L’abbaye cistercienne de Grandselve
|Troisième Partie. Structures et paysages agraires
Chapitre 2. Un grand domaine : la grange
Texte intégral
1La vaste étendue des domaines de Grandselve aurait pu ne former qu’un agrégat de possessions, inorganisées et dispersées au gré des acquisitions. Cependant, l’abbaye s’attacha à les regrouper autour de quelques noyaux privilégiés, constituant ainsi de vastes unités économiques appelées granges.
- 1 C.V. Graves, « Medieval cistercian granges », Studies in médiéval culture, Western Michigan Univers (...)
2Le terme utilisé dans les textes est uniquement celui de grangia à l’exception de tout autre. Mais il pourrait avoir différentes significations. Au sens propre, c’est un grenier, un bâtiment utilisé pour conserver les grains (nous avons trouvé l’indication sur un plan d’une grange « bladière »). Par extension, le mot signifie la terre d’où provient le produit, ce qui nous oriente vers la terre arable. Enfin, dans l’organisation cistercienne, il s’agit d’une ferme monastique caractérisée par le faire-valoir direct et le travail des frères1.
- 2 J’avais développé cette synthèse dans l’article « Les granges de l’abbaye cistercienne de Grandselv (...)
3L’abbaye possède de nombreuses granges et l’étude analytique de la formation de chacune d’elles a été faite par grands ensembles géographiques, ce qui a permis de regrouper, dans la conclusion, les principaux aspects comparés : chronologie, localisation, potentialités économiques2.
LE NOYAU CENTRAL
4L’abbaye était installée dans le vallon de la Nadesse. Elle a réuni de nombreuses terres autour d’elle et les granges sont nombreuses dans un faible rayon géographique. Deux caractères communs s’imposent pour leur étude : la faiblesse de la documentation (seul l’inventaire du XVIIe siècle est utile) et l’impossibilité de déterminer les modes d’acquisition, la taille des parcelles, etc. D’autre part un cadre topographique similaire : des petites rivières coulent parallèlement à la Nadesse, comme le Lambon et la Tessonne. Les vallées sont assez étroites, les pentes dissymétriques (caractéristiques de la Gascogne) ont entaillé le plateau et dégagé des crêtes d’interfluves, les serres. Les pentes étaient couvertes le plus souvent de vastes forêts.
L’abbaye et ses granges
- 3 108H1.
- 4 C’est ce que pense F. Moulenq, Documents historiques sur le Tarn-et-Garonne, Montauban, 1879, t. IV (...)
- 5 J. Jouglar, Monographie de l’abbaye de Grandselve, Montauban, 1857, p. 199.
- 6 F. Mirouse, Le clergé paroissial du diocèse de Toulouse (1450-1516), Ecole Nationale des Chartes, 1 (...)
- 7 9994 f° 219, en juillet 1194, Bernard Bord situe un bien par rapport à l’église de Saint Sernin de (...)
5La dotation initiale de l’abbaye comprenait la forêt de Grandselve. L’emplacement est assez vague et fut précisé par la confirmation de la fondation faite par l’évêque de Toulouse Amiel en 1117 : il reconnut aux moines ce qu’ils avaient déjà acquis ou acquerraient, à Grandselve, Figarède, Gaudanville, Ricancelle, Beaumont, Bouillac, Saint-Germain, tous lieux qui sont entre les quatre églises de Ricancelle, Beaumont, Bouillac et Saint-Germain3. Figarède n’a pas laissé de trace sur le terrain, Gaudanville est devenu Pamville4. L’église de Bouillac était proche de l’actuel village du même nom, celle de Saint-Germain se trouvait au Nord, sur le plateau au-dessus du ruisseau de Bousseran, affluent de la Nadesse, au sud-ouest de Saint-Sardos et n’existe plus depuis plusieurs siècles. Celle de Beaumont est inconnue. J. Jouglar l’a identifiée avec l’actuelle Beaumont-de-Lomagne (qui fut une bastide créée par Grandselve)5, mais rien n’autorise à penser que l’abbaye s’étendait jusque-là dès sa fondation, et d’autre part, Beaumont-deLomagne n’existait pas à l’époque puisqu’il n’y avait que le terroir de Bodot et l’église Sainte-Marie de Gilhac ainsi que nous le verrons en étudiant la grange de Calcassac. L’église de Beaumont n’est donc pas localisée. Celle de Ricancelle soulève aussi des difficultés : pour J. Jouglar, il s’agit de Saint-Sernin-de-Ricancelle qui se trouvait au confluent de la Dère et de la Nadesse. Une carte du XVIIe siècle qui a été utilisée par F. Mirouse montre une implantation des églises un peu curieuse6 : il y a un établissement Saint-Sernin-de-Ricancelle à l’est du confluent de la Dère et de la Nadesse et un autre dit de Ricancelle au nord-est de Grandselve, en bordure du Lambon, vers l’actuel lieu-dit La Croix de Madone. On pourrait imaginer ainsi un quadrilatère avec, pour la partie Nord les églises de Saint-Germain et de Ricancelle et pour la partie Sud, celles de Bouillac et de Beaumont. Mais la carte du XVIIe siècle est-elle crédible ? La carte de Cassini place l’église de Saint-Sernin-de-Ricancelle à l’ouest du confluent de la Dère et de la Nadesse. Par ailleurs, les textes ne nous ont apporté aucun éclaircissement : alors que de nombreuses chartes citent des terres à Ricancelle avant 1190, le terme de Saint-Sernin de Ricancelle n’est employé qu’à partir de 11947.
- 8 108 H 56, f° 241.
6La donation initiale, telle qu’elle était délimitée, couvrait un paysage de plateau forestier, au nord du vallon de l’abbaye. Le noyau, stable pendant 30 ans, fut augmenté dans la deuxième moitié du XIIe siècle vers le Sud-Est et Ricancelle. L’expansion fut beaucoup plus importante à partir de 1174 : le bois de Pamville8, les terres au sud de la Nadesse et est de la Dère, la terre d’Arénè au fond du vallon, près de l’abbaye, les bois entre Pamville et Nonas. A la fin du XIIe siècle et au début du XIIIe siècle, les possessions allaient jusqu’à la terre de Luguet et le bois de la Carbonnade au Sud-Est et jusqu’à Nonas au Nord (carte n° 2).
7Sur la représentation graphique des acquisitions, les 80 textes qui se rapportent à ces terres sont très resserrés dans le cadre chronologique : l’ensemble a été obtenu entre 1180 et 1205, avec un sommet en 1190-1195. La taille des parcelles n’est pas indiquée sauf une fois pour une terre de 4 sétérées. Par contre, les terroirs devaient être anciennement occupés près de Ricancelle car nombreux en étaient les ayant-droit.
8Si les bois étaient nombreux, la vigne était aussi cultivée, à la fin du XIIe siècle, à Pamville et Ricancelle. Depuis Nonas jusqu’à Coubirac et les bois près de Savenès, une vaste superficie entourait l’abbaye et était cultivée par l’intermédiaire d’une exploitation agricole.
- 9 J. Jouglar, Monographie de Grandselve..., p. 198.
9L’abbaye avait sa propre grange. J. Jouglar décrit ainsi la situation : l’abbaye avait deux granges contiguës, l’une au-dessus et l’autre au-dessous de son enceinte9. Mais la transposition sur le terrain n’est pas aisée. Il s’agissait sans doute des fermes d’Auragne et d’Arénè (la Raynet) qu’on peut retrouver sur la carte de Cassini, à l’ouest et à l’est de l’abbaye. D’après les documents, nous pensons que la grange du Moyen Age était celle d’Arénè car plusieurs textes portaient sur cette terre.
- 10 108 H 60, registre des baux de ferme et de culture de 1675-1705.
10Des clairières cultivées trouaient la forêt de Grandselve, sur lesquelles des granges sont attestées à partir du XVIIe siècle, mais nous ne savons pas si elles existaient antérieurement10 : il s’agit de celles de Gaillard et de Fraysse, établies sur le plateau, au nord de l’abbaye.
- 11 Arch. départ. Tarn-et-Garonne, manuscrit 266. Mr de Bernard, Comptes de l’abbaye de Grandselve à la (...)
- 12 Toutes les estimations de surface des granges sont des ordre de grandeur car tout le travail de rec (...)
11En incluant les bois de Pamville et les terres de Ricancelle, la superficie couverte était considérable. D’après l’estimation de Mr. de Bernard11 qui porte sur les biens à la veille de la Révolution, nous trouvons un total de 630 éminées soit 270 ha de terres cultivées, et 700 arpents soit 400 ha de bois environ. Or, les biens, au sud de la Nadesse et à l’est de la Dère, n’étaient plus en la possession de l’abbaye, On peut donc évaluer la superficie au début du XIVe siècle à 800 ha et plus12.
La grange de Coubirac
- 13 A côté de la grange fut élevé le château de Coubirac, l’un des manoirs de l’abbé de Grandselve. J. (...)
12Elle était établie près de la Nadesse au sud de l’abbaye. La pente abrupte ne permettait pas une installation près du ruisseau et c’est en bordure du plateau voisin, où subsiste encore un lieu-dit Coubirac qu’elle aurait été bâtie13. La donation initiale dont la date n’est pas connue, était sans doute composée ou entourée de bois, car elle était en bordure du plateau (il en resterait le bois de Bouscarras et le bois de Coubirac actuels).
- 14 Gallia Christiana, t. XIII, Instr., col. 18, et 108 H 56, f° 2.
- 15 108 H 56, f° 92.
13L’existence de la grange est attestée par la bulle d’innocent II et confirmée par celle d’Alexandre III14. Son territoire est complété dans les années 1161- 1168, puis est étendu entre 1172 et 1178 en direction du bois de Cardonnet (dont la localisation n’est pas connue) et à partir de 1187 en direction du terroir d’Escoute-Caüs qui comportait des bois et des vignes15.
- 16 108H 56, f° 23.
- 17 108H 60, et 1 G 394.
- 18 De Bernard, Comptes de Grandselve..., p. 21.
- 19 Des éléments intéressants de prospection, localisation et interprétation se trouvent dans T. Pratvi (...)
14Coubirac est toujours citée dans les dénombrements de 151916 et du XVIIe siècle17 et avait, vers 1788, un bois d’environ 140 ha18. Sa superficie est difficile à évaluer : elle ne devrait pas dépasser 200 hectares19.
Comberouger
- 20 Doat 77 f° 243, le 24 février 1181, Forton de Gots donne tout ce qu’il possède au bois de Gausard.
- 21 108 H 56, f° 136, le 15 janvier 1240.
- 22 108 H 56, f° 144,148 : le premier est du 16 avril 1325 et le second du 4 mai 1278.
15A l’ouest de Grandselve près du Lambon, le versant gauche monte en pente douce, très ensoleillée. En ce lieu, un terroir dit de Comberouger fut donné très tôt, mais sans que nous puissions toutefois préciser quand, à l’abbaye. Le site était proche du chemin qui allait de Bouillac par son église de Saint-Sulpice, vers le gué proche du lieu-dit Le Plassa sur le Lambon, et continuait vers Saint-Jean-de-Cauquessac. La grange existait en 1142, date à laquelle Innocent II en confirma la possession à Grandselve. La région paraissait très peu occupée par les hommes alors, et le terroir de Saint-Léonard, possédé en 1147, n’avait jamais payé de dîmes. Par la suite, les efforts de l’abbaye portèrent sur l’obtention du grand bois voisin de Gausard20. Elle s’installa aussi près de Brivecastel (terroir de La Salle, Castelar) et obtint la terre d’Escudès près de Vigueron (carte n° 3). Quelques donations dans les deux dernières décennies du siècle portent encore sur le bois de Gausard. Au XIIIe siècle, la grange s’étend vers l’Ouest, les terres de Verfeuil, Gasquet procurées par Odon de Terride, fils de Bernard d’Astaffort21 faisant la liaison avec les biens de la grange Lescout ; mais ses successeurs, puissants vicomtes de Gimois, imposèrent à l’abbaye un compromis touchant de nombreuses terres devenues litigieuses entre eux. Les sentences arbitrales indiquent ainsi les limites de Comberouger, de Gausard, de Gasquet, de Verfeuil et Hermite-Pages22.
16Le site précis de la grange n’est pas connu. Elle a donné naissance à une agglomération, la petite ville de Comberouger et n’a pas subsisté à côté. Elle n’est plus citée aux XVIe et XVIIe siècles. Escudès existe toujours, à côté de Vigueron. Le nom de Gausard se retrouve peut-être dans celui de la métairie Causail à l’ouest de Comberouger. Si l’on cherche à évaluer la superficie de la grange, en fonction des limites connues, on peut estimer qu’elle couvrait environ 600 ha, surtout composés de bois et en moindre proportion de terres cultivées.
Les granges de Bouillac
17Grandselve ainsi que les granges de Comberouger et Coubirac se trouvaient dans la paroisse de Bouillac, petite agglomération sur la rive droite de la Nadesse et dont l’église dédiée à saint Sulpice avait été construite sur le versant gauche.
- 23 108H 56, f° 104.
18Quelques donations de dîmes montrent l’existence de terres acquises avant les années 1150, et à Espagnac dès 1143. La grange de Bolhaguel est attestée par la bulle d’Alexandre III. Elle se trouvait près de la route de Bouillac à Beaupuy23. Elle s’agrandit rapidement entre 1177 et 1195 : des bois, des vignes, des terres, des prés, formant une mosaïque de terres. Certaines sont proches de la grange de Coubirac, les autres entourent le village, ou sont près de Saint-Salvy (carte n° 3).
19Les acquisitions continuent au XIIIe siècle : casal de Ricardens et terroir de Montamat, près de Bouillac, terres entre le Lambon et la Nadesse à partir de 1214. La terre de Puyvidal est donnée. Dans la plupart des cas, les acquisitions à titre onéreux dominent.
20Au milieu du siècle, quelques pièces viennent s’ajouter aux propriétés, mais des compromis doivent régler les contentieux : différend entre Grandselve et Guilhem Rainaud de Sedac, habitant de Bouillac et l’abbaye conserva le casal de Coubirac près de la route de Saint-Salvy, une vigne près de Bolhaguel et la terre de Larache ; différend entre Grandselve et Ainard de Goas pour la terre de Liaroles qui reste à l’abbaye, de même un peu plus tard que celle de Puyvidal. A la fin du siècle, l’abbaye achetait encore des terres près de la Nadesse, et en 1325 également.
21Les textes nous donnent très peu d’indications sur la dimension des terres : on peut noter les cas de 5 sétérées, 4 sétérées, 1 éminée. Lorsque l’abbaye inféoda ses terres au cours du XIIIe siècle, les confronts montrent que le plus souvent, les parcelles étaient entourées par celles de particuliers, la propriété était donc considérablement émiettée. De plus, il est très peu fait mention de bois, ce qui tendrait à prouver l’occupation assez dense des sols auprès du village sauf entre le Lambon et la Nadesse.
22Les biens de Grandselve dans la paroisse de Bouillac étaient répartis en deux granges sur lesquelles nous n’avons que très peu de renseignements. Celle de Bolhaguel dont l’orthographe varia considérablement (Boulhaguet, Bolaguel, etc.) peut être identifiée avec l’actuel lieu-dit de Bouillac-Vieil. Elle existait en 1162 et fut, sans doute, très importante ; elle occupait au XIIIe siècle la partie sud-est des possessions.
- 24 108H 46, f° 13 et 14 : elle est dite grangia Porterii, et grangia del Porterii.
23Entre la grange de Bolhaguel et celle de Coubirac se trouvait celle de Portier (l’actuel Portié) signalée plusieurs fois mais sans date, peut-être du XIIIe siècle d’après les textes avoisinants24. Les extensions du milieu du XIIIe siècle se firent en direction de Saint-Salvy avec le vaste terroir de Puyvidal. Il ne semble pas qu’une grange ait été installée là, mais plutôt une communauté de personnes, ainsi que nous le reverrons.
- 25 F. Moulenq, Documents historiques..., t. IV, p. 373.
24Ce terroir conduit à poser le problème des limites des granges : dans le pourtour de Grandselve, elles sont imbriquées les unes dans les autres et le classement des documents opéré par l’inventaire côté 108 H 56 ne paraît pas obéir à une rigueur géographique qui d’ailleurs n’existait sûrement pas alors. C’est ainsi que les terres d’Espagnac, Puyvidal, Saint-Salvy semblent être dans la grange de Bolhaguel et non dans celles de Comberouger ou de Lescout, pourtant toutes proches. D’autre part, un certain nombre de terres ne sont connues qu’en dehors de leur contexte et nous ne pourrons que difficilement les attribuer à telle ou telle grange. Les biens de Bouillac n’ont laissé que peu de traces dans la toponymie, même si leurs noms ont été conservés : Liaroles est resté, mais Sansanhel, Frezals, Sordones, Pech Gaufre, Maurilhos qui entouraient Puyvidal ont disparu. L’emplacement de Puyvidal s’était conservé sur la carte de Cassini par le lieu-dit le Moulin de Salvi25.
- 26 J. Jouglar, Monographie de Grandselve..., p. 199.
25Dans les inventaires du XVIe et XVIIe siècles, les établissements n’apparaissent plus et avaient cessé d’exister auparavant. J. Jouglar déclare qu’il y en avait deux26. Une estimation très approximative de la surface des granges de Bouillac, tenant compte de la dispersion des parcelles donne au minimum 300 hectares, pour les deux, en incluant la région de Puyvidal. J. Jouglar rappelle aussi qu’à la fin du XVIIe siècle, la superficie de la seigneurie de Bouillac était de 800 cartonnades soit, environ 1 400 ha. Etant donné la proximité de l’abbaye, il est donc possible qu’elle ait possédé un territoire plus vaste que celui que nous proposons.
