Les Recteurs et le rectorat de l’académie de Toulouse (1808-2008)
|Deuxième partie. Le rectorat du Premier Empire au début de la Troisième République : Une institution fragile qui s’impose durablement
Alexandre-Auguste Jamme premier recteur de l’académie de Toulouse 1809-1815
Texte intégral
- 1 Condette (Jean-François), Les recteurs d’académie en France de 1808 à 1940, t. 1, L a formation d’u (...)
1Parmi le groupe des premiers recteurs nommés en 1809, bien connus grâce aux travaux de Jean-François Condette, le seul à être né avant 1740 était Alexandre-Auguste Jamme, ce qui en fait le doyen d’âge1. Lors de sa nomination en 1809, il était déjà âgé de 73 ans. Et lorsqu’il quitta ses fonctions en octobre 1815, il avait atteint l’âge vénérable de 79 ans.
2Du fait de sa date de naissance, on peut considérer Jamme comme un homme du XVIIIe siècle, dont il a vécu les deux tiers. Cette longue vie avant d’accéder aux fonctions de recteur fera l’objet d’une première analyse, avant que ne soit abordé la période de l’exercice des fonctions rectorales. L’examen de sa longue carrière permet de repérer des moments clés caractéristiques. Dans les pages qui suivent, je voudrais aborder cinq de ces moments.
3- Jamme fut d’abord un avocat toulousain précoce et célèbre ;
4- Il fut également, à la veille de 1789, un avocat engagé dans la défense du parlement, dans une posture que l’on peut qualifier de « patriote » ;
5- Pendant la Révolution, Jamme fut un non-révolutionnaire, voire un contre-révolutionnaire ;
6- À la sortie de celle-ci, il revint sur la scène toulousaine comme le défenseur et le restaurateur des institutions toulousaines anciennes ;
7- Enfin, à partir de 1809, il devint le premier recteur de l’académie.
Une longue et brillante carrière d’avocat
8Évidemment, l’homme a évolué et mûri tout au long de sa vie, mais on pourra sans doute remarquer quelques traits du futur recteur dans le jeune avocat à succès des années 1760. On verra que plusieurs expériences vécues avant 1809 semblent avoir influencé directement son action comme recteur.
L’avocat précoce et célèbre
- 2 La Biographie toulousaine de 1823 le fait naître à Toulouse, d’autres notices biographiques lui don (...)
- 3 Voir plusieurs notices biographiques de Jamme : Biographie toulousaine ou Dictionnaire historique d (...)
9Fils d’un notaire des alentours de Saint-Pons (futur département de l’Hérault), Jamme fit ses études à Toulouse, au collège de l’Esquile puis à la faculté de droit2. Il y aurait fait preuve très vite de ses capacités littéraires et oratoires avant de recevoir son diplôme et de s’inscrire au barreau de Toulouse en 17613. Cette première phase de sa carrière repose sur deux éléments inégaux : ses ambitions littéraires et poétiques, et son talent de juriste qui lui apporta l’essentiel de sa célébrité et de sa fortune.
- 4 Poèmes cités par Tajan dans son « Éloge à M. Jamme », op. cit., p. 30. Pour le lien entre sciences (...)
10Jamme s’inscrit parfaitement dans ce qu’on pourrait appeler l’habitus d’un juriste ambitieux de la deuxième moitié du XVIIIe siècle. Comme plusieurs de ses confrères, il se voulait poète et participait aux concours des Jeux floraux. L’année de son inscription au barreau (1761), il fut primé pour trois poèmes différents. Certains abordaient des questions scientifiques – Le Téléscope, L’Inoculation, L’Arc-en-Ciel imité par le prisme, par exemple. Ces œuvres reflètent une sensibilité scientifique bien caractéristique des Lumières4. En même temps, cependant, Jamme rappelle ses croyances religieuses dans un sonnet couronné par un prix : À l’honneur de la Sainte-Vierge.
- 5 Taillefer (M.), « Les avocats dans les sociétés savantes et les loges maçonniques de l’époque des L (...)
- 6 Taillefer (M.), Une académie interprète des Lumières. L’Académie des Sciences, Inscriptions et Bell (...)
- 7 Taillefer (M.), « Les avocats dans les sociétés savantes et les loges maçonniques », op. cit., p. 1 (...)
- 8 Ibid. Voir également Tajan (M.), Éloge, op. cit., p. 31.
- 9 Taillefer (M.), La franc-maçonnerie toulousaine : 1741-1799, Paris, ENSB-CTHS, Comité d’histoire de (...)
11Comme son confrère Pierre-Firmin Lacroix, défenseur d’accusés dans plusieurs causes célèbres, Jamme fut élu mainteneur des Jeux floraux en 1770. Michel Taillefer, spécialiste de la sociabilité académique toulousaine, suggère que Jamme et ses semblables étaient épris de la philosophie moderne du siècle des Lumières : « confiance dans la raison, foi dans le progrès, tolérance religieuse, libéralisme économique et politique5 ». Il cite Jamme, qui déclara dans un discours le 7 septembre 1774 : « On a accusé ce siècle d’être trop philosophique ; je crois au contraire qu’il ne l’est pas assez6 ». Autre signe de témérité du jeune avocat, avec deux autres juristes des Jeux floraux, ils choisirent comme sujet de concours en 1772 l’éloge de Pierre Bayle. Ce choix fut alors censuré par le chancelier Maupeou7. En même temps, il ne s’éloigna jamais trop d’une position respectueuse pour les institutions. Ce fut lui qui, en 1774, prononça l’éloge de Louis XV, éloge où il fit également celui du chancelier d’Aguesseau, grand unificateur du droit français (et, peut-être, contre modèle de Maupeou)8. Enfin, Jamme se comporta aussi comme bon nombre d’autres avocats toulousains en se faisant élire à l’Académie des Sciences, Inscriptions et Belles Lettres et en étant initié comme franc-maçon au sein de la loge des Vrais Amis Réunis. Cette loge regroupait un grand nombre de gens de justice, des magistrats du parlement aux employés et officiers subalternes, aux juges du sénéchal, aux procureurs et à beaucoup d’avocats9.
- 10 Taillefer (M.), Une académie interprète des Lumières, op. cit., p. 65
12Jeux floraux, Académie des Sciences, franc-maçonnerie : Jamme fit ainsi partie de ce réseau de sociabilité intellectuelle et culturelle si caractéristique de son époque. Le futur recteur appartenait au petit groupe d’une quinzaine d’hommes qui figuraient dans au moins trois sociétés académiques sur quatre. La moitié de ce groupe étaient des nobles, deux des religieux et cinq des avocats10. Jamme se trouvait donc au cœur de la vie culturelle toulousaine dans les dernières décennies de l’Ancien Régime. Cette intense activité se limita toutefois à Toulouse ; rien n’indique que sa célébrité ait dépassé de beaucoup le gardiage de la ville.
- 11 Berlanstein (Lenard R.), The Barristers of Toulouse, op. cit., p. 15.
- 12 Gourvat (Thierry), Les mémoires judiciaires des avocats au parlement de Toulouse (1770- 1790), mémo (...)
- 13 Mémoire pour Catherine Estinès, habitante de Cazaux, condamnée par les officiers du siège royal de (...)
- 14 Affiches de Toulouse, 4 et 11 juillet 1787, Bibliothèque municipale de Toulouse, microfilm n° 145 ; (...)
- 15 Instruction concernant la vie et les voyages d’Arnaud Lamaure suivie de ses auditions catégoriques (...)
13Pour gagner sa vie, Jamme devait compter avant tout sur ses talents de juriste. Il le fit, semble-t-il, assez rapidement. Dans les années 1760-1770, il fit partie de la quinzaine d’avocats les plus actifs du barreau selon Lenard Berlanstein11. Sa carrière d’avocat plaidant lui apporta fortune et une nouvelle célébrité. Il est l’auteur de dizaines de mémoires judiciaires destinés aux juges du parlement mais aussi au public toulousain12. Son texte juridique le plus connu est son factum écrit en 1787 pour la Pyrénéenne Catherine Estinès, accusée de parricide et condamnée à mort par un tribunal secondaire du Comminges13. D’abord défendue par Pierre-Firmin Lacroix, sa dernière défense fut assurée par Jamme. Quand Estinès fut acquittée par le parlement, il récolta les fruits de la gloire. Il accompagna Catherine au théâtre de Toulouse où la foule acclama son juge et applaudit l’avocat victorieux avant de se pâmer devant l’héroïne14. Quasiment dans la foulée, il se lança dans la défense d’un ancien esclave des Algérois, racheté par le roi et les ordres religieux en 1785. L’ancien esclave prétendait être le nommé Arnaud Lamaure, un Toulousain absent depuis plus de quarante ans. Au-delà des mémoires et des plaidoiries, Jamme s’impliqua personnellement en hébergeant l’ancien captif chez lui, dans la maison qui allait devenir le siège du rectorat après 1809. Quand le revenant mourut en 1798, il était encore chez Jamme, rue des Fleurs, près du parlement15.
