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L’abbaye cistercienne de Grandselve

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Mireille Mousnier

Troisième Partie. Structures et paysages agraires

Chapitre 1. Le monde rural au milieu du xiie siècle

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  • 1 J.B. Mahn, L’ordre cistercien et son gouvernement des origines au milieu du XIIIe siècle (1098-1265 (...)
  • 2 G. Despy, « Les richesses de la terre : Cîteaux et Prémontrés devant l’économie de profit aux XIIe (...)

1« En ces lieux déserts qu’on choisit pour séjour » : voilà comment se présentent, de manière habituelle, les sites où s’installèrent les communautés cisterciennes1. Elles choisirent d’être loin des hommes, ce qui dans l’espace médiéval signifiait dans ou proche de la forêt. L’étude détaillée des origines de quelques abbayes2 a mis en lumière que la solitude était très relative : les parages étaient déjà partiellement occupés, le défrichement commencé. Grandselve par le choix de son implantation s’est inséré dans un certain milieu.

2Vers 1160, les documents du monastère sont en nombre suffisant pour que l’on puisse dresser une esquisse, sinon un tableau du monde rural. Quelques réponses aux questions d’histoire agraire sont appréhendables dans leurs grandes lignes : l’histoire du peuplement, la répartition de l’habitat. Il s’agit de voir aussi comment les hommes avaient transformé le cadre naturel ; comment se répartissaient terres cultivées et bois, où s’étendaient les voies de communication renforçant les liens entre les gens, mais aussi qui possédait la terre et l’exploitait.

3Diverses études ont été réalisées sur certains de ces points, mais souvent ne concernant pas directement la région. Elles ont été utilisées, comme références et non exhaustivement. Tous les noms mentionnés ici se trouvent effectivement dans les cartulaires, soit que Grandselve y ait eu des biens, soit que des témoins en proviennent ou des partenaires. Et d’ailleurs, dans la multitude, une bonne partie n’a pu être identifiée, que les endroits aient disparu ou soient trop loin.

4A travers les sources, on voit une mise en forme des données fondamentales qui ne la concernent pas uniquement. Aussi a-t-il paru intéressant de ne pas se cantonner à la moitié du XIIe siècle, mais de pousser parfois jusqu’au XIIIe et exceptionnellement au XIVe pour rechercher quelques structures profondes et permanentes, ou établir quelques comparaisons quand la situation générale s’était modifiée ou nuancée localement.

L’INSTALLATION DU PEUPLEMENT AU MILIEU DU XIIe SIECLE

5Le peuplement s’est mis en place en fonction d’impératifs géographiques qui ont certainement été plus contraignants que les facteurs historiques. Les géographes ont souligné l’opposition entre la basse vallée de la Garonne et les terrasses qui la bordent. Si celle-là a des sols fertiles propices aux cultures, elle est également la proie des ravages occasionnés par le fleuve, et par là même s’oppose à l’habitat. De plus, largement ouverte aux communications, elle n’offre guère de protections contre les mauvaises surprises comme le pillage. Mais les terrasses ont des sols médiocres le plus souvent.

6La Garonne n’est pourtant pas une frontière entre les terres de la rive droite et celles de la rive gauche et dès le Haut Moyen Age, les passeurs ont permis aux villages d’avoir des activités complémentaires sur les deux bords, à preuve des communes qui actuellement sont encore à cheval sur le cours d’eau comme Grenade, Verdun, etc.

Une mise en place ancienne

  • 3 Il convient maintenant d’être plus prudent et de rapporter cette approche toponymique aux noms atte (...)
  • 4 M. Roblin, « L’habitat rural dans la vallée de la Garonne de Boussens à Grenade », Revue géographiq (...)

7Deux méthodes d’approche concourent à l’étude de l’installation des hommes dans la période la plus ancienne : l’archéologie et la toponymie3. Des synthèses de travaux ont été réalisées, par M. Roblin pour la haute Garonne et la rive gauche du fleuve, Ch. Higounet pour la moyenne Garonne et la rive droite jusqu’au Tarn4. Il ne s’agit pas de présenter l’étude systématique de toute la région où Grandselve s’est étendue, mais de s’aider de leurs conclusions pour tracer un tableau de l’occupation antique.

  • 5 M. Roblin, L’habitat rural..., p. 18, et suivantes.

8Le peuplement est très ancien, et si on ne sait pas grand-chose des Ibères, on n’en connaît guère plus sur les Celtes. Dès la période préhistorique, ou plutôt protohistorique, les hommes étaient installés sur le rebord de la terrasse orientale : oppidum de Gandalou et peut-être aussi de Montbartier, sites de la terrasse occidentale juchés sur les hauteurs, les sources coulant au pied du talus et un chemin s’accrochant à mi-pente. Il était facile de défendre de telles implantations. La toponymie a conservé de ces temps anciens quelques noms comme Bouconne et Aussonne5. L’appellation Verdun est d’origine celte.

  • 6 En raison des très nombreuses fouilles, liées en particulier à l’archéologie préventive, le bilan e (...)

9Mais la trame de fond fut constituée par l’installation de grands domaines à l’époque gallo-romaine. Les traces archéologiques en sont nombreuses6 ; rive droite à Saysses, Borde Rouge qui est à quelques centaines de mètres de la future grange Lassale, Finhan, Bessens, Dieupentale. Sur la rive gauche, des trouvailles jalonnent le ressaut surplombant de quelques mètres le cours du fleuve : elles s’échelonnent depuis Blagnac jusqu’au Nord du confluent de la Save et de la Garonne.

  • 7 H. Gavel, « Chronique de toponymie. Le Toulousain méridional », Revue des Etudes Anciennes, 4e séri (...)

10Bagnols date sûrement de cette période et la toponymie apporte de nombreuses autres indications. Trois types de suffixes se rattachent à la domination des grands domaines gallo-romains : en – an, ou – a ; en – ac ou – at ; en – ens. Le premier groupe est peu courant : on peut citer Auran, Foissa (aussi dit Foissan) Pompignan et Affinia (actuellement Finhan). Le deuxième ensemble est beaucoup plus fréquent et sur les domaines de l’abbaye ou en bordure, on peut noter les groupements suivants : près de la grange Lassale ce sont Pantagnac, Rogonac (ou Roenac) ; au sud de Vieilaigue et autour de la forêt de Bouconne, voilà Pibrac, Lévignac, Bracoac ; la grange Larra était formée, ou limitée par Gojac, Caujac, Espagnac, Launac, Gauzinhac, Marnac ; proches de Daux étaient Flaunac et Orsiac (ou Aussiac) ; tout autour de l’abbaye se trouvaient Coubirac, Bouillac, Berzac, Espagnac ; en Lomagne le long de la Gimone existaient Calcassac, Sérignac, Gilhac, Argumbat, Esparsac, Avensac ; à proximité de la grange de Terride étaient Vinsac et Usac. L’examen des cartes montre l’existence d’une foule d’autres toponymes avec les mêmes terminaisons, mais ils ne sont pas cités dans les cartulaires. La différence entre ceux qui sont terminés en – a et ceux qui sont terminés en – ac ne viendrait pas d’un degré plus ou moins conservé de celtisation des colons, mais de dates différentes7. Par contre, de nombreux autres, cités avec le nom d’une personne, ont disparu en tant que tels (Preissac, Gajac, Barreria, Gradac, Bamiac, etc.) et ne sont pas localisables. Le troisième suffixe est – ens, sans doute d’origine ligure, et latinisé, mais qui rend possible la confusion avec un suffixe germanique – ing. On peut noter Glatens et Peyssoulens.

  • 8 Ch. Higounet, « Pour l’histoire de l’occupation du sol et du peuplement de la France du Sud-Ouest, (...)

11Cependant cette liste géographique ne permet pas de savoir de quels types d’installations il s’agissait. Que ce soit de grands domaines ou d’habitations dispersées dessus, tous ces lieux, bien plus nombreux que ne le laissent supposer les cartes actuelles, montrent une vie continue, liée à la domination romaine. Si l’occupation du sol n’est pas intensive, elle est du moins totale : « le réseau de ses habitats et de ses terroirs présentait des mailles espacées »8.

12Les apports germaniques n’ont guère changé la répartition globale du peuplement. Absents sur la rive gauche, ils ont laissé quelques toponymes sur la rive droite comme Gandalou, Bessens et Escatalens, mais ce sont des lieux qui étaient déjà précédemment occupés. Si l’origine du nom de Dieupentale n’est pas sûre, le site était habité auparavant. Les Wisigoths se sont donc installés sur certains points des unités gallo-romaines, sans étendre davantage l’occupation du sol. D’une manière générale, les hommes s’étaient enracinés au bas des talus bordant la terrasse inférieure, dans les vallées, laissant plateaux et collines à l’emprise de la forêt ou à la brousse des landes et bruyères. Durant le très haut Moyen Age s’était produit un recul des terroirs surtout à l’ouest de la Garonne.

  • 9 Ch. Higounet, L’occupation du sol du pays..., p. 311.
  • 10 G. Pradalié a repris toute cette question dans « La ville des Francs », dans M. Taillefer, Nouvelle (...)
  • 11 Ch. Higounet, L’occupation du sol du pays..., p. 312.

13Une série de noms rappelle l’existence des grands domaines héritiers des villas antiques et qui portent le nom de -ville. L’examen des textes a révélé un nombre bien plus élevé que l’étude de la carte : un groupe autour de Finhan et Bessens n’a pas laissé de traces toponymiques9, mais peut être identifié par ses églises. Par contre, sur la rive gauche, ils se multiplient : la zone large autour du confluent Save Garonne était particulièrement privilégiée avec Merville, Mondonville, Maurenville, Maneigville, Bossomville, Boisville, Lobaville, Aucamville qui constituent une remarquable concentration. Non loin de l’abbaye se groupaient Pamville, Gaudanville, Passoville près de Bramelaygue ; enfin près de la Gimone à proximité de Calcassac, un groupe assez nombreux comprenait Bacosville, Bréville, Antetville, Lozadville. Penenville était un peu plus au Nord, et La Réole rassemblait Estanville et Garbosville. Il faut noter que l’énorme majorité de ces citations attestées par les textes ne se retrouvent plus dans la toponymie10. Ch. Higounet a brossé le tableau de ces grandes exploitations agricoles avec demeures de maîtres et agglomération voisine d’esclaves, affranchis, colons, ces derniers employés sur de petites exploitations à côté de la réserve domaniale, formant sans doute les « dépendances » souvent mentionnées d’un honneur11.

Sauvetés, castra et castelnaux12

  • 12 Lancées par Ch. Higounet, puis relayées dans tout le Midi, les recherches sur ces formes d’habitat (...)

14De nombreux toponymes sont moins anciens et forment une bonne part des chartes du XIIe siècle. A consonance religieuse, ce sont des villas gallo-romaines ayant abandonné leur nom pour prendre celui de la paroisse dédiée à un saint : Saint-Sardos, Saint-Germain (de Berzac), Saint-Sernin (de Ricancelle) sont tout proches de l’abbaye ; Saint-Jean (de Cauquessac), Saint-Pierre (de Vinsac) étaient en Lomagne ; Saint-Cry, Saint-Laurent, Saint-Pierre et Saint-Géraud entouraient Sainte-Marie de Lassale ; la chapelle Saint-Martin avait donné le village de Grisolles à la fin du XIe siècle.

15Très souvent aussi, l’appellation ne se différencie guère du lieu-dit et décrit la géographie ou le paysage agraire de l’époque. Les hauteurs et autres sites marquent le paysage : Beaupuy, Montgaillard, Escampech, Pech de Vila, Montaigut-sur-Save, Auterive. La végétation est aussi rappelée : les aunes de Vernet, les noyers de Noguer Anar, Lalande, Lerm ; et même le sol de Terrefort, ou bien Fonsorbes dont les sources se sont taries. La structure agraire est témoignée dans Mas-Grenier, ou Escazeaux.

