Précédent Suivant

Le « dégoût » de la noblesse française à l’égard de la croisade à la fin du xiiie siècle

p. 17-30


Texte intégral

1Comment expliquer que la croisade de Tunis conduite par Saint Louis en 1270 ait été la dernière expédition de grande ampleur avant la chute d’Acre, en 12911 ? Comment expliquer que la chute des derniers établissements chrétiens en Terre sainte n’ait pas été suivi d’un mouvement de fond comparable à l’élan de la Première croisade ? Comment se fait-il que, vers 1300, le secours à la Terre sainte soit en passe de devenir seulement un thème de réflexion pour les beaux esprits de l’époque, à l’image d’un Pierre Dubois ?

2Une des explications souvent mises en avant par les historiens tient au dégoût qui aurait saisi la noblesse à l’égard de la croisade. L’objectif de cette étude est de tester la fiabilité de cette hypothèse, à travers le cas français – la noblesse française étant traditionnellement la plus impliquée dans les croisades.

3À y regarder de près, ce n’est que par un réflexe téléologique qu’on estime que les grandes puissances occidentales ne tentèrent rien pour sauver la Terre sainte : à la suite de Saint Louis, les rois de France Philippe III et Philippe IV se firent un devoir d’entretenir des troupes en Terre sainte, qui défendirent Acre jusqu’à la fin ; tout au long de la décennie 1270, jusqu’à ce que la dégradation de la situation internationale devienne irréversible, Philippe III prépara activement une nouvelle croisade, de pair avec son oncle Charles d’Anjou, le roi de Sicile ; ce dernier, qui avait acquis le titre de roi de Jérusalem, était activement soutenu en Terre sainte par les gens du roi de France ainsi que par les ordres militaires, composés surtout de Français – le maître du Temple lui-même, Guillaume de Beaujeu, cousinait avec les Capétiens. En d’autres termes, les successeurs de Saint Louis n’abandonnèrent pas ce qui restait de la Terre sainte : autant que la situation politique en Europe occidentale leur en laissa le loisir, ils fournirent un effort constant et coûteux pour en assurer la défense2.

4C’est à la fin du xiiie siècle, de fait, que l’effort en faveur de la croisade aurait pu devenir le plus massif et le plus structuré, à la faveur du renforcement contemporain des États monarchiques (France, Angleterre, royaume angevin), dont les moyens devenaient énormes, et alors même que la papauté prêchait inlassablement et, semble-t-il, sincèrement, la croisade. La croisade de Saint Louis contre Tunis ou celle de Philippe III contre le roi d’Aragon, de fait, mobilisèrent des armées importantes, renforcées d’une flotte propre, financées par les décimes dont la perception atteignit sans doute son rendement maximum3.

5Du coup, à la fin du xiiie siècle, plusieurs centaines et même sans doute plusieurs milliers de chevaliers français furent des croisés. On possède des chartes rédigées à la veille d’un départ outre-mer qui sont très proches de celles des croisés du xiie siècle4. En 1248, Joinville, avant de partir pour la croisade, reçut de l’abbé d’un monastère voisin l’écharpe et le bâton de pèlerin et se rendit ensuite en pèlerinage à Blécourt et à Saint-Urbain5. Ceux qui suivirent Charles d’Anjou en Italie, Saint Louis à Tunis, Philippe III en Catalogne, portaient la croix sur leur manteau. C’est à cette époque, sans doute, que la définition par l’Église du statut de croisé fut portée à son degré de raffinement le plus achevé.

6Par ailleurs, le « dégoût » pour la croisade n’était pas un renoncement à la guerre, bien au contraire. En Méditerranée se poursuivait une forte activité militaire, ainsi qu’en Aragon, en Italie, en Sicile, en Grèce, sous des climats souvent difficiles pour les hommes du Nord, et alors que la croisade outre-mer, à destination de la Syrie franque, était abandonnée dans les faits.

7En un sens, c’est bien la multiplication des théâtres d’opération en Méditerranée qui a entraîné la chute d’Acre. L’effort en faveur de la Terre sainte reposait essentiellement sur les successeurs de Saint Louis, les autres rois se contentant le plus souvent de bonnes paroles, à l’image par exemple du roi d’Angleterre Édouard Ier, qui réussit à se faire passer pour le héros de la croisade. En guerre avec la Castille de 1277 à la fin de son règne, avec l’Aragon à partir de 1282, Philippe III dut en outre envoyer des troupes en Romagne, au service du pape Martin IV (1282-1283), puis au secours de Charles d’Anjou, confronté aux Vêpres siciliennes (mars 1282). La croisade d’Aragon (printemps-été 1285), au terme de laquelle Philippe III tomba malade et mourut, et le règlement de ses conséquences, absorbèrent Philippe le Bel dans les premières années de son règne, tandis que le royaume angevin, soutenu à bout de bras par les rois de France, se révélait un poids plus qu’un atout dans la défense de la Terre sainte. On peut reconnaître aux rois de France qu’à partir de la fin de la décennie 1270 ils n’eurent guère le loisir de se consacrer entièrement à cette tâche.

8Les éléments conjoncturels jouent donc certainement leur rôle, mais ils ne fournissent probablement qu’une clé parmi d’autres. Qu’en est-il de l’attitude de la noblesse militaire à l’égard de la croisade ? Peut-on parler, à son propos, de « dégoût » pour la croisade ?

