Les Recteurs et le rectorat de l’académie de Toulouse (1808-2008)
|Première partie. Mises en perspective
Entre le local et le central la fonction rectorale et ses mutations de 1808 à 1940
Texte intégral
1Le recteur apparaît dans l’imaginaire collectif comme un homme de l’ombre, disposant certes de pouvoirs importants mais dont l’opinion publique, tout comme le personnel de l’Éducation nationale, ont parfois tendance à grandir les attributions discrétionnaires, sinon à noircir le rôle, en le transformant en agent d’exécution des basses œuvres du ministère parisien. Pour l’observateur étranger, le recteur français demeure également une énigme et une exception, lui qui dirige un espace géographique spécifique – l’académie – en tant que représentant nommé par le ministre, alors qu’ailleurs dans le monde, le recteur est resté le président d’une université, tirant sa légitimité de son élection par les pairs. Il faut dire que la fonction rectorale, née du décret napoléonien du 17 mars 1808, a vite donné lieu à la construction d’une légende noire, diffusée à l’intérieur du monde éducatif. On voit ainsi se dessiner, en filigrane, derrière les multiples notices du XIXe siècle, une image dégradée de la fonction qui repose sur trois idées.
- 1 Voir Condette (Jean-François), « Traîtres fatigués ou élites administratives : une recherc (...)
- 2 Proff (L.-W.), « Le fonctionnarisme et l’enseignement secondaire », Revue internationale d (...)
- 3 PAyot (Jules), La faillite de l’enseignement, Paris, Felix Alcan, 1937, p. 36.
- 4 Ibid., p. 141.
2Fonctionnaire de l’État, travaillant à la destruction des petites patries académiques et des libertés locales au nom de l’unité nécessaire de la nation, le recteur apparaît comme un suppôt de la centralisation, envoyé en province pour mieux contrôler la vie quotidienne des institutions d’enseignement. Il devient alors l’incarnation de la bureaucratie tracassière1. Dans un système perçu comme centralisé, le niveau académique n’a aucun intérêt, le recteur ne faisant qu’appliquer les décisions venant de Paris et se voyant doté d’un degré zéro d’initiative. C’est ce que signale L.-W. Proff, dans un article de la Revue internationale de l’enseignement en 1892 : « Les académies ne sont que des rouages importants sans autonomie ou, si l’on veut, de grosses courroies de transmission2 ». Jules Payot, dans La Faillite de l’enseignement, insiste sur cette bureaucratie envahissante. Inspecteur d’académie puis recteur, il n’a cessé de militer pour d’importantes réformes mais s’est heurté à la routine et dénonce alors l’organisation césarienne de l’Université. Le ministre doit s’occuper de multiples problèmes en même temps et ce sont les bureaux et leurs commis qui prennent les décisions. Ils appliquent les règlements et on ne peut leur demander de l’initiative. « Au contraire, toute initiative les affole, car il n’y a pas de précédents3 ». Comme l’administration ne fait pas, chaque jour, le tri de ce qui est essentiel et de ce qui ne l’est pas, « elle finit par ressembler au ver à soie qui s’emprisonne lui-même dans le cocon qu’il tisse4 ».
- 5 Sarcey (Francisque), Souvenirs de jeunesse, Paris, Paul Ollendorff éditeur, 1885, p. 190.
- 6 Rascol (Louis), Claude-Marie Perroud : La vie et l’œuvre d’un universitaire au XIXe siècle(...)
3Dans le même temps, le personnel administratif de l’Instruction publique est longtemps accusé d’incompétence et d’arrivisme. Francisque Sarcey note ainsi, en 1885 : « Il faut dire que dans l’Université, jamais […] le personnel administratif n’avait été à la hauteur du personnel enseignant. […]. C’était un préjugé courant chez nous que l’administration se recrutait parmi les fruits secs de l’enseignement5 ». Claude Perroud, futur recteur toulousain, se souvient de l’abbé Juste, recteur de l’académie de Clermont-Ferrand alors qu’il débutait dans l’enseignement en 1865- 1867. « Il était célèbre pour son avarice […]. On racontait qu’il avait réclamé à la ville une allocation pour la nourriture de son chien parce que c’était un chien de garde, l’hôtel de l’académie étant un bâtiment municipal ». Plus loin, revenant sur la situation qu’il découvre à Toulouse, il note : « En deux ans, cinq recteurs s’étaient succédés […]. Mon prédécesseur […], muté à Toulouse à la veille de la retraite, n’avait même pas défait ses valises […]. Tel autre, après deux ans de séjour, n’avait laissé dans les archives qu’un seul rapport écrit de sa main6 ».
- 7 Gusdorf (Georges), L’Université en question, Paris, Payot ,1964, p. 141-142 et p. 148-149.
- 8 Annuaire des anciens élèves de l’École normale supérieure, 1923, p. 79 à 84.
- 9 Ibid., tome 1912, p. 9.
- 10 Archives nationales, F17 20387, Lettre d’Émile Charles au ministre, datée du 2 octobre 187 (...)
4À ces critiques, s’ajoute enfin un reproche implicite de trahison. Dans un monde universitaire très attaché à la défense de ses franchises particulières, le candidat aux fonctions rectorales, s’il est membre du sérail, apparaît comme un déserteur qui accepte de se mettre au service du pouvoir. « En France, le recteur n’est pas l’incarnation des franchises universitaires ; il en est très exactement la négation7 », note encore Georges Gusdorf en 1964. « Agent d’exécution, il est là pour mettre en œuvre les directives du pouvoir […]. C’est dire qu’il a aliéné sa liberté ». Dès lors, de multiples notices utilisent un argument sanitaire pour justifier l’abandon du métier d’enseignant. Francisque Sarcey décrit ainsi le recteur Auguste Nisard : « C’était un universitaire de la vieille roche, très amoureux des lettres latines et grecques et qui n’avait accepté les fonctions administratives que lorsque la fatigue physique l’avait obligé de renoncer à sa chère rhétorique ». La notice du recteur Antoine Benoist (1846- 1922) relève : « Ce n’est qu’en 1898, se sentant obligé de ménager sa gorge, qu’il accepta le rectorat de Grenoble8 ». Celle du recteur Théodore Hanriot (1811-1911) explique qu’après « dix ans d’enseignement au collège royal de Nancy, Hanriot, fatigué et souffrant de laryngite, se détermina à demander une place d’inspecteur d’académie puis de recteur9 ». Émile Charles (1825-1897), longtemps professeur de philosophie, demande, dans une lettre du 2 octobre 1872, sa nomination dans l’administration : « L’état de ma santé me rend très dangereux sinon impossible l’enseignement de la philosophie […]. Pour éviter la fatigue de la parole […], je ne puis que demander à entrer dans l’administration10 ». Il est alors nommé recteur à Clermont en 1874. Le rectorat devient ainsi, dans l’imaginaire hostile de la plupart des membres de l’enseignement, un aréopage d’enseignants fatigués.
- 11 Voir Durand-Prinborgne (Claude), « Le recteur : De la déconcentration à la décentralisatio (...)
- 12 Pour disposer de multiples exemples, voir Condette (Jean-François), Le recteur d’académie, (...)
5Deux cents ans plus tard, la fonction rectorale est toujours présente dans le paysage éducatif français et le recteur se retrouve doté de pouvoirs démultipliés par la politique de déconcentration, alors qu’il est aussi devenu le pilote de la politique éducative académique et un véritable « manager » de l’Éducation nationale, négociateur en lien avec les multiples partenaires promus par les lois de décentralisation des années 198011. La spécificité française est toujours bien là et il est alors intéressant de tenter de revenir, à grands traits12, sur l’évolution de la fonction rectorale entre 1808 et 1940.
Une fondation napoléonienne contestée mais conservée par la monarchie (1808-1848)
6Le recteur, défini comme chef d’une circonscription territoriale appelée académie, est une création napoléonienne qui suit de peu la loi fondamentale du 10 mai 1806 fondant l’Université. Celle-ci regroupe l’ensemble des niveaux d’enseignement sous l’autorité du Grand-Maître. L’important décret du 17 mars 1808 organise cette Université et fait apparaître la fonction de recteur, représentant direct du pouvoir central, qui doit se mettre au service des ambitions éducatives mais aussi politiques de l’Empereur. Menacée de disparition lors de la première Restauration, la fonction est ensuite maintenue sans grand changement.
Le recteur d’académie : une fondation napoléonienne (1808-1815)
- 13 Voir Boudon (Jacques-Olivier) dir., Napoléon et les lycées, Paris, Bibliothèque Napoléon, (...)
7La désorganisation des structures scolaires est forte aux lendemains de la Révolution. Dans le primaire, les diverses tentatives de réorganisation, plus ou moins généreuses, sont peu passées dans la réalité et l’on retrouve globalement la situation d’avant 1789, laissant l’initiative aux seules volontés locales. Dans le secondaire, la suppression des collèges (1793) a laissé un grand vide que les écoles centrales (1795) n’ont pas réussi à combler. Les lycées, fondés par la loi du 1er mai 1802, sont peu nombreux et soumis à de terribles oppositions13. Dans le supérieur, la situation n’est pas bonne depuis la suppression des universités en 1793. Des écoles de santé et des écoles de droit réapparaissent dans certaines villes mais ne forment pas un réseau cohérent d’institutions alors qu’en sciences et en lettres, il devient urgent de songer à restaurer des facultés pour délivrer les grades, en particulier le baccalauréat. Pour l’Empereur, cette situation est inacceptable alors qu’il doit s’assurer du contrôle des esprits et de la formation de nombreux cadres. La naissance de l’Université en 1806 a, dès lors, pour but d’affirmer les prérogatives de l’État en matière éducative alors que les établissements privés, qu’ils soient confessionnels ou laïques, se multiplient et menacent l’existence des établissements publics. L’Université jouit du monopole de l’enseignement et se définit comme un système autoritaire centralisé, contrôlé par le Grand-Maître, travaillant directement sous les ordres de l’Empereur. Tous les enseignants sont obligatoirement membres de cette corporation publique.
- 14 Bulletin des Lois, n° 1 85, Décret impérial du 17 mars 1808, p. 145 à 171.
8Le décret impérial du 17 mars 1808 définit ensuite précisément la structure et les missions de la création napoléonienne. « L’enseignement public de tout l’Empire est confié exclusivement à l’Université (article 1)14 ». L’Université impériale sera composée d’autant d’académies qu’il y a de cours d’appel. Chaque académie est gouvernée par un recteur, sous les ordres du Grand-Maître. Le recteur assiste aux examens et réceptions des facultés, vise et délivre les diplômes qui sont ensuite ratifiés par le Grand-Maître (article 96). Il doit entendre les rapports réalisés par les doyens des facultés, les proviseurs des lycées et les principaux des collèges sur l’état de leur établissement. Le recteur en dirige l’administration surtout « sous le rapport de la sévérité dans la discipline et de l’économie dans les dépenses » (article 97). Il fait surveiller les écoles, les collèges et les pensions par les inspecteurs d’académie et doit lui-même réaliser de nombreuses visites dans les établissements (article 98). La création napoléonienne fait ainsi du recteur une pièce maîtresse des rouages administratifs qui définissent l’Université. Ce dernier est alors un agent de l’État qui surveille et dynamise les divers établissements d’enseignement de l’entité territoriale qu’il dirige par décision du pouvoir central.
9Il ne faut cependant pas imaginer le recteur napoléonien comme un administrateur omnipotent et les premiers titulaires doivent mener une véritable lutte pour la vie. Ils sont des hommes presque seuls, envoyés dans une académie immense où il est encore difficile de se déplacer. Ils ne disposent que de leurs inspecteurs d’académie et d’un ou de quelques commis. Ils doivent lutter pour disposer d’un logement et de bureaux et trouvent en face d’eux la mauvaise volonté des autorités locales, la méfiance des évêques et des préfets peu favorables à l’arrivée de ce nouveau représentant de l’État. La municipalité rechigne souvent à le loger et un rapport en avril 1812 relève :
- 15 Archives nationales, F17 1645, Frais d’installation des recteurs, rapport au Grand-Maître (...)
Malgré les demandes réitérées de votre Excellence aux autorités, malgré les demandes de Messieurs les inspecteurs généraux et les sollicitations des recteurs, à peine quatorze académies sont-elles installées dans leur chef-lieu définitif […]. Plusieurs villes et je citerai particulièrement Besançon et Bordeaux refusent de fournir un local ; d’autres ont prétendu n’avoir point de bâtiment disponible […]. Quelques recteurs se sont établis dans le lycée […]. Les autres se sont trouvés dans la nécessité de louer, à leurs frais, le bâtiment qui sert provisoirement à leur administration15.