LA COURONNE PERIPHERIQUE
26Tout autour du cœur du domaine foncier de l’abbaye, quelques domaines d’inégale importance sont encore proches et leurs terres parfois intriquées dans celles de granges plus centrales.
27Deux types de sites dominent : la vallée (nous retrouvons d’ailleurs la Nadesse et le Lambon), mais aussi le plateau avec ses aptitudes économiques différentes puisque en général, les sols y sont moins bons.
La grange d’Aussiac ou Orsiac
28Au sud de Grandselve et du ruisseau de la Dère, s’étend une région très plane, entourée par la Nadesse et la Dère et le Marguestaud. Il s’agit de la terrasse qui borde l’ouest de la vallée garonnaise, et qui constitue là un véritable plateau entaillé par le Goutoule et le Marguestaud.
- 27 108 H 46, f° 68.
- 28 Doat 78, f° 189, en novembre 1209.
- 29 108 H 46, f° 68.
29L’abbaye acquit des terres tout d’abord autour d’Orsiac, au sud du Burgaud en 117927. Quelques donations vers 1190 lui apportèrent le terroir de Merles, et l’honneur de Sainte Anastasie près de l’ancienne maladrerie du Burgaud et du gué menant vers Saint-Cézert. Au XIIIe siècle, une importante donation comportait au Burgaud des terres, bois, prés, vignes et pâturages28, complétée par une autre à Orsiac en 1236 avec les maisons, casals, édifices, bâtiments, terres cultes et incultes, les hermes, bois, bartes, vignes, eaux et paisselles (sans oublier les divers droits ni les serfs)29. D’autres donations de moindre importance complétèrent les possessions de la grange (carte n° 4).
- 30 Ch. Higounet, « Les origines d’une commanderie de l’Ordre de Malte : le Burgaud (Haute-Garonne) », (...)
30Un autre établissement religieux était aussi installé au Burgaud : une maison de l’Hôpital Saint Jean de Jérusalem. Ch. Higounet estime que la fondation de la commanderie de l’Hôpital ne pouvait guère être antérieure à 1214-121530 Mais un texte nous permet peut-être d’avancer dans le temps cette date. Amanieu de Coubirac, seigneur d’un château près de Grandselve ainsi que toute sa famille qui par ailleurs dota largement l’Hôpital, fit de nombreuses donations à l’abbaye.
- 31 9994 f° 214.
- 32 Doat 79 f°165.
31Or, en mai 1190, Amanieu est cité comme témoin dans une donation faite par Sans de Coubirac, et il est alors qualifié de filiolus de l’Hôpital du Burgaud31. Une controverse s’éleva entre les deux établissements au sujet des honneurs de Fief et Barreria situés près de la route vers Drudas, sans doute près d’Orsiac : le premier était possédé pour moitié par chacun et le second baillé à fief par Grandselve à l’Hôpital32.
- 33 Doat 79 f° 360.
32L’affaire rebondissait en 1280 à propos de la métairie d’Escatabiau, auprès de Toulouse que Grandselve avait inféodée à l’Hôpital du Burgaud. Le désaccord s’était aussi établi sur les limites de Fief qui furent précisées dans le compromis. Une clause précisa que Grandselve aurait dans le dîmaire de Saint-Michel-d’Orsiac « 50 cartons de terre, c’est-à-dire quatre arpents à la mesure de Toulouse (l’équivalence paraît douteuse), là où sont actuellement la maison, les jardins, prés, aire de la grange d’Orsiac »33. Le texte précise également que les terres étaient continues et non-éparpillées, sauf une, du compte. Par rapport aux autres granges que nous avons vues, cette concentration parcellaire paraît assez rare.
- 34 De Bernard, Comptes de Grandselve..., p. 18.
33Dans la mesure où il n’y a que peu de documents pour cette grange, la localisation reste incertaine. Merle existe toujours. La grange, elle-même, n’est pas localisée précisément par les textes. Au sud du Marguestaud une ferme dite Saint-Michel rappelle sans doute le dîmaire d’Orsiac. A quelques centaines de mètres à l’Est, un lieu-dit La Grange est peut-être celui que nous recherchons. La confirmation nous est partiellement donnée par Mr. de Bernard qui rappelle qu’à la veille de la Révolution la grange d’Aussiac comprenait le château de Vernon34.
34Le domaine et le bois existaient encore alors. De Bernard l’évaluait à 200 éminées soit 85 ha de terres cultivées et 41 arpents soit 25 ha de bois. Si la grange n’apparaît pas dans les dénombrements du XVIIe siècle, c’est qu’elle avait été aliénée pour la rançon du roi François 1er (et l’inventaire de 1519, qui avait été fait « pour le Roi », citait la métairie d’Aussiac). Elle fut ensuite rachetée à grands frais par les religieux à la fin du XVIIIe siècle. On ne sait s’ils reconstituèrent la propriété en son entier. D’après les biens cités au XIIIe siècle, la grange d’Orsiac devait approcher 150 à 200 ha, car les bois étaient sans doute importants en superficie, durant le Moyen Age, et certainement plus qu’en 1789.
La grange de Les Ayres
35Le manque d’informations ne permet que de donner quelques indications sur la grange Les Ayres. Nous ne savons pas quand ni comment elle fut constituée.
- 35 Doat 78 f° 252, le 4 mars 1229.
- 36 108 H 56 f° 149 en 1278 dans la sentence arbitrale entre Odon de Terride et Grandselve.
- 37 108 H 46, f° 8, à la date du 27 mars 1281.
36Elle est attestée en 1229 par un texte qui donne à Grandselve un terrain entre Malegate et la grange de Las Airis35 ; puis, à la fin du XIIIe siècle, lors d’un compromis avec les habitants de la Graulet à propos de pâturages36 ; enfin comme limite de la grange Lescout37 ; dans les différents inventaires depuis le XVe siècle jusqu’à la fin du XVIIIe siècle. Son orthographe a subi des variations considérables : Heyris au XVe siècle, Cyres ou Eyros au XVIIe siècle, métairie les Ayres au XVIIIe siècle et Lasaires sur la carte de Cassini.
37Actuellement, elle subsiste dans la toponymie par un lieu-dit Les Ayres : c’est une ferme établie sur le fond de la vallée de la Nadesse, au contact avec le versant gauche tout proche. La Nadesse coule au pied du versant droit et laisse une petite plaine alluviale dans le fond de sa vallée.
- 38 De Bernard, Comptes de Grandselve..., p. 20.
38A la veille de la Révolution, Mr. de Bernard note qu’elle avait 50 arpents soit 28 ha mais nous n’avons aucun élément nous indiquant la taille qu’elle avait pendant le Moyen Age38.
La grange de Lescout
- 39 108 H 56 f° 415.
- 40 108 H 56 f° 416.
- 41 108 H 56 f° 417.
- 42 108 H 56 f° 422.
- 43 108 H 56 f° 432.
- 44 108 H 56 f° 430.
- 45 108 H 56 f° 431.
39La vallée du Lambon est assez étroite lorsque l’on remonte vers sa source et la dénivellation des pentes y est sensible (4 %), ce qui est une difficulté pour une exploitation agricole. Au XIIe siècle, les forêts dominaient très largement : bois de Lescout39, de Camplobaud40, de Peyraube41, de Taillepastenc42, de Belsol43, de Musti44, de Gavis et de Vinholes45. Toute la crête entre le Lambon et la Tessonne était recouverte d’arbres, et ceux-ci descendaient largement vers le fond des vallées (carte n° 5).
40L’abbaye obtint des terres dans la région de Lescout à partir de 1181, mais les premiers textes de l’inventaire du XVIIe siècle laissent supposer qu’il y avait eu des donations antérieures. Le premier groupe de documents se place entre 1188 et 1193 et concerne Lescout. L’essor véritable se fait vers 1226-1227 avec une très importante vente pour la somme de 2 000 sous toulzas, la plus importante tractation qu’a connue l’abbaye.
41Puis, vers le milieu du XIIIe siècle, la grange s’étend au Sud par le terroir de Moras et au Nord par celui de Peiraube. A la fin du siècle plusieurs compromis montrent qu’elle possède les bois de Taillepastenc, Musti, Belsol, les terres de Gavis, et celles de Vinholes, situées sur l’autre versant de la vallée du Lambon. L’importance de ses bois excita la convoitise à la fois des habitants des villages voisins (Gariès, Escazeaux) mais même de ceux de Verdun, et le seigneur de Terride ne manqua pas d’y porter la désolation. Lescout avait obtenu des vignes et des pâturages. Enfin, des vignes et des prés étaient cités également à Vinholes et Gavis.
42La grange se trouvait sur le versant gauche de la vallée, bien exposé au soleil. Un petit cours d’eau, maintenant asséché par des travaux, coulait au Nord : l’emplacement de la grange se trouve dans un bosquet d’arbres.
43Le passage qui actuellement se fait par un pont légèrement au sud de la grange devait être réalisé par un gué situé au pied des bâtiments. Ce fait nous a été suggéré par l’existence d’une pente très douce sur le versant oppose, mais surtout par la persistance de traces de charrois, particulièrement visibles en été. Le chemin descendait directement vers la rivière et les hauts maïs contemporains poussent d’une manière différente sur la terre séculairement tassée, phénomène insensible vu de près, mais très net de loin.
- 46 Mgr X. Barbier de Montault, « L’inscription de la Grange Lescou (Tarn-et-Garonne) », BSATG, 1884, p (...)
44L’emplacement de la grange est indiqué sur les cartes de l’I.G.N. par le lieu-dit Les Granges. Sur la carte de Cassini, il est encore nommé la grange de Lescoute. En 1834, l’édifice portait des marques d’incendie46, et les bâtiments que l’on voit actuellement sont contemporains. Quelques lieux se sont perpétués dans la toponymie : Peiraube qui est devenu Pierre blanc, et Taillepastenc ne s’est pas modifié.
- 47 108 H 56 f° 144 et 108 H 46 f° 16, le seigneur abandonnait le droit de coupe et de pâturage sur la (...)
45La grange de Lescout a été morcelée, entre Lescout et Malegate. En 1229, plusieurs achats constituent un grand ensemble entre le Lambon et la Nadesse au sud de la terre d’Espagnac, près de la fontaine de Malegate. A l’ouest de la Nadesse, la grange de Malegate devait être à l’emplacement de l’actuel lieu-dit Malegate qui portait sur la carte de Cassini le nom de Tracat. Elle fut constituée vers 1230. Lorsqu’en 1325, le seigneur Odon de Terride établit un véritable contrat de paréage avec l’abbaye à propos de Comberouger et fit délimiter les possessions respectives, la grange de Malegate était conservée à l’abbaye avec 20 cartonnades de terre « pour l’infirmerie »47.
- 48 De Bernard, Comptes de Grandselve..., p. 17 et 21.
- 49 108 H 56 f° 422.
- 50 108 H 56 f° 149.
46Lescout se retrouve jusqu’à la Révolution dans tous les dénombrements. Par contre, elle avait perdu une bonne partie de ses bois. De Bernard évalue ainsi les biens à la fin du XVIIIe siècle : 140 éminées soit 60 ha de terres cultivées, 180 arpents soit 100 ha de bois, et 331 arpents soit 190 ha pour la forêt de la Crambe qui lui était rattachée48. Or au XVIe siècle, le bois de Taillepastenc avait encore 75 ha49. Dans sa plus grande étendue, elle a pu posséder 1 300 ha, avec essentiellement des bois. Cela est suggéré par le report sur la carte des limites de Lescout, telles qu’elles sont définies par la sentence arbitrale réglant les différends entre Odon de Terride et Grandselve, en 127850. La grange de Malegate, d’après les achats effectués devait avoir 200 h a environ.
Les granges de Nonas
- 51 108 H 56 f° 139.
- 52 108 H56 f° 212.
- 53 9994 f° 189.
- 54 9994 f° 208.
- 55 9994 f° 211.
- 56 108 H 56 f° 140.
- 57 9994 f° 201.
47Le cours du Lambon s’infléchit vers l’Est et sépare le plateau de la forêt de Grandselve de celui de Saint-Sardos. Sa vallée est assez étroite et oblige les établissements agricoles à s’installer sur les pentes ou sur le plateau. Bois et forêts étaient importants au XIIe siècle sur les versants et sur le plateau et presque tous les noms de lieux cités comportaient des bois : Bersac51, Nonas52, Ricaumont53, Barte Canude54, forêt de Balsonne55, bois près de la Craberie56, bois de Gausard57. Les terres cultivées ne couvraient qu’une faible proportion de ces surfaces.
48Deux maisons religieuses avoisinaient, Saint-Sardos, prieuré de l’abbaye de Sarlat, au Nord, et l’abbaye de Mas-Grenier ou Saint-Pierre-de-Cour à l’Est. On ne sait s’ils avaient déjà participé à la mise en valeur des terroirs mais les populations locales avaient ouvert des clairières suffisantes pour développer des cultures.
- 58 Le cartulaire 9994 et l’inventaire 108 H 56 fournissent l’essentiel de l’information sur la grange (...)
- 59 Doat 76 f° 215.
49La base de la grange fut la terre de Nonas obtenue en 114758 dans sa partie supérieure qui était appelée le Pech de Sarragossa (carte n° 6). L’ensemble du terroir de Nonas fut pratiquement occupé entre 1147 et 1164. La grange est attestée par la bulle d’Alexandre III. A partir de 1160, les terres de Saint-Germain étaient ajoutées ce qui nécessita une négociation complexe avec le prieur de Saint-Sardos qui possédait une partie de celles-ci59. S’étaient intégrés aussi à l’ensemble Barte Canude et le casal de Ricol à Nonas, et la grange commençait à avoir quelques biens dans le terroir de Berzac.
- 60 108 H 56 f° 214, le 27 mars 1286, le cellerier de Grandselve achète à Andrie de Quinquestone, bourg (...)
50Les acquisitions augmentaient considérablement dans la période 1175-1184, allant jusqu’à Escudès, la Borsède et Bausoa. En 1189, la grange gagna vers le Nord avec les terres de Pleus, Montpeyrous et Ricaumont, proches de Saint-Sardos, et en bordure de la Tessonne avec les bois de Balzonne. A partir de cette date, les actes sont beaucoup moins nombreux, mais continuent, de manière épisodique tout au long du XIIIe siècle, montrant ainsi la continuité de l’expansion territoriale de l’abbaye. Une partie nouvelle est rassemblée : l’Ouest entre Brivecastel et la Tessonne, les terres de Lasalle, Saint-Léonard le Vieux, le Castelar et Basoete, à quoi s’ajoutent le Colomé au nord du ruisseau de Bousseran et Linharoles. Le dernier acte, et non le moins intéressant de cette série, est l’achat par Grandselve d’une vigne à Nonas à un bourgeois de Bordeaux60.
- 61 108 H 56 f° 199 , le 15 juin 1251, Grandselve conserve les terres de Balsone, Laranhon, Pleus major (...)
- 62 108 H 56 f° 199 v°, 200 et 200 v°.
- 63 Doat 79 f° 308.
51Des conflits éclatèrent à partir du milieu du XIIIe siècle, essentiellement avec des établissements religieux. En 1251, ce fut avec le prieur de Saint-Sardos61 et ainsi furent délimités un certain nombre de terrains62. En 1281 les habitants de Brivecastel obtinrent la moitié du terroir des Oliers, près de la grange. Il fallut également répartir les pâturages avec l’abbaye de Belleperche car les troupeaux avoisinaient difficilement, et tenir tête à Jourdain de l’Isle qui revendiquait Saint-Germain63.
- 64 J. Jouglar, Monographie de Grandselve..., p. 199.
52Le cartulaire 9994 indiquant souvent de manière assez précise les confronts, il a été possible de placer les unes par rapport aux autres les principales pièces de terre. La toponymie a conservé quelques noms : Nonas que la carte de Cassini nommait Monaste, Ricaumont, le quartier de Barte Canude, les Oliers (devenue L’Houlerie), le ruisseau Borsedam (devenu Bousseran), Escudès. L’église de Saint-Germain, qui se trouvait au Nord du ruisseau de Bousseran, aurait disparu à la Réforme d’après J. Jouglar64.
53Le cartulaire, plus précis que l’inventaire, fait bien la différence entre les acquisitions à titre onéreux et celles qui sont à titre gratuit : il est caractéristique que 70 % des actes soient des donations alors que 30 % seulement ont fait intervenir une contrepartie, sur plus d’une centaine de textes. Il semble que là aussi, l’abbaye n’ait pas rencontré de difficultés pour s’installer, dans un milieu somme toute peu occupé. Les vignes obtenues le sont tardivement à la fin du XIIIe siècle et la taille des parcelles, lorsqu’elle est donnée, indique de grandes surfaces : 5 sétérées, 20 et même 50. Les casals sont peu nombreux (4 sont mentionnés) et se trouvent à Nonas uniquement. Saint-Germain et Berzac étaient de très vastes honneurs, et les échanges furent rares, car ils ne devaient pas être nécessaires. Pour cette étendue importante, une centaine de pièces de terre est un chiffre peu élevé confirmant les dimensions notables des parcelles.
54Les bâtiments anciens n’existent plus et sur l’emplacement se dressent des constructions modernes, sur le flanc du coteau, au milieu des champs avec à l’arrière-plan le bois qui borde la dépression, la goutte séparant l’honneur de Nonas et celui de Saint-Germain (planche n° 5). Au-dessus de la ferme de Nonas, le versant est assez raide et le rebord du talus méridional montre un plateau particulièrement rectiligne. A gauche et en haut, on peut remarquer la ferme d’Aiguebère, où le monastère avait, au Moyen Age, sa tuilerie (Aiguebelle).