9Il faut d’abord tenter de prendre la mesure du phénomène, avant d’en chercher les explications. L’enquête n’est pas facile à mener : elle concerne un milieu qui n’a pas laissé beaucoup de témoignages ni même de traces quant à ses sentiments profonds. Un des risques principaux, par conséquent, est de prendre pour représentatifs des exemples en réalité isolés, et, dont, d’autre part, on trouverait peut-être dans les décennies antérieures des occurrences qui en annuleraient du coup la pertinence pour notre époque.

10Quand on parle de « dégoût » de la noblesse française à l’égard de la croisade, à la fin du xiiie siècle, un exemple jaillit immédiatement : celui de Joinville. Compagnon de Saint Louis durant la première croisade de celui-ci, Joinville fut naturellement invité à participer à la seconde expédition, celle qui devait se finir à Tunis. Même si on sent dans son récit beaucoup de mauvaise conscience, il est de fait que Joinville refusa tout net. Son témoignage est à bien des égards exceptionnel : en l’absence de sources comparables, il est difficile d’évaluer sa représentativité. Autant qu’on sache, l’armée qui débarqua à Tunis ne fut pas jugée moins nombreuse qu’elle aurait dû l’être ; aucune de nos sources n’attribue le relatif échec de l’expédition à l’éventuelle faiblesse de ses effectifs. Il n’en reste pas moins que Saint Louis n’emporta pas facilement la conviction de son entourage. La croisade d’Égypte avait causé la mort de bien des barons, de bien des chevaliers ; Joinville et nos autres sources ne cachent pas l’âpreté des combats, les tourments de la captivité, les affres de la maladie. La plupart des prisonniers faits après la débâcle de l’armée en avril 1250 furent tout simplement massacrés. Tout le baronnage français était représenté lors de la campagne d’Égypte ; quand ils survécurent, les croisés de 1250 durent livrer à leur retour des récits plutôt marquants des événements de l’expédition. Vingt ans après, le roi pouvait bien proposer une nouvelle expédition. L’accueil de la haute noblesse, même dans l’entourage immédiat du roi, semble avoir été pour le moins réservé. L’annonce de la nouvelle prise de croix de Saint Louis fut suivie d’un échec très net : seuls les fils du roi et son neveu préféré, Robert d’Artois, se croisèrent avec lui. Ce n’est que « par le procés du temps »6, alors qu’ils avaient initialement été surpris par « la noveleté de la chose »7, que les barons prirent la croix à leur tour. « Mout des barons ne preissent pas la croiz en ce present pallement, comme il estoient touz desprouveus de ce, et par ce que le roy l’avoit prise si nouvèlement sans faire en mencion a nul »8. L’enthousiasme de commande des hagiographes du roi doit donc être sérieusement tempéré. Il faut rappeler également que Saint Louis utilisa toutes les ressources du chantage moral pour convaincre. Il fit, en effet, des cérémonies de l’adoubement de son fils aîné le cadre de sa prise de croix : les chevaliers nouvellement adoubés étaient des croisés naturels. Pour ces derniers, il était d’autant plus difficile de se dérober que le roi avait fait sortir pour l’occasion de la Sainte-Chapelle la Couronne d’Épines, la relique la plus précieuse de la Chrétienté. C’est sans doute par le recours à de tels moyens que le recrutement de l’armée de la croisade de Tunis fut au total satisfaisant, mais rien ne dit que, parmi les milliers de croisés, beaucoup étaient sincèrement « enflammés par le zèle de la croix », comme le voulait la rhétorique pontificale (zelo devotionis accensi).

11Il s’avère donc difficile d’évaluer la représentativité de Joinville, qui dut hésiter avant de prendre sa décision, et qui n’est pas exempt de remords quand il la rapporte : certains devaient penser comme lui sans avoir le courage de déplaire au roi ; d’autres devaient juger cette attitude bien peu chrétienne. Il faut rappeler cependant que, par la suite, il n’y eut pas de nouveau départ massif : il n’y eut pas de nouvelle occasion, par conséquent, pour les croisés potentiels de refuser de partir, à l’exemple de Joinville en 1270.

12Mais, même dans la décennie qui suivit, alors que Philippe III poussait activement les préparatifs d’une nouvelle croisade, on trouve des indices d’une certaine réticence. Au début de l’année 1273, Robert, comte d’Artois, neveu de Saint Louis, demanda à Grégoire X s’il avait rempli son vœu en allant à Tunis. Le pape lui répondit que non9. Grégoire X est le pape qui a le plus viscéralement désiré le départ d’une croisade, au point de tout subordonner à cet objectif ultime10. Sans doute sincèrement, il crut utile de prendre cette décision, en fait très maladroite. Robert d’Artois, par exemple, s’était distinguée pendant la croisade de Tunis ; sa conduite héroïque pendant les principaux combats, dûment rapportée par les chroniqueurs, avait été récompensée lors du sacre de son cousin germain Philippe III, le 15 août 1271. Le nouveau roi, devant désigner pour porter l’épée de Charlemagne, Joyeuse, le baron le plus courageux, avait choisi Robert d’Artois, pourtant âgé de seulement vingt-deux ans11. En dépit des combats livrés pendant la guerre en Tunisie, les croisés de 1270 ne furent donc pas considérés comme délivrés de leur vœu. Cette décision, objectivement mal venue, procédait de la volonté de Grégoire X de promouvoir la croisade ; elle n’en était pas moins un camouflet à l’égard des compagnons de Saint Louis. Celui-ci, d’ailleurs, ne fut pas considéré comme martyr ; non parce qu’il mourut de maladie, mais parce que sa mort intervint au cours d’une expédition dont le cadre n’était pas la Terre sainte. C’était aussi une manière de réaffirmer l’autorité du Saint-Siège sur la croisade, dont Saint Louis s’était affranchi assez largement en partant en croisade alors que le Sacré collège peinait à élire un successeur à Clément IV.