- 16 Gontard (Maurice), « Un administrateur de l’Université impériale : André-Alexandre d’Eymar (...)
10Le recteur André-Alexandre d’Eymar (Aix) connaît, comme ses collègues, des débuts difficiles16. Nommé en mars 1809, il est longtemps un homme seul. Il ne voit arriver les deux inspecteurs d’académie qu’en 1810 et le conseil académique n’est installé qu’en novembre 1812. Il loge ses services à son domicile personnel puis dans le bâtiment de l’ancienne université qui est dans un état de délabrement avancé. Le registre des établissements de l’académie, remis par le Grand-Maître, ne contient pas le tiers des établissements réellement présents. Il rencontre de grandes difficultés pour collecter le vingtième des frais de pension versés par chaque élève des établissements secondaires.
- 17 Nique (Christian), Charles-Louis Dumas (1765-1813) : premier recteur de l’académie de Mont (...)
- 18 Archives nationales, F17 1645, Lettre du recteur de Montpellier au Grand-Maître, 7 janvier (...)
11À Montpellier, le recteur Charles-Louis Dumas, nommé en août 1809, est aussi le doyen de la faculté de médecine. Sans hôtel académique, il installe ses bureaux dans le logement de fonction dont il dispose en tant que doyen17. Ses multiples démarches auprès de la municipalité n’aboutissent pas et c’est son successeur qui trouve la solution en 1817, après bien des luttes. Victor de Bonald écrit ainsi au Grand-Maître, le 7 janvier 1814 : « Il y a, à Montpellier, une maison qui est depuis longtemps en vente et qui, par sa situation et sa distribution intérieure conviendrait à un établissement public18 ». Il évalue la somme à 60.000 francs mais comme la municipalité refuse la dépense, il propose au maire de la louer à ses frais, en attendant que la commune puisse réaliser l’acquisition. Le conseil municipal, le 6 janvier 1814, répond par la négative. Le recteur de Montpellier doit attendre avril 1810 pour disposer d’un secrétaire et les deux inspecteurs d’académie arrivent en février 1810.
- 19 Bulletin des Lois, 1811, n° 402, Décret impérial concernant le régime de l’Université, 15 (...)
12Les recteurs napoléoniens donnent la priorité au secondaire et tentent de développer les lycées, surveillant le personnel et les élèves. Il faut surtout lutter contre la concurrence des pensions et des écoles secondaires ecclésiastiques. Dans le supérieur, ils mettent en place les facultés des lettres et des sciences qui, selon le décret du 17 mars 1808, doivent apparaître dans la ville qui est chef-lieu d’académie. Les conclusions pessimistes de l’enquête préfectorale de 1810 sont à l’origine du décret du 15 novembre 1811 qui durcit la politique impériale. Les chefs d’institution ne peuvent élever leur enseignement au-dessus des classes d’humanités dans les villes où il y a un collège ou un lycée. Les maîtres de pension doivent se borner aux classes de grammaire et aux éléments d’arithmétique et de géométrie. Les institutions et pensions « placées dans les villes qui possèdent un lycée ou un collège, ne pourront qu’enseigner les premiers éléments qui ne font pas partie de l’instruction donnée dans les lycées et collèges ». À compter du 1er novembre 1812, les chefs d’institution et les maîtres de pensions « ne pourront avoir de pensionnaires à demeure dans leurs maisons au-dessus de l’âge de 9 ans qu’autant que le nombre de personnes que peut recenser le lycée ou le collège établi dans la même ville […] se trouverait au complet ». Il ne peut pas y avoir plus d’une école secondaire ecclésiastique par département19.
- 20 Circulaires et instructions officielles relatives à l’Instruction publique, Paris, Delalai (...)
13Les difficultés croissantes de l’Empire, les débuts de la Restauration puis les Cent Jours remettent en cause l’autorité rectorale. La période est délicate pour les recteurs qui, pour la plupart, multiplient les actes d’allégeances contradictoires. Avec l’entrée de Louis XVIII à Paris, une ordonnance du 22 juin 1814, maintient temporairement l’Université. « Le trône de Saint-Louis est relevé, sa religion doit régner plus que jamais dans toutes les écoles de la France20». Si l’Université ne se transforme pas rapidement en une citadelle catholique, la fondation napoléonienne est condamnée. Les allusions de Fontanes s’appuient sur une très forte campagne d’opinion orchestrée par les opposants à l’Université. Pour eux, cette dernière est une machine de guerre, essentiellement politique, qui est placée sur le même plan que la police ou que la conscription. L’ordonnance du 17 février 1815, d’inspiration fortement décentralisatrice, n’est pas mise en œuvre, les Cent Jours venant interrompre toute tentative d’application tandis que la seconde Restauration ne reprend pas le projet. La non application du texte maintient alors l’organisation académique napoléonienne.
La priorité rectorale donnée au développement de l’école primaire (1815-1848)
14La monarchie utilise les rouages administratifs de l’Empire en les mettant au service de la royauté et les missions du recteur, définies en 1808, sont maintenues. S’il est, comme sous l’Empire, en charge de tous les ordres d’enseignement, les priorités du recteur de la Restauration et de la monarchie de Juillet vont d’abord à la surveillance des établissements secondaires masculins et au développement du réseau des écoles primaires.
- 21 Bulletin des Lois, n° 73, Ordonnance du 29 février 1816, p. 299-304.
- 22 Archives nationales, F17 10376, Rapport du recteur d’Angers à la Commission, août 1818.
- 23 Archives nationales, F17 10383, Rapport du recteur de Toulouse, 30 septembre 1822.
- 24 Archives nationales, F17 6809-2, Rapport du recteur de l’académie de Metz daté du 31 mai 1 (...)
15Sous la Restauration, le recteur doit tenter de faire appliquer de manière efficace les premiers grands textes qui veulent organiser l’enseignement primaire de manière cohérente, travaillant ainsi progressivement à l’affirmation des prérogatives de l’État sur l’École. Les recteurs luttent pour mettre en œuvre l’ordonnance du 29 févrie r1816 qui doit permettre de relancer l’école primaire. C’est le recteur qui nomme et révoque les instituteurs et doit s’occuper des principales charges administratives les concernant, même si les écoles sont aussi sous l’autorité et la surveillance conjointes des préfets, des maires et du clergé21. Au-dessus du comité local de surveillance, un comité cantonal doit être créé pour surveiller les écoles. Dans le même temps, l’ordonnance exige des futurs maîtres la possession d’un brevet de capacité qui possède trois degrés. De nombreux recteurs tentent de relancer la construction d’écoles, mettent en place les comités cantonaux et font ce qu’ils peuvent pour améliorer les compétences des maîtres, organisant des jurys d’examen avant de leur délivrer, ou non, le brevet de capacité. Le recteur d’Angers, en août 1818, informe le Conseil que, sur 94 comités théoriquement constitués dans son académie, 50 seulement ont accepté de répondre à sa circulaire demandant la liste des instituteurs de leur canton. Parmi les 50, d’ailleurs, beaucoup se sont contentés de renvoyer, sans les remplir, les tableaux adressés par le recteur en s’excusant de n’avoir pu obtenir les renseignements demandés22. Le recteur de Toulouse, pour obtenir les informations, décide d’écrire lui-même aux instituteurs23. Le recteur de Metz, le 31 mai 1817, note : « Lorsque je fus chargé, au mois de juillet, de la direction de l’académie de Metz, l’organisation des comités cantonaux n’était même pas préparée et malgré toute la diligence que j’ai mise à recueillir les renseignements nécessaires pour ce travail, il n’a pu être achevé qu’au mois de septembre […]. L’examen et la classification des instituteurs y sont presque terminés24 ». La concurrence des congrégations et des écoles privées est forte et le travail rectoral demeure très difficile, rencontrant sur sa route l’hostilité fréquente des notables locaux, des évêques et les prêtres mais aussi, bien souvent des préfets qui espèrent reprendre l’essentiel des attributions concernant l’École.
- 25 Archives nationales, F17 9368, Rapport du recteur de l’académie de Toulouse au ministre, d (...)
16Avec la monarchie de Juillet, l’action de l’État se fait plus tenace et plus efficace. La loi Guizot du 28 juin 1833, essentielle pour le développement de l’enseignement primaire, exige un important travail du recteur. Il doit être un « incitateur » qui veille, en concertation avec les inspecteurs d’académie, à l’application la plus efficace possible de la loi. Il faut ici travailler avec les communes, les sous-préfets et les préfets mais aussi avec les membres du clergé. Le recteur passe ainsi beaucoup de temps à mettre en place les comités d’arrondissement qui doivent à la fois stimuler les énergies et surveiller les écoles tout en diffusant « les bonnes méthodes ». Le recteur toulousain Ozanneaux signale à François Guizot, en décembre 1833, que la récente loi est un texte d’avenir pour les zones rurales de son académie, où « l’ignorance la plus profonde jointe à l’indifférence la plus complète pour l’instruction » est partout présente sauf à Toulouse, qui apparaît comme un foyer de lumières, entouré par la barbarie qui « campe à ses portes25 ».
- 26 Nique (Christian), L’impossible gouvernement des esprits, Histoire politique des écoles no (...)
- 27 Voir Rosanvallon (Pierre), Le moment Guizot, Paris, NRF Gallimard, 1985.
17Pour contrôler l’application sur le terrain de l’ensemble de ces mesures, Guizot crée un corps d’inspection. Les recteurs et les inspecteurs d’académie sont trop loin des écoles primaires pour pouvoir impulser les pratiques quotidiennes. En novembre 1834, les six premiers inspecteurs primaires sont nommés à titre provisoire, puis l’ordonnance du 26 février 1836 généralise l’expérience. Pour le recteur, la création progressive des écoles normales masculines lui permet aussi d’affirmer une attribution nouvelle. Même si le préfet et le conseil général sont des acteurs importants du contrôle de l’école normale, cette surveillance des structures de formation professionnelle apparaît comme l’attribution complémentaire majeure de la période26. Alors que les premières créations d’écoles normales sont des initiatives locales, même si elles sont à partir de 1828, incitées par le pouvoir central, alors que leur régime intérieur est marqué par une extrême variété des règlements, le « Moment Guizot27 », par l’intervention déterminante du ministère, marque une importante rupture. Désormais, le pouvoir central entend contrôler et uniformiser la formation. Le règlement du 14 décembre 1832 fixe les grandes règles de fonctionnement des écoles normales avant même d’en imposer l’existence par la loi Guizot. Les recteurs jouent alors un rôle important dans la fondation des écoles normales masculines et dans la surveillance de leurs études.
Le recteur, les enseignements secondaire et supérieur (1815-1848)
- 28 Recueil des lois et règlements concernant l’Instruction publique, Paris, A. Delalain, t. 7 (...)
- 29 Gontard (Maurice), L’enseignement secondaire en France de la fin de l’Ancien Régime à la l (...)
18Profitant de la volonté du Trône de s’appuyer sur l’Autel, les initiatives se multiplient en vue de couvrir la France d’établissements scolaires confiés à des religieux. La contre-offensive rectorale se doit d’être habile car l’image de l’Université immorale ne cesse d’être agitée. Les recteurs tentent alors de défendre les établissements publics contre la concurrence des petits séminaires et des établissements privés. Pour attirer les familles, les collèges doivent être irréprochables. Le statut concernant les collèges royaux et communaux du 4 septembre 1821 réaffirme le cadre réglementaire, fortement marqué par la pratique religieuse28. La monarchie de Juillet poursuit les mêmes combats et doit faire face à la même concurrence. Le combat est permanent et semble mobiliser une grande part de l’énergie rectorale. En 1847, on compte 367 collèges dont 52 collèges royaux (17.850 élèves) et 315 collèges communaux (28.727 élèves). Ces 46.577 élèves du public font face à 980 établissements privés, dont 110 institutions (9.501 élèves) et 870 pensions (30.509 élèves)29. Il faut aussi tenir compte des élèves des petits séminaires, qui sont 18.965 en 1847. Le total des élèves des établissements privés est alors de 58.975 élèves en 1847, soit 55,9 % du total. Les recteurs sont souvent en inspection dans les collèges et évaluent les compétences de leurs personnels. Le soutien rectoral au proviseur n’est pas acquis d’avance. Les inspecteurs généraux notent, à propos du recteur Bernardin Thuillier, en 1838 :
- 30 Archives nationales, F17 6811, Rapport des inspecteurs généraux sur le recteur Thuillier, (...)