- 65 108 H 46 f° 67.
- 66 Il convient de faire la distinction, dans les textes, entre les gens de Faursdaz, ou Faordaz c’est- (...)
55La superficie de Nonas était immense, d’après les lieux cités dans les documents. Au XIIIe siècle à une date peu précise, une deuxième grange s’était constitué sur le plateau, groupant la partie occidentale des biens : elle était située à Favardac (ou Faordaz), près de l’église Saint-Germain65. Elle a totalement disparu et n’a été placée que sur son terroir. Les deux établissements étaient encore attestés dans le dénombrement de 1519, mais celle de Favardac ne se trouvait plus sur les inventaires du XVIIe siècle dont l’un cite seulement la Tour Fabardali66.
- 67 De Bernard, Comptes de Grandselve..., p. 17.
- 68 L’opération eut lieu en 1276 pour Favardac (108 H 56 f° 215-216 v°) et en 1280-1282 pour les abords (...)
56A la veille de la Révolution, les comptes de l’abbaye, étudiés par Mr. de Bernard, ne montraient qu’une superficie de 80 éminées, soit 34 ha67. Nous sommes très loin de la grange du Moyen Age. Deux séries de textes peuvent nous éclairer : au XIIIe siècle, l’abbaye morcela une partie des terres et les inféoda. Le total des terres ainsi loties forme une surface de 75 arpents pris à Favardac, et 190 arpents pris dans les appartenances de la grange de Nonas68 soit 150 ha environ. Si on y ajoute le finage de la grange et les très nombreux bois que les chartes mentionnent jusqu’à Vigueron, elles devraient avoir au moins 400 ha (300 pour Nonas et 100 pour Favardac) avec une nette prépondérance des forêts.
L’EST DE LA VALLEE DE LA GARONNE
57Quelques éléments géographiques communs se retrouvent : la présence du fleuve, avec ses méandres, ses anciens tracés, ses crues parfois dévastatrices, la plaine alluviale parfois mal drainée ce qui explique la présence des nauses, terres assez marécageuses ; la terrasse qui forme un véritable plateau tombant par un talus sur la plaine ; la grande route toulousaine vers Moissac.
La grange Lassale
- 69 Les sources essentielles sont les cartulaires n° 9994 et 11011, ainsi que les volumes 76 et 77 de l (...)
58De nombreux textes se rapportent à cette grange, la plus septentrionale dans le bloc proche de l’abbaye. Transcrits dans les cartulaires69, ils donnent un aperçu grâce à leur nombre assez élevé, près de 350, de la région proche de Montech, et du Tarn.
59Le site offre l’alliance de plusieurs types de paysages. La Garonne, dans cette partie de son cours, coule dans une basse plaine souvent composée de cailloux, facilement inondable. Son cours a même plusieurs fois changé. Les îles sont des terres bordant le cours du fleuve, parfois recouvertes par les crues. Souvent marécageuses, on les dénomme aussi nauses : celles de Vernet, Gravèle, Pradèle bordent la Garonne avec les îles de Bourret puis de Montfort (cartes n° 7 et 8). La nause de la Gourgue de Combes borde le ruisseau de la Saudrune qui s’appelle plus au Nord le Pantagnac ; celles de Peironel, du Pont Royal, de Lassale, de Froide Fabrique, longent un affluent de la Saudrune qu’au Moyen Age on appelait aussi la Saudrune, et les cartes de l’I.G.N. la Garouille ; enfin celles de Saint-Laurent et de Cantioca s’étendent au pied de la grande terrasse. Entre celle-ci et le lit de la rivière, une terrasse basse surplombe de quelques mètres les cailloux et les ramiers.
- 70 9994 f° 27.
- 71 9994 f° 30.
- 72 9994 f° 2.
- 73 9994 f° 36.
- 74 9994 f° 21.
- 75 9994 f° 65.
- 76 9994 f° 63.
- 77 9994 f° 65.
- 78 9994 f° 47.
60Sur les nauses, les prés constituent la formation végétale la plus adaptée. Par ailleurs, la couverture forestière était importante : le vaste bois de Saint-Laurent devait former la frange occidentale de la forêt d’Agre. D’autres bois sont cités, tout proches de la grange : ceux de Boutanelle70, Claira71, Graveira72, Montcaprel73, Terrefort74 ; et plus au Nord Rocafortenc75, Montfort76, Lacourt77 et Galganta (l’actuelle forêt de Fromissard)78.
- 79 Doat 76 f° 4 : le 13 janvier 1129, Guilhem Sichier et son frère Gérald donnent la terre de la Rocha (...)
- 80 9994 f° 1, le 20 janvier d’une date inconnue qui pourrait être 1131 ou 1132, car d’autres textes, à (...)
61Cependant la région était déjà profondément humanisée : au-delà de l’occupation du sol, on en trouve trace dans un réseau assez dense de voies de communications. Les premières donations connues sont les plus anciennes qu’a reçues l’abbaye en dehors de sa fondation propre. En 1128, une première terre lui appartient à Combes79, mais le noyau essentiel de la grange est une couture donnée par le comte Alphonse Jourdain de Toulouse80 proche de l’église Sainte-Marie, ce qui explique le nom de grange Lassale (la cella) ; la donation fut complétée par une couture contiguë offerte par le fils du comte, Raymond V, quelques décennies plus tard. Plusieurs personnes se désistent de leurs droits sur ces terres et donnent, ou vendent, les parcelles voisines.
62L’existence de la grange est confirmée par la bulle du pape Innocent II en 1142. Le développement se fait ensuite dans deux directions : vers l’Ouest et la Garonne, par la terre de la Pradèle, de la Gravèle et vers le Sud jusqu’aux vignes de Panpourri à côté de Saint-Cry. Au cours des années 1155-1160, ce sont les îles bordant la Garonne (Bourret, Montfort, Port de Saisses, actuel Port Bas) qui sont intégrées à la grange.
63A partir de cette période, l’abbaye bouche les trous, complète son implantation en éliminant les enclaves et en arrondissant ses possessions. Elle s’étend plus au Nord (l’honneur de Saint-Pierre et Saint-Géraud), mais surtout vers l’Est, à travers la terre de Lalande, le Terrefort et Saint-Laurent. La possession ou l’usage des bois voisins comme celui de Claira, ou lointains comme celui de Galganta la préoccupent, de même que la perception des dîmes.
64A son tour, le pape Alexandre III confirme à l’abbaye la possession de la grange Lassale en 1162. Vers les années 1170-1180, elle étend également ses propriétés au bord de la Garonne (Vernet, Vilars, Rocafortenc), à l’Est vers Volve, Saint-Laurent et le bois de Boutanelle, au Sud jusqu’à Finhan ; mais aussi, beaucoup plus à l’Est, en bordure du Tarn, avec la barte de Saint-Lizier et le bois de Florac. Jusqu’en 1195, elle continue à resserrer la trame de ses biens, obtenant des petites parcelles vers Combes et Saint-Cry, des terres plus importantes dans la paroisse de Saint-Laurent (Combelas et les Albarèdes), vers Finhan (Montcassin, le Champ Saint Martin), Lilu et Boutanelle. Quelques textes peu nombreux montrent l’installation près de Villefranche en 1230, l’extension au bois de Florac en 1260 et à Brial en 1281.
- 81 L. d’Alauzier, « L’église Saint Quiriace », Bulletin de la société des études littéraires, scientif (...)
- 82 9994 f° 100 v° : le 23 mars 1183, Gausbert abbé de Marcillac procède à un échange avec Grandselve : (...)
65La localisation des noms de lieux n’a pas offert de trop grandes difficultés. L’étude approfondie des confronts a permis de reconstituer ce qui était un puzzle. Certains lieux, simplement dénommés n’ont pu être situés : le casal de Boscaza, celui de Brassolenc, de Zocamartel, de Campdozolen, de Comdal et le maillol de Laginad. Quelques toponymes se sont maintenus : la Grange Lassale, Vernet, Espinassie, Montfort, Moncassin, Pech de Vila, Combes. Le cas de Saint-Cry est intéressant. Plusieurs textes mentionnent Sanctus Quiricius et la communauté des moines dépendant de l’abbaye de Marcillac, avec sa maison, ses terres et ses vignes. L. d’Alauzier, s’appuyant sur les localisations proposées par F. Moulenq, a situé cette église à Saint-Cirice près d’Auvillar81. En fait, l’étude des confronts et la topographie permettent de la situer à Saint-Cry, connu sous le vocable Saint-Quéry sur la carte de Cassini82.
- 83 9994 f° 47, 94 v°, 100.
- 84 11011 f° 175, le 15 novembre 1181, Sasneus la met en gage à l’abbaye pour 10 sous toulzas.
66Quelques localisations sont un peu surprenantes. Les hommes de Montfolcaud avaient une terre qui se trouvait non sur le terroir d’origine à 7 km environ au Sud-Est sur le rebord de la terrasse, mais au nord-est de Saint-Cry ; rapidement, la terre est simplement nommée Montfolcaud83. Enfin, la terre de Saulo ne se trouve pas à l’ouest de la Grange Lassale comme l’indique un toponyme actuel, mais à l’Est entre les nauses de Peironel et de Saint-Laurent84.
- 85 Arch. munie. Montech, liste des possessions des Bernadins de Grandselve à Montech, établie en 1806.
67La comparaison a pu être faite avec l’inventaire des biens de Grandselve à Montech85. Dans la partie que l’abbaye avait conservée, c’est-à-dire à l’ouest de la grande route, même quand les noms de lieux se sont modifiés, l’implantation n’a pas changé dans ses principaux aspects : par exemple, le grand domaine de l’Aullerie se trouvant au lieu-dit La Gravette où transparaît l’ancienne Gravèle.
68Plusieurs caractères se dégagent dans la constitution de la grange. 190 pièces de terre ou parts d’une terre sont mentionnées, mais à côté de cela on trouve 23 mentions de vignes, 8 de prés et 5 d’artigues. Ces éléments indiquent que, dès le milieu du XIIe siècle, la mise en valeur du terroir a été faite par les populations locales, que ce soit par la plantation d’un vignoble déjà productif (il n’y a qu’un seul maillol cité), l’utilisation des nauses sous forme de prés ou un effort de défrichement de terres plus difficiles à exploiter.
- 86 9994 f° 77, le 16 novembre 1181, Indie fille d’Arnaud Gausbert donne 13 sétérées de terre à la mesu (...)
69La taille des parcelles n’est pas grande en général. Les vignes sont de l’ordre d’une dénariée, rarement plus. Pour les terres plus ordinaires, on n’indique pas la taille, sauf sans doute, dans des cas assez exceptionnels où les parcelles atteignent une taille respectable : 16 et même 21 sétérées. Une mention a cependant dégagé un autre aspect : 13 sétérées sont prises sur le 1/16e de l’honneur de Saint-Laurent86, ce qui porte le tout à plus de 210 sétérées. Mais morcellement ne signifie pas nécessairement petite propriété et nous avons vu le cas de Bernard de Combes qui céda de nombreuses parcelles, très éparpillées à l’abbaye. Les actes à titre onéreux sont aussi nombreux, sinon plus que les actes à titre gratuit, ce qui montre bien que l’abbaye n’était pas nécessaire à la mise en valeur de la région, et a dû se faire une place parmi d’autres déjà occupées.
- 87 De Bernard, Comptes de Grandselve..., p. 18.
- 88 Doat 78 f° 286, par lettres de janvier 1275, le roi de France Philippe reconnaît à Grandselve la jo (...)
70Peut-on connaître la superficie de la grange ? Pas avec certitude puisque les dimensions des terres ne sont pas connues. Il faut pour cela se reporter à un document postérieur qui permet d’effectuer des approximations87. A la veille de la Révolution, les biens de la grange ne comportaient plus que la partie occidentale entre la route vers Toulouse, la direction Mesnil-Moncassin et celle de Montech-Garonne, à quoi s’ajoutait le domaine de Montfort. L’ensemble des parcelles était estimé à 884 éminées soit 380 ha environ. Or, de grandes parties de la grange avaient été aliénées : l’abbaye avait donné le bois de Boutanelle au roi88 et ne possédait plus l’honneur de Saint-Laurent, celui de Saint-Pierre et Saint-Géraud, les bois de Rocafortenc et de Florac, la barte de Saint-Lizier, et biens d’autres domaines moins importants. Le bois de Boutanelle devait dépasser les 150 ha, l’honneur de Saint-Laurent les 120. Ce sont 370 à 380 ha au bas mot que Grandselve ne possédait plus. Il faudrait donc évaluer approximativement la superficie de la grange à 750 ha au minimum et peut- être à 1 000, ce qui est un chiffre important.
- 89 J. Jouglar, Monographie de Grandselve..., p. 204.
- 90 1 G 394, inventaire des recettes du cardinal de la Valette, abbé commendataire de Grandselve, ainsi (...)
71L’étude d’autres granges montre que le terroir des granges primitives a parfois éclaté en plusieurs granges. J. Jouglar dans le tableau qu’il donne des possessions de l’abbaye cite 7 granges : Lassale, Montfort, Saulon, Pech de Vila, Saint-Quéry et les deux Barthes89. En fait, il reprend la liste des métairies à moitié fruit que l’on trouve dans les comptes de l’abbaye à la fin du XVIIIe siècle. Or nous ne savons pas quand les métairies furent établies. Par contre, un document de 1621 cite parmi les granges de Grandselve, celle de Lassale, et pas d’autre dans cette région90. La grange n’a donc pas été morcelée au cours du Moyen Age.
- 91 G. Leblanc, « La Grange Lassale : étude historique et archéologique d’une "grange" cistercienne », (...)
- 92 108 H 37, document d’environ 40 cm x 50 avec dessins à l’encre, couleurs et écriture.
72Lassale avait une autre particularité : elle avait conservé l’un de ses bâtiments qui était très visible, tout proche du ressaut surplombant la plaine de la Garonne. G. Leblanc avait pu l’étudier archéologiquement et publier photographies et plans91. Beau bâtiment à pièce unique et deux étages, de dimensions respectables, il présentait le type assez curieux de la grange fortifiée, construite en briques, mais très cistercienne par son absence de décoration (planche n° 6). Ce remarquable témoignage contemporain de l’abbaye médiévale a été détruit de fond en comble vers 1975-1978. Il faut donc avoir recours à un document d’archives : un plan, ou plutôt dessin de la fin du XVe siècle figurant la zone Bourret-Grange Lassale pour se faire une idée d’une partie des bâtiments92. Il est tronqué et coupe l’image schématique de l’édifice principal de la grange. On distingue très bien tout contre la grande bâtisse une maison nettement plus petite.
- 93 Mireille Mousnier, « A propos d’un plan figuré de 1521 : paysages agraires et passages sur la Garon (...)
- 94 M. David Roy, « Les granges monastiques en France aux XIIe et XIIIe siècles », Archeologia, 1973, n (...)
73De l’autre côté de la route, vers le Nord-Ouest, correspondant à l’actuelle Borde Rouge, se dresse une construction sans étage, dont les colombages sont apparents, et possédant deux grandes portes sur le petit côté. Une inscription mentionne qu’il s’agit de la grange bladière du monastère de Grandselve93. Faut-il en déduire que les grains y étaient également resserrés, comme dans le bâtiment principal ? La grange en tant qu’unité économique devait comprendre plusieurs parties plus ou moins dispersées, cour, aire, etc.94 qui assuraient le déroulement des activités d’une très grosse exploitation.
74Lassale est assez exceptionnelle par son importance territoriale, ce qui explique le nombre élevé de textes qui s’y rattache. Acquise dans un milieu déjà fortement humanisé, elle fut le résultat d’une longue patience déployée par les abbés et ses paysages variés lui assuraient de multiples possibilités économiques.
La grange de Villelongue
75Quelques kilomètres au Sud, près du village de Canals, se dressait la grange de Villelongue. La Garonne est à plus de deux kilomètres à l’Ouest, et Villelongue se trouvait au pied du talus de la grande terrasse garonnaise. Le village était sans doute ancien.
- 95 9994 f° 3 v°, le 2 janvier 1153, Richard de Combes donne l’honneur engagé pour 10 sous morlans, à V (...)
76Très peu de documents sont relatifs à cette grange : le cartulaire dit « de Villelongue » groupe essentiellement les textes de Lassale. Sa constitution n’est pas connue avec certitude : il semble qu’il y a à l’origine une terre engagée que son propriétaire n’a pu libérer et que l’abbaye a conservée95.
- 96 108 H 56 f° 2 v°. Cet acte existe sur un parchemin à la côte 108 H 1, mais il est coupé : un certai (...)
- 97 9994 f° 6 v°, en 1162 ; 108 H 56 f° 283 en 1215 ; 9994 f° 32, 40, 71 en 1167, 1172 et 1180.
- 98 9994 f° 48, de la part de Seguin de Saint-Cricq, sa femme Sasneus et ses enfants Seguin et Martine.
77L’existence de Villelongue est confirmée, avec d’autres possessions de l’abbaye par le pape Alexandre III en 116296. Quelques donations viennent compléter le terroir : des terres près de la grange, un casal à Dieupentale, plusieurs pièces à Parraquines, et à Las Clotas, un artigue près d’un bois (sans doute au pied du talus)97. L’abbaye reçoit également des droits de pâturage près de Dieupentale et de Saint-Cricq, à côté de Canals98. Ces documents trop peu nombreux ne permettent pas d’étudier la structure ni les paysages agraires. Reporté sur une carte (carte n° 9) le domaine semble assez homogène et non éparpillé en parcelles. Sa taille n’a pas dû dépasser les 40 ha. Perruquines et Las Clotas subsistent encore dans la toponymie.