16Villelongue a provoqué un problème d’identification. La question a été posée depuis longtemps par les historiens. Siège d’un archidiaconé très anciennement attesté, elle a été située par Ch. Higounet, à la suite de Devals, dans l’ancienne Castelsarrasin, et d’après la charte de Nizezius. Or Grandselve avait une grange à Villelongue. Les terres citées, ainsi qu’elles seront analysées, ne se trouvaient pas à proximité de Castelsarrasin, mais de Canals. Il se pourrait donc qu’à la fin du XIe et début du XIIe siècles, il y ait eu deux agglomérations dénommées Villelongue.

17Tous ces noms qui dataient sans doute du Xe et XIe siècles prouvaient l’avancée de la culture sur la forêt et sur la lande. Après une période de recul plus ou moins net, les hommes élargissaient les bornes des vieux finages.

  • 13 P. Ourliac, « Les sauvetés de Comminges. Etudes et documents sur les villages fondés par les Hospit (...)
  • 14 P. Ourliac, « Les villages de la région toulousaine », A. ESC, 1949, p. 272. Une synthèse fournie r (...)

18Le rôle des établissements religieux a été fort justement souligné dans cette reconquête, que l’on insiste sur l’installation d’un nouvel habitat dans le cadre des sauvetés, ou bien sur les grands défrichements du XIIe siècle. Mais il ne faut pas négliger aussi un autre aspect non ecclésiastique qui est celui de la création des castra et castelnaux. Les sauvetés se rencontraient surtout dans des zones devenues désertes et qu’il s’agissait de récupérer par une véritable fondation, mouvement très caractéristique du début du XIIe. Les sauvetés de Comminges, œuvres des établissements religieux des Hospitaliers, ont été étudiées par P. Ourliac qui a mis en relief les aspects essentiels : l’Eglise et les communautés de l’Ordre assuraient l’immunité, l’asile et la paix qui étaient attachés à leurs biens ; eux seuls pouvaient inspirer la confiance suffisante pour que la vie agricole reprenne13. De plus, elles étaient installées sur les terrasses et les coteaux, c’est-à-dire à proximité ou dans la forêt, loin de la mise en valeur gallo-romaine. Villages d’hôtes, c’était avant tout des collectivités paysannes qui ont été le point de départ du défrichement de la forêt. Leurs immenses domaines n’étaient d’ailleurs pas sans rapport avec la villa carolingienne14.

  • 15 Ch. Higounet, « Les chemins de Saint Jacques et les sauvetés de Gascogne », AM, 1951, p. 297.

19Si les exemples de Comminges étaient situés relativement loin au Sud, beaucoup plus proche avait été fondée Fronton vers 1120. Pour Ch. Higounet les sauvetés n’étaient pas liées qu’à des motifs économiques, mais on pouvait établir un lien entre sauvetés et chemins de Saint Jacques : certaines, en effet, jalonnaient les voies de pèlerinage, comme Saint-Nicolas-de-la-Grave, sur la via Podensis, qui fut instituée par la riche et puissante abbaye bénédictine de Moissac et le vicomte de Lomagne15. Les itinéraires principaux ou secondaires ont certainement déterminé le choix de nombreux sites de créations, chemins parfois très anciens et remontant à la période protohistorique. Les abbayes ont cherché à établir hôpitaux et prieurés le long de ces axes et c’est à partir de ceux-ci que la pénétration s’est opérée.

  • 16 F. Moulenq, Documents historiques sur le Tarn-et-Garonne, Montauban, 1879, t. IV, p. 127.
  • 17 F. Hautefeuille, Structures de l’habitat rural et territoires paroissiaux en bas-Quercy et haut-Tou (...)

20Les Hospitaliers avaient une fondation toute proche d’un établissement de Grandselve, la petite église de Sainte-Foy de Roselaygues, localisée à Rogonac16, proche de la grange Lassale, et divers contacts se produisirent entre les deux au cours du XIIe siècle. Les Templiers s’établirent plus au Nord, dans la partie septentrionale de la forêt d’Agre, avec la sauveté de La Ville-Dieu vers le milieu du XIIe siècle17. Enfin, l’abbaye de Conques fut à l’origine de Cépet et Castelmorou.

21Si les ordres militaires avaient contribué à l’amoindrissement de la forêt des terrasses, l’essor du peuplement s’était fait aussi en plaine sous la direction de la maison comtale.

  • 18 Doat 78 f° 175 : le 24 février 1205, Raymond VI comte de Toulouse dorme à l’abbaye une place dans l (...)
  • 19 G. Pradalié, « Les sauvetés castrales », Cadre de vie et société dans le Midi médiéval, Hommage à C (...)

22Les cas précédents sont connus, et toutes ces agglomérations sont mentionnées dans les archives de Grandselve. Mais il est un exemple plus curieux : un texte de 1205 précise qu’à Verdun il y avait une « Salvetat de Dehors »18. On ne sait rien sur l’origine de cette sauveté. Se pourrait-il que la ville de Verdun, peu active, ait été revivifiée de la sorte ? Mas-Grenier était proche, mais le comte de Toulouse était très présent dans la ville et tout autour. Peut-être était-ce plus un castelnau qu’une sauveté19.

  • 20 P. Ourliac, Les sauvetés de Comminges..., p. 68 et 86.

23Plus tard on retrouvera le même type d’organisation avec les bastides, en général sous la garantie d’une autorité non plus ecclésiastique mais royale. Ce fut un même partage du sol en parcelles, une même perception d’un cens et le cas échéant d’un agrier, une même importance de la franchise et des droits de sauveté, qui en faisaient une véritable seigneurie ecclésiastique dont les habitants se regroupaient dans le cadre de l’universitas, la communauté des villageois20.

  • 21 B. Cursente, Les castelnaux de la Gascogne médiévale, Bordeaux, 1980, p. 32.

24Mais de plus en plus, c’est vers un seigneur que les paysans se sont tournés pour assurer leur sécurité, quitte d’ailleurs à perdre en échange la liberté dont ils jouissaient, ce qui ne fut pas toujours le cas. B. Cursente a insisté sur les causes économiques du développement des castra en Gascogne. L’aristocratie avait été mise en difficulté par plusieurs pratiques. Les donations pieuses, le chasement des vassaux et des puînés, le dynamisme démographique, la coutume du partage égalitaire des patrimoines entre les descendants ont surtout touché la petite et moyenne noblesse et les seigneurs ont cherché les moyens de compenser la diminution de leurs ressources traditionnelles21.

  • 22 Doat 76 f° 104 v° : en 1191.
  • 23 108 H 56 f° 176, mais attesté en 1282.
  • 24 108 H 56 f° 93 : en 1194.
  • 25 11008 f° 190 : le château de Naufeld (11008 f° 133 v°), non identifié, se trouvait au nord-ouest de (...)
  • 26 Doat 77 f° 179 : en 1188.
  • 27 Doat 78 f° 175 : en 1205.
  • 28 Doat 77 f° 237 : en 1182.
  • 29 9994 f° 27 : en 1165.
  • 30 Doat 76 f° 66.

25Tout autour de Grandselve sont cités quelques châteaux : ceux de Beaupuy22, Saint-Salvy23, Coubirac24, Saint-Cézert25 La Graulet26. Auprès de la Garonne se dressaient ceux de Verdun27, de Montech28 et de Montcassin29. Par contre, pas un seul n’est indiqué dans la région du confluent de la Save et de la Garonne. Il y a un texte très intéressant montrant la création d’un castrum non loin de Saint-Cézert, à Boisville. Il s’agit d’un accord entre Pierre de Bessens et Armand de Verdun30 : en 1156 le premier donne au second la moitié de sa villa de Boisville avec tous les hommes, honneurs, terres cultes et incultes, prés, vignes et pâturages, les droits qui en dépendent, excepté ses propres hommes s’ils vont y habiter. Armand devra y faire bâtir un château avec un bon fossé et une palissade jusqu’à ce que le castrum puisse résister à une armée ; les deux hommes fourniront conjointement pour le guet. Si le château venait à être détruit par les guerres, Armand devrait le remettre en état à ses frais ; et Pierre de Bessens s’engageait à garantir la donation de tous usurpateurs.

  • 31 B. Cursente, Les castelnaux..., p. 70.
  • 32 Doat 79 f° 203 : en 1267.
  • 33 108H 6 : en juin 1230.
  • 34 108 H 56 f° 339 : en 1236.
  • 35 108 H 56 f° 348 v° : en 1292.
  • 36 108 H 56 f° 347.
  • 37 108 H 46 f° 43 : en 1172.
  • 38 11009 f° 2 bis : en 1172.
  • 39 Doat 78 f° 237 : en 1228.
  • 40 Doat 79 f° 203 : en 1267.
  • 41 B. Cursente, Les castelnaux..., p. 89.
  • 42 Doat 77 f° 251 : le 23 septembre 1182.
  • 43 Doat 77 f° 179 : en 1188.

26Près de l’abbaye, la densité est assez proche de celle que B. Cursente a calculée pour Gimont : un château pour 16 km231. Les sources concernant la Lomagne ne donnent pas de renseignements avant le XIIIe siècle : château de Mauvezin32, de Trotacane près de Saint-Germier33, de Bodot origine de Beaumontde34, Rojols35, du Pin36. Mais sont aussi cités ceux de Piamont, à côté de Mauvezin37, de Bouvées38, de Saint-Jean-de-las-Monges39, du Pin près de Sirac40. Si Maurens et Escornebœuf ne sont pas cités en tant que château, la carte établie par B. Cursente rappelle que c’en était également41. Enfin, les deux castra de Saint-Jean-de-Cauquessac42 et de Gariès43 existaient dès la fin du XIIe siècle. L’installation de l’ouvrage, souvent sur une motte, n’était pas toujours à proximité des anciens centres de peuplement. Ceci a entraîné un déplacement des habitants qui se sont rapprochés de la forteresse, structurant de manière différente l’habitat.

  • 44 Ch. Higounet, L’occupation du sol du pays..., p. 322.

27Il y eut aussi création de bourgs castraux, villages fortifiés près du château, territoires placés dans la juridiction directe. La fondation de Montauban en 1144 par Alphonse-Jourdain y est tout à fait comparable. Or n’est-ce pas le comte de Toulouse qui donna très tôt à l’abbaye la couture de Lassale ? Montech avait également un château et l’agglomération se développa alors. A Grisolles, Raymond V préféra conclure avec l’abbé de Saint-Sernin, patron des églises de l’archidiaconé de Villelongue, et Armand de Verdun, un contrat de paréage pour construire sur l’emplacement d’un chétif village un bourg de ce type. Les castelnaux sont équivalents des bourgs castraux. Castelnau-d’Estrétefonds en a gardé le nom. Au sud de l’abbaye, Montferran était établi par le seigneur de Marestaing et Fonsorbes par Bernard d’Orbessan avec les Hospitaliers. Mais il faut remarquer encore qu’entre Grandselve et ces bourgs s’étendait un no man’s land que n’avaient pas comblé les sauvetés, auparavant. Les alentours de l’abbaye connaissaient bien quelques châteaux, mais ni sauvetés, ni castelnaux. Il y avait donc là un tissu de peuplement informe où l’action de l’abbaye allait pouvoir s’exercer. Pour l’instant, partiellement à l’écart des préoccupations politiques de la maison comtale toulousaine, ainsi que des zones d’expansion hospitalières et templières44, elle s’insérait dans un milieu dont les caractéristiques étaient en partie modifiables.

L’HUMANISATION DES PAYSAGES

28L’histoire de la colonisation agraire explique au XIIe siècle la répartition du peuplement, l’importance des terres cultivées, et les transformations déjà apportées au paysage.

Dispersion de l’habitat

29La lecture des textes fournit des renseignements qui ne concordent pas tout à fait avec l’étude de la carte. Les cartulaires fourmillent de lieux, selon toute vraisemblance proches de Grandselve, mais qui n’existent plus actuellement. Ceci pose plusieurs problèmes. Les lieux ont-ils purement et simplement disparu ? Il est difficile de répondre car certains, effectivement, ne se sont pas maintenus, mais d’autres ont pu seulement changer de nom, ce qui est probable. De plus, dans la mesure où ils subsistaient au milieu du XIIe siècle, est-ce que ce n’est pas l’abbaye qui, par le recours au système économique de la grange, ne les a pas fait disparaître ? L’étude du rôle des granges sur l’habitat cherchera à préciser cela.