M. Thuillier, envoyé à Toulouse avec la difficile mission de remettre en honneur les études sérieuses dans une ville où toutes les facultés semblaient s’être concertées pour éloigner toute idée de travail, pour tenir excessive indulgence, s’est consacré courageusement à cette tâche ingrate […]. Il a obtenu de grandes améliorations mais ce n’a pas été sans soulever des résistances opiniâtres et sans blesser beaucoup d’intérêts. À ces causes d’irritation, M. Thuillier a eu le tort d’en joindre d’autres qu’il aurait pu éviter. Il a traité tous ses subordonnés avec hauteur […]. M. le recteur, ayant presque toujours raison au fond, a souvent dans la forme, prêté le flanc aux attaques de ses ennemis […]. M. Thuillier poursuit d’une haine implacable le proviseur du collège de Toulouse […]. Monsieur le recteur intervient dans les moindres détails de manière à compromettre l’autorité du proviseur30.
19Si la gestion et le développement des enseignements primaire et secondaire occupent une large part de l’emploi du temps rectoral, l’enseignement supérieur ne pèse pas très lourd dans la plupart des académies. Le recteur ne se préoccupe réellement des facultés que pour régler des questions de nomination d’enseignants, d’examens ou pour réprimer des incidents disciplinaires. Seule l’université de Paris conserve un grand prestige mais, en province, les facultés vivent très isolées. La Restauration, méfiante envers le monde étudiant, décide la suppression de nombreuses facultés. En lettres, ne subsistent que six facultés (Besançon, Caen, Dijon, Paris, Strasbourg et Toulouse) pour cinq en sciences (Caen, Montpellier, Paris, Strasbourg et Toulouse). En droit, on compte neuf facultés (Paris, Grenoble, Toulouse, Poitiers, Dijon, Strasbourg, Rennes, Aix et Caen) alors qu’en médecine ne subsistent que les facultés de Paris, de Montpellier et de Strasbourg. La monarchie de Juillet fait ensuite preuve d’une grande timidité pour en fonder de nouvelles. Six facultés des lettres et cinq facultés des sciences réapparaissent, les recteurs participant aux négociations entre les municipalités et le ministère en vue de doter ces structures nouvelles de bâtiments, d’enseignants et de moyens pédagogiques.
- 31 Burney (John M.), Toulouse et son université. Facultés et étudiants dans la France provinc (...)
- 32 Archives nationales, F17 13068, Rapport des inspecteurs généraux, année 1831.
- 33 Archives nationales, F17 13070, Rapport de l’inspecteur général sur la faculté des science (...)
20Toulouse apparaît ici comme une exception, avec quelques grandes villes, par le maintien d’une vie universitaire importante, liée à la présence de plusieurs facultés et de son école de médecine. Il n’en demeure pas moins qu’« aucun étudiant ne s’inscrivit à la faculté des sciences lors de la première décennie de son existence31 ». En mathématiques pures ou appliquées, les étudiants sont douze en 1820-1821. Il y a par contre 90 étudiants dans le cours de physique expérimentale ou 60 en chimie. Le rapport des inspecteurs généraux en 1831 est plus négatif encore. Le professeur Romieu n’a qu’un auditeur en calcul différentiel mais « Monsieur le professeur a eu la complaisance de faire la leçon comme si l’auditoire eût été complet32 ». La faculté ne dispose que deux salles humides dans des bâtiments qui abritent aussi le collège et la bibliothèque municipale, ces deux salles étant aussi celles qui abritent la faculté des lettres. Pour chaque cours, tout le matériel pour les expériences doit être apporté puis débarrassé33. La faculté des lettres toulousaine est dans la même situation, elle qui fut rétablie en 1810 avec quatre chaires (philosophie, histoire, littérature française, littérature latine).
- 34 Burney (John M.), Toulouse et son université…, op. cit., p. 225.
- 35 Archives nationales, F17 4391, Lettre du recteur Thuillier au ministre datée du 7 mai 1839
- 36 Ibid., Lettre du recteur Thuillier parue dans La France méridionale du 13 mai 1839.
21Le manque d’étudiants assidus aux cours est un réel problème pour les autorités universitaires, que les articles 23 à 27 du statut de 1825 tentent de résoudre en ordonnant qu’un appel méticuleux soit opéré. Tout étudiant absent sans excuse à un cours deux fois dans le trimestre perd l’avantage de son inscription. Mais dans la pratique, la tâche est ardue pour les enseignants, qui répugnent à cette opération de police. De nombreux étudiants viennent signer en début d’heure puis s’éclipsent ou font signer des camarades. À la faculté de droit de Toulouse, le professeur Delpech, ulcéré de voir nombre de ses étudiants quitter le cours dès l’appel terminé, exige davantage. En avri l1839, sans avertir les étudiants et sans se concerter avec ses collègues, il se met à faire l’appel au début mais aussi à la fin de son cours, de nombreux absents étant alors signalés au doyen. Le 3 mai, les étudiants mécontents accueillent le professeur Delpech par des battements de pieds et des sifflets. L’assemblée de la faculté condamne, le 5 mai 1839, six étudiants à perdre l’une de leurs inscriptions. Dès lors, l’agitation s’accroît. Lors du cours suivant, le professeur Delpech est chahuté. Le doyen et les autres professeurs arrivent dans la salle et rétablissent l’ordre mais dès que ses collègues se retirent, le professeur Delpech ajoute quelques remontrances personnelles qui font reprendre le tumulte. Le doyen fait évacuer la salle mais les étudiants les plus en colère se précipitent vers les portes extérieures et barrent le passage. Les professeurs se retirent dans leur salle de délibérations. Pendant ce temps, les étudiants brisent les tables et les bancs de la salle de classe. Des pierres sont jetées vers la pièce dans laquelle sont enfermés les professeurs34. Le recteur Thuillier doit alors fermer la faculté pendant plusieurs jours. Le recteur condamne la « mesure insolite » du professeur, prise sans concertation. Il a, en outre, lancé l’expérience alors que son cours avait déjà duré une demi-heure de plus que la normale, de bons étudiants étant partis pour ne pas manquer le repas servi dans leurs pensions35. Le recteur Thuillier fait alors campagne pour expliquer les enjeux de ce renforcement de la discipline, par des mises au point dans la presse locale et régionale36.
- 37 Burney (John M.), Toulouse et son université…, op. cit., p. 230.
- 38 La Gazette du Languedoc du 28 mars 1845 (les deux lettres du recteur y sont publiées).
- 39 Archives nationales, F17 4392, Lettre du ministre de l’Intérieur au ministre de l’Instruct (...)
- 40 Burney (John M.), Toulouse et son université…, op. cit., p. 234.
- 41 Archives nationales, F17 4392, Lettre du recteur au ministre datée du 1er avril 1845.
22En décembre 1844, le nouveau doyen Laurens, ainsi que trois enseignants, décident de fermer à clef la porte de la salle une fois le cours commencé. La presse dénonce la violation des principes universitaires, les cours du supérieur étant publics. Le 14 mars 1845, de nombreux étudiants arrivés en retard trouvent porte close. Le doyen n’ouvre pas la porte, la même action se produisant les jours suivants. Dès lors, le 16 mars, les cours sont désertés par les étudiants, qui organisent des réunions. Trois cents étudiants se massent devant Le Journal de Toulouse et La France méridionale pour protester37. Après une réunion houleuse des professeurs de la faculté de droit, le 17 mars, un plan d’harmonisation des réglementations est adopté. Le recteur fait publier deux lettres dans la presse, le 24 et 25 mars 1845. La première informe que le ministre a approuvé la légalité des mesures disciplinaires prises ; la seconde décrit les mesures qui seront prises en cas de troubles : « Toute absence prolongée à un cours entraîne la suspension du contrevenant pour un trimestre et la perte de l’inscription de janvier38 ». Le ministre de l’Intérieur, agacé par l’agitation des étudiants toulousains, écrit le 22 mars 1845 au ministre de l’Instruction publique pour se plaindre et demander à son collègue un « esprit de fermeté39 » renforcé. Le recteur Thuillier doit s’exécuter et les sanctions tombent. Lorsque le recteur vient annoncer les mesures prises pour garantir l’assiduité, un bon nombre d’étudiants sortent pendant son exposé. « Seuls, dix à vingt sur les cent-cinquante possibles de la première année restèrent à l’écouter40 ». La police est alors appelée pour disperser l’attroupement en cours de formation devant la faculté. Le recteur décide de fermer la faculté et tous les étudiants sont condamnés à perdre leur inscription de janvier41. Ces mesures disciplinaires et la nécessité de préparer la session d’examens de la mi-avril finissent alors par briser la résistance.
- 42 Burney (John M.), Toulouse et son université…, op. cit., p. 79.
- 43 Vauthier (G.), « Le baccalauréat ès lettres à Toulouse en 1835 », Revue internationale de (...)
23Les recteurs tentent également d’imposer aux enseignants des règles plus précises dans les interrogations du baccalauréat. À Toulouse, « de 1810 à 1830, la faculté des lettres conféra en moyenne 170 baccalauréats par an. Ce chiffre s’éleva à 224 de 1830 à 1848 puis à 304 de 1848 à 1874 et finalement à 312 entre 1874 et 1885. À cette dernière date, les reçus à cette épreuve ne représentaient qu’environ un tiers des candidats »42. Sous la monarchie de Juillet, la faculté toulousaine est accusée de laxisme. Vers 1835, un quart seulement des candidats échouent. Villemain, qui préside le Conseil royal, lance alors une campagne pour obliger les professeurs à se montrer plus sévères. À Toulouse, c’est le recteur Thuillier qui est chargé de mettre en œuvre ces mesures. Il juge que l’enseignement secondaire est particulièrement faible dans son académie. Un candidat a même été reçu en dépit de multiples fautes en grammaires grecque et latine et de ses erreurs lamentables en histoire. Les professeurs Gatien-Arnoult, Cabantous et Sauvage, au nom de leur liberté, refusent les ordres du recteur. Villemain soutient cependant le recteur et critique l’Instruction relative au baccalauréat ès lettres rédigée par la faculté toulousaine où les programmes sont réduits à des fragments de textes trop brefs43. Le recteur Thuillier finit par s’imposer en menaçant de ne pas signer les certificats des candidats suspects. Pour la session de 1843, il n’y a plus que 77 reçus pour 210 candidats.
- 44 Archives nationales, F17 13068, Rapports des inspecteurs généraux pour l’année 1835.
24Le recteur Thuillier doit aussi tenter de « canaliser » Adolphe Félix Gatien-Arnoult. Nommé professeur titulaire de la chaire de philosophie en 1831, il l’occupe jusqu’en 1872. Gatien-Arnoult devient vite un conférencier à succès, qui attire des centaines d’auditeurs pour exposer les bases de sa propre philosophie tout en faisant de multiples allusions aux événements contemporains. Son esprit libéral et sa défense de l’éclectisme cousinien lui attirent le soutien des milieux libéraux. Dès l’hiver 1832- 1833, des plaintes parviennent à l’hôtel académique44. L’Univers du 8 février 1842 note :
Il y a, à Toulouse, un professeur de philosophie à la faculté des lettres, appelé Gatien-Arnoult, lequel a figuré dans les derniers troubles de Toulouse aux côtés d’illustres radicaux […], lequel encore est un des principaux rédacteurs de L’Émancipation, feuille radicale de cette ville. Ce malheureux professeur a le talent d’attirer un grand nombre de jeunes gens autour de sa chaire et de leur faire beaucoup de mal en attaquant la religion, mais d’une manière indirecte et en semant le doute, à la façon de Bayle.
- 45 Archives nationales, F17 20802, Lettre du recteur au ministre datée du 13 février 1842.
- 46 Ibid., Lettre du recteur au ministre datée du 6 mars 1842.
25Le recteur ordonne à Gatien-Arnoult de changer le programme de son cours pour le second semestre et le prévient que ses allusions à des événements contemporains risquent d’avoir des conséquences sur sa carrière. Le recteur défend cependant son enseignant auprès du ministère en arguant qu’il ne trouve, dans ses leçons, ni impiété ni manque de respect pour les lois. Mais il est trop tard et une vaste campagne de presse s’enclenche le 7 février 1842 dans Le Journal de Toulouse, puis le 8 dans La Gazette du Languedoc, qui publient le mandement de carême de l’archevêque de Toulouse intitulé « Contre les doctrines philosophiques ». Monseigneur d’Astros dirige sa lettre contre les écrits du professeur qui n’est « ni catholique, ni chrétien ». Devant le risque de troubles, le recteur obtient la suspension du cours45. Le recteur propose au professeur de prendre un congé pour « raison de santé » mais il refuse46. Gatien-Arnoult apparaît, dès lors, comme l’un des principaux chefs du parti libéral de Haute-Garonne et devient adjoint au maire en 1843. Il fait office de maire de Toulouse en 1848 puis est élu le 23 avril 1848 représentant de la Haute-Garonne à l’Assemblée constituante.
