Préface

1Bertrand Vayssière, avec l’aide précieuse de Sylvaine Poillot-Peruzzetto, renoue brillamment avec une tradition que Jacques Poumarède avait initiée : la collaboration scientifique entre historiens, juristes et géographes. Quand on sait que la recherche en sciences sociales progresse souvent par segmentation et hybridation, on ne peut que saluer cette initiative courageuse. Courageuse car la collaboration n’est pas si facile entre des disciplines qui affichent chacune leur méthodologie de travail et leur définition de la notion d’Europe. Les auteurs, très bons connaisseurs de la construction européenne au sens large, nous offrent de multiples pistes de réflexion. Certains privilégient une analyse braudélienne, par le temps long, que maîtrisent parfaitement Jacques Krynen et Caroline Barrera, tandis que d’autres, comme Marc Blanquet, s’attachent à souligner la complexité des spécificités et des identités. L’affirmation d’une communauté de destin implique effectivement de relever le défi d’élaborer un espace de liberté, de sécurité et de justice, en tenant compte de la diversité des territoires de l’Europe que Philippe Dugot analyse. Tout ceci participe à la recherche d’un idéal qui s’appuie sur un passé communautaire bien fragile. De la réalité à l’espérance il y a beaucoup d’obstacles à franchir, et le chemin en sens inverse se révèle parfois plus rapide à parcourir, comme le suggère habilement Bertrand Vayssière. À un moment crucial où les grandes réussites économiques de l’Union européenne sont remises en cause, les réflexions rassemblées dans cet ouvrage constituent une mise en perspective salutaire.