14Grâce à ses activités de juriste, Jamme avait conquis non seulement une aisance matérielle certaine mais aussi une réputation flatteuse. Son prestige était tel que ses pairs le reconnurent comme un de leurs leaders ou porte-parole dans les crises qui secouèrent le monde judiciaire toulousain et la société française toute entière en 1788 et 1789.
L’avocat « patriote » de la pré-Révolution toulousaine
- 16 Berlanstein (Lenard R.), The Barristers of Toulouse, op. cit., p. 144-145.
- 17 Tajan (M.), « Eloge de M. Jamme », op. cit., p. 32-34.
15Pendant ces deux années, on peut, en fait, distinguer deux moments forts dans l’activité politique et corporatiste de Jamme. Le premier moment correspond à la suppression des parlements et à la création des grands bailliages en 1788. Vrai avocat plaidant devant le parlement, le futur recteur, comme ses confrères, avait un grand intérêt à son maintien. Les avocats étaient fiers de leur association avec cette auguste institution et ne voulaient pas voir les avocats des tribunaux inférieurs tels que la sénéchaussée, venir leur faire concurrence. On peut penser aussi que Jamme était mû également par le respect qu’il portait au parlement et à ses magistrats. Lenard Berlanstein et d’autres auteurs ont raconté comment Jamme et plusieurs leaders du barreau ont apporté tout leur soutien au parlement16. Avec deux autres avocats, il a été l’auteur d’une Lettre des avocats du parlement de Toulouse à Monseigneur le garde des sceaux pour le maintien des droits et privilèges de la ville et de la province. Cet écrit véhément leur valut une convocation à Paris pour s’expliquer avec les autorités royales. Le vent politique ayant tourné pendant leur voyage, les trois avocats toulousains revinrent à une ville en liesse grâce à la restauration des parlements. Ils furent alors considérés comme des héros et on fit frapper une médaille pour Jamme où était gravé Orator patriae17. À la fin de 1788, Jamme était au sommet de sa gloire ; il était bâtonnier du barreau de Toulouse, il incarnait l’esprit de résistance à l’arbitraire royal et la défense des institutions et des privilèges locaux.
- 18 Berlanstein (Lenard R.), The Barristers of Toulouse, op. cit., p. 149-152.
16Les premiers mois de 1789 virent les préparatifs de la réunion des États généraux à Versailles, programmée pour mai 1789. Jamme fut omniprésent dans les débats du moment. En Languedoc, la grande cause était de contrer les prétentions des États du Languedoc qui revendiquaient la nomination des députés aux États généraux. Jamme fut le principal porte parole des différents corps du Tiers état toulousain et il fit partie d’un petit groupe d’avocats ayant formé une « commission intermédiaire » pour faire le lien entre les avocats et les autres corps constitués. Jamme fut député pour se rendre à Versailles pour combattre les prétentions des États du Languedoc. Cette mission fut couronnée de succès, dans un contexte national défavorable aux institutions provinciales18.
- 19 Ibid., p. 154-157.
17À l’heure de la rédaction du cahier des doléances du tiers état de la sénéchaussée de Toulouse, Jamme fut encore présent comme l’un de ses principaux auteurs. Berlanstein qualifie cette rédaction de « modérée et conciliatoire » ; on pourrait aussi dire réformiste et déférente, au sens où le parlement et les privilèges n’y étaient guère mis en cause19. Clairement, Jamme, comme quelques autres, pensait que les réformes étaient certes nécessaires mais dans le cadre d’une monarchie qui donnerait plus de place à l’égalité des citoyens tout en sauvegardant les prérogatives des parlements.
- 20 Ibid. p .153-154, 161; en fait, c’est Jamme lui-même qui donna cette version des événements dans so (...)
18Au printemps de 1789, l’influence de Jamme à Toulouse parvint à un vrai tournant. Au moment de choisir les hommes pour accompagner les cahiers de doléances, le tiers état toulousain se détourna de lui. On a évoqué une campagne plus ou moins occulte de la part des avocats et officiers du siège présidial-sénéchaussée de la ville, Ces juristes étaient moins aristocratiques que beaucoup de leurs confrères qui plaidaient devant le parlement, ils s’estimaient plus indépendants. On aurait dit de Jamme qu’il avait du talent et de la probité, mais qu’il était trop attaché à un parlement qui avait fait sa fortune20. Par conséquent, la délégation toulousaine aux États généraux de Versailles pour ne comptait qu’un avocat de premier rang, Viguier, professeur de droit et doyen de la faculté. Les autres grands noms du barreau restèrent à la maison, sauf Bertrand Barère, élu député de la Bigorre. À partir de ce moment, Jamme allait pencher vers des expressions critiques de l’œuvre révolutionnaire.
Un citoyen non révolutionnaire voire contre-révolutionnaire
- 21 Dans sa lettre Aux maire et officiers municipaux de 1793, op. cit., Jamme s’en explique de la façon (...)
19Comment qualifier la position de Jamme pendant la Révolution ? Un premier constat s’impose : il n’occupa aucune charge politique entre 1789 et 1805, quand il devint professeur de droit et directeur de l’école de droit de Toulouse21. Son accompagnement du processus révolutionnaire s’arrêta quasiment au printemps de 1789.
- 22 Lyons (Martyn), Révolution et Terreur à Toulouse, traduction par Philippe Wolff, préface de Jacques (...)
- 23 Adresses de la Seconde légion de Saint-Barthélemi, au Roi et à l’Assemblée nationale. En exécution (...)
- 24 Berlanstein (Lenard R.), The Barristers of Toulouse, op. cit., p. 163-165 pour l’ensemble de ces év (...)
- 25 Sur le texte du parlement et ses conséquences, voir Sicard (Germain), « Le procès des parlementaire (...)
20Pendant les premières années de la Révolution, on le trouve impliqué dans des expressions critiques de ce qui se passe dans la ville. Quelques exemples aideront à comprendre ce positionnement. Au tout début de la Révolution, son beau-frère, Jean-Joseph Gez, lui aussi avocat, fit partie de la Seconde légion du capitoulat de Saint-Barthélémy. Cette légion était réputée contre-révolutionnaire ou réactionnaire, en liaison peut-être avec la nature de ce quartier proche du Palais et peuplé de magistrats, d’avocats, de procureurs au parlement. Sa réputation était telle que la municipalité l’a dissoute tout en désarmant les habitants du quartier22. En mai 1790, Jamme signa, avec d’autres juristes et parlementaires, deux adresses de la Seconde légion au roi et à l’Assemblée nationale, qui cherchaient à justifier son refus d’obéir à un ordre du général des légions patriotiques de la ville pour aller porter secours à Montauban qui venait de vivre d’importants troubles notamment entre catholiques et protestants23. Au printemps 1790, l’avocat Duroux, capitoul, un des proches de Jamme, fut attaqué politiquement. Jamme assista à une réunion pour protester contre le traitement réservé à Duroux. On y retrouve également son beau-frère Gez comme animateur. À la mi-avril1790, Jamme assista à une nouvelle réunion de citoyens actifs contre la suppression des ordres religieux. Cette assemblée comptait 43 avocats dans l’assistance. Enfin, et surtout, Jamme aurait fait partie de l’équipe de rédaction du fameux arrêt de protestation de la chambre des vacations du parlement des 25-27 septembre 1790. Ce texte protestait contre la suppression des parlements et se situait clairement dans la mouvance contre-révolutionnaire24. Il allait ensuite servir de prétexte à une politique de répression contre les parlementaires toulousains, dont près de la moitié ont été exécutée sous la Terreur, ce qui constitue un record en la matière25.
- 26 Tajan (M.), « Eloge de M. Jamme », op. cit., p. 36.
21Cette position très critique allait rendre les années 1790-1795 très difficiles pour Jamme et sa famille. Il fut poursuivi au moment de la Terreur, obligé de quitter Toulouse pour se réfugier dans les campagnes des alentours. Il dut fuir de façon précipitée le château du marquis de Fontenilles, avec une foule révolutionnaire à ses trousses26. Est-il passé en Espagne ? Quoi qu’il en soit, il ne fit sa réapparition qu’après Thermidor. Malgré la disparition théorique des avocats, on le retrouve en train de défendre l’ancien esclave d’Alger au travers les dédales des appels de la période révolutionnaire.