- 47 Beauchamp (A. de), Recueil des lois et règlements sur l’enseignement supérieur, op cit., t (...)
- 48 Archives nationales, F17 4391, Affiche, janvier 1841, banquet réformiste des étudiants en (...)
- 49 La Gazette du Languedoc du 5 mars 1844.
- 50 La Gazette du Languedoc du 21 mars 1844.
26Le recteur toulousain doit aussi, à de nombreuses reprises, intervenir dans la vie universitaire pour interdire ou stopper des mouvements estudiantins de contestation ou de revendication, alors que tout regroupement de la jeunesse est interdit par l’ordonnance du 5 juillet 1820, sans autorisation préalable du recteur47. Des pétitions circulent en novembre et décembre 1832 à la faculté de droit en faveur de la Duchesse de Berry, arrêtée et emprisonnée dans la forteresse de Blaye après sa tentative de soulèvement en Vendée. De nouveaux troubles éclatent en janvier 1841 autour d’un « banquet libéral48 ». En mars 1844, une certaine agitation anime le monde étudiant toulousain. La Gazette du Languedoc loue les 500 à 600 étudiants et jeunes gens, qui se sont présentés pour féliciter le Duc de Valmy lors de sa réélection comme député49. Un étudiant s’est alors avancé pour lire un discours d’éloge. Le conseil académique le punit en annulant deux de ses inscriptions pour avoir parlé « au nom de la jeunesse des écoles ». La Gazette s’en prend violemment au recteur. « Je ne savais pas que dans notre pays […], si la liberté est promise par quelques lois, le despotisme est consacré par mille ordonnances50 ».
27En 1848, quarante ans, après sa création, la fonction rectorale semble stabilisée. L’appesantissement du contrôle étatique sur l’École est réel, qui doit permettre une mise en cohérence plus forte des structures éducatives mais aussi leur meilleure efficacité au service de l’enseignement et de l’éducation de l’enfance et de la jeunesse. Les recteurs, relais majeurs entre le pouvoir central et les réalités locales, ont pris leur part du travail dans cette affirmation d’un État enseignant, même si le poids des petites patries académiques et de leurs spécificités est encore très fort.
Des petits recteurs du comte de Falloux aux grands recteurs de Napoléon III (1848-1870)
28La Révolution de février 1848 ne s’en prend pas à la fonction rectorale mais la rapide victoire de la réaction change la donne et la loi Falloux du 15 mars 1850 atteint fortement le prestige d’une fonction départementalisée. C’est alors la loi du 14 juin 1854 qui sauve la fonction rectorale d’un inexorable déclin.
La fonction rectorale dans l’agitation politique des années 1848-1850
29La période de deux années qui va de la proclamation de la République, en février 1848, au vote de la loi Falloux en mars 1850, est marquée par trois phénomènes majeurs. Le corps rectoral doit tout d’abord faire face à une première vague d’épuration dans les premiers mois de 1848, qui élimine les recteurs les plus engagés dans le soutien à l’ancienne monarchie. C’est ainsi que l’abbé Daniel (Caen), qui a refusé de diffuser certains manuels d’éducation civique et morale, est destitué en mai 1848. Mais dès 1849 commence une épuration a contrario, les conservateurs désormais maîtres de la République, œuvrant au remplacement des recteurs qui ont apporté leur soutien à Hippolyte Carnot et aux forces républicaines. L’abbé Daniel est ainsi réinstallé dès février 1849. À ces deux mouvements s’ajoute une réforme du découpage des académies. L’arrêté du 7 septembre 1848 ramène de vingt-six à vingt le nombre des académies, jouant sur les regroupements départementaux. L’éphémère « moment républicain » voit le ministère multiplier les circulaires qui demandent aux cadres de l’Instruction publique mais aussi aux enseignants de s’engager pour soutenir la République en se portant candidat lors des premières élections au suffrage universel masculin mais aussi pour « éclairer » les masses. Hippolyte Carnot adresse ainsi aux recteurs une circulaire le 6 mars :
- 51 Circulaires et Instructions officielles relatives à l’Instruction Publique, op. cit., tome (...)
Il n’est aucune partie de l’Instruction primaire qui n’ait été plus négligée, sous les précédents gouvernements, que la formation des enfants comme citoyens […]. Beaucoup de citoyens, surtout dans nos campagnes ne sont pas suffisamment instruits de leurs droits et par conséquent de leurs devoirs. Ils ne savent pas quels sont les bienfaits que le peuple doit attendre de l’État républicain et par conséquent combien peu il leur est permis d’être indifférents aux choix des hommes qui, dans quelques jours, vont revêtir le caractère auguste de mandataires de la nation51.
30Les recteurs doivent mobiliser le corps enseignant pour qu’il réalise l’éducation politique du peuple, diffusant les catéchismes républicains écrits par Charles Renouvier et Henri Martin mais aussi souvent par des enseignants de leur académie.
31La démission d’Hippolyte Carnot, en juillet 1848, et l’abandon du projet de réforme laissent ensuite le champ libre aux conservateurs. La victoire de Louis-Napoléon Bonaparte aux présidentielles de décembre 1848, puis celle du parti de l’Ordre aux législatives de février 1849, changent les données du problème. Le camp conservateur trouve dans l’Université, surtout dans ses instituteurs, de faciles boucs émissaires responsables du développement des idées subversives. Dès lors, il s’agit de mettre au pas l’institution en favorisant le développement des écoles confiées aux religieux et religieuses. Les recteurs, symboles de l’Université impériale, centralisée et monopolisatrice, sont dessaisis de nombreux pouvoirs sur l’enseignement primaire, ceux-ci étant transférés entre les mains des préfets. La loi du 11 janvier 1850 relative aux instituteurs communaux (loi De Parieu) note dans son article 1er : « L’instruction primaire, dans chaque département, est spécialement placée sous la surveillance des préfets ». Ce dernier peut réprimander, muter ou suspendre les instituteurs. Dans le même temps, les congréganistes reçoivent toute facilité pour devenir instituteurs.
Les recteurs départementaux (mars 1850-juin 1854)
- 52 Agulhon (Maurice), 1848 ou l’apprentissage de la République, Paris, Seuil, 1992, p .163.
- 53 Bulletin administratif de l’Instruction publique, année 1850, « Loi relative à l’enseignem (...)
32C’est ensuite la loi Falloux du 15 mars 1850 qui bouleverse le cadre académique tout en mettant fin au théorique monopole d’État sur l’enseignement secondaire. La révolution du suffrage universel masculin (1848) a changé les données de la question éducative car les idées personnelles des instituteurs ont désormais des conséquences directes sur la vie politique de la nation. Le paysan et l’ouvrier sont électeurs et l’instituteur, qui contribue à la formation de leur esprit, « se trouve forcément promu à un niveau de responsabilité analogue à celui du prêtre ou du médecin, du cabaretier ou du notaire52». Une Commission extraparlementaire est formée en 1849 pour préparer une profonde réforme de l’enseignement, dirigée par Adolphe Thiers, très hostile à l’Université. La loi Falloux du 15 mars 1850 tente alors un compromis53. « Il sera établi une académie dans chaque département (article 7) ». Chaque académie est administrée par un recteur. Les recteurs ne sont pas choisis exclusivement parmi les membres de l’enseignement public. Ils doivent avoir le grade de licencié ou dix années d’exercice comme inspecteurs d’académie, proviseurs, censeurs, chefs ou professeurs des classes supérieures dans un établissement public ou libre (article 9). Le recteur partage son autorité, au sein du conseil académique, avec plusieurs notables, en particulier, le préfet, l’évêque, divers représentants des Églises, le procureur général de la Cour d’appel et quatre conseillers généraux. Les 86 petits recteurs doivent se transformer en petits préfets, attentifs à ce que les membres de l’enseignement ne troublent pas la morale publique. Le 31 octobre 1850, le ministre De Parieu rappelle qu’il est interdit aux membres du corps enseignant de fréquenter les cercles politiques et les cafés. Le 2 novembre 1850, il précise sa pensée. Les recteurs doivent faire connaître à l’administration « la mesure et le caractère du mérite de chaque fonctionnaire ». Dès lors, l’inspection des lycées et des collèges mais aussi des écoles doit être menée avec « une attention minutieuse », le recteur récupérant ses pouvoirs sur le primaire.
- 54 Téphany (Joseph), Vie de Monseigneur René-Nicolas Sergent, Quimper, De Kerangal, 1872, p. (...)
- 55 Archives nationales, F17 21720, Rapport au ministre daté de novembre 1852.
33L’abbé René Sergent, recteur de la Nièvre, lance ainsi l’épuration demandée. « Dès qu’on lui signalait un sujet véreux, il ordonnait immédiatement une enquête, interrogeant lui-même au besoin les autorités locales puis il sévissait si l’accusé était reconnu coupable. Il ne transigeait jamais avec ceux qui étaient convaincus d’immoralité ou d’affiliation aux sociétés démagogiques et socialistes54». Dans un rapport au ministre de novembre 1852, le recteur Sergent précise : « Monsieur le préfet, sous la loi du 11 janvier, a fait une forte épuration. Je l’ai continuée. Malgré cela, il y a encore des instituteurs affiliés aux anarchistes […]. Je viens d’en révoquer deux, d’en suspendre un et d’en déplacer trois. J’ai mis opposition à l’ouverture de trois écoles libres ; un de ceux qui voulaient les ouvrir […] est un socialiste de la plus dangereuse espèce55 ». Si de nombreux petits recteurs acceptent de se mettre au service de l’épuration, d’autres tentent, comme ils peuvent, de protéger leur personnel de la vindicte des conservateurs. Collèges et lycées, quant à eux, subissent de plein fouet la concurrence ravivée des établissements libres sans que les recteurs ne puissent faire grand chose.
- 56 Mourier (Adolphe), Notes et souvenirs d’un universitaire (1827-1889), op. cit., p. 58-59.
- 57 Archives nationales, F17 4342, Rapport du recteur Vincens de Gourgas depuis Toulouse, 12 a (...)
34Le recteur Mourier à Toulouse (août 1850-septembre 1852), se souvient que ses premières interventions portent essentiellement sur les instituteurs. La nomination de la commission chargée de surveiller l’école normale est une grosse affaire. Le premier président de la Cour d’appel intervient pour rappeler que la loi de 1850 autorise la suppression des écoles normales et propose cette suppression pour la Haute-Garonne, suggérant le recrutement de maîtres formés dans d’autres établissements plus respectueux de la religion56. Le recteur doit alors justifier l’existence de l’école. Il ne faut pas remettre la formation des maîtres aux congrégations mais faire pénétrer le sentiment religieux dans les écoles normales. À Toulouse toujours, le recteur Vincens de Gourgas rédige un rapport de vingt-sept pages, le 12 août 1853, qui montre bien la réduction de l’espace académique mais aussi la forte concurrence des établissements privés. Si la faculté de droit et l’école préparatoire de médecine et de pharmacie ont des étudiants nombreux, la faculté des lettres (quelques auditeurs bénévoles, 10 examens de licence et 5 admissions) et celle des sciences (300 à 410 auditeurs bénévoles, deux examens de licence et pas d’admission) ne sont encore essentiellement que des jurys d’examen et des lieux de conférences mondaines. Dans le secondaire, le recteur contrôle deux établissements, le lycée de Toulouse (477 élèves) et le collège de Saint-Gaudens (160 élèves). Il existe une école secondaire à Revel (77 élèves) et vingt-quatre institutions secondaires privées qui regroupent 1.553 élèves, auxquels il faudrait encore ajouter les 470 élèves des petits séminaires. Dans le primaire, le recteur recense 448 écoles publiques de garçons et 87 écoles publiques de filles pour 68 écoles privées de garçons et 279 écoles privées de filles. Le recteur fait aussi remarquer que « le département compte 108 communes représentant une population de 26.241 habitants dépourvus de tout moyen d’instruction57 ».
- 58 Rosanvallon (Pierre), Le sacre du citoyen, Histoire du suffrage universel en France, Paris (...)
35De 1850 à 1854, le recteur joue aussi un rôle politique majeur et se transforme en adjoint préfectoral chargé de mobiliser les maîtres afin qu’ils fassent voter pour le « bon » candidat. Le sacre du citoyen, par « la révolution de l’égalité58 », fait peur et l’instituteur a désormais une fonction majeure de guide politique. Les recteurs multiplient les circulaires qui exigent des enseignants qu’ils se mobilisent pour « bien » faire voter les masses. Pierre-François Doucin (Saône-et-Loire) note dans sa circulaire du 12 novembre 1852 :
- 59 Archives nationales, F17 20622, Circulaire du 12 novembre 1852.
