigothique puis franc), venant appuyer la thèse wisigothique dans la Nouvelle Histoire de Toulouse parue en 2002 :

  • 67 J.-M. Pailler, « L’Antiquité tardive, mutations et embellies », dans M. Taillefer (dir.), Nouvelle (...)

Il a été possible de dater l’ensemble de ces vestiges, d’une façon assez large, du ve siècle. Leur identification prête davantage à discussion […] Tranchons d’un mot : d’un palais et donc, en plein ve siècle, du palais des Wisigoths […] C’est là, n’en doutons pas, que s’est tenu pendant près d’un siècle le siège d’un pouvoir dont les limites s’étendaient de la Loire à l’Espagne.67

41La destruction des vestiges, le caractère urgent des opérations contrastent avec l’importance supposée des découvertes, il en résulte un sincère et légitime questionnement face à ces points délicats.

  • 68 J. Bordenave, Aux racines du mouvement cathare : la mentalité religieuse des paysans de l’Albigeois (...)

42Les cathares n’ayant laissé aucune trace archéologique (à l’exception des pseudo « châteaux cathares »), un glissement s’opère vers le comté toulousain qui synthétise la gloire, la puissance du Midi et le foyer du catharisme. Pour l’archéologie cultuelle, Toulouse et sa région possèdent une longue tradition d’interprétation religieuse abusive des sites archéologiques : les silos gaulois de Toulouse et de Vieille-Toulouse seraient des fosses à offrandes ou des sépultures, les fosses des cultes chtoniens du Moyen Âge annonçant le catharisme (en fait il s’agit de dépotoirs68) et plus récemment, la découverte ou « l’invention » du crâne de saint Sernin, que nous avons précédemment évoquée. Quant au cathare, il doit de même être trouvé, fouillé, inventé si besoin. L’ouvrage de Bordenave, publié en 1973, Aux racines du mouvement cathare : la mentalité religieuse des paysans de l’Albigeois médiéval, en constitue un sommet, utilisant pêle-mêle des sites et des collections sans stratigraphie ni chronologie. Il faut noter cependant que l’auteur avait l’honnêteté d’affirmer clairement ses hypothèses, que son travail était celui d’un amateur et que les éléments de datation pour les périodes médiévales s’avéraient inexistants.

  • 69 Collectif, Archéologie du village déserté, Paris, EHESS (Cahiers des Annales), 1970.
  • 70 Ibid.

43Face à ce manque de repères chronologiques, les xiie-xiiie siècles ont offert des périodes d’élection pour les archéologues qui ont ainsi « douziémisé » des productions matérielles allant de la période carolingienne jusqu’à la période gothique69. Période spirituelle et profonde, choisie pour exprimer les plus hautes aspirations de la ville, ce Moyen Âge d’élection, ramené à son essence glorieuse et idéaliste, a pesé sur la recherche. Il faut en effet attendre une vingtaine d’années après l’arrivée de l’équipe franco-polonaise en 1964 sur les fouilles de Montaigut dans le Tarn70 pour que l’archéologie médiévale soit réellement lancée à Toulouse.

  • 71 Collectif, Le Comte de l’an mil (Aquitania), sup. 8, 1996.
  • 72 Ibid., introduction par D. Baudis, p. 5.

44Trente deux ans plus tard, l’ouverture d’un sarcophage, placé dans un enfeu de la basilique Saint-Sernin de Toulouse, en a été un événement médiatique71 et a inspiré Dominique Baudis : « Les Toulousains présents lors de l’ouverture du sarcophage ont ressenti l’émotion intense que procure une rencontre avec l’Histoire »72.

  • 73 « Il apparaît finalement que le sarcophage a livré les restes d’au moins vingt sujets, mélangés à d (...)
  • 74 « Reste à déterminer, autant qu’il sera possible, qui est le personnage principal, celui dont la sé (...)
  • 75 Sur l’invention des reliques voir : Alain Schnapp, La Conquête du passé, Aux origines de l’archéolo (...)