- 27 Dans sa lettre Aux maires et officiers municipaux…, op. cit., Jamme fait un plaidoyer pro domo afin (...)
22On le voit, Jamme n’apparaît jamais comme un révolutionnaire même modéré. Très attaché au parlement, il lia son sort à celui de cette vénérable institution. Quand le parlement fut condamné, Jamme l’accompagna dans sa disgrâce27.
Faire renaître les anciennes institutions toulousaines
23Une fois arrivé au Consulat et à l’Empire, le futur recteur put reprendre toute une série d’activités même, si son métier d’avocat était quelque peu entre parenthèses. Jamme avait 64 ans en 1800. Manifestement, il lui restait à la fois de l’énergie et un certain prestige dans la notabilité toulousaine. On a vu comment Jamme avait été un pilier de la sociabilité académique d’avant la Révolution. Après, il se consacra à faire revivre les institutions toulousaines qu’elle avait emportées. Il participa activement à la renaissance de trois institutions de l’Ancien Régime : en 1805, la faculté de droit ; en 1806, l’Académie des Jeux floraux ; en 1807, l’Académie des Sciences, Inscriptions et Belles-Lettres.
- 28 Poumarède (Jacques), « Le barreau et l’université », dans Histoire des avocats et du barreau de Tou (...)
24La faculté de droit avait disparu en 1793. La recréation d’écoles de droit, puis de facultés venait de Napoléon à la suite de la mise en place du Code civil. Il fallait former des juristes compétents, notamment en droit civil. Toulouse se vit attribuer une de ces écoles en 1805. Elle fut dotée de cinq chaires ; Jamme fut nommé à la deuxième chaire de droit civil et, plus important, directeur de la nouvelle école. Très vite les étudiants y affluèrent et l’école de Toulouse devint la deuxième après celle de Paris28. Cette expérience de direction est certainement une des clés pour comprendre la nomination de Jamme, quatre ans plus tard, comme recteur.
- 29 Monestier (J.), « Les avocats mainteneurs de l’Académie des Jeux floraux de Toulouse (1694-1989) », (...)
25L’Académie des Jeux floraux avait disparu au moment de la Révolution, mais pas tous les mainteneurs. En 1806, avec le soutien du maire de Toulouse, Picot de Lapeyrouse, Jamme œuvra pour faire renaître les Jeux floraux de leurs cendres. Lui-même était alors leur doyen d’âge. Il prit l’initiative de réunir chez lui sept anciens mainteneurs avant la tenue d’une première séance publique le 23 février 1806. Ils cooptèrent alors six nouveaux mainteneurs et l’Académie revint à la vie29.
- 30 Tajan (M.), « Éloge de M. Jamme », op. cit., p. 37.
26Enfin, Jamme avait appartenu à l’Académie des Sciences, Inscriptions et Belles-Lettres avant la Révolution. Avec quelques autres anciens membres, il ressuscita cette Académie et en devint le directeur, fonction qu’il occupa jusqu’à sa mort en 181830.
27Si la renaissance des deux académies pouvait se comprendre comme un débouché pour une forme de sociabilité intellectuelle et culturelle, celle de l’école de droit, bientôt faculté de droit, constituait un vrai investissement dans l’avenir. Jamme semble avoir été conscient des enjeux et il s’y consacra avec énergie. C’est l’exercice de cette autorité pendant plusieurs années qui en appela d’autres. Avec la création de l’Université impériale en 1808, Napoléon avait besoin d’hommes capables de prendre en main un ressort important, avec la mission de créer une nouvelle administration de l’enseignement à tous les niveaux. Avec les premières nominations de recteurs d’académie en 1809, Jamme vit sa carrière publique culminer.
Le premier recteur de l’académie de Toulouse (1809-1815)
Sa nomination
- 31 Picot de Lapeyrouse était également professeur et doyen de la faculté de sciences.
- 32 Aldéguier (J.-B.-A. d’), Histoire de la ville de Toulouse depuis la conquête des Romains jusqu’à no (...)
- 33 Bibliothèque universitaire de l’Arsenal, Service des livres anciens (désormais B. U. Arsenal), Ms. (...)
28Que sait-on des raisons qui motivèrent l’administration impériale dans la désignation de Jamme ? Son expérience de directeur de l’école de droit et le succès de celle-ci ne furent sans doute pas étrangers à cette nomination. L’historien toulousain J.-B.-A. d’Aldéguier, lui-même juriste, propose une version moins flatteuse pour Jamme. Aldéguier, écrivant en 1835, affirme que le premier grand maître Fontanes fit le choix déterminant. Fontanes aurait eu des attaches toulousaines qui lui donnaient des renseignements sur les candidats potentiels. Aldéguier soutient que le candidat naturel par ses qualités intellectuelles et scientifiques était Picot de Lapeyrouse, maire de Toulouse entre 1800 et 180631. Mais celui-ci aurait eu des ennemis, notamment dans le clan proche de Fontanes. Le grand maître se tourna alors vers Jamme. Aldéguier dresse un portrait sévère du nouveau recteur, qui « ne connaissait que le code, le digeste et les institutes, et qui avait passé sa vie à disputer à l’audience sur le déplacement d’une borne, sur une fossé ou mur mitoyen, ou une servitude. Quoique Fontanes eût une sorte d’aversion pour la science du droit, il repoussa le savant universel [Picot] et choisit l’avocat…32 ». Aldéguier est manifestement trop sévère par rapport à la carrière juridique de Jamme, qui eut des affaires retentissantes de grande complexité à traiter. De même, lorsqu’on examine certains de ses actes en tant que recteur, notamment quand il s’agit de moderniser l’enseignement du droit, Jamme se montra capable d’une vraie modernité, privilégiant le droit français vivant par rapport aux vestiges du droit romain qui n’avaient plus de pertinence pour les juristes que l’on formait33.
Jamme parmi les premiers recteurs impériaux
- 34 Pour l’ensemble des caractéristiques des premiers recteurs, voir Condette (Jean-François), Les rect (...)
29Si l’on replace Alexandre-Auguste Jamme dans le contexte des premiers recteurs, comment se compare-t-il aux autres choisis par le même grand maître ? Grâce au travail prosopographique de Jean-François Condette, il est relativement aisé de comparer Jamme aux autres premiers recteurs34. Comme nous l’avons vu au tout début, il était le plus âgé. Sur les vint-cinq premiers recteurs, quatre seulement avaient 60 ans et plus ; Jamme en avait 73. Plus de la moitié avaientt la cinquantaine. Alors que la plupart des premiers recteurs étaient des hommes encore en pleine activité, Jamme partageait son temps entre sociabilité académique et responsabilité dans son école de droit.
30Comme ses nouveaux collègues, Jamme était un provincial ayant fait toute sa carrière dans une ville plus ou moins éloignée de la capitale. Dans le premier groupe de recteurs, un seul était Parisien ou né dans l’Île-de-France. Les Méridionaux, tels que Jamme, étaient un peu sur-représentés ; il y avait neuf académies dans un grand Midi (de Bordeaux au Massif Central et à la Provence) alors que onze recteurs étaient nés dans cette large Occitanie.
- 35 Gontard (Maurice), « Un administrateur de l’Université impériale, André-Alexandre d’Eymar, recteur (...)
31En tant que juriste, Jamme faisait partie d’un groupe socio-professionnel plutôt rare parmi les premières nominations (ce qui confirme les dires d’Aldéguier sur le peu de goût de Fontanes pour les sciences juridiques). Le recteur qui le ressemble le plus était André-Alexandre d’Eymar, le premier recteur d’Aix. Celui-ci, plus jeune que Jamme, était aussi un avocat au parlement (d’Aix). Il avait déjà été professeur de droit avant la Révolution. À la différence de Jamme, il occupa des charges publiques pendant la Révolution, mais de façon assez discrète : dans un canton reculé des Basses-Alpes comme juge de paix pendant une dizaine d’années35.
- 36 Sentou (Jean), « Jamme », dans Wolff (Philippe) dir., Les Toulousains dans l’Histoire, Toulouse, Pr (...)
32Si le métier juridique n’avait pas les faveurs du grand maître, les professeurs, eux, constituaient le principal vivier des nouveaux recteurs, et de loin. À l’intérieur du groupe des enseignants (de lycée et de faculté), Fontanes cherchait manifestement des administrateurs, d’où un nombre significatif de proviseurs de lycée, de doyens de faculté, de directeurs d’école de droit. Même si son expérience de professeur et de directeur d’école était encore récente, Jamme possédait des qualifications qui ne pouvaient que séduire les autorités impériales. Picot de Lapeyrouse partageait cette même expérience de professeur et doyen ; son profil politique était a priori favorable, dans la mesure où il avait été nommé maire en 1800 par le premier consul Bonaparte, puis professeur et doyen, enfin baron de l’Empire en 180836. Faut-il croire Aldéguier, qui met le choix du recteur entre les mains d’un grand maître, Fontanes, dont les parents toulousains auraient préféré Jamme à Picot ?