La grange de Lalande
- 99 P. Gérard, « Les origines du collège Saint Bernard de Toulouse (vers 11501335) », AM, 1957, p. 191. (...)
- 100 108 H 56 f° 23 v°, dans un dénombrement du 11 novembre 1519.
78Environ à 5 km au nord de l’église Saint-Sernin de Toulouse, entre l’Hers et la grande route romaine toulousaine, la vallée de la Garonne offre l’aspect d’une large plaine alluviale où les eaux sont assez mal drainées. Grandselve acquit là un ensemble de biens, dans le terroir dénommé Lalande. Neuf pièces de terres et un bois servirent à constituer un domaine, entre le mois de janvier 1164 et le mois d’octobre 120099. La propriété portait le nom de Grange de Lalande100 et fut rattachée au fonds de l’Hôpital de Grandselve à Toulouse, à une date inconnue. Le site est devenu actuellement le centre d’un quartier de la banlieue nord de Toulouse appelé Grandselve.
79Dans le cas de Lalande, les documents que nous avons consultés ne sont pas non plus suffisants pour la connaître de manière plus précise.
AU CONFLUENT DE LA GARONNE, L’HERS ET LA SAVE
80A quelques dizaines de kilomètres au nord de Toulouse, le cours de la Garonne s’infléchit vers l’Ouest. Le fleuve reçoit sur sa droite l’Hers grossi du Girou, et sur sa gauche la Save. Un véritable carrefour de voies fluviales assure des communications vers le Haut-Languedoc, l’Est toulousain, le Nébouzan et le Comminges, en sus de l’axe garonnais.
La grange de Bagnols
- 101 Doat 79 f°288.
- 102 Les cours de l’Hers et de la Garonne ayant changé depuis le Moyen Age, nous avons fait une restitut (...)
81A l’est de la Garonne, l’Hers méandre et ses nombreux bras se recoupaient. Les eaux avaient tendance à stagner sur la plaine alluviale formant par exemple la gourgue de Mazères. A 500 mètres de la rive actuelle de la Garonne, une dénivellation borde un ancien lit du fleuve qui changea souvent de cours ; la partie basse s’appelait la Garonne morte au Moyen Age. Une route franchissait l’Hers par le pont de Cardonières101, joignant Castelnau-d’Estrétefonds à Saint-Jory, c’est-à-dire Moissac à Toulouse. A 3 kilomètres de là, la terrasse surplombe la région, au Nord-Est. Les éléments topographiques et toponymiques ont été mis en place sur la carte n° 9102.
- 103 Doat 79 f° 288.
- 104 9994 f° 104 v°.
82La partie inférieure du cours de l’Hers était bordée de forêts : la forêt de Corbeyra (Corbières)103, de part et d’autre de l’Hers, et surtout les garrigues de Bagnols104. Le terme de garrigue indique une forêt de chênes, en langue du pays. Le domaine fut constitué très tôt dans l’histoire de l’abbaye. Une dizaine de donations, avant 1139 (fin de l’épiscopat d’Amiel qui est cité comme repère chronologique par les textes), concerne tout d’abord la condamine de Mazères, puis les garrigues de Bagnols.
83L’existence de la grange est attestée en 1142 par la bulle d’Innocent II. Peu d’acquisitions jusque vers 1160 où brusquement la grange complète son implantation en quelques années : les terres de Bagnols, plus à l’Ouest l’île de Peyros, et enfin un début d’installation au clos de vigne de Recussols près de Castelnau-d’Estrétefonds. Un arrêt dure jusqu’en 1178, puis une recrudescence pendant 10 ans. Bagnols s’étend vers l’Est (sur l’alleu de Saint-Sernin), sur l’honneur de Petra, mais surtout obtient des vignes à Recussols, à Grisolles, et des droits de pâturage vers l’Est (depuis Villemur jusqu’à Castelmaurou et Saint-Geniès). Quelques textes isolés dont un qui la dote de l’honneur de Bonfol nous conduisent à 1199, date à partir de laquelle la grange semble totalement constituée.
84La toponymie actuelle ne présente guère de trace des lieux du Moyen Age à part le château de Bagnols. Les parties solidaires peuvent être mises en place, mais les biens isolés comme l’honneur près du bois de Remeienc ne sont pas localisés. Grandselve rassembla les terres de la grange essentiellement grâce à des dons. Sur environ 80 textes qui constituent le cartulaire de Bagnols, à l’intérieur du groupe Vieilaigue-Bagnols, il y a 72 % de donations pour 28 % de donations avec charité et de ventes.
- 105 9994 f° 104 v°.
85Les confronts montrent en effet une faible occupation du sol et, le plus souvent, ils ne sont même pas précisés. La dimension des parcelles n’est pas indiquée, sauf dans un cas où il s’agit du labourage de 2 paires de bœufs, soit environ 20 ha105. Il semble donc que les propriétaires des lieux n’aient pas hésité à abandonner des terres pour lors peu productives étant donné la couverture forestière. Il ne fut pas non plus nécessaire de procéder à des échanges de terres pour les regrouper.
86Environ 60 terres furent acquises : leur superficie était sans doute assez importante, sauf quelques éminées pour bâtir un moulin, et quelques petites pièces dans le vignoble de Castelnau-d’Estrétefonds. Certaines des terres avaient déjà une vocation agricole, ce sont les vignes déjà citées, mais aussi des prés particulièrement adaptés aux terres de la Garonne morte et de l’île Peyros. Pour tout le reste, nous ne savons ce qui était forêt et ce qui était cultivé.
- 106 J. Jouglar, Monographie de Grandselve..., p. 201.
- 107 108 H 38, une partie du terroir de la grange put être distrait pour constituer la métairie, près de (...)
- 108 108 H 53, sur le plan, elle est appelée « grange de Lagarrosse de Grandselve », et un lieu dit Garr (...)
- 109 108 H 56, f° 23 v°, dénombrement de 1519 ; 1 G 394, dénombrement de 1621.
87J. Jouglar, se fondant sur un dénombrement de 1687, estimait sa surface à 1 600 arpents soit 900 ha environ106, chiffre très probable. Bagnols était donc une grange de belle taille. A-t-elle été fractionnée ? Un titre du XVIe siècle mentionne la métairie de Rouanel107, et surtout un plan du XVIIIe siècle indique la grange de Lagarosse108. Pourtant, les dénombrements de 1519 et 1621 ne signalent que la grange de Bagnols109.
88Le site même n’est pas connu car une inondation de la Garonne le détruisit au XIXe siècle : celui que nous avons indiqué sur la carte reste approximatif.
89Il ne faut pas concevoir la grange comme une entité isolée car de l’autre côté de la Garonne, Grandselve possédait de vastes biens et des liens étroits devaient relier les deux rives. L’abbaye avait d’ailleurs réuni les textes concernant Bagnols et Vieilaigue dans un seul cartulaire.
Les granges de Vieilaigue
90A l’Ouest de la Garonne, la vallée est plus étroite qu’à l’Est ; le fleuve, à plusieurs reprises, a coulé au pied du talus au bord duquel est située l’actuelle ville de Grenade, et l’on peut distinguer encore le cours d’un ancien méandre au nord-ouest du confluent de la Save. Le fond de la vallée a 5 kilomètres de large environ. Il est bordé par une terrasse, mais très différente de celle de la rive droite : la dénivellation est beaucoup plus faible et le paysage est constitué de collines et non d’un plateau, entaillées par les nombreuses rivières ou ruisseaux qui s’écoulent, la Save, le Marguestaud et le Merdanz.
- 110 9994 f° 134 v°.
- 111 9994 f° 135 v°.
- 112 9994 f° 152 v°.
91La couverture forestière était importante surtout à proximité de la Garonne : le bois le plus vaste était celui de Sètes110 ; celui de Tirapel couvrit une partie de l’honneur de Maurenville jusqu’à la Save111 ; le bois de Ribald112 et une partie de l’honneur de Lerm en étaient les derniers éléments. Si la région avait été anciennement humanisée, la partie au nord de la Save demeurait une zone sauvage, et ceci malgré la route romaine qui arrivait au Nord-Ouest et quelques chemins qui reliaient les collines au confluent des deux rivières, passage obligé par bateliers vers Toulouse. Les terres cultivées se cantonnaient au Sud de la rivière et vers son embouchure.
92La constitution de Vieilaigue peut être étudiée avec le cartulaire 9994, la collection Doat n’apportant presque aucune information supplémentaire. L’origine même de la grange est peu connue : nous n’avons pas de document antérieur à 1151, et elle n’est pas indiquée dans la bulle d’innocent II en 1142. Il y a pourtant quelques références à des donations antérieures mais imprécises.
93L’afflux des titres commence en 1160 et un nombre important de témoignages écrits se situent entre 1160 et 1165. La bulle d’Alexandre III en 1162 en confirme la réalité. Les terres obtenues sont rassemblées autour de l’église de Saint-Sulpice dont la grange était voisine (terres de Ulmo, Toalha, Furno, Bozoville, Ferranel plus au Nord, la Voulte plus à l’Ouest et la couture vicomtale de Merville au Sud) (carte n° 10) ; peu d’extension dans la partie même de Vieilaigue (terres d’Escoboler, Mortared et Toronno).
94A partir de 1170 les acquisitions reprennent pendant 5 ans et Vieilaigue s’étend largement dans l’espace : au Nord, vers les alleux de Lerm, Noguer Anar et Maneigvile, les bois de Sètes ; à l’Ouest, vers Maurenville, Fauz, Governad, le bois de Tirapel.
95Nouveau ralentissement jusqu’en 1179 date à laquelle elle s’agrandit des terres de Gauzinhac, de l’île de Brumagas et du bois de Ribald, dans sa périphérie septentrionale. Par des droits de pâturage, elle gagne vers le Nord, dans la plaine entre le Marguestaud et la Save. De 1184 à 1193, il n’y a plus que quelques textes épars. Ensuite rien ne dépasse ce terme. La courbe des acquêts est donc très nettement en dents-de-scie.
- 113 Doat 76 f° 388, le 13 août 1168, par l’arbitrage de Hugues, abbé de Saint Sernin. En particulier, l (...)
- 114 Doat 78 f° 287, le 5 janvier 1239, une commission d’arbitrage mène une enquête : les seigneurs cont (...)
- 115 Doat 79 f° 222, le 11 mai 1270.
- 116 Doat 79 f° 308, une sentence arbitrale du 8 août 1278 détermine propriétés et droits de pâturage.
- 117 Doat 78 f° 336, le mardi après l’Ascension, soit le 30 mai 1281.
- 118 Le texte nous est connu par une copie du XVIIIe siècle à l’intérieur de la liasse 108 H 53, exhibée (...)
96Par contre, des voisins puissants ont rendu nécessaire la délimitation plus précise des possessions. Tout se passe bien avec l’abbaye prémontrée de La Capelle, fille de Combelongue, installée en 1143 en un lieu au sud de la grange, en bordure de fleuve. Un accord se fit en 1168 pour préciser les appartenances des terres vers Vieilaigue et Mairas113. Mais il en fut autrement avec des seigneurs du voisinage. Le vicomte Raymond de Dieupentale et les seigneurs de Margastaud contestèrent à Grandselve la propriété des honneurs de Maneigvile et de Margastaud114. Le compromis n’intervint qu’en 1270 et les limites furent fixées115. Les mêmes difficultés ont surgi avec le seigneur Jourdain de l’Isle, à propos de nombreux biens, dont le bois de Tirapel et la seigneurie de Merville116. Le cas le plus épineux fut celui qui fut provoqué par le roi : en effet, Grandselve avait donné à Alphonse de Poitiers, fils du roi de France et comte de Toulouse, la jouissance d’une partie du bois de Sètes, et celui-ci en fit donation en 1275 à l’abbaye pour après sa mort117. Il semble que le roi Philippe III conserva les biens dans l’héritage et une transaction fut nécessaire pour que Grandselve fasse reconnaître ses droits en janvier 1279118. Le roi resta d’ailleurs le partenaire essentiel de l’abbaye en ce qui concerne les terres de cette partie du domaine.
- 119 F. Moulenq, Documents historiques..., t. IV, p. 403.
97La localisation des terres citées a été assez difficile car très souvent les confronts ne sont pas indiqués. Le donateur abandonne ce qu’il a à tel ou tel endroit. Quelques lieux ont été conservés par la toponymie : Sètes (Cètes), Ribald (Rabaut), Bélesta, la Voulte (Beauté). Quelques indications restent problématiques : Ferranel pourrait être l’actuel Ferran près de Bélesta, mais Grandselve l’eut dans les premiers temps de la grange et cette terre serait alors trop au Nord ; le fief de Gauzinhac pourrait être l’actuel quartier de Gauzignac au sud-ouest d’Aucamville, mais F. Moulenq rappelle que la terre faisait partie du dîmaire de Saint-Martin de Castelnau-d’Estrétefonds119 ; il faudrait supposer que ce dîmaire s’étendait largement à l’ouest de la Garonne, ce qui n’est pas d’ailleurs impossible puisque l’abbaye de Saint-Semin en était le percepteur. L’alleu de Noguer Anar se trouvait sans doute là où se trouvent aujourd’hui les propriétés de Noderi et de Nolet. Mais les terres d’Ulmo, d’Escoboler ne sont pas connues.
98L’acquisition des terres et des droits pesant dessus se fit plutôt à titre onéreux qu’à titre gratuit. Sur environ 140 actes, il y a 48 % de donations. Les ventes sont très rares mais les donations « par charité » représentent les 52 % restants. Dans la partie étudiée, l’occupation du sol était suffisante pour qu’elle nécessitât un désintéressement par l’abbaye des éventuels propriétaires.
- 120 9994 f° 109 v°, le 21 février 1163, Bertrand de Toalha donnait 8 pièces de terre relativement conce (...)
- 121 Doat 76 f° 189 v° : à la Voulte, le 16 novembre 1181.
- 122 9994 f° 158, un jeudi de septembre 1178, l’abbé de Saint-Sernin Pons autorise Grandselve à acquérir (...)
- 123 9994 f° 131.
- 124 9994 f° 156 v°.
- 125 9994 f° 177.
- 126 9994 f° 119.
- 127 9994 f° 152 v°.
- 128 9994 f° 154 v°.
99Le parcellaire indique des disparités : près de Vieilaigue dominent des petites parcelles et elles concentrent l’essentiel des 120 pièces de terre obtenues par l’abbaye. Un même donateur peut céder en une seule fois 8 pièces de terre120. Les quelques rares mentions portent 6 sétérées121 et 10 arpents122. De nombreux casals coexistent avec quelques coutures (à Merville, Toronno, Maneigvile). Ces chiffres ont dû être répandus pour la partie au nord de la Save, moins occupée. A part les bois déjà cités, quelques terres acquises par l’abbaye ont déjà une vocation agricole affirmée : les vignes de la Voulte123, de Toalha124 et surtout de Gauzihnac125, et les prés peu nombreux sur les parties plus basses et humides, à Vieilaigue126, Maneigvile127 et Toalha128. Il y a peu d’actes d’échanges ; par contre nombreux sont les intéressés d’un bien donné.
100La dimension de la grange est difficile à connaître car elle a varié, à la suite des controverses ; de plus son territoire s’est morcelé en plusieurs granges et a cependant permis l’implantation d’une bastide.
- 129 Le texte qui se trouve dans Doat 80 f° 51 a été publié par R. Rumeau, Monographie de la ville de Gr (...)
- 130 Articles 21 et 29 du paréage : 100 cartonnades pour Vieilaigue avec toute la terre, des bâtiments d (...)
- 131 108 H 60, registre des baux de ferme et de culture (1675-1705).
101Les autres granges sont attestées lors de l’acte de paréage fondant la ville de Grenade129. A l’Ouest, les terres de la Voulte formaient une unité ; au Nord-Ouest, celles de Bélesta une autre (mais il se pourrait, étant donné la continuité de l’implantation de l’abbaye, que Bélesta ait été formée avec des terres de la grange de Larra). Le territoire de la bastide fut pris sur celui de la grange de Vieilaigue. Le paréage prévoyait que les granges conserveraient une certaine étendue, d’environ 190 ha chacune130. En 1685, la grange de Bélesta était estimée à 2 paires de bœufs de labourage, ainsi que celle de la Voute-Baute, soit à 20 ha chacune131 : les chiffres étaient déjà nettement inférieurs à ceux du XIIIe siècle. Or l’abbaye avait donné une bonne partie du territoire de Vieilaigue pour élever la bastide. Le total des places de maisons, jardins, terres indiquées devait dépasser les 2 200 ha. La grange de Vieilaigue, avant son morcellement, devait couvrir une superficie d’environ 2 800 ha, ce qui est le propre du très grand domaine.
- 132 R. Rumeau, Notes et documents pour servir à l’histoire de Grenade (Haute-Garonne), Toulouse, 1886, (...)
- 133 108 H 56 f° 23 v°.
102Elle avait été installée au sud-est de l’actuel lieu-dit Berti. Le site ressemblait beaucoup à celui de Lassale, c’est-à-dire en bordure du talus qui surplombe les ramiers de la Garonne. Un incendie détruisit la grange en 1291132. Elle fut reconstruite puisque Bertrand de Got y séjourna en 1305. La grange de Vieilaigue existait encore lors du dénombrement de 1519133, mais n’est plus citée dans les listes postérieures alors que la Voulte et Bélesta y figurent : Grenade toute proche avait fini par l’absorber.