36Je vous invite à vous faire immédiatement inscrire sur les listes électorales qui sont actuellement en cours de révision à la mairie de votre commune à l’occasion du vote sur le plébiscite relatif au rétablissement de l’Empire […]. Non seulement aucun fonctionnaire ne peut se dispenser d’aller déposer son vote mais tous […] doivent contribuer à éclairer les populations sur le caractère du grand événement qui se prépare afin que les intrigues et l’hostilité des partis ne détournent pas le peuple de donner, le 21 novembre, une dernière et solennelle consécration aux votes du 10 décembre 1848 et du 20 décembre 1851 […]. Je compte sur votre zèle et votre dévouement59.
Les grands recteurs de Napoléon III (1854-1870)
- 60 Maurain (Jean), La politique ecclésiastique du Second Empire de 1852 à 1869, Paris, Félix (...)
- 61 Beauchamp (A. de), Recueil des lois et règlements sur l’enseignement supérieur, tome 2, Lo (...)
- 62 Bulletin des Lois, n° 186, « Loi sur l’Instruction publique du 14 juin 1854 », p. 1551-155 (...)
- 63 Beauchamp (A. de), Recueil des lois et règlements sur l’Enseignement supérieur, op. cit., (...)
37Lorsque Hippolyte Fortoul arrive au ministère, en décembre 1851, il ne peut que constater la faiblesse des recteurs départementaux. S’il est conscient que l’école doit œuvrer à consolider les pouvoirs du Prince impérial et contribuer à la diffusion des valeurs chrétiennes, il est aussi profondément attaché à la défense d’un système scolaire public et à la limitation de l’influence de l’Église sur l’École. Les recteurs départementaux sont dans une position qui les rend incapables de résister aux pressions des notables et du clergé. Dans le secondaire, entre 1850 et 1854, « le clergé se fit ainsi céder une cinquantaine de collèges60 ». Hippolyte Fortoul prend rapidement conscience qu’une réaction est nécessaire pour dynamiser l’enseignement public et c’est tout le sens de la loi du 14 juin 1854. La loi de 1850 a été réalisée par des gens soucieux du devenir de l’enseignement primaire et par la volonté d’un retour à l’ordre, imposant le cadre départemental comme unité de surveillance. Il faut désormais « reconstituer le rectorat de manière à lui rendre sa légitime autorité sur l’instruction supérieure et sur l’instruction secondaire donnée par l’État, tout en conservant pour l’instruction primaire, l’organisation départementale61». Par la loi du 14 juin 1854, la France est divisée en seize circonscriptions académiques. Chaque académie est administrée par un recteur assisté d’autant d’inspecteurs d’académie qu’il y a de départements dans la circonscription (article 2)62. Le décret impérial du 22 août 1854 précise ensuite le rôle du recteur et confirme la perte presque totale de ses pouvoirs sur le primaire. Les attributions du recteur comprennent « la direction et la surveillance des établissements d’enseignement supérieur ; la direction et la surveillance des établissements publics d’enseignement secondaire ; la surveillance de l’enseignement secondaire libre ; le maintien des méthodes de l’enseignement primaire public » (article 17)63. Ce texte du 22 août 1854 fixe définitivement l’un des critères du recrutement : « Nul ne peut être nommé recteur, s’il n’est pourvu du grade de docteur » (article 16).
38Dès lors, les recteurs des années 1854-1870 ne jouent plus qu’un très faible rôle dans l’enseignement primaire. Ils surveillent les écoles normales qu’ils tentent de redynamiser et transmettent aux inspecteurs d’académie et aux inspecteurs primaires leurs consignes sur les méthodes et les contenus scolaires. Les recteurs rappellent aussi en permanence la nécessité de disposer d’écoles communales et tentent de résister au développement de l’influence congréganiste mais ils ne peuvent ici que soutenir les préfets et les inspecteurs. La lutte d’influence avec les préfets demeure fréquente et c’est ce sur quoi insiste le recteur Laferrière (Toulouse), le 2 octobre 1855 :
- 64 Archives nationales, 246 AP/20, Réunions entre le ministre et les recteurs, 2 octobre 1855
Je crois, pour revenir à la question des préfets, que l’un des plus grands obstacles à l’influence que les recteurs et les inspecteurs d’académie peuvent exercer dans l’intérêt de l’instruction primaire, est dans la fausse opinion que Messieurs les préfets ont pu se faire de leur situation. J’ai vu, dans les commencements, des préfets et même des sous-préfets qui se disaient les recteurs en ce qui concerne l’instruction primaire. Dans les départements, tout cela est maintenant abandonné mais si l’on est pas assez ferme, on voit toujours de leur part le désir d’empêcher que l’influence rectorale ne se fasse trop sentir en ce qui concerne l’enseignement primaire64.
- 65 Ibid., Rapport du recteur de Toulouse, septembre-octobre 1861.
- 66 Ibid., Rapport du recteur de Rennes au ministre, février 1861.
39Dans le secondaire, il s’agit surtout de résister au développement des établissements privés et la tâche est difficile. Les établissements doivent être des modèles. Dans son rapport de septembre-octobre 1861, le recteur Rocher relève que le lycée de Toulouse compte 582 élèves mais il insiste sur le problème posé par quelques maîtres répétiteurs, « trop occupés de leurs propres études65». Son rapport de février 1861 signale qu’au collège de Foix, le nouvel aumônier manque de retenue car il tient en dehors de l’établissement des propos très désobligeants sur le principal. Le recteur a envoyé l’inspecteur sur place avant de demander d’éventuelles sanctions. Au lycée de Cahors (191 élèves), un jeune élève s’est échappé en escaladant le mur pour rentrer quelques jours plus tard. Exclu, cet élève est de bonne famille et recommandé par le maire. Le recteur demande alors sa réintégration, qu’il subordonne à l’expression d’un repentir sincère. « Son Excellence comprendra à quel point il importe de tenir compte, indépendamment des considérations personnelles, de l’intervention des autorités locales dont nous sommes si fondamentalement intéressés à nous concilier la bienveillance66 ».
40Les recteurs consacrent beaucoup de temps à la rénovation des établissements secondaires. Ils lancent de nombreux travaux de reconstruction des bâtiments, négocient avec les municipalités et le ministère, tout en multipliant les visites d’inspection. Ils veillent aussi à la bonne organisation des examens du baccalauréat et expliquent les enjeux des réformes, en particulier de celles de 1864-1865 qui suppriment la bifurcation à la fin de la quatrième. Ils mettent en place le nouvel enseignement spécial fondé en 1865. Il s’agit de fournir une solide culture générale préparant à l’exercice du métier et cet enseignement est dispensé dans les établissements habituels que sont les lycées et les collèges. D’une durée de quatre à cinq ans à partir de la sixième, ce cycle plus court d’études débouche sur un diplôme spécifique qui n’est pas le baccalauréat. Un programme est fixé par l’arrêté du 6 avril 1866, qui tente de faire davantage de place aux exercices pratiques comme les manipulations de chimie et de physique, aux langues vivantes, à la législation et à la comptabilité.
- 67 Bourgade (Germaine), Contribution à l’étude d’une histoire de l’éducation féminine à Toulo (...)
- 68 Archives nationales, F17 8756, Lettre du recteur Roustan au ministre datée du 1er novembre (...)
- 69 Ibid., Lettre du recteur au ministre datée du 29 juin 1868.
41Les recteurs tentent aussi de développer les cours secondaires féminins recommandés par Victor Duruy dans sa circulaire du 30 octobre 1867 mais les résistances sont fortes. À Toulouse, le lycée de jeunes filles est fondé en 1884 mais il existe depuis longtemps des maisons privées, le plus souvent congréganistes. Les Filles de la Charité de Saint-Vincent-de-Paul, la Maison de charité de Saint-Sernin, la Maison de charité de Saint-Jérôme instruisent les fillettes pauvres67. La congrégation des Dames de la Compassion, reconnue par l’État le 7 juin 1826, a la confiance des familles. L’initiative de Victor Duruy trouve alors un terrain hostile. Le recteur Roustan tente bien de lancer un cours mais ce dernier rencontre peu de succès68. Dans une lettre du 29 juin 1868, il donne les raisons majeures de cet échec. Les deux associations volontaires pour donner les cours, celle des professeurs du lycée et celle des maîtres retraités ne sont jamais parvenues à se mettre d’accord et de nombreux conflits de personnes se sont produits. Mais la « cause profonde de l’échec toulousain réside dans l’hostilité ou dans la réserve des pères de famille69 ». Le préfet n’a pas fait inscrire ses deux filles, pas plus que le procureur général n’y a envoyé les siennes. Le clergé a mené une terrible campagne, en particulier dans La Semaine catholique de Toulouse.
- 70 Circulaires et instructions officielles relatives à l’Instruction publique, op. cit., tome (...)
- 71 Voir Mourier (Adolphe), Notes et souvenirs d’un universitaire (1827-1889), Orléans, George (...)
42L’enseignement supérieur devient un enjeu pour les recteurs du Second Empire, même si les moyens matériels demeurent limités. La circulaire du 15 septembre 1854 insiste sur l’importance de leur rôle : « Vous marchez à la tête des facultés qui forment votre cortège, dont vous surveillez personnellement les travaux, dont vous dirigez les délibérations. Vous participez à la rédaction de leurs programmes ; vous assistez, toutes les fois que vous le jugez convenable, à leurs actes publics70». Par le décret du 22 août 1854, cinq facultés des sciences et quatre facultés des lettres sont établies afin de consolider les centres provinciaux. En médecine, une école préparatoire est fondée à Alger et à Lille mais ce sont les deux seules fondations du Second Empire. En 1864, réapparaît la faculté de droit de Nancy puis, en 1865, est fondée la faculté de droit de Douai. La politique ministérielle vient ici s’appuyer sur de nombreuses demandes locales qui, depuis des années, multipliaient les campagnes revendicatives en vue d’obtenir ces créations. Les recteurs stimulent les énergies locales, les canalisent ou les calment, tentent de déterminer de manière raisonnable, les critères du choix de la future ville siège. Il faut négocier entre les municipalités intéressées et l’État les conditions matérielles (locaux, équipements) de l’installation mais surtout se mettre d’accord sur les clauses financières. Il faut aussi veiller à la mise en place des programmes et à la conformité des structures administratives et pédagogiques, tout en surveillant les examens. L’Ouest de la France, si l’on excepte la ville de Rennes, apparaît longtemps en retrait mais la possibilité d’ouvrir des écoles préparatoires à l’enseignement supérieur étant admise par l’article 4 du décret du 22 août 1854, les initiatives locales se multiplient. Le recteur a habilement stimulé la traditionnelle querelle entre Rennes, Nantes et Angers, faisant tout ce qui est possible pour que l’agitation revendicative soit active, moyen d’influencer positivement le ministère. Le décret impérial du 30 mars 1855 fonde alors, à Nantes, une école préparatoire puis, celui du 7 juillet 1855 fait de même à Angers. Le recteur Mourier joue ici un rôle majeur de négociateur71.
43Les recteurs de Napoléon III conservent aussi une mission politique forte et doivent mobiliser leurs troupes pour qu’ils soutiennent les candidats officiels. Le discours du recteur de l’académie de Toulouse, lors de l’ouverture du conseil académique, le 24 juin 1858, réaffirme clairement la philosophie dominante, qui doit être respectueuse de l’idéal chrétien et du régime en place :
- 72 Archives nationales, F17 4353, Discours du recteur de l’académie de Toulouse, 24 juin 1858
Le jour où les maîtres de l’enfance ont reconnu le vide et le danger des folles excitations qui les poussaient vers un avenir impossible, une voix de salut a été ouverte à l’enseignement. Il s’est régénéré en redevenant chrétien. La résignation a fécondé le travail […] et le dévouement des instituteurs […]. Lors des dernières élections pour l’assemblée législative, on les a vu marcher comme un seul homme sous la bannière de l’ordre et de la paix publique72.
- 73 Goedert-Abaji (Nathalie), « Quand les recteurs regardaient la France », dans Claude Bontem (...)
44Peu après l’attentat d’Orsini (14 janvier 1858), les recteurs reçoivent une circulaire de Gustave Rouland, datée du 19 mars 1858. Ce dernier leur demande de lui adresser « chaque trimestre, en toute confidentialité, un rapport sur la situation morale, politique et religieuse » de leur académie. Il s’agit, pour le gouvernement, de disposer d’informations multiples sur l’état de l’opinion73. Les premiers rapports, en 1858, témoignent des doutes rectoraux, beaucoup de recteurs se posant la question de savoir jusqu’où doit aller la délation. Si certains acceptent cette mission sans broncher, d’autres font le choix de rédiger un rapport dont le contenu reste essentiellement centré sur les questions universitaires. L’engagement dans ces missions politiques décline ensuite avec Victor Duruy.