33Enfin, politiquement, Jamme appartient à cette catégorie de recteurs qui ne traîne pas derrière eux un passé politique trop chargé. Ses positions pendant la Révolution le mettaient plutôt du côté des conservateurs. Il avait été persécuté, mais pas trop, et il n’était pas marqué comme un émigré au sens aristocratique du terme. C’était clairement un homme respectueux des autorités légales, de l’ordre établi. En tant que tel, ce fut un homme qui pouvait servir l’Empire et l’Empereur.
L’activité du recteur Jamme
34Pendant presque sept ans, Jamme est resté recteur de l’académie de Toulouse, dont le ressort était composé alors de quatre départements (Haute-Garonne, Tarn, Tarn-et-Garonne, Ariège). Les sources sont à la fois abondantes et très lacunaires. Il subsiste un registre de ses arrêtés et deux registres de sa correspondance, notamment avec le grand maître (plus rarement avec un inspecteur général). Malheureusement, le premier registre ne commence qu’en août 1810, soit presque dix-huit mois après sa nomination.
- 37 B. U. Arsenal, Service des livres anciens, Ms. 146, Registre des arrêtés du recteur à partir du 24 (...)
35Une rapide et incomplète analyse des registres d’arrêtés et de correspondance permet d’apercevoir l’étendue des activités du recteur. Les arrêtés, qui sont un des reflets de l’action rectorale, révèlent plutôt ses fondements administratifs : beaucoup d’actes concernent les traitements payés aux personnels enseignants et autres ; la comptabilité des établissements de l’académie (collèges, lycée, facultés, académie) ; l’organisation administrative des établissements (règlements, nominations aux conseils d’administration) ; des nominations de personnels ; l’organisation des cérémonies autour du recteur et d’autres autorités telles que l’archevêque ; enfin, un petit nombre d’actes concernent la pédagogie au sens large37.
36Les registres de correspondance donnent une vision plus politique de l’action du recteur car il y exprime beaucoup plus son opinion sur les différentes questions abordées. La très grande majorité des entrées sont des lettres à l’intention du grand maître, son supérieur hiérarchique. Jamme y exprime sa subordination et présente ses actions de la façon la plus positive possible. Il sollicite des instructions claires mais il est aussi capable de donner sa position sur telle ou telle question.
37La question des traitements, omniprésente dans les arrêtés, est plus rare dans la correspondance, car le recteur n’aborde ici que les problèmes précis où il a besoin de poser une question ou expliquer son action. L’administration à la fois du rectorat et des établissements scolaires et universitaires est assez présente mais l’aspect comptable y est rare. Les élèves et les étudiants figurent plus souvent dans la correspondance que dans les arrêtés. Jamme doit traiter des questions de places de boursiers, d’inscriptions tardives, de places dans des grandes écoles, de conscription ou d’enrôlement (n’oublions pas pendant les années 1810-1815 la France est constamment en guerre et que les jeunes gens sont très recherchés par les armées napoléoniennes). Les personnels sont aussi concernés s’ils sont jeunes. Jamme doit aussi gérer les nominations et les démissions dans les différents établissements de son ressort. Enfin, la correspondance est jalonnée de lettres sur le problème du monopole universitaire et de la perception des droits, source principale de financement du rectorat.
38S’il m’est impossible de traiter ici avec exhaustivité l’ensemble du travail du recteur Jamme, il est possible d’aborder plusieurs aspects importants. J’essaierai de suggérer que certaines caractéristiques de Jamme visibles dans sa carrière avant 1800 permettent de comprendre certaines de ses actions en tant que recteur.
Installer son administration
- 38 Quénet (Maurice), « L’installation des recteurs napoléoniens : des hommes nouveaux dans des bâtimen (...)
- 39 B. U. Arsenal, Service des livres anciens, Ms .147, correspondance active du recteur avec le grand (...)
39Le nouveau recteur fut chargé de créer ex nihilo une nouvelle administration. Plusieurs questions cruciales se posèrent à lui. Comme pour son homologue aixois, il y avait le problème du siège de l’académie. La ville de Toulouse semblait prête en 1810 encore à mettre à sa disposition l’hôtel de Malte mais cette promesse n’a jamais été réalisée38. En l’absence d’autres alternatives fournies par la ville ou l’État, Jamme décida, comme à Aix, d’installer ses bureaux dans sa propre maison, près de l’ancien parlement, rue des Fleurs. Il fit aménager le second étage afin de pouvoir recevoir le public et le personnel, faisant faire des travaux dont il a avancé lui-même les frais. La correspondance le montre en train de négocier âprement avec le grand maître pour essayer de se faire rembourser39. Le siège de l’académie est resté dans sa maison jusqu’à son départ et une solution pérenne n’a été trouvée que bien plus tard.
- 40 Ibid., 6 octobre 1810.
40Manque de locaux, mais aussi manque de personnel. À son arrivée, le nouveau recteur n’avait pas beaucoup de soutien administratif pour mettre en place son administration. Les inspecteurs (deux) n’arrivèrent que dans le courant de 1810. Le secrétariat était partagé d’abord entre deux postes, entre le rectorat et le lycée, comme à Aix. Jamme, probablement comme d’autres recteurs, expliqua au grand maître qu’il avait besoin de deux ou trois garçons de bureau, dont un pour la comptabilité et un autre pour la correspondance40. Ce fut donc une administration qui commença littéralement avec des bouts de ficelle.
41Sur un plan plus institutionnel, il fallait mettre en place les organes prévus par la loi sur l’Université. Elle prévoyait, par exemple, un Conseil académique dont les membres étaient nommés par le grand maître. Or, celui-ci ne sembla pas très empressé, de telle sorte que le Conseil de l’académie de Toulouse dut attendre 1812 pour être finalement au complet. On trouve trace, toutefois, dès décembre 1810, d’un Conseil académique provisoire.
- 41 Ibid., 10 janvier 1811.
42Enfin, sans doute plus grave, à certains moments, les contours même de sa fonction et de son autorité n’apparaissent pas clairement au nouveau recteur. L’expression de ses doutes se fait jour en janvier 1811 dans une longue lettre au grand maître concernant ses liens (ou absence de liens) avec le doyen de la faculté de théologie protestante de Montauban. Selon Jamme, le doyen l’ignore superbement et entretient une relation directe avec le grand maître à Paris. Jamme dit ne pas savoir ce qui s’y passe, même s’il montre par plusieurs remarques qu’il en a quelques idées. Il défend ses prérogatives de recteur et demande au grand maître de clarifier les choses. En bref, il voulait que le doyen lui soit subordonné et non quasi-autonome41. On peut penser que le fait que le doyen soit à Montauban lui avait permis d’échapper à une relation personnelle avec Jamme et à la manifestation des liens hiérarchiques entre eux. En tant que premier recteur, Jamme devait construire une structure administrative et des relations hiérarchiques qui, plus tard, ont probablement posé moins de problèmes.
Donner de l’éclat à l’institution
43Installer l’académie impliquait aux yeux de Jamme de donner un éclat certain à ses propres fonctions et à l’institution. Homme d’Ancien Régime, qui avait baigné dans le milieu judiciaire où les cérémonies jalonnaient l’année, Jamme chercha à donner du rituel à la vie académique. En novembre 1810, il organisa la rentrée solennelle de l’Université. Il n’avait pas encore de local, mais la mairie lui prêta la salle des Illustres de l’hôtel de ville. Le corps universitaire re rendit au Capitole à la cathédrale Saint-Étienne pour une messe célébrée par l’archevêque en présence d’autres corps constitués tels que le général de la place de Toulouse et son état-major. Le recteur et ses professeurs furent accueillis par l’archevêque dans le sanctuaire même de la cathédrale. On chanta un Te deum. Tout le monde revint au Capitole pour les discours d’usage que les doyens dirent vouloir faire imprimer. Jamme eut là l’occasion d’exercer une nouvelle fois ses talents oratoires d’avocat célèbre.
Le monopole de l’Université et le droit de rétribution
- 42 B. U. Arsenal, Service des livres anciens, Ms. 146, Registre des arrêtés du recteur, le 19 octobre (...)
- 43 B. U. Arsenal, Service des livres anciens, Ms. 147, Correspondance, 10 janvier 1811.