45La rencontre avec l’Histoire, c’est-à-dire avec le Comte, se révèlera en effet passionnante : l’étude minutieuse de la tombe dévoile une vingtaine de sujets mêlés aux restes de rongeurs, d’insectes et de divers détritus73. Le squelette le plus complet, trouvé au fond du sépulcre correspond à celui d’un homme de grande taille (plus de 1,85 mètre) de moins de quarante ans, qui boitait, souffrait d’une scoliose, décédé au printemps à la suite d’une tumeur cérébrale. Détail d’importance, les indications chronologiques l’excluent de la liste des comtes de Toulouse74. Mais, pour les auteurs de ces recherches, il s’agit forcément d’un comte : son tombeau, son emplacement contre l’église, ses habits de luxe, en particulier une paire de chausses rouges, deviennent, de fait, des preuves. Quel était le but de cette opération : étudier une sépulture privilégiée des xie-xiie siècles, ou inventer un comte75 ?

  • 76 Collectif, Archéologie et vie quotidienne aux xiiie-xive siècles en Midi-Pyrénées, catalogue d’expo (...)

46Dans les mêmes années, nombre d’expositions ont célébré la grandeur de la ville médiévale, plus précisément, les périodes comprises entre le xie et le xive siècle, de Raymond IV à l’entrée de Charles VI à Toulouse76.

  • 77 Ibid., p. 97, P. Garnier, « Métrologie et conception architecturale du château de Montségur », p. 1 (...)
  • 78 Par stratigraphie relative ou par des datations absolues comme le C14 par exemple.
  • 79 « Rivalités qui opposent dans cette micro région deux puissants propriétaires fonciers », site de V (...)

47Malgré une volonté affichée de faire œuvre scientifique, on y retrouve les mêmes topoï : Montségur a fait l’objet de trois notices dans la même exposition Archéologie et vie quotidienne au xiiie-xive siècles en Midi-Pyrénées77 ! Dans les catalogues, le matériel archéologique présenté est glissé dans les tranches « xiie-xiiie siècles », « ou xive-xve siècles », alors que dans l’ensemble, il ne bénéficiait pas de datation78. Les anachronismes relevés dans cette exposition furent justifiés par le concept « de particularités locales », c’est-à-dire d’un régionalisme à une échelle quasi cantonale79.

48En 1989, le huit-centième anniversaire des libertés municipales toulousaines fit l’objet d’une exposition commémorative :

  • 80 Collectif, De Toulouse à Tripoli, la puissance Toulousaine au xiie siècle, catalogue d’exposition, (...)
  • 81 Ibid., p. 13.

Ce fut à l’issue d’un très violent conflit, ce pacte du 6 janvier 1189 par lequel Raymond V, Comte de Toulouse, confirmait leur liberté municipale à ses capitulaires et bourgeois. Toutes les prérogatives judiciaires, administratives, politiques, et économiques essentielles leur étaient reconnues80. […]
Une exposition qui se fonde sur l’art roman, sur les exceptionnelles collections toulousaines, et en appelle à eux comme à l’un des facteurs de l’histoire de la puissance toulousaine, de son expression, ne fût-elle que symptomatique.81

  • 82 Collectif, Métropolis, transports souterrains et archéologie urbaine à Toulouse, 1990-2007, catalog (...)

49Cependant on ne distingue rien de la création ou de la production de la ville elle-même ou de ses capitouls. Le propos reprend donc la vieille distinction entre un art roman issu des gloires toulousaines comtales et un art gothique intrusif, venu du nord. Dans ce même esprit de glorification, l’exaltation de la magnanimité et de la puissance des comtes de Toulouse contraste avec le silence pudique recouvrant les massacres de la première croisade. On peut ainsi trouver une stupéfiante conclusion, lors de l’exposition réalisée à la suite des travaux du métro en 2007 : « Une ville de brique, capitale régionale et centre universitaire… Toulouse actuelle est-elle différente de Toulouse médiévale ? »82

50Le récent « renouvellement » de l’histoire de Toulouse par l’archéologie suit donc de près la tradition, les analyses des découvertes tendant à être plus des confirmations de cette dernière que des remises en questions. La discipline n’ose peut-être pas apporter une voix différente ou un regard critique en raison de ses nombreuses faiblesses méthodologiques (la tradition française l’inféodant à l’histoire). Depuis vingt ans, le développement de l’archéologie dite de « sauvetage » a pour contrepartie politique la destruction des vestiges fouillés générant des réactions tardives, comme on peut le lire en 2006, lors de l’anniversaire du centenaire des Toulousains de Toulouse :

  • 83 A. Hermet, « Les Toulousains de Toulouse, cent ans d’Histoire », Collectif, Toulouse, pages d’Histo (...)