30Le dernier point sur lequel il est impossible d’apporter une réponse est la distinction à faire entre lieu habité et agglomération. Un simple nom ne donne absolument pas une approche quantitative des gens qui y vivaient. Les villages contemporains sont tous cités. Certains comme Saint-Salvy, Brivecastel, Belbèze, Bréville, Vigueron, étaient certainement plus grands que de nos jours. Ils comptaient sans doute quelques dizaines d’habitants et peut-être quelque centaine. Mais pour les autres dont les noms même se sont effacés, on ne sait s’il s’agissait d’unités d’exploitation comme la borde ou la métairie, ou bien s’il y avait plusieurs familles.

31Il ressort cependant qu’au milieu du XIIe siècle, la dispersion de l’habitat était très spécifique et l’on ne peut pas estimer une quelconque densité. Il faut pourtant souligner un facteur essentiel : l’éparpillement se situait à l’intérieur des terroirs, qui ne représentaient qu’une partie des surfaces, le reste étant laissé aux friches et à la forêt. La densité sur la surface agricole utile pouvait donc être assez élevée.

32Cette dispersion est d’ailleurs sans doute liée à un mouvement de colonisation agraire qui a pu se placer aux Xe et XIe siècles, obscur et inconnu et dont on ne trouve plus que des traces toponymiques comme témoignage. Ce serait une preuve de la vitalité du milieu dans lequel l’abbaye s’inséra. Dans ses alentours, le mouvement de concentration de l’habitat dont étaient objet la Gascogne gersoise ou les vallées du Tarn et de la Garonne ne s’était pas encore produit.

  • 45 11008 f° 225 : en décembre 1180.
  • 46 9994 f° 160 v° : en mai 1181.

33Cet habitat n’était d’ailleurs pas fixé et si l’on n’a pas de mention de naissance d’agglomération, par contre on a celles de disparitions de lieux déjà occupés au XIIe siècle, château ou villa, ce dernier mot ne permettant pas de savoir s’il était question d’un ancien grand domaine du haut Moyen Age, ou bien d’un petit village né dessus. C’est déjà le cas pour la villa de Gojac, qui a son église et des habitants45. Mais à Pamville c’est très net : en 1181 Arnaud d’Esblanqueth accorde l’autorisation de passer par la terre de Pamville avec charrettes, bêtes et biens ; mais si cette villa est remise en état et que les habitants ne veuillent pas supporter le transit, le donateur rendra les 3 s. toulzas qu’il a reçus de l’abbaye46. Il est possible que l’établissement humain ait été détruit à la suite de l’insécurité et de la guerre vers 1178-80.

  • 47 108 H 56 f° 347.

34En 1206, l’un des seigneurs de Varanhas donne des terres à l’abbaye, comprenant des bois, pâturages, prés, eaux, moulins de part et d’autre de la Gimone près du ruisseau de Rojols. Il ajoute que si le château du Pin est remis dans son premier état, il pourra faire rebâtir le moulin du lieu sans porter préjudice à celui de Cabanac qu’elle possédait, un peu plus en aval47. Là aussi, il est possible qu’il y ait eu destruction, pour que le moulin et le château aient été anéantis.

  • 48 Doat 76 f° 87.
  • 49 Doat 76 f° 88 : le 18 mars 1165.
  • 50 Doat 76 f° 89 : le 18 mai 1173, il donnait tout ce qu’il avait au territoire de Boisville, en terre (...)
  • 51 Doat 76 f° 121 : Donat d’Albarils donne tout son droit sur les terres données par Pierre de Bessens (...)
  • 52 Doat 76 f° 231 : en juillet 1163, Armand, portant alors le titre de vicomte de Terride, alors malad (...)

35Le château de Boisville a-t-il été construit ? En 1158, on apprend que le donateur, Pierre de Bessens, était tenancier, pour la villa de Boisville d’Odon d’Escuders à qui il versait 20 s. d’acapte, et qui vendit à Armand de Verdun tous ses droits pour 100 s. morlans48. Le vocabulaire juridique sur la seigneurie est peu fiable pour représenter la réalité sociale car en fait, les trois personnages sont de petits seigneurs sauf Armand de Verdun (il avait traité avec Raymond V pour Grisolles). Mais le château existait-il encore quand le même Odon d’Escuders donnait à l’abbaye en 1165 les droits qu’il avait à Boisville, dans l’honneur et les appartenances, et sur tous, hommes et femmes49. Aimard d’Escuders renforçait la donation en 117350. Les terres avaient été données à Grandselve avant 1161 par Pierre de Bessens, et Armand de Verdun et diverses personnes qui avaient des droits sur ces biens s’en dessaisirent au profit de l’abbaye51. La donation fut rappelée par Armand avant son décès, en 116352. Etant donné le caractère résolument militaire de l’installation, elle n’avait pas dû réussir, pour que le monastère en ait toutes les terres quelques années après, alors qu’il n’eut jamais de château en tant que forteresse, mais en tant que moyen de perception de redevances diverses.

  • 53 M. Roblin, L’habitat rural..., p. 72.

36L’opposition est donc nette entre le mouvement de concentration (gallo-romain dans la région de Grandselve) et la dispersion complète sous la forme de la borde, sans que l’on dénote le stade intermédiaire comme dans de nombreuses régions de l’Ouest ; le hameau. M. Roblin estime que la tendance profonde de l’habitat était la dispersion complète, peut-être due à un fonds indigène, qui répondait au mieux au relief et à l’étendue des terrasses, adaptée aux aptitudes agricoles variées du sol53. Villages et bourgs étaient directement le fruit d’une concentration liée à la sécurité ou à des impératifs socioéconomiques.

  • 54 M. Bourin, P. Chareille (éd.), Genèse médiévale de l’anthroponymie moderne, t. III, Enquêtes généal (...)

37D’où venaient les habitants ? Les noms permettent une approche dont il faut indiquer les limites : souvent ils fournissent une origine géographique, mais qui peut être aussi le rappel d’une possession domaniale, ou bien le souvenir d’un voyage ou d’une ressemblance. De plus, la famille a pu déjà s’installer depuis une ou deux générations, le nom étant devenu héréditaire54. Malgré cela, c’est un indice intéressant pour suivre les mouvements de populations.

  • 55 Ch. Higounet, « Mouvements de population dans le Midi de la France du XIe au XVe siècle, d’après le (...)
  • 56 Ch. Higounet, « Le peuplement de Toulouse au XIIe siècle », AM, 1942-1943, p. 494.
  • 57 Ch. Higounet, Mouvements de population..., p. 3-6.

38Dans le cadre des castelnaux et sauvetés, Ch. Higounet a montré que le peuplement s’est fait essentiellement à partir d’un recrutement local55. Le monde rural se présente comme étant en pleine croissance démographique, ce qui est à mettre en relation avec le mouvement de colonisation agraire. La pression est suffisante pour alimenter un courant un peu plus lointain vers Toulouse, mais peu important car il y a localement bien de la place pour mettre en culture, et des possibilités de regroupement56 Certains sont également partis vers l’Espagne profiter des terres de la Reconquista, provenant de Muret, Castelsarrasin, de Lomagne, de Gascogne57.

  • 58 9994 f° 207 : Guilhem Arnaud d’Espagne en 1179.
  • 59 Doat 77 f° 190 v° : en 1200.

39Un mouvement s’est produit dans le sens contraire, originaire de l’Aragon et du bassin de l’Ebre, mais en plus petit nombre. De fait, les archives de Grandselve signalent une famille dite d’Espagne, installée près de Nonas58. Par ailleurs est cité comme témoin Arnaud Bernard de Candeia, espagnol59. Bien sûr, la précision géographique est trop large, et elle prouve que la région n’est pas fermée sur elle-même et qu’elle peut absorber des gens venus d’ailleurs.

  • 60 108 H 56 f° 351.
  • 61 Ch. Higounet, Mouvements de population..., p. 9.

40Un nom a cependant frappé l’attention : Bertrand de Tudel60 qui n’est pas sans rappeler les Tudèle venus d’Espagne, et installés à Montauban et en Bas-Quercy61. S’agirait-il de la même provenance, ou bien plus simplement, ainsi que l’a suggéré G. Passerat, de Tudeth, le gascon ne faisant pas une distinction systématique entre le -t et le -1 final d’un nom ?

  • 62 9994 f° 198 : le 23 octobre 1167.

41La famille d’Arnaud de Gironde avait de grands biens près de Berzac62 et l’on trouve également une famille Peytavin, l’Aquitaine ayant elle aussi fourni son contingent de migrants.

42L’habitat se présentait donc comme un semis de petits groupes de maisons, sinon d’exploitations isolées. L’isolement n’était d’ailleurs pas la règle car elles n’étaient jamais très éloignées d’une voie, d’un chemin, et un lacis de sentiers assurait les liaisons.

Les communications

43Les confronts des terres obtenues par Grandselve sont assez souvent repérés par rapport aux voies de communication. Parfois un adjectif permet de savoir si c’est une voie ancienne (antica, vetus) ou plus récente (nova) ce qui est infiniment plus rare. La dissémination des lieux ne donne pas une vue d’ensemble, mais il est bon de faire le point. La cartographie du réseau a été réalisée dans les diverses cartes concernant chaque grange de l’abbaye.

  • 63 9994 f° 23 v°.
  • 64 9994 f° 52.
  • 65 9994 f° 84
  • 66 9994 f° 19 v°et 84.
  • 67 9994 f° 39 v°
  • 68 9994 f° 64 : carreria vetus.
  • 69 9994 f° 27.
  • 70 9994 f° 7 : calsata nova
  • 71 9994 f° 29.
  • 72 9994 f° 44.
  • 73 9994 f° 15.

44Dans la région près de Montech, plusieurs voies révèlent un système assez dense. L’articulation centrale est une grande voie romaine, la strata tholosana 63. Cet axe principal desservait toute la région par la basse terrasse de la rive droite de la Garonne : il allait de Toulouse à Moissac, et au-delà vers Agen, en passant par Pompignan, Dieupentale, Bessens, Finhan, Saysses et Escatalens. Il s’agit donc bien d’une route romaine, dite également publica 64. Des voies secondaires, également qualifiées d’anciennes, se raccordaient à elle : un faisceau rayonnait autour de Montech, vers Montbartier65, vers la Garonne par Lassale66, vers Combes, Saint-Cry et la Garonne67. Ces points étaient aussi reliés entre eux, tel Combes à Saint-Cry par un chemin ancien68 qui a aujourd’hui disparu ; le château de Montcassin était aussi raccordé à la nause de Saint Laurent en bordure de la forêt d’Agre69. Par contre, un chemin neuf est indiqué en 1156 près de Lassale, peut-être au sud de la grange (par Larramet actuellement)70. La géographie impose des contraintes. Sur la basse terrasse coulent plusieurs petits ruisseaux, dans des zones mal drainées, formant des nauses, par exemple tout au long de la Saudrune. Des ponts étaient nécessaires et avaient été construits avant le milieu du XIIe siècle : le pont Cairal71, le pont royal72 et le pont de Lassale73. On se trouvait, par conséquent, près de Lassale dans une région bien équipée de communications, bien aménagée par les hommes.

  • 74 Doat 79 f° 288.
  • 75 Arch. départ. Tarn-et-Garonne, A 297, Saume de l’Isle, f° 566 v° : en 1309.

45Au confluent de l’Hers, de la Garonne et de la Save, la notion de carrefour est particulièrement évidente. Si c’est vrai pour les voies fluviales, est-ce identique pour les voies terrestres ? Sur la rive droite, la strata tholosana se prolongeait en direction de Toulouse, passant au pied de Castelnau-d’Estrétefonds et franchissant l’Hers par le pont de Cardonnières, attesté au milieu du XIIIe siècle74. Au début du XIVe siècle, le territoire de Bonfol était situé par rapport à la voie qui allait de Fronton à Bouloc, et celle qui allait de Castelnau-d’Estrétefonds à Villemur75.

  • 76 A. Galabert, Monographie d’Aucamville, Montauban, 1890, p. 10.
  • 77 9994 f° 119 : via vetus.
  • 78 9994 f° 109 v°.
  • 79 108 H 53 : attestée au XIIIe siècle.
  • 80 9994 f° 155 v°.