44En tant que recteur, Jamme devait faire respecter le monopole de l’Université impériale sur l’enseignement et percevoir les droits, notamment celui appelé rétribution (1/20 des droits de pension perçus par les maîtres de pension dans le ressort). En ce qui concerne le monopole, un texte important d’octobre 1810 oblige les chefs d’institutions, les directeurs d’écoles secondaires ecclésiastiques et les maîtres de pension à envoyer aux lycées et collèges de leurs localités les élèves qui sont en état de suivre des cours. Par exemple, à Toulouse, il fallait envoyer les élèves capables de suivre les cours d’humanités au lycée de la ville42. Cette nouvelle règle ne plut pas à tout le monde et plusieurs correspondances montrent comment le directeur du petit séminaire de Castres essayait d’éviter cette obligation. Il se déplaça même à Toulouse pour voir Jamme en personne. Il lança une pétition auprès des parents et autres Castrais. Jamme se montra intransigeant et organisa grâce à un de ses inspecteurs un contre-mouvement pour défendre l’école secondaire publique de Castres. Il réfuta les arguments de ses adversaires selon lesquels l’établissement public faisait courir des risques moraux aux petits séminaristes car l’on y apprenait la danse, l’escrime, la déclamation théâtrale43.
- 44 Ibid., entre le 17 et le 22 novembre 1810.
45Un des enjeux du monopole était le versement du droit dit de rétribution dans les caisses de l’Université. Jamme, comme son homologue aixois d’Eymar, dut s’y consacrer pleinement pour assurer les paiements que les responsables des écoles et pensions cherchaient à éviter sous tous les prétextes. La correspondance du recteur revient très souvent sur ce problème. À l’automne 1810, par exemple, Jamme évoque le cas d’un prêtre commingeois qui refuse par tous les moyens de payer la rétribution. Jamme montre au grand maître sa détermination : « Je ne me suis point découragé, je l’ai poursuivi dans ses retranchements et enfin je viens de recevoir les résultats de l’espèce de persécution que j’avais successivement employée à son égard. » Et il conclut : « Si je n’étais pas aux aguets même pour les plus petits objets […] la recette de l’Université s’en ressentirait44 ».
- 45 Condette (Jean-François), Les recteurs d’académie, op. cit., p. 65.
- 46 B. U. Arsenal, Service du livre ancien, Correspondance, mai 1814.
- 47 Ibid. 26 mai 1814.
- 48 Ibid., 1 août 1814.
- 49 Ibid., 19 août 1814.
46Si la question de la rétribution est présente tout au long de sa charge rectorale, elle devint particulièrement aiguë pendant la première Restauration. Selon Jean-François Condette, « dès le retour des Bourbons, une vive campagne se déchaîne alors contre l’Université et son centralisme45 ». La liberté de l’enseignement fut proclamée et l’Église chercha à reprendre sa place perdue depuis la fin de l’Ancien Régime. Jamme dut faire face à deux personnages particulièrement retors de son point de vue : l’abbé Lodes à Saint-Gaudens et M. Lasalle à Toulouse. Lodes avait déjà été condamné pour avoir ouvert une école sans autorisation, mais, avec la Restauration et un texte invoquant la liberté de l’enseignement, il reprit ses activités scolaires46. Si Jamme demanda des instructions à son ministre, il n’hésita pas à lui donner des conseils sur la démarche à suivre. Le recteur, avocat de formation et de profession, mit en garde le grand maître contre les poursuites judiciaires. Il se méfiait des magistrats susceptibles selon lui de mal interpréter l’arrêté relatif à la liberté de l’éducation et de relaxer des maîtres de pension qui ne versaient pas la rétribution. D’après les informations fournies par le principal du collège de Saint Gaudens, Lodes avait rouvert son école « en déclarant publiquement qu’aujourd’hui l’instruction est libre, et que ce qu’on payait aux collèges étaient des droits odieux et tirranniques et que les élèves qu’on enverrait chez lui seraient exempts de cette extorsion47 ». Comme le lui demanda son ministre, le recteur poursuivit Lodes devant le tribunal de Saint-Gaudens. Et comme Jamme l’avait pressenti, le tribunal donna raison à Lodes, « regardant les droits universitaires comme une surcharge dont il fallait délivrer les familles48 ». Jamme se prépara à faire appel tout en insistant auprès du grand maître sur les dangers de la voie judiciaire ; le 11 août, ses craintes furent confirmées par la décision de la Cour royale de Toulouse qui trancha en faveur de l’abbé Lodes49. Aux aléas de la justice, Jamme préférait nettement la voie administrative, c’est-à-dire l’interdiction d’enseigner.
- 50 Ibid., 2 janvier 1815.
- 51 Ibid.
- 52 Ibid.
47À Toulouse, la révolte contre le monopole universitaire et la rétribution fut menée par M. Lasalle, chef d’institution de Saint-Rémi. Au printemps de 1814, Lasalle n’envoyait plus ses élèves au lycée et ne payait pas les droits universitaires. D’autres chefs d’institution et maîtres de pension suivaient son exemple. Les enjeux étaient bien plus importants qu’à Saint-Gaudens, car Lasalle accueillait, selon le recteur, 80 pensionnaires et 150 externes, ce qui représentait des sommes importantes en termes de droit d’1/20e50. L’argent était sans doute une motivation importante pour les parents d’élèves et pour les chefs d’institution, mais il n’était pas la seule. L’idée d’une école laïque n’avait pas encore conquis toute la population, notamment la partie qui avait les moyens de scolariser ses enfants dans l’enseignement secondaire. L’idée que les institutions scolaires devaient rester entre les mains de l’Église était encore largement répandue. Selon Jamme, Lasalle bénéficiait d’une coalition « composée d’une foule de prêtres qui vont dans les maisons et dans les rues recruter les élèves51». Quels arguments employaient-ils ? « Le cri général qu’ils vont répéter de concert est que le lycée est un lieu de corruption et d’ignorance52 ».
- 53 Ibid.
- 54 Maza (Sara), Vies privées, affaires publiques. Les causes célèbres de la France prérévolutionnaire, (...)
- 55 B. U. Arsenal, Service du livre ancien, 10 février 1815.
48Comme pour l’abbé Lodes, Jamme pesa de tout son poids pour que la voie judiciaire ne fût pas enclenchée. Toutefois, il dut suivre les ordres et aller devant le tribunal de première instance de Toulouse. Le 6 février, celui-ci relaxa Lasalle, comme Jamme l’avait craint. Son argumentation montre l’expertise d’un ancien bâtonnier du barreau de Toulouse. Permettre à Lasalle d’aller devant la justice lui permettrait de prendre l’opinion publique à témoin : « On choisira l’avocat le plus disposé à vilipender l’autorité universitaire et à répéter toutes les déclamations que l’on sait permises à cet égard ». Pire encore, avertit Jamme : « Votre Excellence doit s’attendre que cette cause sera solennellement plaidée ; le public y accourra en foule et l’intérêt personnel fera que les rieurs ne seront pas avec nous53 ». On voit ici l’avocat d’expérience qui connaît l’usage du tribunal comme un moyen de mettre en scène une question publique, comme on avait commencé à le faire dans les dernières décennies de l’Ancien Régime54. Si l’abbé Lodes a été frappé d’une interdiction d’enseigner, dans le cas de Lasalle, Jamme préconisa le retrait de l’autorisation qui lui avait été donnée d’ouvrir une école. Avec son œil de juriste, il estimait qu’une telle ordonnance émise par le grand maître aurait plus de poids auprès des tribunaux. La procédure était plus claire et les conséquences d’une contravention moins ambiguës à interpréter pour les juges. Le 3 février 1815, le grand maître consentit enfin à retirer l’autorisation donnée à Lasalle55.
49Dans ces deux affaires qui occupèrent grandement Jamme pendant la première Restauration, sa solide connaissance du droit mais aussi des conséquences d’un procès pour l’opinion publique lui fit prendre des positions très affirmées face au grand maître. Son ton est plus véhément, même s’il manifeste toujours sa déférence envers son supérieur hiérarchique. Ses arguments, plus tranchés qu’à l’ordinaire, sont fondés sur l’expertise judiciaire acquise pendant ses années de pratique avant 1789. Il serait intéressant de voir comment des recteurs non juristes ont géré le même type de problèmes à la même époque.
Un médiateur et un porte-parole
- 56 Ibid., 2 octobre 1810.
- 57 Ibid., 6 novembre 1810, 24 novembre 1810 (question de préséance entre les professeurs du lycée et c (...)
- 58 Ibid., 6 décembre 1810.