Ainsi a-t-on vu disparaître, morceaux après morceaux, une grande partie du rempart romain, une porte antique lors du creusement du parc automobile du Capitole en 1970. Anéanti également le vaste podium mis au jour, place Esquirol en 1992.83

51Ces destructions interdisent toute possibilité de contrôle ou de vérification des données, laissant donc la place aux mythes renouvelés du palais des Wisigoths, du crâne de saint Saturnin et du comte sans nom !

52Toulouse, à l’image de l’Europe, du xixe au xxie siècle, est marquée par un champ de perturbation des valeurs, déchirée entre l’aspiration au progrès et le conservatisme. De nouvelles méthodes d’investigation scientifique coexistent avec le retour au passé et le respect de la tradition qui s’inscrivent dans un vaste mouvement de renaissance nationale. Un même principe idéologique régit des villes ou des pays en apparence différents : il s’agit de restaurer les fondements du mythe face à l’histoire vécue comme un processus de dégradation.

53De l’hypothèse à l’affirmation, du mythe au dogme, les cas toulousains sont des révélateurs particulièrement sensibles, mêlant tout à la fois les excès d’une discipline trop descriptive et autarcique. C’est là une conséquence d’une absence de politique archéologique de la ville, de mise en valeur et de conservation des vestiges exhumés : pour preuve, en réponse à l’afflux de milliers d’objets et d’artefacts issus des fouilles, de nouveaux entrepôts ont été crées à défaut de musées ! De telles destructions patrimoniales permettent aussi une revitalisation des mythes. Ainsi se pérennise une société qui maintient l’ordre fictif d’une l’idéologie dominante face à une modernité du changement. Utopie pour utopie, l’archéologie, pas plus qu’une autre discipline n’échappe aux tentatives de réduction politique et l’on n’est pas surpris de voir se rejoindre les fantasmes d’une science pure et d’une civilisation idéalisée qui s’offrent à notre société en mal de rêves. Elles renvoient à une partialité, faisant partie d’un « inconscient-cité » privilégiant le spectaculaire et le merveilleux. Si Toulouse est grande, c’est par ses mythes, peut-être ses plus belles créations collectives…

Notes

1 Emmanuel des Essarts, « Armand Silvestre », L’Âme latine, Toulouse, septembre 1904, p. 529.

2 Armand Praviel, « Préface », L’Âme latine, Toulouse, janvier 1902, p. 2.

3 Armand Praviel, Le Languedoc rouge, Paris, Privat, 1929, p. 94.

4 Paul Redonnel, « Mouvement provincialiste », La Plume, Paris, n° 246, 15 juillet 1899, p. 474.

5 Adrien van Bever, « Introduction », in Adrien van Bever (sous la direction de), Les Poètes du terroir du xve siècle au xxe siècle, tome I, Paris, Librairie Charles Delagrave, 1909, p. V.

6 Armand Praviel, « Préface », art. cit., p. 1.

7 Ibid.

8 Dans ce cycle de peintures on peut citer : L’émigration des Tectosages (1683), La défaite de Ptolémée, roi de Macédoine (Antoine Rivalz, 1702), Le pillage du temple de Delphes (Antoine Coypel, 1684), Théodoric menant Littorius (Rivalz, 1705).

9 Cayla & Perrin-Paviot, Histoire de Toulouse depuis sa fondation jusqu’à nos jours, Toulouse, Bon et Privat, 1839 ; réédition, Toulouse, Éditions de la Tour Gile, 1992, p. 95.

10 M. Caze, « Aperçu général des travaux de la société archéologique depuis sa fondation », Mémoires de la Société archéologique du Midi de la France tome VIII, 1861-1865, p. 102.