46Sur la rive gauche, les relations étaient beaucoup plus développées. Les trouvailles archéologiques témoignent d’une voie romaine arrivant du Nord, passant le ruisseau Marguestaud se dirigeant vers la Save76, et au bord de laquelle se trouvait Aucamville. Autour de l’église Saint-Sulpice de Vieilaigue, entre Save et Garonne, un chemin menait de l’église à la grange77, qui était située tout à proximité, puis un autre de l’église à la base de la montagne de Toalha, en passant par la Voulte78, une voie plus importante se dirigeait vers Launac79, une autre reliait Saint-Cézert à la Voulte80. Tout donne l’impression d’une convergence vers l’embouchure de la Save, grand passage obligé vers la rive droite du fleuve. Le transit s’effectuait vraisemblablement avec des passeurs car la construction de ponts sur cette partie de la Garonne ne fut que très tardive au Moyen Age. On avait donc là un grand carrefour de communications.

  • 81 11008 f° 146 v°.
  • 82 11008 f° 133 v°.
  • 83 11008 f° 214.
  • 84 108 H 53.
  • 85 Doat 79 f° 308.

47Le chemin vers la montagne de Toalha se prolongeait plus au Sud, par-delà le ruisseau de Mairas sans doute jusqu’à Montaigut81. Sur l’autre rive, une voie antique menait depuis la fontaine de Lespinassar jusqu’à l’église Saint-Séverin, passant par le gué de Las Planquas82, et donc proche de Larra83. Au XIIIe siècle, d’autres voies sont citées : ce sont celles d’Aucamville à Larra84, de Launac à Montaigut, qui est appelée la via molinal, et le chemin de Larra à Thil85.

  • 86 108 H 56 f° 104.
  • 87 108 H 56 f° 97.
  • 88 108 H 56 f° 207 v°.
  • 89 108 H 56 f° 107.
  • 90 108 H 56 f° 178 v°.
  • 91 108 H 56 f° 166.
  • 92 108 H 56 f° 235 : il est appelé chemin public.
  • 93 108 H 56 f° 129.
  • 94 108 H 56 f° 192 v° : appelé aussi chemin public.
  • 95 108 H 56 f° 417 v°.
  • 96 108 H 56 f° 432.
  • 97 108 H 56 f° 431.
  • 98 108 H 56 f° 430 v°.
  • 99 108 H 56 f° 432.

48Autour de l’abbaye, il n’y en a qu’un nombre très réduit de connues pour le XIIe siècle : seule celle qui va de Bouillac à Beaupuy est mentionnée, et la grange de Bolhaguel était située à proximité86. Par contre, à la fin du XIIIe on constate la multiplication des chemins : de Grandselve au Lambon87, de Grandselve à Bourret88, de Bouillac à Saint-Salvy89, de Saint-Salvy à la grange de Lescout90, de Saint-Sardos à Comberouger91, de Brivecastel au Mas-Grenier92. En élargissant la prospection, étaient réunis Bellesserre et Beaupuy93, Brivecastel et Escazeaux94, Escazeaux et Belbèze passant par Saint-Jean-de-Cauquessac et Vigueron95, Escazeaux et le Causé96, et tout autour de Gariès il y avait raccord à La Graulet97, à la grange Lescout98 et à Faudoas99. La différence est par conséquent considérable entre le XIIe siècle peu viabilisé et la fin du XIIIe siècle où le réseau contemporain était pratiquement mis en place.

  • 100 108 H D6 f° 343 v°.
  • 101 108 H 56 f° 341.
  • 102 108 H 56 f° 403 v°.
  • 103 Doat 77 f° 251 : le 23 sept 1182.
  • 104 Doat 78 f° 314.
  • 105 108 H 56 f° 340 v°.
  • 106 L’Homme et la route en Europe occidentale au Moyen Age et aux Temps Modernes, Flaran 2, Auch, 1982.

49En Lomagne, un faisceau se dirige vers la Gimone, dont on sait mal comment les parties étaient raccordées entre elles : ce sont des vieux parcours, comme celui de Bréville100, celui du Pin et de Cabanac101, celui de Grandselve menant à la grange de Calcassac102. Des compléments d’information sont apportés grâce à la donation de Bernard d’Astaffort en 1182 : il octroie à l’abbaye l’usage exclusif du chemin allant du château de Saint-Jean, passant par la terre de Beaumont, jusqu’à la grange de Calcassac ; toute autre personne – dont lui-même – devait suivre le vieux chemin entre les terres d’Escampech et de Lagarosse, puis rejoindre celui de Grandselve à Calcassac103. Or il faut reconnaître que tous ces passages ont à peu près disparu sous le réseau moderne. Seule subsiste la route de Vigueron à Cabanac car les autres n’ont laissé que quelques lambeaux non-coordonnés. Sur l’autre rive de la Gimone, des itinéraires sont cités au milieu du XIIIe siècle : si celui de Sérignac au moulin de Calcassac était peut-être assez récent104, celui de Sérignac à Esparsac était sûrement beaucoup plus ancien105, type même, comme la voie de Gariès à Belbèze, des serrades, routes de crêtes si caractéristiques de la Gascogne106.

  • 107 108 H 56 f° 351 : donation en 1166 par Bertrand de Tudel.
  • 108 108 H 56 f° 351 : donation, le 24 mai 1259, d’un casal à proximité du pont.

50Comment s’effectuait le franchissement de la Gimone ? Plusieurs possibilités s’offraient : une au moulin de Cabanac vers Sérignac, une autre possible vers Le Pin, un peu plus en amont, et une autre à proximité du moulin de Calcassac, autrefois dit moulin d’Aussecambe. En effet, là se trouvait au milieu du XIIe siècle un bois en cours de défrichement pour lequel plusieurs artigues sont nommées, ainsi qu’une terre appelée Malartic107. Or, au milieu du XIIIe il y avait là le pont Malartic qui, s’il n’existait pas en tant que tel auparavant, était certainement une zone de passage108.

51On peut se demander si une voie ne menait pas depuis la Save juqu’à la Gimone et au-delà. Un axe très ancien, sans doute romain allait de Vieilaigue au Marguestaud, près de Saint-Jean. Puis, passé le croisement des quatre chemins, il pouvait rejoindre Bouillac, traverser la Nadesse, remonter sur l’autre versant au pied de l’église Saint-Sulpice et descendre vers le Lambon par une courbe située entre Comberouger et l’ancien site de Puyvidal vers le gué de Le Plassa – des chemins creux de part et d’autre de ce gué seraient l’indice de son utilisation. Plus loin, il rejoint la route de crête entre Escazeaux et Brivecastel ; puis elle le prolonge vers Saint-Jean-de-Cauquessac. Le passage pouvait se faire à Aussecambe, tout près de Calcassac, la voie remontant la pente ouest du versant de la rivière vers Gilhac, puis Esparsac et vers Lectoure. On se trouverait sur une branche Nord de la liaison entre Lectoure et Toulouse, avec franchissement de la Garonne à hauteur du confluent avec la Save.

  • 109 HGL, t. V, col. 363 : vers 1016, usque ad stratum publicam, quae est in Grandesylva.

52Le trajet très ancien entre Toulouse et Agen ne pose guère de problèmes entre cette dernière et Lectoure : cette voie appelée La Peyrigne a joué un rôle important pour Agen. Mais entre Lectoure et Toulouse, plusieurs trajets sont possibles. A partir de Blagnac, et par le nord de la forêt de Bouconne, on gagnait Montaigut et Saint-Paul-sur-Save. Au-delà de Séguenville, passait-on par Le Causé et Faudoas, ou par Sarrant ? On peut concevoir qu’un itinéraire un peu plus septentrional, longeant la Grande Forêt par Aucamville et Bouillac, ait assuré un passage sur la rive droite de la Garonne, au nord de Toulouse. Cela expliquerait un terme trouvé dans une charte du début du XIe siècle : une donation au monastère de Mas-Grenier de l’alleu d’Annonas qui est limité par « la route publique qui est dans la Grande Forêt »109. L’expression de route publique fait référence à une voie très ancienne romaine probablement.

  • 110 11009 f° 25.
  • 111 11009 f° 9.
  • 112 11009 f° 15.

53Au sud de la Lomagne, vers la vicomté de Fezensaguet, c’est-à-dire la Lomagne gersoise, d’autres routes anciennes peuvent être localisées. L’une d’elles se dirigeait du moulin de Tarride à l’église de Vinsac qui était dédiée à Saint-Pierre110 ; elle se prolongeait jusqu’au Serrampion, passait sur un « pont libre », que l’on aille vers Séguenville111 ou vers Drudas112, se raccordant par conséquent à la route en provenance de Montaigut-sur-Save et de Toulouse. Y avait-il là un axe plus méridional pour franchir la Gimone ?

  • 113 Doat 77 f° 167.
  • 114 Doat 77 f° 395 v°.
  • 115 108 H 56 f° 82 v°.
  • 116 Doat 76 f° 388 : en 1168.
  • 117 11008 f° 224 : en 1189.

54Enfin, le chemin de Saint-Jacques bordait tout à fait au Sud les possessions de l’abbaye. Des autorisations de pâturage s’étendaient entre la Save et le chemin, englobant une grande partie de la forêt de Bouconne. En 1180, Pierre d’Orbessan donnait droit de pâturage du Chemin de Saint-Jacques à Vieilaigue et de la Save à la Garonne113 ; en 1187, il ajoutait les herbages, les eaux, entrées et sorties, et l’usage des noix114 dans les mêmes lieux ; et en 1194, la localisation devenait plus complète encore, car on décrivait ainsi, chemin « par lequel les pèlerins ou autres allant à Rome passent pour se rendre de Toulouse à l’Isle-Jourdain, et à Aubinet »115. Il est appelé également Chemin de Toulouse à l’Isle116, ou même Chemin Français117

  • 118 Doat 78 f° 237 et suivants : transaction en date de mars 1228, entre Elie Garin abbé de Grandselve (...)
  • 119 E. Cabié, « L’ancien couvent de Saint-Orens ou de Saint-Jean de Las Monges près de Gimont », RG, 18 (...)

55Il est encore mentionné au XIIIe siècle avec d’autres détails. Près de Gimont, lors du règlement des pâturages entre les deux abbayes : on pouvait franchir la Gimone sur le pont de Saint-Jean-le-Vieux et suivre une vieille voie qui sortait du château de Saint-Jean, de la maison des moniales jusqu’au Pont Romieu du Chemin de Saint-Jacques, puis aller du Pont jusqu’à l’hôpital d’Ambon, et celui de Bestiol et là on circulait sur la route du pèlerinage118. Par la même occasion, on trouve là confirmation de pérennité dans la première moitié du XIIIe siècle du couvent de moniales bénédictines, établi à Saint-Jean dit de Las Monges, et consacré à sainte Marie, saint Jean et saint Orens dès la fin du XIe siècle119.

56Il a paru intéressant de déborder largement le cadre du milieu du XIIe pour mieux faire la distinction entre les régions assez fortement viabilisées comme autour de Montech, au confluent de la Save et de la Garonne ; ou bien faiblement comme toute la bordure de la terrasse occidentale, près de Bouillac, et entre le Serrampion et la Gimone, alors qu’à la fin du XIIIe siècle, les chemins se sont manifestement multipliés.

57Il convient aussi d’introduire un correctif en fonction des textes : ils n’emploient presque exclusivement que le terme de via, ou de strata, qui signifie la route. Par contre ceux de semitarium ou de caminus qui indiquent les sentiers sont très rares. Ils étaient sans doute trop insignifiants pour être seulement mentionnés. Pourtant les campagnes étaient sillonnées par ces innombrables chemins et pistes de desserte, sans âge, et par lesquels on va partout, mais pas très loin, et à condition de ne pas avoir de trop lourdes charrettes. Un véritable chevelu rural évitait le total isolement.

58A côté du sentier de piéton très étroit s’étiraient les carrières (carreira) où les charrettes pouvaient circuler en files, larges de 8 pieds environ, et les voies (via) où deux charrettes pouvaient se croiser, ce qui requerrait une largeur de 16 pieds soit 6 mètres environ avec les fossés et bas-côtés. Les grandes routes romaines continuaient à être utilisées ; on construisait même de nouvelles voies comme à Lassale ; enfin le Chemin de Saint-Jacques qui devait servir tant aux marchands qu’aux pèlerins était très fréquenté, et jalonné d’hospices. Tout cela montre l’extension des échanges, l’activité. Cependant, la route n’était qu’un élément du paysage et hors de sa demeure, l’homme le marquait également par ses cultures et ses troupeaux.