50Si les recteurs impériaux étaient vraiment sous la coupe d’un grand maître omnipotent, ils jouaient néanmoins un rôle important de conciliateurs et de médiateurs dans des contentieux divers. Jamme s’érige souvent en porte-parole de ses administrés auprès du grand maître dans les affaires les plus variées. En octobre 1810, il s’agit de savoir si, au lycée de Toulouse, les cahiers de philosophie devaient être tenus en français ou en latin. Jamme suggéra au grand maître une voie médiane, avec des dictées en latin et des développements en français56. Dans une autre affaire, il se fit le conciliateur entre les professeurs du lycée et ceux de l’école de médecine et chirurgie. Les premiers estimaient devoir passer devant les seconds (une école étant moins prestigieuse qu’une faculté). Jamme apaisa provisoirement le conflit en les faisant marcher en deux files parallèles57. Par ailleurs, l’école de médecine et ses enseignants cherchaient à faire la transformer en faculté. Le recteur porta leur parole dans sa correspondance avec le grand maître dans un vrai plaidoyer. Jamme justifiait cette modification à la fois par l’absence de préjudice porté à la faculté de Montpellier et par « cette heureuse rivalité de travail et de gloire aussi nécessaire au progrès des études qu’utile au bien de la société58». Autrement dit, il se fit le chantre de la concurrence entre facultés comme source de progrès. Enfin, Jamme essaya de trouver des solutions pour le lycée qui était empêtré dans des difficultés financières, notamment à cause des réticences de la mairie de Toulouse à financer les réparations nécessaires.
Un recteur loyal envers l’Empereur et l’Empire mais royaliste fervent
- 59 B. U. Arsenal, Service du livre ancien, Ms. 146, Registre des arrêtés du recteur, commencé le 24 ao (...)
- 60 Ibid.
- 61 Discours prononcé par Monsieur Jamme, recteur de l’Académie impériale de Toulouse, avant la distrib (...)
51N’ayant jamais été révolutionnaire, le recteur Jamme ne semble pas avoir d’états d’âme pour servir l’Empereur. Il organise et participe à de nombreuses cérémonies qui célèbrent l’Empereur, sa famille et ses victoires militaires. Le registre des arrêtés du recteur est jalonné de tels événements : le 5 juin 1811, il arrête, à la suite d’une injonction du grand maître, la célébration de la naissance de Sa Majesté le roi de Rome avec un Te Deum chanté devant « tous les fonctionnaires de l’instruction publique » et avec « toute la solennité dont elle peut être susceptible ». Le rassemblement devait se faire dans la maison du recteur, siège de l’académie, avant d’aller « en grand costume » au lycée59. Un autre arrêté du 29 novembre 1811 organise un nouveau Te Deum à la cathédrale pour célébrer l’anniversaire du couronnement de Sa Majesté. Tous les fonctionnaires de l’instruction publique et tous les membres des facultés toulousaines devaient y assister60. Les expressions publiques du recteur concernant l’Empereur et l’Empire sont rares dans les documents consultés. Un texte imprimé à l’occasion d’un discours prononcé avant la distribution des prix du lycée de Toulouse permet de constater une adhésion publique claire : ces couronnes « doivent surtout élever vos âmes vers le souverain qui d’une main recule les bornes de l’empire, et présente sans cesse de l’autre des palmes aux talens vainqueurs. Ce héros qui préside aux destinées de la France a senti que l’instruction est le premier besoin des peuples […]. Les mœurs sont aujourd’hui sur le trône. En élevant le plus beau monument aux lettres et aux sciences, la Majesté impériale et royale déclare que la Religion doit être la base de tout enseignement61». On peut se demander si Jamme admire moins le héros que le souverain qui valorise l’instruction et défend la religion.
- 62 B. U. Arsenal, Service du livre ancien, Ms. 148, le 21 juin 1814. La brochure se trouve à la Biblio (...)
52La Première Restauration libère manifestement le royaliste bridé chez lui. Le 21 juin 1814, Jamme écrivit au grand maître pour lui envoyer une brochure intitulée Claudien ressuscité au mois d’avril 1814 ou centon tiré des ouvrages de ce poète, sur l’élévation et les ruines de la tyrannie de Buonaparte. Il s’agissait d’un montage d’extraits des écrits de Claudien, poète romain (370-407), détournés pour dénoncer la vie et l’œuvre de Napoléon. La traduction en français est accompagnée de titres en marge qui incitent explicitement le lecteur à faire le lien entre les événements romains et la vie et les œuvres de Napoléon, entre la campagne d’Italie et les « adieux au tyran ». Le texte s’achève sur une « prière des Français à Louis XVIII ». Jamme cherche à donner ainsi des gages politiques aux nouvelles autorités royales62.
- 63 Ibid.
- 64 Ibid.
53Les preuves de son royalisme se multiplient dans les mois qui suivent. Le 19 juillet, Jamme indiqua au grand maître qu’il avait, en tant que président de l’Académie des Sciences, « proposé un prix extraordinaire d’un lys d’or de la valeur de 600 francs destiné au meilleur éloge de Louis XVI » en vue des cérémonies du 21 janvier 181563. Le 1er août, il expliqua au grand maître les sujets de composition pour les différentes classes du lycée, tant en latin, qu’en français : « Tous sont relatifs aux heureux événements que la France a si bien senti et dont il est important de nourrir le cœur des jeunes gens… », faisant référence au retour des Bourbons64. Le grand jour fut celui du 4 août 1814, lorsque Jamme prononça un éloge de Louis XVI en présence des corps constitués, des facultés et des membres de l’instruction publique. Ce discours fut imprimé et Jamme inonda le grand maître de lettres qui cherchaient à le faire connaître jusqu’au sommets de l’État. Le recteur rappela à ses auditeurs toulousains qu’il avait prononcé un éloge de Louis XV quarante ans plus tôt :
Quand j’exprimai, il y a quarante ans, les regrets de l’Académie des Jeux floraux, sur la tombe de Louis XV, pouvais-je me croire destiné à rouvrir aujourd’hui, l’effroyable plaie que la plus infernale férocité a faite à la France, en traînant sur l’échafaud le successeur de 66 rois ?
54La Révolution et l’Empire portent, pour Jamme, la responsabilité d’avoir rompu cette succession royale. Si le jeune Jamme avait été royaliste, il s’affichait aussi comme un homme des Lumières. Or, en 1814, il semble avoir mis une distance entre lui et cet état d’esprit :
- 65 Jamme (Alexandre-Auguste), Eloge de Louis XVI, roi de France, prononcé le 4 août 1814…, Toulouse, M (...)
Grand Dieu, que vos jugements sont impénétrables ! La dépravation des mœurs, l’esprit d’irréligion qui s’était rendu dans presque tous les rangs de la société, l’audace de cette philosophie impie qui voulait braver votre toute-puissance, avaient-ils comblé la mesure des vases de votre colère65 ?
- 66 BU Arsenal, Service du livre ancien, Ms. 148, 10 août 1814.
55Dans une lettre du 10 août au Grand Maître, Jamme se vante de la réception du discours : « L’indulgence du public a été poussée si loin que quoiqu’on n’applaudisse pas à des discours de ce genre, les applaudissements réitérés m’interrompirent plusieurs fois », et plusieurs auditeurs demandèrent l’impression du discours66. On pourrait multiplier les exemples de l’empressement du recteur à montrer un royalisme qui était probablement plus sincère et plus profond que son allégeance à l’Empire.
- 67 Ibid.
- 68 Ibid.
- 69 Ibid.
- 70 Ibid., le 20 mai 1815.