11 Henri Ramet, Histoire de Toulouse, Toulouse, Tarride, 1935, p. 103.

12 Armand Praviel, « Le Livre du jour », L’Âme latine, Toulouse, mars 1909, p. 78.

13 Alex Coutet, Toulouse, ville artistique, plaisante et curieuse, Toulouse, Librairie Richard, 1926, p. 150.

14 Jean Montray, « Hommes et choses du midi – Poètes et lauréats du xve siècle », L’Âme latine, 1902, p. 174.

15 Jean Montray, « Le Mouvement régionaliste », L’Âme latine, février 1904, p. 56.

16 Lettre de Napoléon Peyrat à L.-X. de Ricard du3 décembre 1876, citée dans René Soula, Les Cathares entre légende et histoire, Toulouse, Institut d’Estudis Occitans, Textes et documents, 2005, p. 67.

17 Charles Maurras, « Le Midi », La Gazette de France, 18 décembre 1903, n. p.

18 Henri Focillon, La Peinture au xixe siècle – Du réalisme à nos jours, 1927 ; réédition : Paris, Flammarion, 1991, p. 236.

19 Jean-Paul Laurens, Le Comte de Toulouse, Raymond VI, en prière dans une église, 1912, huile sur toile, 0,55 x 0,38 m, Beauvais, Musée départemental de l’Oise.

20 Alex Coutet, Toulouse, ouv. cité, p. 19.

21 Voir Luce Barlangue, La Vie artistique à Toulouse de 1888 à 1939, thèse d’État, université de Toulouse-Le Mirail, 1989, p. 31.

22 Louis Théron de Montaugé, « Billets à dame Clémence », L’Âme latine, mars 1903, p. 116.

23 Jean Montray, « La Prière à Dame Clémence », L’Âme latine, 1910, p. 136.

24 Richard Muther, The History of Modern Painting, Londres, 1896, cité dans : Joyce Henri Robinson, « La Représentation de l’âge d’or », Francis Auburtin 1866-1930, Le symboliste de la mer, Paris, Délégation à l’action artistique de la ville de Paris, 1988, p. 66.

25 Ibid.

26 Louis Maisonneuve, L’Express du Midi, 4 juin 1929.

27 Ibid.

28 Louis Théron de Montaugé, « La Renaissance des cigales », L’Âme latine, Toulouse, juin 1909, p. 252.

29 Maurice Magre, Lucifer, roman moderne, Paris, Albin Michel, 1929, p. 247.

30 Maurice Magre, Le Sang de Toulouse, 1931 ; réédition, Verviers, Marabout, 1987, p. 15.

31 Ce nouvel idéalisme, très imprégné d’ésotérisme fin-de-siècle, renouait avec la branche Rose+Croix de Joséphin Péladan par son interprétation latine et catholique du cœur de la culture occidentale. Dans la Croisade contre le Graal, essai poétique et pseudo-historique publié en 1933, Rahn n’hésite pas à assimiler le château de Montségur, « temple occitan de l’amour suprême », à Montsalvage, le légendaire château du Graal qui allait obséder les nazis. Otto Rahn, Croisade contre le Graal (Grandeur et chute des Albigeois), 1933 ; réédition, Paris, Stock, 1974, p. 25.

32 Armand Praviel, La Ville rouge, Paris, La Renaissance du livre, 1933, p. 14.

33 Louis Thomas, « Voyages – Notes d’un nationaliste », L’Âme latine, Toulouse, mai 1909, p. 163.

34 Jean-Marc Bernard, « Questions littéraires – Enquête sur la littérature nationale », L’Âme latine, Toulouse, mai 1909, p. 169.

35 Armand Praviel, Le Languedoc rouge, Toulouse, Privat, 1929, p. 94.

36 Toulouse, Guide bleu illustré, Paris, Hachette, 1931, p. 10.

37 Pierre Belperron, La Croisade contre les Albigeois, Paris, Plon, 1942, p. 9.

38 Armand Praviel, La Ville rouge, ouv. cité, p. 80.

39 Tolosa, 7 avril 1935. Cité par Luce Barlangue dans : « Le décor peint et sculpté », Les artistes de la bibliothèque municipale, Toulouse 1935, Centenaire de la Société des Artistes Méridionaux, Bibliothèque de Toulouse, 2005, p. 34.