13De notre point de vue, c’est la démarche du comte d’Artois qu’il faut retenir. Voici un héros de la croisade de Tunis qui demande s’il est délivré de son vœu : preuve, très certainement, qu’il n’était pas particulièrement désireux de repartir. Le pape, néanmoins, comptait sur lui : le Trésor des chartes d’Artois conserve une dizaine de lettres de Grégoire X où le comte et la comtesse d’Artois étaient systématiquement qualifiés de « croisés » (crucesignati), et dans lesquelles le pape leur concédait un certain nombre de privilèges liés à leur futur départ pour la Terre sainte12. Cette façon très volontariste de voir les choses et de forcer la main des croisés réticents n’était pas forcément la meilleure attitude à adopter : on n’est pas très loin du chantage moral exercé par Saint Louis lors de sa seconde prise de croix ; de fait, l’enthousiasme qui animait ce dernier ou Grégoire X ne paraît pas unanimement partagé. Dans le cas de Robert d’Artois, sa réticence est d’autant plus surprenante que c’était un homme extrêmement belliqueux : s’il ne partit pas pour la Terre sainte, il gagna le royaume angevin, à deux reprises, à chaque fois à l’appel de son oncle le roi de Sicile, Charles d’Anjou : en 1274-1275, pour quelques mois ; en 1282, pour neuf ans. Les combats qu’il livra dans cette deuxième période furent très durs : il fut alors, en effet, le principal chef de guerre de l’armée angevine. Son éventuel désintérêt pour la croisade ne provenait pas, du coup, d’un goût pour les plaisirs de la paix : Robert d’Artois, de retour en France en 1291, fut certainement un de ceux qui poussèrent Philippe le Bel à la guerre contre le roi d’Angleterre ; il fut en tout cas le chef de l’armée royale en Aquitaine, en 1296-1297, et en Flandre, en 1297 et en 1302 – c’est le héros malheureux de Courtrai. Quand il n’était pas en campagne, il hantait les tournois. Il est pour le moins curieux qu’un tel homme n’ait pas manifesté une plus grande implication dans les affaires de la croisade.

14La maladresse des autorités de l’Église pourrait être une explication à retenir, d’autant plus que la ligne de Grégoire X fut suivie par ses successeurs immédiats. En 1277, par exemple, sans doute sur l’ordre du Saint-Siège, le légat Simon de Brie entreprit de contraindre ceux des croisés de Tunis qui ne s’étaient pas ensuite rendus en Terre sainte à en prendre le chemin13. Les années 1274-1275, néanmoins, sont certainement celles durant lesquelles la perspective d’un nouveau départ en croisade fut la plus réaliste : Philippe III, alors, multiplia les preuves de bonne volonté. De façon significative, cependant, il reprit explicitement la croix – preuve que de son point de vue, l’expédition de Tunis valait accomplissement de son vœu. L’impression générale doit donc être nuancée : le volontarisme de Grégoire X, pour maladroit qu’il ait été, trouva un écho à la cour de France, même si on y prit soin de noter, par une nouvelle prise de croix, que l’expédition de Tunis avait bien été une authentique croisade.

15La réticence très perceptible du comte d’Artois à repartir pour la Terre sainte est-elle représentative ? On peut le penser, même si le dossier des lettres pontificales conservées à Arras paraît unique en son genre. Qu’un combattant d’élite comme Robert d’Artois, véritable héros de la chevalerie française dans le dernier tiers du xiiie siècle et dont on a tout lieu de penser qu’il partageait, même banalement, la piété des aristocrates de son temps, se soit senti peu disposé à repartir suggère qu’il n’était pas le seul dans ce cas. De fait, si, à la fin du xiiie siècle, on connaît des exemples de croisés très impliqués, comme Geoffroy de Sergines ou Olivier de Termes, leurs successeurs (Jean de Grailly, Othon de Grandson), qui payèrent tout autant de leur personne, semblent bien isolés. Surtout, ceux-ci ne se sentent plus entièrement voués à la défense de la Terre sainte : tant Grailly que Grandson, en effet, alternent les missions à Acre et les postes en Occident, au service du roi d’Angleterre Édouard Ier.