56Comment ce recteur royaliste a-t-il négocié le délicat tournant des Cent Jours ? Sa correspondance ne révèle pas de grandes envolées après le retour de Napoléon à Paris. Le principal sujet ayant un lien avec les changements politiques concerne l’obligation faite aux fonctionnaires de prêter serment à partir du 8 avril 1815. Dès le 24 avril, le registre de correspondance montre un refus important des enseignants de prêter serment à l’Empereur, d’où une vague de démissions. Le recteur est chargé de collecter les serments et de les faire remonter à Paris. Jamme mit en garde le grand maître sur les retards qui risquaient de se multiplier à la suite des courriers transmis aux établissements dans toute l’académie67. Le 27 avril, il fit part de la démission de M. Pijon, professeur et doyen de la faculté de théologie, acte très certainement lié à son refus de prêter le serment. Jamme refusa d’accepter sa démission et lui commanda de continuer ses fonctions jusqu’à son acceptation par les autorités impériales. Commentaire de Jamme : « Il est à craindre que l’exigence du serment prive l’académie de beaucoup de talens »68. Le 2 mai, ce furent quatre professeurs du lycée de Toulouse et le censeur qui lui remirent leurs démissions, toujours pour la même raison. Comme pour le doyen Pijon, Jamme regrette les démissions et demande aux démissionnaires de rester en poste le temps que le grand maître accepte leurs démissions. Le 10 mai, Jamme annonça le refus de son propre fils, professeur à la faculté de théologie, de prêter le serment. Sur le registre de correspondance, on voit bien que son fils l’a obligé à écrire les mots : « qu’il refuse de prêter69 ». Enfin, le 18 mai, le recteur écrivit une longue lettre au grand maître pour se plaindre du préfet de la Haute-Garonne, le comte Treilhard, qui avait pris les devants de leurs postes en expulsant ceux qui avaient refusé de prêter serment, ce qui aboutirait à faire le vide dans les rangs des enseignants de lycée et d’université. Si Jamme est clairement furieux contre cette initiative, on peut penser que c’était parce qu’il avait cherché à gagner du temps. La situation politique et militaire était très instable ; n’espérait-il pas que l’Empereur allait être vaincu de nouveau et la monarchie rétablie incessamment ? Jamme annonça la couleur en notifiant au grand maître que la confection des tableaux des prestataires de serment (ou du tableau des refus de serment) allait prendre du retard, tout en maintenant ostensiblement les démissionnaires dans leurs postes en attendant des allers-retours de courriers entre Paris et Toulouse. En outre, il fit des commentaires qui montrent combien ces démissions allaient poser problème : « Il n’est pas facile, surtout en province, de remplacer les hommes que nous avons. Ce n’est pas en un instant et par l’imposition des mains qu’on crée des professeurs dignes de ce nom70 ». En purgeant l’instruction publique de la Haute-Garonne de son propre chef, le préfet déjoua la tactique dilatoire du recteur et le mit devant le fait accompli.
Conclusion
- 71 Woloch (Isser), The New Regime. Transformations of the French Civic Order, 1789-1820s, New York, W. (...)
57Alexandre-Auguste Jamme a été démis de ses fonctions de recteur en octobre 1815. Il était alors âgé de 79 ans et prit une retraite bien méritée. Cet avocat de renom avant la Révolution est une des rares personnalités toulousaines à avoir joué un rôle important dans la cité aussi bien avant 1789 qu’après 1800, les années révolutionnaires ayant sacrifié bien des hommes pro et contre-révolutionnaires. Il représente une sorte de trait d’union entre l’Ancien et le « Nouveau » régime, pour reprendre le terme d’Isser Woloch71. Restaurateur de plusieurs institutions de l’Ancien Régime, Jamme fut chargé par le régime impérial à la fois de restaurer le système éducatif régional et de mettre en place un nouveau système où l’État jouait désormais le premier rôle au détriment de l’Église. Profondément conservateur, sans doute catholique bon teint (son seul fils survivant était prêtre et professeur de théologie), Jamme défendit pourtant avec constance le monopole de l’Université contre les tentatives des institutions scolaires religieuses de reprendre la main, notamment lors de la première Restauration.
58Académicien et juriste, Jamme montre, au travers de sa correspondance, un goût certain pour les cérémonies, les discours, les éloges ; en même temps, il emploie son expérience professionnelle pour conseiller le grand maître sur la place du droit romain dans le cursus des étudiants de droit et sur les dangers d’une stratégie judiciaire dans les affaires de rétribution en 1814 et 1815. En tout cas, le doyen des recteurs impériaux donne l’impression d’être en pleine possession de toutes ses facultés jusqu’au dernier jour de sa charge et d’être doté d’une énergie peu commune. En dernier lieu, on peut dire qu’il a été un fidèle serviteur de l’Empereur et un fonctionnaire zélé de la monarchie restaurée.
Notes
1 Condette (Jean-François), Les recteurs d’académie en France de 1808 à 1940, t. 1, L a formation d’une élite administrative au service de l’instruction publique, Lyon, Institut national de la recherche pédagogique, collection « Histoire biographique de l’enseignement », 2006.
2 La Biographie toulousaine de 1823 le fait naître à Toulouse, d’autres notices biographiques lui donnent Mons, en HauteGaronne, comme patrie. Presque tous les auteurs lui font naître en 1736. Patrick Ferté m’a signalé que les inscriptions de Jamme comme étudiant à la faculté de droit lui donnent des origines dans le diocèse de Saint-Pons, dans l’actuel département de l’Hérault. J’ai consulté les registres paroissiaux en ligne pour la paroisse de Mons (sur le site des Archives départementales de l’Hérault) pour trouver son acte de baptême qui se trouve à la date du 25 juillet 1737. Archives départementales de l’Hérault, commune de Mons-la-Trivalle, registres des années 1737-1764, 3E 165/1. Petit détail : l’acte de baptême déclare que l’enfant se prénomme Auguste-Alexandre. Je n’ai pas vu d’autres sources qui indiquent cet ordre dans ses prénoms ; à quel moment a-t-il inversé ses prénoms ? Lors de son inscription en droit à Toulouse en 1760, il est déjà Alexandre-Auguste. Je remercie Patrick Ferté pour les informations sur les inscriptions universitaires de Jamme et Monsieur Bernard Silvestre pour la bonne piste concernant l’acte de baptême.
3 Voir plusieurs notices biographiques de Jamme : Biographie toulousaine ou Dictionnaire historique des personnages qu se sont rendus célèbres dans la ville de Toulouse…, par une société de gens de lettres, Paris, Michaud, 1823, t. 1, 330-333 ; Tajan (M.), « Éloge de M. Jamme », Recueil de l’Académie des Jeux floraux, 1819, Toulouse, Dalles, 1819, p. 27-39 ; Poumarède (J.), « Jamme, Alexandre-Auguste », dans de Arabeyre (P.), Halpérin (J.-L.) et Krynen (J) dir., Dictionnaire historique des juristes français, XIIe-XXe siècle, Paris, PUF, collection Quadriges, 2007, p. 421-422.
4 Poèmes cités par Tajan dans son « Éloge à M. Jamme », op. cit., p. 30. Pour le lien entre sciences et Lumières, voir, entre autres, Dupront (Alphonse), Qu’est-ce que les Lumières ?, Paris, Gallimard, collection Folio Histoire, 1996.
5 Taillefer (M.), « Les avocats dans les sociétés savantes et les loges maçonniques de l’époque des Lumières », dans Gazzaniga (Jean-Louis) dir., Histoire des avocats et du barreau de Toulouse, Toulouse, Privat, 1992, p. 194.
6 Taillefer (M.), Une académie interprète des Lumières. L’Académie des Sciences, Inscriptions et Belles-Lettres de Toulouse au XVIIIe siècle, Paris, Éditions du CNRS, 1984, p. 232.
7 Taillefer (M.), « Les avocats dans les sociétés savantes et les loges maçonniques », op. cit., p. 193.
8 Ibid. Voir également Tajan (M.), Éloge, op. cit., p. 31.
9 Taillefer (M.), La franc-maçonnerie toulousaine : 1741-1799, Paris, ENSB-CTHS, Comité d’histoire de la Révolution française, Mémoires et documents XLI, 1984, p. 136-137. Voir aussi Berlanstein (Lenard R.), The Barristers of Toulouse en the Eighteenth Century (1740-1793), Baltimore, The Johns Hopkins University Press, 1975, p. 125.
10 Taillefer (M.), Une académie interprète des Lumières, op. cit., p. 65
11 Berlanstein (Lenard R.), The Barristers of Toulouse, op. cit., p. 15.
12 Gourvat (Thierry), Les mémoires judiciaires des avocats au parlement de Toulouse (1770- 1790), mémoire de DEA, Université de Toulouse-Le Mirail, 1999, p. 112 : l’auteur dit avoir trouvé 26 mémoires de Jamme pour les années 1772-1788.
13 Mémoire pour Catherine Estinès, habitante de Cazaux, condamnée par les officiers du siège royal de Rivière, dans le comté de Comminges, à avoir le poing coupé et à être brûlée, contre les officiers dudit siège, Toulouse, imprimerie de J. J. Robert, 1787 (signé Jamme).
14 Affiches de Toulouse, 4 et 11 juillet 1787, Bibliothèque municipale de Toulouse, microfilm n° 145 ; voir aussi les Mémoires secrets de Bachaumont, t. 35, p. 361 ; le Mercure de France du 4 août 1787 (n° 31), p. 24-25. Sur l’affaire Estinès et le rôle des avocats, voir Tajan (Mathieu) et Thomas (Jack), « L’affaire Catherine Estinès : les racines familiales et villageoises d’une cause célèbre à la fin de l’Ancien Régime », dans D’un versant à l’autre des Pyrénées, Actes du 51e Congrès de la Fédération des sociétés académiques et savantes Languedoc-Pyrénées-Gascogne, Saint-Girons, juin 1998, Toulouse, Imprimerie Messages, 1999, t . 1, p. 139-155 ; et Thomas (Jack), « Les victimes accusées dans plusieurs causes célèbres à la fin de l’Ancien Régime », dans GARNOt (Benoît) dir., Les Victimes, des oubliées de l’histoire ?, Rennes, PUR, 2000, p. 75- 86.