EXPLOITATION ET POSSESSION DU SOL

59La répartition géographique étudiée dans le cadre de chaque grange apporte les nuances régionales des paysages et des structures agraires. Mais il est préférable auparavant d’analyser les données du vocabulaire.

Les éléments du paysage agricole

  • 120 P. Deffontaines, Les hommes et leurs travaux dans les pays de la moyenne Garonne (Agenais, Bas Quer (...)

60La forêt domine le plus souvent, or le terme de silva n’est pas employé : c’est celui de nemus qui désigne une étendue forestière plus réduite, et que le français bois rend mieux. C’est ainsi que la forêt d’Agre n’est pas citée, mais plutôt les bois de Galganta, de Boutanelle qui la composent en partie, auprès de Montech. La seule plantation forestière homogène qui ait un vocable est la chênaie, appelée garrigua, quoique homonyme de garrigue. Le gascon appelle garri le chêne120.

61Plusieurs mots se rapportent à des formes dégradées de végétation, dont il est difficile de savoir quelles associations végétales elles pouvaient représenter : l’élément arboré y est plus ou moins dense, plus ou moins ordonné. Voici les bosquets, les bartes faites de mauvais taillis, les bouzigues de friches ainsi que les brugues où dominent les bruyères. Toutes sont des terres « hermes » c’est-à-dire incultes parce que en friches. La variété du vocabulaire ainsi que sa fréquence d’emploi restent l’indice de la prépondérance des sols non labourés, mais utilisables dans le cadre d’une économie pastorale.

62La géographie introduit ses nuances dans les paysages : les îles sont des zones de divagation de la Garonne, dans sa basse vallée, couvertes de galets. La végétation peu à peu stabilise les berges, mais elles restent souvent inondables, et la forêt y domine le plus souvent. Les étendues marécageuses où les eaux stagnent ou s’écoulent mal portent le nom de nauses. Là, ce sont les prairies naturelles qui poussent le mieux. Les nauses longent donc les cours d’eau et les basses vallées.

63Le terrefort qui est une terre lourde et argileuse a même donné son nom à une région proche de Montech.

  • 121 Toponymie et défrichement médiévaux et modernes en Europe occidentale et centrale, Flaran 8, Auch, (...)
  • 122 9994 f° 8.
  • 123 108 H 56 f° 200 v°.
  • 124 11008 f° 122 v°.

64Mais les hommes interviennent sur ce que la nature avait édifié. Si les terres ensemencées n’ont pas de nom particulier, il y a spécification avec pratum qui est le pré, poussant, naturellement pour cette période du Moyen Age, dans les zones humides. Les vignes sont nommées, mais aussi les maillots (malleolum) qui sont les jeunes vignes, les plantiers. Cette appellation n’est utilisée qu’assez peu souvent dans l’ensemble, pour le milieu du XIIe siècle. Lorsque les hommes augmentent les surfaces cultivées, mordent sur les parties incultes, la terre ainsi valorisée s’appelle, à l’exclusion de tout autre nom, artigue ou artigal121. L’expression « essart » n’est pas employée. Or, on défriche, et des hommes donnent ou vendent des terres déjà mises en état, à l’abbaye : les artigues se rencontrent avec une plus grande fréquence près de Lassale122, surtout sur les nauses, mais aussi le long de la Gimone dans les bois et les nauses ; au nord de l’abbaye le long du Lambon123, et le long du Merdanz124. On était donc au milieu du XIIe siècle en train d’étendre les cultures.

Le mode d’exploitation

65Si le vocabulaire utilise peu de mots, ceux-ci sont par contre très imprécis et ne permettent guère de se faire une idée réelle de la situation. La confusion grandit quand on essaye de cerner le lien avec le grand domaine de la période carolingienne, la villa, si présente dans les noms de lieux. Deux mots dominent : le casal et l’honneur.

  • 125 9994 f° 102 v° : en 1192, elle donne la moitié des honneurs soit le 1/4 des terres de Saint-Laurent (...)
  • 126 9994 f° 77 : en 1182.

66Il n’est pas rare de trouver l’expression suivante : une terre est dans l’honneur, le territoire et le dîmaire de tel endroit, ce qui n’aide guère à la compréhension. Il semble cependant que l’honneur corresponde à une grande propriété car parfois on détaille ce qui la compose et ce sont divers types de terroirs agricoles, ainsi que les bâtiments et édifices divers125. Il était certainement de grande taille, mais c’est difficilement chiffrable. Dans la région de Larra, les biens mentionnés de la sorte couvrent des dizaines d’hectares, ainsi que près de Calcassac, mais cela n’indique pas la totalité de la surface d’un honneur. Le seul cas est celui de Lassale : une donatrice abandonne la 16e partie de l’honneur de Saint-Laurent, soit 13 sétérées, ce qui laisse à supposer que l’honneur, en entier, dépassait les 208 sétérées, c’est-à-dire environ 116 hectares126.

  • 127 Ch. Higounet, L’occupation du sol du pays..., p. 317.
  • 128 108 H 46 f° 2-5.

67Le plus souvent, la donation porte sur une part d’honneur, au moins pour les régions de Lassale et de Vieilaigue ; cela tendrait à prouver qu’il n’y avait plus de grands domaines, mais des plus petites propriétés, dont les exploitants étaient soit de petits propriétaires, soit des tenanciers aux statuts variables. Très manifestement, l’évolution s’était faite depuis le seigneur chef d’exploitation jusqu’au seigneur détenteur de tenures127 Le démembrement d’une vaste villa était déjà très avancé. L’exemple le plus net de ce morcellement se trouve près de La Réole, pour l’honneur de Pest que Grandselve acquit, il est vrai, dans la seconde moitié du XIIIe siècle. En 1266, elle obtient le 1 /6e par testament de Géraud de Séguenville, 1/12e vendu par la chevalier Guilhem de Saubolée en 1267, un l/6e en 1268 vendu par Guilhem de Maurens ; en 1275, elle paie 1000 s. tournois à Géraud de Coubirac pour une autre partie, en 1276, un 1/30e est donné par Garsias de Saubolée, et 1/12e vendu par Dame Farsidas, femme du seigneur Gaillard de Fortina ; en 1284 le 1/60e est acquis de Dame Braydas femme du seigneur Guilhem Arnaud Trota ; en 1287, le 1/ 60e est donné par le seigneur Gautier de Sirac ; soit au total un peu plus de la moitié de l’honneur128. Cette série appelle deux remarques : les patronymes rassemblent toute la fleur de la petite aristocratie des environs et il y a une forte probabilité pour qu’il s’agisse de frères et de sœurs, parents ou cousins. D’autre part, la cause de ce morcellement est rappelée à plusieurs reprises : c’est un bien dans l’indivision et l’abbaye devait obtenir l’un après l’autre les désintéressements des nombreux propriétaires. Cela expliquerait aussi que le terme de casal soit employé deux fois au lieu de celui d’honneur si régulièrement cité.

68Le casal est d’une compréhension non moins difficile. Beaucoup plus petit manifestement que l’honneur, il s’agirait de terre nue, et non d’une exploitation entière, ou de sa partie : bâtiments, composition des terroirs ne sont jamais signalés. L’étude des granges permettra de mettre en relation la multiplicité des casals et le morcellement des honneurs, bien qu’on ne puisse affirmer une relation de cause à effet. A la place des grands domaines s’étaient constitués des agrégats de casals, dont les petits exploitants allaient se regrouper au sein des communautés villageoises.

  • 129 Ch. Higounet, L’occupation du sol du pays..., p. 317, note 82 et 319.
  • 130 P. Ourliac, Les sauvetés de Comminges..., p. 57.

69La taille du casal reste un problème pratiquement insoluble tant les disparités sont énormes. Ch. Higounet cite une superficie de 12 sétérées, soit plus d’une dizaine d’hectares, ce qui correspondrait à la taille des propriétés moyennes actuelles, entre Tarn et Garonne ; mais à Fronton, ils n’étaient que de 6 sétérées lors de la fondation129. Par contre, si on rapproche ces chiffres des casals des sauvetés commingeoises, ils restaient encore de belle taille pouvant porter une unité d’exploitation : ceux des fondations hospitalières n’avaient qu’une dizaine d’ares et n’étaient que de petits enclos avec la 130 maison130.

  • 131 Ch. Higounet, Le comté de Comminges de ses origines à son annexion à la couronne, Paris, Toulouse, (...)
  • 132 M. Berthe, Le comté de Bigorre. Un milieu rural au bas Moyen Age, Paris, 1976, p. 76.
  • 133 P. Tucoo-Chala, Gaston Fébus et la vicomté de Béarn (1343-1391), Bordeaux, 1959, p. 170-171. La que (...)

70On retrouve cette diversité d’appréciation en comparant avec les régions voisines. Dans la chaîne pyrénéenne, en Comminges, le casal est l’équivalent du manse de la France septentrionale et comprend terres, bois et édifices131. En Bigorre, le « casau » est le nom propre de l’exploitation et suivant les lieux varie autour de 5 ha132. Si en Béarn le « casau » est la tenure serve, l’unité agricole est dite « ostau » et recouvre une étendue moyenne de 11 ha133.

  • 134 R. Rumeau, Monographie de Grenade..., p. 76-77, article 2 du paréage.
  • 135 F. Moulenq, Le livre juratoire de Beaumont-de-Lomagne, Montauban, 1888, p. 36.

71En se rapprochant de Grandselve, le problème ne s’éclaire pas davantage. Lors de la fondation de ses deux bastides, au XIIIe, chaque maison avait droit à un petit casal mais aussi à des terres. Casal, alors, n’est plus synonyme que de jardin, d’enclos, par distinction avec les terres labourables. A Grenade où l’on parle d’ailleurs de casalaria et non de casal, la surface est du quart d’un arpent soit 14 ares environ134. A Beaumont, les mille casalaria devaient être utilisés pour planter des vignes, chacun ayant la moitié d’un arpent135. Mais le suffixe – arius indique bien le sens vers la minoration. Au XIXe siècle, le casal, plus grand, ne devait pas avoir seulement quelques ares, mais quelques hectares.

  • 136 11008 f° 220 v° : le 24 mars 1188 : debent casales isti habere duodecim lanceas defraxino in latum.

72Pourtant le doute subsiste à cause du seul texte qui, dans toutes les archives de l’abbaye, parle des dimensions d’un casal. A la fin du XIIe siècle, près de Larra une transaction porte sur des casals ainsi décrits : « ils doivent avoir 12 lances de frêne de large »136. Le moins que l’on puisse dire, c’est que ce n’est pas une unité commode. Très approximativement, on atteindrait une dizaine d’ares ou un peu plus. Ce qui se dégage de tous ces chiffres, c’est l’extrême variabilité de cette appellation, tantôt véritable exploitation sur laquelle une famille peut vivre, tantôt petit champ d’un parcellaire très morcelé.

73Deux derniers termes interviennent dans la désignation des terres, mais beaucoup plus rarement : la couture et la condamine. Ils ont d’ailleurs une signification qui est très voisine, la différence semblant être dans l’utilisation régionale car condamine est employé dans les textes concernant le confluent de l’Hers et de la Garonne et la vallée de l’Ariège, tandis que la couture s’utilise dans toute la partie à l’ouest de la Garonne ainsi qu’entre Tarn et Garonne.

  • 137 P.H. Billy, La condamine, institution agro-seigneuriale : étude onomastique, Niemeyer, 1993.
  • 138 Ch. Higounet, La grange de Vaulerent. Structure et exploitation d’un terroir cistercien de la plain (...)

74Ce sont de grandes pièces de terre qui ont appartenu aux réserves seigneuriales137, dans le grand domaine du haut Moyen Age, alors que les serfs chasés exploitaient des tenures. Ce n’est d’ailleurs pas particulier au Toulousain puisqu’on les trouve aussi bien dans le Bassin Parisien138. Autrefois elles étaient travaillées par des esclaves, d’autres catégories de non-libres et des affranchis.