Un « sacre » républicain pour la fonction rectorale (1870-1940) ?
45La Troisième République, si elle réalise une œuvre fondamentale par les lois de Camille Sée, de Jules Ferry, de René Goblet ou l’œuvre de Louis Liard à la tête de l’Enseignement supérieur, ne remet pas en cause les structures administratives héritées du Second Empire et ne change pratiquement rien aux attributions du recteur, si ce n’est pour renforcer son rôle d’homme orchestre dans l’enseignement supérieur.
La laïcisation du conseil académique et l’universitarisation du recrutement
- 74 Bulletin administratif de l’Instruction publique, année 1880, « Loi du 27 février 1880 », (...)
46Après des années incertaines, la conquête de la République par les républicains, réalisée en 1879, ouvre une période de profonde stabilité pour la fonction. L’une des premières réformes opérées est celle de la laïcisation du conseil académique. Dès le 27 février 1880, par la Loi relative au Conseil supérieur de l’Instruction publique et aux conseils académiques, le gouvernement républicain, laïcise les rouages administratifs de l’Instruction publique. Le nouveau conseil académique, placé sous la présidence du recteur, comprend désormais essentiellement des professionnels de l’éducation, à savoir : les inspecteurs d’académie ; les doyens des facultés et les directeurs des écoles préparatoires à l’enseignement supérieur ; un professeur élu par ses pairs au sein de chaque institution d’enseignement supérieur ; un proviseur et un principal désignés par le ministre ; six enseignants du secondaire élus par leurs pairs et quatre notables politiques (deux conseillers généraux et deux conseillers municipaux)74. C’est la fin de la présence des évêques, des prêtres, des préfets et des membres du monde judiciaire.
47L’analyse des cursus professionnels des 114 recteurs de la Troisième République confirme la domination exclusive du recrutement au sein de l’Instruction publique mais permet aussi de repérer des réajustements internes qui affirment progressivement la domination des enseignants du supérieur (65,78 %). Le temps de l’accès à la fonction pour des proviseurs chevronnés ou d’anciens enseignants du secondaire devenus inspecteurs d’académie est révolu et c’est désormais la figure de l’ancien doyen de faculté qui s’impose. Sous la Troisième République, la grande stabilité de la fonction permet désormais à certains recteurs de se créer de véritables « règnes » à la tête de leur académie. Georges Lyon dirige ainsi l’académie de Lille pendant 21 ans (1903-1924) ; son collègue Charles Adam est à la tête de l’académie de Nancy durant 26 années (1902-1928). Claude Perroud est recteur de l’académie de Toulouse de 1881 à 1908 (27 ans). Seules une volonté personnelle de mutation, une promotion dans l’administration centrale ou la retraite modifient la carte des rectorats. Dès lors, ces recteurs quasi-inamovibles sont autant, sinon plus, les représentants et les défenseurs de leur patrie académique auprès du ministère que les représentants du ministre en province. C’est là une réalité majeure qu’il faut prendre en compte dans le rapport entre le central et le local, vu à travers le prisme académique.
Le recteur républicain, les enseignements primaire et secondaire
48La Troisième République ne change rien dans la répartition des pouvoirs selon les niveaux d’enseignement et la gestion des maîtres du primaire reste la même qu’en 1854, soumise essentiellement à l’autorité préfectorale.
- Au niveau du primaire
49Le recteur républicain ne s’intéresse plus qu’aux « méthodes » et se transforme en « gardien du temple » qui, dans ses discours, ne cesse de rappeler les valeurs fondamentales qui doivent animer l’École républicaine, à savoir la liberté et l’égalité dans le respect des principes de la laïcité. Il n’intervient plus directement dans toutes les questions concernant l’ouverture des écoles, les nominations des maîtres et leur possible sanction. Il joue, dès lors, un rôle très faible dans le mouvement de laïcisation des personnels et dans les épisodes souvent tendus liés à la lutte contre les congrégations à partir de 1901-1902. Il est parfois présent dans les débats qui concernent les savoirs scolaires et les méthodes pédagogiques mais la plupart des recteurs des années 1870-1940 préfèrent déléguer leurs attributions pédagogiques aux inspecteurs d’académie et aux inspecteurs primaires, même s’ils sont en relations fréquentes avec eux. Le recteur s’occupe davantage des écoles normales et joue un rôle très actif dans la mise en œuvre de la loi Paul Bert du 9 août 1879. Si pour les garçons, le modèle normalien s’est imposé, il n’en va pas de même pour les filles, le plus souvent formées au sein de cours normaux aux mains de religieuses. Les recteurs se transforment alors en négociateurs et président à la construction de nombreuses écoles normales de filles mais aussi à la reconstruction de celles de garçons. Ils mettent en place les comités de surveillance et veillent à l’application des programmes qui sont plusieurs fois modifiés.
- 75 Ministère de l’Instruction publique et des Beaux-Arts, Recueil des monographies pédagogiqu (...)
50Dans l’académie de Toulouse, le recteur Perroud relève ainsi en 1888 de grands progrès pour les huit départements qu’il dirige. En 1878, ils regroupent sept écoles normales de garçons (le Lot n’en a plus depuis 1852) mais ne comptent pas une seule école normale d’institutrices. Six cours normaux forment médiocrement les futures maîtresses, dont cinq sont aux mains de religieuses (Albi, Bagnères-de-Bigorre, Rodez, Montauban, Cintegabelle) alors que le dernier est installé au sein d’une pension laïque à Pamiers. Depuis cette date, les progrès sont nets et le Lot s’est doté d’un cours normal masculin en 1882, qui a été transformé en école normale en 1885. La plupart des écoles normales ont d’ailleurs été transférées dans de nouveaux locaux. Des écoles normales d’institutrices ont été ouvertes et seul le département du Tarn n’en possède pas mais le bâtiment ouvrira en 189075.
- Au niveau du secondaire
- 76 Archives nationales, F17 4364, Conseil académique de Toulouse, juin 1869, rapports des div (...)
51Les attributions du recteur demeurent majeures et sont même renforcées par les volontés d’État de développer l’enseignement public féminin. Bien avant la Loi Falloux (1850), qui ne fait que légaliser une situation de fait, les établissements publics sont soumis à une terrible concurrence des établissements privés. Le conseil académique de Toulouse en juin 1869, examine dans le détail les effectifs des établissements secondaires et la synthèse des données permet de visualiser la carte du secondaire. En 1868-1869, le recteur toulousain gère six lycées (Rodez, Toulouse, Auch, Cahors, Tarbes et Albi) qui regroupent 2.146 élèves (49,1% des effectifs du secondaire public mais 17,7 % des effectifs du secondaire, si on y intègre les établissements libres et les petits séminaires)76. Le réseau des lycées est encore très faible et deux départements n’en ont pas, le Tarn-et-Garonne et l’Ariège. Le lycée de Toulouse apparaît comme l’établissement principal avec 873 élèves, soit 40,6 % des lycéens de l’académie. Le réseau des collèges communaux est plus étoffé avec seize établissements (Foix, Pamiers, Saint-Girons, Villefranche, Millau, Saint-Gaudens, Revel, Condom, Lectoure, Figeac, Vic, Castres, Gaillac, Montauban, Moissac et Castelsarrasin) pour 2.224 élèves, mais plusieurs ont des effectifs très faibles (le collège de Lectoure à 89 élèves, celui de Castelsarrasin, 75). À côté des lycées et des collèges, qui dépendent de l’autorité académique (4370 élèves), un réseau complexe d’établissements libres existe, reposant sur les petits séminaires mais aussi sur de nombreuses institutions libres qui peuvent être laïques ou ecclésiastiques. Quelque peu incomplets par les lacunes documentaires concernant les sept établissements libres du Lot, nos calculs montrent cependant la réalité majeure de cette fin de Second Empire, à savoir la forte concurrence livrée aux établissements publics. Aux 4370 élèves du secondaire public, l’enseignement libre oppose 7747 élèves dans l’académie de Toulouse. De manière générale, les établissements publics ne rassemblent donc que 36 % des effectifs, même si les différences sont grandes entre les départements de l’académie, en raison des contextes historiques, culturels et religieux locaux.
- 77 Archives nationales, F17 6825, Rapports sur l’enseignement secondaire, conseil académique (...)
- 78 Rogers (Rebecca), Les Bourgeoises au pensionnat : l’éducation féminine au XIXe siècle, Ren (...)
- 79 Marchand (Philippe), « Georges Lyon : Un grand chef d’académie à Lille (1903-1924) », dans (...)
52Dès lors, la mission première du recteur, après 1870, est de promouvoir les établissements publics. Progressivement, de nombreux établissements sont rénovés ou construits alors que dans les grandes villes, des annexes apparaissent qui deviennent ensuite des établissements spécifiques. Dans un rapport du 1er mai 1893, le recteur Perroud précise l’état de l’enseignement secondaire dans son ressort. Il a alors autorité sur huit lycées (Albi, Auch, Cahors, Foix, Montauban, Rodez, Tarbes, Toulouse) pour un total de 3.148 élèves et sur quinze collèges communaux de garçons (1.996 élèves). L’enseignement secondaire libre laïque compte treize établissements (753 élèves) mais l’enseignement secondaire ecclésiastique compte vingt-cinq établissements (2.693 élèves) auxquels il faut ajouter les seize établissements dépendant des petits séminaires (2.860 élèves). L’enseignement secondaire féminin compte désormais deux lycées (Toulouse et Montauban : 533 élèves), quatre collèges (Albi, Cahors, Tarbes, Vic-Bigorre : 393 élèves) et six cours secondaires (Auch, Castres, Figeac, Millau, Pamiers et Rodez : 397 élèves)77. Le recteur est en effet l’un des acteurs majeurs, avec les communautés locales et le ministère, de la fondation de l’enseignement secondaire féminin public, par application de la loi Camille Sée du 21 décembre 1880. Si le réseau des pensions, quelles soient laïques ou religieuses, est dense et souvent de bonne qualité78, ce sont les républicains qui fondent les lycées et les collèges de jeunes filles. Comme pour les écoles normales, le recteur joue ici un rôle important de négociateur et de chef de chantier, en lien avec les communes et le ministère. Il veille aussi à la stricte application des règlements et des programmes. De nombreux recteurs, tel Georges Lyon à Lille, s’engagent, à partir de 1905 environ, dans une rénovation des études par l’acceptation de cours supplémentaires de latin qui permettent aux filles de préparer le baccalauréat79. Ils appliquent ensuite le décret Léon Bérard du 25 mars 1924 qui aligne l’enseignement féminin sur celui des garçons.
- 80 Archives nationales, F17 7293, Lettre du proviseur du lycée de Toulouse au recteur datée d (...)
53Le recteur est également chargé, chaque année, de veiller au bon déroulement des épreuves du baccalauréat mais doit aussi gérer les nombreuses révoltes lycéennes qui, entre 1870 et 1890, dénoncent le carcan de règlements hérités de la période napoléonienne. C’est ainsi qu’en 1882 éclate, au lycée de Toulouse, une importante révolte. Le proviseur rend compte au recteur des incidents dans son rapport du 26 mars 1882. « Le complot devait partir du premier quartier (philosophie), le vendredi 24 mars au soir. Ces élèves, réunis à ceux de l’école préparatoire, devaient monter au second dortoir dont on aurait roulé le maître dans les couvertures en le tapant sans merci puis aller réveiller tous les autres dortoirs et se mettre à tout briser80 ». Étant au courant du projet, l’administration réussit à empêcher le plan des mutins. Mais les choses se précipitent dès le matin suivant. À la récréation, les trois premières divisions montent dans les appartements du proviseur en chantant La Marseillaise. Dès 9 heures, le recteur Perroud est sur place et dirige les opérations de maintien de l’ordre. Le midi, des élèves montent dans les dortoirs et brisent les vases de nuit. Dans la cour, les élèves refusent de revenir en cours et chantent La Marseillaise. Vers 15 heures, les maîtres répétiteurs apprennent que les élèves ont l’intention de se rendre dans la salle des fusils dont ils ont une clef volée. Le recteur, l’inspecteur et le proviseur font alors déménager les baïonnettes dans une pièce de l’économat. Ils n’ont pas le temps de s’occuper des fusils mais barricadent la porte. La nuit suivante, quelques mouvements d’élèves s’opèrent mais rien de grave ne se produit. Le rapport que le recteur adresse au ministre, le 29 mars 1882, comprend dix-huit pages :
- 81 Ibid., Rapport du recteur au ministre daté du 29 mars 1882.