15 Instruction concernant la vie et les voyages d’Arnaud Lamaure suivie de ses auditions catégoriques et de quelques réflexions d’un patriote ami de la vérité, Toulouse, Bésian, libraire, 1786 (mémoire non signé par Jamme mais vraisemblablement de lui car il était reconnu comme le défenseur de Lamaure). Pour l’acte de décès d’Arnaud Lamaure (selon l’état civil), voir Archives municipales de Toulouse, 1 E 221, Etat civil Toulouse, décès, le 25 thermidor an VI (le 12 août 1798). Sur cette affaire voir Thomas (Jack), « Un fils de Martin Guerre : le vrai-faux retour d’Arnaud Lamaure à Toulouse à la fin du XVIIIe siècle », Annales du Midi, t. 120, n° 264 octobre-décembre 2008, p. 535-561.
16 Berlanstein (Lenard R.), The Barristers of Toulouse, op. cit., p. 144-145.
17 Tajan (M.), « Eloge de M. Jamme », op. cit., p. 32-34.
18 Berlanstein (Lenard R.), The Barristers of Toulouse, op. cit., p. 149-152.
19 Ibid., p. 154-157.
20 Ibid. p .153-154, 161; en fait, c’est Jamme lui-même qui donna cette version des événements dans son texte Aux maires et officiers municipaux, aux autorités constituées, aux Comités de surveillance et aux membres de la Société populaire de Toulouse, 1793, p. 4.
21 Dans sa lettre Aux maire et officiers municipaux de 1793, op. cit., Jamme s’en explique de la façon suivante : « Je n’ai rien sollicité, on ne m’a rien offert », p. 4.
22 Lyons (Martyn), Révolution et Terreur à Toulouse, traduction par Philippe Wolff, préface de Jacques Godechot, Toulouse, Privat, collection « le Midi et son histoire »,1980, p. 49-50.
23 Adresses de la Seconde légion de Saint-Barthélemi, au Roi et à l’Assemblée nationale. En exécution de la délibération du 22 mai 1790, Toulouse, 1790.
24 Berlanstein (Lenard R.), The Barristers of Toulouse, op. cit., p. 163-165 pour l’ensemble de ces événements.
25 Sur le texte du parlement et ses conséquences, voir Sicard (Germain), « Le procès des parlementaires toulousains devant le tribunal révolutionnaire », dans Poumarède (Jacques) et Thomas (Jack) dir., Les parlements de province. Pouvoirs, justice et société du XVe au XVIIIe siècle, Toulouse, Framespa, collection Méridiennes,1996, p. 577-597.
26 Tajan (M.), « Eloge de M. Jamme », op. cit., p. 36.
27 Dans sa lettre Aux maires et officiers municipaux…, op. cit., Jamme fait un plaidoyer pro domo afin d’éloigner les soupçons d’incivisme qui pesaient sur lui et qui allaient l’obliger de s’enfuir jusqu’à la fin de la Terreur.
28 Poumarède (Jacques), « Le barreau et l’université », dans Histoire des avocats et du barreau de Toulouse, op. cit., p. 171-174.
29 Monestier (J.), « Les avocats mainteneurs de l’Académie des Jeux floraux de Toulouse (1694-1989) », Revue internationale d’histoire de la profession d’avocat, n° 2, juin 1990, p. 50- 51.
30 Tajan (M.), « Éloge de M. Jamme », op. cit., p. 37.
31 Picot de Lapeyrouse était également professeur et doyen de la faculté de sciences.
32 Aldéguier (J.-B.-A. d’), Histoire de la ville de Toulouse depuis la conquête des Romains jusqu’à nos jours, t. 4, Toulouse, J-B. Paya, 1835, p. 605-606.
33 Bibliothèque universitaire de l’Arsenal, Service des livres anciens (désormais B. U. Arsenal), Ms. 148, Correspondance, le 7 mars 1814 et le 9 septembre 1815.
34 Pour l’ensemble des caractéristiques des premiers recteurs, voir Condette (Jean-François), Les recteurs d’académie en France de 1808 à 1940, op. cit., t. 1, p. 222-234.
35 Gontard (Maurice), « Un administrateur de l’Université impériale, André-Alexandre d’Eymar, recteur de l’académie d’Aix », 95e Congrès national des sociétés savantes, Reims, 1970, t. 1, Histoire de l’enseignement de 1610 à nos jours, Paris, Bibliothèque nationale, 1974, p. 761-789.
36 Sentou (Jean), « Jamme », dans Wolff (Philippe) dir., Les Toulousains dans l’Histoire, Toulouse, Privat, collection « Les hommes dans l’histoire »,1984, p. 336-337.
37 B. U. Arsenal, Service des livres anciens, Ms. 146, Registre des arrêtés du recteur à partir du 24 août 1810.
38 Quénet (Maurice), « L’installation des recteurs napoléoniens : des hommes nouveaux dans des bâtiments anciens », dans. Bardet (J.-P.), Dinet (D.), Poussou (J.-P.), Vignal (M.-C.), Etat et société en France au XVIIe et XVIIIe siècles : Mélanges offerts à Yves Durand, Paris, Presses de l’Université Paris-Sorbonne, 2000, p. 463-464. Quénet cite les promesses sans suite faites par les autorités municipales de Toulouse.
39 B. U. Arsenal, Service des livres anciens, Ms .147, correspondance active du recteur avec le grand maître, 1810-1813, 1er janvier 1811.
40 Ibid., 6 octobre 1810.
41 Ibid., 10 janvier 1811.
42 B. U. Arsenal, Service des livres anciens, Ms. 146, Registre des arrêtés du recteur, le 19 octobre 1810.
43 B. U. Arsenal, Service des livres anciens, Ms. 147, Correspondance, 10 janvier 1811.
44 Ibid., entre le 17 et le 22 novembre 1810.
45 Condette (Jean-François), Les recteurs d’académie, op. cit., p. 65.
46 B. U. Arsenal, Service du livre ancien, Correspondance, mai 1814.
47 Ibid. 26 mai 1814.
48 Ibid., 1 août 1814.
49 Ibid., 19 août 1814.
50 Ibid., 2 janvier 1815.
51 Ibid.
52 Ibid.
53 Ibid.
54 Maza (Sara), Vies privées, affaires publiques. Les causes célèbres de la France prérévolutionnaire, traduit de l’américain par Christophe Beslon et Pierre-Emmanuel Dauzat, Paris, Fayard, 1997, 384 p.
55 B. U. Arsenal, Service du livre ancien, 10 février 1815.
56 Ibid., 2 octobre 1810.
57 Ibid., 6 novembre 1810, 24 novembre 1810 (question de préséance entre les professeurs du lycée et ceux de l’école militaire).
58 Ibid., 6 décembre 1810.
59 B. U. Arsenal, Service du livre ancien, Ms. 146, Registre des arrêtés du recteur, commencé le 24 août 1810.
60 Ibid.
61 Discours prononcé par Monsieur Jamme, recteur de l’Académie impériale de Toulouse, avant la distribution des prix du Lycée de cette ville, Toulouse, chez Benichet cadet (sans date), 4 p.
62 B. U. Arsenal, Service du livre ancien, Ms. 148, le 21 juin 1814. La brochure se trouve à la Bibliothèque municipale de Toulouse : Claudien ressuscité au mois d’avril MDCCCXIV ou Centon tiré des ouvrages de ce poète sur l’élévation et la ruine de la tyrannie de Buonaparte et accompagné de la traduction par L. A. Décampe, Toulouse, impr. J.-M. Douladoure, sans date, 33 p.
63 Ibid.
64 Ibid.
65 Jamme (Alexandre-Auguste), Eloge de Louis XVI, roi de France, prononcé le 4 août 1814…, Toulouse, M-J. Dalles, 1814, p. 5-6.
66 BU Arsenal, Service du livre ancien, Ms. 148, 10 août 1814.
67 Ibid.
68 Ibid.
69 Ibid.
70 Ibid., le 20 mai 1815.
71 Woloch (Isser), The New Regime. Transformations of the French Civic Order, 1789-1820s, New York, W.W. Norton, 1994, 536 p.
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