16Un autre cas doit être examiné avec attention, toujours dans l’entourage le plus proche de Philippe III14. Le 20 juin 1275, Pierre de La Broce, le tout-puissant favori du roi, obtint l’autorisation du légat Simon de Brie de racheter son vœu de croisade pour sept cent cinquante livres tournois15. Pierre avait pris part à la croisade de Tunis ; il reçut, au cours de l’expédition et lors du retour, beaucoup de dons du nouveau roi et des grands seigneurs. Pierre était riche ; il était puissant. Il dut obtenir facilement de racheter son vœu. C’était explicitement, notons-le bien, le vœu qu’il avait fait avant de partir pour Tunis : Pierre adhérait donc strictement à l’interprétation de Grégoire X, selon laquelle l’expédition de Tunis ne délivrait pas à elle seule du vœu de croisade. Le rachat de vœu fut un phénomène permanent de l’histoire de la croisade ; c’était du reste une des sources traditionnelles du financement de la croisade, dûment rappelée à chaque fois qu’il était question d’argent entre le pape et les princes temporels. Il est impossible de dire si les rachats de vœux se multiplièrent à la fin du xiiie siècle. Une enquête exhaustive serait très difficile puisque les archives des légats ne paraissent pas avoir été conservées et que du coup les documents sont par nature éparpillés, chaque « décroisé » conservant par devers lui la lettre de « décroisement ». Il faut des circonstances exceptionnelles pour qu’on conserve ce type de lettres : la chute de Pierre de La Broce entraîna la confiscation de son chartrier, versé dans le Trésor des chartes16.

17À vrai dire, il n’est pas du tout sûr que l’exemple de Pierre de La Broce soit représentatif. Quatre jours après que son favori avait obtenu d’être relevé de son vœu, Philippe III et les barons réunis à l’occasion du sacre, dans le cadre prédestiné de la Sainte-Chapelle, de la seconde femme du roi de France, Marie de Brabant, prirent solennellement la croix (24 juin 1275). Cette cérémonie semble avoir été l’apogée du mouvement qui devait conduire à une nouvelle croisade. On peut envisager que Pierre ne reprit pas la croix dont il venait de se débarrasser – éclairage intéressant, du reste, sur ses rapports avec le roi. La réticence de Pierre de La Broce confirme cependant celle de Robert d’Artois. La juxtaposition est d’autant plus éclairante que le comte d’Artois fut l’artisan de la chute du favori, quelques années plus tard. Les deux futurs adversaires se trouvaient donc d’accord pour ne pas manifester un enthousiasme débordant à l’idée d’un nouveau départ pour la croisade.

18En somme, et en forçant un peu le trait, les seuls qui, dans nos sources, se rendent effectivement en Terre sainte, sont encore ceux qui ont été condamnés à le faire. À certains égards et avec bien des différences, le séjour en Syrie semble un peu l’équivalent du bagne. Pour les nobles, le séjour outre-mer, pour une durée déterminée, était la punition infligée pour des crimes graves, généralement un homicide. Enguerrand, sire de Coucy, fut condamné pour la pendaison des trois garçons nobles qui avaient chassé, sans le savoir, sur ses terres, à dix mille livres d’amende et à partir en Terre sainte pour trois ans à ses propres frais17. Les Olim, recueil d’une partie des décisions du Parlement pour la fin du xiiie siècle, donnent plusieurs exemples comparables. En 1268, Saint Louis condamna André de Renty, coupable du meurtre de Guillaume de Selingehem à demander publiquement pardon à messire Alnard, père de la victime, à donner quarante livrées de rente en terre à la veuve et à ses enfants, et à demeurer cinq ans en Terre sainte18. En 1279, un accord intervint devant la cour du roi entre les amis de Perronnelle et Guillaume Clinet, accusé d’avoir tué Jean, fils de ladite Perronnelle ; Guillaume passera quatre années en Terre sainte19. Un cordonnier avait été condamné à passer dix ans en Terre sainte pour un homicide involontaire ; Saint Louis, « pour jalousie de greigneur justise », ajouta trois ans à la peine20. Ceux qui volaient de la vaisselle appartenant au roi étaient aussi envoyés outre-mer21. Joinville rapporte que Saint Louis retint à ses gages, pour le suivre outre-mer, un clerc qui avait tué trois sergents du Châtelet qui détroussaient les passants22. Les crimes moins graves pouvaient être rachetés par un temps de service en « Pouille », c'est-à-dire dans le royaume angevin23. Ceux qui s’étaient opposés à l’autorité royale devaient se rendre en Terre sainte : en 1291, le comte de Foix, après s’être rebellé contre le roi, dut promettre d’aller servir pendant deux ans en Terre sainte, avec dix chevaliers armés, et ce avant l’été 129224. Après la chute d’Acre, c’est Chypre qui se substitua à la Terre sainte25. Après sa révolte, Henri, comte de Bar, s’engagea à se rendre dans l’île pour expier ses torts envers Philippe le Bel ; finalement, le roi l’autorisa à suivre Charles de Valois dans son expédition italienne de 130126 ; avant d’être finalement exécuté, Enguerrand de Marigny fut d’abord, semble-t-il, condamné à servir à Rhodes ou en Chypre27.

19On peut s’interroger sur la réalité de ces condamnations : beaucoup des hauts personnages cités ci-dessus n’effectuèrent pas le séjour auquel ils étaient tenus. Pour les autres, de moindre parage, il est le plus souvent difficile de répondre, faute d’éléments. Mais il arrivait que les autorités de Terre sainte délivrent des certificats attestant que tel ou tel avait bien accompli le service dû28 et on relève, ici et là, la mention d’individus envoyés en Terre sainte le temps que se fasse l’oubli ou le pardon29.