- 134 J.P. Claverie, Notes historiques et renseignements divers sur la ville de Grenade (Haute-Garonne) e (...)
103Au XIXe siècle, on ne voyait plus au lieu-dit Las Campanetos de Saint-Sulpice que quelques mètres de murailles en béton et une croix134. Ceux-ci, de nos jours, ont même disparu sous les champs de maïs.
104Le cartulaire de Vieilaigue cite des terres de la grange de Larra, de même que celui de Larra cite quelques textes de la première. Cela n’est pas pour nous étonner car les deux granges étaient voisines et leurs terres mitoyennes. Grandselve contrôlait ainsi, au confluent de la Save et de la Garonne, une très vaste zone aux terroirs variés.
Les granges de Larra
- 135 11008 f° 132 v°.
- 136 11008 f° 133 v°.
- 137 11008 f° 167.
- 138 11008 f° 133 v°.
- 139 11008 f° 197 v°.
105A cinq ou six kilomètres de Grenade, la vallée de la Save offre l’aspect dissymétrique caractéristique de celles de Gascogne : le versant droit est abrupt, tandis que le versant gauche, bien exposé au soleil, monte en pente plus douce. La rivière serpente dans un fond très horizontal ; on peut même distinguer, entre les lieux-dits la Grange et Duffauts, les restes d’un ancien méandre dans la courbure nettement marquée au creux du talus. La zone est inondable par fortes pluies. Les coteaux sont assez profondément érodés par de nombreux petits ruisseaux. La forêt couvrait le sommet relativement plan des coteaux. Quelques bois sont cités : ceux de Foissa135, de Lespinassar136, de Peirola137, de Gaugi138 et surtout la vaste forêt de Bouconne139.
106Mais les principaux honneurs mentionnés comportaient des terres cultivées ainsi que des bois : Boisville, Larra, Espagnac, Margastaud, Gojac. L’occupation des sols était sans doute réduite, bien que d’origine ancienne et s’apparentait plus à des clairières.
107Les premiers textes du cartulaire 11008 datent de 1160. Peut-être y eut-il quelques acquisitions antérieures, mais elles n’ont dû être que peu nombreuses. Le centre du domaine fut l’honneur de Larra, mais les biens s’étendirent très vite jusqu’à Boisville, Lobaville, Espagnac, Foissa, Gojac (carte n° 11).
- 140 J. Jouglar, Monographie de Grandselve..., p. 202.
- 141 11008 f° 130, le 30 décembre 1162, Guilhem Adémar donne les pâturages et usages de son honneur près (...)
108La grange existait-elle en 1162 ? Le texte de la bulle d’Alexandre III ne mentionne pas la grange de Larra. Sur la liste est indiquée une certaine grange de Saint-Jean que, par ailleurs nous n’avons pas identifiée : peut-être est-ce celle de Saint-Jean de Lescout ainsi que le pense J. Jouglar140 ; mais les documents la concernant ne commencent qu’en 1181 (ce qui ne prouve pas qu’elle n’existait pas auparavant). Peut-être est-ce celle de Larra, qui aurait eu tout d’abord le nom de l’église Saint-Jean de Gojac, mais cela est peu probable. Il est sûr par contre que la grange était bâtie en 1162 puisqu’un acte la mentionne à cette date141.
109A partir de 1164, elle s’étend sur la rive droite de la Save, sur la « montagne » de Bracoac, et les pâturages atteignent Lévignac et Aussonne. A plusieurs kilomètres au Sud, un honneur borné par le ruisseau Torrompol (l’actuelle Tourrompe), la Save et le château de Marnac est acquis et confirmé à plusieurs reprises. Les possessions sont complétées à Larra, Foissa, Gaugi, et Tirapel.
110Vers 1178 elle obtient le vaste honneur de Margastaud, s’installe près de Saint-Cézert, dans les pâturages d’Espagnac, dans ceux de Thil et de Montaigut et surtout de la forêt de Bouconne.
111L’expansion territoriale se termine vers 1189 avec les terres de Caniavad, Daux, Mairas et des pâturages à Pibrac, Saint-Jean et Golgadier. Moins de 30 ans avaient suffi pour couvrir une aire très vaste. Elle avait atteint rapidement les points extrêmes de son étendue puis passé les années à consolider les acquisitions.
112De l’étude des textes, nous pouvons trouver confirmation de la faible occupation des terres : les donations (60 % environ) sont plus nombreuses que les donations par charité et, de plus, les sommes versées sont peu élevées, de l’ordre de quelques sous. Les échanges de terres sont très rares. Les casals sont peu nombreux (ceux de Boisville, Estrader et Rocas) ; les honneurs dominent, et les honneurs de La Graulet et de Mairas étaient de grande taille.
113Lorsque la surface des parcelles est connue, les dimensions sont très importantes : deux labourages de bœufs, six labourages (60 ha à Boisville ?), 50 concades à Espagnac, 20 et 15 sétérées, 12 concades. Souvent les documents stipulent que l’abbaye prendra là où elle voudra, dans l’honneur. Les vignes, par contre, sont toujours de petite superficie (deux dénariées) et d’ailleurs il y en a peu qui soient acquises : deux à Gojac et une à Boisville.
114La courbe des acquisitions nous oblige à nous demander si nous avons bien tous les textes concernant la grange : ils sont nombreux jusque vers 1170. Un creux est nettement accusé entre 1175 et 1179 puis les acquisitions augmentent régulièrement, vers un véritable sommet jusqu’en 1189. Par la suite il n’y a plus du tout de documents et l’on a du mal à imaginer une rupture aussi nette, sans un seul texte après ce terme. La collection Doat d’autre part ne mentionne pas non plus d’acquisitions postérieures. Voilà qui reste mystérieux !
115La localisation des terres a souffert du manque de précision des confronts qui, de plus, signalent plutôt les cours d’eau que les chemins (connus pourtant par le cartulaire de Bagnols et de Vieilaigue). Certains lieux cités sont aujourd’hui de petites villes (Saint-Cézert, Montaigut, Saint-Paul, Thil, Pibrac, Lévignac, Aussonne, Daux). Quelques rares noms ont subsisté : Larra, Saint-Séverin, Caniavad (l’actuel Canibas), Rocas (sans doute Roquefort) près du gué du même nom, la Bouconne. La carte de Cassini nous fournit des indications complémentaires : Mairas, la Moleira (sans doute As Mouleres).
- 142 Doat 79 f° 308, au cours de l’année 1278.
116Par contre les casals de Cabrairol à Boisville et celui d’Estrader à Gojac ne peuvent être situés. Quelques hypothèses sont à signaler : les pâturages de l’honneur de Saint-Jean devaient être au nord-ouest de Merville (où existe un château Saint-Jean) et ceux de Golgadier étaient peut-être à Cornague (Gournague sur la carte de Cassini) au sud-est de Mondonville. Ces identifications seraient possibles car par la suite, au XIIIe siècle, le sire Jourdain de l’Isle conteste des pâturages de Grandselve à Mondonville et Merville142.
- 143 J.A. Galabert, Monographie d’Aucamville..., p. 13.
117Le lieu de Boisville a été situé par J.A. Galabert comme étant le village de Notre Dame de Boiville ou Beauville, situé au bord de la Garonne, à l’embouchure du Merdanz. Mais les textes du cartulaire par leurs confronts ne permettent pas un éloignement aussi oriental de cette terre, et tout au contraire, la placent à l’ouest de Lobavilla et Gojac143.
- 144 R. Rumeau, « Larra et son église », Bulletin de la Société de Géographie de Toulouse, 1907, p. 183- (...)
118La localisation des bâtiments de la grange a été facilitée par un article de R. Rumeau à partir d’un mémoire du XVIIIe siècle : ils étaient à une centaine de pas de l’église de Saint-Séverin de Mairas144. Cette église était placée selon la carte de Cassini, presque au confluent du petit ruisseau dit Rouverol et de la Save. L’église, qui était dans un état déjà fort délabré au XVIIIe siècle, n’existe plus maintenant. Les indications sont confirmées par la toponymie actuelle : sur le lieu correspondant à la description du mémoire, s’élève maintenant une ferme appelée la Grange et qui est sans doute à l’endroit même où se trouvait la grange Larra mais les constructions actuelles sont contemporaines.
119Le site était bien choisi : à l’abri des inondations au pied d’un éperon là où la vallée se rétrécit, il donnait à la grange le contrôle de la route le long de la Save. Elle était proche du gué de Las Rocas qui assurait le passage vers la rive droite de la rivière. Sa position enfin lui offrait le contact avec les trois types de terroirs : le fond de vallée, humide, le talus ensoleillé et le sommet des coteaux formant un véritable plateau.
- 145 Doat 76 f° 388 ; de plus, la grange renonçait à s’étendre au sud de la rivière Mairas et la Capelle (...)
120Comme Vieilaigue, il fut nécessaire de s’entendre avec les propriétaires voisins : l’accord avec le monastère de La Capelle en 1168 touchait aussi les terres de Larra qui abandonna une partie du bois de Tirapel et de la montagne de Bracoac, conservant toute la partie regardant vers la Save145.
- 146 Doat 78 f° 344, le 13 juin 1254. Il promettait aussi son aide et sa garantie.
- 147 Arch. départ. Tarn-et-Garonne, A 297, Saume de l’Isle, f° 1382, le 14 juin 1254 et pour plus de sûr (...)
121Le conflit fut plus rude avec Jourdain de l’Isle : bien qu’il ait commencé par donner la totalité de ses droits sur les honneurs de la Voulte, de Gojac et de Tirapel146, il ne poursuivit pas ses libéralités. Une transaction de 1254 régla la possession de l’honneur de Daux147 entre le seigneur, l’abbaye de Grandselve et celle de la Capelle : le premier en avait la moitié, la première abbaye le quart et la seconde le dernier quart, mais les portions étaient indivises entre les trois partenaires.
- 148 Doat 79 f° 308.
122Le différend éclata à propos de la juridiction et des terres de Mondonville, Daux, Bracoac, Tirapel et Merville. Grandselve était confirmée dans l’usage de ses pâturages et la possession de Bossonville, Jourdain de l’Isle en ayant la juridiction148.
- 149 Arch. départ. Tam-et-Garonne, A 297, Saume de l’Isle, f° 812, 817, 831 et v°, 842 et v°, 844 à 845 (...)
123Le conflit avec le couvent de Lespinasse dura de nombreuses années et chaque partie fournit pour preuves le maximum de témoignages et de chartes149 : les terres étaient celles de Mondonville. Une première sentence arbitrale en 1234, fut insuffisante ; une deuxième en 1243 ne fit pas mieux, et l’affaire rebondissait en 1271.
- 150 J. Jouglar, Monographie de Grandselve..., p. 201.
124L’étendue des biens de Larra est difficile à évaluer : les parties les plus éloignées forment un demi-cercle de sept kilomètres dans l’est des possessions. Or la grange ne possédait pas toutes les terres dans ce périmètre. Avant la fondation de Grenade, son territoire avait permis la constitution de deux granges, Aurano et Larra. Les biens de Tirapel avaient complété le territoire de La Voulte. Par la suite, en 1687, la seigneurie de Grenade fut évaluée à 7 947 arpents soit 4 480 ha environ150.
- 151 R. Rumeau, Monographie de Grenade..., p. 81, article 21 et Doat 80 f° 65.
- 152 idem, articles 22 et 25
125Elle comprenait la ville de Grenade et son territoire, la grange de Vieilaigue, le domaine acquis plus tard, de Nougarolis, et la grange Larra. Puisque nous avons évalué la grange de Vieilaigue à 2 390 ha à la fin du XIIIe siècle, celle de Larra aurait eu 2 090 ha, selon le compte du XVIIe siècle. Les confronts indiqués par le paréage de Grenade permettent de préciser ses limites151 : la Save, le bois de Saint-Séverin, un ruisseau affluent de la Save et faisant séparation d’avec Montaigut ; au Nord la couture de Gojac. Ces limites ne pouvaient correspondre à l’estimation de la superficie et il faudrait y ajouter les autres terres mentionnées soit la couture de Villavert, de Bossomville, la couture de Gojac152.
- 153 idem, articles 21, 25 et 27. Un chemin la reliait à Aucamville, et elle conserva 10 canonnades de b (...)
126La grange d’Aurano nous est presque inconnue : seul le paréage de Grenade la cite, et à plusieurs reprises. Elle a disparu sans laisser de traces et la localisation faite sur la carte reste très approximative, les renseignements fournis par le paréage étant insuffisants153. Elle semble avoir été de peu d’importance et ne devait pas dépasser 18 à 20 ha.
- 154 R. Rumeau, Notes et documents..., p. 21.
127Un texte relevé par R. Rumeau dans les archives de Grenade indique une autre grange dénommée l’Argente, en 1295154. S’agit-il de la même qu’Aurano (mais on explique mal le passage de l’or à l’argent !) ? S’agit-il d’une autre ? Nous n’avons pas le moindre renseignement. Le seul toponyme s’en rapprochant est celui du lieu-dit Argentou, mais qui est si proche de la grange de Bélesta qu’il en devient improbable, ou bien ce fut justement la cause de la dissolution de la grange d’Argente en tant qu’unité économique ; et pourtant la ferme existerait toujours.
- 155 1 G 394, 1621, Inventaire des recettes du cardinal de la Valette.
128Dans ces mentions du XIIIe siècle, il n’est pas question des terres près de Marnac, ni de celles de Mondonville et d’Aussonne, ni de celles de Daux. Elles avaient pu être aliénées ou bien inféodées, ce qui est assez vraisemblable pour Aussonne. On peut alors estimer que la grange de Larra dans sa plus grande étendue a dû approcher les 2 200 ha. Lors du dénombrement de 1519 elle existait toujours (mais celle d’Aurano n’était déjà plus citée) et elle figurait encore sur la liste de 1621 mais était alors appelée grange de Saint-Saurin (à la place de Saint-Séverin)155.
129La grange de Larra était donc, comme celle de Vieilaigue, très vaste et son territoire était largement occupé par des forêts, et la mise en valeur des sols plus difficile. On quittait les terres garonnaises pour s’approcher des terres gasconnes.
LES GRANGES DE LA LOMAGNE
130Les paysages s’organisent en fonction du cours de la Gimone : la rivière a largement creusé dans un sol peu résistant et ses nombreux affluents ont adouci les versants de la vallée. Celle-ci est très ouverte dans le nord de la Lomagne et sur son fond plat et souvent marécageux se développent de très nombreux méandres. Plus au Sud, les cours d’eau rapprochés ont laissé subsister des serres ou des lambeaux de plateau.
- 156 L’inventaire 108 H 56, sur une soixantaine de textes se rapportant à la grange de Calcassac, signal (...)
131Grandselve avait là plusieurs granges mais qui nous sont peu connues car les documents les concernant sont limités et laconiques156.
La grange de Calcassac
132Dans la partie de la Lomagne où se trouve actuellement Beaumont, l’érosion a dégagé une vaste cuvette aux bords arrondis et au fond presque plat. La frange Ouest se relève de manière plus abrupte et les ruisseaux l’ont parfois profondément entaillée. Si le relief est plus difficile du point de vue de l’installation humaine, la pente est très bien exposée au Sud-Est.
- 157 108 H 56 f° 338 v°.
- 158 108 H 56 f° 399 v°.
- 159 108 H 56 f° 341.
- 160 108 H 56 f° 347.
- 161 108 H 56 f° 353 v°.
- 162 108 H 56 f° 402 v°.
133L’implantation humaine n’était pas identique des deux côtés de la vallée, au milieu du XIIe siècle. La partie basse et méridionale de l’ouest de la vallée, appelée Bedot, ou Bodot, était presque déserte et couverte de forêts157, sauf entre Gilhac et Arcumbat, où l’occupation était plus serrée. Dans la partie est de la vallée, les groupements humains formaient un véritable semis au milieu des bois, mais ceux-ci n’étaient pas continus et les territoires semblaient plus nettement délimités. Quelques nauses longeaient la rivière bordée de bois, ceux de Bacosville158, de Mausas159, de Rojols160, d’Aussecambe161 et de Varanhas162 (carte n° 12).
134Les premiers textes commencent vers 1155 à partir de deux zones voisines, Bréville et Bacosville. En moins de cinq ans, plus d’une vingtaine de documents attestent l’installation rapide de la grange de Calcassac non loin de la Gimone. Elle a des biens à Foliaca comme dans le dîmaire de Mausas. De 1160 à 1175, elle n’obtient qu’assez peu de terrains nouveaux, situés essentiellement en bordure de la rivière là où sont les moulins, et de l’autre côté, vers Antetville et Verdier. Alexandre III confirme l’existence de la grange.
135A partir de 1175 et en quinze ans, elle parachève son installation : elle gagne au Nord les terres de Bariton, Prat Vieil et Cabanac ; la Peyre, Cornenca, Cuhn, Canet et Rocas dans le terroir de Bréville, Auterive, plus à l’Ouest, mais aussi au Nord-Ouest Castelars, Cadelhan près d’Arcombat et de Gilhac. Elle possédait déjà Bodot depuis une date inconnue et y reçut encore des pâturages.
136Au XIIIe siècle, il n’y a que peu d’actes, mais ils s’étendent régulièrement sur les deux premiers tiers du siècle, et en 1293, la grange recevait encore trois terres à l’Est vers Saint-Jean-de-Cauquessac. Tout d’abord elle avait acheté le château et la seigneurie de Bodot, reçu une partie d’Arcumbat, en 1230, partagé Rocas, les terres de Saulier, Carpoet et Negaca ; quelques autres achetées en 1313 entre Bréville et Calcassac achevaient de réaliser la propriété.