Vendredi 24 mars, 7 heures du soir : le proviseur vient m’annoncer qu’une révolte doit éclater cette nuit-même au lycée de Toulouse. Je m’y rends sur-le-champ. Je passe dans les réfectoires […]. Samedi 25 mars, 8 heures du matin : conseil dans le cabinet du proviseur avec l’inspecteur d’académie et le censeur. Je m’enquiers des causes de la révolte : les voici : avant tout, l’exemple de Montpellier colporté par les petits journaux ; le moment de l’année : le mois de mars est une époque climatérique pour la discipline […] ; l’action pernicieuse de quelques élèves chassés de Rodez lors de la révolte de leur division […] ; l’action non moins factueuse de quelques élèves venus de chez les Jésuites. Ils ont apporté un esprit de sournoiserie et de calcul ; le mécontentement des élèves de plusieurs quartiers contre le maître répétiteur et un professeur trop exigeant ; l’influence des grands élèves de l’école préparatoire (Saint-Cyr) au sujet du régime de la discipline81.
- 82 Prost (Antoine), Histoire de l’enseignement en France de 1800 à 1967, op. cit., p. 405-431
54Le 26 mars, le recteur Perroud signale : « Depuis 36 heures, je n’ai presque pas quitté le lycée ». Les sanctions tombent ensuite rapidement. Il est alors urgent pour les hommes au pouvoir de réformer la vie scolaire des lycées. Dès 1883, le ministère commence une progressive réforme du régime disciplinaire. Une circulaire de Jules Ferry, le 2 mai 1883, ordonne aux recteurs de veiller à la fermeture des locaux destinés aux séquestres. La mise en œuvre de l’arrêté du 5 juillet 1890 sur la réforme du régime disciplinaire apporte ensuite une nette amélioration dans la vie quotidienne des élèves du secondaire. Les recteurs œuvrent aussi à la mise en place progressive de la gratuité des études secondaires, à partir de 1928, et lancent avec, plus ou moins d’ardeur, selon leurs propres convictions, les réformes qui doivent permettre de faire avancer la cause de l’École unique et les expérimentations voulues par Jean Zay (classes d’orientation, loisirs dirigés)82.
Le recteur couronné : la présidence du conseil de l’université
- 83 Condette (Jean-François), « Stimuler ou contraindre ? Les recteurs d’académie et l’enseign (...)
- 84 Ministère de l’Instruction publique, Documents, tome XVI, « Réponses à la circulaire de Ju (...)
- 85 Allard (Michel), Essai sur la fonction rectorale, Thèse de doctorat, Université de Droit e (...)
55Déjà fortement réaffirmées par la loi de 1854, les missions du recteur dans l’enseignement supérieur sont consacrées par la loi du 10 juillet 1896 qui le transforme en président du conseil de l’université. Il joue alors, en lien permanent avec les doyens et la Direction de l’Enseignement supérieur, un rôle majeur d’incitateur et d’intermédiaire83. Contrairement aux souhaits de l’immense majorité des personnels de l’enseignement supérieur, consultés en 1883, le régime républicain n’accepte pas l’élection d’un président d’université élu par ses pairs84. Le décret du 28 décembre 1885 réforme les rouages administratifs et désigne le recteur comme président d’un conseil général des facultés chargé de coordonner la vie universitaire de l’académie. Après plus de dix années d’observation, la loi du 10 juillet 1896 décide ensuite de permettre le retour des universités, fédérations des facultés d’un même ressort académique. On est loin cependant des universités du Moyen Âge. Tous les actes ou presque du conseil de l’université sont soumis à l’approbation du ministre avant d’être exécutoires. Le président du conseil de l’université n’est pas élu mais nommé, en la personne du recteur qui est un agent de l’État. Pour la fonction rectorale, on peut alors parler d’un réel « couronnement de 189685 ». Symbole évident d’une tutelle du pouvoir central, le recteur, à l’usage, n’est cependant pas uniquement cet œil de Paris, surveillant général de la vie universitaire. Ancien enseignant de faculté, installé à la tête de son académie pour de nombreuses années et connaissant le contexte régional, le recteur apparaît comme le défenseur des facultés bien plus que comme un contrôleur leur rappelant l’orthodoxie ministérielle. À l’écoute des projets des enseignants, leur demandant de les clarifier, il tente ensuite d’y répondre en multipliant les contacts personnels auprès des élites régionales et des bureaux du ministère.
- 86 Dauphin (Stéphanie), « Octave Gréard, vice-recteur de l’académie de Paris (1879-1902) : ré (...)
- 87 Condette (Jean-François), Une faculté dans l’histoire : la faculté des lettres de Lille de (...)
- 88 Burney (John M.), Toulouse et son université…, op. cit., p. 70.
56De nombreux recteurs participent activement aux négociations qui permettent le lancement de nouvelles constructions ou l’apparition d’instituts spécialisés, n’hésitant pas à multiplier les démarches en vue d’obtenir subventions et soutiens politiques. C’est le cas d’Octave Gréard à Paris pour l’immense chantier de reconstruction de la nouvelle Sorbonne (1885-1903)86 mais aussi de la plupart de ces collègues de province. À Lille, les recteurs successifs contribuent au développement des facultés, de leurs moyens d’enseignement et de recherche87. Ils luttent aussi pour enrichir les enseignements et pour les adapter aux besoins régionaux. On voit alors les recteurs soutenir les initiatives qui permettent aux facultés des sciences de se rapprocher des milieux industriels ou agricoles ou celles qui, au sein des facultés des lettres, valorisent l’histoire et le patrimoine régional. À Toulouse, la collaboration entre le doyen des sciences, Paul Sabatier, et le recteur Claude Perroud permet la création de plusieurs instituts en bénéficiant de subventions de la municipalité, du ministère de l’Instruction publique et de celui de l’Agriculture : Institut de chimie (1906), Institut électrotechnique (1907), Institut agricole (1909). « En 1913, à Toulouse, 21 licences de sciences furent accordées contre 110 diplômes industriels88 ».
- 89 Ibid., p. 48-49.
- 90 Archives nationales, F17 22083, Dossier du recteur Perroud.
57À Toulouse, le recteur Claude Perroud poursuit les efforts, déjà anciens, en vue de doter la ville de nouveaux bâtiments universitaires. Les projets, multiples depuis la monarchie de Juillet, ont systématiquement échoué, soit par la mauvaise volonté du ministère, soit par la frilosité de la municipalité qui rechigne devant l’ampleur de la dépense. La ville insiste sur le fait qu’elle demande la transformation de son école de médecine en une faculté et qu’à cette condition seulement, elle acceptera un lourd effort financier. Après de multiples démarches, le décret du 28 novembre 1878 décide la création d’une faculté mixte de médecine et de pharmacie à Toulouse sous la condition que la ville tienne ses promesses de reconstruction de nouveaux locaux pour les autres facultés. Des plans sont alors dessinés et approuvés, un emprunt est autorisé par les Chambres mais les riverains de la future faculté protestent contre l’installation d’une école de dissection près de chez eux. Les plans sont alors revus et un nouveau contrat préparé mais la chute de l’équipe municipale ajourne le projet. « C’est le recteur Perroud qui maintint le projet en vie89 ». Nommé en 1881, Claude Perroud consacre beaucoup d’énergie à ce dossier. Pendant quatre ans, le recteur ne peut avancer car les conflits sont permanents entre les différents clans du conseil municipal. En 1885 cependant, un conseil « opportuniste » est élu et l’on reprend alors immédiatement les négociations. Un nouveau contrat avec le ministère, préparé et négocié par le recteur, est examiné par la commission municipale en février 1886. Il est alors prévu la construction d’une faculté des sciences et d’une faculté de médecine sur des terrains acquis par la ville, la transformation de l’école de médecine en école de plein exercice dès la signature du contrat, puis sa transformation en faculté dès que le chiffre des 250 étudiants sera atteint, mais aussi la reconstruction de la faculté des lettres auprès de la faculté de droit avec une bibliothèque commune. Cette fois, le recteur réussit à fédérer les énergies et les travaux commencent. La faculté des sciences débute les cours dans ses nouveaux locaux en 1887, alors que la faculté de médecine et de pharmacie est inaugurée en 1891 ; la faculté des lettres étant ouverte pour la rentrée 1892-1893. Claude Perroud est bien, comme le qualifie une lettre du préfet de la Haute-Garonne au ministre du 14 mai 1893, « le véritable réorganisateur de l’enseignement supérieur à Toulouse90 ».
- 91 Burney (John M.), Toulouse et son université…, op. cit., p. 103.
- 92 Ibid., p. 109.
58Le recteur Perroud fait aussi tout ce qui est possible pour enrichir le panel des cours proposés. En 1888-1889, est ouvert un cours de chimie industrielle et agricole. En 1900, une chaire est créée pour l’enseignement de ces deux disciplines, le recteur ayant réussi à réunir diverses sources de financement. À la faculté des lettres91, trois chaires sont créées en 1886 qui témoignent d’une prise en compte des spécificités locales : une de langue et littérature espagnoles (Ernest Mérimée), une de langue et littérature méridionales (Antoine Thomas) et une d’histoire de la France méridionale (Charles Molinier). La faculté des lettres de Toulouse développe ainsi les études d’espagnol alors que, jusque-là, elle ne proposait que l’allemand et l’anglais. Les milieux économiques, les chambres de commerce du Midi signalaient depuis longtemps que les lacunes dans l’enseignement de l’italien et de l’espagnol étaient un gros handicap dans le commerce avec ces deux pays proches. La faculté, soutenue par le recteur, qui a multiplié les démarches, obtient une subvention du conseil municipal et peut alors fonder une chaire de langue et littérature espagnoles (1886), un cours municipal existant depuis 1872. En 1896, sur les 43 étudiants préparant le certificat d’aptitude à l’enseignement des langues vivantes, 27 sont inscrits en espagnol92.
59Le recteur joue donc un rôle important dans l’animation de l’enseignement supérieur. Par l’examen annuel des rapports des doyens lors du conseil académique, par son rôle de président du conseil de l’université, par la multiplicité des contacts personnels aussi avec les doyens, les professeurs et les élites locales, il s’affirme comme un relais majeur entre le central et le local. Représentant du ministre, il veille à l’application des réformes édictées depuis Paris mais il ne faut pas voir dans le recteur la seule figure du représentant de l’État. Si la logique est assurément descendante, elle peut aussi – et elle est souvent – remontante, le recteur se transformant en un habile défenseur des projets des élites municipales et des membres de l’enseignement supérieur de son académie.
***
- 93 Croissandeau (Jean-Michel), « La fonction de recteur : Du notable au gestionnaire », Le Mo (...)
60Fondée par Napoléon Ier afin de permettre l’affirmation des prérogatives de l’État sur l’École, menacée de disparition lors de la première Restauration, la fonction rectorale est conservée par la Monarchie, celle-ci comprenant tout l’intérêt qu’elle peut tirer de la présence sur le terrain de cet agent à la fois pour développer les structures éducatives et pour servir le pouvoir en place. La brève seconde République n’a pas le temps de marquer le paysage scolaire français mais la réaction conservatrice qui suit les journées de juin 1848, entraîne une modification radicale de la fonction, la loi Falloux décidant de mettre en place les recteurs départementaux. Très vite cependant, Le Second Empire se rend compte que les établissements publics sont menacés par les prétentions de l’Église à régenter l’Instruction publique. Hippolyte Fortoul, par la loi du 14 juin 1854, décide de revenir aux grandes académies et renforce les attributions du recteur sur les enseignements secondaire et supérieur alors que ce dernier perd l’essentiel de ses pouvoirs, autres que pédagogiques, sur le primaire. La Troisième République ensuite modifie peu les attributions rectorales. Après 1880, le recteur se transforme en une grande figure morale, héraut des principes républicains au sein des établissements, administrateur quasi-inamovible qui devient autant le défenseur des projets de son académie auprès des bureaux parisiens qu’un agent du ministère envoyé en province. S’il intervient de manière importante dans l’enseignement secondaire masculin et dans la fondation de l’enseignement secondaire féminin public, le recteur devient aussi le président du conseil de l’université (1896) et joue un rôle majeur dans la dynamisation de la vie des facultés. La fonction rectorale connaît après 1945 de nombreuses mutations, en lien avec la massification des effectifs mais aussi par le contrecoup de décisions politiques. En 1967, le ministère décide de mettre fin à la quasi-inamovibilité des recteurs et de rappeler qu’il s’agit d’une mission temporaire au service du gouvernement et de sa politique éducative. Par les événements de mai-juin 1968, le recteur perd ensuite une grande part de ses pouvoirs sur le monde universitaire. De multiples mesures de déconcentration lui permettent cependant de se voir doter de nombreuses attributions nouvelles alors que la politique de décentralisation, en confiant de nombreuses responsabilités aux communes, aux départements et aux régions, complexifie de manière considérable ses fonctions. On passe du « notable au gestionnaire93 », le recteur se transformant en un manager d’équipes, pilotant la politique éducative académique en tenant compte des spécificités de ses départements et des multiples partenaires qui interagissent sur les réalités scolaires.