20Le séjour en Terre sainte était donc assimilé à une punition plus encore qu’à une expiation. L’impression que l’opinion en retirait devait être désastreuse. Pourquoi partir en Terre sainte si on n’avait pas tué quelqu’un ? Il était du coup assez difficile de trouver de bons combattants pour la Terre sainte, même en échange d’une solde. Au début de son pontificat (1271-1276), Grégoire X avait chargé Thomas, patriarche de Jérusalem, de recruter des soudoyers en vue d’une expédition outre-mer. Mais il revint aux oreilles du pape que le patriarche avait recruté de bien piètres combattants : « Il ne manque pas, en effet, ceux qui murmurent, qui dénigrent, qui calomnient tes actions, en affirmant que, vaincu par les prières de certains ou circonvenu par leurs tromperies, tu as reçu des hommes qui ne conviennent pas, et même, en outre, beaucoup d’inutiles et d’indignes ». Le reste de la lettre se poursuivait sur le même ton30. Il faudrait croire, alors, que les défenseurs de la Terre sainte étaient soit des criminels purgeant leur peine, soit des repris de justice servant pour l’argent de leur solde : en somme, peu de croisés dans le vrai sens du terme.

21Au total, de façon certes quelque peu impressionniste, on arrive à l’idée que la croisade n’était plus la préoccupation principale de la noblesse française. Une des manifestations les plus frappantes de ce désintérêt est l’absence d’expédition conduite par un grand baron entre 1265 et 1291. En 1265, Eudes, comte de Nevers, fils aîné du duc de Bourgogne Hugues IV, conduisit une petite expédition en Syrie ; il y trouva d’ailleurs la mort31. Le contingent qu’il conduisait ne comptait qu’une cinquantaine de chevaliers, ce qui peut paraître peu. Il faut rappeler cependant que les ordres militaires ne disposaient que de quelques centaines de chevaliers, et que les effectifs du contingent entretenu par le roi de France, une des principales forces de manœuvre des chrétiens en Terre sainte, devaient tourner autour d’une centaine de chevaliers. Par la suite, on ne voit guère d’expédition similaire à celle du comte de Nevers, l’effort d’un grand baron pour venir en aide à la Terre sainte. Pourquoi n’y eut-il donc pas de nouvelle « croisade des barons », pour reprendre le nom à l’expédition de 1239 ?

22Au fond, c’est peut-être la véritable question à laquelle il s’agit de répondre. La cour de France ne manquait pas de grands seigneurs, à commencer par les frères du roi, ses cousins, les hauts barons qu’étaient les ducs de Bourgogne et de Bretagne, les comtes de Flandre et de Blois. Pourquoi le belliqueux comte d’Artois n’a-t-il pas conduit une telle expédition ? Pourquoi tous ces puissants barons se sont-ils contentés d’en prévoir la possibilité ou l’obligation pour leurs héritiers dans leurs testaments ? Trois raisons semblent devoir être mises en avant.

23La première est que la croisade coûtait très cher ; surtout, peut-être, elle ne paraît plus à la portée des barons de la fin du xiiie siècle, alors même qu’elle était envisageable par leurs prédécesseurs. De fait, pour ne prendre que cet exemple, le comte d’Artois est sans cesse à court d’argent ; en 1274, alors qu’il n’a que vingt-quatre ans, il doit déjà cinquante-cinq mille livres tournois à divers créanciers – un ordre d’idées : le revenu annuel de la monarchie capétienne tourne autour de quatre cent cinquante-cinq mille livres ; le produit d’une année de décime était de deux cent cinquante mille livres environ. Un peu au-delà du terme de notre étude, quand, en 1307-1309, Charles de Valois envisage la reconquête de l’empire latin de Constantinople dont il a acquis la couronne, il doit être subventionné par son frère Philippe le Bel32. Au début du xiiie siècle, la Quatrième croisade, puis, en 1239, celle des barons, avaient été conduites par des princes français : à la fin du siècle, leurs successeurs semblent bien incapables de les imiter.

24En lien étroit, évidemment, avec ce qui précède, la seconde raison tient au rapport de forces au sein de la société politique française. La fin du xiiie siècle marque en effet un sommet du pouvoir du roi dans son royaume, particulièrement dans ses rapports avec les barons, grands et moins grands. Tous sont dans la main du roi. Tous, par exemple, le servent dans ses armées. Tous l’entourent de leurs conseils. Il faudra toute l’agressivité de Philippe le Bel pour mettre au rang de ses adversaires le comte de Flandre, Gui de Dampierre, puis le duc d’Aquitaine, roi d’Angleterre, tous deux en bons termes avec ses prédécesseurs, Saint Louis et Philippe III.

25Au fond, néanmoins, l’évolution du rapport de forces et l’abaissement des barons ne suffisent pas à expliquer leur manque d’initiative en faveur de la Terre sainte. La véritable raison est que, depuis Saint Louis, on peut parler d’une véritable « étatisation » de la croisade. Les deux expéditions conduites par Saint Louis (1248-1250 et 1270) ont été placées sous son contrôle étroit. C’est Saint Louis qui s’occupait de la mise à disposition des bateaux ; c’est lui qui payait les combattants, faisait rassembler le ravitaillement, décidait de la destination de l’expédition – qu’on pense au choix de Tunis. C’était lui enfin le chef incontesté de l’armée : il y faisait régner la discipline ; il en prenait sur lui la destinée, en 1250, quand l’armée capitula, en 1270, quand, sur le point de mourir, il la remit à Dieu. Dans une très large mesure, les armées réunies en 1248, en 1270 ainsi qu’en 1285, pour la croisade d’Aragon, n’étaient que des armées royales, qui ne différaient pas radicalement des armées levées, dans d’autres circonstances, par Saint Louis ou Philippe III.