  • 139 9994 f° 103 v°.
  • 140 9994 f° 127 v°.
  • 141 9994 f° 152 v°.
  • 142 11008 f° 128 v°.
  • 143 11009 f° 3 v°.
  • 144 9994 f° 19 v°.
  • 145 9994 f° 123 v°. J’ai choisi de traduire ainsi le terme de costa vicomtale que rien ne permet de tra (...)
  • 146 11008 f° 215 v°.
  • 147 9994 f° 13 : le 15 septembre 1162.

75L’abbaye reçut un certain nombre de coutures : telles celles de Mazères à Bagnols139, de Toronno au sud de la Save140 et de Maneigvila au Nord141 ; le territoire de Boisville avait celle de La Graulet142 ; enfin, près de Terride, s’étendait la couture de Vinsac143 Mais surtout, trois seigneurs de haut lignage en ont donné : le comte de Toulouse, Alphonse-Jourdain, à Lassale144, le vicomte Adémar de Bruniquel une autre dite vicomtale à Merville145, et Bernard d’Astaffort, la couture vicomtale de Mairas146. Il semble donc qu’il y ait eu par prédilection deux zones de forte concentration : le confluent Save-Garonne-Hers, et la région de Montech, où, en plus de celle du comte, se trouvait une autre en Terrefort, appartenant à Galambrun de Lassale qui en donne à l’abbaye l/6e tenu à cens par Guilhem de La Motte147

76Le rassemblement peut être dû aux lacunes de la documentation car le mot ne se trouve que dans les cartulaires latins, et pour des dates assez anciennes en général. L’inventaire côté 108 H 56, qui rassemble les données sur les autres possessions, ne l’emploie jamais et l’on ne peut donc savoir s’il y avait ou pas de couture en Lomagne et près de l’abbaye. Mais il se peut aussi que ce soit une caractéristique de la vallée de la Garonne où, de plus, elles étaient possédées par des familles comtales ou vicomtales, Toulouse, Bruniquel, Terride (Bernard d’Astaffort étant fils du vicomte de Terride, Armand).

77La présence des grands conduit à poser la question de l’aspect juridique de la propriété. Grands seigneurs, grands domaines, terres fiscales, tout concourt vers une structure fortement hiérarchisée, où les casals sont les corollaires des réserves seigneuriales. Comment cela se traduit-il ?

Structure juridique de la propriété

  • 148 H. Richardot, « Le fief roturier à Toulouse aux XIIe et XIIIe siècles », RHDFE, 1935, p. 312-313.
  • 149 Idem, p. 322-323 et note 1.
    Plusieurs années de séminaires de l’axe 1 à FRAMESPA y ont été consacrée (...)

78Les difficultés de la terminologie, dans ce cas également, ont été soulignées depuis longtemps. Le fief sert à des réalités diverses. La tenure roturière se caractérise par le paiement d’une redevance annuelle, le cens, au seigneur. Celle des nobles est déterminée par l’hommage et c’est la signification plus classique du mot. Mais un serf peut aussi avoir des fiefs, prêter hommage, en plus de sa tenure servile148. Cependant, à côté de l’aspect « féodal » de la possession subsistait en Toulousain, comme dans tout le Midi, le régime romain de la propriété pleine et indépendante. H. Richardot indique les limites concernant l’étude de l’alleu149 : difficultés à dresser un état comparatif des alleux et des fiefs car, en ces temps, des transformations ont pu souvent avoir lieu ; ambiguïtés d’appréciation du terme puisque dans les cartulaires ecclésiastiques le mot est, paraît-il, souvent employé dans l’acception d’immeuble.

79L’alleu est donc surtout la terre libre, sur laquelle ne pèse aucun droit éminent. Dresser la liste des mentions au XIIe siècle est assez illusoire pour une connaissance de leur nombre : il apparaît beaucoup plus utile de voir la répartition géographique. En effet, la citation s’accompagne souvent de considération ainsi libellée : le donateur abandonne sa terre qui est dans l’alleu et territoire de tel endroit. Certaines parties apparaissent allodiales, mais morcelées entre plusieurs possesseurs alleutiers. Quelles sont les principales régions ?

  • 150 9994 f° 18 : le 27 mars 1163, Garsios donne le quart de son alleu, qu’il a en commun avec Pierre Gr (...)
  • 151 9994 f° 30 v° : le 24 octobre 1167, c’est une donation de Géraude, femme de Pons Roger.
  • 152 9994 f° 61 v° : 1e 2 janvier 1178.
  • 153 9994 f° 102 v° : en mai 1192.

80Près de Montech, deux cousins ont un alleu en commun en Terrefort150. Alleu également en Terrefort et Volvena, mais est-ce le même secteur151 ? Pons Bernard et Arnaud son fils promettent tout leur honneur allodial si, inspirés par Dieu, ils entrent dans l’Ordre et si Arnaud meurt sans enfant152. Mais le plus vaste était sans doute celui de Saint-Laurent dont Sasneus, femme de Guilhem de Castelnau donna « la moitié des honneurs, soit le quart des terres »153. Par ailleurs, d’autres références ont pu être localisées.

  • 154 9994 f° 157 v° : alleu inféodé par Fons, abbé de Saint Sernin en septembre 1175.
  • 155 9994 f° 166 v° : le 15 octobre 1183.

81Au confluent de l’Hers et de la Garonne, l’abbaye de Saint-Sernin avait un alleu qu’elle inféoda à Grandselve en 1187154 ; en 1183 Pierre Vidal de Saint-Jory donna à Grandselve la terre qu’il tenait en fief de Saint-Sernin, située entre la Garonne morte et l’alleu de Saint-Jory155.

  • 156 9994 f° 155 v° : vendus par Roger de Paites et sa famille en septembre 1178.
  • 157 Doat 79 f° 242 : Grandselve devait payer le cens qui se montait à 3 sous morlans par an à la Toussa (...)

82Sur la rive gauche du fleuve, au confluent avec la Save, le nord de la rivière regroupe les alleux de Maneigvila, Sètes et Noguer Anar qui furent vendus pour 320 s.156. On peut se demander si, là aussi, ce n’était pas un monastère qui avait été propriétaire alleutier, ayant ensuite inféodé son bien car, en 1272, entre le prieur de Saint-Orens d’Auch et Grandselve, fut prononcée une sentence arbitrale. Saint-Orens ne pouvait reprendre ses fiefs même si Grandselve ne payait pas les cens dus, puisque les fiefs étaient perpétuels ; or il s’agissait des territoires et églises de Maneigvilla, Noguer Anar et Sètes, avec les alleux et leurs appartenances, et tous les droits (dîmes, prémices et autres)157

  • 158 11008 f° 184 v° : en août 1174.
  • 159 11008 f° 207 : en juin 1187.
  • 160 1100B f° 222 : en avril 1157, et en 1189.
  • 161 Doat 78 f° 338 : en juin 1254.
  • 162 Doat 78 f° 344 : en juin 1254.
  • 163 Arch. départ. Tam-et-Garonne, A 297, Saume de l’Isle, f° 116 v°, en janvier 1243.
  • 164 108 H 46 f° 68 : en 1236.
  • 165 Doat 78 f° 189 : en novembre 1209.
  • 166 108 H 46 f° 24 : en juin 1288.
  • 167 Doat 76 f° 104 v° : en janvier 1191.
  • 168 Doat 78 f° 259 : en juillet 1230.

83Sur la moyenne terrasse, et à ses pieds, les alleux sont assez nombreux. Si celui de Boisville est un peu au bord de la Save158, les autres sont tous au Sud, entre la Save et le chemin de Saint-Jacques, à Daux159, Pibrac, Saint-Jean et Gorgalderio160, Bracoac161, Gojac, Tirapel et la Voulte162, Mondonville163. Plus au Nord, en se rapprochant de l’abbaye, on trouvait ceux d’Aussiac164, du Burgaud165, de Saint-Salvy166 ; tout près celui de Ricancelle167et près de Verdun celui de Villenaysague168.

  • 169 Doat 78 f° 32.
  • 170 108 H 46 f° 39.

84Pour le reste des possessions de l’abbaye, les indications sont rares, mais c’est sans doute une lacune de la documentation. A part celui de Lescout169 et celui de Montagnac170, il n’y a pas d’alleu nommé.

  • 171 H. Richardot, Le fief roturier..., p. 323, note 1.

85Le nombre élevé de lieux allodiaux montre que ce type de propriété était vivace, même si la signification tout à fait précise n’est pas connue. Il est, bien sûr, impossible d’établir le rapport entre ces terres et toutes les autres, comme de chiffrer leur superficie. Mais la dénomination d’une terre dans « le territoire et l’alleu » d’un lieu, ou « l’honneur et l’alleu » de tel autre laisse plutôt supposer une grande taille. Or H. Richardot estimait qu’ils étaient de petites tailles, mais nombreux171 : plus au nord de Toulouse, ils auraient donc été plus vastes. D’autre part, selon toute vraisemblance, tout paysan pouvait être mialleutier, mi-tenancier.

  • 172 M. Berthe, Le comté de Bigorre..., p. 139.
  • 173 Il n’est de plus pas du tout assuré que le terme ait les mêmes sens aux XIIe -XIIIe siècles et aux (...)

86Si on compare avec les régions voisines, la synthèse des connaissances actuelles a été faite par M. Berthe qui estime qu’en Bigorre l’alleu était inférieur à 10 % des possessions, ressemblant en cela au Comminges, alors qu’il était extrêmement rare en Béarn aux XIVe et XVe siècles ; par contre, la proportion était plus élevée en Bordelais (environ 10 %)172. Il y a de fortes chances pour que les régions avec lesquelles Grandselve fût en contact connaissaient une proportion équivalente à la Bigorre et au Comminges173.

87Il se peut que le déséquilibre entre Lomagne et vallée de la Garonne ne soit pas dû uniquement aux caractéristiques de la documentation. Les deux régions pouvaient connaître un régime assez différent. Le pullulement des châteaux gascons au XIIIe siècle a peut-être des liens avec un recul de l’alleu contemporain ; or, il n’y a presque pas de textes portant sur le XIIe siècle. Pour cette raison, les exemples d’alleux dans la vallée de la Garonne ont aussi été relevés pour le XIIIe siècle, et l’on ne remarque pas de disparition de l’alleu, ni de développement des châteaux, comparables à la Gascogne.

  • 174 R. Boutruche, Une société provinciale en lutte contre le régime féodal. L’alleu en Bordelais et Baz (...)

88A examiner les possessions de l’abbaye, on se rend compte à quel point elle recherche ce genre de propriétés, dégagées de toute redevance seigneuriale et de tout service féodal. On peut lui appliquer cette appréciation que R. Boutruche portait sur le Bordelais et le Bazadais ; « L’Eglise mène la course aux terres libres et aux revenus allodiaux »174. On peut aussi se demander dans quelle mesure elle n’a pas cherché à libérer ce qui ne l’était pas et à modifier le régime de la propriété.

CONCLUSION

89Au cours du XIe siècle et du début du XIIe siècle s’était opéré ce qu’on pourrait appeler une révolution silencieuse. Silencieuse dans la mesure où les documents manquent pour éclairer un certain nombre de transformations profondes, leurs causes précises, et leur déroulement chronologique. A la suite de plusieurs facteurs, dont sans doute une forte poussée démographique, la population de la Gascogne et du Toulousain a entrepris une extension des terres cultivées qui a commencé à mordre sur les friches et les bois, alors que ceux-ci constituaient une très grande partie du paysage,

90Cela se traduit par divers aspects : si on ne peut tracer avec exactitude le recul de la forêt, on peut constater le morcellement des grands domaines, la multiplicité des casals, les fondations de sauvetés et de castelnaux qui regroupent toute une population éparse et structurent l’habitat. Les anciennes voies de communications servent toujours et même, on en ouvre de nouvelles.

  • 175 Pour élargir la comparaison, deux thèses ont abordé d’autres régions proches : Fl. Hautefeuille, St (...)