137Les achats, plus fréquents au XIIIe qu’au XIIe siècle, n’étaient cependant pas les plus nombreux. Mais la documentation n’est pas suffisante pour pouvoir établir des comparaisons.
- 163 108 H 56 f° 399 v°.
- 164 Lors d’un échange avec l’abbaye de Belleperche, Grandselve donna les terres reçues à Montain et Pen (...)
138Sur environ 80 mentions de terres, il n’y a que deux casals cités et ils sont proches de la Gimone. Par contre les surfaces de parcelles indiquées sont grandes : 5 et 10 sétérées, 10 concades d’un seul tenant à Carpoet, 30 sétérées à Mausas ; et même considérable avec 200 cartonnades à Bacosville, en une seule donation163. Il devait s’agir de grands patrimoines, ce qui a cependant nécessité quelques échanges de détails164. La mise en valeur en avait été commencée : les artigues longeaient la Gimone, mais il y avait aussi des vignes et des prés, à côté des terres cultivées de Varanhas et Mausas et des prés non loin de Rojols.
- 165 108 H 56 f° 405.
- 166 108 H 56 f° 149 et 147 v° (casal de Cuhn).
- 167 F. Moulenq, Le livre juratoire de Beaumont-de-Lomagne, Montauban, 1888, p. 83-87.
139L’abbaye s’était entendu en 1250 avec le seigneur de Faudoas pour délimiter les terres de Mausas ; et avec le vicomte Bernard d’Astaffort en 1260 pour celles de Varanhas et de la Planhe165. Mais les difficultés s’élevèrent surtout avec Odon de Terride et le long compromis de 1278 offre l’inégalable information de délimiter tout le terroir de la grange au sud de la Gimone. Cette limite a été reportée sur la carte166, ainsi d’ailleurs que la limite Nord donnée par le texte du contrat de paréage pour la fondation de la bastide de Beaumont167. La surface en est d’autant plus impressionnante qu’elle forme un bloc assez massif. Peut-être y avait-il des biens étrangers enclavés, mais nous n’avons pas les moyens de le savoir. En tout cas, pour la partie nord, il ne semble pas qu’il y en ait eu.
140La toponymie a conservé une partie des noms du Moyen Age. Mausas (actuellement Mauzas), la Peyre, Varanhas (Baragnes) ; le casal d’Auterive est devenu une petite ville. Saint-Jean-de-Cauquessac existe toujours ainsi que Bréville, Prat Vieil et Rojols (Roujos). La rive gauche, moins riche en toponymie, n’a fourni qu’Arcombat (Argoumbat). Les textes dénommaient l’église de Gilhac Sainte-Radegonde, et c’est un quartier maintenant. La situation permettait de dominer la route vers le Nord-Ouest.
141La grange de Calcassac est appelée La Grange sur les cartes de l’I.G.N. (Grande Grange sur la carte de Cassini). Elle est à quelques centaines de mètres de la rivière, sans dénivellation notable ; la ferme actuelle se trouve dans un bouquet d’arbres (planche n° 7). Mais à l’arrière des bâtiments, vers l’Est, le versant est creusé par un ruisseau qui passe, tout proche au pied de la grange. Un très petit bâtiment, désaffecté et fermé, apparemment très ancien, subsiste au milieu d’arbres fort âgés à proximité des bâtiments récents (planche n° 8).
- 168 108 H 46 f° 28.
142De taille considérable, la grange aurait pu être morcelée. L’inventaire de la fin du XVe siècle signale que l’abbaye avait dans ses archives une liasse de plus de 80 donations de terres, honneurs, dîmes « des granges de Calcassac, de Bréville, de Prat Vieil, de Lespinal, de Mausas, de Barbas, de Varanis et autres honneurs »168. Le terme de grange porte à confusion puisque là, il est assimilé à honneur. Il n’est pas impossible qu’elles aient existé en tant que telles, dans l’acception cistercienne du terme, mais cette seule mention ne permet pas de l’affirmer.
Planche n° 8 : Près de la grange de Calcassac, vue vers Beaumont-de-Lomagne et le clocher de son église

- 169 De Bernard, Comptes de Grandselve..p. 20.
143Que devint la grange au cours des siècles ? Elle est citée dans le dénombrement de 1519, mais on ne la mentionne plus au XVIIe siècle. Avait-elle été aliénée ? Nous la retrouvons à la veille de la Révolution avec la métairie voisine de la Grangeonne (Granjoune) avec 150 arpents de terres, soit 85 ha environ169. Nous sommes très loin des surfaces délimitées par la sentence arbitrale avec Odon de Terride et par le paréage fondant Beaumont, à la fin du XIIIe siècle. Une évaluation de la superficie donne 5 700 ha. Même si la grange n’avait pas un territoire homogène, même si quelques terres lui échappaient, elle recouvrait une zone extrêmement vaste et c’était certainement la plus vaste grange que l’abbaye ait possédée sinon une des plus vastes qu’aucune abbaye cistercienne ait jamais eue.
Les granges de Terride
- 170 11009 f° 23 v°.
- 171 Abbé Clergeac, Cartulaire de l’abbaye de Gimont, Paris, 1905, p. 230.
144En remontant le cours de la Gimone, à une quinzaine de kilomètres au sud de Beaumont-de-Lomagne, la vallée de la rivière est assez encaissée ; l’Arratz qui coule tout près, et le Serrampion qu’elle reçoit sur la rive droite ont ainsi délimité de petits plateaux ou des crêtes, et c’est sur l’un deux que Grandselve installa la grange de Terride. Elle nous est très mal connue car le cartulaire 11009 est fragmentaire et incomplet ; la collection Doat fournit quelques indications, ainsi que l’inventaire du XVe siècle. A part quelques bois près du Serrampion, le paysage ne nous est pas visible170, la constitution de la grange non plus. La grange existait en 1158, puisqu’elle est citée dans le cartulaire de Gimont171. Elle était confirmée en 1162 par la bulle d’Alexandre III sous le nom de Saint-Georges.
145Des droits de pâturage dans la région de Sirac annoncent la formation de Terride. Les premiers renseignements donnés sont relatifs, en 1170, aux terres de Saint-Georges (carte n° 4), du moulin près de Bouvées, de Solbairan, d’Usac et de Roset (avec ses bois, ses vignes et ses près). La couture de Vinsac venait s’ajouter à ces biens.
- 172 Doat 77 f° 399, octobre 1198.
- 173 Doat 78 f° 270, en 1234, Escornebœuf était situé par rapport aux honneurs de Touget, Saint-Jean, Si (...)
- 174 108 H 46 et Doat 78 f° 4-15.
146Vers 1179-1181, la grange obtenait les honneurs de Fontanelle, de Columbat et le casal de Masdoat tout en continuant, en 1190, à compléter ses possessions à Vinsac, Saint-Georges et Saubairan. La majeure partie des acquisitions se fit à titre onéreux, mais un échange portait aussi sur 10 concades de terre à Saint-Georges172. Pour le XIIIe siècle, l’inventaire du XVe siècle nous donne quelques renseignements souvent très allusifs, mais les principaux textes se retrouvent dans la collection Doat. Les pâturages atteignaient Maurens, très au sud de la grange. En 1213, la grange recevait des biens près de Sarrant, à Estamiac et dans la couture de Guamaut au Causé. Vers 1235-1245, elle allait beaucoup plus au Sud avec les châteaux et appartenances de Trotaca et d’Escornebœuf, les bois de l’église Saint-Germier et le bois de Fromiguier173. Des controverses s’élevèrent et il fallut fixer les limites de Saint-Aubin et de Lastours, conserver le château de Montagnac, négocier avec l’abbaye cistercienne de Gimont la possession des honneurs de Saint-Aubin, Trotaca, Saint-Germier, Montagnac, Fulhac, Semilhan, Guaterville, Corione174.
- 175 Doat 78 f° 360.
- 176 108 H 46 f° 2-5.
- 177 108 H 46 f° 36.
147Trois autres pôles de développement marquèrent encore le XIIIe siècle : la région de Mauvezin avec Caniac et Piamont, la région du Pin175, la région de La Réole avec l’honneur de Pest, acquis pièce à pièce entre 1251 et 1287176. Un tel déplacement vers le Sud-Est explique l’existence d’une autre grange, qui n’est mentionnée qu’une fois, celle de Rasenguas177. Cherchant à localiser sur une carte, nous avons trouvé à côté du village de Rasengues, à 2,5 km du chemin de pèlerinage vers Saint-Jacques de Compostelle un lieu-dit La Grange, tout à côté d’un petit ruisseau dans un site extrêmement semblable à celui de très nombreuses granges de Grandselve. Ce n’est bien sûr pas un argument suffisant pour dire que Rasenguas se trouvait là, au XIIIe siècle, mais la probabilité est très élevée. Elle était, de plus, en plein cœur de la zone commune de pâturages que Grandselve partageait avec Gimont, chaque maison y ayant ses propres biens.
- 178 108 H 56 f° 148 v°.
- 179 108 H 46 f° 21 v°.
148La négociation d’ensemble avec Odon de Terride en 1278 avait porté aussi sur les limites de la grange de Terride, reportées sur la carte178. La surface paraît assez homogène, et à nouveau, nous ne savons pas si des propriétés étrangères étaient enclavées à l’intérieur. A l’extérieur, par contre, la grange avait, à la fin du XIIIe siècle des possessions éparpillées, à Mauvezin, à Cologne179 et sans doute ailleurs.
Quelques noms de lieux peuvent être retrouvés dans la géographie du XXe siècle : Saint-Pierre-de-Vinsac (Saint-Pierre), Saint-Georges, Usac, Bouvées, Solbairan (Saubarian), Columbat (le Colombat) ; Gardone qui marquait la limite avec Sarrant est peut-être En Gardian ; quant à Masdoat, on le retrouve, peut-être aussi dans Mahourat. Les châteaux du XIIIe siècle se sont maintenus par des agglomérations : Saint-Germier, Escornebœuf, Roquelaure-Saint Aubin, Mauvezin, Piamont (Piémont), le Pin.
- 180 La recherche a été menée par G. Leblanc qui avait étudié par ailleurs la magnifique grange fortifié (...)
149La grange de Terride a donné le toponyme des Granges. Non loin au Sud passait une vieille route, du moulin de Terride à Sirac. Le site est un petit vallon ombragé où coule un ruisseau, le Rieutort. Il avait été partiellement détourné et les eaux remplissaient un béal d’environ 60 mètres de long sur 4 ou 5 mètres de large et qui a partiellement conservé son appareillage en briques. Un système d’évacuation par vannes assurait le drainage des eaux qui rejoignaient le cours d’eau. Les bâtiments que l’on peut voir datent de la période moderne mais l’entrée par contre est beaucoup plus ancienne : au-dessus d’un grand porche voûté se dresse une tour de deux étages, avec de petites fenêtres, et des mâchicoulis surplombant la porte d’entrée (planche n° 9). Terride devait être une grange fortifiée, comme l’était la grange Lassale180.
- 181 108 H 60.
- 182 De Bernard, Comptes de Grandselve..., p. 21.
- 183 J.M. Garric m’a incitée à reprendre le dossier en m’indiquant des références qui m’étaient alors in (...)
150La grange est citée dans les dénombrements des XVIe et XVIIe siècles. Il est même précisé, dans le registre des baux de ferme et de couture de 1685 qu’elle avait 8 à 9 paires de labourages181. A la fin du XVIIIe siècle, Mr. de Bernard signale que le domaine de Terride était composé de 2 métairies avec 648 arpents182 soit environ 370 ha. C’était alors l’un des plus grands domaines de l’abbaye avec celui de la région de Montech. Par contre en reportant sur le terrain les limites indiquées par le compromis négocié avec Odon de Terride, on trouve une surface d’environ 1 800 ha. Terride était donc une grande grange183.
151La grange de Rasenguas ne peut être estimée car elle est vraiment trop peu connue. Mais si elle englobait les honneurs cités (allant d’Escornebœuf à Saint-Aubin) elle devait avoir un territoire important. Il faut souhaiter la découverte d’autres documents, peut-être dans les archives du Gers pour la mieux connaître.
GRANGES LOINTAINES ET INCERTAINES
152Quelques granges éloignées de l’abbaye sont peu ou mal connues. Quelques autres ne sont que citées, une seule fois, hors de tout contexte géographique, ce qui rend impossible toute localisation. Nous serons alors réduits à quelques hypothèses. Voyons les documents.
La bulle du pape Innocent 11184
- 184 Gallia Christiana, t. XIII, Instr., col. 18.
153Elle mentionne, à la date de 1142, l’existence des granges de Coubirac, Comberouger, Bagnols et Lassale. Elle indique aussi la possession du lieu de Fontfroide dans le diocèse de Narbonne ce qui est sans doute inexact en 1142, et ajoute « pour construire une abbaye » ce qui est également inexact, puisque Fontfroide fut créée à la fin du XIe siècle. Le lieu de Scenzalas (orthographié Senselas dans l’inventaire de 1685) dans le diocèse de Périgueux n’a pu être identifié.
154Enfin, la bulle mentionne la grange de Salet sous le château de Caraman, mais il n’y a pas une seule autre mention, dans toute la documentation, de cette grange. Il est cependant probable qu’elle a existé : la famille de Caraman, qui avait des biens jusqu’à la Garonne, a donné de nombreuses terres à l’abbaye, en bordure du fleuve, et octroyé des droits de pâturages. Des liens existaient donc entre Caraman et Grandselve. De plus, l’examen d’une carte au 1/25 000e (celle de Cassini n’ayant rien relevé) montre à une centaine de mètres de la sortie nord-ouest de Caraman un quartier appelé Salères. Est-ce elle ? Placée dans une telle situation, la grange était remarquablement implantée sur la voie vers le Lauragais et le haut Languedoc, en provenance de la Garonne par la vallée de la Ceillonne, affluent de l’Hers.
La bulle du pape Alexandre III – L’inventaire de 1685 et les Statuta capitulorum generalium
- 185 108 H 56 f° 2 v°.
155Rédigée en 1162, la bulle185 énumère les granges de Coubirac, Comberouger, Bolhaguel, Nonas, Villelongue, Calcassac, Saint-Georges, Lassale, Vieilaigue, Bagnols, et nous l’avons citée pour chacune d’elles. Elle inclut sur la liste la grange de Saint-Jean. Nous avons déjà vu dans les cas de Larra et de Lescout que l’hypothèse n’était pas concluante : et les lieux-dits Saint-Jean sont légions, en l’absence de tout autre renseignement.
- 186 9994 f° 234.
156La bulle cite enfin la grange de Rieumanent. La collection Doat permet de faire un rapprochement : un texte daté de février 1190 nous dit que Ransane, prieure de Vernet et de Rieumanent, et Ermessinde de Niort donnent droit de pâturage sur leurs domaines et s’engagent à ne céder qu’à Grandselve la maison de Rieumanent186. Le prieuré de Rieumanent et Vernet ne nous est pas connu. Peut-être est-il possible de rapprocher ces deux noms de Rieumes et Vernet, dans la haute vallée de la Garonne.
- 187 108 H 56 f° 2.
- 188 Par contre, un travail ultérieur a permis d’identitifier le vocable médiéval de Bragerac devenu par (...)
157Un autre rapprochement semble confirmer cette hypothèse géographique : dans un titre de 1160, Grandselve promet, à la prière du vicomte Gautier et ses enfants, de donner à la prieure de Bragayrac pendant sa vie l’usufruit de la grange que le Frère Pagès avait fait bâtir. En échange, la vicomtesse Garsens y ferait sa résidence, et la grange reviendrait à l’abbaye après le décès de celle-ci187. Le document était rédigé par un chanoine de Saint-Sernin. Bragayrac se trouvant non loin de Rieumes, nous avons scruté, mais en vain, les cartes pour trouver trace d’une grange dont le vocable rappellerait Grandselve188.
- 189 108 H 56 f° 48.
158Une mention très vague peut être signalée : en 1303, les habitants et la communauté d’Agen autorise Grandselve à faire passer annuellement tout le sel nécessaire pour ses granges dans les diocèses de Toulouse et d’Agen189. L’abbaye ayant par ailleurs un moulin à Agen, faut-il en déduire qu’elle avait une grange en Agenais ?
- 190 J.M. Canivez, Statuta Capitulorum Generalium Ordinis cisterciensis, Louvain, 1933 ; 1191 : 29
159Enfin, la dernière citation isolée de grange émane du Chapitre Général de l’Ordre de Cîteaux : Boulbonne et Grandselve sont en conflit à cause de la grange de cette dernière190. Or les deux abbayes avaient eu des querelles sur les pâturages en haute Ariège, et Grandselve avait possédé une maison à Tarascon. Avait-elle aussi une grange dans la vallée de l’Ariège, qui aurait été très bien située sur la route des pâturages pyrénéens ?
Coursan
- 191 L’étang de Montady avait été asséché de manière topographiquement spectaculaire au milieu du XIIIe (...)
160Elle fut la plus lointaine des granges que nous connaissons. Elle était située en Narbonnais, dans un cadre très particulier. Le village, très ancien, était établi partiellement sur plaine inondable, et le massif de la Clape constituait quelques îles. La région était donc caractéristique de la côte lagunaire languedocienne, en voie de régularisation. Elle avait plusieurs étangs, ceux de Montady, de Capestang, de Coursan, communicant plus ou moins avec la mer, et dont le drainage défectueux favorisait l’endoréisme. Actuellement, le marécage continue de se chausser d’un centimètre par an malgré les nombreux travaux d’assèchement réalisés depuis le Moyen Age191.
- 192 J.M. Canivez, Statuta Capitulorum..., 1469 : 35.