40 Alex Coutet, Toulouse, ouv. cité, p. XXII.

41 Dominique Baudis, Raimond « le Cathare », Paris, Le Livre de poche, 1998, p. 45.

42 Cette situation s’accentuant récemment par la destruction de sites entiers lors de vastes opérations urbaines. Les vestiges antiques les plus notables sont des fragments de muraille romaine (place du Capitole, au Rectorat, à l’Institut catholique) et l’amphithéâtre de Purpan.

43 Collectif, Toulouse et l’Antiquité retrouvée au xviiie siècle, Musée Saint-Raymond, catalogue d’exposition, Toulouse, 1989.

44 À l’image des personnages du Cabinet des Antiques de Balzac : Balzac, Le Cabinet des antiques, Paris, 1830

45 De 94 ap. J.-C.

46 Dante, Purgatoire, XXI, 88-90 ; Nicolas Bertrand, La geste des Toulousains, p. 13 ; Antoine Noguier, Histoire Tolosaine, p. 46 ; M. Labrousse, Toulouse antique, des origines à l’établissement des Wisigoths, Paris, 1968, p. 506-508.

47 Cl. Devic et J. Vaissète, Histoire générale de Languedoc, Toulouse, 1730, rééd. Privat, 1830.

48 Ibid., Privat, 1830.

49 M. Caze, « Aperçu général de la Société archéologique depuis sa fondation », Bulletin de la Société archéologique du Midi de la France, t. VIII, 1861-1865, p. 97.

50 Ibid.

51 Dominique Allios, Le vilain et son pot, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2004.

52 La liste de ces pratiques est considérable, par exemple on peut citer, J.-P. Cros, « Mémoire sur les cavernes tumulaires de la Fronde », Bulletin de la Société archéologique du Midi de la France, Toulouse, 1837, p. 129-139 ; il est vraisemblable qu’il s’agisse d’un site de l’âge du fer.

53 Les rapports de fouilles, appelés Documents de synthèse final, ne peuvent se substituer à des études ou des recherches poussées exhaustives et systématiques. Notamment par les lacunes perceptibles dans les études de collections de mobiliers et l’absence de tableaux stratigraphiques. Or cette documentation constitue l’unique trace des structures détruites.

54 Les pillards venaient d’Asie Mineure, Michel Labrousse, Toulouse antique, ouv. cité, p. 129-136.

55 Collectif, L’or de Tolosa, catalogue d’exposition, Musée Saint-Raymond, 2002, Éd. Odyssée, 2001, D. Cazes, « Avant-propos », p. 9

56 Collectif, Gaulois des pays de Garonne, iie-ier siècle avant J.-C., catalogue d’exposition, Musée Saint-Raymond, Toulouse, 2005.

57 Collectif, Gaulois des pays de Garonne, catalogue d’exposition, musée Saint Raymond, Toulouse, 2005, Toulouse 2004, « Introduction » par Ph. Douste-Blazy, maire de Toulouse, ministre de la Santé et de la Protection sociale, p. 7.

58 H. Ramet, Histoire de Toulouse, 1935, rééd. Toulouse, 1994, p. 16.

59 Ibid., p. 22.

60 Ibid., p. 3.

61 M. Labrousse, Toulouse antique, des origines à l’établissement des Wisigoths, Paris, 1968. p. 277.

62 Ibid, p. 591.

63 Collectif, Tolosa, nouvelles recherches sur Toulouse et son territoire dans l’Antiquité, Coll. École Française de Rome, 281, Rome 2002.

64 Métropolis, catalogue d’exposition, Toulouse, 2007, p. 73.

65 Collectif, « Le capitolium de Toulouse, l’église saint Pierre et saint Géraud et le martyre de saint Saturnin : nouvelles données », Mémoires de la Société archéologique du Midi de la France, t. LXV, 2005, Toulouse, p. 33. Un fragment de crâne découvert dans un remblai est considéré comme étant celui du saint : « … La présence inattendue d’un crâne humain, isolé dans un remblai de démolition du ve siècle au pied de l’escalier monumental. Il s’agit d’une calvaria d’adulte mâle [ !…]. Il ne peut s’agir d’une inhumation stricto sensu ; c’est par ailleurs le seul ossement humain découvert en contexte sur le site. Sa présence à l’endroit précis où d’après les sources, le crâne de Saturnin avait éclaté, pourrait être intentionnelle, à une époque où le culte de l’évêque, à travers ses reliques, est en plein essor. Il serait bien aventureux d’aller plus loin dans l’analyse ».- J.-C. Arramond et J.- L. Boudartchouk, Le souvenir de Capitolium de Toulouse à travers les sources de l’Antiquité tardive et du Moyen Âge, p. 27, t. 3. Parking Esquirol, Toulouse31 Rapport de Fouilles, dir. J.-C. Arramond, SRA, Toulouse, 1993,3 vol.