91Mais il faut cependant introduire des nuances régionales : la région de Montech et le confluent de la Save et de la Garonne sont nettement humanisés, viabilisés, l’infrastructure ancienne a subsisté, et de plus ce sont des passages obligés où les hommes s’étaient rassemblés depuis longtemps. Vers Bouillac et Beaupuy, où s’installa l’abbaye, la structuration était moins forte. La pression démographique y a été plus faible, ou la population y était plus clairsemée dans un milieu très boisé. Pourtant les habitants occupaient de manière diffuse toute cette partie à la limite entre deux provinces. Du côté de la Lomagne, les renseignements manquent pour mieux éclairer la situation. L’abbaye fut fondée non pas dans une zone déserte, mais dans un milieu peu dense quoique à proximité de nombreux petits centres de peuplement175.

  • 176 Ch. Higounet, Pour l’histoire de l’occupation du sol..., p. 385.

92Ce mouvement de conquête et de colonisation avait marqué le pas vers le milieu du XIIe siècle. Les principales causes ont pu être les difficultés de mise en valeur de terres ingrates, un moindre accroissement démographique, et aussi le mouvement de migration vers l’Espagne en cours de reconquête176. Il est possible que la communauté religieuse installée à un moment d’expansion ait connu par la suite un ralentissement jusque vers les armées 1150-1155. Le nombre assez faible de documents provient soit de la non-conservation dans les archives, soit d’une certaine récession.

  • 177 Les ordres militaires, la vie rurale et le peuplement en Europe occidentale (XIIe-XVIIIe siècles), (...)

93Si les hommes ont fourni le travail, le rôle des établissements religieux a été très remarquable dans cette région. Les bénédictins de Moissac et de Conques étaient solidement implantés sur la rive droite de la Garonne. Si leur présence était surtout passive (Moissac étant un très grand propriétaire foncier), ce n’est pas le cas des Hospitaliers qui fondèrent de nombreuses sauvetés tant au nord du Comminges et dans la forêt de Bouconne qu’à proximité de Montech et de la forêt d’Agre. Avec les Templiers, ils firent progresser les défrichements177.

  • 178 J.M. Garric s’est attaché à mener des comparaisons systématiques entre les deux abbayes : L’abbaye (...)

94Dans tous ces cas, les ordres ont un rôle humain évident, mais économique direct beaucoup moins caractéristique. Ils agissent en quelque sorte en tant que rentiers du sol. L’action des cisterciens est différente. Deux monastères sont établis, très près l’un de l’autre, Belleperche et Grandselve, dans un milieu également réceptif178. Tous deux ont un mode d’exploitation original puisqu’il s’agit du faire-valoir direct et tous deux vont participer très activement et très immédiatement aux travaux en cours. Or, ils étaient sans concurrence dans cette boucle de la Garonne, les autres établissements se localisant plus à l’Est ou plus au Sud.

95La situation non loin de grands axes de communication rappelle une des fonctions des ordres qui étaient l’accueil du voyageur. Si les Clunisiens et les Hospitaliers étaient célèbres pour cela, les cisterciens et Grandselve s’y consacrèrent également. Dans l’hypothèse de l’existence d’une branche Nord de la route Toulouse-Garonne-Lectoure, l’abbaye se trouvait à quelques centaines de mètres de la voie et a pu offrir l’hospitalité et jouer ce rôle de relais sur un trajet peu commode.

96Deux caractères très originaux ont continué à marquer le XIIe et même une grande partie du XIIIe siècle : le maintien de l’alleu, en tant que propriété libre, pleine et entière, en particulier sur les plaines de la vallée de la Garonne – et l’abbaye a obtenu un bon nombre de terres allodiales. Ce fut aussi la multiplication des châteaux sur les versants gascons, signes d’une petite et moyenne aristocratie cherchant à surmonter des difficultés économiques par un regroupement plus efficace des populations et une meilleure perception de redevances diverses. L’abbaye se trouvait là à la limite de deux régions, comme elle l’était déjà d’un point de vue géographique, non qu’il n’y ait pas de château dans la vallée garonnaise, ni d’alleu en Lomagne, mais comme phénomènes très minoritaires pour quelques raisons dont le maintien de la puissance comtale.

97L’abbaye obtint en effet des terres issues du patrimoine des grandes familles, pièces de la réserve seigneuriale, de grande taille. Ces terres du fisc ont plusieurs fois constitué le noyau d’une exploitation, la base d’un grand domaine, sous la forme si spécifique comme unité économique, que représente la grange.

Notas

1 J.B. Mahn, L’ordre cistercien et son gouvernement des origines au milieu du XIIIe siècle (1098-1265), Paris, 1951, p. 51.

2 G. Despy, « Les richesses de la terre : Cîteaux et Prémontrés devant l’économie de profit aux XIIe et XIIIe siècles », Revue de l’Université de Bruxelles, 1975, n° 4, p. 400-422. L’auteur a fait la mise au point sur les abbayes de Basse-Lotharingie.

3 Il convient maintenant d’être plus prudent et de rapporter cette approche toponymique aux noms attestés dans les cartulaires. Croiser archéologie et toponymie reste à faire systématiquement, comme le montrent les travaux de P.H. Billy, « Toponymie et archéologie : essai méthodologique sur la Basse-Auvergne », Nouvelle revue d’onomastique, n° 27-28, 1996, p. 147-168 ; et ceux d’E. Zadora-Rio, « Archéologie et toponymie : le divorce », Les petits cahiers d’Anatole, n° 8, 2001, adresse internet http://www.univ-tours.fr/lat/pdf/F2_8.pdf.

4 M. Roblin, « L’habitat rural dans la vallée de la Garonne de Boussens à Grenade », Revue géographique des Pyrénées et du Sud-Ouest, t. VIII, 1937, p. 5-72 ; Ch. Higounet, « L’occupation du sol du pays entre Tarn et Garonne au Moyen Age », AM, 1953, p. 301-330.

5 M. Roblin, L’habitat rural..., p. 18, et suivantes.

6 En raison des très nombreuses fouilles, liées en particulier à l’archéologie préventive, le bilan est à recommencer en se servant en particulier de la carte archéologique en Midi-Pyrénées.

7 H. Gavel, « Chronique de toponymie. Le Toulousain méridional », Revue des Etudes Anciennes, 4e série, t. 39,1937, p. 372.

8 Ch. Higounet, « Pour l’histoire de l’occupation du sol et du peuplement de la France du Sud-Ouest, du XIe au XIVe siècle », dans Paysages et villages neufs du Moyen Age, Bordeaux, 1975, p. 377.

9 Ch. Higounet, L’occupation du sol du pays..., p. 311.

10 G. Pradalié a repris toute cette question dans « La ville des Francs », dans M. Taillefer, Nouvelle histoire de Toulouse, Privat, Toulouse, 2002, p. 44-59.

11 Ch. Higounet, L’occupation du sol du pays..., p. 312.

12 Lancées par Ch. Higounet, puis relayées dans tout le Midi, les recherches sur ces formes d’habitat se sont multipliées à un point tel qu’il ne saurait être question d’en rendre totalement compte. B. Cursente a effectué une grande synthèse dans « Les villages et paysages du Midi médiéval en recherche (1971-2001) », dans B. Cursente (dir.), Habitats et territoires du Sud, CTHS, Paris, 2004, p. 15-29. Retenons quelques jalons dans cette abondante production, autres que ceux utilisés dans ce chapitre, et pour simple mémoire : Châteaux et peuplements en Europe occidentale du Xe au XVIIIe siècle, Flaran 1, Auch, 1980 ; B. Cursente, « Castra et castelnaux dans le Midi de la France (XIe-XVe siècles) », Châteaux et peuplements en Europe occidentale du Xe au XVIIIe siècle, Flaran 1, Auch 1980, p. 31-55 ; D. Baudreu, J.P. Cazes, « Le rôle des églises dans la formation des villages médiévaux. L’exemple des pays audois », Heresis, n° 2, 1991, p. 139-158 ; P. Bonnassie, « Les sagreres catalanes : la concentration de l’habitat dans le « cercle de paix des églises (XIe s.) », dans M. Fixot, E. Zadora-Rio (dir.), L’environnement des églises et la topographie religieuse des campagnes médiévales, Paris, DAF, 1994, p. 68-79 ; réed, Les sociétés de l’an Mil. Un monde entre deux âges, De Boeck, Bruxelles, 2001, p. 285-315 ; B. Cursente, « Eglise et habitat dans les villages gascons : quelques aspects topographiques (XIe-XIVe s.) », dans M. Fixot, E. Zadora-Rio (dir.), L’environnement des églises et la topographie religieuse des campagnes médiévales, Paris, DAF, 1994, p. 122-130 ; A. Catafau, Les celleres et la naissance du village en Roussillon (Xe-XVe siècles), PU Perpignan, 1998 ; M. Berthe, B. Cursente (éd.), Villages pyrénéens, CNRS-UTM, 2001 ; D. Baudreu, « Formes et formation des villages médiévaux dans le bassin de l’Aude », dans B. Cursente (dir.), Habitats et territoires du Sud, CTHS, Paris, 2004, p. 65-89.

13 P. Ourliac, « Les sauvetés de Comminges. Etudes et documents sur les villages fondés par les Hospitaliers dans la région des coteaux commingeois », Revue d’Académie de législation, 1947, p. 25. Réédité dans Etudes d’histoire du droit médiéval, Paris 1979, p. 31-111.

14 P. Ourliac, « Les villages de la région toulousaine », A. ESC, 1949, p. 272. Une synthèse fournie reste à faire ; G. Loubès et B. Cursente s’y sont attachés pour le département du Gers : Villages gersois. I. Autour de l’église, à l’ombre du château, Chambre d’Agriculture du Gers, Auch, 1991.

15 Ch. Higounet, « Les chemins de Saint Jacques et les sauvetés de Gascogne », AM, 1951, p. 297.

16 F. Moulenq, Documents historiques sur le Tarn-et-Garonne, Montauban, 1879, t. IV, p. 127.

17 F. Hautefeuille, Structures de l’habitat rural et territoires paroissiaux en bas-Quercy et haut-Toulousain du VIIe au XIVe siècle, thèse, Toulouse, 1998, manuscrit. Il étudie chaque commune du Bas-Quercy dont La Ville-Dieu.

18 Doat 78 f° 175 : le 24 février 1205, Raymond VI comte de Toulouse dorme à l’abbaye une place dans le château de Verdun pour y bâtir une maison à la Salvetat de Dehors, entre la maison de Salomon le juif, et l’emplacement de Raymond Peytavin. Le comte accordait aussi sa protection sur cette maison et tous ses biens, avec tout ce que les moines y feraient porter.

19 G. Pradalié, « Les sauvetés castrales », Cadre de vie et société dans le Midi médiéval, Hommage à Charles Higounet, Annales du Midi, jv-juin 1990, p. 29-34.

20 P. Ourliac, Les sauvetés de Comminges..., p. 68 et 86.

21 B. Cursente, Les castelnaux de la Gascogne médiévale, Bordeaux, 1980, p. 32.

22 Doat 76 f° 104 v° : en 1191.

23 108 H 56 f° 176, mais attesté en 1282.

24 108 H 56 f° 93 : en 1194.

25 11008 f° 190 : le château de Naufeld (11008 f° 133 v°), non identifié, se trouvait au nord-ouest de la grange de Larra.

26 Doat 77 f° 179 : en 1188.

27 Doat 78 f° 175 : en 1205.

28 Doat 77 f° 237 : en 1182.

29 9994 f° 27 : en 1165.

30 Doat 76 f° 66.

31 B. Cursente, Les castelnaux..., p. 70.

32 Doat 79 f° 203 : en 1267.

33 108H 6 : en juin 1230.

34 108 H 56 f° 339 : en 1236.

35 108 H 56 f° 348 v° : en 1292.

36 108 H 56 f° 347.

37 108 H 46 f° 43 : en 1172.

38 11009 f° 2 bis : en 1172.

39 Doat 78 f° 237 : en 1228.

40 Doat 79 f° 203 : en 1267.

41 B. Cursente, Les castelnaux..., p. 89.

42 Doat 77 f° 251 : le 23 septembre 1182.

43 Doat 77 f° 179 : en 1188.

44 Ch. Higounet, L’occupation du sol du pays..., p. 322.

45 11008 f° 225 : en décembre 1180.