161Les mentions relatives à cette grange proviennent de textes assez tardifs, et mutilés ce qui en rend incertain l’exploration. Voici les principaux éléments : à la fin du XIVe siècle, le grangier de Coursan transige avec les habitants du village pour l’utilisation de pâturages, de prés et autres possessions de l’abbaye. La terre en question est située au sud de la grande route et à proximité d’un cours d’eau ; elle est entourée par un jardin de la grange, un honneur de l’abbaye de Fontfroide et les terres d’un habitant de Saint-Just de Narbonne192. Mais une partie du texte, incompréhensible par ailleurs, fait référence à la situation en 1292. Cela laisse donc supposer que la grange était là dès la fin du XIIIe siècle.
- 193 108 H 44.
- 194 108 H 36.
162L’existence de l’établissement est confirmée au XVe siècle par un texte où le tenancier de la grange en appelle à la juridiction de l’abbaye pour échapper à celle d’un seigneur voisin193. Vers la même période, ailleurs, le Chapitre Général de Cîteaux mande à l’abbé de Fontfroide d’obliger l’abbé de Grandselve à récupérer la grange appelée Grandselve, près de Narbonne, qui avait été donnée auparavant à emphytéose au préjudice du monastère194.
163Une grande propriété continue maintenant de porter le nom de Grandselve, à la sortie sud-ouest de Coursan, au sud de la route vers Narbonne. Si l’ensemble des constructions est moderne, il subsiste quelques parties beaucoup plus anciennes, et sans doute médiévales : un puits, autrefois équipé d’une noria et qui a conservé un appareillage en pierres de taille, une cave, mais aussi un hangar où l’on peut apercevoir deux lourds contreforts épaulant les murs et un arc cintré inclus dans la maçonnerie de l’un des murs. Les bâtiments encadrent sur trois côtés une cour, et il y a, en plus des caves, une bergerie et un four à chaux. Si les édifices sont récents, les fonctions sont très habituelles, et n’ont pas dû changer depuis plusieurs siècles.
164Il faut replacer cette grange, pour la comprendre, dans son contexte géographique et historique : la proximité des lagunes salines et des collines rocheuses, le voisinage de l’abbaye-fille de Fontfroide et des possessions catalanes, la libéralité des seigneurs de Béziers et de Narbonne. On a l’impression de trouver là un relais dans un ensemble de biens et d’échanges, dont il faudra voir à quel point il pouvait faire partie d’un groupe plus vaste et cohérent, d’un véritable réseau aux nombreuses ramifications, aux nœuds d’organisation et de contrôle.
CONCLUSION
- 195 F. Grèzes-Rueff, « L’abbaye de Fontfroide et son domaine foncier aux XIIe-XIIIe siècles », AM, 1977 (...)
- 196 A. Altissent, Historia de Poblet, Poblet 1974, p. 251.
165A la fin du XIIIe siècle, Grandselve avait eu 24 à 25 granges, le total ayant varié dans le temps, sans que nous en ayons le détail précis. Il est élevé et comparable à celui d’autres abbayes cisterciennes, dotées d’un important temporel : 24 à Fontfroide195,17 à Poblet196 pour prendre des exemples dans la filiation de Grandselve.
166Encore faut-il s’entendre sur le terme de grange. Nous avons vu un cas où le mot est synonyme de celui d’honneur, à moins que les honneurs cités n’aient été le siège de grange. D’autre part, la bulle du pape Innocent II datée de 1142 nous montre que l’abbaye avait des granges avant même d’être cistercienne : le vocable signifie-t-il simplement domaine agricole ou bien exploitation de type cistercien avec ses convers et sa structure en faire-valoir direct ? Les documents ne permettent pas de trancher pour cette date.
167Le développement quantitatif s’est fait de manière rapide (tableau n° 3) :
-
avant 1142 : 5
-
avant 1162 : 12
-
fin du XIIe siècle : 17
-
fin du XIIIe siècle : 25
168Jusqu’à la fin du XIIIe siècle, l’augmentation du nombre des granges correspond à une extension du temporel. Au cours du XIIIe siècle, l’accroissement est dû surtout, mais pas uniquement, au fractionnement du terroir d’exploitations déjà existantes.
169La raison en est sans doute à rechercher dans les trop vastes dimensions de certaines, qui rendaient difficile une utilisation agricole à partir du centre de la grange, ou bien dans la mise en valeur particulière d’une partie excentrique du domaine (ce fut sans doute le cas de Bélesta, la Voulte, Favardac, Rasenguas).
170La précocité de l’installation d’une grange n’est pas fonction de la difficulté à s’installer dans la région. Coubirac et Comberouger, très proches de l’abbaye, s’expliquent aisément. Bagnols et Lassale sont nettement plus éloignées et la seconde en particulier s’est développée dans un milieu fortement humanisé. Vieilaigue et Calcassac ont dû se tailler une place dans une région où les hommes avaient développé des activités agricoles. Le cas de Saint-Sernin-de-Ricancelle montre que les populations ont dû parfois résister à l’expansion de l’abbaye : bien qu’à deux pas du monastère, les terres ne sont obtenues qu’à la fin du XIIe siècle.
171Partout ailleurs, Grandselve acquiert des biens peu ou pas mis en valeur, d’immenses étendues de forêts ou de terres incultes, des terroirs peu humanisés : le nord de Calcassac, Lescout, Terride offrent des terrains non limités, non bornés, où les moines peuvent parfois prendre à leur convenance. Et l’on voit se dessiner le profil du moine cistercien, défricheur de forêts, et imprimant sa marque sur les paysages agraires.
172On peut remarquer en considérant l’évolution de la toponymie que 11 noms se sont conservés (avec quelques modifications linguistiques). 6 sont devenus La Grange ou Les Granges, 2 (parmi les établissements les plus lointains) s’appellent Grandselve, 2 se sont transformés en villes (Comberouger et Vieilaigue) et 4 ont disparu dont Bagnols dans une inondation de la Garonne, car pour les 3 autres nous ne connaissons pas les motifs de leur suppression. Un tel total montre le succès de l’implantation humaine et géographique.
173Une carte de répartition des granges (cartes n° 13 et 14) n’a pu représenter Salet et Coursan, trop éloignées du cœur de l’abbaye. A part les deux que nous venons de citer, et peut-être Lalande, toutes les autres répondent au critère des usages de Cîteaux qui voulaient que l’exploitation soit à moins d’un jour de marche de l’abbaye. Plus précisément, nous trouvons :
-
à moins de 24 kilomètres : 22 granges
-
à moins de 15 kilomètres : 17 granges
-
à moins de 4 kilomètres : 7 granges
- 197 R. Fossier, « Les granges de Clairvaux et la règle cistercienne », Cîteaux, 1955, p. 260, a fait re (...)
174Elles étaient réparties dans un rayon très limité autour de l’abbaye, mais par là même très proches, trop proches les unes des autres, du moins selon la prescription qui imposait 2 lieues entre deux granges : autour de Grandselve, elles forment une nébuleuse dont la densité diminue en s’éloignant197.
175Leur taille est très variable et montre des réalités géographiques différentes. D’après les estimations que nous avons faites, nécessairement sommaires et partiellement fausses comme toute hypothèse dans ce domaine, on peut donner le tableau suivant :
-
300 ha et moins : 11 granges
-
600 ha à 1 300 ha : 5 granges
-
1 800 ha et plus : 4 granges
-
taille inconnue : 5 granges
176Ces nombres appellent quelques commentaires. On peut remarquer, globalement, leur surface importante. Les plus petites, et c’est très relatif en la matière, sont soit situées très près de l’abbaye, soit nées du morcellement d’un domaine beaucoup plus vaste.
- 198 Ch. Higounet, La grange de Vaulerent. Structure et exploitation d’un terroir cistercien de la plain (...)
177Les plus grandes sont d’une taille très importante puisque 4 dépassent les 1 800 ha, et en particulier Calcassac, tout à fait exceptionnelle en cela. Même en réduisant ces dimensions selon une fourchette d’erreur probable, celles-ci n’en restent pas moins de très grande superficie198. Le total de la superficie possible des granges mieux connues avoisinerait 18 500 ha. On peut expliquer l’aire importante par l’étendue de la couverture forestière et la faiblesse, parfois, des terres cultivées.
- 199 M. Mousnier, « Granges cisterciennes de Gascogne toulousaine aux XIIe-XIIIe siècles : une dynamique (...)
178La transcription cartographique des granges a fait apparaître un facteur essentiel : c’est le rôle des communications dans leur situation géographique. Quelques grands axes sont ainsi matérialisés : la grande route de Moissac à Toulouse, ainsi que la Garonne ; un axe terrestre Garonne-Lectoure par Grenade, Grandselve et Beaumont ; un axe Toulouse-Lectoure par Blagnac, Saint-Paul-sur-Save, Cologne, Mauvezin, Fleurance ; un axe Toulouse-Auch qui est celui du Chemin de Saint-Jacques ; les axes transversaux sont fluviaux : la Gimone, le Lambon et la Nadesse, la Save. Les 22 granges proches de l’abbaye sont toutes à l’intersection de ces axes, formant un réseau aux mailles croissantes vers la périphérie. Les granges en constituent les nœuds, semblables aux ganglions d’un vaste tissu nerveux199.
179Chacune forme un ensemble cohérent, un véritable organe utilisant un emplacement aux vocations multiples. Tous les sites sont à des zones de contact entre terroirs aux possibilités complémentaires : plaine alluviale et terrasse, vallée aux riches terres et plateau aux sols plus pauvres, terres de labours et terres de parcours. Cet ensemble d’organes formait-il un organisme ? Il faudrait connaître les rapports des granges entre elles, leur éventuelle complémentarité, leurs rapports avec le cœur du système. Mais les documents n’apportent guère d’informations dans ces domaines. Par contre, il est possible d’entrevoir l’action des granges sur leur environnement et leurs propres transformations.
Notes
1 C.V. Graves, « Medieval cistercian granges », Studies in médiéval culture, Western Michigan University, 1966, vol. 2, p. 5-64.
2 J’avais développé cette synthèse dans l’article « Les granges de l’abbaye cistercienne de Grandselve (XIIe-XIVe siècles) », AM, t. 95, n° 161, janvier-mars 1983, p. 7-27.
3 108H1.
4 C’est ce que pense F. Moulenq, Documents historiques sur le Tarn-et-Garonne, Montauban, 1879, t. IV, p. 307.
5 J. Jouglar, Monographie de l’abbaye de Grandselve, Montauban, 1857, p. 199.
6 F. Mirouse, Le clergé paroissial du diocèse de Toulouse (1450-1516), Ecole Nationale des Chartes, 1976 : il s’agit de la carte Jaillot du diocèse de Toulouse.
7 9994 f° 219, en juillet 1194, Bernard Bord situe un bien par rapport à l’église de Saint Sernin de Ricancelle.
8 108 H 56, f° 241.
9 J. Jouglar, Monographie de Grandselve..., p. 198.
10 108 H 60, registre des baux de ferme et de culture de 1675-1705.
11 Arch. départ. Tarn-et-Garonne, manuscrit 266. Mr de Bernard, Comptes de l’abbaye de Grandselve à la fin du XVIIIe siècle, p. 17 et 21.
12 Toutes les estimations de surface des granges sont des ordre de grandeur car tout le travail de reconstitution du parcellaire et sa mesure n’a pas été fait.
13 A côté de la grange fut élevé le château de Coubirac, l’un des manoirs de l’abbé de Grandselve. J. Jouglar, Monographie de Grandselve..., p. 199.
14 Gallia Christiana, t. XIII, Instr., col. 18, et 108 H 56, f° 2.
15 108 H 56, f° 92.
16 108H 56, f° 23.
17 108H 60, et 1 G 394.
18 De Bernard, Comptes de Grandselve..., p. 21.
19 Des éléments intéressants de prospection, localisation et interprétation se trouvent dans T. Pratvieil, Inventaire archéologique du canton de Verdun-sur-Garonne et occupation du sol, maîtrise, Toulouse, 1989, manuscrit : la commune de Bouillac est étudiée t. 1, p. 103-153 et t. 2, p. 21-30.
20 Doat 77 f° 243, le 24 février 1181, Forton de Gots donne tout ce qu’il possède au bois de Gausard.
21 108 H 56, f° 136, le 15 janvier 1240.
22 108 H 56, f° 144,148 : le premier est du 16 avril 1325 et le second du 4 mai 1278.
23 108H 56, f° 104.
24 108H 46, f° 13 et 14 : elle est dite grangia Porterii, et grangia del Porterii.
25 F. Moulenq, Documents historiques..., t. IV, p. 373.
26 J. Jouglar, Monographie de Grandselve..., p. 199.
27 108 H 46, f° 68.
28 Doat 78, f° 189, en novembre 1209.
29 108 H 46, f° 68.
30 Ch. Higounet, « Les origines d’une commanderie de l’Ordre de Malte : le Burgaud (Haute-Garonne) », AM, 1932, p. 137.
31 9994 f° 214.
32 Doat 79 f°165.
33 Doat 79 f° 360.
34 De Bernard, Comptes de Grandselve..., p. 18.
35 Doat 78 f° 252, le 4 mars 1229.
36 108 H 56 f° 149 en 1278 dans la sentence arbitrale entre Odon de Terride et Grandselve.
37 108 H 46, f° 8, à la date du 27 mars 1281.
38 De Bernard, Comptes de Grandselve..., p. 20.
39 108 H 56 f° 415.
40 108 H 56 f° 416.
41 108 H 56 f° 417.
42 108 H 56 f° 422.
43 108 H 56 f° 432.
44 108 H 56 f° 430.
45 108 H 56 f° 431.
46 Mgr X. Barbier de Montault, « L’inscription de la Grange Lescou (Tarn-et-Garonne) », BSATG, 1884, p. 290.
47 108 H 56 f° 144 et 108 H 46 f° 16, le seigneur abandonnait le droit de coupe et de pâturage sur la grange de Malegate, si ce n’est avec l’accord de l’abbé.
48 De Bernard, Comptes de Grandselve..., p. 17 et 21.
49 108 H 56 f° 422.
50 108 H 56 f° 149.
51 108 H 56 f° 139.
52 108 H56 f° 212.
53 9994 f° 189.
54 9994 f° 208.
55 9994 f° 211.
56 108 H 56 f° 140.
57 9994 f° 201.
58 Le cartulaire 9994 et l’inventaire 108 H 56 fournissent l’essentiel de l’information sur la grange de Nonas.
59 Doat 76 f° 215.
60 108 H 56 f° 214, le 27 mars 1286, le cellerier de Grandselve achète à Andrie de Quinquestone, bourgeois de Bordeaux, deux vignes, l’une à Nonas près du ruisseau de la Corrège, l’autre à Comberouger ; pour 25 livres qui ont été reçues par Iter Comte, notaire de Bordeaux. Ce bourgeois bordelais serait-il de souche anglaise (Kingston ?) ? Voilà pour le moins une situation peu banale et qui demanderait de mieux connaître le milieu bordelais.
61 108 H 56 f° 199 , le 15 juin 1251, Grandselve conserve les terres de Balsone, Laranhon, Pleus major, Montpeirous, Perer Avarge, Favardac, Cantegranolhe tandis que le prieur gardait Ricaumont,
62 108 H 56 f° 199 v°, 200 et 200 v°.
63 Doat 79 f° 308.
64 J. Jouglar, Monographie de Grandselve..., p. 199.
65 108 H 46 f° 67.
66 Il convient de faire la distinction, dans les textes, entre les gens de Faursdaz, ou Faordaz c’est-à-dire de Favardac, et ceux de la maison de Faudoas dont le centre est en Lomagne. Ainsi peut-on éviter la confusion entre ces deux noms comme dans A. Ledru, E. Vallée, La Maison de Faudoas, Paris, 1908, tome 1, p. 3. 1 G 394, inventaire des recettes du cardinal de La Valette.
67 De Bernard, Comptes de Grandselve..., p. 17.
68 L’opération eut lieu en 1276 pour Favardac (108 H 56 f° 215-216 v°) et en 1280-1282 pour les abords de Nonas (108 H 56 f° 216 v°-224 v°).
69 Les sources essentielles sont les cartulaires n° 9994 et 11011, ainsi que les volumes 76 et 77 de la collection Doat.
70 9994 f° 27.
71 9994 f° 30.
72 9994 f° 2.
73 9994 f° 36.
74 9994 f° 21.
75 9994 f° 65.
76 9994 f° 63.
77 9994 f° 65.
78 9994 f° 47.
79 Doat 76 f° 4 : le 13 janvier 1129, Guilhem Sichier et son frère Gérald donnent la terre de la Rocha de Combes.
80 9994 f° 1, le 20 janvier d’une date inconnue qui pourrait être 1131 ou 1132, car d’autres textes, à partir de cette date, s’articulent sur la couture.
81 L. d’Alauzier, « L’église Saint Quiriace », Bulletin de la société des études littéraires, scientifiques et artistiques du Lot, t. CII, 1981, p. 205-208.
82 9994 f° 100 v° : le 23 mars 1183, Gausbert abbé de Marcillac procède à un échange avec Grandselve : il donne des terres et en particulier une maison près de la clôture de ses moines, et une vigne à Long Fayx, Grandselve donnant une sétérée de terre à Volve, soit entre le pont de Saint-Cry et le château. Il s’agit du Pont Royal sur la Saudrune (et non du pont sur l’Arratz) et du château de Montech. Vital de Combes qui exerçait la bailie de ces biens pour le monastère de Marcillac, la donne à Grandselve contre 30 sous melgoriens.
83 9994 f° 47, 94 v°, 100.