66 J. Schmidt, Le royaume wisigoth de Toulouse, Perrin, Paris, 1992, p. 37.

67 J.-M. Pailler, « L’Antiquité tardive, mutations et embellies », dans M. Taillefer (dir.), Nouvelle histoire de Toulouse, Toulouse, 2002, p. 41.

68 J. Bordenave, Aux racines du mouvement cathare : la mentalité religieuse des paysans de l’Albigeois médiéval, Toulouse, Privat, 1973.

69 Collectif, Archéologie du village déserté, Paris, EHESS (Cahiers des Annales), 1970.

70 Ibid.

71 Collectif, Le Comte de l’an mil (Aquitania), sup. 8, 1996.

72 Ibid., introduction par D. Baudis, p. 5.

73 « Il apparaît finalement que le sarcophage a livré les restes d’au moins vingt sujets, mélangés à des os de mouton, de bœuf, de volaille, de poissons etc. Lérots et souris se sont introduits à diverses époques et ils ont amené les restes végétaux attribuables à plus de 40 espèces. Des insectes relevant de dizaines de genres et d’espèces attirés par le cadavre ou simplement l’obscurité se sont introduits. À côté des restes biologiques, des éléments aussi divers qu’un fragment d’instrument à corde, de cartes à jouer, de tessons de vaisselle de plusieurs époques ont été mis au jour. Une partie de ce remplissage était recouverte d’environ 140 kilogrammes de gravats dont certains attribuables à ceux de la célèbre fresque décrite par les bénédictins de l’Histoire de Languedoc », Ibid., p. 192.

74 « Reste à déterminer, autant qu’il sera possible, qui est le personnage principal, celui dont la sépulture intervient en premier et dont le squelette et complet. […] La tentation a été immédiate de reconnaître dans le squelette en place le comte de Toulouse Guillaume Taillefer, mort à une date très voisine de 1037. […] Il n’est pas possible de trancher avec certitude entre des candidats aussi peu cernés… », Ibid.

75 Sur l’invention des reliques voir : Alain Schnapp, La Conquête du passé, Aux origines de l’archéologie, Paris, Éditions Carré, 1993, p. 117-119.

76 Collectif, Archéologie et vie quotidienne aux xiiie-xive siècles en Midi-Pyrénées, catalogue d’exposition, Toulouse, Musée des Augustins, Toulouse, mai 1990.

77 Ibid., p. 97, P. Garnier, « Métrologie et conception architecturale du château de Montségur », p. 100- 101.

78 Par stratigraphie relative ou par des datations absolues comme le C14 par exemple.

79 « Rivalités qui opposent dans cette micro région deux puissants propriétaires fonciers », site de Vacquier, J. Falco, Collectif, Archéologie et vie quotidienne aux xiiie-xive siècles en Midi-Pyrénées, ouv. cité, p. 131.

80 Collectif, De Toulouse à Tripoli, la puissance Toulousaine au xiie siècle, catalogue d’exposition, Musée des Augustins, Toulouse, 1989, Espic, 1988, introduction de D. Milhau, p. 13.

81 Ibid., p. 13.

82 Collectif, Métropolis, transports souterrains et archéologie urbaine à Toulouse, 1990-2007, catalogue d’exposition, Musée Saint Raymond, Toulouse, 2007.

83 A. Hermet, « Les Toulousains de Toulouse, cent ans d’Histoire », Collectif, Toulouse, pages d’Histoire, « Les Toulousains de Toulouse » ont cent ans, catalogue d’exposition, Musée des Jacobins, Toulouse, 2006, p. 33.

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