46 9994 f° 160 v° : en mai 1181.

47 108 H 56 f° 347.

48 Doat 76 f° 87.

49 Doat 76 f° 88 : le 18 mars 1165.

50 Doat 76 f° 89 : le 18 mai 1173, il donnait tout ce qu’il avait au territoire de Boisville, en terres cultes et incultes.

51 Doat 76 f° 121 : Donat d’Albarils donne tout son droit sur les terres données par Pierre de Bessens à Grandselve, à Boisville, le 26 juin 1161 ; Doat 76 f° 124 : à la même date, Guilhem de Valers, sa femme Marie et son fils Arnaud, donnaient tous leurs droits sur les biens donnés par Pierre de Bessens et Armand de Verdun à Grandselve, à Boisville.

52 Doat 76 f° 231 : en juillet 1163, Armand, portant alors le titre de vicomte de Terride, alors malade et à Grandselve, donne à l’abbaye les terres cultes et incultes de Boisville. Ses trois fils Bernard d’Astaffort, Arnaud de Montaigut et Guilhem de Verdun confirmaient la donation.

53 M. Roblin, L’habitat rural..., p. 72.

54 M. Bourin, P. Chareille (éd.), Genèse médiévale de l’anthroponymie moderne, t. III, Enquêtes généalogiques et données prosopographiques, Publications de l’Université de Tours, 1994.

55 Ch. Higounet, « Mouvements de population dans le Midi de la France du XIe au XVe siècle, d’après les noms de personne et de lieu », A. ESC, 1953, p. 10.

56 Ch. Higounet, « Le peuplement de Toulouse au XIIe siècle », AM, 1942-1943, p. 494.

57 Ch. Higounet, Mouvements de population..., p. 3-6.

58 9994 f° 207 : Guilhem Arnaud d’Espagne en 1179.

59 Doat 77 f° 190 v° : en 1200.

60 108 H 56 f° 351.

61 Ch. Higounet, Mouvements de population..., p. 9.

62 9994 f° 198 : le 23 octobre 1167.

63 9994 f° 23 v°.

64 9994 f° 52.

65 9994 f° 84

66 9994 f° 19 v°et 84.

67 9994 f° 39 v°

68 9994 f° 64 : carreria vetus.

69 9994 f° 27.

70 9994 f° 7 : calsata nova

71 9994 f° 29.

72 9994 f° 44.

73 9994 f° 15.

74 Doat 79 f° 288.

75 Arch. départ. Tarn-et-Garonne, A 297, Saume de l’Isle, f° 566 v° : en 1309.

76 A. Galabert, Monographie d’Aucamville, Montauban, 1890, p. 10.

77 9994 f° 119 : via vetus.

78 9994 f° 109 v°.

79 108 H 53 : attestée au XIIIe siècle.

80 9994 f° 155 v°.

81 11008 f° 146 v°.

82 11008 f° 133 v°.

83 11008 f° 214.

84 108 H 53.

85 Doat 79 f° 308.

86 108 H 56 f° 104.

87 108 H 56 f° 97.

88 108 H 56 f° 207 v°.

89 108 H 56 f° 107.

90 108 H 56 f° 178 v°.

91 108 H 56 f° 166.

92 108 H 56 f° 235 : il est appelé chemin public.

93 108 H 56 f° 129.

94 108 H 56 f° 192 v° : appelé aussi chemin public.

95 108 H 56 f° 417 v°.

96 108 H 56 f° 432.

97 108 H 56 f° 431.

98 108 H 56 f° 430 v°.

99 108 H 56 f° 432.

100 108 H D6 f° 343 v°.

101 108 H 56 f° 341.

102 108 H 56 f° 403 v°.

103 Doat 77 f° 251 : le 23 sept 1182.

104 Doat 78 f° 314.

105 108 H 56 f° 340 v°.

106 L’Homme et la route en Europe occidentale au Moyen Age et aux Temps Modernes, Flaran 2, Auch, 1982.

107 108 H 56 f° 351 : donation en 1166 par Bertrand de Tudel.

108 108 H 56 f° 351 : donation, le 24 mai 1259, d’un casal à proximité du pont.

109 HGL, t. V, col. 363 : vers 1016, usque ad stratum publicam, quae est in Grandesylva.

110 11009 f° 25.

111 11009 f° 9.

112 11009 f° 15.

113 Doat 77 f° 167.

114 Doat 77 f° 395 v°.

115 108 H 56 f° 82 v°.

116 Doat 76 f° 388 : en 1168.

117 11008 f° 224 : en 1189.

118 Doat 78 f° 237 et suivants : transaction en date de mars 1228, entre Elie Garin abbé de Grandselve et Auriol abbé de Gimont, entre les mains de Vidal abbé de Berdoues.

119 E. Cabié, « L’ancien couvent de Saint-Orens ou de Saint-Jean de Las Monges près de Gimont », RG, 1895, p. 455. L’auteur a localisé le couvent et le texte recueilli par Doat confirme l’identification proposée.

120 P. Deffontaines, Les hommes et leurs travaux dans les pays de la moyenne Garonne (Agenais, Bas Quercy), Lille, 1932, p. XXI.

121 Toponymie et défrichement médiévaux et modernes en Europe occidentale et centrale, Flaran 8, Auch, 1988.

122 9994 f° 8.

123 108 H 56 f° 200 v°.

124 11008 f° 122 v°.

125 9994 f° 102 v° : en 1192, elle donne la moitié des honneurs soit le 1/4 des terres de Saint-Laurent, cultes et incultes, tous les droits, édifices et bâtiments.

126 9994 f° 77 : en 1182.

127 Ch. Higounet, L’occupation du sol du pays..., p. 317.

128 108 H 46 f° 2-5.

129 Ch. Higounet, L’occupation du sol du pays..., p. 317, note 82 et 319.

130 P. Ourliac, Les sauvetés de Comminges..., p. 57.

131 Ch. Higounet, Le comté de Comminges de ses origines à son annexion à la couronne, Paris, Toulouse, 1949, p. 430.

132 M. Berthe, Le comté de Bigorre. Un milieu rural au bas Moyen Age, Paris, 1976, p. 76.

133 P. Tucoo-Chala, Gaston Fébus et la vicomté de Béarn (1343-1391), Bordeaux, 1959, p. 170-171. La question des maisons a été entièrement reprise par B. Cursente, Des maisons et des hommes : la Gascogne médiévale (XIe-XVe s.), Toulouse, PUM, 1998.

134 R. Rumeau, Monographie de Grenade..., p. 76-77, article 2 du paréage.

135 F. Moulenq, Le livre juratoire de Beaumont-de-Lomagne, Montauban, 1888, p. 36.

136 11008 f° 220 v° : le 24 mars 1188 : debent casales isti habere duodecim lanceas defraxino in latum.

137 P.H. Billy, La condamine, institution agro-seigneuriale : étude onomastique, Niemeyer, 1993.

138 Ch. Higounet, La grange de Vaulerent. Structure et exploitation d’un terroir cistercien de la plaine de France. XIIe-XVe siècles, Paris 1965.

139 9994 f° 103 v°.

140 9994 f° 127 v°.

141 9994 f° 152 v°.

142 11008 f° 128 v°.

143 11009 f° 3 v°.

144 9994 f° 19 v°.

145 9994 f° 123 v°. J’ai choisi de traduire ainsi le terme de costa vicomtale que rien ne permet de traduire par ailleurs, le vocable n’étant pas attesté. Or Jean-Loup Abbé a trouvé comme mention uniquement le premier compoix conservé de Saint-Guilhem, sans date, vraisemblablement vers 1400 (Arch. Départ. Hérault, 170 EDT CC 1). La costa, au sens indéterminé, représente 2,5 % des biens agraires contenus dans le compoix, soit 9 mentions sur 360. Cf. communication de J.-L. Abbé, V. Challet, « Du territoire à la viguerie : espaces construits et espaces vécus à Saint-Guilhem-le-Désert à la fin du Moyen Âge », Espaces vécus/espaces institutionnalisés : Rencontre autour de Monique Bourin, Béziers, 14-15 octobre 2005.

146 11008 f° 215 v°.

147 9994 f° 13 : le 15 septembre 1162.

148 H. Richardot, « Le fief roturier à Toulouse aux XIIe et XIIIe siècles », RHDFE, 1935, p. 312-313.

149 Idem, p. 322-323 et note 1.
Plusieurs années de séminaires de l’axe 1 à FRAMESPA y ont été consacrées, tant la question se révèle complexe. Le terme que j’ai employé de « subsister » est manifestement hors de propos tant la question de la pénétration du droit romain est difficile. Il y aurait d’ailleurs tout un travail sur la tenure, à mener à partir des archives de Grandselve, et que je n’avais pas abordé initialement.

150 9994 f° 18 : le 27 mars 1163, Garsios donne le quart de son alleu, qu’il a en commun avec Pierre Granet son cousin.

151 9994 f° 30 v° : le 24 octobre 1167, c’est une donation de Géraude, femme de Pons Roger.

152 9994 f° 61 v° : 1e 2 janvier 1178.

153 9994 f° 102 v° : en mai 1192.

154 9994 f° 157 v° : alleu inféodé par Fons, abbé de Saint Sernin en septembre 1175.

155 9994 f° 166 v° : le 15 octobre 1183.

156 9994 f° 155 v° : vendus par Roger de Paites et sa famille en septembre 1178.

157 Doat 79 f° 242 : Grandselve devait payer le cens qui se montait à 3 sous morlans par an à la Toussaint, et si Saint Orens était lésée, elle devait donner 2 sous de plus à la Nativité de la Vierge en septembre ; et aux 6 d. d’acapte s’en ajouteraient 6 de plus.

158 11008 f° 184 v° : en août 1174.

159 11008 f° 207 : en juin 1187.

160 1100B f° 222 : en avril 1157, et en 1189.

161 Doat 78 f° 338 : en juin 1254.

162 Doat 78 f° 344 : en juin 1254.

163 Arch. départ. Tam-et-Garonne, A 297, Saume de l’Isle, f° 116 v°, en janvier 1243.

164 108 H 46 f° 68 : en 1236.

165 Doat 78 f° 189 : en novembre 1209.

166 108 H 46 f° 24 : en juin 1288.

167 Doat 76 f° 104 v° : en janvier 1191.

168 Doat 78 f° 259 : en juillet 1230.

169 Doat 78 f° 32.

170 108 H 46 f° 39.

171 H. Richardot, Le fief roturier..., p. 323, note 1.

172 M. Berthe, Le comté de Bigorre..., p. 139.

173 Il n’est de plus pas du tout assuré que le terme ait les mêmes sens aux XIIe -XIIIe siècles et aux XIVe-XVe siècles, sans compter les très fortes probabilités de grandes évolutions en la matière.

174 R. Boutruche, Une société provinciale en lutte contre le régime féodal. L’alleu en Bordelais et Bazadais du XIe au XVIIIe siècle, Rodez, 1947, p. 87.

175 Pour élargir la comparaison, deux thèses ont abordé d’autres régions proches : Fl. Hautefeuille, Structures de l’habitat rural et territoires paroissiaux en bas-Quercy et haut-Toulousain du VIIe au XIVe siècle, thèse, Toulouse, 1998, manuscrit et J.P. Cazes, Habitat et occupation du sol en Lauragais audois au Moyen Age, thèse, Toulouse, 1998, manuscrit.

176 Ch. Higounet, Pour l’histoire de l’occupation du sol..., p. 385.

177 Les ordres militaires, la vie rurale et le peuplement en Europe occidentale (XIIe-XVIIIe siècles), Flaran 6, Auch, 1986 ; A. Luttrell, L. Pressouyre (dir.), La commanderie : institution des ordres militaires dans l’Occident médiéval, CTHS, Paris, 2002.

178 J.M. Garric s’est attaché à mener des comparaisons systématiques entre les deux abbayes : L’abbaye cistercienne Notre-Dame de Belleperche en Lomagne (Tarn-et-Garonne). Son histoire, Albias, Les éditions Le Mont de Saule, 1997 ; L’abbaye cistercienne Notre-Dame de Belleperche en Lomagne (Tarn-et-Garonne). Architecture et décor, Albias, Les éditions Le Mont de Saule, 1999.

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