84 11011 f° 175, le 15 novembre 1181, Sasneus la met en gage à l’abbaye pour 10 sous toulzas.
85 Arch. munie. Montech, liste des possessions des Bernadins de Grandselve à Montech, établie en 1806.
86 9994 f° 77, le 16 novembre 1181, Indie fille d’Arnaud Gausbert donne 13 sétérées de terre à la mesure de Castelsarrasin à prendre dans sa seizième partie de l’honneur donné par Sasneus, veuve de Cénabrun de Canzas, à Saint-Laurent.
87 De Bernard, Comptes de Grandselve..., p. 18.
88 Doat 78 f° 286, par lettres de janvier 1275, le roi de France Philippe reconnaît à Grandselve la jouissance des dîmes et prémices sur la forêt de Boutanelle que l’abbaye avait donnée au roi.
89 J. Jouglar, Monographie de Grandselve..., p. 204.
90 1 G 394, inventaire des recettes du cardinal de la Valette, abbé commendataire de Grandselve, ainsi que de Saint-Semin, Gimont, Berdoues, Lagrasse, f° 19-23.
91 G. Leblanc, « La Grange Lassale : étude historique et archéologique d’une "grange" cistercienne », dans Dixième Congrès d’Etudes de la Fédération des Sociétés, Académiques et Savantes Languedoc-Pyrénées-Gascogne, Montauban 1954, Montauban 1956, p. 121-134. Cette étude a été reprise par A. Dimier, « Granges, celliers et bâtiments d’exploitation cisterciens », Archeologia, n° 74, 1974, p. 52.
92 108 H 37, document d’environ 40 cm x 50 avec dessins à l’encre, couleurs et écriture.
93 Mireille Mousnier, « A propos d’un plan figuré de 1521 : paysages agraires et passages sur la Garonne », AM, t. 98, n° 176, oct.-déc. 1986, p. 517-528. Publication du plan.
94 M. David Roy, « Les granges monastiques en France aux XIIe et XIIIe siècles », Archeologia, 1973, n° 58, p. 53-54.
95 9994 f° 3 v°, le 2 janvier 1153, Richard de Combes donne l’honneur engagé pour 10 sous morlans, à Villelongue.
96 108 H 56 f° 2 v°. Cet acte existe sur un parchemin à la côte 108 H 1, mais il est coupé : un certain nombre de noms de lieux manque, dont celui de Villelongue.
97 9994 f° 6 v°, en 1162 ; 108 H 56 f° 283 en 1215 ; 9994 f° 32, 40, 71 en 1167, 1172 et 1180.
98 9994 f° 48, de la part de Seguin de Saint-Cricq, sa femme Sasneus et ses enfants Seguin et Martine.
99 P. Gérard, « Les origines du collège Saint Bernard de Toulouse (vers 11501335) », AM, 1957, p. 191. L’auteur signale dans la note 17 que les titres de propriété ont été transcrits dans le registre contenant plusieurs actes importants qui ont été ramassés de différents endroits depuis l’incendie du Collège Saint Bernard de Toulouse et transcrits dans ce registre par les soins de Don Jean-Philippe Loume, docteur en théologie de la Faculté de Paris, religieux.
100 108 H 56 f° 23 v°, dans un dénombrement du 11 novembre 1519.
101 Doat 79 f°288.
102 Les cours de l’Hers et de la Garonne ayant changé depuis le Moyen Age, nous avons fait une restitution d’après la carte de Cassini, d’après une carte du XVIIIe siècle, contenue dans le parcellaire vers Rouanel et Lagarosse ; et d’après un plan coté PA 131, établi à la suite d’un litige avec le marquis de Castelnau et Grandselve au XVIIIe siècle. Ce procès occupe de nombreuses layettes et concerne le bois de Corbeyra (ou Corbières). Il dura plus de vingt ans, et l’animosité était telle qu’il fallut protéger l’arpenteur et le peintre chargés d’établir le plan.
103 Doat 79 f° 288.
104 9994 f° 104 v°.
105 9994 f° 104 v°.
106 J. Jouglar, Monographie de Grandselve..., p. 201.
107 108 H 38, une partie du terroir de la grange put être distrait pour constituer la métairie, près de l’église de Saint-Caprais.
108 108 H 53, sur le plan, elle est appelée « grange de Lagarrosse de Grandselve », et un lieu dit Garrosses existe toujours, au sud de Saint-Caprais.
109 108 H 56, f° 23 v°, dénombrement de 1519 ; 1 G 394, dénombrement de 1621.
110 9994 f° 134 v°.
111 9994 f° 135 v°.
112 9994 f° 152 v°.
113 Doat 76 f° 388, le 13 août 1168, par l’arbitrage de Hugues, abbé de Saint Sernin. En particulier, la couture donnée par le vicomte Adémar de Bruniquel est divisée en deux parties : la partie vers la Save allant à Grandselve, la partie vers la montagne de Bracoac à La Capelle. Grandselve abandonne les biens au Sud, en direction du chemin Toulouse-L’Isle-Jourdain, et La Capelle ceux entre la Save et le village de Montaigut. Les pâturages furent également réglementés.
114 Doat 78 f° 287, le 5 janvier 1239, une commission d’arbitrage mène une enquête : les seigneurs contestent la validité des chartes de Grandselve qui produit des témoins (de nombreux frères surtout) pouvant attester qu’elle a depuis 30 ans et plus la possession et l’exploitation des biens contentieux, et cela sans qu’il y ait eu manifestation d’opposition auparavant.
115 Doat 79 f° 222, le 11 mai 1270.
116 Doat 79 f° 308, une sentence arbitrale du 8 août 1278 détermine propriétés et droits de pâturage.
117 Doat 78 f° 336, le mardi après l’Ascension, soit le 30 mai 1281.
118 Le texte nous est connu par une copie du XVIIIe siècle à l’intérieur de la liasse 108 H 53, exhibée lors d’un procès en 1745 ; par l’inventaire 108 H 56, et J.A. Galabert le traduit dans sa Monographie d’Aucamville, publiée à Montauban en 1890, p. 13, après avoir trouvé le document dans les archives de Verdun et celles de Grenade. Le bois de Setes qui s’étendait pratiquement jusqu’à la route Aucamville-Larra, restait à Grandselve ainsi que l’honneur de la Voulte (Boute) ; enfin la limite avec le territoire de Merville était précisée par des bornes.
119 F. Moulenq, Documents historiques..., t. IV, p. 403.
120 9994 f° 109 v°, le 21 février 1163, Bertrand de Toalha donnait 8 pièces de terre relativement concentrées dans l’espace près de Vieilaigue.
121 Doat 76 f° 189 v° : à la Voulte, le 16 novembre 1181.
122 9994 f° 158, un jeudi de septembre 1178, l’abbé de Saint-Sernin Pons autorise Grandselve à acquérir jusqu’à 10 arpents dans le fief de Gauzinhac.
123 9994 f° 131.
124 9994 f° 156 v°.
125 9994 f° 177.
126 9994 f° 119.
127 9994 f° 152 v°.
128 9994 f° 154 v°.
129 Le texte qui se trouve dans Doat 80 f° 51 a été publié par R. Rumeau, Monographie de la ville de Grenade, Toulouse 1879
130 Articles 21 et 29 du paréage : 100 cartonnades pour Vieilaigue avec toute la terre, des bâtiments de la grange et 10 cartonnades de bois ; articles 26 et 28 : 100 cartonnades pour Belesta la terre des bâtiments et 5 cartonnades de terre pour faire un parc ; articles 24 et 27 : la grange de la Voulte avec toutes ses terres et 10 cartonnades de bois.
131 108 H 60, registre des baux de ferme et de culture (1675-1705).
132 R. Rumeau, Notes et documents pour servir à l’histoire de Grenade (Haute-Garonne), Toulouse, 1886, p. 21. Le texte qu’il résume précise que ces habitants de Grenade furent reconnus « irtnocens, immuns et descharges du bruslement de la Grange de Vieilles-Aygues ».
133 108 H 56 f° 23 v°.
134 J.P. Claverie, Notes historiques et renseignements divers sur la ville de Grenade (Haute-Garonne) et les communs de ce canton, Toulouse, 1875. p. 17.
135 11008 f° 132 v°.
136 11008 f° 133 v°.
137 11008 f° 167.
138 11008 f° 133 v°.
139 11008 f° 197 v°.
140 J. Jouglar, Monographie de Grandselve..., p. 202.
141 11008 f° 130, le 30 décembre 1162, Guilhem Adémar donne les pâturages et usages de son honneur près de la Save du côté où la grange de Larra est construite.
142 Doat 79 f° 308, au cours de l’année 1278.
143 J.A. Galabert, Monographie d’Aucamville..., p. 13.
144 R. Rumeau, « Larra et son église », Bulletin de la Société de Géographie de Toulouse, 1907, p. 183- 217.
145 Doat 76 f° 388 ; de plus, la grange renonçait à s’étendre au sud de la rivière Mairas et la Capelle renonçait au Nord de la Save jusqu’à la rivière Marguestaud.
146 Doat 78 f° 344, le 13 juin 1254. Il promettait aussi son aide et sa garantie.
147 Arch. départ. Tarn-et-Garonne, A 297, Saume de l’Isle, f° 1382, le 14 juin 1254 et pour plus de sûreté, il n’y aurait de partage avec d’autres personnes avant 10 ans.
148 Doat 79 f° 308.
149 Arch. départ. Tam-et-Garonne, A 297, Saume de l’Isle, f° 812, 817, 831 et v°, 842 et v°, 844 à 845 v°, 856 à 860.
150 J. Jouglar, Monographie de Grandselve..., p. 201.
151 R. Rumeau, Monographie de Grenade..., p. 81, article 21 et Doat 80 f° 65.
152 idem, articles 22 et 25
153 idem, articles 21, 25 et 27. Un chemin la reliait à Aucamville, et elle conserva 10 canonnades de bois.
154 R. Rumeau, Notes et documents..., p. 21.
155 1 G 394, 1621, Inventaire des recettes du cardinal de la Valette.
156 L’inventaire 108 H 56, sur une soixantaine de textes se rapportant à la grange de Calcassac, signale une fois qu’il y a 15 autres donations sur un terroir, et 10 autres sur un autre.
157 108 H 56 f° 338 v°.
158 108 H 56 f° 399 v°.
159 108 H 56 f° 341.
160 108 H 56 f° 347.
161 108 H 56 f° 353 v°.
162 108 H 56 f° 402 v°.
163 108 H 56 f° 399 v°.
164 Lors d’un échange avec l’abbaye de Belleperche, Grandselve donna les terres reçues à Montain et Peneville, le casal de Labatud et le fief de Ferriol au terroir de Sérignac et Belleperche donna la terre de Malhorgas à Gilhac, la moitié de l’honneur de Balzonne près de Brivecastel, l’honneur de Rochas. Doat 78 f° 377,31 mars 1259.
165 108 H 56 f° 405.
166 108 H 56 f° 149 et 147 v° (casal de Cuhn).
167 F. Moulenq, Le livre juratoire de Beaumont-de-Lomagne, Montauban, 1888, p. 83-87.
168 108 H 46 f° 28.
169 De Bernard, Comptes de Grandselve..p. 20.
170 11009 f° 23 v°.
171 Abbé Clergeac, Cartulaire de l’abbaye de Gimont, Paris, 1905, p. 230.
172 Doat 77 f° 399, octobre 1198.
173 Doat 78 f° 270, en 1234, Escornebœuf était situé par rapport aux honneurs de Touget, Saint-Jean, Sirac et Beaupuy.
174 108 H 46 et Doat 78 f° 4-15.
175 Doat 78 f° 360.
176 108 H 46 f° 2-5.
177 108 H 46 f° 36.
178 108 H 56 f° 148 v°.
179 108 H 46 f° 21 v°.
180 La recherche a été menée par G. Leblanc qui avait étudié par ailleurs la magnifique grange fortifiée de Fontfroide à Fontcalvi : « La grange cistercienne de Fontcalvy », XXXe congrès de la Fédération historique du Languedoc méditerranéen et du Roussillon, Sète 1956, p. 4357.
181 108 H 60.
182 De Bernard, Comptes de Grandselve..., p. 21.
183 J.M. Garric m’a incitée à reprendre le dossier en m’indiquant des références qui m’étaient alors inconnues : Arch. Nationales, L 1009 B, et je l’en remercie même si je n’ai pas approfondi la piste.
184 Gallia Christiana, t. XIII, Instr., col. 18.
185 108 H 56 f° 2 v°.
186 9994 f° 234.
187 108 H 56 f° 2.
188 Par contre, un travail ultérieur a permis d’identitifier le vocable médiéval de Bragerac devenu par la suite Saint-Aignan : M. Mousnier, « Peuplement et paysages agraires : Saint-Nicolas-de-la-Grave et Saint-Aignan au début du XIIe siècle », BSATG, 1991, t. CXVI, p 121-131. Voir pour toute cette zone A. Guinvach, L’occupation du sol dans le canton de Saint-Nicolas de la Grave (Tarn-et-Garonne) au Moyen Age, maîtrise, Toulouse, 2003, manuscrit.
189 108 H 56 f° 48.
190 J.M. Canivez, Statuta Capitulorum Generalium Ordinis cisterciensis, Louvain, 1933 ; 1191 : 29
191 L’étang de Montady avait été asséché de manière topographiquement spectaculaire au milieu du XIIIe siècle. L’étang de Capestang ne commença vraiment à être asséché qu’à la fin du XVIIIe siècle. Quant à celui de Coursan, nous ne savans pas quand il le fut. J.L. Abbé a étudié de manière approfondie ces étangs, non seulement dans la partie de l’assèchement et de la planification du parcellaire, mais aussi dans l’exploitation et la dimension sociale : A la conquête des étangs. L’aménagement de l’espace en Languedoc méditerranéen (XIIe-XVe siècle), PUM, Toulouse, 2006.
192 J.M. Canivez, Statuta Capitulorum..., 1469 : 35.
193 108 H 44.
194 108 H 36.
195 F. Grèzes-Rueff, « L’abbaye de Fontfroide et son domaine foncier aux XIIe-XIIIe siècles », AM, 1977, p. 274.
196 A. Altissent, Historia de Poblet, Poblet 1974, p. 251.
197 R. Fossier, « Les granges de Clairvaux et la règle cistercienne », Cîteaux, 1955, p. 260, a fait remarquer que l’éloignement de la règle se double d’une extension du rôle économique des granges.
198 Ch. Higounet, La grange de Vaulerent. Structure et exploitation d’un terroir cistercien de la plaine de France, XIIe-XIVe siècles, Paris, 1965. L’auteur a pu estimer de manière précise la superficie de cette vaste grange, qui était de l’ordre de 320 à 380 ha. Mais il faut reconnaître qu’il s’agit d’un terroir cultivé.
199 M. Mousnier, « Granges cisterciennes de Gascogne toulousaine aux XIIe-XIIIe siècles : une dynamique spatiale originale », dans L. Pressouyre, L’Espace cistercien, Paris, CTHS, 1994, p. 190-203.
Table des illustrations
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Titre | Carte n° 2 : Granges à Grandselve |
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Fichier | image/jpeg, 30k |
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Titre | Carte n° 3 : Granges de Bouillac et de Comberouger |
URL | http://books.openedition.org/pumi/docannexe/image/28558/img-2.jpg |
Fichier | image/jpeg, 37k |
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Titre | Carte n° 4 : Granges d’Aussiac et de Terride |
URL | http://books.openedition.org/pumi/docannexe/image/28558/img-3.jpg |
Fichier | image/jpeg, 57k |
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Titre | Carte n° 5 : Granges de Lescout |
URL | http://books.openedition.org/pumi/docannexe/image/28558/img-4.jpg |
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Titre | Carte n° 6 : Granges de Nonas |
URL | http://books.openedition.org/pumi/docannexe/image/28558/img-5.jpg |
Fichier | image/jpeg, 48k |
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Titre | Planche n° 5 : Site de la grange de Nonas |
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Fichier | image/jpeg, 52k |
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Titre | Carte n° 7 : Grange Lassale et son environnement |
URL | http://books.openedition.org/pumi/docannexe/image/28558/img-7.jpg |
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Titre | Carte n° 8 : Grange Lassale |
URL | http://books.openedition.org/pumi/docannexe/image/28558/img-8.jpg |
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Titre | Planche 6 : La grange Lassale avant sa destruction d’après l’étude de G. Leblanc |
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Titre | Carte n° 9 : Granges de Villelongue et de Bagnols |
URL | http://books.openedition.org/pumi/docannexe/image/28558/img-10.jpg |
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Titre | Carte n° 10 : Les granges de Vieilaigue |
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Fichier | image/jpeg, 64k |
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Titre | Carte n° 11 : Granges de Larra |
URL | http://books.openedition.org/pumi/docannexe/image/28558/img-12.jpg |
Fichier | image/jpeg, 73k |
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Titre | Carte n° 12 : Grange de Calcassac |
URL | http://books.openedition.org/pumi/docannexe/image/28558/img-13.jpg |
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Titre | Planche n° 7 : Site de la grange de Calcassac |
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Titre | Planche n° 8 : Près de la grange de Calcassac, vue vers Beaumont-de-Lomagne et le clocher de son église |
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Titre | Planche n° 9 : Portail fortifié de la grange de Terride |
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Titre | Tableau n° 3 : Tableau récapitulatif des granges |
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Titre | Carte n° 13 : Granges de Grandselve |
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Titre | Carte n° 14 : Les granges proches de Grandselve |
URL | http://books.openedition.org/pumi/docannexe/image/28558/img-19.jpg |
Fichier | image/jpeg, 33k |
© Presses universitaires du Midi, 2006