Notes
1 Voir Condette (Jean-François), « Traîtres fatigués ou élites administratives : une recherche en cours sur les recteurs d’académie de 1809 à 1940 », dans Histoire de l’Éducation, n° 97, janvier 2003, p. 37-77.
2 Proff (L.-W.), « Le fonctionnarisme et l’enseignement secondaire », Revue internationale de l’enseignement, année 1892, juillet-décembre, p. 514-527.
3 PAyot (Jules), La faillite de l’enseignement, Paris, Felix Alcan, 1937, p. 36.
4 Ibid., p. 141.
5 Sarcey (Francisque), Souvenirs de jeunesse, Paris, Paul Ollendorff éditeur, 1885, p. 190.
6 Rascol (Louis), Claude-Marie Perroud : La vie et l’œuvre d’un universitaire au XIXe siècle, Paris, Didier, 1941, p. 95.
7 Gusdorf (Georges), L’Université en question, Paris, Payot ,1964, p. 141-142 et p. 148-149.
8 Annuaire des anciens élèves de l’École normale supérieure, 1923, p. 79 à 84.
9 Ibid., tome 1912, p. 9.
10 Archives nationales, F17 20387, Lettre d’Émile Charles au ministre, datée du 2 octobre 1872.
11 Voir Durand-Prinborgne (Claude), « Le recteur : De la déconcentration à la décentralisation », dans Condette (Jean-François) et Legohérel (Henri) dir., Le recteur d’académie : Deux cents ans d’histoire, Paris, Cujas, 2008, p. 209-220.
12 Pour disposer de multiples exemples, voir Condette (Jean-François), Le recteur d’académie, l’École, la Nation (1808-1940) : entre réalités scolaires locales et politiques éducatives nationales, Lyon, INRP-SHE, 2009.
13 Voir Boudon (Jacques-Olivier) dir., Napoléon et les lycées, Paris, Bibliothèque Napoléon, Série Etudes, 2004.
14 Bulletin des Lois, n° 1 85, Décret impérial du 17 mars 1808, p. 145 à 171.
15 Archives nationales, F17 1645, Frais d’installation des recteurs, rapport au Grand-Maître du 15 avril 1812.
16 Gontard (Maurice), « Un administrateur de l’Université impériale : André-Alexandre d’Eymar : recteur de l’académie d’Aix », dans Collectif, Histoire de l’Enseignement de 1610 à nos jours, Actes du 95e congrès des sociétés savantes, Reims, 1970, tome 1, Paris ,1974, p. 761 à 789.
17 Nique (Christian), Charles-Louis Dumas (1765-1813) : premier recteur de l’académie de Montpellier, Montpellier, 2008, Rectorat, p. 7-8.
18 Archives nationales, F17 1645, Lettre du recteur de Montpellier au Grand-Maître, 7 janvier 1814.
19 Bulletin des Lois, 1811, n° 402, Décret impérial concernant le régime de l’Université, 15 novembre 1811, p. 425-456.
20 Circulaires et instructions officielles relatives à l’Instruction publique, Paris, Delalain, t .1, 1863, Instruction relative à l’ordonnance royale du 22 juin 1814, p. 213-214.
21 Bulletin des Lois, n° 73, Ordonnance du 29 février 1816, p. 299-304.
22 Archives nationales, F17 10376, Rapport du recteur d’Angers à la Commission, août 1818.
23 Archives nationales, F17 10383, Rapport du recteur de Toulouse, 30 septembre 1822.
24 Archives nationales, F17 6809-2, Rapport du recteur de l’académie de Metz daté du 31 mai 1817.
25 Archives nationales, F17 9368, Rapport du recteur de l’académie de Toulouse au ministre, décembre 1833.
26 Nique (Christian), L’impossible gouvernement des esprits, Histoire politique des écoles normales primaires, Paris, Nathan, 1991.
27 Voir Rosanvallon (Pierre), Le moment Guizot, Paris, NRF Gallimard, 1985.
28 Recueil des lois et règlements concernant l’Instruction publique, Paris, A. Delalain, t. 7, p. 104-113.
29 Gontard (Maurice), L’enseignement secondaire en France de la fin de l’Ancien Régime à la loi Falloux (1750-1850), Aix-en-Provence, Edisud, 1984, p. 211.
30 Archives nationales, F17 6811, Rapport des inspecteurs généraux sur le recteur Thuillier, année 1838.
31 Burney (John M.), Toulouse et son université. Facultés et étudiants dans la France provinciale du XIXe siècle, Toulouse, Presses universitaire du Mirail-CNRS, 1989, p. 63.
32 Archives nationales, F17 13068, Rapport des inspecteurs généraux, année 1831.
33 Archives nationales, F17 13070, Rapport de l’inspecteur général sur la faculté des sciences de Toulouse, année 1854.
34 Burney (John M.), Toulouse et son université…, op. cit., p. 225.
35 Archives nationales, F17 4391, Lettre du recteur Thuillier au ministre datée du 7 mai 1839.
36 Ibid., Lettre du recteur Thuillier parue dans La France méridionale du 13 mai 1839.
37 Burney (John M.), Toulouse et son université…, op. cit., p. 230.
38 La Gazette du Languedoc du 28 mars 1845 (les deux lettres du recteur y sont publiées).
39 Archives nationales, F17 4392, Lettre du ministre de l’Intérieur au ministre de l’Instruction publique datée du 22 mars 1845.
40 Burney (John M.), Toulouse et son université…, op. cit., p. 234.
41 Archives nationales, F17 4392, Lettre du recteur au ministre datée du 1er avril 1845.
42 Burney (John M.), Toulouse et son université…, op. cit., p. 79.
43 Vauthier (G.), « Le baccalauréat ès lettres à Toulouse en 1835 », Revue internationale de l’Enseignement, 1912, p. 537.
44 Archives nationales, F17 13068, Rapports des inspecteurs généraux pour l’année 1835.
45 Archives nationales, F17 20802, Lettre du recteur au ministre datée du 13 février 1842.
46 Ibid., Lettre du recteur au ministre datée du 6 mars 1842.
47 Beauchamp (A. de), Recueil des lois et règlements sur l’enseignement supérieur, op cit., t .1, p. 439-443.
48 Archives nationales, F17 4391, Affiche, janvier 1841, banquet réformiste des étudiants en droit de la faculté de Toulouse.
49 La Gazette du Languedoc du 5 mars 1844.
50 La Gazette du Languedoc du 21 mars 1844.
51 Circulaires et Instructions officielles relatives à l’Instruction Publique, op. cit., tome 3, p. 388 à 390.
52 Agulhon (Maurice), 1848 ou l’apprentissage de la République, Paris, Seuil, 1992, p .163.
53 Bulletin administratif de l’Instruction publique, année 1850, « Loi relative à l’enseignement du 15 mars 1850 », p. 57-80.
54 Téphany (Joseph), Vie de Monseigneur René-Nicolas Sergent, Quimper, De Kerangal, 1872, p. 67.
55 Archives nationales, F17 21720, Rapport au ministre daté de novembre 1852.
56 Mourier (Adolphe), Notes et souvenirs d’un universitaire (1827-1889), op. cit., p. 58-59.
57 Archives nationales, F17 4342, Rapport du recteur Vincens de Gourgas depuis Toulouse, 12 août 1853, 27 p.
58 Rosanvallon (Pierre), Le sacre du citoyen, Histoire du suffrage universel en France, Paris, Gallimard, 1992, p. 11.
59 Archives nationales, F17 20622, Circulaire du 12 novembre 1852.
60 Maurain (Jean), La politique ecclésiastique du Second Empire de 1852 à 1869, Paris, Félix Alcan, 1930, p. 140.
61 Beauchamp (A. de), Recueil des lois et règlements sur l’enseignement supérieur, tome 2, Loi du 14 juin 1854, « Exposé des motifs du projet de loi par Hippolyte Fortoul », p. 324-327.
62 Bulletin des Lois, n° 186, « Loi sur l’Instruction publique du 14 juin 1854 », p. 1551-1555.
63 Beauchamp (A. de), Recueil des lois et règlements sur l’Enseignement supérieur, op. cit., tome 2, p. 340 et suivantes.
64 Archives nationales, 246 AP/20, Réunions entre le ministre et les recteurs, 2 octobre 1855.
65 Ibid., Rapport du recteur de Toulouse, septembre-octobre 1861.
66 Ibid., Rapport du recteur de Rennes au ministre, février 1861.
67 Bourgade (Germaine), Contribution à l’étude d’une histoire de l’éducation féminine à Toulouse de 1830 à 1914, publication de l’Université de Toulouse Le Mirail, 1980.
68 Archives nationales, F17 8756, Lettre du recteur Roustan au ministre datée du 1er novembre 1868.
69 Ibid., Lettre du recteur au ministre datée du 29 juin 1868.
70 Circulaires et instructions officielles relatives à l’Instruction publique, op. cit., tome 4, p. 444-447.
71 Voir Mourier (Adolphe), Notes et souvenirs d’un universitaire (1827-1889), Orléans, Georges Jacob, 1889, p. 101 à 107.
72 Archives nationales, F17 4353, Discours du recteur de l’académie de Toulouse, 24 juin 1858.
73 Goedert-Abaji (Nathalie), « Quand les recteurs regardaient la France », dans Claude Bontems (dir.), Instruction, éducation, administration, Hommage à Jacques Lelièvre, Paris, PUF, 1999, p. 121-157.
74 Bulletin administratif de l’Instruction publique, année 1880, « Loi du 27 février 1880 », p. 247-254.
75 Ministère de l’Instruction publique et des Beaux-Arts, Recueil des monographies pédagogiques publiées à l’occasion de l’Exposition universelle de 1889, Paris, Imprimerie nationale, tome 2,1889, p. 487-632.
76 Archives nationales, F17 4364, Conseil académique de Toulouse, juin 1869, rapports des divers inspecteurs d’académie.
77 Archives nationales, F17 6825, Rapports sur l’enseignement secondaire, conseil académique de Toulouse, 1er mai 1893.
78 Rogers (Rebecca), Les Bourgeoises au pensionnat : l’éducation féminine au XIXe siècle, Rennes, PUR, 2007.
79 Marchand (Philippe), « Georges Lyon : Un grand chef d’académie à Lille (1903-1924) », dans Condette (Jean-François) et Legohérel (Henri) dir., Le recteur d’académie. Deux cents ans d’histoire, Paris, Cujas, 2008, p. 135-155.
80 Archives nationales, F17 7293, Lettre du proviseur du lycée de Toulouse au recteur datée du 26 mars 1882.
81 Ibid., Rapport du recteur au ministre daté du 29 mars 1882.
82 Prost (Antoine), Histoire de l’enseignement en France de 1800 à 1967, op. cit., p. 405-431.
83 Condette (Jean-François), « Stimuler ou contraindre ? Les recteurs d’académie et l’enseignement supérieur sous la Troisième République (1870-1940) » dans Condette (Jean-François) et Legohérel (Henri) dir., Le recteur d’académie. Deux cents ans d’histoire, op. cit., p. 111-134.
84 Ministère de l’Instruction publique, Documents, tome XVI, « Réponses à la circulaire de Jules Ferry du 17 novembre 1883 sur les universités et facultés », Imprimerie nationale, 1884.
85 Allard (Michel), Essai sur la fonction rectorale, Thèse de doctorat, Université de Droit et de la Santé, Lille, 1971, p. 70.
86 Dauphin (Stéphanie), « Octave Gréard, vice-recteur de l’académie de Paris (1879-1902) : réformer et développer l’Intruction publique », dans Condette (Jean-François) et Legohérel (Henri) dir., Le recteur d’académie, op. cit., p. 93-109.
87 Condette (Jean-François), Une faculté dans l’histoire : la faculté des lettres de Lille de 1887 à 1974, Lille, Septentrion, 1999.
88 Burney (John M.), Toulouse et son université…, op. cit., p. 70.
89 Ibid., p. 48-49.
90 Archives nationales, F17 22083, Dossier du recteur Perroud.
91 Burney (John M.), Toulouse et son université…, op. cit., p. 103.
92 Ibid., p. 109.
93 Croissandeau (Jean-Michel), « La fonction de recteur : Du notable au gestionnaire », Le Monde du 14 mai 1977, p. 29.
© Presses universitaires du Midi, 2010