26C’est là, probablement, qu’il faut chercher la raison fondamentale du désintérêt de la noblesse française pour la croisade. À la fin du xiiie siècle, barons et chevaliers du royaume de France n’étaient plus, sans doute, très enthousiastes. Mais surtout, ils attendaient que l’initiative vienne du roi dont c’était devenu une des prérogatives et qui, seul désormais, en avait les moyens matériels. De fait, Philippe III essaya certainement de préparer une nouvelle expédition ; tout aussi certainement, Philippe le Bel s’en détourna assez rapidement, même s’il maintint opérationnel le contingent français en Syrie jusqu’à la chute d’Acre, en 1291. Ni l’un ni l’autre, cependant, ne laissèrent à tel ou tel baron la responsabilité de conduire à leur place une expédition en Terre sainte ; jamais ils ne déléguèrent un de leurs proches pour diriger en Syrie les opérations, fût-ce en leur nom. Ils gardèrent toujours en leurs mains ce qui était devenu à leurs yeux un élément essentiel de leur fonction. À cet égard, les modalités de recrutement des armées croisées en 1248 et 1270 – de simples armées royales, en réalité – jouèrent certainement un très grand rôle : quand on servait outre-mer, désormais, on servait le roi autant que le Christ. Quand Joinville refusait de partir, c’est à son ami le roi qu’il refusait.

27Les deux successeurs de Saint Louis furent servis en cela par leurs capacités financières, qui les plaçait désormais bien au-dessus du plus riche des princes du royaume, et qui les identifiait comme les souverains le plus puissants de la Chrétienté occidentale. De ce point de vue, le règne de Philippe III, apparaît comme une époque de grande aisance financière, rendue encore plus sensible par l’octroi par le Saint-Siège des décimes, le roi consentant le cas échéant à abandonner à chaque prince le produit de la décime levée sur ses terres.

28Cette « étatisation » de la croisade a été encore renforcée par le souvenir de Saint Louis, considéré comme un saint avant même sa canonisation en 1297, par la possession de la Couronne d’Épines et par la place, depuis toujours prépondérante, de l’élément français dans les croisades : tous ces éléments convergeaient pour renforcer ce monopole acquis par le roi de France sur la croisade, au détriment de ses barons, mais aussi des autres souverains chrétiens.

29C’est donc avant tout parce qu’elle était tombée sous la responsabilité exclusive du roi que la croisade n’intéressait plus directement les barons. Certains d’entre eux, à l’image du duc de Bourgogne ou du comte de Brienne, n’hésitaient pas, d’ailleurs, à envisager de lointaines expéditions pour faire triompher les droits plus ou moins imaginaires qu’ils se croyaient sur les royaumes de Chypre ou de Thessalonique. Certains, même, partirent ; le comte d’Artois lui-même passa neuf ans à guerroyer en Italie du sud. Mais aucun ne prit l’initiative de prendre la tête d’une croisade. On peut penser néanmoins que, comme en 1270, ils auraient suivi volontiers le roi si celui-ci avait pris la tête d’une expédition. Somme toute, nombreux furent les barons qui suivirent Charles d’Anjou en Italie en 1265, Saint Louis en 1270, Philippe III en 1285. La docilité avec laquelle la noblesse française servait les desseins militaires de la monarchie capétienne illustre le degré de puissance inédit atteint par celle-ci à la fin du xiiie siècle. Il y a là un « moment »33. À tout prendre, la résurgence de desseins individuels sous les tout derniers Capétiens directs ne serait-elle pas un indice de la moindre puissance relative du roi dans son royaume ? Ce déclin du rayonnement du roi serait en fait sensible dès la sanglante défaite de Courtrai (1302), après les ligues (1314-1315), au fil des règnes courts et décevants des fils de Philippe le Bel. Assez significativement, les chimères impériales de Charles de Valois datent justement de la seconde moitié du règne de Philippe le Bel, de même que les projets de croisade qui fleurissent alors, à l’instigation des ordres militaires ou de polémistes comme Pierre Dubois34.

30Y eut-il vraiment dégoût à l’égard de la croisade, de la part de la noblesse française, dans le dernier tiers du xiiie siècle ? Ce n’est pas si sûr. Certes, l’enthousiasme devait désormais être suscité, habilement ou tortueusement ; un départ outre-mer n’allait plus de soi. Mais n’est-il pas préférable d’estimer que c’est l’« étatisation » de la croisade, le monopole acquis sur son organisation par la royauté française – une sorte d’appropriation – qui explique le curieux manque d’implication pour le sort de la Terre sainte ? En définitive, c’est parce que, du fait de la dégradation de la situation internationale, largement imputable aux menées du roi d’Aragon Pierre III, les deux successeurs de Saint Louis n’ont pas eu l’opportunité, pour Philippe III, ou la volonté, pour Philippe IV, de relancer effectivement une croisade, que la chute des établissements francs de Terre sainte est devenue inéluctable.

Notes de bas de page

1 Cette étude concerne essentiellement les règnes de Saint Louis, Philippe III et Philippe le Bel ; Jean Richard, Saint Louis, roi d’une France féodale, soutien de la Terre Sainte, Paris, Fayard, 1983 ; Jacques Le Goff, Saint Louis, Paris, Gallimard, 1994 (Bibliothèque des Histoires) ; Charles-Victor Langlois, Le règne de Philippe III le Hardi, Paris, 1887 ; Jean Favier, Philippe le Bel, Paris, Fayard, 1978 ; Joseph R. Strayer, The reign of Philippe the Fair, Princeton, 1980 ; Ch.-V. Langlois, Saint Louis, Philippe le Bel et les derniers Capétiens directs, Paris, 1911 (Histoire de France sous la direction d’Ernest Lavisse) ; Robert Fawtier, Histoire du Moyen Âge, t. VI, « L’Europe occidentale de 1270 à 1380, 1ère partie (1270 à 1328) », Paris, 1940 (Histoire générale dirigée par Gustave Glotz).

2 Xavier Hélary, « Les rois de France et la Terre sainte de la croisade de Tunis à la chute d’Acre (1270-1291) », Annuaire-Bulletin de la Société de l’histoire de France. Année 2005 (2007), pp. 21–104.

3 Sur les croisades de Tunis et d’Aragon, je me permets de renvoyer à ma thèse : L’Ost de France. La guerre, les armées, la société politique au royaume de France (fin du règne de Saint Louis-fin du règne de Philippe le Bel), Université de Paris IV-Sorbonne (dir. Jacques Verger), chapitres 1 et 4.

4 Voyez, à titre d’exemple, la charte de Jean d’Évry, chevalier, avant son départ pour la croisade avec Saint Louis, tirée du cartulaire de Saint-Maur-des-Fossés dit le Livre Noir, Arch. nat., LL 46, fol. 91v.

5 Jean Joinville, Vie de Saint Louis, éd. de J. Monfrin, Paris, 1995, § 122.

6 Primat, Recueil des historiens de la Gaule et de la France [désormais RHGF], t. xxiii, p. 39.

7 Guillaume de Nangis, RHGF, t. xx, p. 441 (version latine, p. 440, « utpote tanta novitate perculsi »).

8 Primat, RHGF, t. xxiii, p. 39 ; cf. dans le même esprit, Guillaume de Nangis, ibid, t. xx, pp. 440 et 441 ; au contraire, Geoffroy de Beaulieu, ibid, t. xx, p. 21.

9 Arch. dép. Pas-de-Calais, A 21, no 22.

10 Ludovico Gatto, Il pontificato di Gregorio X, 1271-1276, Rome, 1959 ; Pierre-Vincent Claverie, « Un aspect méconnu du pontificat de Grégoire X : les débuts de sa politique orientale (1271-1273) », Hommage à la mémoire de Jules Labarbe. Byzantion, t. 68/2 (1998), pp. 281–310 ; X. Hélary, « Les rois de France… ».

11 Grandes chroniques de France, éd. de J. Viard, Paris, t. viii, 1934, p. 39.

12 J’ai étudié le dossier des lettres pontificales reçues par Robert II d’Artois dans une communication présentée à Arras, lors de la journée d’étude organisée par Alain Provost à l’université d’Artois, le 28 septembre 2007, sur « les comtes d’Artois et leur Trésor des chartes », à paraître.

13 Ces efforts ne sont connus que par une supplique, en date du 1er mai 1277, adressée par Édouard Ier au pape Jean XXI, pour que ce dernier dispensât Èble, vicomte de Ventadour, de suivre le prochain passage général ; Èble s’était en effet engagé à suivre Édouard quand celui-ci partirait ; la supplique est publiée dans Foedera, conventiones, litterae et cujuscunque generis acta publica, éd. de Th. Rymer, t. ii, Londres, 1705, p. 82 ; cf. Ch.-V. Langlois, Le Règne de Philippe III…, p. 109.

14 Sur Pierre de La Broce, Ch.-V. Langlois, Le règne de Philippe III…, pp. 13–30 ; William Chester Jordan, « The Struggle for Influence at the Court of Philip III : Pierre de La Broce and the French Aristocracy », French Historical Studies, 24 (2001), pp. 439–468 et X. Hélary, « Pierre de La Broce, seigneur féodal, et le service militaire sous Philippe III. L’ost de Sauveterre (1276) », Journal des savants (juillet-décembre 2006), pp. 275–305.

15 Arch. nat., J 730, no 222.

16 Le chartrier occupe aujourd’hui les cartons J 726-730 des Archives nationales.

17 Grandes chroniques de France, éd. de J. Viard, Paris, t. vii, 1932, p. 192 ; la Vie de Saint Louis par Guillaume de Saint-Pathus, confesseur de la reine Marguerite, éd. de H.-Fr. Delaborde, Paris, 1899 (Collection de textes pour servir à l’étude et à l’enseignement de l’histoire), p. 138, dit douze mille livres parisis, « la quele somme d’argent il [le roi] envoia en Acre pour despendre en l’ayde de la Sainte Terre ».

18 Actes du Parlement de Paris, éd. d’Edgar Boutaric, 1ère série, « De l’an 1254 à l’an 1328 », 2 vol., Paris, 1863-1867, [désormais Actes du Parlement], no 1233.

19 Actes du Parlement, no 2222 C ; Arch. nat., K 34, no 21 ter ; voyez également un arrêt de 1282 (Actes du Parlement, no 2443), ordonnant la séquestre entre les mains du roi d’une somme de six cents livres, donnée à l’évêque de Clermont par Gérard de Neuville, chevalier, qui, arrêté comme accusé du meurtre de sa femme, avait été mis en liberté par cet évêque moyennant cette somme, et à condition de faire un pèlerinage outre-mer.

20 Vie de saint Louis par Guillaume de Saint-Pathus…, p. 147.

21 Ibid., p. 151 : « Aucune foiz forfesoit l’en en sa court d’escueles d’argent ou d’autres chose de tele maniere, et donques li benoiez rois le soufroit debonerement et donnoit as larrons aucune somme d’argent et les enveoit outre mer ; et ce fist il de pluseurs ».

22 Jean Joinville, Vie de Saint Louis…, § 115 et suiv.

23 Voyez par exemple les Actes du Parlement, n1253, l’arrêt condamnant à trois cents livres d’amende trois écuyers, qui avaient, malgré le sauf-conduit du roi, enlevé de nuit et maltraité Jean Trossebois, chevalier ; les coupables iront en outre servir une année en Pouille avec le roi de Sicile ; l’année suivante, le roi réduisit l’amende à cent cinquante livres (Pentecôte 1268).

24 Claude Devic et Joseph Vaissète, Histoire générale du Languedoc, 2e éd. par Auguste Molinier, Toulouse, t. ix, 1880, p. 149.

25 Voyez par exemple, pour un crime de droit commun, Actes du Parlement, no 4289 (16 avril 1314), l’arrêt condamnant Hugues de la Houssaye, chevalier, pour avoir maltraité un homme levant et couchant en la justice de l’abbé de Corbie, à une compensation et à se rendre en Chypre, où il attendra la prochaine expédition pour se rendre en Terre sainte.

26 Joseph Petit, Charles de Valois, Paris, 1900, p. 58 ; mort en revenant de Sicile, le comte de Bar fut enterré à Naples.

27 J. Petit, Charles de Valois…, p. 152 ; J. Favier, Un conseiller de Philippe le Bel : Enguerran de Marigny, Paris, Presses Universitaires de France, 1963 (Mémoires et documents publiés par la Société de l’École des chartes, xvi), p. 212.

28 Voyez p.ex. l’analyse de Dupuy d’une pièce en déficit du Trésor des chartes, en date du 31 août 1263 : « Certifficat de l’evesque de Bethleem, que Guigo Aucardus a servy deux ans durant aux guerres de la Terre sainte. Pridie kal. septembris, 1263 » (Arch. nat., J 734, no 7 ; Layettes, no 4865).

29 Voyez, par exemple, la notification, le 7 décembre 1275, par Miles de Nangis, sous-bailli d’Arras, du rappel par Hugues de Caucourt, à la demande du comte d’Artois, de Pierre Corbel, « liquels est outre mer et devoit estre dusques au rappel celui Huon parmi le pais ki fu faite entre lui et Huon de la mort Jehan Boilart » (Arch. dép. du Pas-de-Calais, A 23, no 11).

30 « Non enim desunt qui murmurent, qui detrahant, non qui calumpnientur actus tuos, asserentes quod inhabiles, immo multos prorsus inutiles et viles, aliquorum, ut creditur, devictus precibus vel circumventus fallaciis, in stipendiarios recepisti » (Jean Guiraud, Registres de Grégoire X, no 797, s.d.).

31 « Inventaire et comptes de la succession d’Eudes, comte de Nevers (Acre, 1266) », éd. M. Chazaud, Mémoires de la Société nationale des Antiquaires de France, 4e sér., ii (1871), pp. 164–206.

32 J. Petit, Charles de Valois…, pp. 125–126.

33 X. Hélary, « Servir ? La noblesse française face aux sollicitations militaires du roi (fin du règne de Saint Louis-fin du règne de Philippe le Bel) », Cahiers de Recherches Médiévales, 13 (2006), pp. 21–40.

34 Voyez par exemple, au milieu d’une bibliographie imposante, Robert Mantran, « Sur quelques propagandistes de la croisade au début du xive siècle », Histoire et société. Mélanges offerts à Georges Duby, Aix-en-Provence, t. 3, 1992, pp. 77–85 ; Alan J. Forey, « The Military Orders in the Crusading Proposals of the Late-Thirteenth and Early-Fourteenth Centuries », Traditio, 36 (1980), pp. 317–346 ; Jacques Paviot, « Comment reconquérir la Terre sainte et vaincre les Sarrasins ? », et Alain Demurger, « Les ordres militaires et la croisade au début du xive siècle : quelques remarques sur les traités de croisade de Jacques de Molay et de Foulques de Villaret », dans M. Balard, B. Z. Kedar, J. Riley-Smith (éd.), Dei Gesta per Francos. Études sur les croisades dédiées à Jean Richard, Aldershot, 2001, pp. 79–85 et 117–128 ; sur Pierre Dubois, Ch.-V. Langlois, De Recuperatione Terre sancte, Paris, 1891 (Collection de textes pour servir à l’étude et à l’enseignement de l’histoire) et la traduction anglaise, The Recovery of the Holy Land, translated with an introduction and notes by Walther I. Brandt, Columbia University Press, New York, 1956 (Records of civilization, sources and studies edited under the auspices of the department of history, Columbia University).

Précédent Suivant

Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.